TITRE II :
SÉCURITÉ DES ÉPARGNANTS ET DES
ASSURÉS
CHAPITRE PREMIER :
RÉFORME DU DÉMARCHAGE EN
MATIÈRE BANCAIRE ET FINANCIÈRE
ARTICLE 39
Nouveau régime du démarchage bancaire et
financier
Commentaire : le présent article a pour objet
d'instaurer un nouveau régime global du démarchage bancaire ou
financier. Il définit le démarchage et indique les personnes
habilitées à y procéder, les produits interdits, les
règles de bonne conduite et les sanctions disciplinaires applicables.
I. LE DROIT EXISTANT
A. UN DISPOSITIF ANCIEN, COMPLEXE ET PEU LISIBLE
1. Une accumulation de textes anciens et relativement
hétérogènes
Le démarchage bancaire et financier est aujourd'hui essentiellement
régi par les dispositions du titre IV du livre III du code
monétaire et financier, relatives au démarchage et au colportage.
D'autres dispositions, issues du droit de la consommation (articles L. 121-21
à L. 121-33 du code de la consommation relatifs au démarchage de
biens et services, articles L. 122-8 à L. 122-11 du code de la
consommation sur le délit d'abus de faiblesse
545(
*
)
) et de la réglementation sur
la présentation des produits d'assurance, ont une incidence indirecte ou
mineure sur le démarchage bancaire et financier et ne sont pas
modifiées par le présent article.
Les dispositions du code monétaire et financier que le présent
article propose de réécrire sont structurées en trois
parties :
- les articles L. 341-1 à L. 341-6 traitent du démarchage
concernant les opérations de banque et sont notamment issus de la
loi
du 28 décembre 1966
relative à l'usure, aux prêts
d'argent et à certaines opérations de démarchage et de
publicité ;
- les articles L. 342-1 à L. 342-21 traitent du démarchage
concernant les valeurs mobilières et sont issus de la
loi du 3
janvier 1972
relative au démarchage financier et à des
opérations de placement et d'assurance ;
- les articles L. 343-1 à L. 343-6 traitent du démarchage
concernant les opérations sur le marché à terme et
émanent de la loi du 28 mars 1885 sur les marchés à terme,
modifiée par la loi du 31 décembre 1987 relative au marché
à terme.
Le dispositif juridique actuel, à la fois
complexe et
segmenté
, est le résultat d'une accumulation peu
cohérente de textes souvent anciens, qui laisse perdurer des interstices
de vide juridique et nuit à la compréhension des règles
applicables et donc à la protection du démarché. Il est
jugé peu adapté aux situations et instruments financiers actuels
puisque, ainsi que le rappelle M. Emmanuel Rodocanachi
546(
*
)
, cette législation
«
n'a pas bénéficié de l'effort de
rationalisation des activités financières entrepris aux niveaux
européen et national, au cours des dernières
années
», et s'applique donc en marge des deux grandes
lois à portée générale qui régissent
aujourd'hui les opérations de crédit et les services financiers
(la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à
l'activité et au contrôle des établissements de
crédit et la loi n° 96-597 du 2 juillet 1996, dite loi
de modernisation des activités financières).
De même, le démarchage n'est pas considéré par la
réglementation communautaire, et en particulier par la directive sur les
services d'investissement du 10 mai 1993, comme un service d'investissement ni
comme un service connexe. Les activités de démarchage ne
bénéficient donc pas du « passeport
européen »
547(
*
)
y afférent.
Votre rapporteur avait déposé dès 1995 une proposition
de loi dont l'objet était notamment de réformer le régime
du démarchage financier
548(
*
)
, mais les gouvernements
successifs n'avaient pas, jusqu'ici, considéré le sujet comme
réellement important et urgent.
2. Plusieurs définitions toutefois fondées sur des
critères communs
Le dispositif actuel donne trois définitions du démarchage pour
des opérations déterminées, qui ne se
révèlent pas strictement identiques :
Article L. 341-2 (loi du 28 décembre 1966) |
Article L. 342-2 (loi du 3 janvier 1972) |
Article L. 343-1 (loi du 28 mars 1885) |
Opérations de banque (prêts, rentes viagères, biens divers, SCPI) |
Valeurs mobilières |
Marchés à terme |
« Se livre au démarchage au sens du
présent article celui qui, à l'une des fins visées
à l'alinéa premier, se rend habituellement soit au domicile ou
à la résidence des personnes, soit sur leurs lieux de travail,
soit dans des lieux ouverts au public et non réservés à de
telles fins. »
|
« Constitue une activité de
démarchage le
fait de se rendre habituellement au domicile ou à la résidence
des personnes, ou sur leurs lieux de travail, ou dans des lieux publics, en vue
de conseiller la souscription, l'achat, l'échange ou la vente de valeurs
mobilières ou une participation à des opérations sur ces
valeurs. »
|
« Constitue une activité de
démarchage au
sens du présent chapitre, le fait de se rendre habituellement, soit au
domicile ou à la résidence des personnes, soit sur leurs lieux de
travail,
soit dans les lieux ouverts au public et non réservés
à de telles fins
, en vue de conseiller une participation à
des opérations sur ce marché ou de recueillir des ordres à
cet effet, quel que soit le lieu où les ordres d'opérations ou le
contrat liant le donneur d'ordre à celui qui les a recueillis ou
exécutés ont été passés ou
conclus. »
|
Source : rapport Rodocanachi
Certains
critères transversaux permettent néanmoins de dégager un
faisceau d'indices communs :
- le critère de
lieu
est quasiment identique entre les trois
articles :
le démarchage consiste à se rendre
habituellement au domicile ou à la résidence des personnes, sur
leurs lieux de travail, ou dans des lieux publics
(non
réservés à de telles fins, s'agissant du démarchage
portant sur les opérations de banque ou les marchés à
terme) ;
- la
personne
qui faut l'objet du démarchage (critère
découlant de celui du lieu) : il s'agit exclusivement d'une
personne
physique
;
- la
fréquence
: le démarchage suppose que cette
activité soit
habituelle
. La jurisprudence considère que
cette condition est remplie dès deux démarches, donc dans la
grande majorité des cas ;
- les
moyens
: déplacement physique, envoi de lettres ou
circulaires ou communication téléphonique. Le champ du
démarchage sur les instruments à terme inclut toutefois les
technologies plus récentes et en particulier internet, puisqu'il couvre
«
l'envoi de tout document d'information ou de publicité,
ou par tout moyen de communication » ;
-
l'action
: le démarchage est une méthode de vente
active, voire agressive, puisque le client va à la rencontre de son
client potentiel. Le démarchage est ainsi
distinct du conseil
,
qui résulte d'une initiative du client.
Le
colportage
, qui est une forme prohibée de démarchage,
fait l'objet d'une disposition spécifique pour les valeurs
mobilières. L'article L. 342-1 pose une interdiction et définit
le colporteur comme
« celui qui se rend au domicile ou à la
résidence des personnes ou sur leurs lieux de travail ou dans des lieux
publics pour offrir ou acquérir des valeurs mobilières avec
livraison immédiate des titres et paiement immédiat total ou
partiel sous quelque forme que ce soit »
.
3. Des intervenants multiples et soumis à habilitation
Le principe fondamental de la législation actuelle est que
toute
personne physique exerçant l'activité de démarchage doit
être titulaire d'une carte d'emploi
549(
*
)
, valable pour un an
550(
*
)
. Cette carte est
délivrée par une personne ou un établissement
habilité par le législateur, et la procédure est
placée sous le contrôle du juge civil. L'identité,
l'adresse et l'état civil des démarcheurs doivent être
déposés au parquet du procureur de la
République
551(
*
)
.
Pour l'octroi de telles cartes, les trois lois précitées
habilitent des organismes différents selon les produits
démarchés, et dont les principaux sont les établissements
de crédit et les entreprises d'investissement :
Loi du 28 décembre 1966 (opérations de banque) |
Loi du 3 janvier 1972 (valeurs mobilières) |
Loi du 28 mars 1885 (marchés à terme) |
Etablissements de crédit
|
Etablissements de crédit
|
Prestataires de services d'investissement et personnes morales visées à l'article 44 de la loi du 2 juillet 1996 sur la modernisation des activités financières |
Source : rapport Rodocanachi
On est ainsi amené à distinguer trois niveaux d'acteurs, résumés dans le tableau suivant :
Situation juridique actuelle du démarchage
financier
(régime principal : loi du 3 janvier 1972, combiné avec les
lois de 1966 et de 1885)
Etablissements de crédit, entreprises d'investissement, entreprises
d'assurance
NIVEAU
1
- Etablissements
habilités à recourir au
Les salariés doivent avoir une carte s'ils font du démarchage à partir de l'établissement ou à l'extérieur de celui-ci
démarchage
Personnes morales (dont au moins 2/3 du capital appartient aux personnes morales ou physique du niveau 1)
•
• • • • • • • • • • •
• • • • • • • • • • •
• • • • • • • • • • •
• • • • • • • • • • •
• • • • • • • • • • •
• • • • • • • NIVEAU 2
NIVEAU 3
Démarcheurs exclusifs sous mandat
Démarcheurs multicartes, disposant de plusieurs mandats (1)
Démarcheur
(1) Un
établissement habilité (niveau 1) peut confier à une de
ses filiales ou un établissement qu'il contrôle, le soin de
procéder pour son compte aux opérations de démarchage.
Quoique entièrement placé sous le contrôle du niveau 2, le
démarcheur a l'obligation d'avoir une carte d'emploi
(délivrée par le niveau 1).
Le démarcheur multicartes a, au plus, une carte de démarcheur
pour les valeurs mobilières (loi de 1972), une carte pour les produits
à terme (loi de 1885, modifiée par la loi de 1987), plusieurs
cartes pour les prêts d'argent, recueil de fond parts de FCPI (loi de
1966), plusieurs cartes pour les produits d'assurances.
Source : rapport Rodocanachi
Le
premier niveau
est constitué des établissements
habilités et donc susceptibles de recourir directement au
démarchage, notamment par l'entremise de leurs salariés. Le
deuxième niveau
est constitué des démarcheurs
personnes morales, qui représentent toutefois un cas très
spécifique
552(
*
)
. Le
troisième niveau
est enfin constitué des personnes
physiques, qui sont soit mandataires exclusifs lorsqu'ils ne vendent les
produits que d'un seul mandant (ce qui est nécessairement le cas pour
les valeurs mobilières, aux termes de l'article L. 342-9), soit
« multicartes », dans la mesure où le
démarcheur peut détenir au plus : plusieurs cartes pour les
prêts d'argent et les produits d'assurance, et une seule carte pour les
valeurs mobilières et les produits à terme.
Le démarchage financier repose également sur
l'établissement d'un
lien de responsabilité directe ou
indirecte
entre le démarcheur et l'établissement
habilité qui lui attribue la carte. Ce lien est ainsi exposé dans
l'article L. 342-10 du code monétaire et financier, qui dispose que
«
les personnes et établissements (...) sont civilement
responsables du fait des démarcheurs, agissant en cette qualité,
auxquels ils ont délivré une carte d'emploi. Nonobstant toute
convention contraire, ces démarcheurs sont considérés
comme leurs préposés au sens de l'article 1384 du code
civil
».
4. Des conditions d'exercice peu contraignantes
Les conditions présidant à l'exercice du démarchage
financier sont de trois ordres
553(
*
)
: honorabilité, âge
et nationalité, et qualification professionnelle.
Les conditions d'
honorabilité
sont restreintes puisque il est
uniquement requis que le démarcheur n'ait pas fait l'objet d'une
interdiction d'exercice du métier de banquier. Le délai d'un mois
prévu entre l'inscription au parquet et la délivrance de la carte
doit permettre à l'autorité judiciaire de procéder
à la vérification du casier de l'intéressé.
Le dispositif actuel prévoit en outre que le démarcheur doit
être
majeur
, et avoir la nationalité française ou
être ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, sous
réserve des conventions internationales.
La principale lacune de la législation vient de ce qu'
aucune
qualification professionnelle ou de compétence n'est exigée,
alors que les courtiers et agents généraux d'assurance sont,
aux termes de l'article R. 513-1 du code des assurances, soumis à des
conditions précises de diplôme ou d'expérience
professionnelle significative.
5. Une protection de l'épargnant mal assurée
La protection de l'épargnant, qui est présumé
incompétent sur les produits qui lui sont proposés, relève
de trois types de dispositions : celles afférentes aux
caractéristiques des produits et à l'information dont ils font
l'objet, celles relatives à l'existence d'un délai de
réflexion et de rétractation et celles applicables aux sanctions
encourues par les démarcheurs.
Un certain nombre de produits sont
interdits de démarchage
,
dès lors qu'ils font courir un risque trop important au particulier.
L'ensemble de ces interdictions résultent de dispositions de niveau
normatif différent (loi, décret et instruction de la Commission
des opérations de bourse - COB). Les principaux produits prohibés
sont néanmoins exposés dans l'article L. 342-5 du code
monétaire et financier : opérations à terme non
fixé préalablement ; valeurs mobilières non
autorisées à la vente en France ; valeurs émises par
des sociétés françaises n'ayant pas établi deux
bilans en deux ans au moins d'existence (sous réserve de certaines
exceptions) ; valeurs émises par des sociétés non
cotées, à l'exception des SICAV.
Les produits éligibles au démarchage sont néanmoins soumis
à une
obligation d'information
par remise à la personne
démarchée d'une documentation sur leurs caractéristiques.
Cette communication est plus ou moins détaillée selon les
produits (taux effectif global et charges pour les prêts et emprunts,
«
note d'information succincte
», aux termes de
l'article L. 342-6, pour les valeurs mobilières), de telle sorte qu'il
est difficile pour l'épargnant de toujours connaître les
obligations effectives en la matière. L'information peut être
simultanée à la signature du contrat de vente, qui en est alors
le support matériel (tel est le cas pour les prêts ou les produits
d'épargne réglementée), ou préalable à la
vente, cette seconde modalité constituant naturellement une protection
supplémentaire.
La réglementation relative aux
délais de réflexion
(préalable à la vente)
et de rétractation
(faculté pour la personne démarchée de revenir sur son
engagement et d'être éventuellement démarchée) est
également
disparate
: il n'est pas prévu de
délai de réflexion pour les prêts, l'offre de plans
d'épargne est soumise à un délai de dénonciation de
quinze jours, et un délai de réflexion de sept jours est
prévu pour les produits à terme. Les contrats d'assurance-vie et
de capitalisation font pour leur part l'objet d'une disposition
spécifique puisque le délai de renoncement est de trente jours
à compter du premier versement.
Enfin les
sanctions
554(
*
)
reposent sur deux logiques parallèles : pénale ou
professionnelle.
6. Une protection du démarcheur totalement ignorée
Il n'est pas rare que les personnes concernées soient elles-mêmes
recrutées par des annonces alléchantes ou des approches leur
laissant miroiter un haut niveau de rémunération, alors que la
totalité de celle-ci intervient « à la
commission ». Tant que le démarcheur est en mesure de faire
souscrire des contrats par son environnement proche, il parvient à
maintenir son niveau de vie. Ensuite, il est réduit à
l'indigence...
D'où l'agressivité
désespérée de certains vendeurs de produits financiers
paupérisés et totalement dépendants de quelques signatures
supplémentaires
. De façon étrange, personne, dans les
gouvernements successifs de 1995 à aujourd'hui, n'a paru sensible
à la situation de ces intermédiaires, que ne défend bien
sûr aucune corporation constituée.
B. UN DISPOSITIF PEU FIABLE
L'inadaptation et la relative insécurité, qui sont les
caractéristiques généralement admises du dispositif
actuel, résultent de trois principaux constats.
1. L'encadrement et le contrôle sont déficients
L'absence de centralisation et d'actualisation précise des
données
relatives aux démarcheurs autorisés ne permet
pas de connaître précisément leur nombre. De 120.000
à 130.000 déclarations de démarchage financier ont ainsi
été enregistrées en 1999 au parquet de Paris, qui
reçoit la très grande majorité des demandes de cartes. Or
ce chiffre, qui a trait aux déclarations de cartes, ne couvre par le
nombre de démarcheurs, puisqu'une même personne peut
détenir plusieurs cartes. Il inclut les salariés des
établissements de crédit, entreprises d'investissement et
entreprises d'assurance, qui doivent détenir une carte lorsqu'ils font
du démarchage financier et constituent la grande majorité des
démarcheurs. Le chiffre global, vraisemblablement surestimé, de
300.000 démarcheurs qui est souvent cité couvre également
les déclarations relatives au démarchage en matière
d'assurance.
Le principe de l'unicité de la carte pour les produits à terme
et les valeurs mobilières est, de l'avis des professionnels, largement
contourné
. La période récente a, en outre, vu
croître le nombre des intermédiaires et apporteurs d'affaires
relevant de professions parfois mal définies et situées dans une
« zone grise », telles que « conseillers
financiers » ou « conseillers en gestion de
patrimoine », qui ne sont pas recensés comme
démarcheurs mais exercent de fait cette activité.
L'activité de certains démarcheurs parfois peu scrupuleux tend
à nuire à la crédibilité et à l'image des
professionnels qui exercent sérieusement leur métier.
Enfin, le dispositif actuel de délivrance de carte par des organismes
habilités ne pallie pas
l'absence préjudiciable d'une
autorité de contrôle
clairement investie d'une mission de
régulation du système et de surveillance d'agréments qui
iraient au-delà d'une simple déclaration.
2. L'inadaptation aux évolutions technologiques est manifeste
Les dispositions actuelles se montrent trop précises et factuelles sur
les techniques de démarchage et la définition de
l'activité, de telle sorte qu'elles n'intègrent pas les
évolutions sensibles que l'avènement d'internet et de la
communication mobile (
wap, i-mode
et future norme UMTS), voire de la
télévision interactive, a suscitées dans la conception
même du démarchage, pas plus qu'elles ne peuvent se montrer
adaptées aux progrès à venir.
Internet introduit un élément fondamental de distanciation et
de dématérialisation
, et est à cet égard le
vecteur de nombreux moyens nouveaux de contact avec des clients potentiels, qui
tendent à estomper les frontières entre publicité et
démarchage, tels que le courtage en ligne, la vente de crédits
par internet, les sites des établissements de crédit, les
« bannières » permettant d'accéder à
des sites à partir de portails généralistes, les courriers
électroniques personnalisés ou le
«
spamming
» (publipostage électronique
abusif et non sollicité auprès d'un très grand nombre de
personnes). Ces techniques modifient l'environnement du démarchage et
l'approche traditionnelle fondée sur la carte
matérialisée, le déplacement physique du démarcheur
et la communication par voie orale, qui ne permettent plus d'appréhender
cette nouvelle réalité.
3. Les risques de fraude sont réels
Le nombre des sanctions prononcées du chef de démarchage
financier est réduit, comme en témoignent les données
ci-après :
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
13 |
2 |
14 |
3 |
8 |
24 |
8 |
4 |
3 |
4 |
Source : ministère de la justice
S'il est permis d'espérer que le nombre d'infractions a effectivement
baissé au cours des dernières années,
ces chiffres ne
sont vraisemblablement pas représentatifs
de la
réalité des abus de faiblesse et escroqueries pratiquées,
ne serait-ce que parce que le nombre de plaintes et de demandes de
précisions enregistrées par la COB a dans le même temps
augmenté, en particulier dans le cadre du démarchage par internet
et des opérations sur les marchés à terme étrangers.
En revanche, les cas de fraude transfrontalière semblent relativement
bien contenus, du moins dans le périmètre des Etats de l'OCDE,
grâce à une bonne coopération internationale entre
autorités de régulation et à l'action de la COB et du
Conseil des marchés financiers (CMF), qui consultent
régulièrement les sites internet pour tenter d'en cerner les
infractions.
De manière générale, les risques de fraude sont accrus
dès lors que la réglementation s'avère trop
fragmentée, que les responsabilités sont mal définies et
que les zones d'incertitude et interstices se multiplient à la faveur de
normes hétérogènes, de règles trop ou
insuffisamment précises et de contraintes trop lâches en
matière d'information, laissant les personnes démarchées
éventuellement vulnérables à l'intimidation et aux
mensonges.
La législation actuelle présente certaines de ces
caractéristiques.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
L'obsolescence du dispositif actuel du démarchage bancaire et financier
est depuis longtemps soulignée. Le présent projet de loi tend
à répondre aux principaux
objectifs
de la réforme,
fixés notamment dans le rapport Rodocanachi dont il reprend l'essentiel
des recommandations :
- proposer une définition du démarchage claire et adaptée
aux nombreuses techniques existantes et futures ;
- construire un cadre d'activité cohérent, stable et
responsabilisant pour les professionnels ;
- préciser les règles relatives à l'exécution de la
démarche elle-même ainsi que le champ des produits et
destinataires exclus du champ du démarchage ;
- mettre en place des sanctions adaptées et strictes.
Aussi les axes qui ont guidé la conception de la nouvelle
réglementation sont-ils l'autorégulation du système par
une responsabilisation selon une chaîne continue, la bonne information
des épargnants et la facilité des recours, en vue de contribuer
à la sécurité juridique et financière des
investisseurs non avertis. Il s'agit donc de
protéger les
particuliers et personnes morales des sollicitations non souhaitées et
intimidations dont ils pourraient faire l'objet, c'est-à-dire, plus
familièrement, d'empêcher les offreurs de produits et services
financiers de « forcer la main » de personnes
dénuées de capacité de
« résistance » ou ne disposant pas a priori des
compétences suffisantes pour appréhender certaines offres
complexes. Il s'agit aussi de faire bénéficier les
démarcheurs d'un cadre professionnel mieux établi et plus
sécurisant.
Le présent projet de loi, dont il faut rappeler qu'il ne couvre pas le
démarchage en matière d'assurance, reprend la quasi
totalité des dispositions qui figuraient déjà dans le
projet portant diverses dispositions d'ordre économique et financier
déposé au Sénat le 30 mai 2001, qui n'a jamais
été inscrit à l'ordre du jour. Ce projet de loi comportait
les dispositions ici proposées en matière de démarchage
bancaire et financier et de statut des conseillers en investissements
financiers.
Par rapport au projet de 2001, le présent projet de loi
apporte deux principales innovations
:
- une modification de la définition des personnes exclues du champ du
démarchage ;
- une disposition relative au démarchage de produits d'épargne
salariale.
Le dispositif proposé par le présent article occupe douze pages
du présent projet de loi et insère ou réécrit
entièrement dix-sept articles du code monétaire et financier.
A. UNE DÉFINITION EXTENSIVE ET PÉRENNE
La nouvelle définition du démarchage bancaire ou financier, qui
figurerait à l'article L. 341-1 du code monétaire et financier,
se veut extensive afin d'inclure tous les moyens de communication actuels et
potentiels, tout en qualifiant assez précisément l'acte
même de démarchage. Cette définition est exposée aux
premier et sixième alinéas, qui recouvrent des situations
distinctes.
1. Une prise de contact non sollicitée
Le premier alinéa du texte proposé par l'article L. 341-1 dispose
que «
constitue un acte de démarchage bancaire ou financier
toute prise de contact non sollicitée, par quelque moyen que ce soit,
avec une personne physique ou une personne morale déterminée, en
vue d'obtenir, de sa part, un accord
» sur une série de
services ou opérations
555(
*
)
. Cette définition appelle les
observations suivantes :
- la notion centrale est celle de
prise de contact non
sollicitée
, qui suppose une démarche active de la part du
démarcheur. Ainsi, le simple fait de prendre contact avec un client
potentiel, même si aucun contrat n'est conclu
in fine
ou s'il
s'agit uniquement de proposer des conseils, constitue un acte de
démarchage ;
- tous les moyens sont envisagés par la précision
«
par quelque moyen que ce soit
», de telle sorte
que la loi soit pérenne et «
technologiquement
neutre
». Le démarchage peut donc avoir lieu par
déplacement physique, envoi de courrier, appel
téléphonique ou par voie électronique, ainsi que tous les
autres moyens non sollicités qui pourraient apparaître à
l'avenir. Le démarchage par voie téléphonique concerne
également le personnel des centres d'appel, qu'il soit temporaire ou
permanent, qualifié ou non. En revanche, les appels entrants
d'épargnants, par exemple à la suite de la publication d'un
numéro vert, ne seraient pas considérés comme du
démarchage
556(
*
)
.
Internet n'est pas mentionné explicitement, mais une telle insertion
ferait courir le risque de trop « dater » la loi en
fonction des préoccupations technologiques d'une période
donnée ;
- le démarchage vise une
personne physique ou morale
. Il s'agit
là d'une innovation puisque le dispositif actuel ne concerne que les
personnes physiques.
La définition française serait donc
dorénavant extensive, notamment au regard des dispositions
communautaires
qui tendent à ne retenir que les personnes physiques.
Ainsi la directive 85/477/CE concernant les contrats négociés en
dehors des établissements commerciaux, qui comporte des dispositions
relatives au démarchage à domicile, ne retient que les
consommateurs personnes physiques n'agissant pas dans le cadre d'une
activité professionnelle. De même la directive 2002/65/CE du 23
septembre 2002, en faveur de laquelle la France a voté, concernant la
commercialisation à distance de services financiers auprès des
consommateurs, définit dans son article 2 le consommateur comme
«
toute personne physique qui, dans les contrats à
distance, agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son
activité commerciale et professionnelle
» ;
- cette personne est «
déterminée
».
La formulation peut sembler plus floue que celle qu'avait
préconisée le rapport Rodocanachi, qui évoquait une
personne «
nommément
désignée
», mais elle implique néanmoins que
le démarcheur s'adresse à une personne dont il connaît
préalablement l'identité
557(
*
)
.
Cette définition, plus précise que l'actuelle,
rend possible
une distinction entre démarchage et publicité,
dans la mesure
où elle fait ressortir que le démarchage se caractérise en
particulier par l'existence d'un contact direct et personnalisé en vue
de la vente d'un produit financier, alors que la publicité dans son
acception courante se définit par la volonté de créer, de
façon diffuse, une appétence pour un produit. Cette distinction
devra toutefois être précisée par le décret
d'application. Dans le cas du démarchage par voie électronique,
on peut exciper deux conséquences importantes :
- le champ de cette modalité de démarchage se
révèle relativement restrictif puisqu'il concerne essentiellement
l'envoi sporadique d'un courrier électronique non sollicité
à un client potentiel, c'est-à-dire le
«
spamming
». Ce type d'envoi non sollicité
peut intervenir dans un délai assez long après qu'un internaute a
consulté un site financier sans pour autant solliciter de quelconque
abonnement ou lettre d'information (qui se situerait alors hors du champ du
démarchage) ;
- en revanche
toute démarche active initiale de l'internaute emporte
exclusion du champ du démarchage
. Il peut s'agir de propositions
faites sur un site consulté directement ou indirectement (via des
« bannières » publicitaires et liens hypertextes
figurant sur un portail généraliste par exemple), mais aussi d'un
abonnement à une lettre électronique, qui suppose que le profil
du prospect ait été renseigné en amont par cette
même personne sur un site. De même la télévision
interactive, qui est très vraisemblablement appelée à
connaître un grand développement dans les années à
venir, n'entre pas dans le champ du démarchage dès lors que
l'utilisateur réalise volontairement un choix ou une opération au
moyen de sa télécommande.
Une difficulté se pose concernant le droit applicable au
démarchage opéré par voie électronique depuis un
autre Etat de l'Union européenne
. Cette question ne connaît en
effet pas de réponse certaine au niveau communautaire, s'agissant des
dispositions protectrices du consommateur. Le Traité permet
l'application du droit français à des opérateurs
étrangers, sous réserve du contrôle de
proportionnalité exercé par la Commission sous la surveillance de
la Cour de justice des communautés européennes. Le
problème général de l'application des droits de la
consommation de chaque Etat membre fait actuellement l'objet de consultations
en vue de fixer les lignes directrices
(«
guidances
») de cet exercice de
proportionnalité.
2. L'objet du démarchage
Le démarchage a pour objet d'obtenir du prospect un accord sur quatre
types d'opérations, mentionnées dans le texte proposé par
le présent article pour l'article L. 341-1 et qui recouvrent un champ
vaste mais à l'exclusion de tout autre :
-
les opérations sur des instruments financiers
réalisées par un des organismes mentionnés au 1° de
l'article L. 341-3
558(
*
)
. La
liste des instruments financiers concernés est visée à
l'article L. 211-1 du code monétaire et financier. Elle est large
puisqu'il s'agit des actions et autres titres donnant accès au capital
et aux droits de vote, des titres de créance (à l'exclusion des
effets de commerce et bons de caisse), des OPCVM, des instruments financiers
à terme et de tous instruments financiers équivalents de droits
étrangers ;
-
les opérations de banque et les opérations connexes
réalisées par les mêmes personnes. Les opérations de
banque sont mentionnées à l'article L. 311-1 du code
monétaire et financier, qui dispose qu'elles «
comprennent
la réception de fonds du public, les opérations de crédit,
ainsi que la mise à disposition de la clientèle ou la gestion de
moyens de paiement
». Les opérations qui leur sont
connexes sont quant à elles mentionnées à l'article
L. 311-2 du même code et comprennent des activités aussi
diverses que les opérations de change, les opérations sur or,
métaux précieux et pièces, le conseil et l'assistance en
matière de gestion de patrimoine, l'ingénierie financière,
les transactions et la gestion portant sur les valeurs mobilières et
produits financiers, et les opérations de crédit-bail.
-
les services d'investissement et services connexes
réalisés par les mêmes personnes. Les services
d'investissement sont mentionnés à l'article L. 321-1 du
code monétaire et financier. Ils portent sur les instruments financiers
précédemment énumérés et comprennent la
réception et la transmission d'ordres pour le compte de tiers,
l'exécution d'ordres pour le compte de tiers, la négociation pour
compte propre, la gestion de portefeuille pour le compte de tiers, la prise
ferme et le placement. Les services connexes, décrits à l'article
L. 321-2, sont également variés et comprennent par exemple la
conservation ou l'administration d'instruments financiers ; le conseil en
gestion de patrimoine ou le conseil en stratégie financière et
industrielle aux entreprises ;
- enfin
les opération sur biens divers
, telles que les
souscriptions sur rentes viagères et acquisitions de droits sur des
biens immobiliers ou mobiliers (lorsque les acquéreurs n'en assurent pas
eux-mêmes la gestion), mentionnées à l'article L. 550-1.
Le démarchage ne concerne donc pas les produits d'assurance ou de
protection sociale
, bien que les entreprises d'assurance soient
visées par le texte proposé par le présent article pour
l'article L. 341-3 parmi les personnes habilitées à recourir au
démarchage. Les produits d'assurance sont en effet régis par un
régime spécifique, et les agents généraux,
courtiers et autres intermédiaires d'assurance font l'objet de
dispositions législatives dans le titre V du code des assurances et de
nombreuses dispositions réglementaires.
3. Le critère essentiel du lieu du démarchage
Le texte proposé pour l'article L. 341-1 du code monétaire et
financier enrichit également la définition du démarchage
en précisant les lieux susceptibles d'en faire l'objet :
«
constitue également un acte de démarchage bancaire
ou financier, quelle que soit la personne à l'initiative de la
démarche, le fait de se rendre au domicile des personnes, sur leur lieu
de travail ou dans les lieux non destinés à la commercialisation
de produits, instruments et services financiers, en vue des mêmes
fins
».
Cet alinéa ne concerne que les particuliers et reprend les
critères de lieu de l'actuelle législation, mais apporte une
inflexion significative par rapport à la première partie de la
définition puisque
le démarchage peut éventuellement
être sollicité par la personne démarchée ou à
l'initiative d'une autre personne que le démarcheur, telle que son
mandant
. La personne démarchée se trouve ainsi
« protégée » par le régime du
démarchage, alors même qu'elle peut être à l'origine
de la démarche, dans la mesure où
le critère du lieu
tend à l'emporter sur celui de la sollicitation
. Ainsi toute
démarche non sollicitée relève du démarchage, mais
une démarche non sollicitée n'est pas pour autant
nécessairement exclue du champ du démarchage. Cette disposition,
qui n'est donc qu'en apparence contradictoire avec la définition
posée au premier alinéa de l'article L. 341-1, peut être
liée à deux types d'explication :
- il s'agit de tenir compte de la plus grande
« vulnérabilité » d'un client potentiel quand
il reçoit un démarcheur chez lui ou à son lieu de travail,
même si c'est à sa demande ;
- certaines situations concrètes peuvent imposer la qualification de
démarchage, en particulier lorsqu'une personne insusceptible de se
déplacer dans les locaux professionnels du démarcheur
(empêchement physique, absence momentanée par exemple) ne peut
faire autrement que de demander à ce dernier de se rendre chez lui.
On peut également considérer que la notion de
«
lieu non destiné à la commercialisation de
produits
», dont le principe est légitime
puisque la personne démarchée est par définition sujette
à un certain « effet de surprise », présente
des imperfections de par son caractère relativement imprécis. Sur
un plan pratique, on peut se demander par exemple si un grand magasin ou une
concession automobile, qui proposent souvent des formules de crédit
à la consommation, constituent ou non un tel lieu
559(
*
)
. Il convient cependant de bien garder
à l'esprit que le critère du lieu doit être combiné
avec celui de l'habilitation
560(
*
)
, puisque le démarcheur doit
être salarié ou mandaté par un organisme habilité
à recourir au démarchage, tel que défini à
l'article L. 341-3. Il appartiendra néanmoins à l'AMF et à
la jurisprudence de faire preuve de pragmatisme et de bien considérer
l'ensemble des situations potentielles pour en préciser les obligations
au regard du démarchage.
In fine, les deux principaux éléments de la définition
sont donc l'intention du démarcheur (proposer un certain type
d'opérations) et le lieu du démarchage, le critère de la
sollicitation n'étant pas exclusif.
4. Les situations exclues de la définition du démarchage
La définition du démarchage proposée par le
présent article souffre un certain nombre d'exceptions, au regard de
certaines dispositions particulières portant sur les opérations
proposées, des professions concernées ou des personnes faisant
l'objet du démarchage.
La rédaction proposée pour l'article L. 341-1 dispose ainsi que
«
l'activité de démarchage bancaire ou
financier est exercée
sans préjudice de l'application des
dispositions particulières
relatives à la prestation de
services d'investissement, à la réalisation d'opérations
de banque et à la réalisation d'opérations sur biens
divers, ainsi que des dispositions de l'article 66-4 de la loi n° 71-1130
du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions
judiciaires et juridiques. »
Parmi ces dispositions
particulières figurent en premier lieu :
- pour les opérations connexes aux opérations de banque (article
L. 311-2 du code monétaire et financier), les dispositions relatives
à l'exercice illégal de certaines professions en matière
d'ingénierie financière et la procédure d'agrément
prévue à l'article L. 532-1 du même code pour la fourniture
de services d'investissement et l'activité de conservation ;
- les modalités et conditions de fourniture des services
d'investissement et de leurs services connexes, définies aux livres V et
VI du code monétaire et financier ;
- aux termes de l'article L. 550-1 du même code, la non application des
dispositions relatives aux intermédiaires en biens divers aux
opérations d'assurance et de capitalisation régies par le code
des assurances, aux opérations de crédit différé,
aux opérations régies par le code de la mutualité et par
le code de la sécurité sociale, et aux opérations donnant
normalement droit à l'attribution en propriété ou en
jouissance de parties déterminées d'un ou plusieurs immeubles
bâtis.
En second lieu, l'article 66-4 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre
1971 précitée dispose que les syndicats et associations
professionnels régis par le code du travail peuvent donner des
consultations juridiques et rédiger des actes sous seing privé au
profit des personnes dont la défense des intérêts est
visée par leurs statuts, sur des questions se rapportant directement
à leur objet.
Concernant les situations et personnes faisant l'objet du
démarchage, le texte proposé par le présent article pour
l'article L. 341-2 précise quatre cas pour lesquels le régime du
démarchage ne s'applique pas :
-
premier cas :
les prises de contact avec les
investisseurs
qualifiés
561(
*
)
et
avec les
sociétés commerciales dont le total du bilan, le
chiffre d'affaires ou les effectifs sont supérieurs à un seuil
fixé par décret
.
Le rapport Rodocanachi proposait de
limiter cette exclusion aux seuls investisseurs qualifiés, par
définition réputés détenir une connaissance
suffisante des instruments financiers pour ne pas être astreints aux
règles du démarchage. Le projet de loi portant diverses
dispositions d'ordre économique et financier déposé par le
précédent gouvernement en mai 2001 reprenait la solution
préconisée par le rapport.
Le présent article adjoint trois critères quantitatifs
alternatifs, dont les caractéristiques ne sont pas encore connues mais
le seuil, s'agissant du chiffre d'affaires, devrait s'établir à
100 ou 150 millions d'euros.
Les notions d'investisseur qualifié, institutionnel et averti
1 -
Les investisseurs qualifiés
L'appartenance à la catégorie des
investisseurs
qualifiés
permet un allègement de l'obligation d'information
du prestataire ou de mise en garde de l'initiateur. Il en est ainsi, notamment,
en cas d'émission ou de cession de titre à ces investisseurs,
conformément aux dispositions des articles 3-3-5 et 3-3-7 du
Règlement général du CMF. De même, lorsque
l'émission ou la cession d'instruments financiers est
réalisée auprès d'investisseurs qualifiés, elle ne
constitue pas un appel public à l'épargne, de sorte que les
dispositions protectrices des investisseurs n'ont pas lieu de s'appliquer.
Un investisseur qualifié est, aux termes de l'article L. 411-2,
«
une personne morale disposant des compétences
et des moyens nécessaires pour appréhender les risques
inhérents aux opérations sur instruments financiers
.
La liste des investisseurs reconnus comme qualifiés est fixée par
décret »
. Les OPCVM sont réputés agir en
cette qualité. De manière générale, les
investisseurs qualifiés se divisent en deux catégories, selon
qu'ils le sont par nature ou par déclaration, d'après les termes
du décret du 10 octobre 1998 :
- en premier lieu, les investisseurs qualifiés
par nature
sont
des personnes morales dont l'activité est financière. Autrement
dit, il s'agit des professionnels de l'investissement agissant pour compte
propre ou pour le compte d'investisseurs également qualifiés.
Concrètement, cette catégorie regroupe les établissements
de crédit et compagnies financières, le Trésor public, la
Banque de France, les services financiers de La Poste, l'institut
d'émission d'outre-mer ou des départements d'outre-mer, la Caisse
des dépôts et consignations, les entreprises et
sociétés d'investissement, les sociétés d'assurance
et de capitalisation, les institutions de prévoyance et les Caisses
d'amortissement de la dette sociale (I de l'article 1 du décret n°
98-880 du 1er octobre 1998) ;
- en second lieu, les investisseurs qualifiés
par
déclaration
sont des personnes morales qui, à raison de leur
objet ou de leur importance, sont éclairées en matière
financière. Ils agissent nécessairement pour compte propre et
peuvent être des sociétés de capital-risque, des
sociétés financières d'innovation, des
sociétés commerciales dont le total du bilan est supérieur
à 150 millions d'euros, des établissements publics nationaux
à caractère industriel et commercial dont les titres sont
négociés sur un marché réglementé d'un Etat
partie à l'accord sur l'Espace économique européen,
certains organismes mutualistes, des sociétés dont un ou
plusieurs investisseurs qualifiés détiennent, ensemble ou
séparément, directement ou indirectement, au moins 99% du capital
ou des droits de vote (II de l'article 1
er
du décret n°
98-880 du 1
er
octobre 1998). Leur qualité d'investisseur
qualifié n'est pas de droit, mais résulte d'une
déclaration, faite par leur conseil d'administration, leur directoire ou
leur(s) gérant(s), qui prend effet à compter de sa publication au
Bulletin des annonces légales et officielles.
La notion d'investisseur qualifié manifeste donc certaines
carences
:
- les grandes sociétés commerciales n'entrent pas dans cette
catégorie de droit, mais il s'agit simplement d'une
faculté
qui leur est ouverte. De fait, seule l'entreprise
publique Réseau Ferré de France a procédé à
une telle déclaration, et les grandes entreprises
préfèrent bénéficier du statut plus protecteur
d'investisseur non qualifié, alors même que les récents
aménagements portant sur la définition de l'investisseur
qualifié avaient été en partie initiés par ces
entreprises ;
- la définition posée par le décret présente le
risque d'un
effet de seuil
, qui exclut de la qualification les
sociétés et particuliers fortunés qui disposeraient a
priori d'une pratique et d'une expertise abouties des risques inhérents
aux instruments financiers sophistiqués. Outre l'opportunité d'un
critère qualitatif, qu'il est certes difficile de définir, la
qualité d'investisseur qualifié pourrait être reconnue aux
gestionnaires mandatés par des particuliers disposant d'un patrimoine et
d'une connaissance des marchés étendus.
Les travaux menés par le
Committee of European Securities
Regulators
(CESR), organisme représentant au niveau
communautaire la COB et ses homologues de l'Union européenne, ont
conduit en juillet 2002 à la définition d'une notion plus
opérationnelle de l'
investisseur professionnel
, qui pourrait
à terme devenir la référence des droits nationaux. Ces
investisseurs professionnels sont :
- les entités autorisées ou réglementées en tant
qu'opérateurs sur les marchés financiers ;
- les entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 40
millions d'euros ou le total de bilan supérieur à 20 millions
d'euros ;
- les autres investisseurs institutionnels dont la vocation est d'investir en
instruments financiers ;
- les gouvernements nationaux, banques centrales, institutions internationales
et supra nationales ;
- les investisseurs personnes physiques qui en font la demande, sous
réserve de remplir certaines conditions de pratique des marchés
et de taille du portefeuille financier.
2 - Les investisseurs institutionnels
Les
investisseurs institutionnels
"sont des organismes financiers
qui, en raison de leur nature ou de leurs statuts, sont tenus de placer une
grande partie des ressources qu'ils collectent en instruments financiers"
(Droit des marchés financiers, Th. Bonneau et F. Drummond, Economica,
2001, n° 475), et recouvrent donc en partie la catégorie des
investisseurs qualifiés. Les investisseurs institutionnels ne sont pas
définis par la loi, mais visés par des dispositions
réglementaires. Ils sont dispensés du formalisme exigé
normalement avant toute intervention sur un marché
réglementé d'instruments financiers à terme (article 3 a
contrario du Règlement COB n° 97-02 relatif à
l'établissement et à la diffusion d'une note d'information
concernant les marchés réglementés d'instruments
financiers à terme). Ils sont également autorisés à
formuler par tous moyens leurs demandes de dérogation à
l'obligation de centralisation des ordres sur les marchés
réglementés (article 4-1-32, 3° du Règlement
général du CMF). Enfin, les prestataires travaillant pour le
compte d'investisseurs institutionnels sont dispensés du respect du
formalisme entourant la conclusion de la convention de services
d'investissement, à moins que ce service soit une activité de
compensation (article 2-4-12, alinéa 3 du Règlement
général du CMF).
3 - Les investisseurs avertis
Enfin, un
investisseur averti
est celui qui a connaissance des risques
encourus, eu égard à sa compétence professionnelle ou
à la nature des opérations réalisées. Cependant,
cette catégorie n'est pas consacrée par les dispositions
légales puisque ni le code monétaire et financier, ni le
règlement général du CMF n'utilisent ce concept.
Dès lors, on peut préférer à cette classification
celle opposant les investisseurs profanes aux investisseurs qualifiés
qui, elle, est utilisée par le règlement général du
CMF. Cependant, le concept d'investisseur averti conserve un
intérêt dans la mesure où il est plus large que celui
d'investisseur qualifié, qui exclut les personnes physiques. Ainsi, dans
le cas de FCPR à procédure allégée
réservés à des investisseurs avertis, ces derniers sont
limitativement énumérés : investisseurs
qualifiés, personnes physiques et morales investissant au moins 500.000
€
562(
*
)
, les dirigeants,
salariés et personnes physiques agissant pour le compte de la
société de gestion, et les personnes physiques ou morales
investissant au moins 30 000 € et procurant une assistance soit aux
sociétés non cotées du fonds, soit aux gestionnaires dudit
fonds, ou possédant déjà une expérience
significative dans le capital-investissement (en d'autres termes, les
« business angels »
). Cette définition
mouvante et opérationnelle ne saurait cependant masquer l'importance que
revêt la catégorie des investisseurs avertis.
-
deuxième cas : les règles du démarchage bancaire
ou financier ne s'appliquent pas aux prises de contact dans les locaux des
personnes habilitées à recourir au démarchage
, telles
qu'elles sont mentionnées dans le texte proposé pour l'article L.
341-3. Cette disposition vise plus spécifiquement les particuliers se
rendant dans une
agence bancaire
, une telle démarche laissant en
effet supposer que la personne peut s'attendre à se voir proposer des
produits ou services financiers ;
-
troisième cas : les démarches effectuées dans
les locaux professionnels d'une personne morale à la demande de cette
dernière
. Cette disposition vise le cas ou une personne morale
susceptible d'être démarchée prend l'initiative d'une prise
de contact dans ses propres locaux, par exemple lorsqu'une direction
financière prospectée par un établissement offreur de
produits sollicite un rendez-vous dans ses locaux ;
-
quatrième cas : lorsque la personne visée est
déjà cliente de la personne pour le compte de laquelle le
démarchage a lieu, dès lors que l'opération
proposée s'inscrit - à raison de sa nature, des instruments
financiers proposés, des risques ou des montants en cause - dans le
champ des opérations habituellement proposées par cette
personne
.
Ce cas prévoit deux conditions cumulatives : que la personne
visée soit déjà cliente, et que les produits
proposés lui soient familiers. A contrario, les règles du
démarchage s'appliquent donc aux produits d'une nature différente
de ceux auxquels le client est habitué. Cette disposition semble logique
et est destinée à ne pas alourdir inutilement les relations
normales de clientèle. Elle prête néanmoins le flanc
à de possibles dérives tenant à l'appréciation du
terme « habituellement ». On peut ainsi concevoir qu'un
client se voie progressivement proposer des produits présentant un
risque élevé, après qu'il a été
« fidélisé » en plusieurs étapes par
des offres de produits graduellement de plus en plus complexes mais dont il lui
semblerait être familier
563(
*
)
.
Il est possible de résumer les dispositions précédentes
relatives aux situations de démarchage dans le tableau
suivant :
|
|
OFFRE SOLLICITE |
OFFRE NON SOLLICITEE |
Investisseur qualifié |
||
|
|
Client |
Prospect |
Client |
Prospect |
Client ou prospect |
LOCAUX |
Domicile ou lieu de travail de la personne démarchée |
Démarchage (personnes physiques) / pas de démarchage dans les locaux professionnels d'une personne morale à sa demande |
Démarchage |
Cette catégorie d'investisseur est exclue du champ du démarchage, de même que les sociétés dont le chiffre d'affaires, le total de bilan et les effectifs sont supérieurs à des seuils quantitatifs |
||
Locaux professionnels du démarcheur ou de son mandant |
Pas de démarchage |
|||||
Lieux non destinés à la commercialisation |
Démarchage |
|||||
OPERATIONS |
Opérations habituelles |
Pas de démar-chage |
Par définition, le prospect n'a pas réalisé d'opérations |
Pas de démar-chage |
Démarchage (pas d'opérations antérieures) |
|
Opérations non habituelles |
Pas de démar-chage |
Démarchage |
N.
B : la distinction entre opérations habituelles et non habituelles
ne constitue pas un critère du démarchage à proprement
parler, mais résulte des dispositions du 4° du texte proposé
pour l'article L. 341-2, qui ne visent que les personnes déjà
clientes de la personne pour le compte de laquelle le démarchage a lieu.
B. LA NOUVELLE ARCHITECTURE DU DÉMARCHAGE ET LES CONDITIONS
D'EXERCICE
Les dispositions proposées pour la section 2 du chapitre I
er
du titre IV du livre III du code monétaire et financier
564(
*
)
, intitulée
«
personnes habilitées à procéder au
démarchage
», recouvrent en réalité un champ
beaucoup plus vaste puisqu'elles tendent non seulement à préciser
les catégories de « personnes habilitées à
démarcher », mais également à détailler
le système de mandats successifs, les responsabilités y
afférentes, les conditions pénales et modalités d'exercice
(carte d'emploi et assurance notamment), et le rôle de l'Autorité
des marchés financiers (AMF) dans le contrôle de l'architecture
d'ensemble.
1. Les personnes habilitées à procéder au
démarchage
Le texte proposé pour l'article L. 341-3 distingue exclusivement
trois catégories de personnes habilitées à recourir
indirectement ou à se livrer à l'activité de
démarchage
, dont deux sont des personnes morales et la
troisième éventuellement des personnes physiques :
- les établissements de crédit, les organismes publics
mentionnés à l'article L. 518-1 du code monétaire et
financier (le Trésor public, la Banque de France, les services
financiers de la Poste, l'institut d'émission des départements
d'outre-mer, l'institut d'outre-mer et la Caisse des dépôts et
consignations), les entreprises d'investissement, les entreprises d'assurance
et les établissements équivalents agréés dans un
autre Etat membre de la communauté européenne et habilités
à intervenir sur le territoire français ;
- les entreprises, dans le cadre des dispositifs d'intéressement, de
participation et de plan d'épargne salariale qu'elles peuvent proposer
à leur salariés, et qui relèvent du titre IV du livre IV
du code du travail.
Le texte utilise cependant un raisonnement a contrario, puisqu'il
précise que les seules dispositions de la réglementation relative
au démarchage applicables à ces activités sont celles qui
ont trait aux conditions pénales (article L. 341-9 du code
monétaire et financier, introduit par le présent article) et aux
sanctions pénales (3° de l'article L. 353-2 et article L. 353-4 du
même code, introduits par le présent article). Il en
résulte que
les dispositifs d'épargne d'entreprise ne sont pas
soumis, pour l'essentiel, au régime du démarchage
565(
*
)
. Il est vrai qu'ils
relèvent le plus souvent davantage d'une information fournie aux
salariés sur les possibilités d'épargne qui leur sont
ouvertes, que d'un véritable démarchage actif qui se traduirait
par des visites, envois de courrier ou appels téléphoniques au
domicile des personnes concernées. En tout état de cause, ces
dispositions ne sont pas d'une limpidité éclatante, et compte
tenu de l'ampleur des dérogations prévues pour les dispositifs
d'épargne salariale, il eut sans doute été
préférable de ne pas laisser entendre que les entreprises qui les
proposent figurent parmi les personnes habilitées au démarchage,
et de renverser la perspective en excluant ces dispositifs du démarchage
et en prévoyant des règles déontologiques ;
- enfin les conseillers en investissements financiers, tels qu'ils sont
définis par le texte proposé par l'article 42 du présent
projet de loi pour l'article L. 541-1.
2. Une architecture reposant sur un système de mandats et une
responsabilité claire des mandants
La nouvelle architecture du démarchage repose sur deux principes
fondamentaux.
En premier lieu,
la possibilité de mettre en place des
délégations ou mandats successifs selon des modalités
particulières
. Le
I
du texte proposé par le
présent article pour l'article L. 341-4 dispose ainsi que les personnes
habilitées peuvent mandater des personnes physiques aux fins d'exercer
pour leur compte une activité de démarchage bancaire ou
financier. Il est également prévu que
seule la première
catégorie de personnes habilitées au démarchage
mentionnée à l'article L. 341-3, c'est-à-dire les
établissements de crédit, entreprises d'investissement,
organismes financiers publics et entreprises d'assurance,
peut mandater une
ou plusieurs personnes morales
(selon les produits qu'ils souhaitent
commercialiser), qui peuvent à leur tour mandater des personnes
physiques pour exercer l'activité de démarchage.
La nature juridique de ces personnes morales intermédiaires n'est pas
précisée et il n'est donc pas nécessaire qu'elles soient
elles-mêmes habilitées
au sens de l'article L. 341-3. Le champ
en est donc potentiellement vaste et on peut concevoir, par exemple, qu'une
institution de prévoyance,
non habilitée, puisse
être mandatée (on peut penser que le mandat sera donné par
une compagnie d'assurance) pour effectuer des opérations de
démarchage via des démarcheurs personnes physiques. Mais en tout
état de cause, cette institution ne pourra proposer que des produits
financiers ou bancaires (à l'exclusion de tout produits d'assurance ou
de prévoyance, exclus du nouveau régime) qui sont eux-mêmes
commercialisés à titre accessoire par la compagnie d'assurance
mandante de niveau 1.
Les intermédiaires en opérations de banque
, dont
l'activité est définie aux articles L. 519-1 à L. 519-5 du
code monétaire et financier et qui agissent en vertu de mandats
délivrés par les établissements de crédit, sont
également implicitement visés par le dispositif proposé
pour l'article L. 341-3
566(
*
)
et
peuvent donc exercer une activité de démarchage. En outre une
personne physique, en l'espèce un CIF, peut théoriquement
mandater une autre personne physique, mais ce cas semble assez improbable
puisqu'à priori un conseiller en investissements financiers (CIF)
personne physique exerce directement l'activité de démarchage ou
se constitue en personne morale pour mandater des salariés.
Une importante clarification
567(
*
)
s'impose à propos des CIF
.
Ces derniers, en tant que personnes habilitées,
ne peuvent effectuer
du démarchage que sur leur activité de conseil s'ils ne disposent
pas d'un mandat
, puisque la qualité de CIF est de fournir une
prestation de conseil, et uniquement cette prestation, telle qu'elle est
définie à l'article L. 541-1 dans sa rédaction
proposée par l'article 42 du présent projet de loi. Pour
démarcher des produits et services financiers et ainsi
« participer » à la réalisation d'un service
d'investissement ou d'une opération de banque, toute personne
exerçant une activité de conseil en investissement financier doit
donc bénéficier en tant que personne physique, ou personne morale
de niveau intermédiaire, d'un mandat clair émanant d'une des
personnes visées au 1° de l'article L. 341-3 nouveau
568(
*
)
. En outre, un CIF personne physique
ne peut en aucun cas, en application des dispositions des articles L. 532-1 et
L. 532-2 du code monétaire et financier, demander un agrément
pour devenir prestataire de services d'investissement et ainsi distribuer de
manière « autonome », sans mandat, des produits
financiers.
En second lieu, le III du texte proposé pour l'article L. 341-4 dispose
que
chaque niveau de mandant est civilement responsable du fait de son ou de
ses mandataires
. Cette responsabilité « de
tête » suppose donc un contrôle étroit de chaque
mandant sur l'activité de son ou de ses mandataires, et qu'il prenne
toutes les dispositions nécessaires pour lui faire respecter les
obligations afférentes au démarchage
569(
*
)
. En outre, les démarcheurs
sont, dans le seul cadre de leur activité de démarchage,
considérés comme les préposés de leurs mandants au
sens de l'article 1384 du code civil
570(
*
)
, qui dispose qu'
« on
est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait,
mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on
doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde ».
Le
II
du texte proposé pour l'article L. 341-4 précise
certaines modalités du mandat propres à encadrer
l'activité de démarchage : il est nominatif, donc non
transmissible, limité à deux ans et renouvelable, et doit
mentionner tant la nature des produits et services qui en sont l'objet que les
conditions d'exercice du démarchage. En outre, une même personne
peut recevoir des mandats émanant de plusieurs entreprises ou
établissements, ce qui signifie que
le démarchage
« multicartes » est désormais autorisé,
sans distinction de produits, à la différence de la
réglementation actuelle. La législation est ainsi davantage en
phase avec la réalité du démarchage. En effet, dès
lors que le régime du mandat et les responsabilités respectives
du mandant et du mandataire sont clairement définis, rien ne s'oppose
à la possibilité pour un démarcheur d'être
mandaté par plusieurs établissements financiers.
Les obligations que les indépendants devront à ce titre respecter
sont désormais bien identifiées, et la confusion avec les
métiers de la gestion pour les indépendants qui travaillent pour
plusieurs établissements devrait être également
évitée. Enfin, les prestataires de services d'investissement ont
intérêt à distribuer largement leurs produits, et les
démarcheurs ont de même intérêt à travailler
avec un éventail large de distributeurs pour mieux satisfaire leurs
clients par une offre adaptée et diversifiée.
3. Les conditions d'attribution et d'exercice du mandat de
démarcheur
L'attribution du mandat, comme l'exercice de l'activité de
démarcheur, doivent présenter un certain nombre de garanties
précises et sont soumises à plusieurs conditions
préalables, susceptibles de renforcer sensiblement la
sécurité des épargnants.
En premier lieu, des conditions d'âge, d'honorabilité et de
compétence
: le IV du texte proposé pour l'article L.
341-4 prévoit en effet que les personnes physiques mandataires et celles
ayant le pouvoir de gérer ou administrer les personnes morales
mandatées, de même que les salariés des entreprises
habilitées et des personnes morales mandatées, doivent remplir
des conditions d'âge, d'honorabilité et de compétence
fixées par
décret
en concertation avec les professionnels
confrontés au démarchage bancaire et financier. Cette
troisième série de conditions constitue une avancée
majeure, puisqu'elle contribue à renforcer le statut et la
crédibilité professionnelle des démarcheurs, pour autant
que le décret prévu impose des conditions de qualification et
d'expérience suffisamment précises ;
En deuxième lieu, l'obligation de contracter une assurance
:
le dispositif proposé pour l'article L. 341-5 dispose ainsi que toute
personne physique ou morale mandatée doit être en mesure de
justifier à tout moment de l'existence d'un contrat d'assurance la
couvrant contre les conséquences pécuniaires de sa
responsabilité civile professionnelle, en cas de manquement à ses
obligations professionnelles. Le niveau minimal des garanties que cette
assurance doit apporter est fixé par décret, et est notamment
fonction du nombre de mandats détenus et des produits et services
concernés ;
En troisième lieu, l'obligation d'enregistrement des mandataires
personnes physiques auprès des autorités de régulation
compétentes
: le texte proposé pour l'article L. 341-6
dispose ainsi que les personnes morales mandantes ou les mandataires de niveau
intermédiaire font enregistrer en tant que démarcheurs, selon la
nature de leur activité auprès de l'AMF, du Comité des
établissements de crédit et des entreprises d'investissement
(CECEI) ou du Comité des entreprises d'assurance (CEA), les
salariés ou mandataires
à qui elles ont confié un
mandat de démarchage. Les mandants et mandataires de niveau
intermédiaire procèdent à cet enregistrement après
avoir vérifié que les personnes concernées satisfaisaient
aux conditions de capacité pénale et aux autres conditions
précédemment mentionnées (honorabilité,
compétence, assurance...).
Toutefois, le V de la rédaction proposée pour l'article L. 341-4
dispose que les modalités du mandat et les conditions d'âge,
d'honorabilité et de compétence des démarcheurs
ne
s'appliquent pas aux
« personnes physiques participant à
l'envoi en masse de documents nominatifs
, sous réserve
qu'elles n'aient aucun contact personnalisé permettant d'influencer le
choix de la personne démarchée. »
Les règles
de l'activité de démarchage s'imposent dans ce cas aux personnes
morales habilitées du premier niveau et celles mandatées du
niveau intermédiaire. Il s'agit en réalité de ne pas
soumettre au régime du démarchage le personnel impliqué
dans les activités de «
reporting
» et de
courrier, dès lors que ces personnes n'ont pas de contacts directs
(visuel ou par téléphone) avec des prospects ou clients
identifiés, qui soient susceptibles d'être assimilés
à du démarchage
571(
*
)
.
On peut cependant s'interroger sur la pertinence de cet encadrement, et
au-delà de l'obligation de déclaration, pour les salariés
démarcheurs d'entreprises déjà
réglementées
, en particulier celles visées au 1°
du texte proposé pour l'article L. 341-3. La réglementation dont
ces sociétés font déjà l'objet, jointe aux
obligations afférentes au démarchage, risque en effet de
créer des doublons et d'inutiles pesanteurs dans les contrôles. La
nécessité d'une protection efficace de l'épargnant est
néanmoins de nature à atténuer ces
réserves
572(
*
)
.
Les CIF personnes physiques qui se livrent au démarchage, aux termes du
troisième alinéa de ce même article L. 341-6, sollicitent
eux-mêmes leur enregistrement auprès de l'AMF, qui devient donc
l'autorité de tutelle pour cette catégorie de démarcheurs.
Cet enregistrement constitue un préalable à l'exercice du
démarchage, de telle sorte qu'il devrait être possible
d'éviter qu'un démarcheur non enregistré ne se
présente à une personne en prétendant être
enregistré de manière imminente.
Dans le cas du démarchage multicartes,
chaque personne morale
mandante doit séparément procéder à
l'enregistrement de ce mandataire
, comme c'est déjà le cas
aujourd'hui auprès des parquets.
L'article L. 341-6 prévoit également certaines
conséquences de l'enregistrement : l'autorité saisie
attribue un numéro d'enregistrement, qui doit être obligatoirement
communiqué par le démarcheur à toute personne
démarchée et doit figurer sur tous les documents qu'il est
susceptible de présenter. En outre lorsque des salariés ou
mandataires ne remplissent plus les conditions d'enregistrement, les personnes
morales mandantes qui les ont fait enregistrer doivent impérativement en
informer l'autorité concernée, ce qui contribue à
renforcer les obligations de surveillance des mandants.
Une innovation majeure du présent article réside dans la
constitution d'un fichier centralisé des
démarcheurs
573(
*
)
,
prévu par le dispositif proposé pour l'article L. 341-7 et tenu
conjointement par les trois autorités que sont l'AMF, le CECEI et le
CEA. Ce fichier est librement consultable par le public et ses modalités
de constitution sont fixées par décret. Ce point appelle
plusieurs commentaires :
- les modalités de la procédure d'enregistrement, d'information
dans les documents des démarcheurs, les délais éventuels
et les sanctions en cas de non respect seront fixées par l'AMF ;
- le fichier constitué à partir des enregistrements successifs ne
sera pleinement efficace que si les autorités compétentes lui
consacrent suffisamment de moyens humains et financiers et mettent en place un
système d'information interconnecté performant ;
- la consultation du fichier sur internet devra être rendue possible
dès sa constitution. Des procédures d'accès
sécurisé pour les professionnels à un éventail plus
large d'informations pourraient également être prévues.
En quatrième lieu, l'attribution et la présentation d'une
carte d'emploi pour les démarcheurs personnes physiques
: le
texte proposé par le présent article pour l'article L. 341-8
dispose que tout démarcheur qui se rend physiquement sur un lieu
visé par le régime du démarchage (domicile, lieu de
travail du démarché ou lieux non destinés à la
commercialisation de produits) doit être titulaire d'une carte de
démarchage délivrée par son mandant, et doit la
présenter à toute personne ainsi démarchée. Les
caractéristiques
574(
*
)
du
modèle de cette carte seront fixées par arrêté du
ministre chargé de l'économie.
Les dispositions qui précèdent sur l'architecture de la
chaîne des mandats et la procédure d'enregistrement peuvent
être résumées ainsi :
Le
système de mandataire dans la nouvelle législation
ORGANISMES DE CONTROLE ET DE RECENSEMENT : AMF, CECEI ; CEA
Fichier partagé des démarcheurs enregistrés
(enregistrement)
Conseillers en investissements financiers (personnes morales ou personnes
physiques)
Etablissements de crédit, entreprises d'investissement, entreprises
d'assurance
Entreprises, dans le cadre des dispositifs d'épargne salariale qu'elles
proposent à leurs salariés,
mais avec exclusion de la
majorité des règles du démarchage
NIVEAU 1
Etablissements
habilités à recourir
au démarchage
(article L. 341-3)
Les
salariés doivent détenir
une carte s'ils font du
démarchage à partir de
l'établissement ou
Personnes morales spécialisées recevant un ou plusieurs mandats
à l'extérieur de celui-ci
NIVEAU
2
(article L. 341-4)
Démarcheurs multicartes, disposant de plusieurs mandats
NIVEAU 3
Démarcheurs mandataires exclusifs
Démarcheurs
personnes
physiques
(démarchage)
(consultation du fichier)
EPARGNANT (personne physique ou personne morale, à l'exception des investisseurs qualifiés et des entreprises au-dessus de certains seuils quantitatifs)
:
démarchage : mandat : enregistrement auprès des
autorités
Enfin, en dernier lieu, le I du texte proposé pour l'article L. 341-9
impose une condition d'exercice pour les personnes physiques, tenant à
l'absence de condamnation définitive depuis au moins dix ans pour des
peines
n'ayant pas exclusivement trait à des infractions
financières :
- pour crime ;
- à une peine d'emprisonnement sans sursis d'au moins trois mois pour
divers délits et infractions, parmi lesquels le blanchiment,
l'escroquerie et l'abus de confiance, le recel, la corruption passive ou
active, le trafic de stupéfiants, le proxénétisme, la
banqueroute, la fraude fiscale, les infractions relatives aux chèques et
cartes de paiement mentionnées aux articles L. 163-2 à L. 163-4
et L. 163-7 du code monétaire et financier, l'abus de faiblesse
(articles L. 122-8 à L. 122-10 du code de la consommation), la
falsification, la tromperie et les délits connexes (articles L. 213-1
à L. 213-5 du code de la consommation), le délit d'initié
et l'entrave au fonctionnement régulier d'un marché financier
(articles L. 465-1 et L. 465-2 du code monétaire et financier), les
infractions relatives aux placements collectifs, les infractions relatives
à l'appel public à l'épargne, aux marchés
réglementés, aux négociations sur instruments financiers
et aux entreprises de marché et chambres de compensation (chapitres Ier
à IV du titre VI du livre IV du code monétaire et financier), et
les infractions relatives au secteur bancaire, aux prestataires de services
d'investissement, aux change manuel et au blanchiment de capitaux (titre VII du
livre V du code monétaire et financier).
L'ensemble de ces dispositions pénales, et en particulier la mention de
la prescription de dix ans, s'inspire de la rédaction retenue dans le
projet de loi portant ratification de l'ordonnance n° 2000-912 du 18
septembre 2000 relative à la partie législative du code de
commerce, déposé sur le bureau de l'assemblée nationale le
15 novembre 2000, mais jamais examiné ;
- à la destitution des fonctions d'officier public ou ministériel.
Le II du même article dispose qu'en cas de condamnation à une de
ces peines, les démarcheurs concernés doivent
cesser leur
activité
dans un délai d'un mois à compter de la date
de décision définitive de justice. Le III traite les cas de
condamnation par une juridiction étrangère : ainsi,
lorsqu'une telle condamnation est passée en force de chose jugée
pour une infraction constituant, selon la loi française, un crime ou
l'un des délits mentionnés précédemment, le
tribunal correctionnel du domicile du condamné prononce l'interdiction
d'exercice de l'activité de démarchage. Cette incapacité
s'applique également à toute personne ayant fait l'objet d'une
faillite personnelle prononcée par une juridiction
étrangère.
C. LES PRODUITS INTERDITS DE DÉMARCHAGE
Les nombreuses garanties et conditions décrites
précédemment contribuent à sécuriser
l'activité de démarchage et à inciter à un plus
grand sérieux et professionnalisme des démarcheurs. Elles ne
portent cependant pas sur les produits démarchés. Il
apparaît donc nécessaire que l'offre de produits soit
également encadrée en vue de prévenir une mauvaise
compréhension de la nature des produits proposés ou
d'empêcher les épargnants de prendre, même en connaissance
de cause (dès lors que les obligations d'information ont
été correctement remplies par le démarcheur), des risques
trop élevés dans le seul contexte du démarchage.
Les dispositions relatives aux produits interdits de démarchage reposent
sur deux types de critères et sur deux exclusions spécifiques,
exposés ci-après.
1. L'appréciation en termes de risque
Le 1° du texte proposé pour l'article L. 341-10 dispose que ne
peuvent faire l'objet de démarchage :
-
« les produits dont le risque maximum n'est pas connu au moment
de la souscription »
. Cette formulation peut a priori surprendre,
et laisser penser que les produits investis en actions et la majorité de
ceux investis en obligations, dont le risque potentiel de perte ne saurait
être précisément quantifié, seraient exclus du champ
du démarchage. Cela ne saurait cependant être le cas, dans la
mesure où c'est bien la notion de risque
maximum
qui importe. Or
ce dernier est connu dans le cas des actions et obligations, puisque la perte
potentielle maximale correspond à l'intégralité du prix
d'acquisition. Cela n'est cependant pas le cas pour des opérations sur
produits dérivés telles que ventes de
call
ou
swaps
de taux fixe contre taux variable. Le caractère technique et
risqué de ce type de produits justifie pleinement qu'ils soient exclus
du démarchage auprès de petites entreprises et a fortiori de
particuliers. En outre certains de ces instruments peuvent de toute
façon être proposés, hors du contexte du démarchage,
à des particuliers ou à des sociétés de taille
moyenne qui en éprouveraient le besoin au titre de leurs
activités commerciales, dans le cadre de l'appel public à
l'épargne (ainsi le marché réglementé Euronext cote
un grand nombre de produits dérivés accessibles aux investisseurs
non qualifiés) ou d'une relation contractuelle globale dans laquelle le
contrat de gestion stipulerait précisément que le recours
à ces produits est autorisé;
- les produits
« pour lesquels le risque de perte est
supérieur au montant de l'apport financier initial ».
Parmi ces produits figurent notamment des dérivés tels que les
ventes de
put
et les produits de couverture et d'action, qu'il est
logique d'exclure du démarchage, mais aussi les
parts de
sociétés civiles de placement immobilier (SCPI)
575(
*
)
, pour lesquelles le risque de
perte peut atteindre deux fois l'investissement initial. L'article L. 214-55 du
code monétaire et financier dispose en effet que
« la
responsabilité de chaque associé
(dont font partie les
porteurs de parts de SCPI)
à l'égard des tiers est
engagée en fonction de sa part dans le capital et dans la limite de deux
fois le montant de cette part »
.
2. Le critère de la non admission à la commercialisation sur
le territoire français et à la négociation sur les
marchés réglementés
Le 2° du texte proposé pour l'article L. 341-10
précité dispose, de façon tout à fait logique, que
sont interdits de démarchage :
-
les produits non admis à la commercialisation sur le territoire
français
, en application des dispositions de l'article L. 151-2 du
code monétaire et financier relatives à la réglementation
des relations financières entre la France et l'étranger
(dispositions concernant les procédures de contrôle et
autorisation préalables, le rapatriement des créances sur
l'étranger hors Communauté européenne, l'habilitation
d'intermédiaires et la régulation des investissements portant
atteinte à l'ordre public) ;
-
les produits qui ne sont pas admis aux négociations sur les
marchés réglementés ou les marchés étrangers
reconnus
, que sont les marchés réglementés des Etats
parties à l'accord sur l'Espace économique
européen
576(
*
)
et les
autres marchés étrangers reconnus dans des conditions
fixées par décret et sous réserve de
réciprocité
577(
*
)
.
Cette seconde catégorie est finalement assez restreinte, et ne comporte
pas les principales places internationales (New York Stock Exchange, NASDAQ et
marchés réglementés de Tokyo) en raison de l'absence
d'accord sur une reconnaissance réciproque.
Liste des marchés étrangers reconnus par arrêtés du ministre de l'économie
Etats-Unis 578( * ) |
20 septembre 1991 |
. Amex Commodities Corporation, New York |
|
. Chicago Board of Trade, Chicago |
|
. Chicago Mercantile Exchange, Chicago |
|
. Chicago Rice and Cotton Exchange, Chicago 579( * ) |
|
. Citrus Associate of the New York Cotton Exchange Inc, New York |
|
. Coffee, Sugar and Cocoa Exchange Inc, New York 580( * ) |
|
. Commodity Exchange Inc, New York 581( * ) |
|
. Kansas City Board of Trade, Kansas City |
|
. Mid America Commodity Exchange, Chicago 582( * ) |
|
. Minneapolis Grain Exchange, Minneapolis |
|
. New York Cotton Exchange, New York 583( * ) |
|
. New York Futures Exchange, New York |
|
. New York Mercantile Exchange, New York |
|
. Philadelphia Board of Trade, Inc, Philadelphia |
|
. Twin Cities Board of Trade, Minneapolis |
|
|
|
. Cantor Financial Futures Exchange |
11 octobre 1999 |
|
|
Royaume- Uni |
|
. London Commodity Exchange (LCE) 584( * ) |
28 juillet 1994 |
. London International Financial Futures and Options (LIFFE) 585( * ) |
|
. International Petroleum Exchange (IPE) |
|
Allemagne |
|
. Deutsche Termin Börse 586( * ) |
8 août 1994 |
Le
2° de la rédaction proposée pour l'article L. 341-10
précise également que les parts et actions
d'OPCVM
, qui ne
sont pas cotées sur des marchés réglementés mais
n'en sont pas moins des véhicules de placement très
diffusés, sont bien inclus dans le périmètre du
démarchage.
2. Le cas particulier des fonds communs de créances (FCC) et des
fonds communs d'investissement sur les marchés à terme (FCIMT)
Le 2° de la rédaction proposée pour l'article L. 341-10
exclut également les deux types de produits très
spécifiques que sont les FCIMT et FCC
, mentionnées
respectivement aux articles L. 214-42 et L. 214-43 du code monétaire et
financier.
Ces deux véhicules de placement présentent en effet
une évidente complexité et des risques spécifiques
.
Les
FCIMT
, également dénommés « fonds de
futures
» ont été introduits en 1988 et
investissent sur les marchés à terme de valeurs mobilières
ou de matières premières. Ils constituent une stratégie
particulière de « gestion alternative »
587(
*
)
et présentent à ce
titre des caractéristiques difficiles à appréhender pour
le profane. Il s'agit en outre d'une stratégie particulièrement
risquée dans l'univers de la gestion alternative, dans la mesure
où elle repose soit sur les options fondamentales du gestionnaire
(stratégie dite « discrétionnaire »), soit
sur des modèles d'analyse technique élaborés
(stratégie « systématique »), en vue de
prévoir l'évolution probable à court terme de
cours
588(
*
)
, et de prendre les
positions à l'achat ou à la vente susceptibles d'en retirer le
meilleur gain. Le rendement de ces fonds peut être momentanément
très élevé, mais leur volatilité l'est
également et les hypothèses économétriques du
modèle peuvent se révéler déterminantes. Les FCIMT
s'adressent donc à des investisseurs avertis et sont interdits de
publicité, de même qu'ils sont encadrés dans certaines
contraintes réglementaires strictes, telles que l'obligation d'investir
au moins la moitié du fonds sur le marché monétaire. Il
est donc naturel qu'ils soient interdits de démarchage. La ventilation
des FCIMT selon leur encours était la suivante en 2002 :
Encours en millions d'euros |
Encours |
|
||
> 100 M€ * |
Entre 10 et 100 M€ |
< à 10 M€ |
Total |
|
Nombre de FCIMT en 2002 |
2 |
11 |
16 |
29 |
Encours cumulé au 31/12/2002 |
368,5 |
413,8 |
54 |
836,3 |
Nombre de FCIMT en 2001 |
2 |
12 |
17 |
31 |
Encours cumulé au 31/12/2001 |
375,2 |
414,5 |
70,5 |
860,3 |
Source : Commission des opérations de bourse |
Le
fonds commun de créances
constitue un véhicule de
placement représentatif de la titrisation, coté ou non en bourse.
Il est, aux termes de l'article L. 214-43 du code monétaire et
financier,
« une copropriété qui a pour objet
exclusif d'acquérir des créances et d'émettre des parts
représentatives de ces créances. »
Un FCC peut
comporter deux ou plusieurs compartiments, chaque compartiment donnant lieu
à l'émission de parts représentatives des actifs du fonds
qui lui sont attribués. Bien que les FCC soient également des
instruments complexes, leur environnement juridique paraît assez
sécurisé. Les parts de FCC non cotés ne sont toutefois pas
liquides.
D. UN DISPOSITIF ÉTENDU SUR LES RÈGLES DE BONNE PRATIQUE
PROFESSIONNELLE
La section 4 du dispositif proposé par le présent article pour le
chapitre I
er
du titre IV du livre III du code monétaire et
financier traite des règles de bonne conduite que les démarcheurs
doivent respecter. Ces dispositions peuvent être regroupées en
trois catégories
selon une séquence chronologique.
1. Les obligations préalables à l'acte de démarchage
La rédaction proposée pour l'article L. 341-11 dispose
qu'
avant de formuler toute offre
, le démarcheur doit
s'enquérir de
« la situation financière de la
personne démarchée, de son expérience et de ses objectifs
en matière de placement ou de financement. »
Il s'agit
d'une obligation importante et susceptible de ménager des voies de
recours à l'investisseur en cas de conflit, puisque le démarcheur
est supposé agir en connaissance de cause. Cette disposition est aussi
utile au démarcheur puisqu'elle le contraint à accomplir un acte
qui relève de la bonne pratique et de la conscience professionnelles. En
sollicitant ces informations auprès de la personne
démarchée, le démarcheur prend immédiatement
connaissance du « profil » de son prospect et est plus
rapidement amené à lui faire une offre adaptée à
ses besoins.
Cette règle constitue donc un facteur responsabilisant
pour le démarcheur, mais aussi d'efficacité et de
professionnalisme dans son activité.
Le dispositif proposé dispose en outre que les démarcheurs
communiquent, d'une manière claire et compréhensible, les
informations qui sont utile à la personne démarchée pour
prendre sa décision. Cette obligation générale, qui
diffère de la précédente dans la mesure où le
démarcheur ne sollicite pas mais soumet des éléments
d'information, emporte une série de conséquences qui sont
précisées dans les dispositions suivantes de l'article. Parmi les
éléments d'aide à la décision pour la personne
démarchée, figurent ainsi la nature et l'identité de
l'organisme pour le compte duquel travaille le démarcheur, les
caractéristiques des produits ou services proposés, et les
modalités afférentes au contrat et au droit de
rétractation.
2. Les obligations d'information afférentes à l'acte de
démarchage
Plusieurs articles prévoient un certain nombre de règles
contraignantes que le démarcheur doit respecter lors de la soumission de
l'offre de produits ou services.
En premier lieu, l'article L. 341-12 du code monétaire et financier,
dans sa rédaction proposée par le présent article, impose
au démarcheur de
fournir à la personne démarchée
certaines informations par écrit, quel qu'en soit le support
. Il
peut donc s'agir par exemple d'un courrier, d'un document d'information, d'une
carte professionnelle ou d'un courrier électronique. Ces informations,
qui s'ajoutent aux obligations législatives et réglementaires
spécifiques propres à chaque catégorie d'instruments
financiers ou de service, sont les suivantes :
- le nom, l'adresse et le numéro d'enregistrement de la personne
physique procédant au démarchage ;
- le nom et l'adresse de la ou des (dans le cas du démarchage
multicartes) personnes morales habilitées, ou le nom, l'adresse et le
numéro d'enregistrement de la personne morale mandatée (de niveau
intermédiaire), si le démarchage est effectué pour le
compte d'une telle personne ;
- les
documents d'information particuliers relatifs aux produits,
instruments financiers et services proposés
requis par les
dispositions législatives et réglementaires en vigueur (tels que
la notice d'information visée par la COB). En l'absence de tels
documents, une notice d'information sur chacun des produits, instruments
financiers et services proposés demeure requise. Cette notice est
élaborée sous la responsabilité de la personne ou de
l'établissement qui a recours au démarchage, et doit mentionner
le cas échéant les risques particuliers inhérents à
l'offre. Cette obligation d'information est d'une grande importance, car elle
détermine l'appréciation que la personne démarchée
peut porter tant sur l'adéquation de l'offre que sur la
crédibilité des propos du démarcheur ;
- les conditions de l'offre contractuelle et les modalités de conclusion
du contrat, en particulier son lieu et sa date de signature. Outre les
modalités de rétractation, qui font l'objet d'une obligation
particulière, ces conditions comprennent par exemple la durée,
les modalités d'achat ou de cession, les éventuelles
possibilités ultérieures d'avenants à l'offre, ou les
modalités de rémunération (frais, honoraires et
commissions) ;
- enfin l'absence ou l'existence d'un droit de rétractation ainsi que
ses modalités d'exercice.
En deuxième lieu, le texte proposé pour l'article L. 341-13
dispose qu'un démarcheur ne peut proposer des produits, instruments et
services autres que ceux pour lesquels il a reçu mandat explicite de
démarchage.
En troisième lieu, l'article L. 341-14 disposerait que le contrat
portant sur les services et opérations visées à l'article
L. 341-1 (services d'investissements et services connexes, opérations de
banque, sur biens divers et sur instruments financiers) est conclu entre la
personne démarchée et le fournisseur habilité de ces
produits ou services,
sans que le démarcheur puisse le signer ou nom
et pour le compte d'une personne morale intermédiaire pour le compte de
laquelle il agirait
. L'existence et le nom de ce mandant
intermédiaire doivent donc être mentionnés à la
personne démarchée, mais il n'est pas visé par le contrat.
Enfin, l'article L. 341-15 disposerait qu'il est interdit au démarcheur
de recevoir des personnes démarchées un quelconque moyen de
paiement, tel qu'espèces, effets de commerce, valeurs ou chèques
au porteur ou à son nom.
3. Les obligations postérieures à l'acte de
démarchage : les délais de réflexion et de
rétractation
Le régime du démarchage proposé par le présent
article prévoit l'existence d'un délai de
rétractation
de droit commun au profit de la personne
démarchée, qui s'applique sans pénalité et sans que
cette personne soit tenue d'en indiquer les motifs. Les modalités de ce
délai, qui constitue une garantie essentielle pour l'épargnant,
sont précisées par le texte proposé pour l'article L.
341-16 :
- sa durée est de
quatorze jours
589(
*
)
, ce qui peut être
considéré comme relativement long mais est conforme aux
dispositions de l'article 6 de la directive européenne 2002/65/CE du 23
septembre 2002 concernant la commercialisation à distance de services
financiers auprès des consommateurs. Ce délai court à
compter de la date de réception par la personne démarchée
du contrat signé par les deux parties. Si le délai de
réflexion ou de rétractation expire un samedi, un dimanche ou un
jour férié chômé, il est prorogé jusqu'au
premier jour ouvrable suivant. Le contrat doit comporter un formulaire, dont
les mentions obligatoires sont précisées par décret,
destiné à faciliter l'exercice de cette faculté de
rétractation;
- l'exercice du droit de rétractation ne saurait être soumis
à un quelconque versement de frais ou commissions. La personne
démarchée doit néanmoins payer le prix correspondant
à l'utilisation du produit ou service fourni entre la date de conclusion
de contrat et celle de l'exercice du droit de rétractation (ce
délai intermédiaire comprend donc le temps d'acheminement du
contrat à la personne démarchée). En outre,
l'exécution des contrats portant sur des services de conservation,
d'administration et de gestion de portefeuille pour compte de tiers est
différée pendant la durée de ce droit.
Trois types d'exceptions
à ce délai de rétractation
sont prévues :
- les services de réception-transmission et d'exécution d'ordres
pour le compte de tiers ;
- la fourniture d'instruments financiers ;
-
lorsque des dispositions spécifiques prévoient un
délai de réflexion ou de rétractation de durée
différente pour certains produits et services
. Il est en effet
logique que ces délais ne s'appliquent pas aux produits et services dont
le prix fluctue en fonction des variations du marché de
référence, tels que les produits financiers cotés et les
OPCVM, afin d'éviter toute tentation de spéculation dans
l'intervalle. En outre le code de la consommation prévoit certains
délais spécifiques de rétractation, et dans le cas des
produits financiers régit les délais relatifs aux
différents types de crédits. La directive européenne du 23
septembre 2002 sur les services financiers à distance mentionne par
ailleurs dans son article 6-2 une série de produits pour lesquels le
droit de rétractation ne s'applique pas : les opérations de
change, instruments du marché monétaire, titres
négociables, parts d'OPCVM, contrats financiers à terme, contrats
sur taux d'intérêt, swaps de taux ou devises et les options. Cette
liste est compatible avec les dispositions du présent projet de loi,
pour autant qu'il s'agisse de produits éligibles au démarchage.
Enfin, un
délai de réflexion de quarante-huit
heures
590(
*
)
au profit de la
personne démarchée est requis lorsque l'activité de
démarchage a lieu à son domicile, son lieu de travail ou dans un
lieu non destiné à la commercialisation, et qu'il porte sur la
fourniture d'instruments financiers ou de services de
réception-transmission et exécution d'ordres pour le compte de
tiers. Ce délai de réflexion court à compter du lendemain
de la remise d'une lettre recommandée avec avis de réception
établissant la communication à la personne
démarchée, par écrit sur support papier, de l'ensemble des
informations afférentes à l'acte de démarchage et
précédemment mentionnées. Le silence de la personne
démarchée à l'issue de ce délai ne vaut pas
consentement, celui-ci doit donc être explicitement requis.
La réglementation actuellement en vigueur sur les délais de
réflexion et de rétractation afférents à tous les
types de démarchage peut être résumée dans le
tableau suivant :
Types de contrats |
Délais de réflexion ou de rétractation |
Modalités de renonciation |
Crédit à la consommation |
Rétractation : 7 jours
|
Renvoi sous 7 jours du formulaire détachable à l'organisme prêteur, sous pli recommandé avec avis de réception |
Immobilier Contrat de prêt |
Réflexion : 10 jours obligatoires à compter de la réception de l'offre préalable de crédit. Signature interdite avant le terme. |
Par lettre recommandée avec avis de réception |
Renégociation par voie d'avenant au contrat de prêt |
Réflexion : 10 jours à compter de la réception du projet d'avenant |
Par lettre recommandée avec avis de réception |
Construction et acquisition d'un logement à usage d'habitation (comptant ou crédit) |
Rétractation :
7 jours
|
Par lettre recommandée avec avis de réception |
Démarchage à domicile |
Rétractation :
7 jours
591(
*
)
|
Renvoi sous pli recommandé avec avis de réception, dans les délais, du formulaire détachable OBLIGATOIREMENT joint au contrat. |
Ventes à distance (Télé-achat, minitel, audiotel, internet...) |
Rétractation : 7 jours
|
Renvoi, durant le délai, du produit pour échange ou remboursement sans pénalité, à l'exception des frais de retour. |
Enseignement à distance |
Réflexion :
7 jours obligatoires
|
Par lettre recommandée avec avis de réception |
Assurance vie |
Rétractation : 30 jours
|
Par
lettre recommandée avec AR.
|
Source : Direction générale de la
concurrence,
de la consommation et de la répression des fraudes
E. DES SANCTIONS DISCIPLINAIRES ET PÉCUNIAIRES ALIGNÉES SUR LE
DROIT COMMUN
Le texte proposé pour l'article L. 341-17 du code monétaire et
financier dispose que les manquements aux lois, règlements et
obligations professionnelles applicables au démarchage bancaire ou
financier sont sanctionnés, selon des modalités d'application
fixées par décret, par la commission bancaire et l'AMF ou par la
commission de contrôle des assurances, des mutuelles et des institutions
de prévoyance, dans les conditions afférentes à chaque
catégorie de démarcheur et de mandant (prestataires de services
d'investissement, conseillers en investissements financiers et entreprises
d'assurance) :
- aux termes de l'article L. 613-21, qui pose des conditions communes à
plusieurs activités, la
commission bancaire
peut sanctionner un
prestataire de services d'investissement (établissement de crédit
et entreprise d'investissement) qui a enfreint la réglementation, n'a
pas répondu à une recommandation ou n'a pas tenu compte d'une
mise en garde, et en informe l'AMF. La gradation de ces sanctions
disciplinaires encourues est alors la suivante : avertissement,
blâme, interdiction d'effectuer certaines opérations et toutes
autres limitations dans l'exercice de l'activité, la suspension
temporaire d'un ou plusieurs de ses dirigeants, la démission d'office de
l'une ou plusieurs de ces mêmes personnes, et la radiation de ce
prestataire d'investissement de la liste des établissements
agréés.
La commission bancaire peut en outre prononcer, à la place ou en sus de
ces sanctions, une
sanction pécuniaire
versée au budget de
l'Etat et plafonnée au capital minimum auquel est astreinte la personne
morale sanctionnée, et peut également décider d'interdire
ou de limiter la distribution d'un dividende ou d'une
rémunération des parts sociales. Enfin la commission bancaire
peut décider la publication de l'ensemble de ces sanctions, aux frais de
la personne morale sanctionnée ;
- le texte proposé pour l'article L. 621-15 par l'article 14 du
présent projet de loi expose la procédure d'instruction par le
collège de l'AMF
du rapport d'enquête ou de contrôle
établi par les services de cette même institution, ainsi que les
modalités de la procédure de sanction applicable par la
commission des sanctions et le collège. De même l'article L.
621-17 du code monétaire et financier dispose que lorsqu'une pratique
est de nature à porter atteinte aux droits des épargnants, le
président de l'AMF peut demander au président du tribunal de
grande instance de Paris de statuer en référés pour mettre
fin à l'irrégularité constatée. En outre, la
rédaction proposée par l'article 10 du présent projet de
loi pour le II de l'article L. 621-9 dispose que l'AMF veille au respect des
obligations professionnelles auxquelles sont astreintes en vertu des
dispositions législatives et réglementaires les personnes
habilitées à procéder au démarchage ;
- enfin, l'article L. 310-18 du code des assurances, dans sa rédaction
proposée par l'article 28 du présent projet de loi, dispose que
la commission de
contrôle des assurances, des mutuelles et des
institutions de prévoyance (CCAMIP)
, au même titre que la
commission bancaire, peut prononcer des sanctions disciplinaires à
l'encontre d'une entreprise d'assurance, ou de ses dirigeants, qui aurait
enfreint une disposition législative ou réglementaire ou aurait
eu recours à des pratiques mettant en péril sa marge de
solvabilité. Ces sanctions sont, en fonction de la gravité du
manquement : l'avertissement, le blâme, l'interdiction d'effectuer
certaines opérations et toutes autres limitations dans l'exercice de
l'activité, la suspension temporaire ou la démission d'office
d'un ou plusieurs dirigeants de l'entreprise, le retrait total ou partiel
d'agrément ou d'autorisation, et le transfert d'office de tout ou partie
du portefeuille des contrats.
La CCAMIP peut en outre décider de reporter sa décision à
l'issue d'un délai qu'elle impartit à l'entreprise, pour prendre
toute mesure susceptible de mettre fin aux manquements ou pratiques
précédemment mentionnés. Elle peut prononcer une sanction
pécuniaire, versée au Trésor Public, à la place ou
en sus de ces sanctions. Le montant de cette sanction pécuniaire doit
être proportionné et ne peut excéder 3% du chiffre
d'affaires hors taxes réalisé au cours du dernier exercice clos
calculé sur une période de douze mois. Ce maximum est cependant
porté à 5% en cas de récidive. La commission de
contrôle des assurances statue après une procédure
contradictoire, et les personnes sanctionnées peuvent, dans le
délai de deux mois qui suit la notification de la décision,
former un recours de pleine juridiction devant le Conseil d'Etat. La commission
peut enfin ordonner, aux frais de l'entreprise sanctionnée, l'insertion
de sa décision dans trois journaux ou publications qu'elle
désigne et l'affichage dans les lieux et pour la durée qu'elle
indique.
Les sanctions professionnelles présentent l'avantage de pouvoir
être mises en oeuvre plus rapidement que les sanctions pénales, et
sont souvent d'un effet aussi dissuasif.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Votre commission approuve le nouveau régime du démarchage
introduit par le présent article, qui devrait contribuer à
clarifier les modalités du démarchage, à responsabiliser
les acteurs et à mieux protéger les épargnants. En outre,
ce dispositif vient après de longues années d'attente et
répond à un certain consensus sur les nombreuses imperfections et
sur le manque de lisibilité de la réglementation actuelle.
Les amendements qu'elle vous soumet s'inscrivent dans une double optique de
renforcement des garanties pour les épargnants et de pragmatisme au
regard des acteurs du démarchage, c'est-à-dire des personnes
susceptibles d'y recourir comme des clients potentiels.
A. CLARIFIER LES OPÉRATIONS ET ACTEURS DU DÉMARCHAGE
1. L'inclusion dans le champ du démarchage
Le texte proposé pour l'article L. 341-1 du code monétaire et
financier donne la liste des opérations concernées par
l'activité de démarchage : opérations sur instruments
financiers, opérations de banque et connexes, services d'investissement
et connexes, et opérations sur biens divers.
Cette liste pourrait être utilement complétée par
la
fourniture de prestations de conseil en investissement
, dans la mesure
où les conseillers en investissements financiers figurent dans la liste
des personnes habilitées à recourir au
démarchage
592(
*
)
. Il
conviendrait cependant de préciser que les CIF en tant que tels ne sont
habilités qu'à démarcher des prestations de conseil. Pour
démarcher des produits, il est nécessaire qu'ils soient
mandatés par une personne habilitée, comme les autres
démarcheurs, dans les conditions prévues par le présent
article
593(
*
)
.
Votre commission vous soumet donc deux
amendements
:
- le premier tendant à créer une
cinquième
catégorie d'opérations visées par le démarchage
dans le texte de l'article L. 341-1 du code monétaire et financier,
consistant en la fourniture par un CIF d'une prestation de conseil en
investissement ;
- le second, au texte proposé pour le 3° de l'article L. 341-3 du
même code, tendant à
préciser le champ de l'habilitation
des CIF au démarchage
: les CIF en tant que tels ne peuvent
être habilités qu'à démarcher directement des
prestations de conseil.
Le dispositif proposé pour l'article L. 341-3 du code monétaire
et financier n'inscrit pas les mutuelles parmi les personnes habilitées
à procéder au démarchage, ce qui est susceptible de porter
préjudice à une catégorie spécifique de mutuelles.
Les mutuelles régies par les dispositions du livre II du code de la
mutualité, que sont
les mutuelles et unions pratiquant des
opérations d'assurance et de capitalisation
, relèvent en
effet du même statut communautaire d'« entreprise
d'assurance » que les sociétés d'assurance
régies par le code des assurances, qui sont pour leur part
habilitées à procéder au démarchage. Ces mutuelles
sont ainsi soumises aux mêmes règles de sécurité
financière et à la même autorité de
contrôle
594(
*
)
que les
sociétés d'assurance, et sont donc fondées à
exercer une activité de démarchage au même titre que ces
dernières.
Votre commission vous propose donc un
amendement
au texte de l'article
L. 341-3 en vue de faire figurer les mutuelles et unions agréées
pour gérer les activités régies par les dispositions du
livre II du code de la mutualité parmi les personnes habilitées
à recourir au démarchage. Par souci de cohérence, votre
commission vous propose également un
amendement
tendant à
faire figurer, dans le texte proposé pour l'article L. 341-6,
l'autorité chargée d'accorder l'agrément à cette
catégorie de mutuelles dans la liste des autorités
d'enregistrement des démarcheurs.
Le dispositif du démarchage manifeste une lacune susceptible de nuire
à la protection du particulier ou de créer un doute sur le
critère de sollicitation, dans le cas de
démarches
effectuées dans ou à proximité de magasins de grande
surface
595(
*
)
. Les
consommateurs se voient en effet parfois proposer des cartes de paiement dont
les modalités d'usage (paiement différé avec un taux de
crédit élevé, "réserve automatique d'argent"
portant un taux, frais d'assurance parfois inclus d'office sans réelle
communication préalable) et les conditions d'offre se
révèlent parfois abusives, et qui doivent en tout état de
cause être soumises à la réglementation sur le
démarchage. Il en va de même pour les produits financiers
proposés par les filiales financières de sociétés
de grande distribution à des "stands" souvent situés à
l'entrée même du supermarché. Ces services financiers sont
généralement fournis par des filiales des entreprises de grande
distribution ou des sociétés financières qui leur sont
contractuellement liées, dans la mesure où ces dernières
ne peuvent constituer en tant que telles des établissements de
crédit ou des entreprises d'investissement.
Un cas fréquent de situation ambiguë au regard du régime du
démarchage se présente lorsqu'un
client de grand magasin ou de
grande surface se voit proposer une telle carte de paiement
au moment de
son passage en caisse, et est invité à obtenir de plus amples
renseignements ou à remplir diverses formalités dans un bureau ou
stand dédié aux services financiers, situé dans les locaux
ou à proximité immédiate du magasin. L'incertitude tient
en effet à ce que :
- la démarche de proposition effectuée par le responsable de
caisse relèverait
a priori
du démarchage ;
- mais le fait pour le client de se rendre dans les locaux financiers ne serait
pas soumis au régime du démarchage, car les critères de
non-sollicitation (le client se rend dans les locaux de sa propre initiative,
même si la démarche originelle revient à 'un responsable de
caisse) et de lieux (il ne s'agit ni du domicile ou du lieu de travail de la
personne démarchée, ni d'un lieu non destiné à la
vente de produits et services financiers) ne s'appliqueraient pas.
L'insertion ou la non-insertion de cette situation dans le champ du
démarchage supposerait donc de pouvoir établir une distinction
claire entre la démarche du responsable de caisse et celle du client,
qui paraît malaisée à établir et source de
contentieux préjudiciable à la protection du consommateur.
Votre commission vous propose donc un
amendement
tendant à lever
cette ambiguïté en
assimilant à du démarchage
toute prise de contact, quelle que soit la personne à l'origine de la
démarche, dans les bureaux de ces services financiers, lorsque ces
derniers sont implantés sur le même site ou à
proximité immédiate d'établissements grande
distribution
. Une telle disposition constituerait une protection importante
pour le consommateur, dont on ne saurait nier la vulnérabilité
dans ce genre de situation : l' « effet de surprise » de la
proposition peut en effet intimider le client ou l'empêcher de
préciser les arguments qu'il pourrait légitimement opposer
à la fourniture de ce type de carte ou produit.
2. L'exclusion du champ du démarchage
A contrario
, certaines activités mériteraient de figurer
dans la liste des situations et opérations ne pouvant pas faire l'objet
de démarchage bancaire et financier, telle qu'elle est mentionnée
dans le texte proposé pour l'article L. 341-2.
Le dispositif
proposé est en particulier parfois susceptible de porter
préjudice aux
crédits affectés
596(
*
)
et à la location-vente
. En
effet, lorsque le financement à crédit est lié à
l'achat d'un bien de consommation particulier, l'opération de
crédit proposée par le vendeur (par exemple dans une concession
automobile) qui agit pour le compte de l'établissement financier de
l'entreprise qui produit les biens est subordonnée à
l'activité principale de vente. La location-vente et la location avec
option d'achat s'inscrivent dans le même contexte, en ce qu'elles
constituent une modalité de financement d'un bien
déterminé. Ainsi, les agents commerciaux qui offrent
fréquemment au consommateur la possibilité de financer leur achat
par un crédit n'exercent pas, au sens du projet de loi, une
activité de démarchage bancaire et financier à titre
professionnel, mais seulement à titre accessoire. Ce caractère
accessoire est pris en compte par l'actuelle législation : l'article L.
341-5 du code monétaire et financier exonère de l'obligation de
détenir une carte de démarchage les démarcheurs qui, pour
le compte d'un établissement de crédit, proposent des contrats de
financement, à la condition que le nom du prêteur et le coût
du crédit soient mentionnés dans le contrat.
En outre, le crédit affecté à l'achat d'une voiture est
aujourd'hui soumis aux dispositions du code de la consommation relatives au
crédit affecté (articles L. 311-15 à L. 311-17 et L.
311-24), qui prévoient un certain nombre de
garanties
, notamment
un délai de rétractation de sept jours, pouvant être
ramené à trois jours si l'acheteur demande expressément la
livraison immédiate du bien. Toute vente réalisée en
dehors des locaux commerciaux est également soumise aux règles de
droit commun du démarchage à domicile des biens de consommation
(qui se distingue du démarchage bancaire et financier), qui
prévoient également un délai de rétractation de
sept jours et l'interdiction pour le vendeur représentant
l'établissement de crédit de recevoir des fonds avant
l'expiration de ce délai (articles L. 121-25 et L. 121-26 du code de la
consommation).
Votre commission vous propose donc un
amendement
tendant à
insérer dans le texte proposé pour l'article L. 341-3
deux
nouvelles catégories d'activités auxquelles le régime du
démarchage ne s'applique pas
: les démarches
effectuées, pour le compte d'un établissement de crédit,
en vue de proposer un contrat de crédit affecté, et celles
relatives à un contrat de location-vente ou de location avec option
d'achat. Cet amendement tend également à prévoir une
disposition particulière pour les contrats de financement de vente
à tempérament pour des biens à usage professionnel acquis
par une personne physique ou morale (à la condition que le nom de
l'établissement prêteur et le coût du crédit soient
mentionnés, ainsi que le prévoit la législation actuelle).
B. PRÉVOIR UNE DÉFINITION PLUS OPÉRATIONNELLE DES
INVESTISSEURS NON CONCERNÉS PAR LE DÉMARCHAGE
1. Prévoir un critère de l'investisseur professionnel
Le 1° du texte proposé pour l'article L. 341-2 prévoit que
les règles du démarchage bancaire ou financier ne s'appliquent
pas aux investisseurs qualifiés ni aux sociétés
commerciales dont le total de bilan, le chiffre d'affaires ou les effectifs
sont supérieurs à un seuil fixé par décret.
Ces critères quantitatifs sont susceptibles de faciliter l'adaptation du
démarchage à la réalité de la pratique
financière des investisseurs, mais pourraient aboutir à
décrédibiliser la notion d'investisseur qualifié
telle qu'elle est entendue en France, ne serait-ce que parce qu'ils tendent
à intégrer dans la loi les critères qui ne relèvent
aujourd'hui que d'une simple faculté déclarative pour les
investisseurs
597(
*
)
, ainsi que
le dispose l'article L. 411-2 du code monétaire et financier. En outre,
la référence aux investisseurs qualifiés, qui constituent
une notion avant tout liée à l'appel public à
l'épargne, tend à lier de manière impropre les
réglementations relatives aux deux contextes différents que sont
l'appel public à l'épargne et le démarchage (dans laquelle
les établissements ayant recours à ce procédé n'ont
pas la qualité d'émetteur ni de cédant).Les
critères quantitatifs, inspirés de la définition
européenne des PME, sont également susceptibles de créer
des
effets de seuil
sans prendre en compte la compétence
réelle de l'entreprise.
Le dispositif proposé est donc susceptible de soumettre au régime
du démarchage des situations dans lesquelles la personne
prospectée détient une pratique et une connaissance
significatives des instruments financiers. Tel est par exemple le cas de
petites entreprises fortement exportatrices, présentant un chiffre
d'affaires ou des effectifs inférieurs aux seuils requis mais utilisant
régulièrement des instruments de couverture ou des produits
financiers complexes.
A contrario
, il ne serait pas non plus souhaitable
d'exclure d'emblée l'ensemble des personnes morales du champ du
démarchage, comme c'est le cas dans la réglementation actuelle,
dans la mesure où nombre d'entreprises n'ont, du fait de leur taille
réduite (entreprises unipersonnelles ou très petites
sociétés) ou de leur activité, qu'une compétence
réduite ou inexistante en matière de placements financiers et
présentent donc une vulnérabilité proche de celle de
l'épargnant non averti personne physique.
Il conviendrait donc de mettre en place un critère qualitatif
transversal, qui soit plus conforme aux compétences réelles des
investisseurs personnes morales et inscrive néanmoins dans le cadre
protecteur du démarchage toute relation entre une partie
« forte » (le démarcheur) et une partie
« faible ».
Votre commission propose donc que se
substitue à ces critères quantitatifs un critère
d'activité, exercée à titre professionnel,
d'opérations sur les instruments financiers, dont le contenu serait
précisé par décret.
Il s'agirait ainsi d'exclure du
champ du démarchage les personnes morales présentant des
caractéristiques quantitatives éventuellement inférieures
aux seuils mentionnés dans le présent projet de loi, mais dont au
moins une partie de l'activité professionnelle et des salariés
seraient dédiés aux opérations d'investissement et
feraient l'objet d'offres de services et produits. A titre d'exemple, une
entreprise de plomberie, même dotée d'un chiffre d'affaires
conséquent et de quelques salariés, s'inscrirait dans le
périmètre du démarchage dès lors que ses
activités premières ou connexes ne seraient pas liées aux
opérations sur les marchés et services financiers. En revanche,
les démarches qui viseraient une entreprise de taille moyenne
réalisant un chiffre d'affaires inférieur au seuil
réglementaire prévu mais disposant d'un service financier plus ou
moins étoffé et exclusivement dédié à titre
professionnel aux opérations bancaires et financières, dont elle
détiendrait une expérience et une connaissance abouties,
n'auraient pas lieu de relever du démarchage bancaire ou financier dans
la mesure où la personne morale prospectée exerce, parmi ses
attributions, une activité professionnelle d'investissement.
Ce critère d'opérations financières exercées
à titre professionnel a en outre déjà été
invoqué par la jurisprudence administrative
. Le Conseil d'Etat, dans
son arrêt
Boniface
du 14 février 2001 relatif à un
contentieux fiscal, a en effet eu recours à cette notion et pour
définir par analogie les opérations de bourse effectuées
à titre habituel
598(
*
)
par un particulier. Cette référence à l'activité de
placement exercée à titre professionnel pourrait donc être
utilement reprise dans le présent projet de loi. Elle
présenterait en outre l'avantage de rapprocher la législation
française de la notion d'« investisseur
professionnel » proposée en 2002 par CESR
599(
*
)
, qui est plus complète et
opératoire que celle d'investisseur qualifié.
Votre commission vous propose un
amendement
tendant à
insérer dans le 1° du texte proposé pour l'article L. 341-2
un
critère qualitatif d'activité professionnelle emportant
exclusion du champ du démarchage
.
2. Aménager le régime du démarchage au regard de
l'épargne d'entreprise
Le dispositif proposé comporte un certain nombre d'obstacles au
développement de l'épargne d'entreprise, qui présente la
particularité d'être deux fois intermédiée, à
la différence d'autres produits d'épargne, puisqu'une
société de gestion peut démarcher une entreprise, qui
elle-même démarche ses salariés. Considérant que
l'intention du législateur est bien de dispenser les dispositifs
d'épargne salariale de la majorité des obligations relatives au
démarchage, il convient de s'assurer de la cohérence du
régime proposé, tout en
maintenant
les plans
d'épargne interentreprises
600(
*
)
(PEI) dans le champ du
démarchage
, dans la mesure où ces plans ne se distinguent
finalement guère d'un plan d'épargne en actions et peuvent
être institués par un accord collectif (organisations syndicales
de salariés et d'employeurs pour un PEI sur une base géographique
ou professionnelle), sans que les plus petites entreprises concernées
par un tel accord n'aient réellement entrepris de démarche
volontaire en ce sens. Ainsi un salarié d'une PME
601(
*
)
couverte par un accord portant sur un
PEI peut se voir proposer ce type de produits sans être
particulièrement informé de son existence et de son contenu, et
se trouve dès lors dans une situation semblable à celle du
démarchage financier « classique ».
Le texte proposé pour l'article L. 341-3 du code monétaire et
financier dispose que les entreprises sont exonérées de la
majorité des obligations relatives au démarchage lorsqu'elles
proposent à leurs salariés des produits d'épargne
salariale. Cet assouplissement de la réglementation est cependant trop
restrictif sur deux points
602(
*
)
:
- il ne couvre ni les salariés des filiales et sociétés
liées
603(
*
)
, ni les
anciens salariés, les retraités et les mandataires sociaux des
petites entreprises. Il convient donc de mentionner plutôt les
bénéficiaires
de ces dispositifs ;
- il est en outre fréquent que les entreprises ne sollicitent pas
directement les bénéficiaires sur les possibilités
d'épargne d'entreprise qui leur sont offertes, mais mandatent une
personne morale
(telle qu'une société de gestion teneur de
compte conservateur de parts ou une institution de prévoyance proche de
l'entreprise ou du groupe) pour promouvoir et distribuer le dispositif conclu.
Ces personnes morales désignées par l'entreprise doivent
également pouvoir bénéficier des exemptions relatives au
démarchage.
Votre commission vous soumet un
amendement
au 2° du texte
proposé pour l'article L. 341-3, tendant à
inclure l'ensemble
des bénéficiaires ainsi que les personnes morales
désignées par l'entreprise signataire pour proposer un plan
d'épargne salariale
dans le dispositif exonérant de la
majeure partie des obligations relatives au démarchage ces
sollicitations au titre de l'épargne d'entreprise et des comptes
épargne temps.
Il importe que les salariés et bénéficiaires potentiels
de plans d'épargne salariale
puissent également être
démarchés lorsque leur entreprise a fait l'objet d'une
condamnation
, ce que ne permet pas, en tout cas de manière directe,
le dispositif proposé puisque les seules dispositions du
démarchage applicables à l'épargne salariale sont celles
relatives aux capacités et sanctions pénales. Une entreprise
condamnée peut néanmoins avoir indirectement recours au
démarchage en mandatant une personne morale intermédiaire.
Les exemptions prévues par le présent article aux produits
interdits de démarchage ne comprennent pas les titres de
sociétés non cotées qui peuvent être
légalement proposés
604(
*
)
aux bénéficiaires d'un
dispositif d'épargne salariale. Il convient donc d'intégrer ces
titres dans les produits pouvant faire l'objet de démarchage.
Votre commission vous soumet donc un
amendement
tendant à exclure
du champ des produits interdits de démarchage les titres visés
aux articles L. 442-5 et L. 442-3 du code du travail proposés dans le
cadre d'un dispositif d`épargne salariale.
C. INCLURE DANS LE CHAMP DU DÉMARCHAGE LES TITRES DE
SOCIÉTÉS DEVANT FAIRE L'OBJET D'UNE INTRODUCTION EN BOURSE
Le dispositif proposé par le présent article pour l'article L.
341-10 du code monétaire et financier mentionne les produits qui ne
peuvent faire l'objet de démarchage. Il exclut notamment d'emblée
certains produits financiers, dès lors qu'ils ne sont pas admis à
la commercialisation sur le territoire français et à la
négociation sur les marchés réglementés, à
l'exception des OPCVM dont on considère de façon assez logique,
bien qu'ils ne soient pas cotés sur des marchés
réglementés, qu'ils doivent pouvoir être
démarchés.
Ce dispositif raisonnable comporte néanmoins un oubli : il ne
prévoit pas la possibilité de démarcher des
titres de
sociétés en voie d'introduction sur un marché
français réglementé, qui ne sont par définition pas
encore cotées
. Dès lors, il serait par exemple interdit de
proposer la souscription d'actions d'entreprises publiques ouvrant leur
capital. Une telle situation constituerait à l'évidence un recul
par rapport au droit actuel.
Votre commission vous propose donc un
amendement
tendant à
inclure dans le périmètre du démarchage, après
obtention du visa de l'AMF, les titres de sociétés admises
à faire l'objet de négociations sur un marché
réglementé français.
D. ACCROITRE LES OBLIGATIONS D'INFORMATION DES DÉMARCHEURS AUX
MANDANTS ET AUX PERSONNES DÉMARCHÉES
En matière d'information des démarcheurs aux mandants et aux
personnes démarchées, votre commission vous propose de modifier
le dispositif proposé sur les points suivants :
- le nouveau régime proposé pour le démarchage
intègre dans la législation la possibilité du
démarchage « multicartes », qui existait
déjà assez largement dans la pratique. Votre commission vous
soumet un
amendement
tendant à obliger les démarcheurs
à informer leurs mandants de l'ensemble de leurs mandats, afin que les
établissements mandants puissent le cas échéant clarifier
les responsabilités qui leur incombent, eu égard notamment aux
produits autorisés et aux conditions d'exercice ;
-
le texte proposé pour l'article L. 341-11 dispose que les
démarcheurs communiquent à la personne démarchée,
«
d'une manière claire et compréhensible, les
informations qui lui sont utiles pour prendre sa
décision
».
Cette rédaction pourrait être
modifiée pour renforcer les garanties de symétrie de la relation
et de bonne compréhension de l'offre de produits par la personne
démarchée
. Il s'agirait, tout en restant dans le cadre d'un
principe de portée générale, de dépasser le
formalisme de l'information livrée par le démarcheur pour inciter
ce dernier à s'assurer, de manière pédagogique, que la
personne démarchée a bien compris l'ensemble de l'offre qui lui
est soumise.
Votre commission vous propose un
amendement
visant à
requérir des démarcheurs qu'ils s'assurent avec diligence de la
bonne compréhension par la personne démarchée de
l'ensemble des modalités et risques inhérents à l'offre de
produits ou services ;
- le 5° du texte proposé par le présent article pour
l'article L. 341-12 dispose que le démarcheur fournit à la
personne démarchée les informations relatives aux conditions de
l'offre contractuelle et aux modalités de conclusion du contrat, en
particulier le lieu et la date de signature de celui-ci.
Il serait opportun de compléter cette obligation par des
précisions sur les conditions financière du contrat
, dans
la mesure où ces informations sont souvent au centre des contentieux et
abus relatifs au démarchage, en raison du manque de clarté et de
transparence dont elles peuvent faire l'objet. Cette disposition serait
également cohérente avec celle prévue au 5° du texte
proposé par l'article 42 du présent projet de loi pour l'article
L. 541-4 du code monétaire et financier, relatif aux règles de
bonne conduite des CIF, qui prévoit que ces derniers doivent
«
communiquer, d'une manière appropriée, les
informations utiles à la prise de décision par leurs clients
ainsi que celles concernant les modalités de leur
rémunération, notamment la tarification de leurs
prestations
».
En conséquence, votre commission vous soumet un
amendement
tendant à faire préciser par le démarcheur les conditions
financières du contrat proposé. Toutefois, afin de ne pas
introduire de distorsion avec les conditions prévalant aux offres faites
dans les agences bancaires (qui ne relèvent pas du démarchage),
cet amendement ne précise pas si l'information doit porter sur les
frais, honoraires et commissions éventuels dont
bénéficierait le démarcheur.
E. AMENDEMENT RÉDACTIONNEL RELATIF AUX DÉMARCHEURS
PERSONNES PHYSIQUES
Votre commission vous propose également un
amendement
rédactionnel au texte proposé pour le IV de l'article L. 341-4,
tendant à préciser que les conditions d'âge,
d'honorabilité et de compétence mentionnées dans cet
article, qui s'appliquent aux démarcheurs et aux personnes ayant le
pouvoir de gérer ou d'administrer les personnes morales
mandatées, concernent des personnes physiques.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article ainsi modifié.
ARTICLE 40
Régime des infractions pénales relatives au
démarchage
Commentaire : le présent article a pour objet
d'instaurer un nouveau régime des infractions pénales relatives
au démarchage.
I. LE DROIT EXISTANT
Le chapitre III du titre V du livre III du code monétaire et financier
traite des infractions relatives au démarchage. Les sections 1 à
3 concernent successivement les opérations de banque, les
opérations sur les valeurs mobilières et les marchés
à terme, et présentent donc une structure parallèle
à celle des chapitres I à III du titre IV du même livre,
qui présentent les modalités d'exercice du démarchage sur
les mêmes opérations.
Le régime actuel des infractions pénales relatives au
démarchage est donc décliné selon le type
d'opérations démarchées
, et comprend certaines
sanctions identiques pour des infractions analogues et d'autres qui sont
spécifiques, la peine la plus élevée étant
prononcée pour des faits qualifiés d'escroquerie dans le cas du
démarchage sur les valeurs mobilières.
A. LES SANCTIONS RELATIVES AU DÉMARCHAGE SUR LES OPÉRATIONS
DE BANQUE
L'article L. 353-1 du code monétaire et financier dispose que le fait de
méconnaître les obligations prévues aux articles L. 341-1
et L. 341-2 est puni d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende de 45.000
euros. Les infractions visées sont, à titre d'exemple, le fait de
percevoir une commission ou des frais divers (recherche, démarche,
constitution du dossier, etc.) avant le versement effectif des fonds
prêtés, le fait de se livrer au démarchage en vue de
conseiller ou d'offrir des prêts d'argent ou la souscription de plans
d'épargne prévoyant, même pour partie, l'acquisition de
parts de sociétés civiles immobilières, ou de recueillir
sous forme de dépôts des fonds du public, ou le fait de ne pas se
conformer aux principes inclus dans la définition du démarchage.
L'article L. 353-2 du même code dispose en outre que le fait de
méconnaître les obligations prévues à l'article L.
341-3, au deuxième alinéa de l'article L. 341-4 et au premier
alinéa de l'article L. 341-5 est puni d'une amende de 4.500 euros. Parmi
ces obligations figurent le fait de mentionner clairement dans toute
publicité ou propagande sur des emprunts et prêts le taux effectif
global et les charges y afférentes, la nécessité pour un
démarcheur d'être de nationalité française ou
ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne et
d'être porteur d'une carte spéciale délivrée par
l'établissement de crédit mandant, et diverses mentions (nom de
l'établissement prêteur et coût du crédit) devant
figurer sur les contrats de financement de ventes à tempérament.
B. LES SANCTIONS RELATIVES AU DÉMARCHAGE SUR LES OPÉRATIONS
SUR VALEURS MOBILIÈRES
L'article L. 353-3 du code monétaire et financier punit d'une amende de
4.500 euros
le fait de méconnaître les obligations
prescrites par l'article L. 342-8. Ces obligations ont trait au
dépôt d'une déclaration au parquet du procureur de la
République, aux limitations entourant le mandat de démarchage
confié à une personne morale, et aux modalités de
délivrance et de retrait de la carte d'emploi.
L'article L. 353-4 du même code prévoit que les peines
pénales mentionnées aux articles 313-1 (cinq ans d'emprisonnement
et 375.000 euros d'amende pour
escroquerie
), 313-7 (diverses
interdictions de droits civiques et civils, d'exercice d'activité, de
séjour, d'émission de chèques, et fermeture
d'établissement, pour escroquerie ou entrave à une
procédure d'enchères ou d'adjudication publique) et 318-8
(exclusion des marchés publics pour une durée maximale de cinq
ans pour les mêmes infractions) du code pénal s'appliquent en cas
de méconnaissance de nombreuses obligations prescrites au titre des
opérations sur valeurs mobilières
605(
*
)
.
Enfin l'article L. 353-5 prévoit une
peine de deux ans
d'emprisonnement et de 6.000 euros d'amende
en cas d'infraction aux
obligations visées par les articles L. 342-6 (remise ou envoi d'une note
d'information succincte), L. 342-13 (établissement d'un bulletin de
souscription), L. 342-17 (investigations et demandes de documents de la
commission des opérations de bourse) et L. 342-19 (restitution de
l'intégralité des sommes éventuellement versées en
cas de dénonciation d'une opération d'assurance de personnes).
C. LES SANCTIONS RELATIVES AU DÉMARCHAGE SUR LE MARCHÉ
À TERME
L'article L. 353-6 du code monétaire et financier punit des peines
précédemment citées et prévues par les articles
313-1, 313-7 et 313-8 du code pénal les infractions aux obligations
prescrites par les articles L. 343-2 du code monétaire et financier
(seuls les prestataires d'investissement et membres des marchés
réglementés peuvent recourir au démarchage en vue
d'opérations sur les instruments financiers à terme), L. 343-4
(modalités de déclaration au parquet et de délivrance de
la carte d'emploi) et L. 343-6 (délai de sept jours requis, à
compter de la délivrance d'une note d'information sur les marchés
à terme, avant de pouvoir recueillir les ordres et fonds de la personne
démarchée).
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Afin de simplifier le droit existant et de permettre une meilleure
lisibilité du droit pénal, le présent article introduit un
régime unifié de sanctions pénales. A la différence
du dispositif actuel qui décline les sanctions selon le type
d'opérations démarchées, il prévoit pour les
personnes physiques un double niveau de répression selon la
gravité des faits, assorti de peines complémentaires, et les
distingue des peines encourues par les personnes morales.
Le dispositif
proposé serait plus homogène que l'actuel et les peines
globalement plus sévères
. La qualification d'escroquerie est
en revanche maintenue pour les infractions les plus graves.
Le faible nombre de peines prononcées au cours des dernières
années n'est sans doute pas représentatif des dommages subis par
les épargnants
. Ainsi dix-huit infractions pénales ont
été recensées en matière de démarchage
financier pour les années 1996 à 1998, et aucune condamnation n'a
été enregistrée sur le casier judiciaire des personnes
concernées par ces infractions.
Le collège de la Commission des opérations de bourse (COB) a
également reçu en moyenne annuelle cinq demandes d'enquêtes
afférentes au démarchage au cours des dix dernières
années (dont trois en 1999 et 2000), sur une moyenne de quatre-vingt
enquêtes annuelles présentées. Huit dossiers par an en
moyenne ont été directement transmis au parquet sans faire
l'objet d'une présentation devant le collège, sur un total
d'environ vingt cinq transmissions de dossiers par an. La très grande
majorité des dossiers relève de l'application des dispositions de
la loi de 1885 sur les marchés à terme, principalement du fait
d'établissements financiers étrangers.
La COB constate
cependant une augmentation du nombre de plaintes relatives au
démarchage
, qui concernent en particulier le démarchage par
internet émanant d'établissements étrangers.
Il résulte de ces observations que les interstices de la
réglementation relative au démarchage tendent manifestement
à s'élargir,
ce qui accroît la nécessité
de mettre en place un dispositif de sanctions à la fois plus clair et
plus dissuasif.
A. LES PEINES PRÉVUES POUR LES PERSONNES PHYSIQUES
Ces peines sont mentionnées dans les nouveaux articles L. 353-1,
L. 353-2 et L. 353-3, que le présent article propose
d'insérer dans le code monétaire et financier.
1. Les cas de condamnation à 7.500 euros d'amende et six mois
d'emprisonnement
L'article L. 353-1 prévoit une peine de six mois d'emprisonnement et
7.500 euros d'amende pour les infractions suivantes commises dans l'exercice
d'une activité de démarchage :
- le fait de ne pas avoir obtenu de carte de démarchage dans les
conditions prévues à l'article L. 341-8 dans sa rédaction
proposée par l'article 39 du présent projet de loi ;
- le fait de ne pas communiquer à la personne démarchée
les informations et documents prévus, tels que le numéro
d'enregistrement du démarcheur, les coordonnées de la personne
morale mandante (et le cas échéant son numéro
d'enregistrement s'il s'agit d'une personne morale mandatée de niveau
intermédiaire), les informations relatives aux produits
présentés, les conditions et modalités de l'offre
contractuelle et les informations relatives au droit de
rétractation ;
- le fait de ne pas respecter les règles relatives à la signature
du contrat, selon lesquelles le démarcheur ne peut signer au nom et pour
le compte de la personne morale pour le compte de laquelle il agit ;
- le fait de ne pas permettre à la personne démarchée de
bénéficier du délai de rétractation, sous
réserves des dérogations prévues pour l'existence de ce
délai ;
- le fait de recevoir des personnes démarchées des ordres ou des
fonds en vue de la fourniture d'instruments financiers et de certains services
(réception-transmission et exécution d'ordres pour le compte de
tiers), avant l'expiration du délai de réflexion de quarante-huit
heures.
Les peines sont donc globalement renforcées
, dans la mesure
où elles s'élèvent aujourd'hui à 4.500 ou 6.000
euros d'amende pour des infractions comparables.
2. Les cas de condamnation pour une infraction équivalente à
celle d'escroquerie
Le texte proposé pour l'article L. 353-2 du code monétaire et
financier dispose qu'une deuxième série de peines plus
sévères est prévue pour des infractions assimilées
à une escroquerie, et fait à ce titre référence
à l'article 313-1 du code pénal, qui définit l'escroquerie
comme
« le fait, soit par l'usage d'un faux nom ou d'une fausse
qualité, soit par l'abus d'une qualité vraie, soit par l'emploi
de manoeuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de la
déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice
d'un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque,
à fournir un service ou à consentir un acte opérant
obligation ou décharge ».
Ce comportement est puni de
cinq ans d'emprisonnement et 375.000 euros d'amende
. Les cas
prévus par l'article L. 353-2 sont les suivants :
- ne pas remplir les conditions d'habilitation et de mandat prévues par
les articles L. 341-3 et L. 341-4 ;
- proposer des produits interdits de démarchage ;
- exercer ou tenter d'exercer une activité de démarchage sans
remplir les conditions de prescription et de condamnation pénales
prévues à l'article L. 341-9 ;
- proposer des produits, instruments financiers et services autres que ceux
pour lesquels le démarcheur a reçues des instructions expresses
de son mandant ;
- enfin recevoir des personnes démarchées des espèces,
effets de commerce, valeurs, chèques au porteur ou à son nom, ou
tout moyen de paiement, conformément à l'interdiction
posée à l'article L. 341-15.
Ces peines sont lourdes et
a priori
dissuasives, pour autant que les
infractions soient bien communiquées par les victimes, dont on sait
qu'elles n'osent parfois pas porter plainte du fait de pressions
exercées par le démarcheur, d'incertitudes sur la
réalité de l'infraction ou d'une méconnaissance des voies
de recours et droits assurés aux démarchés.
L'architecture future du démarchage, qui prévoit des
contrôles successifs exercés par les mandants et les
autorités de régulation, une déontologie précise
pour la profession et des restrictions imposées à l'exercice du
démarchage (tant en termes de personnes habilitées que de
produits proposés) est toutefois de nature à apporter une
meilleure prévention en amont que dans la situation actuelle.
3. Les peines complémentaires
Le dispositif proposé pour l'article L. 353-3 du code monétaire
et financier prévoit des peines complémentaires pour les
délits évoqués précédemment :
- l'interdiction des droits civiques, civils et de famille, selon les
modalités prévues par l'article 131-26 du code pénal ;
- l'interdiction d'exercer une fonction publique ou d'exercer la même
activité professionnelle ou sociale que celle qui a donné lieu au
démarchage délictueux, et ce pour une durée maximale de
cinq ans ;
- la publication de la décision par affichage ou diffusion, selon les
modalités prévues par l'article 131-35 du code pénal.
Ces peines sont à rapprocher de celles mentionnées à
l'article 313-7 du code pénal, qui prévoit certaines de ces
interdictions et est visé dans l'actuel article L. 353-4 du code
monétaire et financier, relatif aux infractions
606(
*
)
commises dans le cadre du
démarchage sur les valeurs mobilières.
B. LES PEINES PRÉVUES POUR LES PERSONNES MORALES
Le texte proposé pour l'article L. 353-4 du code monétaire et
financier dispose que les personnes morales peuvent être
déclarées responsables, dans les conditions prévues par
l'article 121-2 du code pénal, des infractions définies
précédemment pour les personnes physiques. Les personnes morales
ne sont donc pas uniquement passibles de sanctions civiles (le III de l'article
L. 341-4 nouveau dispose en effet qu'elles sont civilement responsables du fait
des démarcheurs), et les sanctions pénales qu'elles encourent
sont de deux ordres :
-
l'amende
, telle qu'elle est prévue à l'article 131-38 du
code pénal et qui est plafonnée au quintuple de celles
prévues pour les mêmes infractions commises par les personnes
physiques, soit des maxima de 37.500 euros et 1.875.000 euros ;
- les peines alternativement ou cumulativement prévues à
l'article 131-39 du code pénal, qui sont selon les termes de
l'article :
a) la
dissolution
, lorsque la personne morale a été
créée ou, lorsqu'il s'agit d'un crime ou d'un délit puni
en ce qui concerne les personnes physiques d'une peine d'emprisonnement
supérieure ou égale à trois ans,
détournée de son objet pour commettre les faits
incriminés ;
b) l'
interdiction
, à titre définitif ou pour une
durée de cinq ans au plus, d'exercer directement ou indirectement
l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de
laquelle l'infraction a été commise ;
c) le placement, pour une durée de cinq ans au plus, sous
surveillance judiciaire
;
d) la
fermeture
définitive ou pour une durée de cinq ans
au plus des établissements ou de l'un ou de plusieurs des
établissements de l'entreprise ayant servi à commettre les faits
incriminés ;
e) l'
exclusion des marchés publics
à titre
définitif ou pour une durée de cinq ans au plus ;
f) l'interdiction, à titre définitif ou pour une durée de
cinq ans au plus, de faire appel public à l'épargne ;
g) l'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d'émettre
des chèques autres que ceux qui permettent le retrait de fonds par le
tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés ou
d'utiliser des cartes de paiement ;
h) la
confiscation
de la chose qui a servi ou était
destinée à commettre l'infraction ou de la chose qui en est le
produit ;
i) l'affichage de la décision prononcée ou la diffusion de
celle-ci soit par la presse écrite, soit par tout moyen de communication
audiovisuelle.
Les peines définies aux a) et c) ne sont cependant pas applicables aux
personnes morales de droit public dont la responsabilité pénale
est susceptible d'être engagée.
C. LES POUVOIRS D'INVESTIGATION DES AGENTS PUBLICS
Le texte proposé pour l'article L. 353-5 du code monétaire et
financier dispose que
certaines catégories d'agents sont
qualifiées pour procéder, sur l'ensemble du territoire national,
à la recherche et à la qualification des infractions
mentionnées précédemment
. Ces fonctionnaires sont ceux
habilités à cet effet par le ministre chargé de
l'économie, les rapporteurs du Conseil de la concurrence, et des
fonctionnaires de catégorie A du ministère chargé de
l'économie, spécialement habilités à cet effet par
le garde des sceaux.
Ces enquêtes sont réalisées dans les conditions
fixées par les articles L. 450-2 à L. 450-4, L. 450-7 et L. 450-8
du code de commerce, c'est-à-dire :
- l'établissement de procès-verbaux, qui sont transmis à
l'autorité compétente et dont un double est laissé aux
parties intéressées, et le cas échéant de
rapports ;
- un pouvoir d'accéder à tous les locaux et terrains, d'obtenir
communication de tous les documents professionnels nécessaires, et de
recueillir sur convocation ou sur place tous renseignements et justifications.
Ils peuvent également recourir à un expert, et accéder
à tout document ou élément d'information détenu par
les services et établissements de l'Etat et des autres
collectivités publiques, sans se voir opposer le secret professionnel.
Ces visites ne peuvent intervenir que sur autorisation judiciaire donnée
par ordonnance du président, ou d'un juge qu'il a
délégué, du tribunal de grande instance dans le ressort
duquel sont situés les lieux à visiter, et s'effectuent sous le
contrôle de ce juge. Les enquêtes sur pièces et sur place
sont également soumises à certaines conditions de
réalisation (notification aux occupants, horaires, modalités de
saisie des pièces entre autres) ;
- toute opposition à ces prérogatives des fonctionnaires
habilités et des rapporteurs du Conseil de la concurrence est punie d'un
emprisonnement de six mois et d'une amende de 7.500 euros.
D. LES DISPOSITIONS DE COORDINATION
Le présent article prévoit également deux dispositions de
coordination :
- la section 4 du chapitre III du titre V du livre III, qui traite des
opérations sur matières précieuses et billets de banque
étrangers dans le cadre des infractions relatives au démarchage,
devient la section 2 ;
- l'article L. 353-7 qui constitue cette section devient l'article
L. 353-6, cette disposition s'appliquant à tous les textes
juridiques qui y font référence.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article sans modification.
ARTICLE 41
Dispositions
diverses
Commentaire : le présent article a pour objet de
préciser le régime des intermédiaires en opérations
de banque exerçant l'activité de démarchage, ainsi que la
condition à laquelle des démarcheurs peuvent fournir des services
d'investissement. Il prévoit par ailleurs des dispositions de
coordination.
I. LA SITUATION DES INTERMÉDIAIRES EN OPÉRATIONS DE BANQUE AU
REGARD DU DÉMARCHAGE
Les intermédiaires en opérations de banque sont définis
par l'article L. 519-1 du code monétaire et financier comme les
personnes qui, à titre de profession habituelle, mettent en rapport les
parties intéressées à la conclusion d'une opération
de banque, sans se porter ducroire.
Les intermédiaires en opérations de banque sont soumis aux
règles du démarchage
607(
*
)
.
Parmi les dispositions de coordination du présent article, la nouvelle
rédaction proposée par le
I
pour l'article L. 519-5 du
code monétaire et financier n'apporte pas de novation
particulière par rapport au droit existant puisqu'il tend à
soumettre les intermédiaires en opérations de banque qui se
livrent à une activité de démarchage bancaire ou financier
à l'ensemble des conditions, obligations et sanctions du nouveau
régime du démarchage posées par les articles 39 et 40 du
présent projet de loi. Cette disposition est cohérente avec
l'objet du démarchage bancaire et financier, qui aux termes de
l'article
L. 341-1 vise notamment à proposer la réalisation
d'une opération de banque.
II. LA SITUATION DES DÉMARCHEURS AU REGARD DE LA FOURNITURE DE
SERVICES D'INVESTISSEMENT
Le g) du 2° de l'article L. 531-2 du même code dispose que les
personnes dont l'activité est régie par les chapitres
I
er
à III du titre IV du livre III, c'est-à-dire
les démarcheurs en opérations de banque, en valeurs
mobilières et en opérations sur le marché à terme,
peuvent fournir des services d'investissement sans être soumis
à la procédure d'agrément
pour les prestataires de
services d'investissement, prévue à l'article L. 531-1.
La nouvelle rédaction proposée par le
II
du présent
article pour le g) du 2° de l'article L. 531-2 du code monétaire et
financier apporte une précision notable puisqu'elle dispose que les
personnes habilitées à procéder au démarchage
peuvent fournir des services d'investissement sans être soumis à
la procédure d'agrément,
à la condition qu'elles soient
mandatées par des personnes habilitées à fournir les
mêmes services d'investissement,
conformément aux dispositions
de l'article L. 341-4 proposées par l'article 39 du présent
projet de loi.
Cette condition nouvelle est d'importance
, car elle implique en
particulier que les conseillers en investissements financiers ne peuvent
démarcher des produits et services financiers que dès lors qu'ils
ont été mandatés pour ce faire par un prestataire en
services d'investissement. Sans un tel mandat, les conseillers financiers ne
peuvent que démarcher pour des prestations de conseil.
III. LES INTERMÉDIAIRES EN BIENS DIVERS
L'article L. 550-1 du code monétaire et financier mentionne les
personnes soumises à la législation sur les intermédiaires
en biens divers. Ces personnes sont celles proposant directement ou
indirectement à des tiers, par voie de publicité ou de
démarchage, d'acquérir des biens divers
608(
*
)
, et celles qui recueillent des fonds
à cette fin ou assurent la gestion desdits biens. Parmi les obligations
auxquelles ces intermédiaires sont soumis, figurent la remise d'un
document d'information sur l'opération proposée et son
gestionnaire, l'inventaire annuel des biens gérés par le
gestionnaire, et la production et le contrôle des comptes.
Le
III
du texte proposé par le présent article
complète l'article L. 550-1 et dispose que
les
intermédiaires en biens divers
sont également soumis au
nouveau régime du démarchage
lorsqu'ils ont recours à
cette modalité de vente. Cette disposition ne figure pas dans le droit
actuel mais est conforme aux dispositions du 4° de l'article L. 341-1 de
ce même code (dans sa rédaction proposée à l'article
39 du projet de loi), qui vise les opérations sur biens divers parmi les
opérations susceptibles de faire l'objet du démarchage.
IV. LE CHAMP DE L'ACTIVITÉ DES ENTREPRISES D'ASSURANCE
L'article L. 322-2-2 du code des assurances dispose que les opérations
autres que les opérations d'assurance mentionnées aux articles
L. 310-1 et L. 310-1-1 du même code (notamment les opérations
d'assurance-vie, d'assurance-maladie et d'assistance) et que le
démarchage portant sur les opérations en valeurs
mobilières mentionné à l'article L. 342-3 du code
monétaire et financier, ne peuvent être effectuées par les
entreprises d'assurances que si elles demeurent d'importance limitée par
rapport à l'ensemble des activités de l'entreprise, selon des
modalités fixées par un décret en Conseil d'Etat.
Cette disposition tend à limiter les activités
« annexes » des entreprises régies par le code des
assurances, qui ont prioritairement vocation à commercialiser des
opérations d'assurance, lesquelles font l'objet de dispositions
spécifiques et ne sont donc pas couvertes par le régime du
démarchage proposé par l'article 39 du présent projet de
loi.
La nouvelle rédaction proposée pour l'article L. 322-2-2 du code
des assurances par le
IV
du présent article en actualise la
formulation en ne faisant plus référence à l'article 3 de
la loi n°72-6 du 3 janvier 1972 relative au démarchage financier et
à des opérations de placement et d'assurance, mais aux
opérations désormais visées par l'article L. 341-1
(ensemble des opérations susceptibles de faire l'objet de
démarchage).
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article sans modification.
ARTICLE 42
Nouveau régime des
conseillers en investissements
financiers
Commentaire : le présent article a pour objet de
créer un nouveau régime spécifique pour l'activité
de conseiller en investissements financiers.
I. LE DROIT EXISTANT
Un des principaux apports du volet du présent projet de loi
consacré au démarchage bancaire et financier est de créer
un nouveau statut juridique pour l'activité de conseiller en
investissements financiers (CIF), qui n'est aujourd'hui régie par aucun
texte.
Les CIF font rarement l'objet d'un régime particulier chez nos
principaux partenaires. L'exemple du Royaume-Uni constitue cependant un cas
d'analyse intéressant, car il révèle un dispositif
très détaillé, mis en place après que de nombreuses
« affaires » eurent été mises à jour.
Il révèle également les failles de ce système, qui
a été très récemment modifié.
Le conseil en investissements financiers au Royaume-Uni
1 -
Les différents acteurs
L'essentiel de la distribution de produits financiers au Royaume-Uni passe
par la « vente conseillée »
, malgré un
développement récent, notamment via internet, de la vente
(exécution) seule. Toute personne qui fournit un service de conseil en
matière financière au Royaume-Uni doit être
autorisée et enregistrée par la
Financial Services
Authority
(FSA)
609(
*
)
. Le
système a reposé jusqu'au début de cette année sur
le principe dit de la « polarisation », qui divise les
conseillers financiers en deux grandes catégories :
- les
conseillers liés
(
tied advisers
) qui ne peuvent
conseiller et vendre que les produits d'une seule société
spécifique, cette dernière supportant la responsabilité du
conseil donné. Ces conseillers se divisent en forces de vente directes
(
direct sales forces,
employés du
fournisseur du produit
610(
*
)
),
« bancassureurs » (
bancassurers
) et agents
liés (
tied agents,
individus ou sociétés qui sont
légalement distincts du fournisseur de produits mais ont un arrangement
exclusif avec ce dernier pour vendre ses produits
611(
*
)
);
- les
conseillers indépendants
(
independent financial advisers
ou IFAs
), qui peuvent recommander les produits de n'importe quelle
société, ne représentent pas un fournisseur de produits
particulier et sont responsables de leur propre conseil. Ils se
répartissent entre grandes sociétés nationales d'IFAs,
entreprises régionales, entreprises locales et réseaux de
conseillers financiers indépendants.
Le secteur des IFA est très fragmenté. Le nombre de conseillers
indépendants actifs s'élèverait à 36 000,
travaillant pour le compte de 11 000 entreprises de conseil
612(
*
)
. 37 % des IFAs travaillent en
tant que praticien unique. Cette fragmentation s'accompagne toutefois d'un fort
développement des réseaux : environ la moitié des
IFAs personnes physiques seraient désormais membres d'un réseau.
Ces dernières années ont été marquées par
une forte croissance du passage par des conseillers financiers
indépendants (en 2000, ils représentaient plus de la
moitié des ventes de produits financiers en valeur). Leur
clientèle est plus particulièrement concentrée sur les
riches particuliers, les personnes les plus modestes passant plutôt par
les
direct sales forces
, dont le déclin pose de ce fait un
problème d'accès au conseil financier pour les moins
favorisés.
2 - Le régime des conseillers en investissements financiers
Autorisation et enregistrement
Les conseillers en investissements financiers, indépendants ou
liés, personnes physiques ou morales,
doivent être
autorisés par la FSA
. Les conditions générales sont
les mêmes que pour toute personne soumise à l'autorisation de la
FSA et portent notamment sur le
fit and proper test
, la formation et la
compétence (la FSA impose certains examens, qui sont toutefois en cours
de réexamen du fait de leurs insuffisances), la solidité du plan
d'affaires et la solvabilité financière.
Les sociétés de conseillers en investissements financiers doivent
souscrire une
assurance
professionnelle pour un montant égal
à au moins trois fois leur chiffre d'affaires annuel. La FSA revoit
actuellement ces dispositions et envisagerait de les assouplir en
allégeant les exigences dans les cas les moins risqués.
La FSA tient le
registre public
(consultable notamment sur son site
internet) des conseillers en investissements financiers (sociétés
et personnes physiques). Elle publie également une liste des individus
et sociétés interdits d'activité.
Règles de bonne conduite
L'activité des conseillers en investissements financiers, qu'ils soient
indépendants ou non, est soumise à des règles de conduite
édictées par la FSA. Les deux principes fondamentaux sont, d'une
part, « connaître son client » et, d'autre part,
« donner un conseil adéquat ».
La règle «
connaître son client
» passe
par une collecte d'informations sur le client, appelée
fact
finding
. Toutefois, c'est à chaque conseiller ou
société de conseil de définir le niveau de détail
des informations requises et le moyen de les obtenir. Les
interprétations sont très variées : une enquête
de la FSA montre que le document récapitulant les informations
nécessaires, appelé
fact find
, comporte entre six et
trente pages selon les conseillers.
La règle du «
conseil adéquat
» (ou
approprié) oblige le conseiller à ne recommander au client qu'un
investissement qui corresponde à sa situation telle qu'elle
transparaît dans le
fact find
. L'interprétation de la
notion d'« adéquation » (
suitability
) varie
elle aussi. Toutefois, le but de ce principe est d'éviter les
mis-selling
, dont la notion a été largement cernée
dans le cadre des scandales financiers ayant éclaté ces
dernières années.
Des règles de conduite détaillées ont été
édictées spécifiquement pour l'activité de conseil
et de vente. Elles comprennent notamment :
- le principe de la
polarisation
, avec notamment l'interdiction pour un
conseiller lié de fournir des conseils sur un produit autre que ceux de
l'établissement dont il dépend (ce dernier porte la
responsabilité du respect de cette règle par ses conseillers) et
l'obligation pour tout conseiller d'indiquer clairement, dès le
début du contact avec le client, s'il est lié ou
indépendant ;
- des précisions sur les règles « connaître son
client » et « donner un conseil adéquat »
(accompagnées de
guidances
) ;
- une obligation d'information sur la société concernée
(nom, adresse) et l'identité, le statut ou les liens avec la
société des personnes avec lesquelles le client pourra être
en contact, ainsi que sur le fait que la société et les personnes
concernées sont autorisées par la FSA ;
- une obligation d'information sur les frais, rémunérations et
commissions ;
- une obligation d'information sur les caractéristiques du produit, par
écrit (document appelé
key features
) ;
- l'obligation de s'assurer que le client a bien compris la nature du risque
liée à l'investissement conseillé avec, dans certains cas
(par exemple pour les produits dérivés), l'obligation de fournir
au client une notice d'information sur ce risque, dont le client doit accuser
réception par écrit ;
- une obligation d'information sur les éventuels délais de
rétractation, lorsqu'ils existent (ce n'est le cas que pour certains
produits financiers et uniquement dans certains cas).
Comme pour toute activité financière, les consommateurs
bénéficient, en matière de conseil en investissements
financiers, de mécanismes de recours, notamment le
Financial
Ombudsman Service
ou devant les tribunaux, soit à l'encontre du
conseiller si celui-ci est indépendant, soit à l'encontre du
fournisseur de produit auquel le conseiller est lié.
Rémunération
Qu'ils soient liés ou indépendants, les conseillers en
investissements financiers sont dans la plupart des cas
rémunérés sur la base de
commissions
,
c'est-à-dire un paiement versé uniquement en cas de vente d'un
produit, par le fournisseur du produit vendu et généralement en
proportion du montant de l'investissement
613(
*
)
.
Ce système pose un certain nombre de
problèmes
,
malgré l'obligation d'information sur la rémunération,
notamment parce que :
- les clients ont l'impression que le conseil est gratuit, alors qu'il est
directement à la charge du client via les frais prélevés
par le fournisseur ;
- le conseil peut être biaisé, selon l'importance des commissions,
en faveur de tel ou tel produit ou de tel ou tel fournisseur, notamment dans le
cas des conseillers indépendants
614(
*
)
.
Selon une enquête détaillée réalisée à
la demande de la FSA, les consommateurs estiment, d'une manière
générale, que le paiement d'honoraires est
préférable à une rémunération par commission
pour l'objectivité et l'indépendance du conseil, mais il
apparaît également que ces honoraires sont
généralement considérés comme trop
élevés.
La question des rémunérations et du biais qu'elles peuvent
introduire est particulièrement sensible et sous-tend la
réflexion sur le principe de la polarisation.
3 - Les évolutions récentes
Suite à son document de consultation sur la question du régime de
polarisation qui divise les conseillers financiers en deux grandes
catégories (les conseillers liés et les conseillers
indépendants), la FSA a annoncé le 21 novembre dernier sa
décision de supprimer ce régime
.
Par conséquent, les conseillers financiers liés à un seul
fournisseur de produits financiers pourront offrir à leurs clients un
choix plus vaste.
Les conseillers financiers qui voudront conserver la qualification
d'« indépendants » pourront le faire à
condition qu'ils prennent en compte, dans leurs conseils, l'ensemble des
produits du marché et qu'ils offrent à leurs clients l'option de
les payer par commission.
Les épargnants devront désormais être capables de
comprendre la nature exacte du conseil qui leur est donné et des
services fournis par les sociétés avec lesquelles ils traitent.
Pour cela, un nouveau document d'information préalable sera mis en place.
Parallèlement, la règle qui interdisait à un conseiller
financier indépendant de recommander un produit d'un fournisseur
détenant plus de 10 % de son capital va également être
supprimée afin de permettre aux firmes de conseillers financiers
indépendants d'attirer des investisseurs pour renforcer leur situation
financière. Des mesures de sauvegarde, pour éviter que de tels
investissements ne remettent en question l'indépendance du conseiller,
seront mises en place.
Les représentants désignés par un fournisseur pour
commercialiser ses produits continueront à ne pouvoir être
liés qu'à un seul fournisseur, afin de préserver une
claire ligne de responsabilité.
La FSA a procédé à une consultation sur des projets de
règles, et les décisions sont effectives depuis janvier 2003. La
mise en oeuvre du nouveau régime a été
précédée d'une vaste campagne d'information du public afin
que les épargnants soient bien conscients de l'impact des changements.
Source : ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Le nouveau statut des CIF est décliné en plusieurs types de
dispositions : une définition de la profession, des conditions
préalables d'exercice pénales et civiles (ces dernières
étant pour la plupart définies par décret), une certaine
autorégulation de la profession, dont la cohérence est toutefois
assurée par l'Autorité des marchés financiers (AMF), une
procédure d'enregistrement indirect auprès de l'AMF, et des
prescriptions générales tenant à la déontologie de
la pratique du conseil.
Ces dispositions sont proches de celles qui encadrent le nouveau statut des
démarcheurs, mais s'en distinguent néanmoins par une souplesse
plus prononcée, qui traduit une
confiance dans les capacités
endogènes d'amélioration de la profession
.
Le statut des CIF est fondamentalement lié à la
problématique du démarchage
, dans la mesure où les CIF
font partie des personnes habilitées à y recourir, ainsi que le
dispose le 3° de l'article L. 341-3 du code monétaire et financier,
dans sa rédaction proposée par l'article 39 du présent
projet de loi. Toutefois le CIF et le démarchage répondent
théoriquement à des
logiques quasiment inverses
, puisque
le démarcheur détient un mandat pour solliciter un client
potentiel, alors que le conseiller financier
stricto censu
peut
être mandaté par le client pour lui fournir des recommandations et
une aide à la décision, et entretient avec son ou ses
fournisseurs de produits une relation contractuelle et non de mandant à
mandataire
615(
*
)
.
Dans les
faits, toutefois, la frontière entre les deux activités est
souvent poreuse
, dans la mesure où elles concernent
généralement des opérations et services communs ; une
prestation de conseil peut ainsi assez naturellement aboutir à une offre
de produits financiers relevant du démarchage. Néanmoins, ces
deux activités doivent faire l'objet de déclarations
séparées auprès de l'AMF (directement pour
l'activité de démarchage, et indirectement, par
l'intermédiaire d'une association agréée, pour
l'activité de conseil), de telle sorte
qu'il n'existe pas de statut
unique du conseiller-démarcheur
, qui aurait pu engendrer une
certaine confusion auprès des épargnants
616(
*
)
.
Le nouveau statut spécifique portant sur le conseil a donc notamment
pour objectif de clarifier les frontières juridiques entre les deux
activités, tout en consacrant explicitement la profession de CIF. Une
telle reconnaissance, qui suppose un encadrement, semblait en effet
nécessaire, tant cette activité est aujourd'hui exercée
par de multiples professionnels et indépendants
617(
*
)
aux contours mal définis et
présentant des garanties parfois aléatoires. Si la plupart des
professionnels exercent leur activité avec sérieux et
compétence, la profession de CIF est cependant en partie
décrédibilisée par une minorité de conseillers plus
ou moins improvisés, parfois dénués de scrupules et
habillant sous le vocable attractif de « conseil » des
compétences improbables ou des intentions commerciales abusives, quand
ce n'est plus abruptement d'escroquerie ou d'abus de faiblesse. Le
présent article présente donc un double
intérêt :
-
pour les épargnants
, qui pourront désormais mieux
identifier leurs interlocuteurs et évaluer leur professionnalisme. Les
petits épargnants et sociétés de taille et d'effectifs
réduits sont les « cibles » favorites des
conseillers financiers et se laissent parfois séduire par une forte
sociabilité et des compétences supposées mais non
certifiées ;
-
pour les CIF eux-mêmes
, qui aspirent légitimement
à ce que leur profession soit mieux reconnue et à extraire d'un
cadre mieux réglementé les pseudo-conseillers qui nuisent
à l'image de l'ensemble du secteur.
Ce statut apparaît également nécessaire au regard des
évolutions de la réglementation communautaire
. Le projet
de rénovation de la directive sur les services d'investissement,
présenté par la Commission le 19 novembre 2002, prévoit
ainsi de faire du conseil en investissement une
activité de base
(et non plus une activité auxiliaire), et donc susceptible de
bénéficier d'un « passeport » entre les Etats
membres, c'est-à-dire de conditions d'agrément homogènes.
Les présentes dispositions tendent ainsi à anticiper les
prochaines règles communautaires, qui devraient prévoir des
conditions minimales d'exercice, en particulier celles relatives aux principes
déontologiques, à la gestion des conflits d'intérêt,
et à l'obligation d'assurance en responsabilité civile
professionnelle.
Le présent article propose d'insérer un nouveau chapitre premier
intitulé « les conseillers en investissements
financiers » dans le titre IV (« les sociétés
de gestion collective ») du livre V («les prestataires de
services ») du code monétaire et financier.
A. LA DÉFINITION ET LES CONDITIONS D'EXERCICE DE LA PROFESSION
1. Une définition dont le champ est vaste mais le critère
d'entrée unique
Dans le dispositif proposé, la définition de l'activité de
CIF figure à l'article L. 541-1 nouveau du code monétaire et
financier. Le
I
de cet article dispose en premier lieu que
« les conseillers en investissements financiers sont les personnes
exerçant à titre de profession habituelle une activité de
conseil »
. Les deux éléments importants de cette
première partie de définition sont :
-
le caractère habituel
: cela signifie
a contrario
que les professionnels exerçant une activité de conseil à
titre accessoire, tels que certaines professions juridiques (notamment
visées dans le II du même article), ne sont pas concernés
par le statut de CIF ;
-
le conseil
: bien que ce terme revête une signification
relativement floue
618(
*
)
, il
implique clairement que le statut de CIF ne porte pas sur des activités
telles que la gestion ou le démarchage, quand bien même elles
seraient exercées par la même personne.
Le texte proposé pour l'article L. 541-1 énumère ensuite
les domaines étendus sur lesquels porte l'activité de
conseil :
-
la réalisation d'opérations sur les instruments
financiers
définis à l'article L. 211-1 du code
monétaire et financier (actions et autres titres donnant accès au
capital et aux droits de vote, titres de créance, OPCVM, instruments
financiers à terme et tous instruments financiers équivalents
émis sur le fondement de droits étrangers) ;
-
la réalisation d'opérations de banque ou d'opérations
connexes
respectivement définies aux articles L. 311-1 et L. 311-2
du même code. Les opérations de banque comprennent la
réception
de fonds du public, les opérations de
crédit, ainsi que la mise à disposition de la clientèle ou
la gestion de moyens de paiement. Les opérations qui leur sont connexes
sont les opérations de change, les opérations sur or,
métaux précieux et pièces, le conseil et l'assistance en
matière de gestion de patrimoine, l'ingénierie financière,
le conseil en gestion financière, les transactions et la gestion portant
sur les valeurs mobilières et produits financiers, et les
opérations de crédit-bail ;
-
la fourniture de services d'investissement ou de services connexes
,
respectivement définis aux articles L. 321-1 et L. 321-2 du même
code. Les services d'investissement portent sur les instruments financiers
précédemment énumérés et comprennent la
réception et la transmission d'ordres pour le compte de tiers,
l'exécution d'ordres pour le compte de tiers, la négociation pour
compte propre, la gestion de portefeuille pour le compte de tiers, la prise
ferme et le placement. Les services connexes sont également
variés et comprennent la conservation ou l'administration d'instruments
financiers ; le conseil en gestion de patrimoine (qui est donc visé
à deux reprises), le conseil en stratégie financière et
industrielle aux entreprises, les services liés à la prise ferme,
les services de change liés à la fourniture de services
d'investissement et la location de coffre-forts ;
-
la réalisation d'opérations sur biens divers
, qui sont
d'après les termes de l'article L. 550-1 du code monétaire et
financier les souscriptions de rentes viagères et acquisitions de droits
sur des biens immobiliers ou mobiliers lorsque les acquéreurs n'en
assurent pas eux-mêmes la gestion.
Le conseil porte donc sur les mêmes opérations que celles
visées dans le régime du démarchage
. Il convient
néanmoins d'insister sur le fait que ce statut de CIF doit être
distingué des statuts de démarcheur et de gérant de
portefeuille. La fonction de CIF réside exclusivement dans une fonction
de conseil, à l'exclusion de toute proposition de signature de contrat
de vente d'un produit financier. Ainsi, dès lors qu'un CIF souhaite se
livrer à une activité de démarchage, il devient
régi par les nouvelles dispositions relatives à cette
activité et doit être enregistré auprès de l'AMF en
qualité de démarcheur. De même, un CIF qui souhaite
effectuer de la gestion de portefeuille doit impérativement recueillir
les agréments requis pour tout gérant de portefeuille
619(
*
)
.
La qualité de CIF
n'emporte donc pas celle de démarcheur ou de gérant de
portefeuille, les trois activités peuvent être exercées par
une seule et même personne mais doivent bénéficier de trois
déclarations ou agréments distincts.
Le
conseil en gestion de patrimoine
(CGP), dont le champ est assez
proche du conseil en investissements financiers et qui y est parfois tacitement
assimilé dans les appellations de la profession, est implicitement
inclus dans les secteurs d'activités des CIF. Il ne fait pas l'objet
d'un statut spécifique et est donc soumis aux règles applicables
à l'ensemble des prestations de conseil. Le contenu de cette
activité mériterait sans doute d'être précisé
dans la législation, dans la mesure où le « conseil en
gestion de patrimoine » constitue une formulation plus
générique et moins précise que les autres
opérations et services visés dans les articles
précédemment mentionnés, et qui font également
l'objet d'autres articles du code. De fait, une certaine ambiguïté
persiste sur les périmètres respectifs des conseils en
investissement financier et en gestion de patrimoine, car de même que les
CIF peuvent exercer notamment une activité de CGP, le CGP peut
être fourni par d'autres personnes que les CIF, compte tenu des nombreux
types de prestations qu'il comporte (financier, juridique et fiscal,
immobilier, économique). Ces deux activités comprennent donc des
prestations et acteurs communs, mais ne se confondent pas et ne font pas
l'objet d'une « hiérarchie » implicite.
2. Les professions explicitement exclues du statut
Le
II
du texte proposé pour l'article L. 541-1 ne soumet pas au
statut du CIF :
- les établissements de crédit, les organismes publics
mentionnés à l'article L. 518-1, les entreprises d'investissement
et les entreprises d'assurance ;
-
« les professionnels soumis à une réglementation
spécifique qui exercent une activité de conseil en
investissements financiers dans les limites de cette
réglementation »
.
Cette disposition vise notamment les
notaires et professions juridiques
, qui peuvent à titre uniquement
accessoire exercer une activité de conseil financier mais ne sont donc
pas soumis au statut des CIF.
De manière inverse, le
III
du texte proposé pour l'article
L. 541-1 prévoit que les conseillers financiers
« ne
peuvent à titre habituel et rémunéré donner de
consultations juridiques ou rédiger des actes sous seing privé
pour autrui que dans les conditions et limites des articles 54, 55 et 60 de la
loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de
certaines professions judiciaires et juridiques »
. Ces articles
prévoient notamment que ces prestations juridiques sont soumises
à diverses conditions :
- un diplôme (licence ou droit) ou à défaut une
«
compétence juridique appropriée
620(
*
)
à la consultation et à
la rédaction d'actes
» (article 54 de la loi du 31
décembre 1971) qui est réputée, et résulte d'une
réglementation ou d'un agrément donné pour la pratique du
droit à titre accessoire ;
- des conditions d'honorabilité (absence de certaines sanctions
pénales, disciplinaires, administratives et civiles) ;
- des conditions financières (article 55 de la loi
précitée) telles que la couverture par une assurance souscrite
personnellement ou collectivement et garantissant les conséquences
pécuniaires de la responsabilité civile professionnelle encourue
au titre de cette activité juridique, et une garantie financière
résultant d'un engagement de caution pris par une entreprise d'assurance
ou un établissement de crédit ;
- le respect du secret professionnel et la prévention des conflits
d'intérêt ;
- enfin, l'article 60 de la loi précitée dispose que
« les personnes exerçant une activité
professionnelle non réglementée pour laquelle elles justifient
d'une qualification reconnue par l'Etat ou attestée par un organisme
public ou un organisme professionnel agréé peuvent, dans les
limites de cette qualification, donner des consultations juridiques relevant
directement de leur activité principale et rédiger des actes sous
seing privé qui constituent l'accessoire nécessaire de cette
activité »
. Cette disposition concerne notamment les CIF,
dont l'activité est désormais attestée par des
associations professionnelles agréées et indirectement par l'AMF.
Aussi l'éventuelle activité juridique des CIF, qui peut
être rémunérée et habituelle dès lors qu'elle
constitue une conséquence nécessaire de leur activité de
conseil, est-elle strictement encadrée et disjointe des professions
juridiques réglementées.
3. Des conditions d'exercice nombreuses mais devant être
précisées
Le statut des CIF proposé par le présent article
prévoit de nouvelles conditions d'activité, qui n'existent pas
à l'heure actuelle, relevant de dispositions analogues à celles
d'autres professions réglementées
, telles que les professions
juridiques et désormais les démarcheurs :
- la rédaction proposée pour l'article L. 541-2 du code
monétaire et financier dispose que les CIF personnes physiques, ainsi
que les personnes physiques qui gèrent ou administrent des personnes
morales habilitées en tant que CIF
doivent remplir des conditions
d'âge, d'honorabilité et de compétence professionnelle
fixées par décret
. Ces conditions pourront être
inspirées de celles qui prévalent pour les courtiers et agents
d'assurance (en particulier les conditions de diplôme et
d'expérience professionnelle qui sont très
précisément mentionnées à l'article R. 513-1 du
code des assurances
621(
*
)
), mais
devront être également définies en fonction des
spécificités de chaque profession concernée. Les
conditions d'honorabilité sont en partie prévues par l'article L.
541-7 relatif aux conditions pénales d'exercice, dans sa
rédaction proposée par le présent article.
- de même que l'article L. 341-5, dans sa rédaction
proposée à l'article 39, le prévoit pour les
démarcheurs, le texte proposé pour l'article L. 541-3
dispose que tout CIF
« doit être en mesure de justifier
à tout moment de l'existence d'un contrat d'assurance le couvrant contre
les conséquences pécuniaires de sa responsabilité civile
professionnelle »
. Le niveau minimal de ces garanties est
fixé par décret et est fonction de la forme juridique sous
laquelle l'activité de conseil est exercée, et des produits et
services susceptibles d'être conseillés ;
- le texte proposé pour l'article L. 541-7 mentionne également
les mêmes garanties pénales que celles prévues pour les
démarcheurs
par l'article L. 341-9. Ces conditions tiennent à
l'absence de condamnation définitive depuis au moins dix ans pour des
peines
n'ayant pas exclusivement trait à des infractions
financières, puisque le I de l'article L. 541-7
précité vise les condamnations définitives pour crime et
à une peine d'emprisonnement sans sursis d'au moins trois mois pour
divers délits et infractions, parmi lesquels :
Le blanchiment, l'escroquerie et l'abus de confiance, le recel, la corruption
passive ou active, le trafic de stupéfiants, le
proxénétisme, la banqueroute, la fraude fiscale, les infractions
relatives aux chèques et cartes de paiement mentionnées aux
articles L. 163-2 à L. 163-4 et L. 163-7 du code monétaire
et financier, l'abus de faiblesse (articles L. 122-8 à L. 122-10 du code
de la consommation), la falsification, la tromperie et les délits
connexes (articles L. 213-1 à L. 213-5 du code de la consommation), le
délit d'initié et l'entrave au fonctionnement régulier
d'un marché financier (articles L. 465-1 et L. 465-2 du code
monétaire et financier), les infractions relatives aux placements
collectifs, les infractions relatives à l'appel public à
l'épargne, aux marchés réglementés, aux
négociations sur instruments financiers et aux entreprises de
marché et chambres de compensation (chapitres Ier à IV du titre
VI du livre IV du code monétaire et financier), et les infractions
relatives au secteur bancaire, aux prestataires de services d'investissement,
aux change manuel et au blanchiment de capitaux (titre VII du livre V du code
monétaire et financier). La dernière condition tient à
l'absence de condamnation depuis dix ans à la destitution des fonctions
d'officier public ou ministériel.
Le II du même article dispose
qu'en cas de condamnation à une
de ces peines, les CIF concernés doivent cesser leur activité
dans un délai d'un mois
à compter de la date de
décision définitive de justice. Le III du même article
traite en outre les
cas de condamnation par une juridiction
étrangère
: ainsi lorsqu'une telle condamnation est
passée en force de chose jugée pour une infraction constituant,
selon la loi française, un crime ou l'un des délits
mentionnés supra, le tribunal correctionnel du domicile du
condamné prononce l'interdiction d'exercice de l'activité de
démarchage. Cette incapacité s'applique également à
toute personne ayant fait l'objet d'une faillite personnelle prononcée
par une juridiction étrangère.
B. UNE AUTOREGULATION ENCADREE PAR L'AMF
L'architecture du contrôle de la profession de CIF diffère quelque
peu de celle de l'activité de démarcheur car elle ne repose ni
sur une chaîne de mandats ni sur le principe d'une carte d'emploi. Elle
privilégie l'autorégulation, dans la mesure où
l'agrément de l'AMF ne porte pas directement sur les démarcheurs
personnes physiques mais sur les associations professionnelles auxquelles ils
doivent adhérer.
1. Le rôle des associations agréées
Le dispositif proposé pour l'article L. 541-4 du code monétaire
et financier dispose que chaque CIF doit adhérer à une
association professionnelle
chargée de la représentation
collective et de la défense des droits et intérêts de ses
membres. Ces associations font l'objet d'une reconnaissance officielle
puisqu'elles doivent recevoir
l'agrément de l'AMF
, en fonction
notamment de leur représentativité et de leur aptitude à
remplir leurs missions. Ces deux derniers critères semblent relativement
imprécis :
- concernant la
représentativité
des associations, elle ne
pourra pas être uniquement jugée à l'aune de leurs
effectifs, et devra sûrement comporter une appréciation
discrétionnaire puisque le nombre total de CIF exerçant
actuellement en France n'est pas connu avec précision, et varie selon
les conceptions de 2.000 (pour les acteurs considérés comme
« stables ») à 10.000 individus. Il existe
notamment une « Chambre des indépendants du
patrimoine », qui revendique 1.200 membres et les astreint à
une formation continue dans une logique de filtre. D'autres associations
existantes sont l'Association nationale des conseils diplômés en
gestion du patrimoine et la Chambre nationale des conseils et experts
financiers ;
-
l'aptitude de ces associations représentatives à exercer
leurs missions
devra également être précisément
évaluée par l'AMF, par exemple au moyen d'un
audit
approfondi
portant sur le nombre et le rôle des permanents, le
contenu et la présentation du site internet (qui peut être un
indice concordant de professionnalisme), les formations dispensées et
les obligations en la matière, le contrôle que ces associations
opèrent sur les moyens techniques et humains de leurs membres (le
conseil financier requiert en effet de disposer d'un certaine logistique et
d'un accès étendu à l'information sur les produits et
marchés financiers) et les procédures d'admission et d'exclusion.
Il serait également utile que l'AMF rappelle précisément
dans son règlement général que les CIF doivent obtenir un
agrément spécifique pour exercer des activités de gestion
et de démarchage.
Une garantie forte de régulation du système est en outre
apportée par le fait que les conditions de compétence et le code
de bonne conduite des membres de ces associations doivent être soumis
à l'AMF et approuvés par elle.
Cette nouvelle architecture préserve donc à la fois une
certaine souplesse et des garanties de bonne pratique professionnelle
.
L'obligation d'affiliation est susceptible de mettre fin à une situation
que d'aucuns qualifient aujourd'hui de « no man's land »
préjudiciable à la sécurité des épargnants,
et de « rapatrier » dans les effectifs des associations
ceux des nombreux conseillers « indépendants » qui
ne sont aujourd'hui adhérents d'aucune association et exercent leur
activité librement, sans garantie de professionnalisme pour les
épargnants. En ce qui concerne les CIF qui sont actuellement
adhérents d'une association, il est vraisemblable que la plupart d'entre
eux présentent de meilleures garanties, mais ne
bénéficient que ponctuellement de formations, lignes de conduite
et recommandations de ces organismes, sans que leurs prestations n'aient fait
l'objet d'un quelconque contrôle ou d'une certification par une
autorité publique. La situation actuelle suppose donc de s'en remettre
à la rigueur escomptée d'associations professionnelles.
Au total, le choix de l'autorégulation encadrée a pu susciter des
critiques parfois légitimes, mais il a le mérite de ne pas
imposer des contraintes réglementaires excessives et de maintenir une
certaine
confiance
dans la responsabilisation des acteurs, et au premier
chef des associations représentatives.
Si des dysfonctionnements et
manquements importants venaient à se manifester à moyen terme, il
sera toujours temps de modifier le régime des CIF dans le sens d'une
tutelle plus prononcée
, se traduisant par exemple par une
procédure d'agrément et d'enregistrement direct des conseillers
auprès de l'AMF.
2. Les procédures d'enregistrement indirect des CIF
Le texte proposé pour l'article L. 541-5 dispose que tout CIF doit,
après vérification qu'il remplit les conditions posées aux
articles L. 541-2 et L. 541-4 en matière d'assurance et
d'affiliation, être
enregistré sur une liste tenue et mise
à jour par chaque association agréée
, selon des
modalités fixées par un décret pris après avis de
la Commission nationale de l'informatique et des libertés. Ces listes
sont transmises à l'Autorité des marchés financiers - sans
qu'il soit fait mention d'obligation particulière en termes de
régularité - qui en assure le libre accès au public.
De même que pour le régime des démarcheurs, la question de
l'établissement d'un fichier des CIF interdits d'activité peut
être posée. Un tel fichier est d'ailleurs alimenté et
publié par la FSA en Grande-Bretagne.
Dans le dispositif proposé, les CIF se voient attribuer un
numéro d'enregistrement
, au même titre que les
démarcheurs. A la différence de ces derniers, ce numéro
n'est pas délivré par l'AMF mais par les associations
agréées, conformément aux modalités
précitées d'enregistrement. Ce numéro doit être
communiqué à toute personne entrant en contact avec le CIF et
figurer sur tous ses documents, en vue d'assurer le client de la
réalité de son affiliation.
Une précision s'impose sur
la compatibilité de ces
dispositions avec la procédure d'agrément actuellement
envisagée dans le cadre de la refonte de la directive européenne
sur les services d'investissement
. Le projet de directive pose en effet le
principe que le conseil en investissements financiers constitue une
activité connexe des services d'investissement, et que les CIF soient
agréés directement en tant que tels par les autorités de
régulation, ce qui n'est pas le cas dans le dispositif proposé.
Cependant, il est également envisagé dans ce projet que les
autorités compétentes soient habilitées à
déléguer leurs fonctions d'agrément et de contrôle
des CIF à des organismes auto réglementés dûment
constitués et dotés de ressources suffisantes.
C. DES RÈGLES GÉNÉRALES DE BONNE PRATIQUE AUX
CONSÉQUENCES IMPORTANTES
Dans le dispositif proposé par le présent article pour l'article
L. 541-4 du code monétaire et financier, les associations
agréées doivent faire approuver par l'AMF les conditions de
compétence et le code de bonne conduite qu'elles soumettent à
leurs membres. Ce code doit respecter un ensemble de prescriptions centrales
fixées par le règlement général de
l'Autorité des marchés financiers
622(
*
)
, et dont les principes
généraux sont exposés par le même article et sont
autant de garanties destinées à prévenir de tout
amateurisme ou improvisation :
-
« se comporter avec loyauté et agir avec
équité au mieux des intérêts de leurs
clients »
. Cette prescription implique que le CIF fasse
preuve d'honnêteté, connaisse les objectifs et souhaits de ses
clients et respecte un principe d'équilibre dans ses relations, sans
tentative d'intimidation ni de contrainte. L'équité suppose
qu'ils formulent l'offre la mieux adaptée à la situation
financière et patrimoniale de leurs clients ;
-
« exercer leur activité avec la compétence, le
soin et la diligence qui s'imposent au mieux des intérêts de leurs
clients »
. Cette prescription emporte une obligation de
rigueur, de professionnalisme et de technicité dans la recherche des
informations et la formulation des propositions soumises aux clients ;
-
« être dotés des ressources et procédures
nécessaires pour mener à bien leurs activités et mettre en
oeuvre ces ressources et procédures avec un souci
d'efficacité
»
. La première
partie de cette disposition a trait à l'efficience, c'est-à-dire
à la mobilisation exhaustive de moyens adéquats et
opérationnels, et doit inciter les associations professionnelles
à contrôler ces moyens et procédures, notamment par la
présence d'un manuel, une répartition claire des tâches,
des moyens technologiques suffisants, la protection des données ou des
règles de prévention des conflits d'intérêt ;
-
« s'enquérir, avant de formuler un conseil, de la
situation financière de leurs clients, de leur expérience et de
leurs objectifs en matière d'investissements »
. Cette
obligation est similaire à celle qui prévaut pour les
démarcheurs en application des dispositions de l'article L. 341-11 du
code monétaire et financier, introduit par l'article 39 du
présent projet de loi, et implique que le conseiller prenne l'initiative
de cerner la situation et les motivations financières de son client.
A cet égard, on pourrait concevoir le principe d'une
«
lettre de mission
», qui ne serait pas un contrat
mais un document sollicité par le conseiller et rédigé par
le client, qui inciterait ce dernier à préciser ses attentes sur
les modalités de l'offre de conseil, notamment sa durée, son
« spectre » de prestations (s'agit-il par exemple d'un
conseil ponctuel et précis portant sur un actif particulier, ou d'une
mission plus large tenant à l'allocation globale des actifs d'un
patrimoine ?) ou les objectifs attendus (tels que l'arbitrage entre
rendement et risque). S'il ne paraît pas opportun d'introduire cet
instrument par voie législative, il serait sans doute souhaitable qu'il
figure dans les prescriptions fixées par le règlement
général de l'AMF ;
-
« communiquer, d'une manière appropriée, les
informations utiles à la prise de décisions par leurs clients
ainsi que celles concernant les modalités de leur
rémunération, notamment la tarification de leurs
prestations »
.
Ces « informations
utiles » comportent par exemple les modalités
afférentes aux clauses contractuelles, les éventuelles
perspectives de rendement et de risque induites par l'offre (par exemple s'il
s'agit d'un conseil en allocations d'actifs) ou les frais et honoraires
perçus par le conseiller.
Par ailleurs, le dispositif proposé par le présent article pour
l'article L. 541-6 du code monétaire et financier dispose que le CIF ne
peut recevoir de ses clients des fonds autres que ceux destinés à
rémunérer son activité de conseil. Il s'agit là
d'une prescription traditionnelle.
Le projet de loi ne prévoit aucune disposition relative aux relations
entre un CIF et son ou ses établissements promoteurs. Dans la mesure
cependant où cette relation demeure régie par la liberté
contractuelle, il ne semble en effet pas nécessaire de prévoir de
nouvelles règles qui pourraient aboutir à la rigidifier.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Votre commission approuve les dispositions du présent article, qui
créent un statut des CIF susceptible de lever nombre des incertitudes
actuelles, et in fine de renforcer la crédibilité de la
profession aux yeux des épargnants. Elle considère
néanmoins qu'il conviendrait de mieux impliquer l'AMF dans la
régulation des CIF et de préciser les obligations
professionnelles de ces derniers, dans un souci de plus grande protection de
l'épargnant.
A. IMPLIQUER DAVANTAGE L'AMF DANS LA RÉGLEMENTATION DES CIF
Il est normal que les conditions d'âge et d'honorabilité des CIF,
ainsi que le dispose le texte proposé par le présent article pour
l'article L. 541-2 du code monétaire et financier, soient fixées
par décret en Conseil d'Etat au même titre que d'autres
professions réglementées, dans la mesure où elles ont
trait à des dispositions judiciaires et peuvent concerner les rapports
entretenus avec d'autres professions. Il serait cependant opportun que les
conditions de compétence soient pour leur part fixées par
règlement général de l'AMF
, qui leur
confèrerait rapidement une portée plus opérationnelle et
proche des préoccupations des professionnels. Une telle disposition
serait également cohérente avec celles proposées par le
présent article pour l'article L. 541-4 du code monétaire et
financier, relatives à l'approbation par l'AMF des conditions de
compétence auxquelles les associations professionnelles
agréées soumettent leurs membres.
En conséquence, votre commission vous propose un
amendement
tendant à faire préciser les conditions de compétences
professionnelles des CIF par le règlement général de l'AMF.
De même, il serait souhaitable que le règlement
général de l'AMF précise les modalités de
transmission des listes de CIF tenues par chaque association professionnelle
agréée. Dans le dispositif proposé par le présent
article, l'article L. 541-5 du code monétaire et financier
prévoit que les modalités d'enregistrement des CIF et de mise
à jour de ces listes seraient fixées par décret
après avis de la Commission nationale de l'informatique et des
libertés, dans la mesure où elles ont trait à la
protection des informations sur les personnes. Il importerait que la nature des
obligations de transmission des fichiers des associations
(périodicité, délai, sanctions en cas de non-respect,
etc.) soient mieux précisée par l'AMF, en vue de sécuriser
le système d'enregistrement indirect des CIF et de mieux formaliser les
liens entre l'autorité de tutelle et les associations qu'elle
agrée.
Votre commission vous propose donc un
amendement
tendant à faire
préciser par le règlement général de l'AMF les
modalités de transmission de chaque liste de CIF à cette
autorité.
B. PRÉCISER LES PRINCIPES DU CODE DE BONNE CONDUITE DES CIF
Quatre points doivent être précisés :
Votre commission vous soumet en premier lieu un
amendement
rédactionnel
tendant à préciser les termes du texte
proposé par le présent article pour l'article L. 541-3 du code
monétaire et financier, qui dispose que tout CIF doit être en
mesure de justifier à tout moment de l'existence d'un contrat
d'assurance le couvrant contre les conséquences pécuniaires de sa
responsabilité civile professionnelle. Il s'agirait, notamment par souci
de cohérence avec le texte proposé par l'article 39 du
présent projet de loi pour l'article L. 341-5 du même code relatif
à l'obligation d'assurance des démarcheurs, de préciser
que ce contrat d'assurance couvre le CIF en cas de manquement à ses
obligations professionnelles, telles que définies dans le nouveau
chapitre introduit par le présent article.
Le texte proposé pour le 2° de l'article L. 541-4 pourrait en
outre comporter, comme c'est le cas en Grande-Bretagne, un
devoir
d'adéquation de l'offre du conseiller
, c'est-à-dire
l'obligation de ne recommander qu'un investissement qui soit réellement
adapté et proportionné à la situation du client, telle
qu'elle transparaît dans l'examen préalable de son
expérience et de ses objectifs, formalisé dans le 4° du
même article. Une telle disposition serait profitable, dans la mesure
où le risque majeur pesant sur la personne conseillée est sans
doute celui de mévente, davantage que celui de fraude
caractérisée, c'est-à-dire un service ou un produit
manifestement inadapté aux souhaits du client. Le 2° de l'article
L. 541-4 pourrait en outre préciser que les CIF agissent bien dans les
limites de leur statut.
Votre commission vous propose un
amendement
disposant que les CIF
exercent leur activité dans les limites imposées par leur statut
et avec toute la compétence et la diligence nécessaires pour
présenter à leur clients une offre de service adaptée et
proportionnée à leurs besoins et à leurs objectifs ;
Dans le dispositif proposé, les CIF en tant que tels ne peuvent
effectuer qu'une mission de conseil, à l'exclusion de toute
activité financière ou juridique (du moins, pour cette
dernière, à titre habituel). Dès lors, s'ils souhaitent
réaliser de la gestion d'actifs pour compte de tiers ou proposer
d'investir dans des instruments financiers précis émanant de
promoteurs, ils devront remplir les conditions d'exercice des professions de
gestionnaire et de démarcheur mandaté par un prestataire de
services d'investissement, et recevoir de l'AMF les agréments
afférents à ces régimes spécifiques. Les CIF
doivent avoir des relations claires et transparentes avec leurs clients, et en
particulier ne pas entretenir d'ambiguïté sur l'étendue de
leurs attributions ni sur l'agrément dont elles doivent faire l'objet.
Votre commission vous soumet donc un
amendement
au texte proposé
pour l'article L. 541-4 du code monétaire et financier, tendant à
préciser que
les CIF s'interdisent toute initiative susceptible de
laisser croire à la clientèle qu'ils pourraient exercer des
activités pour lesquelles ils ne seraient pas
agréés
;
Il serait enfin souhaitable de compléter les obligations
déontologiques des CIF par une disposition relative à la
communication aux clients de l'étendue et de la nature juridique des
engagements qui les lient à d'autres prestataires
. Il s'agit en
particulier de faire en sorte que le CIF informe ses clients de l'ensemble des
établissements promoteurs dont il conseillerait les produits, et pour
lesquels il doit être mandaté par ces fournisseurs. Cela
permettrait en particulier à l'épargnant de mieux évaluer
la crédibilité, l'« indépendance », la
notoriété et la compétitivité de l'offre du
conseiller. Les modalités de la rémunération du CIF,
déjà prévues dans le texte proposé pour le 5°
de l'article L. 541-4 du code monétaire et financier, n'ont en revanche
pas être précisées dans la législation, dans la
mesure où le CIF ne perçoit pas de commissions (il ne vend pas de
produits), et où le texte proposé pour l'article L. 541-6
prévoit que le CIF ne peut recevoir de ses clients de fonds autres que
ceux destinés à rémunérer son activité de
conseil.
Votre commission vous propose sur ce point un
amendement
tendant
à préciser que le CIF doit communiquer aux clients, d'une
manière appropriée, la nature et l'étendue des
éventuelles relations entretenues avec des établissements
promoteurs de produits tels que mentionnés au 1° de l'article L.
341-3 du code monétaire et financier (relatif aux personnes
habilitées à procéder au démarchage).
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article ainsi modifié.
ARTICLE 43
Sanctions disciplinaires applicables aux conseillers en
investissements financiers
Commentaire : le présent article a pour objet
d'introduire un régime de sanctions disciplinaires applicables aux
conseillers en investissements financiers.
I. LE DROIT EXISTANT
L'article L. 621-17 du code monétaire et financier ne traite pas
directement des conseillers en investissements financiers (CIF), qui ne font
dans le droit actuel l'objet d'aucun texte, mais mentionne le
pouvoir
général de sanction
et les procédures applicables par
le tribunal de grande instance de Paris et par la Commission des
opérations de bourse (COB) lorsque cette dernière constate une
pratique susceptible de porter atteinte aux droits des épargnants, que
la COB a pour vocation de garantir.
Le premier alinéa de cet article dispose ainsi que lorsqu'une pratique
contraire aux dispositions législatives ou réglementaires est de
nature à porter atteinte aux droits des épargnants, le
président de la COB peut demander en justice qu'il soit ordonné
à la personne qui en est responsable de se conformer à ces
dispositions, de mettre fin à l'irrégularité ou d'en
supprimer les effets.
Le deuxième alinéa dispose que cette demande est adressée
au président du tribunal de grande instance de Paris, qui statue par
référé et dont la décision est exécutoire
par provision. Le président du tribunal est compétent pour
connaître des exceptions d'illégalité et peut prendre,
même d'office, toute mesure conservatoire et prononcer pour
l'exécution de son ordonnance une astreinte versée au
Trésor public.
Le troisième alinéa dispose que, lorsque la pratique
relevée est passible de sanctions pénales, la COB informe le
procureur de la République de la mise en oeuvre de la procédure
devant le tribunal de grande instance de Paris.
Le quatrième et dernier alinéa de l'article L. 621-17 dispose
qu'en cas de poursuites pénales, l'astreinte, si elle a
été prononcée, n'est liquidée qu'après que
la décision sur l'action publique est devenue définitive.
II. LE DISPOSITIF PROPOSE
Le présent article propose une nouvelle rédaction pour
l'article
L. 621-17 du code monétaire et financier, qui ne traiterait
désormais que des CIF personnes physiques ou morales. Il mentionne
notamment le rôle joué par la nouvelle commission des sanctions de
l'AMF, et précise la gradation des peines applicables.
Le dispositif
proposé repose sur l'idée que les CIF doivent être soumis
à la procédure de sanction de droit commun, mais faire cependant
l'objet de sanctions spécifiques.
A. LES CIF SONT SOUMIS À LA PROCÉDURE DE SANCTIONS DE L'AMF DE
DROIT COMMUN
Le premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 621-17 du
code monétaire et financier dispose que tout manquement par les CIF aux
lois, règlements et obligations professionnelles qui leur incombent au
titre de cette activité de conseil, est passible de sanctions
prononcées par la commission des sanctions de l'AMF selon les
modalités prévues aux I, IV et V de l'article L. 621-15 du
même code.
Ces modalités, précisées à
l'article 14 du présent projet de loi, ont trait à la seule
procédure de sanction
623(
*
)
et sont les suivantes :
- le rapport d'enquête ou de contrôle établi par les
services de l'AMF est tout d'abord examiné par le collège. S'il
décide l'ouverture d'une procédure de sanction, il notifie les
griefs aux personnes concernées et à la commission des sanctions,
qui désigne un rapporteur parmi ses membres ou parmi des
personnalités désignées. En cas d'urgence, le
collège peut suspendre d'activité les personnes passibles de
sanctions. Si le collège transmet au procureur de la République
le rapport d'enquête ou de contrôle, ce dernier peut autoriser
à rendre publique cette transmission ;
- la commission des sanctions statue par décision motivée, et
aucune sanction ne peut être prononcée sans que la personne
concernée ou son représentant n'ait été entendu ou
appelé ;
- la commission des sanctions peut rendre publique sa décision dans les
publications, journaux ou supports qu'elle désigne. Les frais y
afférents sont alors acquittés par les personnes
sanctionnées.
B. UN RÉGIME SPÉCIFIQUE DE SANCTIONS
Le deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L.
621-17 précise la
gradation des sanctions spécifiques
applicables
. Il s'agit de l'avertissement, du blâme, du retrait de
l'enregistrement et de la radiation de la liste des CIF. La commission des
sanctions peut également prononcer des sanctions pécuniaires
plafonnées à 300.000 euros. Les sommes correspondant à ces
sanctions sont versées au fonds de garantie auquel est affiliée
la personne sanctionnée ou, à défaut, au Trésor
Public.
Ces sanctions diffèrent quelque peu du régime de droit
commun
prévu par les II et III de l'article L. 621-15 du code
monétaire et financier, qui mentionnent l'avertissement, le blâme,
le retrait temporaire ou définitif de la carte professionnelle, et
l'interdiction à titre temporaire ou définitif de l'exercice de
tout ou partie des activités ou services. Les sanctions applicables aux
CIF sont donc analogues et emportent notamment, dans le cas le plus grave,
interdiction d'exercice de l'activité de conseil
624(
*
)
, mais ne prévoient pas de
modalité temporaire ou permanente d'application. En outre, la sanction
pécuniaire maximale de 300.000 euros est conforme à celle du
droit commun pour les personnes physiques
625(
*
)
, mais est appliquée
indifféremment aux personnes morales et physiques, considérant la
taille et la surface financière généralement
réduites des CIF constitués en personne morale.
Le troisième et dernier alinéa institue un principe de
proportionnalité - habituel pour les sanctions disciplinaires et
notamment prévu dans le nouvel article L. 621-15 - et dispose que le
montant de la sanction doit être fixé en fonction de la
gravité des manquements commis et en relation avec les avantages ou
profits éventuellement tirés de ces manquements.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Votre commission approuve ces dispositions. Elle vous propose un
amendement
rédactionnel au texte proposé par le
présent article pour l'article L. 621-17 du code monétaire et
financier. Cet article prévoit en effet que des sanctions sont
applicables pour tout manquement à l'activité de CIF commis par
«
les personnes
mentionnées
à l'article L.
541-1
». Or cet article mentionne non seulement les CIF, dont il
définit la prestation, mais également les personnes qui ne sont
pas soumises aux dispositions relatives aux CIF : les
établissements de crédit, les entreprises d'investissement et
d'assurance, et les professionnels soumis à une réglementation
spécifique qui exercent une activité de conseil en
investissements financiers dans les limites de cette réglementation.
Dans la mesure où l'article L. 621-17 ne vise manifestement que les CIF,
en vue de préciser le régime de sanctions disciplinaires qui leur
est applicable (les autres personnes mentionnées étant soumises
à une réglementation spécifique), il paraît opportun
de simplifier la rédaction de cet article et de lever également
toute éventuelle ambiguïté sur le champ des personnes
concernées.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article ainsi modifié.
ARTICLE 44
Sanctions pénales applicables aux conseillers en
investissements financiers
Commentaire : le présent article a pour objet de
créer un régime de sanctions pénales applicables aux
conseillers en investissements financiers.
I. LE DROIT EXISTANT
Le régime pénal des conseillers en investissements financiers
(CIF) ne fait l'objet d'aucun texte spécifique. Il est donc soumis aux
dispositions de droit commun du code de la consommation, et en particulier aux
sanctions relatives au
délit d'abus de faiblesse
626(
*
)
, telles qu'elles sont
précisées dans les articles L. 122-8 à L. 122-11 de ce
code. L'article L. 122-8 dispose ainsi que
« quiconque aura
abusé de la faiblesse ou de l'ignorance d'une personne pour lui faire
souscrire, par le moyen de visites à domicile, des engagements au
comptant ou à crédit sous quelque forme que ce soit sera puni
d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 9.000 euros ou de l'une
de ces deux peines seulement, lorsque les circonstances montrent que cette
personne n'était pas en mesure d'apprécier la portée des
engagements qu'elle prenait ou de déceler les ruses ou artifices
déployés pour la convaincre à y souscrire, ou font
apparaître qu'elle a été soumise à une
contrainte »
.
Le titre VII du livre V du même code, dans lequel s'insère le
présent article, est consacré aux dispositions pénales
relatives aux prestataires de services, et comprend aujourd'hui quatre
chapitres qui traitent successivement des établissements du secteur
bancaire, des changeurs manuels, des prestataires de services d'investissement
et du blanchiment de capitaux.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Le présent article insère un chapitre III
bis
,
intitulé
« dispositions relatives aux conseillers en
investissements financiers »
et composé de trois articles,
au titre VII du livre V du code monétaire et financier. Il
prévoit des peines pénales principales et complémentaires
pour les personnes physiques et les personnes morales.
A. LES PEINES APPLICABLES AUX PERSONNES PHYSIQUES
L'article L. 573-9 propose de punir des peines prévues à
l'article
313-1 du code pénal, qui définit
l'escroquerie
et la punit de cinq ans d'emprisonnement et d'une amende
plafonnée à 375.000 euros, les délits suivants commis par
toute personne exerçant l'activité de conseil en investissements
financiers :
- ne pas remplir les conditions prévues par les articles L. 541-2
à L. 541-5 du code monétaire et financier, qui sont
l'âge, l'honorabilité, la compétence professionnelle, la
couverture par une assurance en responsabilité civile professionnelle,
l'affiliation à une association représentative
agréée par l'Autorité des marchés financiers (AMF),
les règles générales du code de bonne conduite et
l'enregistrement sur la liste tenue par son association professionnelle
d'affiliation ;
- ne pas remplir (y compris pour les personnes tentant d'exercer cette
activité de conseil) les conditions pénales prévues par
l'article L. 541-7 ;
- recevoir de ses clients des fonds autres que ceux destinés à
rémunérer son activité de conseil.
L'article L. 573-10 du code monétaire et financier, que le
présent article propose de créer, prévoit les peines
complémentaires suivantes pour les personnes physiques coupables des
délits sus-mentionnés :
- la privation des droits civiques, civils et de famille qui, selon l'article
131-26 du code pénal, porte sur le droit de vote,
l'éligibilité, le droit d'exercer une fonction juridictionnelle
ou d'être expert devant une juridiction, de représenter ou
d'assister une partie devant la justice, le droit de témoigner en
justice autrement que pour y faire de simples déclarations, et le droit
d'être tuteur ou curateur. Cette interdiction ne peut excéder une
durée de dix ans en cas de condamnation pour crime et une durée
de cinq ans en cas de condamnation pour délit, et l'interdiction du
droit de vote ou l'inéligibilité emportent interdiction ou
incapacité d'exercer une fonction publique ;
- l'interdiction, pour une durée maximale de cinq ans, d'exercer une
fonction publique ou d'exercer une activité professionnelle ou sociale
dans l'exercice ou à l'occasion de laquelle l'infraction a
été commise. Cette interdiction est, aux termes de l'article
131-27 du code pénal, définitive ou temporaire pour une
durée maximale de cinq ans, et n'est pas applicable à l'exercice
d'un mandat électif ou de responsabilités syndicales ;
- l'affichage et la diffusion de la décision peuvent alors être
prononcées.
B. LES PEINES APPLICABLES AUX PERSONNES MORALES
L'article L. 573-11 du code monétaire et financier, que le
présent article propose d'insérer, dispose que les personnes
morales peuvent être déclarées pénalement
responsables des infractions définies précédemment et
commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants. Les
peines encourues sont de deux ordres :
- une amende d'un montant égal au quintuple de celle applicable pour les
personnes physiques, soit un maximum de 1.875.000 euros ;
- les peines mentionnées à l'article 131-39 du code
pénal
627(
*
)
.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article sans modification.
CHAPITRE II :
SÉCURITÉ DES ÉPARGNANTS ET DES
DÉPOSANTS
Section 1
Mesures relatives aux organismes de placement collectif en
valeurs mobilières et aux sociétés de gestion
ARTICLE 45
Modification de la liste des actifs éligibles des
organismes de placement en valeurs mobilières et autorisation de
l'utilisation des dérivés de
crédit
Commentaire : le présent article a pour objet
d'insérer les fonds de dépôt dans la liste des actifs
éligibles des organismes de placement en valeurs mobilières, et
d'autoriser l'utilisation des dérivés de crédit par ces
fonds.
I. LE DROIT EXISTANT
Le premier alinéa de l'article L. 214-4 du code monétaire et
financier dispose que l'actif d'un organisme de placement en valeurs
mobilières (OPCVM) comprend des valeurs mobilières
françaises ou étrangères, négociées ou non
sur un marché réglementé, ainsi qu'à titre
accessoire des liquidités. Les sociétés d'investissement
à capital variable (SICAV) peuvent en outre posséder les
immeubles nécessaires à leur fonctionnement.
L'article L. 214-7 du même code dispose que le règlement d'un
fonds commun de placement (FCP) ou les statuts d'une SICAV peuvent
prévoir, dans des limites et conditions fixées par décret,
la possibilité de procéder à des opérations d'achat
ou de vente sur des marchés à terme réglementés.
Enfin, le premier alinéa de l'article L. 511-6 exonère un certain
nombre d'organismes des interdictions définies à l'article L.
511-5, aux termes duquel toute personne autre qu'un établissement de
crédit ne peut effectuer des opérations de banque à titre
habituel, ni recevoir du public des fonds à vue ou à moins de
deux ans de terme. Parmi les organismes qui ne sont pas concernés par
ces interdictions figurent les sociétés d'assurance, les
entreprises d'investissement ou les fonds communs de créances.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
A. L'INSERTION DES DÉPÔTS DANS LES ACTIFS ELIGIBLES DES
OPCVM
Le
I
du présent article propose de modifier les dispositions de
l'article L. 214-4 du code monétaire et financier en vue de
rénover la liste des actifs éligibles d'un OPCVM. Ceux-ci
comprennent désormais, dans des conditions et limites fixées par
décret en Conseil d'Etat :
- des instruments financiers au sens de l'article L. 211-1, c'est-à-dire
des actions et autres titres donnant accès au capital ou aux droits de
vote, des titres de créance (à l'exclusion des effets de commerce
et des bons de caisse), des parts ou actions d'OPCVM, des instruments
financiers à terme, et tous instruments financiers équivalents
émis sur le fondement de droits étrangers. La liste de ces
instruments recouvre notamment les dispositions de l'article L. 214-7, qui
est en conséquence supprimé par le II du présent article ;
-
des dépôts effectués auprès
d'établissements de crédit français ou
étrangers
, ce qui constitue une innovation ;
- et à titre accessoire des liquidités.
La faculté pour les SICAV de posséder les immeubles
nécessaires à leur fonctionnement est maintenue.
L'ajout des dépôts bancaires, qui sont proches des pensions,
permet aux investisseurs d'accéder à des placements
sécurisés,
et à l'industrie française de la
gestion de renforcer la compétitivité de son offre de
produits
, dans la mesure où des produits similaires existent
déjà dans d'autres pays (en Allemagne notamment) et devraient
être prochainement commercialisés en France. Il s'agit donc de
rapatrier dans des OPCVM français des dépôts qui
étaient susceptibles de se placer dans des véhicules
étrangers.
Le dispositif proposé permet de transposer une disposition de la
directive communautaire 2001/108/CE du 21 janvier 2002, qui modifie certaines
dispositions de la directive du 20 décembre 1985 sur les OPCVM. La
nouvelle directive inscrit en effet les dépôts parmi les
placements des OPCVM, ces dépôts devant, aux termes de l'article
19 f de la directive, être remboursables sur demande ou présenter
une échéance inférieure ou égale à douze
mois. Ils doivent également être constitués auprès
d'un établissement de crédit qui ait son siège statutaire
dans un Etat membre ou, si le siège statutaire de l'établissement
de crédit est situé dans un pays tiers, soit soumis à des
règles prudentielles considérées par les autorités
compétentes pour les OPCVM comme équivalentes à celles
prévues par la législation communautaire.
B. LA CONFIRMATION DE LA FACULTÉ OUVERTE AUX OPCVM DE RECOURIR AUX
DÉRIVÉS DE CRÉDIT
Le
III
du présent article modifie l'article L. 511-6 du code
monétaire et financier pour accorder aux OPCVM, au même titre que
les entreprises d'assurance et de réassurance, les entreprises
d'investissement ou les fonds communs de créance, une
dérogation au monopole des opérations de banque détenu
par les établissements de crédit
et prévu à
l'article L. 511-5.
Cette dérogation permet ainsi explicitement aux
OPCVM de contracter des dérivés de crédit, dès lors
qu'ils seraient assimilés à des opérations de banque.
Les dérivés de crédit ne sont pas une innovation
récente et sont des instruments permettant de transférer tout ou
partie du risque de crédit d'un porteur à un autre
628(
*
)
.
Cette disposition législative entérine les dispositions de
l'article 2 du décret n°2002-1439 du 10 décembre
2002
629(
*
)
, qui modifie
l'article 2 du décret n° 89-624 du 6 septembre 1989
630(
*
)
. Le décret du 10
décembre 2002 offre ainsi la possibilité aux OPCVM de recourir
à des opérations de dérivés de crédit, en
achat ou en vente de protection, en liant toutefois cet accès
631(
*
)
à une obligation d'information
(devant figurer dans la notice visée par la Commission des
opérations de bourse) et au respect de plusieurs dispositions
actuelles :
- l'approbation, par la Commission des opérations de bourse (puis par
l'Autorité des marchés financiers - AMF), d'un programme
d'activité spécifique produit par la société de
gestion, prévoyant :
a) une valorisation quotidienne des contrats confortée mensuellement
d'une comparaison avec une valorisation externe ;
b) des moyens spécifiques en analyse de crédit, laquelle doit
être réalisée par une unité indépendante des
unités commerciales et opérationnelles et soumise
semestriellement au moins à l'organe délibérant de la
société de gestion ;
c) un contrôle interne indépendant des autres fonctions
opérationnelles, autres que de direction générale de la
société de gestion ;
- l'interdiction de conclure plus de 20 % des engagements de l'OPCVM sur
dérivés de crédit avec, pour contrepartie, une
société liée au sens de l'article 10 du décret
n°89-623 du 6 septembre 1989. Cette disposition est conforme aux règles
de répartition des risques posées dans l'article 22 de la
directive modificatrice 2001/108/CE du 21 janvier 2002, relative aux placements
des OPCVM ;
- les entités sur lesquelles porte le risque de crédit peuvent
être, outre des organismes publics ou para-publics, des personnes morales
ayant émis des titres de créances négociés sur un
marché réglementé en fonctionnement régulier, et
ayant rendu publique pour au moins une émission de tels titres de
créance au moins une notation auprès d'un organisme reconnu par
le ministère de l'économie, ou ayant émis des titres en
capital négociés sur un marché réglementé.
Le sous-jacent des dérivés de crédit doit donc être
composé d'au moins un actif éligible (par la notation), et non
pas exclusivement de tels actifs, ce qui constitue une disposition relativement
souple
632(
*
)
mais conforme aux
orientations de la réglementation communautaire sur les placements des
OPCVM ;
- les contrats devront respecter les principes généraux d'une
convention cadre de place, française ou internationale,
mentionnée à l'article L. 431-7 du code monétaire et
financier, et ne pourront être dénoués que par la livraison
ou le transfert d'actifs éligibles aux OPCVM (titres ou
liquidités).
Les conditions de recours à ces instruments sophistiqués seraient
donc désormais clairement encadrées, empêchant notamment
les banques de recycler leurs mauvais risques, et correspondent en cela aux
recommandations de la commission bancaire.
L'appréciation de l'utilisation de ce type d'instrument demeure
fluctuante, et se traduit notamment depuis plusieurs années par un
débat sur la nature même des dérivés de
crédit
, qui n'est pas précisée dans la
réglementation
633(
*
)
mais
dont les instruments sous-jacents sont généralement plutôt
des crédits bancaires que des titres obligataires. Une question majeure
est ainsi de savoir si ces instruments constituent des opérations de
banque, des instruments financiers à terme, voire de quasi contrats
d'assurance, dans la mesure où les dérivés de
crédit peuvent être considérés comme une garantie
bancaire, mais aussi comme une forme d'assurance contre un risque de
défaut de paiement d'une entreprise. Ce débat n'est toujours pas
tranché, mais la position majoritaire consiste à les assimiler
à des opérations de banque, ce qui placerait les OPCVM en
infraction avec le monopole bancaire
634(
*
)
.
La présente disposition
permet donc de lever toute éventuelle ambiguïté
à
cet égard, en exemptant les OPCVM de l'interdiction relative aux
opérations de crédit.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
L'insertion des dépôts dans les actifs éligibles des OPCVM
conforte la sécurité de la gestion collective comme des
dépôts, qui offrent un faible rendement mais contribuent à
amortir les chocs boursiers auxquels les OPCVM ont été
confrontés ces dernières années.
Il convient également de préciser que les dispositions du
présent article relatives aux dérivés de crédit ne
constituent pas à proprement parler une
« validation » législative a posteriori du
décret du 10 décembre 2002, mais plutôt un prolongement de
la clarification de l'environnement réglementaire des placements des
OPCVM, clarification à laquelle ce décret avait contribué.
En effet, les gestionnaires d'OPCVM ont dès les années 90 eu
recours à ces instruments sans être certains d'y être
autorisés. Si le décret avait permis d'encadrer le recours aux
dérivés de crédit, le présent article lève
l'incertitude juridique relative existante, dans l'intérêt de la
compétitivité de la place de Paris.Il faut cependant être
conscient des changements de nature qu'une telle évolution induit :
des porteurs de parts d'OPCVM souscrivent à des risques de
crédit, qui constituent une nouvelle classe d'actifs.
Il est clair
que cela n'est acceptable que moyennant une très grande vigilance des
autorités de surveillance du marché
. L'AMF devra
définir dans son règlement général les
procédures et les limites applicables. Elle en portera donc la
responsabilité.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article sans modification.
ARTICLE 46
Suppression de l'obligation d'émettre des parts
d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM)
à tout moment de la vie de
l'OPCVM
Commentaire : le présent article a pour objet de
supprimer l'obligation d'émettre des parts d'OPCVM à tout moment
de la vie du fonds.
I. LE DROIT EXISTANT
A. UN PRINCIPE GENERAL D'ENTRÉE ET DE SORTIE A TOUT MOMENT ASSORTI
D'EXCEPTIONS
On distingue deux catégories d'OPCVM, les sociétés
d'investissement à capital variable (SICAV) et les fonds communs de
placement (FCP), qui obéissent à des règles semblables
quant au rachat ou à la suspension de l'émission d'actions ou
parts.
L'article L. 214-15 du code monétaire et financier définit la
SICAV et dispose que ses actions sont émises et rachetées
à tout moment par la société à la demande de ses
actionnaires et à la valeur liquidative majorée ou
diminuée, selon les cas, des frais et commissions.
L'article L. 214-19 dispose en outre que le rachat par la société
de ses actions, comme l'émission d'actions nouvelles, peuvent être
suspendus, à titre provisoire, par le conseil d'administration ou le
directoire, quand des circonstances exceptionnelles l'exigent et si
l'intérêt des actionnaires le commande dans des conditions
fixées par les statuts de la société.
S'agissant des FCP, l'article L. 214-20 du même code définit ces
fonds et dispose que leurs parts sont émises et rachetées
à la demande des porteurs et à la valeur liquidative
majorée ou diminuée, selon les cas, des frais et commissions.
Enfin, l'article L. 214-30 dispose que le rachat par un FCP de ses parts et
l'émission de parts nouvelles peuvent être suspendus à
titre provisoire par la société de gestion quand des
circonstances exceptionnelles l'exigent et si l'intérêt des
porteurs de parts le commande, dans des conditions fixées par le
règlement du fonds.
Les « circonstances exceptionnelles »
évoquées ont généralement trait à des
conditions de marché ou au contexte particulier d'un type de fonds,
telles que celui prévalant pour les fonds communs de placement
d'entreprise (FCPE), pour lesquels les possibilités de rachat de parts
sont soumises à des conditions plus restrictives de durée de
détention ou d'évènement survenu dans la situation
individuelle du porteur (licenciement, mariage, déménagement,
etc.).
B. UNE INTERPRETATION RESTRICTIVE DES DISPOSITIONS COMMUNAUTAIRES
Le droit actuel constitue la transposition de l'article 37 de la directive
85/611/CEE du 20 décembre 1985 portant coordination des dispositions
législatives, réglementaires et administratives concernant
certains OPCVM. Cet article dispose en effet qu' «
un OPCVM
doit racheter ou rembourser ses parts à la demande du
participant
». Par dérogation cependant,
« un
OPCVM peut suspendre provisoirement, dans les
cas et selon
les modalités prévus par la loi, le règlement du fonds ou
les documents constitutifs de la société d'investissement, le
rachat ou le remboursement de ses parts. La suspension ne peut être
prévue que dans des cas exceptionnels quand les circonstances l'exigent
et si la suspension est justifiée compte tenu des intérêts
des participants »
. En outre,
« les États
membres peuvent permettre aux autorités compétentes d'exiger dans
l'intérêt des participants ou dans l'intérêt public
la suspension du rachat ou du remboursement des parts »
.
Ainsi, les dispositions législatives françaises, si elles
prévoient un principe général assorti d'exceptions,
constituent néanmoins une interprétation restrictive de la
directive,
dans la mesure où elles lient l'émission au rachat
de parts ou actions à tout moment
. La directive préserve en
effet une possibilité de sortie à tout moment des participants,
mais ne prévoit pas de dispositions semblables pour l'entrée
(achat de parts ou actions) dans le fonds, que la loi française inscrit
dans le principe général.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
A. LES MODIFICATIONS DU DROIT ACTUEL
Les
II
et
III
du présent article proposent d'assouplir les
dispositions existantes par l'insertion d'un second alinéa aux articles
L. 214-19 et L. 214
-
30 précités, qui dispose que le
règlement général de l'Autorité des marchés
financiers (AMF) fixe les cas et les conditions, autres que ceux explicitement
mentionnés au premier alinéa des mêmes articles, dans
lesquels les statuts de la société ou le règlement du
fonds peuvent prévoir l'interruption provisoire ou définitive de
l'émission d'actions.
Par coordination, le
I
de cet article insère également les
termes
« sous réserve des dispositions de l'article L.
214-19 »
au début du deuxième alinéa de
l'article L. 214-15 précité.
Les dispositions du présent article ne concernent que l'interruption
provisoire ou définitive de la seule émission d'actions ou parts,
et non de leur rachat, ce qui signifie que de nouvelles exceptions sont ainsi
apportées aux modalités d'entrée dans un fonds, mais non
aux possibilités de sortie. En effet si les restrictions à
l'achat (et donc à l'émission) peuvent s'imposer dans des cas
précis (cf. B.), il convient de maintenir le principe de droit commun de
rachat à tout moment, qui est protecteur pour l'investisseur.
Ces
nouvelles exceptions, qui seront prévues par le règlement
général de l'AMF, impliquent donc que les OPCVM ne seront plus
contraints d'émettre des parts ou des actions à tout moment de la
vie du fonds
.
B. LES APPLICATIONS PRATIQUES
La suppression de l'obligation d'émettre à tout moment se
justifie en particulier dans deux cas précis :
-
les fonds dits « dédiés »,
c'est-à-dire réservés à un seul ou à un
nombre restreint d'investisseurs. Ces fonds ne sont par définition pas
ouverts à d'autres participants et les conditions d'émission de
nouvelles parts, généralement à la demande du ou des
investisseurs s'ils souhaitent accroître leur encours, sont fixées
dans le règlement du fonds. Les possibilités de sortie du fonds
sont en revanche plus étendues;
-
les fonds appelés « à formule »,
définis par la Commission des opérations de bourse
635(
*
)
comme les OPCVM
« dont
l'objectif de gestion est d'atteindre, à l'expiration d'une
période déterminée, un montant final ainsi que de
distribuer, le cas échéant, des revenus, par application
mécanique d'une formule de calcul prédéfinie, reposant sur
des indicateurs de marchés financiers ou des instruments financiers. En
contrepartie de l'engagement ainsi décrit, la réalisation de cet
objectif de gestion doit être garantie par un établissement de
crédit dont le siège social est situé dans l'OCDE, soit
vis-à-vis de l'OPCVM, soit vis-à-vis des porteurs de part(s) ou
d'action(s) »
. Ces fonds connaissent depuis deux ans un vif
succès auprès des particuliers - essentiellement en raison de
l'attrait que présente, dans les difficiles circonstances de
marché actuelles, le cumul d'un capital garanti à
échéance et d'une formule d'indexation sur la performance - et
présentent des modalités spécifiques d'entrée. Une
période limitée de souscription est généralement
fixée, et le porteur potentiel entrant au-delà de cette
période ne peut plus bénéficier de la garantie, ce qui
annule tout l'intérêt du fonds. Dans la mesure où une telle
interdiction d'émission de nouvelles parts n'est pas prévue par
la législation actuelle, les promoteurs de ce type de fonds tendent
généralement à fixer des droits d'entrée
prohibitifs afin de dissuader de nouveaux entrants au-delà de la
période de souscription. Les nouvelles dispositions du présent
article permettront au règlement général de prévoir
ce cas de figure.
La rénovation de l'encadrement des fonds à formule
Une
remarque s'impose sur ces « fonds à formule »,
apparus il y a treize ans mais qui connaissent un renouveau et
représentent aujourd'hui près du quart des agréments
d'OPCVM généraux délivrés par la COB. Le tableau
ci-après permet de prendre la mesure de leur
notoriété :
Répartition des OPCVM par classification (OPCVM nourriciers
inclus)
|
Au 31/12/2002 |
Au 31/12/2001 |
|
|
||
OPCVM |
Encours (en milliards €) |
Nombre d'OPCVM |
Encours (en milliards €) |
Nombre d'OPCVM |
Variation de l'encours |
Variation du nombre de produits |
Actions françaises |
44,0 |
505 |
66,3 |
535 |
-33,7% |
-30 |
Actions des pays de l'UE |
4,4 |
75 |
- |
- |
- |
75 |
Actions de pays de la zone euro |
26,5 |
328 |
33,3 |
286 |
-20,4% |
42 |
Actions internationales |
51,3 |
1 010 |
69,6 |
1 008 |
-26,3% |
2 |
Oblig./titres de créances libellés en euro |
90,2 |
927 |
92,2 |
957 |
-2,2% |
-30 |
Oblig./titres de créances internationaux |
57, |
344 |
46,5 |
338 |
22,8% |
6 |
Monétaire euro |
303,1 |
627 |
255,9 |
639 |
18,4% |
-12 |
Monétaire à vocation internationale |
1,2 |
24 |
1,8 |
22 |
-34,6% |
2 |
Diversifié |
179,3 |
3 136 |
197,0 |
3 056 |
-9,0% |
80 |
Garanti ou assorti d'une protection |
46,1 |
815 |
37,6 |
762 |
22,6% |
53 |
TOTAL |
803,1 |
7 791 |
800,2 |
7 603 |
0,4% |
188 |
Source : ministère de l'économie, des
finances
et de l'industrie
Ces fonds posent toutefois de nombreuses questions en termes de transparence,
de niveau de frais (relativement élevés et plus difficiles
à déterminer dans leur globalité que dans un fonds
« classique »), de division des risques et surtout
d'information de l'investisseur au regard du fonctionnement des produits et des
espérances réelles de gain (susceptibles de créer des
attentes trop optimistes). Une régulation plus stricte de ces fonds est
donc souhaitable, mais ne devrait pas requérir de nouvelles dispositions
législatives, dans la mesure où les orientations adoptées
par la COB à la fin de l'année dernière semblent
satisfaisantes au regard de la protection des épargnants et de la
nécessité de maintenir l'inventivité et la
compétitivité de l'industrie française de la gestion. La
COB a en effet adopté les cinq orientations suivantes :
- une définition des OPCVM à formule et la création d'une
nouvelle catégorie unifiée, avec une mention particulière
pour les fonds à capital garanti ;
- l'élaboration avec la profession d'une charte de commercialisation et
de nouvelles règles pour les documents publicitaires (qui devront
reprendre l'objectif de gestion et les avertissements figurant dans la notice
d'information) ;
- une meilleure compréhension de l'économie du produit par
l'épargnant : avertissement spécifique en en-tête de
la notice d'information notamment sur les aléas relatifs aux
valorisations avant échéance), description
détaillée de la formule d'indexation avec des exemples
chiffrés, indications sur l'espérance de gain par rapport au taux
sans risque (notamment par des simulations historiques) ;
- rappel du principe de primauté de l'intérêt des
investisseurs, qui implique notamment pour la société de gestion
l'obligation d'obtenir, par une mise en concurrence des contreparties, le juste
prix du contrat mettant en oeuvre la formule ;
- enfin soumission à la règle de division des risques, dans des
conditions qui tiennent compte de la particularité de ces fonds.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Les modifications proposées par le présent article s'imposent
pour deux raisons. D'une part pour des raisons de
compétitivité
, puisque sont déjà
commercialisés en France des OPCVM coordonnés enregistrés
au Luxembourg ou en Allemagne qui ne sont pas astreints aux obligations
françaises relatives à l'émission, et, d'autre part, de
meilleure conformité au droit communautaire
, dans la mesure
où les nouvelles directives 2001/107/CE et 2001/108/CE du 21 janvier
2002, qui modifient substantiellement la directive originelle de 1985 sur les
OPCVM, ne prévoient pas ces obligations.
L'assouplissement de la réglementation relative aux suspensions
d'émission devrait favoriser la
transparence
(notamment par une
baisse des rétrocessions tacites sur les commissions de mouvement pour
les grands investisseurs) voire la diminution des droits d'entrée, en
particulier pour les fonds à formule. Il pourrait toutefois
pénaliser les fonds présentant un taux de rotation
636(
*
)
élevé de leur
portefeuille, dans la mesure où la baisse escomptée des droits
d'entrée ne serait pas compensée par une hausse nulle ou
limitée des commissions de mouvement, qui sont directement liées
à cette rotation.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article sans modification.
ARTICLE 47
Introduction d'une étanchéité
financière entre les différents compartiments d'un fonds à
compartiments
Commentaire : le présent article a pour objet de
permettre une isolation financière entre les compartiments d'un fonds
à compartiment.
I. LE DROIT EXISTANT
Le I de l'article L. 214-33 du code monétaire et financier
prévoit qu'un OPCVM peut comporter deux ou plusieurs compartiments. Il
dispose que
« chaque compartiment donne lieu à
l'émission d'une catégorie d'actions ou de parts
représentative des actifs de l'OPCVM qui lui sont
attribués »
. Le II du même article dispose en outre
que chaque compartiment fait l'objet d'une comptabilité distincte.
Le deuxième alinéa de l'article L. 214-43 du code
monétaire et financier, relatif aux fonds communs de créance
(FCC), dispose que ce type de fonds peut comporter deux ou plusieurs
compartiments si son règlement le prévoit, chaque compartiment
donnant alors lieu à l'émission de parts représentatives
des actifs du fonds qui lui sont attribués.
Si aucune disposition ne prévoit explicitement un principe de
solidarité financière entre les compartiments d'un fonds,
l'ensemble de ces compartiments n'en est pas moins aujourd'hui soumis au
principe de l'unicité du patrimoine de l'article 2093 du code
civil
, qui dispose que
« les biens du débiteur sont le
gage commun de ses créanciers ; et le prix s'en distribue entre eux
par contribution, à moins qu'il n'y ait entre les créanciers des
causes légitimes de préférence ».
Dans le
cas des OPCVM à compartiments, cette disposition implique que les
dettes, créances et obligations de ces compartiments sont ainsi
assumées par le véhicule de placement qui les porte, et qui
détient la personnalité morale (dans le cas d'une SICAV) ou
constitue une copropriété (dans le cas des FCP).
II. LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE
Le présent article propose de modifier le I de l'article L. 214-33 et
l'article L. 214-43 précités,
de façon à
permettre d'isoler financièrement les compartiments d'un fonds
. Il
dispose, par dérogation à l'article 2093 du code civil
précité et sauf stipulation contraire des documents constitutifs
de l'OPCVM ou du FCC, que
« les actifs d'un compartiment
déterminé ne répondent que des dettes, engagements et
obligations et ne bénéficient que des créances qui
concernent ce compartiment »
. L'étanchéité
des compartiments n'est toutefois pas une obligation mais une faculté,
dès lors que le règlement du fonds le prévoit, qui devrait
néanmoins être choisie par la grande majorité des OPCVM.
Les OPCVM à compartiments
Le
marché des OPCVM à compartiments est en France plutôt
réduit
puisqu'au 31 décembre 2002, 28 OPCVM
« tête » coiffant 120 compartiments (contre 128 un an
plus tôt) réunissaient un encours de 4,9 milliards d'euros, soit
0,6% des 803 milliards d'euros d'encours global des OPCVM agréés
par la COB. A la même date, 3 084 OPCVM ou compartiments
coordonnés agréés dans d'autres pays européens
bénéficiaient d'autorisations de commercialisation
délivrées par la COB, pour un encours global assez faible,
estimé à 29 milliards d'euros. Ces fonds de droits
européens sont néanmoins très majoritairement des OPCVM de
droit luxembourgeois et à compartiments puisqu'ils se
répartissent entre 81 fonds sans compartiments et 231 fonds à
compartiments (avec une moyenne de 13 compartiments par fonds, soit bien
davantage que pour les fonds de droit français).
Ces fonds sont cependant vraisemblablement appelés à se
développer en France car ils
présentent un triple
intérêt
:
- des frais de gestion généralement inférieurs, en
particulier pour les fonds coordonnés dont les compartiments sont plus
nombreux et la taille moyenne des encours plus élevée qu'en
France ;
- la possibilité pour l'investisseur de changer plus facilement de
catégorie d'actifs (actions, obligations, monétaire), de secteur
économique, de « style de gestion » (par exemple
passer d'une gestion en titres dits « de croissance » -
potentiellement rentables mais volatils et qui tendent à accuser
davantage les chocs récessifs - à un style dit
« valeur » dont les performances sont moins spectaculaires
mais plus régulières), de zone géographique de placement
ou de type de titres (par exemple céder des actions de grandes
capitalisations pour se positionner sur des PME). Si le choix se
révèle suffisamment vaste au sein du fonds, l'investisseur peut
passer d'un compartiment à un autre tout en restant dans le même
OPCVM, donc avec des frais d'arbitrage généralement
inférieurs aux droits d'entrée et de sortie classiques ;
- du point de vue du promoteur, les fonds à compartiments permettent de
réaliser des économies d'échelle sur les coûts
variables de structure, d'accroître la taille moyenne des fonds et de
mieux fidéliser la clientèle en lui permettant d'arbitrer tout en
restant dans le même fonds.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Cette innovation présente trois avantages :
-
elle est susceptible de renforcer la sécurité juridique et
financière des porteurs de parts
, bien que la solidarité qui
prévaut aujourd'hui entre les compartiments n'ait jusqu'à
présent pas créé d'incident, qui se manifesterait par un
appel de fonds pour remédier aux difficultés d'un ou de plusieurs
autres compartiments ;
-
elle est conforme aux orientations communautaires
, puisque la
directive 85/611/CE du 20 décembre 1985 et les deux directives
2001/107/CE et 2001/108/CE du 21 janvier 2002, qui fixent le cadre juridique
européen des OPCVM, ne comportent pas de dispositions précises
sur la solidarité ou la séparation financière des
compartiments ;
-
elle pourrait donner un nouvel élan à la création de
fonds à compartiments de droit français
, qui souffrent de la
comparaison avec leurs homologues luxembourgeois coordonnés
(c'est-à-dire commercialisables en France), lesquels proposent
déjà à leurs porteurs l'option de l'isolation.
En outre le dispositif proposé répond à une forte demande
des professionnels et devrait permettre aux promoteurs de fonds communs de
placement d'entreprise de créer des fonds à compartiments
garantis, lesquels impliquent effectivement que la garantie ne s'applique
qu'aux compartiments concernés et non à l'ensemble de l'OPCVM.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article sans modification.
ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 47
Possibilité de
créer différentes catégories de parts ou actions au sein
d'un organisme de placement collectif en valeurs
mobilières
Commentaire : le présent article additionnel a
pour
objet de permettre la création de différentes catégories
de parts ou actions au sein des organismes de placement collectif en valeurs
mobilières
I. LE DROIT EXISTANT
La législation sur les OPCVM ne reconnaît l'existence de
catégories de parts conférant des droits différents aux
porteurs que pour les fonds communs de créances (FCC) et les fonds
communs de placement à risque (FCPR)
. Le cinquième
alinéa de l'article L. 214-43 du code monétaire et financier
dispose ainsi que les parts de FCC peuvent donner lieu à des droits
différents sur le capital et les intérêts, et le 8 de
l'article L. 214-36 du même code dispose que les parts de FCPR peuvent
donner lieu à des droits différents sur l'actif net ou sur les
produits du fonds dans des conditions fixées par
décret
637(
*
)
.
S'agissant des autres OPCVM - sociétés d'investissement à
capital variable (SICAV) et fonds communs de placement (FCP) - la
création de catégorie de parts n'est possible que pour distinguer
les parts ou actions de distribution et de capitalisation
638(
*
)
. Les droits des porteurs ou
actionnaires sont identiques, de même que les frais qu'ils acquittent,
mais la valorisation des parts ou actions est légèrement
différente, selon qu'elle intègre (capitalisation) ou non
(distribution) le dividende annuel dû par le FCP ou la SICAV. Il n'existe
donc pas de catégories de parts ou actions correspondant à des
types d'investisseurs aux intérêts dissemblables.
En revanche, la possibilité de créer des actions conférant
des droits de vote différents aux actionnaires de sociétés
commerciales est prévue par le code de commerce. L'article L. 228-11 de
ce code dispose ainsi que lors de la constitution de la société
ou au cours de son existence, il peut être créé des actions
de priorité jouissant d'avantages par rapport à toutes autres
actions (actions à droit de vote double en particulier). Il peut de
même être créé des actions à dividende
prioritaire mais sans droit de vote dans les conditions prévues aux
articles L. 228-12 à L. 228-20.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Votre commission vous propose d'insérer dans le code monétaire et
financier une disposition tendant à prévoir un principe
général permettant la création, au sein d'un même
OPCVM, de différentes catégories de parts ou d'actions.
Il s'agit par cette disposition de pérenniser par voie
législative, et de diversifier, les possibilités de
création de catégorie de parts, et plus particulièrement
de favoriser la coexistence d'intérêts différents dans un
même OPCVM, notamment entre investisseurs institutionnels (entreprises,
fonds de retraite, institutions de prévoyance...) et particuliers, qui
n'ont ni la même surface financière, ni des attentes identiques
sur ce type de produits. Elle se traduirait par exemple par la création
de parts et actions se différenciant par le montant unitaire, le niveau
des frais de distribution ou les modalités de versement du dividende.
Trois principaux arguments plaident en faveur de la mise en place de ce
dispositif :
- une exigence
concurrentielle
: cette possibilité existe
déjà depuis plusieurs années chez certains partenaires
européens, le Luxembourg et la Grande-Bretagne en particulier, dont
l'abondante offre de gestion tend à capter une partie de la demande des
institutionnels français et étrangers grâce à des
catégories de parts qui leur sont spécifiquement
dédiées ;
- une exigence de
rationalisation de l'offre de produits
: les
entreprises d'investissement tendent aujourd'hui à créer un OPCVM
par type de clientèle, ce qui contribue à rendre l'offre peu
lisible, à minorer la taille moyenne des fonds et éventuellement
à différencier les styles de gestion au profit des investisseurs
institutionnels. Le transfert de la différenciation sur les
catégories de parts plutôt que sur les fonds eux-mêmes
permettrait de rationaliser les gammes d'OPCVM et d'accroître l'encours
moyen des fonds
639(
*
)
, ce qui
présente des avantages en termes de diminution des coûts fixes et
variables de gestion (comptabilité, frais de transaction sur titres,
etc.) et d'attractivité de l'industrie française de la gestion.
En outre, les OPCVM dont l'encours est important permettent de réduire
fortement les contraintes des investisseurs institutionnels afférentes
au ratio d'emprise (souvent plafonné à 10% de l'encours du
fonds) ;
- un impératif de
transparence
: le rapport intitulé
«
Frais et commissions à la charge de l'investisseur dans
la gestion collective
», publié en octobre 2002 à
la suite des travaux menés par la Commission des opérations de
bourse et la profession, a mis en évidence que l'absence de
catégories de parts favorisait la mise en place de mécanismes de
rétrocessions de frais
dans les fonds de fonds et au profit des
investisseurs institutionnels
640(
*
)
. Ces pratiques sont d'autant plus
contestables qu'elles sont largement diffusées mais non moins
officieuses. Le nouveau régime permettrait d'établir une plus
grande transparence des frais affichés en proposant des frais de
distribution réels pour les investisseurs institutionnels
inférieurs à ceux aujourd'hui publiés, sans pour autant
accroître ceux applicables aux particuliers, dans la mesure où les
coûts de gestion diminueraient.
Il est donc proposé, par le présent article additionnel,
d'insérer un second alinéa à l'article L. 214-2 du code
monétaire et financier
(portant dispositions communes aux OPCVM),
disposant que les OPCVM peuvent comprendre différentes catégories
de parts ou d'actions dans des conditions fixées respectivement par le
règlement du fonds ou les statuts de la SICAV, selon les prescriptions
du règlement général de l'Autorité des
marchés financiers. Ces prescriptions seraient destinées à
assurer une parfaite transparence dans la création des catégories
de parts et actions.
Décision de la commission : votre commission vous demande
d'adopter cet article additionnel.
ARTICLE 48
Suppression de la distinction entre les
sociétés de gestion collective et les sociétés de
gestion de portefeuille
Commentaire : le présent article a pour objet de
supprimer la catégorie des sociétés de gestion collective,
conformément aux dispositions de la directive communautaire 2001/107/CE
du 21 janvier 2002. La date limite de mise en conformité avec ces
dispositions est fixée au 13 février 2004.
I. LE DROIT EXISTANT
A. LA DISTINCTION JURIDIQUE ENTRE SOCIÉTÉ DE GESTION
COLLECTIVE ET SOCIÉTÉ DE GESTION DE PORTEFEUILLE
Les articles L. 214-24 et L. 214-25
641(
*
)
du code monétaire et financier
mentionnent, sans les nommer sous cette appellation, les sociétés
de gestion collective, qui sont des
sociétés de gestion
à objet exclusif
, cet objet résidant dans la gestion d'un
organisme de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM).
L'article L. 214-24 du code monétaire et financier dispose qu'un FCP est
constitué à l'initiative conjointe d'une société de
gestion, telle que mentionnée à l'article L. 214-25,
chargée de sa gestion, et d'une personne morale dépositaire des
actifs du fonds. Cette société et cette personne
établissent le règlement du fonds. La société
chargée de la gestion du FCP peut être une société
de gestion de portefeuille.
L'article L. 214-25 du même code dispose que la société de
gestion a pour objet exclusif (
il s'agit alors d'une société
de gestion collective
) des sociétés d'investissement à
capital variable (SICAV), des FCP et des sociétés
d'investissement. La société de gestion est soumise aux
mêmes règles, notamment en matière d'agrément et de
contrôle, que celles prévues pour les sociétés
mentionnées à l'article L. 532-9, c'est-à-dire les
sociétés de gestion de portefeuille.
Les
sociétés de gestion de portefeuille
sont
définies à l'article L. 532-9 du code monétaire et
financier comme les entreprises d'investissement exerçant à titre
principal la gestion de portefeuille pour le compte de tiers, et sont
agréées par la Commission des opérations de bourse.
B. L'ORIGINE COMMUNAUTAIRE DES SOCIÉTÉS DE GESTION
COLLECTIVE
La raison d'être des sociétés de gestion collective est
liée aux dispositions de la
directive 85/611/CE du 20 décembre
1985
relative aux organismes de placements collectifs en valeurs
mobilières (OPCVM), qui limitait l'activité des
sociétés de gestion à la seule gestion collective d'OPCVM
pour compte de tiers (ce qui constitue l'actuelle définition des
sociétés de gestion de portefeuille), et excluait donc la gestion
individualisée sous forme de mandat de gestion de portefeuille. Cette
disposition était peu cohérente avec la pratique des
sociétés de gestion de portefeuille, qui exercent
généralement à la fois des activités de gestion
collective et de mandat.
La transposition de la directive a donc
amené ces dernières à créer des
sociétés de gestion collective
ad hoc
, à objet
exclusif
(donc ne fournissant aucun service de mandat de gestion) et ne
disposant pas de réels moyens financiers ou humains - l'essentiel de ces
moyens étant concentré dans les sociétés de gestion
de portefeuille - pour pouvoir bénéficier du passeport
européen et constituer des fonds coordonnés exportables. Les
sociétés de gestion collective sont donc des structures quelque
peu factices imposées par les critères communautaires de
reconnaissance des OPCVM.
C. LES NOUVELLES DISPOSITIONS COMMUNAUTAIRES SUR LA CAPACITÉ
JURIDIQUE DES SOCIÉTÉS DE GESTION
La nouvelle directive 2001/107/CE du 21 janvier 2002 sur la
réglementation des sociétés de gestion a cependant
étendu la capacité juridique des sociétés de
gestion à la gestion de mandats individualisés
642(
*
)
. Cette disposition avait
été anticipée dans les faits par les
sociétés de gestion françaises, dont les gammes de fonds
coordonnés étaient donc logées dans des
sociétés de gestion collective.
Le 3 de l'article 5 de la directive dispose ainsi que les Etats membres peuvent
autoriser les sociétés de gestion à fournir,
« outre la gestion de fonds communs de placement et de
sociétés d'investissement, une activité de gestion de
portefeuilles d'investissement, y compris ceux qui sont détenus par des
fonds de retraite, sur une base discrétionnaire et
individualisée, dans le cadre d'un mandat donné par les
investisseurs »
.
L'existence des sociétés de gestion collective n'est donc plus
justifiée, dans la mesure où les sociétés de
gestion de portefeuille sont susceptibles de requérir le passeport pour
leurs activités de gestion collective comme individuelle.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
A. LA DISPARITION PROGRAMMÉE DES SOCIÉTÉS DE GESTION
COLLECTIVE
Le présent article propose d'intégrer l'évolution du droit
communautaire en supprimant
la distinction entre sociétés de
gestion collective et sociétés de gestion de portefeuille, en
substituant les secondes aux premières
.
Cette disposition prend
effet à compter du 13 février 2004
, date prévue de
transposition de la directive 2001/107/CE précitée. Des
modifications transitoires du code monétaire et financier ayant trait
aux sociétés de gestion collective sont néanmoins
prévues et fond l'objet des dispositions de l'article 33 du
présent projet de loi
643(
*
)
.
Le
I
du présent article, dont les dispositions prennent effet
à compter du 13 février 2004, tire les conséquences de
cette suppression :
- au premier alinéa de l'article L. 214-24 du code monétaire et
financier, les termes
« société de gestion de
portefeuille »
se substituent aux termes
« mentionnés à l'article L. 214-25 »
,
qui font référence aux sociétés de gestion
collective ;
- le troisième alinéa du même article, qui précise
que la société chargée de la gestion d'un FCP peut
également être une société de gestion de
portefeuille, est supprimé, puisque seules de telles
sociétés pourront désormais gérer des FCP ;
- les deux premiers alinéas de l'article L. 214-25, qui
définissent l'objet exclusif et la procédure d'agrément de
la société de gestion collective, qui est la même que pour
les sociétés de gestion de portefeuille, sont en
conséquence supprimés ;
- enfin le C du I du présent article dispose que le chapitre III du
titre IV du livre V du code monétaire et financier et son article L.
543-I, relatifs aux sociétés de gestion collective, sont
abrogés, également à compter du 13 février
2004.
C. LES MESURES TRANSITOIRES PORTANT DÉLAI DE MISE EN
CONFORMITÉ
Le
II
du présent article prévoit les obligations des
sociétés de gestion collective durant la période
transitoire. Ces sociétés disposent donc d'un
délai de
mise en conformité
, jusqu'au 13 février 2004, pour harmoniser
leurs organisation et moyens avec les présentes dispositions. Elles
doivent en outre effectuer une déclaration d'activité et
présenter une demande d'agrément (afin de faire en sorte que les
sociétés de gestion collective deviennent des
sociétés de gestion de portefeuille) auprès de
l'Autorité des marchés financiers avant le 31 décembre
2003, et poursuivre leur activité jusqu'à ce que
l'autorité ait statué sur cette demande. Ce délai, assez
court compte tenu des échéances potentielles pour le vote du
présent projet de loi, ne devrait cependant pas créer de
difficultés majeures pour les sociétés concernées.
La plupart des sociétés de gestion de portefeuille fournissent en
effet des prestations collectives et individuelles, de telle sorte que les
OPCVM coordonnés pourront par exemple être rapatriés dans
les sociétés de gestion de portefeuille, et que les
sociétés de gestion collective qui les commercialisent seront
supprimées ou aisément converties en nouvelles
sociétés de gestion de portefeuille.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article sans modification.
Section 2
Autres dispositions
ARTICLE 49
Adhésion au mécanisme de garantie des titres
de l'ensemble des prestataires de services d'investissement, à
l'exception des sociétés de gestion de
portefeuille
Commentaire : le présent article a pour objet de
faire adhérer au fonds de garantie des dépôts l'ensemble
des prestataires de services d'investissement, à l'exception des
sociétés de gestion de portefeuille.
I. LE DROIT EXISTANT
L'article L. 322-1 du code monétaire et financier définit le
mécanisme de garantie des titres, institué par l'article 62
modifié de la loi n° 96-597 du 2 juillet 1996 (dite
« loi de modernisation des activités
financières »), son objet et ses adhérents.
Il dispose ainsi que
«
lorsqu'ils sont conservateurs
644(
*
)
d'instruments financiers
confiés par des tiers
, les établissements de crédit et
les entreprises d'investissement agréés en France, les
intermédiaires habilités par le conseil des marchés
financiers au titre de la conservation et de l'administration des instruments
financiers et les adhérents des chambres de compensation adhèrent
à un mécanisme de garantie des titres.
Ce mécanisme a
pour objet d'indemniser les investisseurs en cas d'indisponibilité de
leurs instruments financiers ainsi que de leurs dépôts en
espèces
lorsqu'ils sont liés à un service
d'investissement, à la compensation ou à la conservation
d'instruments financiers et qu'ils n'entrent pas dans le champ d'application du
fonds de garantie des dépôts institué par l'article
L. 312-4 »
. En outre,
« ne peuvent
bénéficier du mécanisme de garantie les personnes et les
fonds exclus de l'indemnisation par l'article L. 312-4 »
.
L'article L. 312-4 du même code définit le
fonds de garantie
des dépôts des établissements de crédit
et
précise son objet ainsi que les dépôts exclus de cette
indemnisation. Il dispose ainsi que «
les
établissements de crédit agréés en France
adhèrent à un fonds de garantie des dépôts qui a
pour objet d'indemniser les déposants en cas d'indisponibilité de
leurs dépôts ou autres fonds remboursables. Sont exclus de cette
indemnisation les dépôts ou autres fonds des établissements
de crédit, des entreprises d'assurance, des organismes de placement
collectif, des organismes de retraite, des entreprises d'investissement et des
personnes mentionnées à l'article L. 518-1 ou au 1 de
l'article L. 312-2. Peuvent être exclus de l'indemnisation, dans des
conditions prévues par un règlement du comité de la
réglementation bancaire et financière, des dépôts ou
autres fonds en raison soit des informations sur la situation de l'entreprise
ou des avantages particuliers dont a pu bénéficier le
déposant concerné, soit de la nature spécifique de
certains fonds ou dépôts, soit de l'origine illicite des fonds
concernés
».
II. LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE
Le présent article propose deux modifications de l'article L. 322-1
relatif au mécanisme de garantie des titres :
- la mention «
lorsqu'ils sont conservateurs d'instruments
financiers confiés par des tiers
» est
supprimée ;
- les termes «
les établissements de crédit et les
entreprises d'investissement
» sont remplacés par les mots
«
les prestataires de services d'investissement, à
l'exception des sociétés de gestion de
portefeuille
».
Il résulte de ces deux dispositions une
modification du
périmètre des adhérents du fonds de garantie
, qui est
aujourd'hui trop étroit en ce qu'il ne concerne que les conservateurs
d'instruments financiers, en vue d'accroître la sécurité
financière des investisseurs. Les adhérents, qui sont aussi les
bénéficiaires (ou du moins leurs clients), seraient
désormais l'ensemble des prestataires de services d'investissement (PSI,
qui sont, aux termes de l'article L. 531-1 du code monétaire et
financier, les établissements de crédit et les entreprises
d'investissement agréés pour fournir des services
d'investissement),
qu'ils assurent ou non une fonction de conservation de
titres
.
L'exclusion actuelle des sociétés de gestion de portefeuille
du mécanisme de garantie est toutefois maintenue par une disposition
spécifique
. Les sociétés de gestion sont en effet des
PSI, mais dans la mesure où l'article L. 533-12 du code monétaire
et financier leur interdit d'être dépositaires des fonds qu'elles
gèrent, elles sont de facto aujourd'hui exclues du mécanisme de
garantie.
Le mécanisme de garantie établit donc une solidarité entre
PSI au bénéfice des investisseurs, en permettant de couvrir les
fonds affectés par la défaillance d'un adhérent. Ces fonds
sont naturellement des titres, mais aussi des espèces ou créances
telles que des avances sur commissions ou des ristournes non
réclamées par les investisseurs, qui ne constituent pas des
dépôts stricto sensu et ne sont donc pas éligibles au fonds
de garantie des dépôts, prévu à l'article L. 312-4
précédemment cité pour les établissements de
crédit.
En ne réservant l'obligation d'adhésion à ce
mécanisme qu'aux PSI habilités par le Conseil des marchés
financiers à la conservation de titres, qui sont
généralement des sociétés de taille moyenne ou
importante, la législation actuelle introduit une distorsion au sein des
prestataires pour des flux de même nature, et pénalise in fine les
investisseurs dont les fonds et créances sont détenus par des
structures de petite taille, qui ne sont pas conservateurs d'instruments
financiers et présentent finalement davantage de risques de
défaillance.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Votre commission note que l'extension proposée par le présent
article est
conforme aux dispositions de la directive
97/9/CE du 3 mars 1997
relative aux systèmes
d'indemnisation des investisseurs, qui ne distingue pas les entreprises
d'investissement concernées par de tels systèmes, selon qu'elles
sont ou non teneurs-conservateurs de comptes.
Pourtant, l'utilité de l'extension du périmètre aux
entreprises d'investissement non conservateurs n'est pas immédiatement
perceptible, dans la mesure où les avoirs des clients sont
essentiellement constitués de titres, et où ce sont bien ces
titres qu'il convient de placer à l'abri d'une éventuelle
faillite du prestataire conservateur. Il apparaît cependant que,
même de manière marginale,
des avoirs non constitués de
titres mais d'avances en espèces
exclusivement affectées
à des instruments financiers pouvaient être conservés par
des établissements non conservateurs de titres. Leur adhésion au
mécanisme de garantie paraît donc justifiée, et il est
vraisemblable que les prestataires, tels que les courtiers, qui ne conservent
aucun avoir en titres ni en espèces, ne seront astreints qu'à la
cotisation annuelle minimale pour les PSI. Cette cotisation, aux termes du
point 1.1 de l'annexe 1 du règlement n° 99-15 du Comité de
la réglementation bancaire et financière, est constitué
d'une base forfaitaire de
800 euros
, à la différence des
cotisations plus élevées dont l'assiette repose sur le montant
des avoirs conservés.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article sans modification.
ARTICLE 50
Mesures relatives aux émetteurs et gestionnaires de
monnaie électronique et d'autres moyens de
paiement
Commentaire : le présent article a pour objet
d'assujettir l'ensemble des émetteurs de monnaie électronique
à l'obligation de déclaration de soupçon, et de transposer
une disposition de la directive européenne sur la monnaie
électronique tendant à permettre la création d'une
nouvelle catégorie d'émetteurs dispensés de
l'agrément du comité des établissements de crédit
et des entreprises d'investissement.
I. LE DROIT EXISTANT
A. LE PRINCIPE DU MONOPOLE BANCAIRE ET SES EXCEPTIONS
L'article L. 511-5 du code monétaire et financier pose un principe
général de
monopole des opérations de banque
pour
les établissements de crédit. Il dispose en effet
qu'
« il est interdit à toute personne autre qu'un
établissement de crédit d'effectuer des opérations de
banque à titre habituel »
, et qu'il est
« interdit à toute entreprise autre qu'un
établissement de crédit de recevoir du public des fonds à
vue ou à moins de deux ans de terme »
. L'article L. 511-7
du même code vient néanmoins
atténuer la portée
de ce principe
puisqu'il dispose que ces interdictions ne font pas obstacle
à ce que toute entreprise puisse effectuer certaines opérations
s'apparentant à des opérations de banque :
« - dans l'exercice de son activité professionnelle
consentir à ses contractants des délais ou avances de
paiement ;
« - conclure des contrats de location de logements assortis d'une
option d'achat ;
« - procéder à des opérations de
trésorerie avec des sociétés ayant avec elle, directement
ou indirectement, des liens de capital conférant à l'une des
entreprises liées un pouvoir de contrôle effectif sur les
autres ;
« - émettre des valeurs mobilières ainsi que des titres
de créances négociables ;
« - émettre des bons et cartes délivrés pour
l'achat auprès d'elle, d'un bien ou d'un service
déterminé ;
« - remettre des espèces en garantie d'une opération
sur instruments financiers ou d'une opération de prêt de titres
régies par les dispositions de l'article L. 431-7 ;
« - prendre ou mettre en pension des instruments financiers et effets
publics visés à l'article L. 432-12. »
Les activités d'émission comme de gestion et de mise à
disposition des moyens de paiement relèvent du monopole bancaire, dans
la mesure où elles constituent, aux termes de l'article L. 311-1 du code
monétaire et financier, des opérations de banque. Le droit
communautaire, par la directive 2000/12/CE du 20 mars 2000 concernant
l'accès à l'activité des établissements de
crédit et son exercice, ne soumet cependant pas la gestion de moyens de
paiement au monopole bancaire.
Aux termes de l'article L. 511-10 du même code, les établissements
de crédit doivent avant d'exercer leur activité obtenir
l'agrément
délivré par le comité des
établissements de crédit et des entreprises d'investissement
(CECEI). L'article L. 511-9 dispose en outre que les établissements de
crédit sont agréés en qualité de banque, de banque
mutualiste ou coopérative, de caisse de crédit municipal, de
société financière ou d'institution financière
spécialisée.
B. LES RÈGLES RELATIVES À L'OBLIGATION DE
DÉCLARATION DE SOUPÇON
L'article L. 562-1 du même code mentionne quant à lui la liste des
personnes physiques et morales assujetties à l'obligation de
déclaration portant sur des mouvements de capitaux suspects dans le
cadre de la lutte contre le blanchiment. Ces personnes sont :
- les établissements de crédit ;
- la Banque de France, l'institut d'émission des départements
d'outre-mer et l'institut d'émission d'outre-mer ;
- les entreprises d'assurance et de capitalisation, les mutuelles, les
courtiers d'assurance et de réassurance ;
- les entreprises d'investissement, les membres des marchés
réglementés d'instruments financiers et les adhérents des
chambres de compensation ;
- les changeurs manuels ;
- les personnes qui réalisent, contrôlent, ou conseillent des
opérations portant sur l'acquisition, la vente, la cession ou la
location de biens immobiliers ;
- les représentants légaux et directeurs responsables de
casinos ;
- les personnes se livrant habituellement au commerce ou organisant la vente de
pierres précieuses, de matériaux précieux,
d'antiquités et d'oeuvres d'art.
C. LA MONNAIE ÉLECTRONIQUE
L'article premier de la
directive européenne 2000/46/CE du
18 septembre 2000
concernant l'accès à l'activité
des établissements de monnaie électronique et son exercice ainsi
que la surveillance prudentielle de ces établissements définit la
monnaie électronique comme toute «
valeur monétaire
représentant une créance sur un émetteur qui est :
stockée sur un support électronique, émise contre la
remise de fonds d'un montant dont la valeur n'est pas inférieure
à la valeur monétaire émise, et acceptée comme
moyen de paiement par des entreprises autres que l'émetteur
645(
*
)
». Un
établissement de monnaie électronique est quant à lui
défini au même article comme «
une entreprise ou
toute autre personne morale,
autre qu'un établissement de
crédit
(...), qui émet des moyens de paiement sous la forme
de monnaie électronique
». La monnaie électronique
est parfois considérée comme un troisième type de monnaie
en ce qu'elle ne pourrait être assimilée ni à de la monnaie
scripturale
646(
*
)
ni à de
la monnaie fiduciaire (qui est à la fois un support et un instrument
monétaire), et présente un pouvoir libératoire
caractéristiques de toute monnaie, dont il n'existe toutefois pas de
définition légale.
Le 4 de l'article premier de la directive précitée dispose que
les Etats membres interdisent aux personnes ou entreprises qui ne sont pas
des établissements de crédit d'exercer, à titre
professionnel, l'activité d'émission de monnaie
électronique
. Le même article dispose en outre que les
activités commerciales des établissements de monnaie
électronique, autres que l'émission, sont limités à
la gestion de monnaie électronique, à l'exercice de fonctions
opérationnelles et accessoires liées à l'émission,
et au stockage de données sur le support électronique pour le
compte d'autres entreprises ou institutions publiques.
II. LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE
Le présent article comporte deux grandes dispositions, susceptibles
à la fois de
sécuriser l'utilisation de la monnaie
électronique au regard de transactions suspectes, et d'assouplir la
réglementation applicable à une catégorie
d'établissements utilisateurs
.
A. LA NOUVELLE EXEMPTION D'AGRÉMENT PERMISE PAR LA TRANSPOSITION
COMMUNAUTAIRE
Le texte proposé par le
I
du présent article pour le II de
l'article
L. 511-7 du code monétaire et financier a pour objet de
transposer expressément le point c de l'article 8 de la directive
européenne du 18 septembre 2000 précitée
, dont la
France a déjà transposé en droit interne l'essentiel des
dispositions
647(
*
)
. Ce point
dispose que les Etats membres peuvent autoriser leurs autorités
compétentes à exempter un établissement de monnaie
électronique de l'application de tout ou partie des dispositions de la
directive, lorsque la monnaie électronique émise par
l'établissement n'est acceptée comme moyen de paiement que par un
nombre limité d'entreprises, qui se distinguent par une proximité
géographique ou organisationnelle
648(
*
)
. Ces dispositions ne constituent donc
qu'une faculté offerte aux Etats membres, que le présent article
applique pour certains établissements émetteurs de moyens de
paiement éventuellement (mais pas exclusivement) électroniques.
Le dispositif proposé crée ainsi une nouvelle catégorie
d'entreprises exerçant une activité de gestion ou de mise
à disposition de moyens de paiement, quels qu'ils soient
649(
*
)
,
susceptible d'être
exemptée d'agrément
650(
*
)
par le CECEI
. Cette disposition
s'inscrit dans la continuité des normes jurisprudentielles que le CECEI
a fixées sur la portée de l'exception au monopole bancaire, qui
porte sur les établissements gestionnaires de tous moyens de paiement,
qu'ils soient ou non électroniques. Le dispositif proposé
prévoit que cette exemption n'est possible que lorsque ces moyens de
paiement ne sont utilisés que par des sociétés
liées
651(
*
)
ou par un
nombre limité d'entreprises répondant aux conditions alternatives
prescrites par la directive précédemment mentionnée :
- se trouver dans les mêmes locaux ou dans une zone géographique
restreinte (
critère de proximité géographique
);
- être liées avec l'établissement émetteur par un
dispositif de commercialisation ou de distribution commun (
critère du
lien organisationnel
).
La jurisprudence du CECEI relative aux exceptions au monopole bancaire de l'activité de gestion et de mise à disposition de la clientèle de moyens de paiement
La
dérogation prévue par le 5° de l'article L. 511-7 du code
monétaire et financier permet à une entreprise qui n'a pas le
statut d'établissement de crédit d'émettre une carte ou un
bon exclusivement utilisable auprès d'elle sans enfreindre le monopole
bancaire. Par conséquent, la seule exception expresse prévue par
la loi au monopole bancaire concerne les cartes ou bons
« monoprestataires », qui se caractérisent par
l'unicité de l'émetteur et du prestataire-accepteur chez qui sera
effectué l'achat.
La jurisprudence du CECEI a cependant été souple en la
matière puisque l'exception au monopole bancaire a aussi concerné
une pluralité de commerçants
, dès lors que
l'entité émettrice regroupe exclusivement des commerçants
qui acceptent la carte en paiement et qu'une solidarité commerciale et
financière a été organisée entre eux pour la
sécurité des porteurs des cartes ou bons (jurisprudence Relais et
Châteaux, 1994).
De même, le CECEI a admis en 1988 (« Points verts ») que des
commerçants puissent, sur la base d'un contrat conclu avec un
établissement de crédit, délivrer des espèces
à des clients de cet établissement de crédit. Il n'a en
revanche pas admis que des commerçants puissent délivrer des
espèces à une clientèle plus large mais aussi recevoir des
espèces ( Banque Rivaud, 1993). Dans ce dernier cas, il a estimé
que la constitution d'un établissement de crédit était
nécessaire. Dans le même esprit, l'émission d'un
porte-monnaie électronique a été considérée
comme relevant du monopole bancaire (Kleline, 1997 et W-HA, 2001) : un statut
de société financière a donc été
donné aux sociétés Kleline et W-HA. Il est à noter
que cette jurisprudence intervenait avant la transposition des deux directives
européennes concernant la monnaie électronique.
Source : ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie
B. LES IMPLICATIONS CONCRÈTES
Il s'agit donc de permettre à certaines entreprises de gérer
et de mettre à la disposition du public des moyens de paiement
éventuellement électroniques sans devoir créer un
établissement de crédit qui y soit dédié
. Ces
dispositions concernent de manière assez marginale certains cas
précis d'entreprises commerciales. Deux exemples sont à ce titre
éclairants :
- la société Club Méditerranée permet à ses
clients d'utiliser une monnaie « alternative » (mais qui
n'est pas électronique) non seulement dans les hôtels, mais encore
avec certains commerçants de l'environnement immédiat. Le nouveau
critère de proximité géographique permettrait donc
à cette entreprise de continuer à émettre ces moyens de
paiement sans avoir à solliciter une demande d'agrément ;
- de même la société Relais & Châteaux donne
à ses clients la possibilité d'utiliser des moyens de paiement
internes entre les différents établissements du groupe. Dans ce
cas, le nouveau critère organisationnel permettrait d'être
exempté d'agrément.
Au-delà de ces cas particuliers, ces dispositions amènent
à
s'interroger sur la nature même des moyens de paiement dans
un nouveau contexte technologique
, en particulier eu égard au
développement des transactions par téléphonie mobile. Le
porte-monnaie électronique Monéo n'est en revanche pas
concerné par ce dispositif, dans la mesure où Monéo est un
consortium d'établissements de crédit, qui
bénéficie lui-même de l'agrément du CECEI.
C. DES CONDITIONS ET OBLIGATIONS PRÉCISES
Le présent article prévoit deux séries de dispositions, la
première pour les seuls établissements de monnaie
électronique et la seconde pour l'ensemble des
bénéficiaires de l'exemption au monopole bancaire
précédemment mentionnée.
Le texte proposé par le
I
de cet article pour le II de l'article
L. 511-7 dispose que l'entreprise qui gère ou utilise des moyens de
paiement électroniques et bénéficie de l'exemption
précédemment mentionnée doit respecter
deux
conditions
652(
*
)
:
- la capacité maximale de chargement du support électronique de
paiement ne peut excéder un montant précis, fixé par
arrêté du ministre chargé de l'économie dans des
conditions établies par décret. L'article 8c de la directive
communautaire précitée établit ce plafond à 150
euros et il devrait en être de même dans la réglementation
française ;
- l'entreprise concernée doit adresser un rapport d'activité
annuel à la Banque de France, dont le contenu est fixé par
arrêté du ministre chargé de l'économie.
Le
II
du présent article propose de compléter l'article L.
562-1 du code monétaire et financier par un alinéa qui inscrit
les entreprises bénéficiaires de l'exemption d'agrément
dans la liste des personnes et organismes
soumis à l'obligation de
déclaration de soupçon
portant sur des mouvements de capitaux
suspects dans le cadre de la lutte contre le blanchiment. Cette obligation
constitue la principale mesure administrative de vigilance des
établissements de crédit à l'égard des mouvements
supposés illicites
653(
*
)
,
et s'applique donc également à des entreprises qui ne sont pas
agréées comme établissements de crédit, ce qui tend
à conforter la position de pointe de la France dans le domaine de la
lutte contre le blanchiment.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
L'exemption au monopole bancaire proposée par le présent article
ne paraît pas contestable en ce qu'elle répond à des
critères limitatifs et est conforme à la jurisprudence du CECEI,
notamment élaborée par les représentants professionnels
des établissements de crédit.
Ses implications concrètes sont néanmoins tributaires de la
définition des moyens de paiement dans un nouveau contexte
technologique
, et ne sont à ce titre pas exemptes d'incertitudes,
dans la mesure où cette définition n'est pas réellement
arrêtée, que ce soit par le droit communautaire ou par les
autorités françaises de réglementation. Le débat
tend aujourd'hui à se focaliser sur les opérateurs
téléphoniques et le développement rapide de leurs
partenariats commerciaux avec d'autres prestataires de services : on peut
ainsi se demander si les unités téléphoniques
prépayées, utilisées dans le cadre d'offres
promotionnelles adressées par les opérateurs à leurs
utilisateurs, constituent un réel moyen de paiement virtuel. Selon les
informations recueillies par votre rapporteur auprès du ministère
de l'économie, des finances et de l'industrie, cela ne semble pas devoir
être le cas, tant du point de vue du droit communautaire que du juge
judiciaire
654(
*
)
. En
l'état actuel du droit, ce type de transactions n'est donc pas
concerné pas la présente exception au monopole bancaire.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article sans modification.
ARTICLE 51
Aggravation des sanctions disciplinaires et
pécuniaires applicables aux personnes physiques et morales
exerçant la profession de change
manuel
Commentaire : le présent article a pour objet
d'aggraver les sanctions pécuniaires et disciplinaires applicables aux
changeurs manuels et aux dirigeants des personnes morales exerçant la
profession de change manuel.
I. LE DROIT EXISTANT
L'article L. 520-1 du code monétaire et financier définit le
change manuel
655(
*
)
comme
l'échange immédiat de billets ou monnaies libellés en
devises différentes
.
Il prévoit que les personnes physiques ou morales autres que les
établissements de crédit et les institutions publiques
mentionnées à l'article L. 518-1 du même code (le
Trésor Public, les services financiers de la Poste, la Banque de France,
l'institut d'émission des départements d'outre-mer, l'institut
d'émission d'outre-mer et la Caisse des dépôts et
consignations), qui font profession habituelle d'effectuer des
opérations de change manuel, doivent adresser préalablement une
déclaration d'activité à la Banque de France, sous peine
d'interdiction d'exercice de la profession de changeur manuel. Ces personnes
sont inscrites au registre du commerce et des sociétés. Les
changeurs manuels sont tenus à tout moment de justifier soit d'un
capital libéré, soit d'une caution d'un établissement de
crédit ou d'une entreprise d'assurances, d'un montant au moins
égal à une somme fixée par un règlement du
comité de la réglementation bancaire et financière (CRBF).
L'article L. 520-3 du même code prévoit les sanctions
disciplinaires que la commission bancaire peut prononcer en cas de manquement
à la réglementation relative au change manuel ou aux obligations
relatives à la lutte contre le blanchiment des capitaux.
Ces
sanctions sont l'avertissement, le blâme, et l'interdiction d'exercer la
profession de changeur manuel
. La commission bancaire peut également
prononcer, à la place ou en sus de ces sanctions, une
sanction
pécuniaire plafonnée à 37.500 euros
.
Les changeurs manuels peuvent être des personnes physiques ou morales
.
Dès lors
ce dispositif n'interdit pas expressément
à une personne de reprendre ses activités de change manuel dans
un autre établissement
que celui qui a fait l'objet de la sanction,
dans la mesure où les interdictions d'exercer ne visent que la
société dont le changeur fautif est le dirigeant.
II. LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE
Le présent article tend à rendre explicitement applicables aux
dirigeants les sanctions prévues pour les personnes morales
exerçant la profession de change manuel. Il a également pour
objet de rendre les dirigeants d'une société de change manuel
solidairement redevables de la sanction pécuniaire infligée
à la personne morale.
Le
I
du présent article modifie ainsi l'article L. 520-1 du code
monétaire et financier en vue de prévoir, pour toute personne
physique ou morale qui n'a pas souscrit à l'obligation de
déclaration d'activité à la Banque de France,
une
interdiction de fonctions de dirigeant de droit ou de fait
dans une
personne morale exerçant la profession de change manuel, en sus de
l'interdiction existante d'exercice de la profession de changeur manuel. Cette
interdiction est également prévue pour toute personne qui a fait
l'objet de la sanction disciplinaire de la commission bancaire prévue au
3° de l'article L. 520-3 du code monétaire et financier.
Par coordination, le
II
du présent article tend ainsi à
insérer une disposition au 3° de l'article L. 520-3 - qui
prévoit une interdiction d'exercer la profession de changeur manuel -
selon laquelle la commission bancaire peut également interdire aux
dirigeants de droit ou de fait des établissements de change manuel
d'exercer directement ou indirectement l'activité de change manuel.
Le
III
de cet article tend en outre à accroître fortement
le plafond de la sanction pécuniaire applicable, que la commission
bancaire peut prononcer à la place ou en sus des sanctions
disciplinaires et qui passe de 37.500 euros à
un million d'euros
.
Cet article a également pour effet de
rendre les dirigeants de droit
ou de fait d'une société de change manuel solidairement
redevables de la sanction pécuniaire prononcée à
l'encontre de la personne morale
, dans la mesure où la sanction
pécuniaire s'ajoute ou supplée à l'ensemble des sanctions
disciplinaires mentionnées à l'article L. 520-3 du code
monétaire et financier, et où la sanction figurant au 3 de cet
article viserait désormais également les dirigeants de droit ou
de fait.
Ces sanctions devraient se révéler plus dissuasives et pallier un
défaut du dispositif actuel, qui n'interdit pas réellement
à un changeur sanctionné de créer une nouvelle
société de change manuel pour y reprendre ses activités.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Votre commission approuve cet accroissement de la sévérité
du dispositif de sanctions applicables aux changeurs manuels, et plus
particulièrement à leurs dirigeants. De nombreux abus ont en
effet été constatés par la commission bancaire au cours de
la période récente
656(
*
)
.
L'applicabilité de la sanction pécuniaire aux personnes physiques
dirigeantes est néanmoins implicite et mérite donc d'être
clairement inscrite dans le texte de l'article L. 520-3.
Votre commission vous propose donc un
amendement
visant à
préciser que lorsque le changeur manuel est une personne morale, la
commission bancaire peut décider que ses dirigeants de droit ou de fait
seront tenus solidairement au paiement de la sanction pécuniaire
prononcée.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article ainsi modifié.
ARTICLE 52
Extension des possibilités d'échange
d'information entre les autorités de régulation françaises
et leurs homologues
étrangères
Commentaire : le présent article a pour objet
d'accroître les obligations d'information entre entreprises d'un
même groupe et les possibilités d'échanges d'informations
entre autorités de régulation européennes, en particulier
dans le cadre de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement
du terrorisme.
I. LE DROIT EXISTANT
Le premier alinéa de l'article L. 511-34 du code monétaire et
financier dispose que, pour les besoins de la surveillance sur la base de la
situation financière consolidée d'un ou plusieurs
établissements de crédit ou entreprises d'investissement ayant
leur siège social dans un Etat partie à l'accord sur l'Espace
économique européen, les entreprises établies en France et
qui font partie du groupe financier ou du groupe mixte auquel appartiennent ces
établissements de crédit ou entreprises d'investissement sont
tenues de transmettre les renseignements nécessaires à des
entreprises du même groupe ayant leur siège social dans un Etat
partie à l'accord sur l'Espace économique européen.
L'article L. 533-3 du même code dispose en outre que les prestataires de
services d'investissement, les entreprises de marché et les chambres de
compensation doivent communiquer à la Banque de France les informations
nécessaires à l'élaboration des statistiques
monétaires.
II. LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE
Les dispositions du
I
du présent article, qui remplacent le
premier alinéa de l'article L. 511-34,
précisent et
élargissent les obligations d'information entre entreprises d'un
même groupe
. Les entreprises établies en France et qui font
partie d'un groupe financier ou mixte auquel appartiennent également des
entreprises ayant leur siège social dans d'autres Etats devraient
dorénavant transmettre des informations dont le contenu est
précisé sur trois points :
- le champ
géographique
est élargi, puisque le
périmètre du groupe inclut désormais non seulement les
sociétés implantées dans un Etat membre de la
Communauté européenne ou de l'Espace économique
européen
657(
*
)
, mais
également dans un Etat où sont applicables les accords
prévus à l'article L. 613-13 du code monétaire et
financier. Cet article prévoit que la commission bancaire peut conclure
avec les autorités d'un Etat non partie à l'accord sur l'Espace
économique européen et chargées d'une mission similaire
(à condition que ces autorités soient également soumises
au secret professionnel) des conventions bilatérales portant sur
l'extension des contrôles sur place aux succursales et filiales
d'établissements de crédit et d'entreprises d'investissement de
droit français ou du droit du pays faisant l'objet de l'accord ;
- les données qui doivent être transmises comprennent non
seulement les renseignements relatifs à la situation financière
de ces établissements nécessaires à leur surveillance sur
une base consolidée, ce qui est déjà le cas actuellement,
mais également les informations nécessaires à
l'organisation de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement
du terrorisme. Ces informations traduisent notamment le
principe de
connaissance du client
, déterminant en matière de lutte
contre le blanchiment selon lequel aucun flux financier n'est en soi suspect,
mais peut le devenir en fonction de la nature de l'émetteur et du
destinataire. Les établissements de crédit et entreprises
d'investissement doivent ainsi respecter un double objectif, à la fois
prudentiel (il s'agit notamment de veiller à ce que les groupes
financiers ne multiplient pas les filiales dans les Etats
considérés comme « grands risques ») et de
lutte contre le blanchiment ;
- les informations relatives à la lutte contre le blanchiment et le
terrorisme ne peuvent être communiquées à des personnes
extérieures au groupe,
excepté aux autorités de
régulation des prestataires d'investissement implantés dans les
Etats précédemment mentionnés,
ce qui permet donc
à ces dernières d'échanger les informations transmises et
de mieux coordonner leur action. Néanmoins, le dernier alinéa du
texte proposé pour l'article L. 511-34 dispose que ces informations ne
doivent pas être transmises aux autorités des Etats dont la
législation et les pratiques sont reconnues comme insuffisantes et
inadaptées par l'instance internationale de concertation et de
coordination en matière de lutte contre le blanchiment d'argent, le
Groupe d'action financière sur le blanchiment des capitaux (
GAFI
).
Le GAFI a récemment actualisé la liste de ces Etats ne faisant
pas l'objet de transmissions d'informations, appelés « pays ou
territoires non coopératifs » (PTNC). Ces Etats sont depuis le
17 février 2003 au nombre de dix : Iles Cook, Egypte, Guatemala,
Indonésie, Myanmar, Nauru, Nigéria, Philippines, Saint-Vincent et
Grenadines, Ukraine. Le GAFI n'ayant pas la personnalité morale, la
liste qu'il établit périodiquement est reprise et inscrite dans
la réglementation française par un arrêté du
ministre de l'économie.
Le rôle et l'action du GAFI
Le GAFI
est engagé dans une initiative importante ayant pour l'objet
l'identification des pays ou territoires non coopératifs (PTNC) dans la
lutte contre le blanchiment de capitaux. Cela a notamment
entraîné l'élaboration d'un processus visant à la
recherche des défaillances graves des dispositifs anti-blanchiment qui
constituent des obstacles à la coopération internationale dans ce
domaine. L'objectif de ce processus est la réduction de la
vulnérabilité du système financier au blanchiment de
capitaux en assurant que toute place financière adopte et mette en
oeuvre des mesures de prévention, de détection et de sanctions du
blanchiment selon les normes internationales reconnues.
Le 14 février 2000, le GAFI a publié un
premier Rapport sur les
PTNC
. Le rapport définissait vingt-cinq critères
permettant d'identifier les règles et pratiques préjudiciables,
et ces critères s'inscrivaient dans une logique de cohérence avec
les
quarante
Recommandations du
GAFI
. Le rapport décrivait également une procédure
devant permettre d'identifier les juridictions dotées de telles
règles et pratiques, et il encourageait la mise en oeuvre dans ces
juridictions des normes internationales dans ce domaine.
L'étape suivante de l'initiative PTNC fut la publication en juin 2000 du
premier rapport visant
à identifier des PTNC spécifiques
. Le rapport a
identifié
quinze juridictions
(les Bahamas, les Îles
Caïmans, les Îles Cook, Dominique, l'Israël, le Liban, le
Liechtenstein, les Îles Marshall, Nauru, Niue, le Panama, les
Philippines, la Russie, Saint-Christophe-et-Niévès, et
Saint-Vincent et les Grenadines) comme manifestant des défaillances dans
leurs dispositifs anti-blanchiment ou un manque de volonté manifeste
concernant la coopération anti-blanchiment.
Depuis la publication du rapport de juin 2000, un grand nombre des juridictions
définies comme non coopératives ont réalisé des
progrès considérables et rapides. En juin 2001, le GAFI a mis
à jour la liste des PTNC avec la publication d'un
deuxième
rapport
. Quatre pays sont sortis de la liste (les Bahamas, les Îles
Caïmans, le Liechtenstein et le Panama), mais six autres juridictions y
ont été rajoutées (l'Égypte, le Guatemala, la
Hongrie, l'Indonésie, le Myanmar et le Nigeria). Lors de la
réunion plénière suivante du GAFI en septembre 2001, deux
autres pays sont entrés dans la liste (la Grenade et l'Ukraine). La
Plénière a également décidé du délai
de l'application des
contre-mesures
possibles, auxquelles les pays membres du GAFI pourraient recourir si certaines
juridictions ne faisaient pas suffisamment de progrès pour
remédier aux défaillances identifiées.
En juin 2002, le GAFI a retiré quatre autres pays de la liste des PTNC :
la Hongrie, Israël, le Liban, et Saint-Christophe-et-Niévès.
Le GAFI a également publié son
troisième rapport
sur les PTNC
.
En octobre 2002, le GAFI a de nouveau retiré
quatre pays de la liste des PTNC : la Dominique, les Îles Marshall,
Niue
(territoire indépendant associé à la
Nouvelle-Zélande)
et la Russie
. Il a également
décidé d'appliquer des contre-mesures au Nigeria et à
l'Ukraine à partir du 15 décembre 2002, sous réserve que
ces deux pays ne remédient rapidement aux défaillances
identifiées précédemment par le GAFI.
L'Ukraine ayant échoué dans la promulgation d'une
législation anti-blanchiment, le GAFI a recommandé le 20
décembre 2002 l'application de contre-mesures à son encontre.
Cependant, en raison de l'importance des réformes législatives
qui ont suivi, le GAFI a décidé en février 2003 de
supprimer l'application des contre-mesures, bien que l'Ukraine demeure sur la
liste des PTNC. A la même date, le GAFI a également
retiré la Grenade de la liste des PTNC.
Source : site internet du GAFI
Le
II
du présent article propose d'introduire un article L.
533-3-1 dans le code monétaire et financier qui étend aux
sociétés de gestion soumises au contrôle de
l'Autorité des marchés financiers et aux groupes financiers
comprenant une société de gestion, les mêmes obligations,
relatives à la lutte contre le blanchiment des capitaux et le
financement du terrorisme, d'information interne et de communication aux
autorités de régulation.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article sans modification.
ARTICLE 53
Extension aux entreprises d'investissement de certaines
dispositions applicables aux établissements de crédit en
matière de contrôle de la structure du
capital
Commentaire : le présent article a pour objet de
rapprocher le régime des entreprises d'investissement en matière
de contrôle des mouvements survenant dans leur capital de celui des
établissements de crédit.
I. LE DROIT EXISTANT
A. LES RÈGLES APPLICABLES AUX ENTREPRISES D'INVESTISSEMENT
L'article L. 531-6 du code monétaire et financier dispose que toute
modification dans la structure du capital d'une
entreprise
d'investissement
doit être effectuée dans des conditions
définies par le règlement du Comité de la
réglementation bancaire et financière (CRBF). Elle doit
être notifiée au comité des établissements de
crédit et des entreprises d'investissement (CECEI) - et le cas
échéant autorisée par ce conseil - et au conseil des
marchés financiers (CMF).
Les prescriptions du CRBF, qui sont confidentielles, tendent à renforcer
la surveillance dans les domaines du respect de ratios prudentiels, de la lutte
contre le blanchiment et de la crédibilité de l'acquérant
(il s'agit en particulier de s'assurer que la prise de participation ou de
contrôle est le fait d'une société disposant d'une surface
financière appropriée). Dans le nouveau dispositif de
surveillance introduit par le titre I
er
du présent projet de
loi et en particulier dans son article 21, le CRBF, ainsi que le Conseil
national des assurances et le Comité consultatif de la
législation et de la réglementation financière,
disparaîtraient pour donner naissance à une nouvelle
entité, le Comité consultatif de la législation et de la
réglementation, saisi de tout projet de texte en matière
financière. Ce comité est présidé par le ministre
chargé de l'économie et ne dispose plus du pouvoir normatif du
CRBF, mais d'un pouvoir d'avis renforcé sur les dispositions
communautaires, législatives et réglementaires.
L'article L. 532-9-1 du même code dispose que toute modification
apportée aux conditions auxquelles était subordonné
l'agrément délivré à une
société
de gestion de portefeuille
doit faire l'objet, selon les cas, d'une
autorisation préalable de la Commission des opérations de bourse
(COB), d'une déclaration ou d'une notification, dans les conditions
fixées par un règlement de la Commission. Dans les cas où
une autorisation doit être délivrée, elle peut,
elle-même, être assortie de conditions particulières visant
à préserver l'équilibre de la structure financière
de la société de gestion, ou subordonnée au respect
d'engagements pris par la société de gestion.
B. LES DISPOSITIONS RELATIVES AUX ÉTABLISSEMENTS DE
CRÉDIT
L'article L. 511-12-1 du code monétaire et financier prévoit pour
les établissements de crédit des dispositions similaires à
celles de l'article L. 532
-
9-1 précité pour les
sociétés de gestion de portefeuille, en cas de modification des
conditions
658(
*
)
auxquelles
était subordonné l'agrément délivré à
un établissement de crédit. Le CECEI délivre le cas
échéant l'autorisation préalable, et un règlement
du CRBF fixe les conditions de cette procédure de notification,
déclaration ou autorisation.
L'article L. 611-2 du même code dispose en outre qu'en cas de manquement
aux prescriptions édictées par le Comité de la
réglementation bancaire et financière pour l'application des
dispositions relatives, notamment, au montant du capital des
établissements de crédit et aux conditions dans lesquelles des
participations directes ou indirectes peuvent être prises,
étendues ou cédées dans ces établissements, le
procureur de la République, la commission bancaire ou le CECEI ou tout
actionnaire
peut demander au juge de suspendre, jusqu'à
régularisation de la situation, l'exercice des droits de vote
attachés aux actions ou parts sociales détenues
irrégulièrement, directement ou indirectement.
A la
différence des établissements de crédit, les entreprises
d'investissement ne sont pas soumises à ce cadre strict.
En ce qui concerne la communication d'informations entre autorités
européennes de régulation, le troisième alinéa de
l'article L. 612-6 du même code en outre dispose que, par
dérogation aux dispositions de la loi n° 68-678 du 26 juillet 1968
relative à la communication des documents et renseignements d'ordre
économique, commercial, industriel, financier ou technique à des
personnes physiques ou morales, le CECEI peut transmettre des informations aux
autorités chargées, dans d'autres Etats, de l'agrément ou
de la surveillance des établissements de crédit et des
établissements financiers sous réserve de
réciprocité et à condition que ces autorités soient
elles-mêmes soumises au secret professionnel avec les mêmes
garanties qu'en France. La Commission des communautés européennes
peut également être destinataire de ces informations, dans la
limite de ce qui est nécessaire à l'exercice des missions qui lui
sont confiées, et sous réserve que les personnes destinataires
soient soumises au secret professionnel avec les mêmes garanties qu'en
France.
II. LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE
Le présent article vise à étendre aux entreprises
d'investissement certaines dispositions plus strictes aujourd'hui applicables
aux établissements de crédit concernant les modifications
survenues dans la structure du capital
. Plus concrètement, ces
dispositions visent à renforcer le contrôle et le pouvoir
suspensif des autorités de régulation dans le cas
d'opérations portant sur le capital d'entreprises d'investissement,
telles qu'un rachat ou une prise de participation, afin de les harmoniser avec
les procédures prévues pour les établissements bancaires,
et qui ont par exemple été récemment mises en oeuvre lors
du rachat par la BNP-Paribas des actions détenues par l'Etat dans le
Crédit Lyonnais.
Le
I
du texte proposé par le présent article introduit
ainsi un nouvel alinéa à l'article L. 531-6
précédemment mentionné, qui dispose qu'en cas de
manquement aux prescriptions édictées par le ministre
chargé de l'économie (au titre de ses attributions dans le cadre
du nouveau Comité consultatif de la législation et de la
réglementation) dans des conditions fixées par décret
,
l'opération portant sur le capital de la société
concernée peut être suspendue par le juge sur demande du procureur
de la République, du CECEI
659(
*
)
, de la commission bancaire
660(
*
)
ou de tout actionnaire ou
détenteur de parts sociales de cette société
. Ce
pouvoir d'interruption, qui permet aux autorités compétentes
d'approfondir le dossier ou de solliciter une régularisation de la
situation, se traduit par la suspension temporaire de l'exercice des droits de
vote attachés à celles des actions et parts sociales de
l'entreprise d'investissement dont il a été constaté
qu'elles étaient détenues irrégulièrement, de
manière directe ou indirecte. Ce nouvel alinéa exclut les
sociétés de gestion de portefeuille, qui font l'objet d'une
disposition spécifique analogue (impliquant l'AMF et non plus le CECEI
ni la commission bancaire), exposée ci-après.
Concernant les
sociétés de gestion de portefeuille
, le
II
du texte proposé par le présent article introduit de la
même manière un nouvel alinéa à l'article L. 532-9-1
du code monétaire et financier, qui dispose qu'en cas de défaut
d'information préalable sur une modification de la structure de
l'actionnariat, l'AMF, le procureur de la République ou tout actionnaire
ou détenteur de parts sociales peut demander, jusqu'à
régularisation de la situation, la suspension de l'exercice des droits
de vote.
Le
III
du présent article apporte enfin une modification de
coordination au troisième alinéa de l'article L. 612-6,
destiné à permettre l'échange d'informations entre le
CECEI et les autorités d'autres Etats chargées de
l'agrément ou de la surveillance des entreprises d'investissement, selon
les mêmes modalités que la procédure déjà en
vigueur pour les échanges d'informations portant sur les
établissements de crédit et les établissements financiers.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Votre commission approuve ces dispositions, qui ne tendent pas à
remédier a posteriori à des manquements graves ou à des
structures capitalistiques suspectes qui auraient été
récemment constatées pour telles ou telles entreprises
d'investissement, mais bien plutôt à unifier la
réglementation et à prévenir d'éventuels
dysfonctionnements. Elles préservent en outre l'esprit de la loi de
modernisation des activités financières du 2 juillet 1996, qui
avait introduit une séparation claire entre le régime des
établissements de crédit et celui des entreprises
d'investissement, motivée notamment par le fait que les risques encourus
n'étaient pas de même nature, et que les activités
conduites par les entreprises d'investissement ne justifiaient pas l'existence
d'un actionnaire de référence au sens de la loi bancaire
. Le
rapprochement actuel ne consiste pas en un alignement intégral sur le
régime des établissements de crédit, et préserve en
particulier la spécificité du contrôle prudentiel des
entreprises d'investissement.
De même, la procédure de coordination des autorités de
régulation apparaît particulièrement nécessaire dans
le cas d'opérations transfrontalières de fusions et acquisitions
- qui tendent notamment à se développer dans le cadre de la
consolidation européenne du secteur bancaire et financier - mais aussi
lorsqu'une entreprise d'investissement entreprend d'ouvrir une succursale dans
un autre Etat de l'Espace économique européen.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article sans modification.
ARTICLE 54
Encadrement de la dissolution anticipée des
établissements de crédit et des entreprises
d'investissement
Commentaire : le présent article a pour objet de
renforcer l'encadrement des conditions de dissolution anticipée des
établissements de crédit et des entreprises d'investissement.
I. LE DROIT EXISTANT
A. LE CONTRÔLE DES AUTORITÉS DE RÉGULATION EN CAS DE
DISSOLUTION ANTICIPÉE
En cas de dissolution anticipée d'un établissement de
crédit ou d'une entreprise d'investissement, il convient
de
distinguer les règles qui s'appliquent à la
personnalité morale
(qui sont les règles du droit commun
de la liquidation) de celles dont l'application résulte du
statut
proprement dit d'établissement de crédit ou d'entreprise
d'investissement, lequel nécessite un agrément
délivré par le Comité des établissements de
crédit et des entreprises d'investissement (CECEI). Le statut emporte
l'application de la réglementation bancaire et place
l'établissement sous le contrôle de la commission bancaire, du
Conseil des marchés financiers (CMF) ou de la Commission des
opérations de bourse (COB), selon qu'il s'agit d'un établissement
de crédit ou d'une entreprise d'investissement.
L'article L. 511-16
du code monétaire et financier dispose ainsi,
dans son dernier alinéa, que tout
établissement de
crédit
ayant décidé sa dissolution anticipée
avant le terme de la période couvrant la durée de
l'agrément accordé par le comité des entreprises
d'investissement et des établissements de crédit (CECEI) demeure
soumis, jusqu'à la clôture de sa liquidation, au contrôle de
la commission bancaire, qui peut prononcer les sanctions disciplinaires, y
compris la radiation, prévues en cas d'infraction aux dispositions
législatives ou réglementaires afférentes à son
activité et dont l'étendue est précisée à
l'article L. 613-21 du même code. Il ne peut faire état de sa
qualité d'établissement de crédit qu'en précisant
qu'il est en liquidation.
Le dernier alinéa de
l'article L. 532-6
du même code
prévoit le même type de dispositions pour les
entreprises
d'investissement
. Il dispose ainsi que toute entreprise d'investissement
ayant décidé sa liquidation avant le terme de sa période
d'agrément demeure soumise, jusqu'à la clôture de sa
liquidation, au contrôle de la commission bancaire et du CMF. La
commission bancaire, le CMF et la COB peuvent prononcer les sanctions
disciplinaires prévues aux articles L. 613-21 (pour la commission
bancaire), L. 621-24 à L. 621-27 (pour la COB), et L. 622-15
à L. 622-18 (pour le CMF). De même, l'entreprise ne peut alors
faire état de sa qualité d'entreprise d'investissement qu'en
précisant qu'elle est en liquidation.
Enfin le statut d'établissement de crédit ou d'entreprise
d'investissement rend applicables les dispositions des articles L 613-25
à L. 613-31 du code monétaire et financier relatives aux
mesures disciplinaires de redressement et de liquidation judiciaires, qui
subordonnent la disparition de la personnalité morale à l'accord
préalable des autorités de régulation afin de
préserver l'intérêt des déposants et
épargnants. L'article L. 613-27 du code dispose en particulier que les
procédures de redressement et de liquidation judiciaires ne peuvent
être ouvertes à l'égard d'un établissement de
crédit ou d'une entreprise d'investissement qu'après avis de la
commission bancaire.
B. LE CONTRÔLE DES AUTORITÉS PEUT CEPENDANT ÊTRE
INEFFECTIF DANS LE RÉGIME ACTUEL
L'indépendance des sphères commerciale et bancaire au sein de ces
établissements financiers implique cependant que, si les
opérations de liquidation amiable se déroulent dans un
délai suffisamment court, les autorités
(commission bancaire,
CMF ou COB)
ne disposent pas du temps nécessaire pour s'y opposer
et s'assurer que la dissolution ne portera aucun préjudice aux
clients ou créanciers. En effet si l'établissement
concerné n'existe plus à la suite d'une procédure
commerciale rapide, les autorités de régulation ne peuvent plus
appliquer d'éventuelles sanctions.
Par conséquent,
dans le cadre légal actuel, la
décision des associés (assemblée générale
pour une société anonyme) d'un établissement de
crédit ou d'une entreprise d'investissement d'engager une dissolution
anticipée de leur activité dans les conditions du 4° de
l'article 1844-7
661(
*
)
du code
civil
peut ne faire l'objet d'aucune intervention spécifique des
autorités de tutelle
. Les deux réglementations, bancaire et
commerciale, existent ainsi en parallèle mais ne sont pas
synchronisées et tendent à s'ignorer.
Enfin, il importe d'autant plus de corriger cette faille du système
existant que les dispositions du présent article correspondent à
celles de la directive 2001/24/CE du 4 avril 2001 concernant l'assainissement
et la liquidation des établissements de crédit
662(
*
)
, dont l'article 11 dispose que «
les autorités compétentes de l'Etat membre
(c'est-à-dire les superviseurs bancaires)
sont consultées,
sous la forme la plus appropriée, avant toute décision de
liquidation volontaire émanant des organes statutaires d'un
établissement de crédit
».
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Le présent article propose de remplacer le dernier alinéa des
articles précédemment mentionnés par de nouvelles
dispositions, en vue de renforcer les procédures relatives à la
cessation anticipée d'activité des établissements de
crédit et des entreprises d'investissement. Ce renforcement de
l'encadrement repose sur deux principales mesures :
-
une plus grande implication des autorités de
régulation
: la dissolution anticipée d'un
établissement de crédit ou d'une entreprise d'investissement ne
pourrait être prononcée
qu'après obtention du retrait de
son agrément
par le CECEI, ou par l'Autorité des
marchés financiers (AMF) lorsque l'entreprise a été
agréée en tant que société de gestion de
portefeuille. Le présent article prévoit que cette disposition
déroge aux dispositions de l'article 1844-5
663(
*
)
et des 4° et 5° de
l'article 1844-7
664(
*
)
du code
civil ;
-
l'établissement d'un lien formel entre la procédure
commerciale et la procédure des autorités de
régulation
: la date de décision de retrait de cet
agrément devrait figurer dans la publication et l'inscription
modificative au registre du commerce et des sociétés concernant
le prononcé de la dissolution. Aux termes du présent article,
cette disposition déroge aux articles L. 123-1 et L. 237-3 du code de
commerce
665(
*
)
.
Ces dispositions sont prévues au
I
du présent article pour
les établissements de crédit, et au
II
pour les
entreprises d'investissement. Ainsi que le précise la
réglementation actuelle, ces sociétés demeurent soumises
jusqu'à la clôture de leur liquidation au contrôle des
autorités compétentes (CECEI ou AMF)
666(
*
)
. Elles ne peuvent également
faire état de leur qualité d'établissement de
crédit ou d'entreprise d'investissement sans préciser qu'elles
sont en liquidation.
III - LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
L'objet de ces dispositions est bien d'empêcher les prestataires de
services d'investissement d'organiser unilatéralement et dans des
délais courts leur disparition, pour éventuellement créer
une nouvelle société sans avoir rempli leurs obligations à
l'égard des créanciers
. Si la réglementation actuelle
prévoit qu'une cessation anticipée d'activité demeure
soumise au contrôle des autorités compétentes, il est
apparu que des interstices subsistaient dans la pratique et qu'il demeurait
possible à certaines entreprises de procéder
délibérément à leur dissolution. Or, les exigences
de la protection des investisseurs imposent bien que dans le cas d'une
dissolution anticipée, les déposants et épargnants soient
désintéressés, c'est-à-dire que l'entreprise
dissoute ait honoré l'ensemble de ses obligations à
l'égard de ses créanciers. Si les situations de cessation
volontaire demeurent très rares, un tel cas s'est néanmoins
produit en 2002.
Les dispositions proposées sont de nature à prévenir et
empêcher de tels manquements. Le retrait préalable de
l'agrément, le contrôle plus approfondi de la
régularisation par le tribunal de commerce, les sanctions potentielles
prononcées par la commission bancaire ou l'AMF et la publicité de
la liquidation à l'égard des tiers renforcent les garanties de
désintéressement des clients et créanciers de la
société.
La référence à l'article 1844-5 du code civil semble en
revanche inutile
. Elle vise à inclure dans le nouveau régime
les dissolutions qui se font par réunion dans une seule main des parts
d'une société. Or les dissolutions prononcées par le juge
en pareille occurrence sont visées par l'article 1844-7 du même
code et, dans la mesure où l'article 1844-4 du même code dispose
que de telles dissolutions ne sont pas de plein droit, l'hypothèse
prévue à l'article 1844-7 est la seule possible. Par
conséquent, l'article 1844-7 couvre bien toutes les hypothèses et
doit être le seul visé par le présent article.
Votre commission vous propose donc un amendement tendant à supprimer
la référence à l'article 1844-5 du code civil.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
cet article ainsi modifié.
ARTICLE 55
Garantie de la rémunération de
l'administrateur provisoire ou du liquidateur d'un prestataire de services
d'investissement
Commentaire : le présent article a pour objet de
modifier les articles L. 613-18 et L. 613-22 du code monétaire et
financier, en vue de permettre de garantir la rémunération par le
Fonds de garantie des dépôts de l'administrateur provisoire ou du
liquidateur d'un prestataire de services d'investissement.
I. LE DROIT EXISTANT
L'article L. 613-18 du code monétaire et financier dispose que la
commission bancaire peut désigner un
administrateur provisoire
auprès d'un établissement de crédit, ou d'une des
personnes mentionnées au premier alinéa de l'article
L. 613-2 (prestataires de services d'investissement autres que les
sociétés de gestion de portefeuille, membres des marchés
réglementés et adhérents aux chambres de compensation),
auquel sont transférés tous les pouvoirs d'administration, de
direction et de représentation de la personne morale.
Cet article prévoit également les cas d'ouverture par la
commission bancaire de décharge des dirigeants de la gestion de
l'établissement. La désignation de l'administrateur provisoire
est faite :
- soit à la demande des dirigeants lorsqu'ils estiment ne plus
être en mesure d'exercer normalement leurs fonctions ;
- soit à l'initiative de la commission lorsque la gestion de
l'établissement ou de l'entreprise ne peut plus être
assurée dans des conditions normales, ou lorsque a été
prononcée la suspension temporaire la ou démission d'office d'un
ou de plusieurs des dirigeants.
L'article L. 613-22 du même code dispose que la commission bancaire peut
nommer un
liquidateur
, auquel sont transférés tous les
pouvoirs d'administration, de direction et de représentation de la
personne morale :
- lorsqu'un établissement de crédit ou une des personnes
mentionnées au premier alinéa de l'article L. 613-2
précédemment mentionné a fait l'objet d'une mesure de
radiation ;
- lorsqu'une entreprise exerce irrégulièrement des
activités d'opérations de banque et d'opérations connexes
ou enfreint l'une des interdictions définies à l'article
L. 511-5 (interdiction pour toute personne autre qu'un
établissement de crédit d'effectuer à titre habituel des
opérations de banque),
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Les dispositions du présent article ont pour objet d'assurer la garantie
du paiement du liquidateur ou de l'administrateur provisoire
qui serait
mandaté en cas de graves difficultés pour un prestataire de
services d'investissement (PSI, établissement de crédit ou
entreprise d'investissement).
Le
I
du présent article propose de compléter l'article L.
613-18 du code monétaire et financier pour prévoir que, lorsque
la situation laisse craindre, à terme, une incapacité de
l'établissement ou de l'entreprise à assurer la
rémunération de l'administrateur provisoire, le
Fonds de
garantie des dépôts
peut, sur proposition de la commission
bancaire, décider d'en garantir le paiement.
La charge de cette garantie serait imputée au mécanisme de
garantie des titres pour les PSI autres que établissements de
crédit, et au mécanisme de garantie des cautions pour les
établissements qui y adhèrent. En cas de mise en oeuvre
conjointe, la charge est imputée à parts égales sur les
différents mécanismes de garantie mis en oeuvre.
Le
II
du présent article propose d'insérer les mêmes
dispositions à l'article L. 613-22 du code monétaire et financier
relatif au
liquidateur
.
L'objet de cette garantie de rémunération est double :
- il concerne avant tout les petites entreprises d'investissement, qui
pourraient ne pas avoir les moyens suffisants, avant même la cessation de
paiement, de rémunérer l'administrateur provisoire ou le
liquidateur ;
- bien que la mise en oeuvre de la garantie demeure soumise à
l'appréciation de la commission bancaire, elle présenterait
l'avantage de permettre aux administrateurs provisoires et liquidateurs
concernés de ne plus agir à titre gracieux, comme cela leur est
parfois aujourd'hui demandé.
L'organisation du Fonds de garantie des dépôts
Le Fonds
de garantie des dépôts a été créé par
la
loi n° 99-532 du 25 juin 1999 sur l'épargne et la
sécurité financière
, notamment à la suite de la
faillite du Crédit Martiniquais en 1999, pour l'apurement duquel le
Fonds a avancé près de 300 millions d'euros en janvier
2000
667(
*
)
.
Cette
intervention, ainsi que celle au profit de la clientèle de
Mutua-équipement, constituent d'ailleurs les deux seules du Fonds depuis
sa création
. Le Fonds a pour mission principale d'indemniser aussi
rapidement que possible les déposants, mais dans certaines conditions et
en particulier dans la limite d'un plafond de 70.000 euros, lorsque
l'établissement auquel ils ont confié leurs avoirs ne peut plus
faire face à ses engagements et ne peut donc assurer le
désintéressement de l'ensemble des créanciers. Il peut
aussi intervenir à titre
préventif
pour permettre la
disparition ordonnée d'un établissement défaillant sans
que les déposants ne soient lésés par cette
défaillance. Son action, en coordination avec celle de la commission
bancaire, a vocation à être une composante de la
sécurité du système bancaire français confortant,
en cas de nécessité, la confiance des déposants dans la
qualité d'ensemble de ce système.
Le Fonds de garantie des dépôts est une personne morale de droit
privé et gère
trois mécanismes de garantie : la
garantie des dépôts bancaires (de loin le plus important au regard
du montant), la garantie des titres et la garantie des cautions
. Il est
dirigé par un directoire agissant sous le contrôle d'un conseil de
surveillance.
Le mécanisme de garantie des dépôts concerne les
établissements bancaires, notamment les grandes banques à
réseau. Le mécanisme de garantie des cautions ne joue que
lorsque, concomitamment, les prestataires cautionnés (par exemple des
agences de voyages ou constructeurs de maisons individuelles) et
l'établissement de crédit qui a donné sa caution à
ce prestataire sont défaillants, et concerne également les
établissements de crédit, mais pour des montants plus
réduits. Le mécanisme de garantie des titres garantit tout
instrument financier mentionné à l'article
L 211-1 du code
monétaire et financier
(actions, titres de créances,
parts ou actions d'organismes de placement collectif, instruments financiers
à terme), et inclut les dépôts espèces auprès
d'un établissement adhérent non établissement de
crédit, liés à un service d'investissement (y compris ceux
effectués en garantie ou en couverture de positions prises sur un
marché d'instruments financiers).
Les dispositions législatives régissant le Fonds de garantie des
dépôts ont été codifiées, dans le code
monétaire et financier, aux articles
L 312-4 à
L. 312-18
pour la garantie des espèces, aux articles
L 322-1
à L. 322-4
pour la garantie des titres, et aux articles
L 313-50 et L.
313-51
pour la garantie des cautions.
Les statuts du Fonds de garantie des dépôts sont également
définis par les
règlements
du Comité de la réglementation bancaire et financière
(CRBF) n°99-06 modifié (articles 10 à 14
), n°
99-07 (articles
11 à 13
), n°
99-15
modifié (article 11
), et n°
99-16 (articles
11 à 13
). Son
règlement intérieur
complète son dispositif statutaire.
Source : Fonds de garantie des dépôts
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article sans modification.
ARTICLE 56
Suppression de la publication de la situation hebdomadaire
de la Banque de France
Commentaire : le présent article a pour objet de
mettre fin à la publication de la situation hebdomadaire de la Banque de
France.
I. LE DROIT EXISTANT
L'article 144-5 du code monétaire et financier dispose que la situation
hebdomadaire
668(
*
)
de la Banque
de France est publiée au
Journal officiel
.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Cet article vise à mettre fin à l'obligation actuellement faite
à la Banque de France de publier une situation hebdomadaire, qui
s'appuie sur les données transmises par la Banque centrale
européenne (BCE).
Or le groupe de travail comptable de la BCE a mis en oeuvre, à compter
du 1
er
janvier 2002, une actualisation des données relatives
au partage du revenu monétaire sur une base désormais mensuelle.
En outre, le Conseil des gouverneurs de la BCE a émis le 4 juillet 2002
une recommandation aux banques centrales nationales portant sur la suppression
des situations hebdomadaires.
Dès lors, cette situation hebdomadaire ne paraît plus
nécessaire, d'autant que son maintien imposerait d'inutiles
opérations de « recalcul ». La situation de la
Banque de France sera donc désormais publiée dans son bulletin
mensuel.
Les économies éventuellement permises par cette mesure sont a
priori faibles et n'ont pas été chiffrées par le
ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article sans modification.
CHAPITRE III :
SÉCURITÉ DES ASSURÉS
Section 1
Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages
Sous-section 1 :
Extension de la compétence du Fonds de
garantie des accidents de circulation et de chasse aux entreprises d'assurances
de dommages
ARTICLE 57
Le Fonds de garantie des assurances obligatoires de
dommages
Commentaire : le présent article prévoit
l'extension de la prise en charge, par l'actuel Fonds de garantie contre les
accidents de circulation et de chasse, des conséquences pour les
bénéficiaires de police d'assurance de la défaillance de
l'entreprise contractante à l'ensemble des assurances dommage dont la
souscription est rendue obligatoire par une disposition législative ou
réglementaire.
I. LES FONDS DE GARANTIE ACTUELS EN MATIÈRE D'ASSURANCE
A. LE FONDS DE GARANTIE CONTRE LES ACCIDENTS DE CIRCULATION ET DE CHASSE
(FGAC)
1. Statut et structure de direction
Le FGAC a été institué par une loi du 31 décembre
1951 qui l'a doté de la personnalité morale, sans pour autant
définir de façon précise sa nature juridique. Plusieurs
décisions rendues par des juridictions civiles ont
considéré que ce fonds était doté d'une
personnalité morale de droit privé.
L'article R. 421-25 du code des assurances prévoit que le FGAC est
administré par un conseil d'administration composé de 14 membres
(8 représentants des assureurs et 6 représentants des
assujettis à l'assurance). Ce conseil élit son président
parmi ses membres. Conformément aux statuts du FGAC
669(
*
)
, le conseil d'administration nomme un
directeur général et lui délègue les pouvoirs
nécessaires pour la direction des affaires ordinaires du FGAC et la
gestion du personnel.
Le FGAC est soumis au contrôle du ministre chargé de
l'économie : un commissaire du gouvernement désigné
par le ministre exerce en son nom un contrôle sur l'ensemble de la
gestion du fonds
670(
*
)
.
2. Missions
Au titre de ses activités propres, le FGAC a pour mission d'indemniser
les victimes d'accidents de la circulation et d'accidents de chasse, ou leurs
ayants droits, lorsque l'auteur des dommages demeure inconnu, n'est pas
assuré ou lorsque son assureur est partiellement ou totalement
insolvable
671(
*
)
.
A ce titre, le FGAC groupe obligatoirement toutes les entreprises d'assurance
qui couvrent les risques de responsabilité civile résultant de
l'emploi de véhicules terrestres à moteur
672(
*
)
.
Au titre de ses activités déléguées
, qu'il
exerce sur la base de conventions de gestion, le FGAC assure l'instruction des
dossiers de trois autres fonds d'indemnisation : le fonds de garantie des
victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions (FGTI)
673(
*
)
, le fonds d'indemnisation des
transfusés et hémophiles (FITH) et le fonds d'indemnisation des
victimes de l'amiante (FIVA).
3. Ressources
Le fonds est essentiellement financé par :
- des contributions instituées par le code des assurances sur les
assurés, les non assurés, les entreprises d'assurance, ainsi que
des majorations d'amendes pénales et des pénalités dues
par l'assureur en cas d'offre d'indemnisation manifestement insuffisante ;
- le produit des recours intentés par le fonds, subrogé dans
les droits des victimes, à l'encontre des responsables d'accidents de
circulation ou de chasse ou de leur assureur.
B. LE FGAP
La loi « épargne et sécurité
financière »
674(
*
)
a créé dans son article
68 un « Fonds de garantie des assurés contre la
défaillance de sociétés d'assurance de
personnes », dit
Fonds de garantie des assurances de personnes
(FGAP).
Ce fonds, auquel adhèrent obligatoirement, toutes les entreprises
agréées en France pour des opérations d'assurance-vie, de
capitalisation et de dommages corporels, a été créé
pour indemniser les assurés bénéficiant de telles
assurances lors de la défaillance de leur assureur. L'intervention du
fonds, qui n'est que curative, est déclenchée par la Commission
de contrôle des assurances (CCA) qui transfère le portefeuille de
l'entreprise concernée et lui retire tous ses agréments
administratifs.
Ce fonds est une personne morale de droit privé, à directoire et
conseil de surveillance. Il est financé par des cotisations
appelées
ex ante
auprès de ses adhérents. Au 31
décembre 2001, les ressources du fonds s'établissaient à
5,2 millions d'euros en excédent cumulé de gestion,
16,6 millions d'euros en cotisations versées par les entreprises
adhérentes et 160,6 millions d'euros en cotisations mises en
réserve pour le FGAP dans les comptes de ces mêmes entreprises.
II. LE PROJET DU GOUVERNEMENT
Afin de garantir les assurés ayant souscrit des assurances obligatoires
de dommages contre les conséquences de la défaillance de leur
assureur, le gouvernement propose d'étendre les compétences de
l'actuel FGAC à la prise en charge des conséquences de ces
défaillances.
Le FGAC devient ainsi le « Fonds de garantie des assurances
obligatoires de dommages » (FGAO).
A. STATUT ET ORGANISATION DU FGAO
Le
V
du présent article propose une nouvelle rédaction de
l'actuel article L. 421-2, qui est relatif au statut du FGAC
(personnalité civile) et à ses membres obligatoires
(«
toutes les entreprises d'assurance qui couvrent les risques de
responsabilité civile résultant de l'emploi de véhicules
terrestres à moteur
»).
1. Une personne morale de droit privé
Le gouvernement propose de donner au fonds, comme il l'a fait pour les fonds de
garantie des dépôts et des assurances de personnes, la
«
personnalité morale de droit
privé
».
Ce statut
sui generis
s'est imposé pour les
précédents fonds de garantie en raison de l'inadéquation
des formes juridiques existantes à prendre en compte toutes les
caractéristiques que doit revêtir un tel système de
garantie : autonomie par rapport aux pouvoirs publics, adhésion
obligatoire des entreprises d'assurance, constitution de réserves
impartageables, etc. La solution retenue évite en particulier de
perturber le droit commun des sociétés commerciales.
Une telle innovation n'est pas de nature à soulever de grandes
difficultés dès lors que le fonds de garantie n'évoluera
pas dans un secteur concurrentiel et que le projet de loi permet de
définir en pratique les règles de droit qui lui sont applicables.
2. Les entreprises obligatoirement adhérentes du fonds
Le gouvernement propose que
le fonds groupe obligatoirement
:
- d'une part, «
l'ensemble des entreprises qui offrent des
garanties en matière d'assurance automobile et de
chasse
» comme le fait l'actuel FGAC,
- d'autre part, «
toutes les entreprises d'assurance
agréées en France et soumises au contrôle de l'Etat en
vertu de l'article L. 310-1
[du code des assurances]
qui couvrent les
risques faisant l'objet d'une obligation d'assurance
en vertu d'une
disposition législative ou réglementaire
».
Il ne s'agit donc
que des entreprises d'assurance du code des assurances
(à l'exclusion des mutuelles du code de la mutualité et des
institutions de prévoyance, qui ne pratiquent pas l'assurance dommage),
et à l'intérieur de cette catégorie, uniquement celles qui
sont
agréées en France
et celles qui
couvrent des
risques pour lesquels la loi ou le règlement
675(
*
)
a prévu une obligation
d'assurance
.
Il existe actuellement plus d'une centaine d'obligations
d'assurance
676(
*
)
. La
dernière en date, prévue par une loi de 2002, est l'assurance
obligatoire de responsabilité civile médicale
677(
*
)
.
Il s'agit le plus souvent d'assurances de responsabilité civile de
professionnels
678(
*
)
, dont le
but est de protéger des consommateurs particuliers et d'une assurance
dommage obligatoire, appelée la « dommage ouvrage ».
Il s'agit donc de la couverture de risques longs.
Il importe de bien distinguer ces assurances obligatoires, des garanties
obligatoires elles-mêmes supportées par des assurances
facultatives qui n'entrent donc pas dans le champ du FGAO
(c'est le cas par
exemple des garanties « catastrophes naturelles »,
« attentats » et bientôt « catastrophes
industrielles »). Ces sinistres relèveront de la liquidation
de l'entreprise d'assurance, sans intervention du FGAO. S'agissant de sinistres
dont le délai de règlement est court (incendie, catastrophes
naturelles), il y aura de toutes façons un montant relativement faible
de sinistres non réglés au moment de la défaillance de
l'entreprise.
B. MISSIONS DU FGAO
1. La reprise des missions du FGAC
Le
1° du
IV
du présent article propose une nouvelle
rédaction pour la première phrase du premier alinéa de
l'article L. 421-1 qui définit la mission de l'actuel FGAC en
matière de garantie contre les accidents de la circulation.
Les compétences actuelles du FGAC en matière d'accident de la
circulation sont reprises au profit du FGAO.
Il est toutefois
précisé qu'en cas d'intervention pour insolvabilité
partielle ou totale de l'assureur, ce mécanisme est subsidiaire par
rapport à la garantie apportée au titre de la défaillance
de l'assureur : ces deux garanties ne sauraient se cumuler.
Le
2° du IV
du présent article complète l'article L.
421-1 pour prévoir que lorsque le fonds prend en charge, pour le compte
de l'entreprise d'assurance en liquidation, le règlement des dommages
causés aux tiers dans un accident de la circulation
679(
*
)
, il ne peut exercer aucun recours
contre les assurés et souscripteurs de contrats pour le recouvrement des
indemnités qu'il a versées en application de cet même
article L. 421-1 relatif à la garantie contre les accidents de la
circulation
680(
*
)
.
L'article L. 421-8 du code n'étant pas modifié par le
présent article,
le FGAO reprendra les compétences du FGAC en
matière de garantie contre les accidents de la chasse
.
De même,
le FGAO pourra continuer à assurer les missions que le
FGAC exerçait pour le compte des autres fonds d'indemnisation
.
2. L'extension à la garantie contre les défaillances
d'entreprises d'assurance lorsque l'assuré a souscrit une assurance
obligatoire
Le
VI
du présent article prévoit l'extension de la
compétence de l'actuel FGAC à la garantie contre les
conséquences des défaillances d'entreprises d'assurance lorsque
l'assuré a souscrit une assurance obligatoire. Il propose une nouvelle
rédaction de l'article L. 421-9
681(
*
)
.
a) Le champ de la garantie
Le I de l'article L. 421-9
tel que modifié par le VI du
présent article définit la mission du FGAO : il est
«
chargé de protéger les personnes assurées,
souscriptrices, adhérentes ou bénéficiaires de prestations
de
contrats d'assurance dont la souscription est rendue obligatoire par une
disposition législative ou réglementaire
, contre les
conséquences de la
défaillance des entreprises d'assurance
agréées en France
et soumises au contrôle de l'Etat
en vertu de l'article L. 310-1
» du code des assurances.
Ne sont toutefois pas concernées ni les entreprises
d'assurance-vie
682(
*
)
, ni celles
qui font de la capitalisation
683(
*
)
ni celles qui n'ont que des
activités d'assistance
684(
*
)
ou que des activités
d'assurance de dommages corporels liés aux accidents et à la
maladie
685(
*
)
(ces entreprises
relèvent du FGAP). Il s'agit donc bien des
seules entreprises
d'assurance de dommages, agréées en France et qui ont fait
souscrire des contrats d'assurance obligatoire
.
De façon logique, ne sont couverts par le fonds que les sinistres
garantis par le contrats, survenus et déclarés par
l'assuré avant la date de cessation des effets du contrat ou qui sont la
conséquence de faits ou d'actes précis survenus et
déclarés par l'assuré avant cette date.
b) L'exclusion de certains contrats d'assurance
Le II de l'article L. 421-9
tel que modifié par le VI du
présent article prévoit, sur le modèle de ce qui existe
actuellement pour le FGAP, que
certains contrats sont exclus de toute
indemnisation
, à raison de la qualité des personnes qui les
ont souscrits ou de la nature particulière des contrats
concernés.
Il s'agit :
1° des contrats «
dont un assuré, un souscripteur, un
adhérent, un bénéficiaire de prestations ou un tiers
agissant pour le compte d'une de ces personnes a pu bénéficier
d'informations sur la situation de l'entreprise défaillante ou
d'avantages particuliers
» ; il s'agit d'éviter qu'un
assuré ne profite de son information privilégiée sur
l'entreprise pour souscrire un contrat d'assurance avec cette entreprise dans
le seul but d'être indemnisé ;
2° des contrats «
relatifs aux corps de véhicules
marins, lacustres, fluviaux, aériens, spatiaux et ferroviaires ;
aux marchandises transportées ; à la protection
juridique ; à l'assistance aux personnes en difficulté,
notamment au cours de déplacements ; de responsabilité
civile ou de garantie financière exigés au titre des conventions
internationales sur la responsabilité nucléaire, les mouvements
transfrontières de déchets dangereux et sur la
responsabilité du transporteur maritime fluvial et aériens, et
ceux souscrits en application
» du règlement communautaire
de 1997 relatif à la responsabilité des transporteurs
aériens en cas d'accident
686(
*
)
; il s'agit d'exclure de la
garantie du FGAO les risques spéciaux ;
3° des contrats «
couvrant ou indemnisant des risques ou
engagements situés hors de la communauté européenne, ou
couvrant ou indemnisant des tiers victimes ressortissants ou résidents
de pays situés hors de la Communauté
européenne
» , il s'agit de ne pas faire entrer dans
la garantie des engagements non maîtrisés ;
4°
a)
des contrats souscrits par les
«
administrateurs, dirigeants, associés personnellement
responsables détenteurs directement ou indirectement, d'au moins 5 % du
capital de l'entreprise d'assurance, commissaires aux comptes et assurés
ayant les mêmes qualités dans d'autres sociétés du
groupe, administrateurs de la société d'assurance
mutuelle
» car ces personnes ont aussi des informations
privilégiées sur la situation difficile de l'entreprise ;
4°
b)
des contrats souscrits par les «
tiers
agissant pour le compte des assurés, souscripteurs de contrats,
adhérents et bénéficiaires des prestations
(...)
» car seuls les assurés directs ont droit à
la garantie ;
4°
c)
des contrats souscrits par les
«
entreprises d'assurance relevant du
[code des assurances],
institutions de prévoyance régies par le code de la
sécurité sociale ou le code rural ainsi que les mutuelles
régies par le code de la mutualité, sauf lorsqu'il s'agit de
contrats souscrits au profit de leurs salariés ou de leurs
clients
» car ces entreprises sont censées être
suffisamment averties pour ne pas choisir un assureur présentant un
risque de défaillance ;
4
° d)
des contrats souscrits par les
«
sociétés entrant dans le périmètre
de consolidation
687(
*
)
(...)
dont relève l'entreprise d'assurance, sauf s'il s'agit de contrats
souscrits au profit de leurs salariés ou de leurs
clients
» car ces sociétés sont également
censées être en mesure d'apprécier la solidité de
l'entreprise d'assurance qui fait partie du même groupe ;
4°
e)
des contrats souscrits par les
«
établissements de crédit
[ainsi que
le
Trésor Public, la Banque de France, les services financiers de La Poste,
l'institut d'émission des départements d'outre-mer, l'institut
d'émission d'outre-mer, la Caisse des dépôts et
consignations et ses filiales]
688(
*
)
sauf pour les contrats
souscrits pour le compte d'un emprunteur, d'un client ou de leurs
salariés
» pour les mêmes raisons ;
5° des contrats «
assurant les personnes morales et les
personnes physiques, souscriptrices, adhérentes ou
bénéficiaires, en ce qui concerne
leurs activités
professionnelles
; sont couverts en revanche les contrats souscrits au
profit d'une personne physique, cliente ou adhérente hors du cadre de
ses activités professionnelles ou au profit des salariés des
personnes morales ou physiques mentionnées
ci-dessus
» ; les personnes agissant dans leur cadre
professionnel sont ainsi réputées être à même
de choisir un assureur financièrement solide ; ainsi un particulier
ou une société civile immobilière (personne morale),
assurés auprès d'un assureur qui fait faillite, seront couverts
si les contrats d'assurance obligatoire conclus ne concernent pas leurs
activités professionnelles.
Si les personnes assurées agissant dans le cadre de leur activité
professionnelle sont réputées à même de choisir un
bon assureur,
les victimes
de dommages que ces personnes assurées
pourraient causer dans le cadre de leur activité professionnelle n'ont
pas à subir les conséquences du mauvais choix de l'assureur.
C'est pourquoi
le
III de l'article L. 421-9
tel que
modifié par le VI du présent article prévoit que
«
les personnes victimes d'un dommage dont l'assuré est
responsable et qui ne se trouvent pas avec lui dans une situation contractuelle
à raison de leur activité professionnelle sont indemnisées
par le fonds
». C'est le cas par exemple d'un patient, victime
d'un dommage causé par son médecin (obligatoirement assuré
en responsabilité civile médicale) : il sera
indemnisé si l'assureur de son médecin vient à faire
faillite.
Un décret en Conseil d'Etat prévoira les modalités
d'application de l'article L. 421-9 tel que modifié par le VI du
présent article.
C. MODALITÉS D'INTERVENTION DU FONDS
Afin de préciser les modalités d'intervention du fonds lorsqu'il
agit au titre de la garantie contre les défaillances d'entreprises
d'assurances, le
VII
du présent article propose d'insérer
six nouveaux articles dans le code des assurances. Ces articles sont la
reprise, presque à l'identique, des dispositions prévues dans le
cadre du FGAP.
1. Le recours au fonds de garantie et la procédure de transfert de
portefeuille
L'article L. 421-9-1
introduit par le présent article
détaille la procédure qui permet d'avoir recours au fonds de
garantie ainsi que la procédure de transfert de portefeuille qui lui
fait suite. Il s'agit d'un fonctionnement à titre exclusivement curatif,
aucune intervention de nature préventive
689(
*
)
n'est prévue.
a) Le recours au fonds de garantie
La décision de recourir au fonds de garantie intervient en plusieurs
étapes :
- tout d'abord, il faut qu'au cours d'une procédure de
sanction
690(
*
)
,
la commission
de contrôle des assurances, des mutuelles et des institutions de
prévoyance (CCAMIP)
691(
*
)
estime qu'une des entreprises
visées dans le champ de la garantie du
FGAO (c'est à dire mentionnées au premier aliéna de
l'article L. 421-9) ou présente sur le marché des garanties de
responsabilité civile automobile «
n'est plus en mesure
de faire face à ses engagements
» envers les personnes
couvertes par cette garantie (c'est à dire celles qui sont
également mentionnées au premier alinéa de l'article L.
421-9) ; si elle fait ce constat,
elle doit alors décider de
recourir au fonds
;
- toutefois, avant de prendre sa décision,
elle doit consulter par
écrit le fonds
en lui indiquant qu'elle envisage de recourir
à lui ;
-
le fonds dispose alors d'un délai de quinze jours pour adresser ses
observations à la CCAMIP
et son représentant peut être
reçu par elle pendant ce délai de quinze jours ;
- à l'expiration de ce délai ou d'un délai plus court
fixé d'un commun accord entre le fonds et le président de la
CCAMIP,
celle-ci statue sur la saisine du fonds et lui notifie sa
décision de recourir à lui
;
- s'il conteste la décision de la CCAMIP,
le fonds peut
, dans un
délai de quinze jours suivant cette décision,
saisir le
ministre chargé de l'économie
;
celui-ci peut
,
«
dans l'intérêt des assurés et des
souscripteurs, adhérents et bénéficiaires des
contrats
» et dans un nouveau délai de quinze jours,
demander à la CCAMIP une nouvelle
délibération
;
- la décision de la CCAMIP de recourir au fonds de garantie est
immédiatement notifiée à l'entreprise concernée
à l'issue de cette procédure.
b) La procédure de transfert de portefeuille
Dès cette notification à l'entreprise concernée,
la
CCAMIP lance un appel d'offres en vue du transfert d'office du portefeuille
de contrats
692(
*
)
de
l'entreprise. Cet appel d'offres est communiqué au fonds de garantie.
Dans le cadre de cette procédure d'appel d'offres, la CCAMIP retient la
ou les offres qui lui paraissent «
le mieux préserver
l'intérêt des assurés, souscripteurs de contrats,
adhérents et bénéficiaires de prestations
».
La CCAMIP prend alors une
décision de transfert du portefeuille au
profit d'une ou plusieurs entreprises.
Cette décision est
publiée au
Journal Officiel
. Elle libère l'entreprise
cédante de tout engagement envers ses assurés dont les contrats
ont été ainsi transférés.
Si, en revanche, la procédure de transfert de portefeuille n'aboutit
pas, la CCAMIP en informe le fonds.
Que le transfert de portefeuille soit total, partiel ou qu'il ne
réussisse pas,
la CCAMIP doit obligatoirement retirer tous les
agréments administratifs de l'entreprise défaillante
. Cette
disposition est très importante pour éviter tout risque
d'aléa moral.
Si une partie du portefeuille n'a pas été
transférée, c'est alors le fonds de garantie (ou l'administrateur
provisoire nommé le cas échéant par la CCAMIP, pour le
compte du fonds de garantie) qui accomplit, jusqu'à la nomination du
liquidateur, les actes nécessaires à la gestion de cette partie
du portefeuille.
2. Le versement d'indemnités par le fonds
L'intervention à titre curatif par le fonds de garantie a pour seul but
l'indemnisation des assurés et/ou des victimes.
L'article L.
421-9-2
introduit par le VII du présent article, prévoit que
le fonds verse des indemnités dans deux cas de figure :
-
soit le transfert de portefeuille n'a pas abouti
: dans ce cas,
les droits des assurés sont garantis par des
versements du fonds de
garantie, au profit direct des assurés
(dans des limites
fixées par un décret en Conseil d'Etat et dans celles
prévues par les contrats souscrits auprès de l'entreprise dont
l'agrément a été retiré) ; les droits
concernés doivent toutefois être nés avant la
résiliation des contrats prévue en cas de retrait de
l'agrément administratif, c'est à dire au plus tard 40 jours
après la publication au
Journal officiel
de la décision de
la CCAMIP prononçant le retrait ;
-
soit le transfert de portefeuille a abouti
: dans ce cas ce n'est
que
la partie des droits des assurés éventuellement non
couverte par le cessionnaire qui est garantie par le versement du fonds au
cessionnaire
(dans des limites fixées par un décret en
Conseil d'Etat et dans celles prévues par les contrats souscrits
auprès de l'entreprise dont l'agrément a été
retiré).
3. Relations du fonds avec les autres autorités compétentes en
matière d'assurance
L'article L. 421-9-3
introduit par le présent article prévoit
que :
- le ministre chargé de l'économie (ou son
représentant) peut demander à être entendu par le fonds. Ce
droit est également ouvert au président de la CCAMIP (ou son
représentant) ;
- à l'inverse, la CCAMIP peut demander au représentant du
fonds de s'exprimer devant elle sur toute question concernant une entreprise
d'assurance
693(
*
)
et le fonds
peut demander à être entendu par la commission.
4. Subrogations et actions récursoires
L'article L. 421-9-4
introduit par le présent article
prévoit :
- les cas dans lesquels le fonds de garantie peut être
subrogé dans les droits des assurés et de l'entreprise
défaillante : le fonds de garantie rachète les droits des
assurés indemnisés et devient titulaire de ces droits dans la
procédure de liquidation ouverte à l'encontre de l'entreprise
défaillante ;
- et ceux dans lesquels il peut engager des actions récursoires contre
les dirigeants de cette entreprise.
a) Cas de subrogation
Le fonds de garantie est subrogé :
-
dans les droits des assurés
à concurrence du
montant des sommes qu'il a versées sous forme d'indemnités ;
-
dans les droits de l'entreprise dont l'agrément a
été retiré
, à concurrence du montant des sommes
qu'il a versées sous forme d'indemnités et des sommes exigibles
en vertu de l'exécution des
traités de réassurance
en cours
694(
*
)
.
b) Actions récursoires
La subrogation permet au fonds d'entamer des actions récursoires afin
d'obtenir le remboursement des sommes qu'il a versées sous forme
d'indemnités. Il peut ainsi engager plusieurs types d'actions, dont il
doit informer la CCAMIP :
- toute
action en responsabilité
695(
*
)
à l'encontre des dirigeants de
droit ou de fait
de l'entreprise d'assurance dont la défaillance a
entraîné son intervention ;
- une
action en responsabilité à l'encontre de autres
dirigeants et actionnaires
de la société
défaillante (ce qui constitue une nouveauté par rapport aux
dispositions régissant le FGAP).
Par ailleurs, afin d'obtenir le remboursement de l'indemnisation versée
à des tiers victimes d'un dommage dont est responsable une personne dans
le cadre de ses activités professionnelles et dont la situation de
l'assureur a justifié l'intervention du fonds de garantie, celui-ci
engage une
action contre le responsable du dommage
.
Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités
d'application de cet article.
b) Reversement de commissions par les intermédiaires d'assurances
L'article L. 324-5
du code des assurances
permet actuellement
à
la CCAMIP
, lorsqu'une entreprise fait l'objet d'une
procédure de transfert d'office du portefeuille et
si elle estime que
les intermédiaires
696(
*
)
qui ont présenté ou
fait souscrire des contrats comportant la garantie de risques couverts par le
FGAP
ont eu un comportement ayant contribué aux difficultés
de cette entreprise,
de décider que ces intermédiaires
doivent reverser au cessionnaire du portefeuille (ou à défaut au
fonds de garantie)
tout ou partie des commissions ou
rémunérations encaissées à l'occasion de la
présentation ou de la souscription de ces contrats au cours des 18 mois
précédents.
Le
VIII
du présent projet de loi propose d'étendre cette
possibilité aux contrats comportant la garantie de risques couverts par
le FGAO.
En outre, le
IX
du présent article introduit un nouvel article
dans le code, numéroté
L. 326-14-1,
qui permet à
la CCAMIP
, lorsqu'une entreprise fait l'objet d'un retrait
d'agrément, de décider que les personnes physiques ou morales
exerçant le courtage d'assurances par l'intermédiaire desquelles
des contrats ont été souscrits auprès de cette entreprise
doivent reverser à la liquidation une part des commissions
encaissées
697(
*
)
à l'occasion de ces contrats
698(
*
)
. La même disposition s'applique
aux mandataires non salariés de la même entreprise qui
n'étaient pas tenus de lui réserver l'exclusivité de leurs
apports de contrats. Il s'agit de la reprise d'un dispositif existant à
l'article L. 326-18, supprimé par le X du présent article,
et qui était limité aux contrats de responsabilité civile
couvrant les dommages causés aux tiers en cas d'accident de la
circulation
699(
*
)
.
La CCAMIP agissant dans le cadre du fonds de garantie pourra donc, dans
certains cas, faire jouer cumulativement les deux mécanismes.
5. Règles de secret professionnel
L'article L. 421-9-5
introduit par le présent article prévoit
les règles de secret professionnel applicables dans le cadre des
activités du FGAO.
Il est prévu que les membres du conseil d'administration du fonds de
garantie ainsi que toute personne qui, par ses fonctions, a accès aux
documents et informations détenus par le fonds de garantie, sont tenus
au secret professionnel
700(
*
)
.
6. Précisions par décret en Conseil d'Etat
L'article L. 421-9-6
introduit par le présent article prévoit
qu'un décret en Conseil d'Etat, qui ne pourra être modifié
qu'après avis du fonds, précisera :
- les conditions et les
plafonds d'indemnisation
par
assuré
,
- les modalités et délais d'indemnisation,
- les règles relatives à l'information de la clientèle,
-
le plafond pluriannuel global
pour l'intervention du fonds dans sa
mission de garantie contre les conséquences des défaillances
d'entreprises d'assurance dommage
701(
*
)
(la garantie des assurances de
dommages pouvant représenter des montants très
considérables, notamment en cas de dommages sériels, il est
prévu qu'elle ne sera pas illimitée ; ainsi, les entreprises
d'assurance qui sont appelées à cotiser au fonds pourront
chiffrer leurs engagements hors bilan au titre de ce fonds) ;
- les délais de forclusion des demandes de versement
présentées par les entreprises cessionnaires du portefeuille ou
par les assurés
702(
*
)
;
- les modalités de définition des limites de garantie en cas de
transfert de portefeuille de l'entreprise défaillante
703(
*
)
.
D. AUTRES DISPOSITIONS
Le
I
du présent article renomme le chapitre I
er
du
titre deuxième du livre quatrième du code des assurances,
actuellement intitulé «
Le Fonds de garantie contre les
accidents de circulation et de chasse
», en «
Le
Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages
». Il
prévoit également que dans tout le code des assurances, les mots
«
Fonds de garantie contre les accidents de circulation et de
chasse
», sont remplacés par les mots «
Fonds
de garantie des assurances obligatoires de dommages
».
Le
II
du présent article
renomme la section
première du chapitre précité
« dispositions générales »
704(
*
)
.
Le
III
du présent article renomme la section VI du chapitre
précité «
intervention du fonds en cas de retrait
d'agrément administratif d'entreprises d'assurances
obligatoires
»
705(
*
)
.
Le
X
du présent projet de loi abroge trois articles du code des
assurances :
- l'article L. 326-17 qui prévoit qu'en cas de retrait
administratif d'une entreprise qui pratique les opérations d'assurance
automobile, le FGAC prend en charge, pour le compte de l'entreprise en
liquidation, le règlement des dommages causés aux tiers lors
d'accidents de la circulation ; le FGAO reprend cette
responsabilité à son compte ;
- l'article L. 326-18 qui est repris et étendu à l'article
L. 326-14-1 introduit par le
IX
du présent article
706(
*
)
;
- l'article L. 326-19 qui précise que les dispositions des articles
L. 326-17 et L. 326-18 sont applicables dans les territoires d'outre-mer
dans la rédaction du code antérieure à une loi de 1991.
L'article L. 421-10 prévoit que les principales dispositions qui
régissent actuellement le FGAC
707(
*
)
sont applicables à la
Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française et
à Saint-Pierre-et-Miquelon. Le
XI
du présent article
prévoit que l'article L. 421-9, qui fixe le champ de la garantie contre
les conséquences de la défaillance des entreprises du FGAO, ne
fait pas partie des dispositions étendues.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
A. UNE SOLUTION PRUDENTE
1. La création d'un mécanisme de garantie pour les assurances de
dommages
L'opportunité de créer, à côté du FGAP, un
fonds dédié aux assurances dommages, avait été
évoquée dès la discussion du projet de loi
précité relatif à l'épargne et à la
sécurité financière.
Un projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et
financier
708(
*
)
,
déposé sur le bureau du Sénat par le
précédent gouvernement en mai 2001, avait eu pour ambition de
créer un tel fonds de garantie pour les assurances de dommages. Ce
projet de loi n'a jamais été inscrit à l'ordre du jour de
notre assemblée.
2. Le choix d'un mécanisme prudent
Le gouvernement reprend donc ces projets antérieurs en limitant de
façon raisonnable le champ couvert par le fonds de garantie, afin
d'éviter toute déresponsabilisation des assureurs et tout risque
de dérive financière incontrôlée :
- il ne s'agit
que des assurances obligatoires de dommages
709(
*
)
(à l'exclusion des
garanties obligatoires liées à des assurances facultatives qui
relèvent du libre choix de tout un chacun) ; les assurances
automobiles (déjà couvertes par le FGAC) représentant
déjà quelques 90 % du chiffre d'affaires des assurances
obligatoires,
l'extension permise dans le présent article demeure
limitée par rapport au droit existant
;
-
seules les personnes agissant en dehors du cadre de leur
activité professionnelle
sont couvertes, car elles sont
réputées être placées dans une situation de profane
face au professionnel averti qu'est l'assureur : à l'inverse,
on
considère, peut-être de façon un peu illusoire
compte
tenu de la difficile évaluation de la solidité d'une entreprise
d'assurance,
qu'une personne agissant dans le cadre de son activité
professionnelle est plus avertie sur la qualité des assureurs
opérant sur le marché et n'est donc pas fondée à
demander une couverture en cas de défaillance de son assureur ;
- seules les personnes assurées auprès d'une
entreprise
d'assurance agréée en France
sont couvertes
710(
*
)
, à l'exclusion des personnes
assurées auprès de succursales d'entreprises d'assurance
communautaires opérant en France ou d'entreprises d'assurances
travaillant en libre prestation de services en France ; en outre,
les
contrats couvrant des risques ou indemnisant des victimes hors Union
européenne
sont exclus
de la garantie ; cette limitation du
champ géographique du mécanisme de garantie vise à
éviter tout détournement par des entreprises confrontées
à des risques de procès en masse qui viendraient s'assurer en
France dans le seul but de bénéficier de la couverture du fonds ;
- des
plafonds d'indemnisation
par assuré seront fixés
ainsi qu'un
plafond global pluriannuel d'intervention
, afin de limiter
le risque de dérive financière.
Comparaison des principaux régimes existant à l'étranger
Un
mécanisme de fonds de garantie pour l'assurance dommage a
été institué dans plusieurs pays de l'OCDE et notamment au
Japon, en Corée du Sud, au Canada, aux Etats-Unis (dans la plupart des
Etats), en Grande-Bretagne et en Irlande (un tel mécanisme est en cours
de discussion aux Pays-Bas). L'Allemagne, l'Italie et l'Espagne ne disposent
pas de tels mécanismes, le régime de liquidation judiciaire
étant très protecteur des intérêts des
assurés.
S'agissant du champ d'intervention du fonds de garantie, on observe qu'il
existe systématiquement des restrictions liées à la nature
du contrat souscrit ou à la qualité du titulaire du contrat
d'assurance :
- s'agissant de la nature du contrat souscrit, le
caractère
obligatoire de l'assurance
est un critère en vigueur au Royaume-Uni,
au Japon et en Italie ;
- s'agissant de la qualité des souscripteurs,
les personnes dont
on est en droit de penser qu'elles possèdent des moyens suffisants pour
choisir leur assureur
en connaissance de cause font souvent l'objet de
dispositions spécifiques ; c'est le cas au Royaume-Uni, en Irlande, au
Japon, aux Etats-Unis (dans 19 Etats) et en Corée du Sud ;
- lorsqu'aucune exclusion n'est prévue quant à la nature du
contrat ou à la qualité du souscripteur,
d'autres
mécanismes
viennent limiter l'action des systèmes de
garantie, essentiellement sous la forme de plafonds d'indemnisation ; c'est le
cas en Irlande, aux Etats-Unis, au Canada et en Corée du Sud.
Source : ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie.
2. L'adossement au FGAC
La fusion du fonds de garantie des assurances de dommages avec le FGAP
n'étant pas envisageable compte tenu de la différence
fondamentale de nature entre les risques couverts, le gouvernement a choisi
d'adosser le nouveau fonds de garantie à un fonds existant de même
nature.
Cette solution permet au FGAO de disposer sans délai d'une
assise
financière confortable
(de l'ordre 300 millions d'euros de
provisions techniques).
Votre rapporteur est favorable à l'approche choisie par le
gouvernement : il convient de mettre en oeuvre de façon très
prudente un fonds qui garantit des risques non calculables. Les prochaines
années permettront d'observer son évolution et, le cas
échéant, d'améliorer la couverture qu'il offre.
B. LES RECOURS CONTRE LES RESPONSABLES D'ACCIDENTS DE LA CIRCULATION
L'article L. 421-1
du code des assurances tel que modifié par le IV
du présent article prévoit que, lorsque le fonds de garantie
prend en charge le règlement des dommages de la circulation (au titre
des anciennes missions du FGAC),
il ne peut exercer aucun recours
contre les assurés
pour le recouvrement des indemnités
qu'il a versées.
Or,
l'article L. 421-9-4
introduit par le VII du présent article
prévoit quant à lui, dans le cadre de la garantie des assurances
obligatoires de dommages,
que le recours du fonds contre le responsable du
sinistre est possible
lorsque les dommages subis par la victime ont
été provoqués par une personne morale ou une personne
physique dans le cadre de ses activités professionnelles.
La garantie des assurances obligatoires de dommages n'étant pas ouverte
aux entreprises d'assurance non agréées en France, on peut
imaginer la situation suivante :
- un poids lourd, dont le propriétaire est assuré
auprès d'une entreprise d'assurance agréée en France,
cause un accident de la circulation ; le fonds pourra demander au
propriétaire du poids lourd le remboursement des indemnités
versées à la victime de l'accident ;
- mais si l'exploitant est assuré auprès d'une entreprise
d'assurance non agréée en France, le fonds ne pourra pas demander
le remboursement de ces indemnités.
Afin de ne pas laisser subsister dans la loi une telle incitation pour les
professionnels à choisir des assureurs non agréés en
France, votre commission vous soumet
un amendement
qui maintient, dans
ce seul domaine des accidents de la circulation, le droit acquis en confirmant
qu'aucun recours ne peut être engagé à l'encontre du
responsable du dommage.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article ainsi modifié.
Sous-section 2 :
Diverses extensions du Fonds de garantie des
assurances obligatoires de dommages
ARTICLE 58
Gestion et financement des
majorations de rentes par le Fonds de garantie des assurances obligatoires de
dommages
Commentaire : le présent article a pour objet de
transférer au fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages
la gestion et le financement de la majoration des rentes allouées en
réparation du préjudice causé par un véhicule
terrestre à moteur.
I. LE DROIT EXISTANT
A. LES MAJORATIONS DE RENTES ALLOUÉES SUITE A UN ACCIDENT DE LA
CIRCULATION
L'article 1
er
de la loi n° 74-1118 du 27 décembre
1974 relative à la revalorisation de certaines rentes allouées en
réparation du préjudice causé par un véhicule
terrestre à moteur dispose que les rentes allouées en
réparation du préjudice causé du fait d'un accident de la
circulation sont majorées de plein droit selon les coefficients de
revalorisation prévus à l'article L. 455 du code de la
sécurité sociale.
Cette revalorisation a pour objet de maintenir le pouvoir d'achat des personnes
titulaires d'une rente, qu'elles soient les victimes de l'accident de la
circulation ou, en cas de décès, les personnes à charge de
la victime.
S'agissant du financement de ces majorations, l'article 2 de la loi du 27
décembre 1974 dispose qu'elles sont à la charge du
débiteur de la rente (ou de l'organisme qui lui est substitué)
à une exception près :
les majorations dont le versement
incombe aux sociétés d'assurance et au fonds de garantie des
accidents de circulation et de chasse, sont prises en charge par l'Etat.
Les crédits sont inscrits à l'article 10 du chapitre 46-93 du
budget des charges communes et ont représenté 15,5 millions
d'euros en 2002.
Il faut noter que c'est une administration centrale du ministère de
l'économie et des finances, la direction du Trésor, qui
gère les demandes de remboursements présentées chaque
année par les compagnies d'assurance.
B. LES AUTRES MAJORATIONS DE RENTES
L'article 2 de la loi n°51-695 du 24 mai 1951 portant majoration de
certaines rentes viagères et pensions dispose que, d'une manière
générale, les rentes viagères et pensions allouées,
soit amiablement, soit judiciairement, en réparation d'un
préjudice sont majorées chaque année au mois de
décembre, par arrêté du ministre chargé du budget
publié au
Journal officiel
, par application du taux
prévisionnel d'évolution en moyenne annuelle de prix à la
consommation de tous les ménages, tel qu'il figure dans le rapport
économique et financier annexé au dernier projet de loi de
finances.
L'article 3 dispose que les majorations dont le service incombe aux compagnies
d'assurance sont financées par un fonds commun alimenté en partie
par les compagnies, partie par l'Etat et partie au moyen d'une contribution des
assurés contre les risques de responsabilité civile.
Les crédits représentant la participation de l'Etat sont inscrits
à l'article 20 du chapitre 46-93 du budget des charges communes et
représentent près de 150.000 euros pour les majorations des
rentes viagères constituées auprès des compagnies
d'assurances. Il s'agit essentiellement d'accidents de la circulation sur le
sol (ex : accidents de ski, rollers, vélo, etc..).
II. LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE
Le présent article a pour objet de transférer la gestion et le
financement des majorations de rentes dont le financement incombe aux
compagnies d'assurance au fonds de garantie des assurances obligatoires de
dommages prévu à l'article L. 421-1 du code des assurances.
Le I modifie à cet effet le second alinéa du 2 de la loi du 27
décembre 1974.
Le II modifie le premier alinéa de l'article 3 de la loi du 24 mai 1951
dans les mêmes termes.
Le III ajoute cette nouvelle mission au fonds de garantie.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Votre commission ne peut que se réjouir des dispositions du
présent article qui constituent à la fois une mesure
d'économie pour le budget de l'Etat et une simplification
administrative, sans que les droits des titulaires de rente ne soient
modifiés.
Elle est donc favorable à son adoption
sous réserve d'un
amendement rédactionnel
visant à préciser dans le code
des assurances que le fonds de garantie des assurances obligatoires de
dommages, prévu à l'article L. 421-1 du code des assurances non
seulement financera mais également gèrera les majorations de
rentes. Il s'agit d'une simple coordination entre le code des assurances et les
dispositions modifiées de la loi du 27 décembre 1974 et du
24 mai 1951.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article ainsi modifié.
Section 2
Transposition de la IVème directive relative à
l'assurance automobile
ARTICLE 59
Transposition de la IVème directive
relative à l'assurance
automobile
Commentaire : le présent article a pour objet de
transposer la directive 2000/26/CE du Parlement européen et du Conseil
du 16 mai 2000 concernant le rapprochement des législations des Etats
membres relatives à l'assurance de la responsabilité civile
résultant de la circulation des véhicules automoteurs et
modifiant les directives 73/239/CEE et 88/357/CEE du Conseil.
I. LA IVÈME DIRECTIVE AUTOMOBILE
A. LES DISPOSITIONS DE LA DIRECTIVE
La directive 2000/26/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 mai
2000, dite « IV
ème
directive sur l'assurance
automobile »
vise à résoudre
les cas dans
lesquels un accident de la circulation survient en dehors de l'État
membre de résidence de la victime. Elle s'applique également aux
accidents impliquant deux ressortissants de l'Union Européenne dans
n'importe lequel des 40 pays adhérant au système de la carte
verte.
La directive vise à faciliter et accélérer le
règlement des sinistres en permettant aux victimes de s'adresser
directement à l'assureur de la partie responsable, au lieu de devoir
passer par celle ci. Chaque assureur doit désigner un
représentant chargé du règlement des sinistres dans chaque
État membre de l'UE, si bien que la victime d'un accident pourra
traiter, dans son propre État membre et dans sa propre langue, avec un
représentant de l'assureur de la partie responsable.
En vertu de la directive, les États membres doivent, en outre:
- imposer
des sanctions propres à accélérer
l'indemnisation
, lorsque les assureurs responsables prennent plus de trois
mois pour donner une réponse motivée à une demande
d'indemnisation ;
- créer des
organismes d'information
chargés de traiter
les questions liées à l'assurance automobile en
général, afin que les victimes d'accidents puissent identifier
plus facilement l'assureur de la partie responsable ;
- mettre en place
un organisme d'indemnisation
ayant pour rôle de
régler les sinistres lorsque aucun représentant chargé du
règlement des sinistres n'a été désigné ou
lorsque l'assureur traite le dossier avec une lenteur excessive. Cet organisme
demandera ensuite à l'organisme d'indemnisation de l'État membre
où est établi l'assureur le remboursement de la somme
payée à titre d'indemnisation.
B. L'ETAT DE TRANSPOSITION DE LA DIRECTIVE
La transposition de la IV
ème
directive automobile devait
intervenir au plus tard le 20 juillet 2002.
Seuls quatre États membres, l'Allemagne, l'Autriche, la Finlande et la
Suède, ont respecté ce délai. Depuis cette date, le
Danemark, l'Espagne, la Belgique, le Royaume-Uni et la Grèce ont
également pris des mesures de transposition.
La France fait donc partie des six Etats membres n'ayant pas encore
transposé la directive et elle fait l'objet d'une procédure
d'infraction engagée par la Commission européenne, de même
que les autres pays n'ayant toujours pas pris de mesures de transposition.
Le présent article a donc pour objet de prendre les mesures
nécessaires pour respecter nos engagements communautaires.
II. LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE
A. L'OFFRE D'INDEMNISATION DES VICTIMES D'ACCIDENTS
Le
I
du présent article a pour objet de modifier l'article L.
211-9 du code des assurances.
Le premier alinéa
introduit une obligation, pour l'assureur d'un
véhicule terrestre à moteur, de présenter à la
victime d'un accident corporel ou matériel une offre d'indemnité
motivée
dans un délai de trois mois à compter de la
demande d'indemnisation
.
Ce principe souffre une exception : lorsque la responsabilité est
contestée par l'assureur ou lorsque le dommage n'est pas
entièrement quantifié (cas en particulier d'un accident corporel
sans consolidation de l'état de la victime), l'assureur peut ne pas
faire d'offre d'indemnité mais doit, toujours dans les trois mois,
donner une réponse motivée à la demande qui lui a
été soumise.
Le second alinéa
ajoute aux dispositions du premier
alinéa, pour les seules victimes ayant un préjudice corporel,
qu'une offre d'indemnité doit leur être faite dans
un
délai maximum de huit mois à compter de leur accident
.
Il s'agit là d'une reprise des dispositions législatives en
vigueur, qui s'ajouteront donc aux nouvelles dispositions prises en application
de la IV
ème
directive relative à l'assurance
automobile. Ainsi, en cas d'accident corporel, deux délais
joueront : l'un de trois mois à compter de la demande
d'indemnité, l'autre de huit mois à compter de la date de
l'accident.
Il s'agit en particulier de prévoir le cas où la demande
d'indemnisation serait tardive ou la victime ne ferait pas de demande
d'indemnisation. L'entreprise d'assurance est contrainte par la loi de faire
une offre d'indemnité dans les huit mois suivant l'accident, à la
victime ou à ses ayant-droits (héritiers et, s'il y a lieu,
conjoint). L'alinéa précise que l'offre comprend tous les
éléments indemnisables du préjudice, y compris les
éléments relatifs aux dommages aux biens, lorsqu'ils n'ont pas
fait l'objet d'un règlement préalable.
Le troisième alinéa
dispose que l'offre peut avoir un
caractère provisionnel lorsque l'assureur n'a pas, dans les trois mois
de l'accident, été informé de la consolidation de
l'état de la victime. L'offre définitive d'indemnisation doit
alors être faite dans un délai de cinq mois suivant la date
à laquelle l'assureur a été informé de cette
consolidation.
Ces dispositions montrent que l'on estime que le délai de huit mois
à compter de la date de l'accident pour faire une offre peut être
pleinement respecté si l'assureur est informé rapidement de la
consolidation de la victime (c'est-à-dire de la stabilisation
définitive de son état de santé). En revanche, dans le cas
où cette information prend du temps, il est proposé de laisser un
délai supplémentaire. L'offre doit tout de même être
faite dans les huit mois de l'accident mais elle a un caractère
provisionnel, c'est-à-dire qu'elle peut être modifiée.
Le quatrième alinéa dispose que «
en tout
état de cause, le délai le plus favorable à la victime
s'applique
». Cette disposition vise à rassurer quant aux
droits des victimes. Elle pourrait être jugée inutile par le fait
que les contraintes en termes de délais (offre d'indemnisation trois
mois après la demande et huit mois après l'accident) ne sont pas
contradictoires mais s'additionnent naturellement.
Enfin, le dernier alinéa dispose qu'en cas de pluralité de
véhicules, et s'il y a plusieurs assureurs, l'offre est faite par
l'assureur mandaté par les autres.
B. LA DÉSIGNATION DE REPRÉSENTANTS DES ENTREPRISES
D'ASSURANCE DANS L'ESPACE ÉCONOMIQUE EUROPEEN
Le
II
du présent article a pour objet d'introduire un nouvel
article L. 310-2-1 au code des assurances.
Le premier alinéa
dispose que toute entreprise d'assurance
couvrant les risques de responsabilité civile résultant de
l'emploi de véhicules terrestres à moteur désigne dans
chacun des Etats de l'Espace économique européen
(c'est-à-dire les 15 Etats membres de l'Union européenne, la
Norvège, l'Islande et le Lichtenstein) un représentant qui a pour
mission de traiter et de régler, dans l'Etat de résidence de la
personne lésée, les sinistres résultant d'un accident de
la circulation causé dans l'EEE par un véhicule qu'elle assure.
Le second alinéa
étend les compétences du
représentant aux accidents causés dans un Etat tiers
adhérant au régime de la carte internationale d'assurance (dite
« carte verte »).
Le troisième alinéa
précise les conditions
d'exercice du métier de représentant d'une ou plusieurs
entreprises d'assurance : résider ou être établi dans
l'Etat où il est désigné, connaître la ou les
langues officielles de l'Etat.
Enfin,
le dernier alinéa
impose aux entreprises d'assurance une
obligation de transmettre à l'organisme d'information de l'Etat, qui
lui-même transmet aux organismes d'information de tous les autres Etats,
le nom et l'adresse du représentant qu'elles ont désigné
dans tous les Etats membres.
C. LA CRÉATION D'UN ORGANISME D'INDEMNISATION DES VICTIMES
D'ACCIDENTS DANS L'ESPACE ECONOMIQUE EUROPÉEN OU DANS UN PAYS
TIERS
Le
III
du présent article crée un organisme
d'indemnisation des victimes d'accidents dans l'espace économique
européen et dans les pays dont le bureau national d'assurance a
adhéré au régime de la carte internationale d'assurance.
Les missions du fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages sont
complétées par un alinéa qui dispose que le fonds de
garantie est l'organisme d'indemnisation chargé des missions
détaillées aux articles L. 424-1 à L. 424-7
détaillées au IV du présent article.
Le
IV
ajoute en effet un chapitre intitulé « organisme
d'indemnisation » au titre II
ème
du livre
IV
ème
du code des assurances.
Le texte proposé pour l'article L. 424-1
détermine les
compétences de l'organisme d'indemnisation : il s'agit d'indemnise
les personnes lésées, résidant en France, pour un
préjudice résultant d'un accident survenu sur le territoire
métropolitain d'un autre Etat de l'Espace économique
européen, et mettant en cause un véhicule ayant son stationnement
habituel ou étant assuré dans un de ces Etats. Cette
compétence s'étend aux accidents survenus dans un pays
adhérant à la carte verte, mais à la condition cette fois
que le véhicule soit stationné et assuré dans un Etat
membre de l'Union européenne.
Le texte proposé pour l'article L. 424-2
précise les
conditions de saisine de l'organisme d'indemnisation. Elles sont au nombre de
trois :
1) Lorsque la personne lésée n'a pas reçu de
réponse motivée dans un délai de trois mois à une
demande d'indemnisation auprès d'une entreprise d'assurance ou de son
représentant ;
2) Lorsque l'entreprise d'assurance n'a pas de représentant (à
condition de ne pas s'être adressé directement à
l'entreprise d'assurance auquel cas il faut naturellement attendre le
délai de trois mois évoqué ci-dessus) ;
3) Lorsque l'identification du véhicule en cause ou l'identification de
l'entreprise d'assurance qui accorde sa garantie ne sont pas possibles au terme
d'un délai de deux mois à compter de l'accident.
Enfin, il est précisé que les personnes lésées ne
peuvent présenter de demande d'indemnisation si elles ont engagé
une action en justice directement à l'encontre de l'entreprise
d'assurance. Cette disposition vise les cas prévus aux 1) et 2)
ci-dessus.
Le texte proposé pour l'article L. 424-3
précise, dans son
premier alinéa, les conditions d'intervention de l'organisme
d'indemnisation. Celui-ci intervient dans un délai de deux mois à
compter de la demande d'indemnisation, sauf si dans cette période,
l'entreprise d'assurance ou son représentant donne une réponse
motivée à la demande qui lui a été faite.
Dans son second alinéa, il affirme le principe général
selon lequel l'offre d'indemnisation a un caractère subsidiaire.
En effet, l'organisme d'indemnisation paye les indemnités qui ne peuvent
être prises en charge à aucun autre titre.
Le texte proposé pour l'article L. 424-4
dispose que l'organisme
d'indemnisation est subrogé dans ses droits à l'encontre de
l'organisme d'indemnisation de l'Etat où se trouve l'entreprise
d'assurance du véhicule en cause pour le remboursement de
l'indemnisation. Cela signifie que lorsqu'un citoyen français est
lésé, il se tourne d'abord vers l'organisme d'indemnisation
français pour se faire rembourser, dans les cas prévus à
l'article L. 424-2 puis, l'organisme d'indemnisation se tourne vers son
homologue de l'Etat où se trouve l'entreprise d'assurance, pour le
remboursement des sommes engagées.
En application de
l'article L. 424-5
, lorsque la situation inverse se
produit, c'est-à-dire lorsque l'organisme d'indemnisation
français rembourse à un homologue étranger les sommes
engagées du fait d'un accident pour lequel le véhicule
impliqué est assuré en France, il est subrogé dans les
droits de l'organisme et de la personne lésée pour obtenir
remboursement auprès de la personne ayant causé l'accident, de
l'entreprise d'assurance ou du fonds de garantie.
Le texte proposé pour l'article L. 424-6
dispose que pour
accomplir sa mission, l'organisme d'indemnisation se fait communiquer toute
information utile et tous documents et prend les mesures nécessaires
pour négocier le règlement des sinistres. Il est
précisé que le droit applicable pour l'indemnisation de la
personne lésée est le droit en vigueur sur le territoire de
l'Etat de survenance de l'accident.
Le texte proposé pour l'article L. 424-7
précise le cas
où l'organisme d'indemnisation est intervenu lorsque le véhicule
ou l'entreprise d'assurance n'ont pu être identifiés.
Dans ce cas, l'organisme possède une créance sur le fonds de
garantie de l'Etat où l'accident a eu lieu, sur le fonds de garantie de
l'Etat où le véhicule a son stationnement habituel si
l'entreprise d'assurance n'a pu être identifiée ou sur le fonds de
garantie de l'Etat où l'accident a eu lieu dans le cas d'un
véhicule non identifié. A la créance s'ajoutent des frais
de gestion selon un accord conclu entre les organismes d'indemnisation des
Etats membres.
D. LA CRÉATION D'UN ORGANISME D'INFORMATION
Dans son V
, le présent article insère dans le livre
IV
ème
du code des assurances un titre V
ème
intitulé « organisme d'information » qui comprend
les articles L. 451-1 à L. 451-4.
Le texte proposé par l'article L. 451-1
énumère les
informations que le nouvel organisme est chargé de diffuser et les
personnes habilitées à les demander.
Les personnes habilitées à demander des informations sont les
personnes lésées dans un accident de la circulation survenu sur
le territoire d'un Etat membre de l'espace économique européen,
à l'exception de leur Etat de résidence ou sur le territoire d'un
Etat tiers adhérant à la carte verte, lorsque le véhicule
a son stationnement habituel sur le territoire français et est
assuré auprès d'une entreprise adhérant à
l'organisme d'information. Ces personnes doivent résider dans un Etat de
l'EEE et peuvent faire leur demande par l'intermédiaire d'un
représentant.
Les informations délivrées sont détaillées aux
1° à 5° de l'article L. 451-1 : il s'agit des
coordonnées de l'entreprise d'assurance du véhicule en cause, du
numéro de contrat, du numéro de carte internationale d'assurance
ou de contrat d'assurance frontière, des coordonnées du
représentant de l'entreprise dans le pays de résidence du
demandeur, des coordonnées de autorités chargées de
l'indemnisation s'il s'agit d'un véhicule de l'Etat.
En plus de ces informations, un dernier alinéa précise que si la
personne lésée « prouve qu'elle y a un
intérêt légitime », l'organisme d'information lui
communique le nom et l'adresse du propriétaire ou du conducteur habituel
ou du détenteur déclaré du véhicule impliqué
dans l'accident.
La diffusion de données personnelles peut poser problème
.
L'article 5 de la directive 2000/56/CE du 16 mai 2000 dispose que le traitement
des données à caractère personnel résultant des
dispositions de la directive doit être effectué en
conformité avec les dispositions nationales prises en application de la
directive 95/46/CE. Il s'agit de la directive du Parlement européen et
du Conseil, du 24 octobre 1995, relative à la protection des personnes
physiques à l'égard du traitement des données à
caractère personnel et à la libre circulation de ces
données.
En France, la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à
l'informatique, aux fichiers et aux libertés protège les
données personnelles et la Commission nationale de l'informatique et des
libertés joue un rôle fondamental en ce domaine. Par bien des
aspects, la loi de 1978 a anticipé sur les dispositions communautaires
actuelles. Toutefois, il faut souligner que la transposition des dispositions
de la directive de 1995 n'est pas parvenue à son terme en
France.
711(
*
)
L'article L. 451-2
traite des relations entre les entreprises
d'assurances et l'organisme d'information.
Toutes les entreprises d'assurance ayant leurs activités sur le
territoire français doivent adhérer à l'organisme
d'information sous peine de sanctions. Ces sanctions sont celles :
- mentionnées à l'article L. 310-18 du code des assurances,
c'est-à-dire les sanctions disciplinaires infligées par la
commission de contrôle des assurances (avertissement, blâme,
limitation de l'exercice de l'activité, suspension temporaire des
dirigeants de l'entreprise, retrait d'agrément, transfert d'office du
portefeuille des contrats, sanctions pécuniaires) ;
- ou mentionnées aux articles L. 351-7 et L. 351-8, c'est-à-dire
les sanctions administratives infligées par la commission de
contrôle des assurances (injonction, saisine des autorités de
contrôle de l'Etat, interdiction de conclure des contrats puis
avertissement, blâme ou limitation de l'exercice de l'activité).
L'article impose également aux entreprises d'assurance de communiquer un
certain nombre d'informations à l'organisme d'information dans un
délai de sept ans à compter de la survenance de l'accident :
le numéro de contrat d'assurance, le numéro de carte
internationale, le nom et l'adresse du propriétaire ou du conducteur
habituel ou du détenteur du véhicule.
Les données doivent donc être conservées sept ans
après l'expiration du contrat d'assurance et l'obligation s'impose
à l'entreprise nouvelle en cas de transfert de portefeuille. Les
mêmes obligations relatives à la conservation des données
s'imposent aux services d'immatriculation de l'Etat. L'Etat doit
répondre aux demandes d'identification formulées par l'organisme
d'information et communiquer les coordonnées des autorités
chargées de l'indemnisation.
L'article L. 451-3
impose à l'organisme d'information de
communiquer les coordonnées de l'entreprise d'assurance d'un
véhicule responsable d'un accident aux autorités suivantes :
le fonds de garantie, l'organisme d'indemnisation, le bureau national
d'assurance.
L'article L. 451-4
dispose que l'organisme d'information peut interroger
le fichier national des immatriculations lorsque le véhicule n'est pas
assuré.
En pratique, c'est l'Association pour la gestion des informations sur le risque
automobile (AGIRA) qui sera chargée de la gestion de l'organisme
d'information.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Votre commission ne peut que se féliciter de la décision du
gouvernement de transposer la IV
ème
directive sur l'assurance
automobile, mais regrette que cette transposition tardive souligne une fois de
plus le retard pris par notre pays en matière de transposition des actes
communautaires.
Elle proposera toutefois
sept amendements rédactionnels
visant à :
-
remplacer le terme « carte verte »
par le terme
« carte internationale d'assurance » par coordination avec
les autres dispositions du code des assurances ;
-
remplacer la référence au fonds de garantie
« contre les accidents de la circulation et de
chasse »
, par une référence au fonds de garantie
visé à l'article L. 421-1 (celui-ci étant rebaptisé
« fonds de garantie des assurances obligatoires de
dommages » par l'article 57 du présent projet de loi) ;
-
supprimer une conjonction de coordination inutile
et
modifier
l'insertion de l'alinéa
selon lequel les personnes
lésées ne peuvent présenter une demande à
l'organisme d'indemnisation si elles ont engagé une action en justice
directement à l'encontre de l'entreprise d'assurance afin de viser tous
les cas ;
-
rédiger de manière plus claire
les dispositions du
premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L.
451-1 relatif à l'organisme d'information ;
-
corriger deux erreurs de référence
et préciser
que
auront seules accès aux informations sur l'entreprise d'assurance
d'un véhicule ayant causé un accident les entreprises d'assurance
des personnes lésées
, et non pas l'ensemble des entreprises
d'assurances adhérant à l'organisme d'information.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article ainsi modifié.
DIVISION ADDITIONNELLE APRÈS L'ARTICLE 59
Dispositions
diverses
Le titre
II du présent projet de loi relatif à la sécurité
des épargnants et des assurés comprend trois chapitres :
- le chapitre premier porte sur la réforme du démarchage en
matière bancaire et financière ;
- le chapitre II porte sur la sécurité des épargnants et
des déposants ;
- le chapitre III est relatif à la sécurité des
assurés.
Votre commission vous propose après l'article 59 deux articles
additionnels dont les dispositions concernent la sécurité des
épargnants et des assurés, conformément à
l'intitulé du titre II du présent projet de loi, mais ne
s'insèrent dans aucun des chapitres existants. Il importe donc de
d'insérer dans le titre II un chapitre IV intitulé
«
Dispositions diverses
».
Décision de la commission : votre commission vous demande
d'adopter cette division additionnelle.
ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 59
Actions en
responsabilité intentées par les fonds de
garantie
Commentaire : le présent article additionnel est
interprétatif. Il vise à préciser l'intention du
législateur s'agissant des actions en responsabilité que peuvent
intenter les fonds de garantie à l'encontre des dirigeants de droit ou
de fait des entreprises pour lesquelles ils interviennent.
La loi « épargne et sécurité
financière » de 1999
712(
*
)
a ouvert la possibilité pour
le Fonds de garantie des dépôts qu'elle créait d'engager
«
toute action en responsabilité à l'encontre des
dirigeants de droit ou de fait des établissements pour lesquels il
intervient aux fins d'obtenir le remboursement de tout ou partie des sommes
versées par lui
».
Dans la mise en oeuvre de cette faculté qui lui était offerte, le
Fonds de garantie des dépôts s'est heurté à
l'interprétation de la nature juridique de cette action en
responsabilité
:
- s'agit-il d'une
action préexistante
à la
création du Fonds et qui donc se prescrit dans les trois ans de la
commission des faits ou de leur révélation
713(
*
)
?
- ou s'agit-il d'une
action d'un type nouveau
dans la conception
classique du droit français
714(
*
)
puisqu'elle ne vise pas à
réparer un préjudice mais à obtenir un
remboursement
715(
*
)
?
Or, s'il s'agit d'une action d'un type nouveau, force est de constater que le
législateur de 1999 n'a pas prévu, au moment du vote de la loi,
de
disposition rétroactive explicite
permettant de l'appliquer
sans détours à des fautes reprochées aux dirigeants,
antérieures à la publication de la loi.
L'insécurité juridique dans laquelle se trouve le Fonds de
garantie des dépôts (et les autres fonds qui seraient
amenés à utiliser cette disposition qui est également
prévue à leur bénéfice) pour exercer ce pouvoir que
lui a conféré la loi est préjudiciable au caractère
dissuasif de l'intervention du Fonds.
Il convient donc de préciser :
- que les actions en responsabilité intentées par les fonds
de garantie concernent les fautes commises antérieurement à la
date d'entrée en vigueur des textes introduisant ces actions ;
- que ces précisions s'appliquent aux instances en cours à
la date de la publication de la loi issue du présent projet de loi.
Décision de la commission : votre commission vous demande
d'adopter cet article additionnel.
ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 59
Renforcement des garanties
afférentes au crédit à la
consommation
Commentaire : le présent article additionnel a
pour
objet de renforcer les garanties afférentes au crédit à la
consommation, en particulier au crédit renouvelable, en étendant
les obligations formelles portant sur les mentions légales devant
apparaître sur les documents publicitaires et en précisant ce qui
relève de la publicité mensongère ou tendancieuse.
I. LE DROIT EXISTANT
Le crédit à la consommation fait l'objet des dispositions des
articles L. 311-1 à L. 311-37 du code de la consommation. Ces
dispositions définissent le champ d'application, les modalités
d'octroi (notamment le crédit gratuit et les crédits
affectés), les règles relatives au contrat de crédit, au
remboursement anticipé et à la défaillance de
l'emprunteur, et les sanctions applicables en cas de manquement.
A. LE CHAMP DU CRÉDIT À LA CONSOMMATION
L'article L. 311-2 du code de la consommation dispose ainsi que la
législation relative au crédit à la consommation
s'applique à
toute opération de crédit, ainsi
qu'à son cautionnement éventuel, consentie à titre
habituel par des personnes physiques ou morales, que ce soit à titre
onéreux ou gratuit
. La location-vente et la location avec option
d'achat, ainsi que les ventes ou prestations de services dont le paiement est
échelonné, différé ou fractionné, sont
assimilées à des opérations de crédit. Sont en
revanche exclus par l'article L. 311-3 du même code :
« 1° Les prêts, contrats et opérations de
crédit passés en la forme authentique ;
« 2° Ceux qui sont consentis pour une durée totale
inférieure ou égale à trois mois, ainsi que ceux dont le
montant est supérieur à une somme qui sera fixée par
décret ;
« 3° Ceux qui sont destinés à financer les besoins
d'une activité professionnelle, ainsi que les prêts aux personnes
morales de droit public ;
« 4° Les opérations de crédit portant sur des
immeubles, notamment les opérations de crédit-bail immobilier et
celles qui sont liées :
« a) A l'acquisition d'un immeuble en propriété ou en
jouissance ;
« b) A la souscription ou à l'achat de parts ou d'actions de
sociétés donnant vocation à une attribution en jouissance
ou en propriété d'un immeuble ;
« c) A des dépenses de construction, de réparation,
d'amélioration ou d'entretien d'un immeuble, lorsque le montant de ces
dépenses est supérieur à un chiffre fixé par
décret. »
B. LES DISPOSITIONS RELATIVES À LA PUBLICITÉ
La publicité pour le crédit à la consommation doit
respecter un certain nombre de
mentions légales
,
précisées à l'article L. 311-4 du code de la consommation.
Toute publicité faite, reçue ou perçue en France doit
ainsi :
« 1° Préciser l'identité du prêteur, la
nature, l'objet et la durée de l'opération proposée ainsi
que le coût total et, s'il y a lieu, le taux effectif global mensuel et
annuel du crédit et les perception forfaitaires ;
« 2° Préciser le montant, en euros, des remboursements par
échéance ou, en cas d'impossibilité, le moyen de le
déterminer. Ce montant inclut le coût de l'assurance lorsque
celle-ci est obligatoire pour obtenir le financement et, le cas
échéant, le coût des perceptions forfaitaires ;
« 3° Indiquer, pour les opérations à durée
déterminée, le nombre d'échéances. »
La publicité mensongère ou tendancieuse
716(
*
)
ne fait pas l'objet de dispositions
particulières pour le crédit à la consommation
. Les
articles L. 121-1 à L. 121-15 régissent en revanche la
publicité dans le cadre de pratiques commerciales
réglementées, et l'article L. 121-1 prévoit ainsi
certaines dispositions susceptibles de contribuer à une
définition globale de la publicité mensongère. Il dispose
ainsi qu' «
est interdite toute publicité comportant, sous
quelque forme que ce soit, des allégations, indications ou
présentations fausses ou de nature à induire en erreur, lorsque
celles-ci portent sur un ou plusieurs des éléments
ci-après : existence, nature, composition, qualités
substantielles, teneur en principes utiles, espèce, origine,
quantité, mode et date de fabrication, propriétés, prix et
conditions de vente de biens ou services qui font l'objet de la
publicité, conditions de leur utilisation, résultats qui peuvent
être attendus de leur utilisation, motifs ou procédés de la
vente ou de la prestation de services, portée des engagements pris par
l'annonceur, identité, qualités ou aptitudes du fabricant, des
revendeurs, des promoteurs ou des prestataires.
»
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR VOTRE COMMISSION DES FINANCES
A. LE SURENDETTEMENT PAR ACCUMULATION D'ILLUSIONS
Le surendettement demeure un problème chronique en France
, en
dépit des nombreuses améliorations successives dont sa
prévention et son traitement ont fait l'objet depuis une quinzaine
d'années
717(
*
)
. Plusieurs
rapports ont également été rédigés, et il
convient à cet égard de mentionner celui de nos collègues
MM. Jean-Jacques Hyest et Paul Loridant en 1997
718(
*
)
, et celui remis au gouvernement en
décembre 2002 par M. Benoît Jolivet
719(
*
)
, alors secrétaire
général du Conseil national du crédit et du titre.
Le surendettement est lié à des facteurs variés : un
contexte économique, social et individuel particulier,
l'irresponsabilité d'une fraction minoritaire de consommateurs vivant
chroniquement au-dessus de leurs moyens, ou les abus commis par les promoteurs
de crédit, dont les pratiques se situent parfois à la limite de
la réglementation. Dès lors, l'accumulation par strates
successives et sans discernement de nombreux crédits renouvelables d'un
montant unitaire modéré conduit parfois à une situation
consolidée de surendettement, alors que chaque crédit
contracté ne semble pas présenter de risques majeurs.
La publicité constitue un terreau privilégié
d'exploitation des failles et interstices de la réglementation,
d'exacerbation de la crédulité des consommateurs et de
création d'une illusion sur un accès facile et illimité
à un pouvoir d'achat supplémentaire d'un coût
réduit.
La publicité est néanmoins
nécessaire
, car elle constitue un vecteur privilégié
de commercialisation, d'extension de la clientèle et de
préservation de la rentabilité des établissements de
crédit.
S'il serait absurde de vouloir la supprimer,
il convient néanmoins de
mieux l'encadrer et de lui donner un contenu plus informatif, sans pour autant
exclure sa vocation promotionnelle, afin de renforcer la sécurité
juridique et financière des consommateurs
.
B. RENFORCER LES OBLIGATIONS FORMELLES RELATIVES À LA
PUBLICITÉ
L'article L. 311-4 du code de la consommation comporte plusieurs dispositions
régissant le contenu et la présentation des documents
publicitaires. Ces obligations, en nombre limité mais
opérationnelles, pourraient néanmoins être
précisées de la façon suivante :
- la publicité doit être
loyale
et
informative
;
- seul le
taux annuel effectif global
(TAEG), au lieu de la mention
alternative ou cumulative des taux mensuel et annuel, devrait figurer dans les
documents afin de fournir aux consommateurs une base de comparaison
homogène et plus claire et compréhensible que le seul taux
mensuel, qui peut donner à penser que le taux est réduit ;
- indiquer que les mentions légales doivent figurer en
caractères très apparents
(une telle disposition est
aujourd'hui en vigueur pour les contrats d'assurance),
lisibles et de taille
équivalente
. Cette dernière précision est
destinée à éviter, par exemple, que le TAEG n'apparaisse
en caractères minuscules comme cela est parfois le cas. Il paraît
en revanche difficile d'imposer que les mentions légales soient de
même taille que les mentions commerciales, par souci de lisibilité
et pour préserver la vocation de la publicité. Les conditions de
lisibilité et d'homogénéité au sein des mentions
légales devraient donc être suffisantes ;
- la publicité doit explicitement comporter les termes de
«
prêt
» ou de
«
crédit
» ;
- imposer que
l'offre préalable de crédit soit distincte du
document publicitaire
. Ces deux volets figurent en effet fréquemment
sur le même support, ce qui entraîne une confusion
préjudiciable entre le simple dépliant promotionnel à
portée informative et l'acte juridique à valeur d'engagement.
C. PRÉCISER LE CONTENU DE LA PUBLICITÉ MENSONGÈRE OU
TENDANCIEUSE
L'article L. 121-1 du code de la consommation, qui définit la
publicité mensongère, dispose qu' «
est interdite
toute publicité comportant, sous quelque forme que ce soit, des
allégations, indications ou présentations fausses ou de nature
à induire en erreur, lorsque celles-ci portent sur un ou plusieurs des
éléments ci-après ; existence, nature, composition,
qualités substantielles, teneur en principes utiles, espèce,
origine, quantité, mode et date de fabrication,
propriétés, prix et conditions de vente de biens ou services qui
font l'objet de la publicité, conditions de leur utilisation,
résultats qui peuvent être attendus de leur utilisation, motifs ou
procédés de la vente ou de la prestation de services,
portée des engagements pris par l'annonceur, identité,
qualités ou aptitudes du fabricant, des revendeurs, des promoteurs ou
des prestataires.
». L'article L. 121-6 du même code
dispose en outre que les infractions à ces dispositions sont punies des
peines prévues en cas de
tromperie
et mentionnées à
l'article L. 213-1
720(
*
)
, et que
le maximum de l'amende prévue à cet article peut être
porté à 50% des dépenses de la publicité
constituant le délit.
Votre commission vous propose l'insertion dans le code de la consommation
d'un nouvel article L. 311-4-1 précisant la nature de la
publicité mensongère ou tendancieuse portant sur le crédit
à la consommation.
Il est en effet manifeste que certaines
publicités tendent aujourd'hui à banaliser l'acte d'endettement
et à donner l'illusion de la gratuité, de la facilité et
de l'augmentation de pouvoir d'achat. Ce nouvel article reprendrait certaines
règles déontologiques formulées par le Bureau de
vérification de la publicité, et disposerait ainsi qu'est
interdite toute publicité pour un crédit, une ouverture de
crédit, un renouvellement de crédit ou une augmentation du
capital emprunté suggérant que :
-
le crédit peut être accordé sans condition ou
formalité
;
-
le crédit entraîne une augmentation de ressources ou accorde
une réserve automatique d'argent immédiatement disponible, sans
contrepartie financière identifiable
. La « réserve
d'argent » constitue en effet un argument fréquent de vente,
sans pour autant être toujours assorti d'une mention claire du
surcoût occasionné, de telle sorte qu'elle peut être
davantage perçue comme une simple avance de trésorerie que comme
un réel crédit à la consommation.
Les peines applicables en cas de manquement seraient celles prévues
à l'article L. 213-1 du code de la consommation pour tromperie, soit une
peine maximale alternative ou cumulative consistant en un emprisonnement de
deux ans et une amende de 37.500 euros. Votre commission vous propose
également que le juge civil puisse en outre être saisi en vue de
prononcer la
déchéance des intérêts
du
prêt contracté sur le fondement d'une publicité
mensongère ou tendancieuse. Cette sanction financière
constituerait une solution à la fois équitable et
opérationnelle, permettant aux deux parties de revenir à la
situation antérieure au prêt
721(
*
)
.
Décision de votre commission : votre commission vous demande
d'adopter cet article additionnel.