B. LES PROGRAMMES MAJEURS DE L'ARMÉE DE L'AIR : 2001, UNE ÉCHÉANCE CRUCIALE
La
baisse des crédits de paiement et des autorisations de programme
prévus pour l'année 2000, si elle entraîne le
décalage de certaines opérations du programme Mirage 2000 D,
notamment l'étude et la mise au point des logiciels de tir SCALP, APACHE
et AASM, ne remet pas en cause les objectifs calendaires.
En revanche, cette réduction réduit la marge de manoeuvre
actuelle et toute nouvelle insuffisance d'autorisation de programmes se
traduira par un recul de programmes. Il est à craindre que
l'année 2001 s'avère particulièrement tendue. C'est en
effet cette année là que doivent impérativement être
obtenues les autorisations de programme correspondant aux commandes globales du
Rafale (4,1 milliards de francs) et de l'ATF (au moins 15 milliards de francs).
•
Les grands programmes aéronautiques
Deux grands programmes aéronautiques, le Rafale et l'ATF, conditionnent
l'avenir de l'Armée de l'air. 1999 aurait dû être
l'année charnière marquant le départ vers le modèle
d'armée 2015, but fixé dès le début de l'action de
modernisation lancée en 1996. Ils auraient dû tous deux être
confortés par une commande pour le premier et par une décision
interalliée pour le second. Ces deux rendez-vous ont été
reportés. Le calendrier initial ne pourra cependant être tenu
qu'à la condition qu'aucun nouveau retard n'intervienne.
.
Le programme Rafale
L'un des enseignements du Kosovo aura été de confirmer
l'intérêt d'un appareil multirôle. En effet, les
opérations aériennes ont pris, au cours des différentes
étapes, des tours très différents. L'accent a
été mis à certains moments sur la
supériorité aérienne, à d'autres sur l'attaque
air-sol, à d'autres enfin sur la reconnaissance. Le fait de ne disposer
que d'appareils spécialisés dans chacune de ces fonctions
augmente de manière importante le nombre d'appareils
déployés, et complique largement le soutien nécessaire.
Le Rafale, avion de combat multirôle, apportera une excellente solution.
Non seulement un seul type d'appareil sera capable de remplir toutes les
missions, mais il suffira d'une patrouille en alerte en vol pour assurer,
à la fois, la défense aérienne et l'appui feu. Le Rafale
ne connaît aucune limitation due aux conditions
météorologiques, à l'environnement ou à l'altitude.
Plus efficace, plus souple d'emploi, doté d'une grande capacité
de survie en environnement hostile, le Rafale optimisera le rapport
coût/efficacité.
Les comparaisons faites entre le Rafale et ses principaux concurrents
confortent la valeur du programme. Les appareils américains
modernisés, F15E et F18E/F lui sont globalement inférieurs, en
particulier dans le domaine air-air. En ce qui concerne les appareils de
nouvelle génération, l'EF 2000 demeure inférieur au Rafale
en mission de défense aérienne et ne remplit pas la mission
air-sol. Si le F 22 et le JSF sont supérieurs à l'avion
français, il ne s'agit pour l'heure que de programmes en
développement ou en études, dont le prix devrait être
supérieur à celui du Rafale.
La deuxième tranche de commande globale de 12 Rafale Air a
été décalée de 2000 à 2001 en raison
d'autorisations de programme insuffisantes.
Ce décalage ne doit pas,
en principe, remettre en cause les dates de livraison et la date de mise en
service du premier escadron est toujours prévue pour fin 2005. Il n'y a
cependant désormais plus de marge de manoeuvre. Il demeure aussi
prévu que, dès leur mise en service, les avions seront tous au
standard F2, le standard F1, sans capacités air-sol, n'étant mis
en oeuvre -à titre provisoire- que par l'Aéronavale.
Les dépenses de développement s'élèvent à 57
milliards de francs (pour les trois premiers standards opérationnels),
l'industrie en prenant en charge 25 %. Le devis de production, pour 95 Rafale
C, 139 Rafale B et 60 Rafale Marine est légèrement
supérieur à 147,5 milliards de francs. l'Armée de l'air a
déjà consommé 24,75 milliards de francs pour le
développement et 11,32 milliards de francs pour la production. Pour
2000, on prévoit en AP 1,317 milliards de francs pour le
développement et 1,711 milliards de francs pour la production, les
chiffres en CP étant respectivement de 1,411 et 1,776 milliards de
francs.
Le tableau ci-dessous présente le coût unitaire des avions
prêts au vol, en fonction des différentes versions.
|
A la date du 23.12.92 |
Au 1 er octobre 1999 |
|
Rafale " Air " C |
270.0 MF CF 1/91 |
247.0 MF CF 1/91 |
291.5 MF CF 1/99 |
Rafale " Air " B |
283.1 MF CF 1/91 |
264.1 MF CF 1/91 |
311.6 MF CF 1/99 |
Rafale " Marine " |
284.5 MF CF 1/91 |
282.2 MF CF 1/91 |
333.1 MF CF 1/99 |
.
Le programme ATF
Le 29 janvier 1999, Airbus Military, Boeing, Lockheed et le consortium
russo-ukrainien MTA ont remis leurs offres pour les trois solutions à
l'étude concernant l'Avion de transport futur : A 400 M, C130J/C17,
AN7x. Ces trois propositions sont aujourd'hui à l'étude, la
décision sera prise en janvier 2000.
La première solution, celle du
A 400M d'Airbus Industrie
présente l'avantage, en termes de capacités militaires,
d'être purement européenne, et donc en cohérence avec
l'objectif d'une communauté d'équipements, dans le cadre d'une
capacité européenne de défense en construction. Sur un
plan plus technique, elle permettrait de disposer d'une flotte homogène
dont les caractéristiques opérationnelles répondent
exactement aux spécifications communes.
La proposition AN7x
, en coopération avec l'Ukraine et la Russie,
conduit aussi à une flotte homogène qui répond aux
spécifications opérationnelles. Elle nécessitera cependant
de nombreuses modifications de l'appareil initial pour le rendre conforme aux
standards occidentaux. Ainsi, le cockpit, conçu pour un équipage
de cinq hommes, doit être entièrement reconstruit avec une
avionique occidentale. Le plancher de soute doit être redessiné
ainsi que les portes pour assurer le largage de parachutistes. Enfin, le
soutien de cet appareil est encore mal défini et imposera la recherche
de solutions nouvelles.
La
proposition américaine
ne répond pas
complètement aux besoins. Elle repose sur une flotte de deux types
d'appareils, le C130J, qui serait limité aux missions de transport
tactique et le C17 qui offre des capacités logistiques
supérieures aux spécifications européennes. La
motorisation de ce dernier appareil (réacteur), de même que sa
taille, l'absence de capacité de ravitaillement en vol constitueraient
par ailleurs des handicaps importants.
Les deux premières solutions (A 400M et An7x) ont en commun de
nécessiter impérativement, dès l'an 2001, des
autorisations de programme très substantielles en volume (de 15 à
35 milliards de francs), la décision de dégager ces autorisations
de programmes constituant un message européen très concret,
surtout si la solution Airbus était retenue. L'achat " sur
étagère " du matériel d'origine américaine
pourrait se faire sans contraintes aussi fortes sur le plan financier. Une
telle option, outre l'affichage politique négatif qu'elle
entraînerait compte tenu de l'enjeu de politique européenne de
défense, ferait perdre les avantages en matière de prix
négociés dans le cadre d'une commande globale.
Toutes les offres ont été reçues le 29 janvier 1999, et
chaque état a analysé les seules propositions qui
l'intéressaient, selon la grille ci-dessous. On note les
différences d'intérêt et le choix faits par chaque pays. On
remarque aussi que seule la solution A400M a été
étudiée par tous les pays.
|
A400M |
C130J |
C17 |
An7x |
France |
x |
x |
x |
x |
Royaume-Uni |
x |
x |
x |
|
Espagne |
x |
x |
|
x |
Belgique |
x |
x |
|
|
Allemagne |
x |
|
|
x |
Italie |
x |
|
|
x |
Turquie |
x |
|
|
|
Quelle que soit la solution retenue, il semble nécessaire d'envisager un coût global de l'ordre de 35 milliards de francs, sachant qu'à ce jour seulement 85 millions de francs ont été consommés et qu'aucune dotation n'est prévue pour l'année 2000.
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Les moyens de commandement, de contrôle et de communications
L'importance des moyens de commandement, de contrôle et de
communications, le C, a de nouveau été démontrée au
Kosovo. L'Armée de l'air poursuit ses efforts sur trois axes majeurs,
qui lui donnent de meilleures capacités dans tous les domaines du C.
.
Le SCCOA
Le SCCOA, Système de Commandement et de Contrôle des
Opérations Aériennes, doit donner à l'Armée de
l'air des capacités de gestion globale des systèmes d'armes
aériennes qui soient aussi intéropérables avec les
systèmes alliés et compatibles avec les systèmes civils.
Le programme a été divisé en trois étapes et a
généré un flux moyen de financement de l'ordre de 700 MF
par an depuis son lancement en 1993. La première étape s'est
achevée en 1997 et la suivante devrait l'être en 2000, la
dernière phase s'étalant jusqu'en 2010.
Le SCCOA comprend des moyens de détection, de
télécommunications, de surveillance et contrôle. Ces moyens
sont reliés aux correspondants des bases aériennes
(Systèmes d'information et de communication SICOPS) et aux unités
aériennes (systèmes locaux de préparation et de
restitution de mission). Encore une fois, les opérations du Kosovo ont
démontré la validité de ce concept, à tel point
qu'il a fallu mettre en place d'un réseau de suivi des opérations
aériennes depuis Taverny. Le choix, fait depuis longtemps, de se doter
d'un centre de conduite des opérations aériennes projetable s'est
lui aussi trouvé validé
.
.
Les MTBA (Moyens de télécommunications des bases
aériennes)
Les besoins en communications fixes des sites Air n'ont cessé de
croître au cours des dernières années, et le besoin d'un
remplaçant au RA 70, qui serait aussi complémentaire avec le
réseau interarmées SOCRATE s'est fait sentir dès la fin
des années 80. Les premiers matériels sont arrivés en
1999. L'année 2000 sera marquée à la fois par la
première livraison d'importance de ces systèmes (5 fixes et trois
mobiles) et la passation d'une commande des 21 derniers ensembles fixes. Les
livraisons s'étaleront jusqu'en 2005, l'objectif final étant
d'équiper en 2006 les 39 plus importants des 101 sites Air et de
disposer de 6 systèmes déplaçables. 1,18 milliard de
francs de paiements ont été réalisés à la
fin de 1999, et le budget 2000 prévoit 502 millions de francs de
crédits de paiement.
.
Valorisation du système de détection et de
contrôle aéroporté (SDCA)
La valorisation du système de détection et de contrôle
aéroporté est rendue nécessaire par l'ancienneté de
la conception du SDCA et pour garantir sa complète
interopérabilité avec les AWACS de l'OTAN. Elle comporte deux
phases. La première, dite ESM (Electronic Support Measures), tend
à augmenter les capacités d'identification par mode de
détection discret. La durée des chantiers est de 6 mois. Cette
phase s'achèvera à la fin de l'année 2000, par la
livraison du dernier des 4 avions rééquipés.
La phase suivante, dite RSIP (Radar system improvement program), vise à
améliorer la sensibilité de la détection radar et sera
mise à profit pour remettre à jour les consoles de commandement.
Le coût total de cette opération qui devrait commencer en 2002,
sera de 1835 MF, dont 100 MF de CP en 2000.
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Le programme Mirage 2000
En l'an 2000, il y aura 380 avions de combat en dotation dans l'Armée de
l'air, dont 230, soit 60 %, seront des Mirage 2000. Ce taux devrait demeurer
supérieur à 50% jusqu'en 2015, la flotte n'étant plus
alors composée, dès 2012, que des Mirage 2000 et des Rafale.
.
Une flotte homogène et modernisée
A cette date, les 230 Mirage 2000 en dotation se répartiront en 30
Mirage 2000-5 (défense aérienne) , 80 Mirage 2000 C ou B
(défense aérienne), 60 Mirage D (attaque au sol) et 60 Mirage
2000 N (composante nucléaire aéroportée).
Une importante opération de modernisation se terminera l'an prochain par
la livraison des 3 derniers Mirage 2000-5. Ces appareils sont des Mirage 2000 C
modernisés. L'opération a été conduite de pair avec
une autre modification, qui a permis de porter l'ensemble de la flotte Mirage
2000 B et C au standard RDI, du nom du radar qui l'équipe. Ce radar,
moderne et performant, est capable de détecter les menaces, quelle que
soit leur altitude, capacité dont l'absence pénalisait lourdement
les appareils équipés du standard précédent, le
RDM. Quant au Mirage 2000-5, basé sur une version exportation de
l'appareil, il dispose d'un radar encore plus performant, doté de
capacités multicibles, d'une avionique nouvelle et de la capacité
d'emport du missile MICA de nouvelle génération. La flotte de
Mirage 2000 de défense aérienne est ainsi durablement
modernisée. Près de 4 milliards de francs ont déjà
été consommés pour l'ensemble de ce programme, et 289
millions de francs de CP sont prévus pour le budget 2000.
De son côté, le Mirage 2000 D est le premier appareil en service
dans l'Armée de l'air à être doté de
capacités de pénétration et d'attaque tout temps. Il a en
particulier démontré au Kosovo sa capacité à tirer
en " aveugle " des armements non guidés avec une
précision suffisante pour prévenir les dommages
collatéraux. 12 nouveaux Mirage 2000 D seront livrés en 2000, ce
qui portera le nombre d'appareils livrés à 81 (la commande
initiale de 90 appareils ayant été ramenée à 86).
Le coût total de ce programme est évalué à 28,35
milliards de francs, dont 22,65 ont déjà été
consommés fin 99, 958 millions de francs étant prévus en
CP pour le budget 2000.
|
Avant 2000 |
2000 |
2001 |
Total |
Livraisons |
69 |
12 |
5 |
86 |
.
Des matériels parfaitement intégrés dans les
capacités interalliées
Un autre de enseignements du Kosovo aura été la capacité
des matériels aériens français à s'intégrer
dans les dispositifs interalliés, où leur
interopérabilité n'a pas été mise en défaut.
Capables de se ravitailler sur tous les avions de l'OTAN, les Mirage 2000
disposent aussi d'un équipement IFF (identification ami/ennemi)
parfaitement compatible et de communications sécurisées. A la
demande des Etats-Unis, et pour écarter tout risque de tirs fratricides,
12 Mirage 2000 de défense aérienne ont été
équipés, pour un coût raisonnable (16 MF) et sans
difficultés techniques particulières, de systèmes NCTR
(non cooperative target recognition), permettant de recouper les informations
données par l'IFF.
Sur le plan des capacités avérées, celle du Mirage 2000 D
à effectuer des tirs de haute précision par tous les temps et
avec tous les types de munitions, y compris non guidées, le classe parmi
les meilleurs appareils d'attaque au sol en service actuellement. Les
possibilités du Mirage 2000 de défense aérienne sont
légalement reconnues, même si l'on peut regretter que la mise en
service du Mirage 2000-5 F, qui n'interviendra qu'à la fin de
l'année 1999, soit intervenue trop tard pour permettre son utilisation
au Kosovo.