N° 140
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2006-2007
Annexe au procès-verbal de la séance du 20 décembre 2006 |
PROPOSITION DE LOI
portant création d'un établissement public de gestion des équipements publics du quartier d'affaires dit de « La Défense » ,
PRÉSENTÉE
Par M. Roger KAROUTCHI,
Sénateur.
(Renvoyée à la commission des Affaires économiques, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).
Établissements publics. |
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
En 1958, l'État a créé l'Établissement public pour l'aménagement de la région de La Défense (EPAD) pour conduire la plus grande opération d'urbanisme du siècle, sur un périmètre de 160 hectares. L'espace qui entourait alors le CNIT tout juste inauguré mêlait les activités industrielles et maraîchères à un habitat vétuste marqué par les bidonvilles. Presque 50 ans après, La Défense est le premier quartier d'affaires européen, avec 1 500 sièges sociaux, plus de 3 millions de m² de bureaux où travaillent chaque jour quelque 170 000 salariés, ainsi que 600 000 m² de logements, 20 000 habitants et 200 000 m² de commerces.
Cette réussite exceptionnelle est cependant fragilisée. Sur 71 tours, 31 offrent des plateaux de moins de 1 200 m², ce qui ne correspond plus aux standards de la demande actuelle. 20 immeubles ont une surface utile inférieure à 40 000 m², ce qui génère des surcoûts de charge, un immeuble sur 6 a été construit avant 1985 et n'a pas été réhabilité depuis lors. En particulier, 17 tours, totalisant environ 650 000 m², soit 20 % du parc, sont aujourd'hui potentiellement « hors marché ».
Le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, et le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire ont donc annoncé, le 25 juillet 2006, un ambitieux plan de relance du quartier d'affaires de La Défense.
Ce plan de relance repose sur trois éléments.
En premier lieu, il vise à faciliter la régénération des tours anciennes qui ne sont plus aux standards internationaux et dont l'obsolescence pourrait affecter l'ensemble du marché immobilier de La Défense. Les opérations de démolition-reconstruction à l'intérieur du périmètre de La Défense seront donc exonérées d'agrément dans la limite d'une extension de leur surface de 40 000 m² ou de 50 % de la superficie de la tour initiale. Ces opérations seront également exonérées de la redevance sur les bureaux, à concurrence de la surface initiale ; cette disposition figure dans le projet de loi de finances rectificative pour 2006 présenté par le Gouvernement.
En second lieu, les ministres ont annoncé leur décision d'autoriser la construction de tours neuves à hauteur de 300 000 m² SHON sur la période 2007-2013.
Enfin, la gouvernance d'ensemble du périmètre de l'opération d'intérêt national de La Défense doit être rénovée, afin de séparer les fonctions d'aménagement et de développement des fonctions de gestion. Le développement de La Défense continuera d'être animé par l'EPAD, tandis que les fonctions de gestion du quartier et de ses équipements publics seront confiées à une structure ad hoc , à laquelle participeront les collectivités locales concernées, de manière à préserver une gestion unifiée du site de La Défense.
Dans cette perspective, la présente proposition de loi répond à deux objectifs.
En premier lieu, elle propose de créer, sous forme d'un établissement public local à caractère industriel et commercial, une structure regroupant les communes de Puteaux et Courbevoie ainsi que le Département des Hauts-de-Seine.
L'établissement public ainsi créé aura pour mission de gérer les ouvrages et espaces publics et les services d'intérêt général lui appartenant, ainsi que ceux appartenant à l'EPAD ou appartenant aux collectivités ou à l'État, situés sur le périmètre de l'opération d'intérêt national (OIN).
Les équipements appartenant au domaine public de l'EPAD pourront être transférés au nouvel établissement, soit en pleine propriété, soit sous le régime de la mise à disposition, par convention entre les deux établissements ; afin de ne pas bloquer de nouvelles opérations d'aménagement, ces transferts seront réversibles.
Les ressources de l'établissement seront principalement constituées des revenus des concessions, et des concours financiers des collectivités membres.
Enfin, dans le cas où les communes de Puteaux et Courbevoie souhaiteraient se regrouper au sein d'un EPCI, celui-ci pourrait se substituer aux communes au sein de l'établissement public.
En second lieu, la présente proposition de loi vise à clarifier et à sécuriser les règles d'urbanisme applicables dans le périmètre de l'OIN.
À cette fin, elle donne une portée législative à la qualification d'intérêt national du plan de modernisation de La Défense. Un décret pris en Conseil d'État permettra d'en arrêter les orientations générales et de préciser les règles d'urbanismes applicables, et ce jusqu'à l'approbation d'un plan local d'urbanisme, sur les parties du territoire du quartier de La Défense qui ne sont pas couvertes par un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu. Enfin, elle autorise le préfet à qualifier de projet d'intérêt général les constructions, travaux, installations et aménagements nécessaires à la mise en oeuvre du plan de modernisation et de développement du quartier de La Défense.
PROPOSITION DE LOI
Chapitre I er
Dispositions relatives à l'établissement
public de gestion
du quartier d'affaires de La Défense
Article 1
Il est créé un établissement public local à caractère industriel et commercial, dénommé Établissement public de gestion du quartier d'affaires de La Défense.
Article 2
Cet établissement public est habilité, sur le périmètre de l'opération d'intérêt national concernée, à gérer les ouvrages et espaces publics ainsi que les services d'intérêt général du quartier d'affaires de « La Défense » :
- lui appartenant,
- appartenant à l'établissement public d'aménagement de la région dite de « La Défense »,
- appartenant aux collectivités territoriales concernées ou à l'État, dès lors qu'ils en font la demande.
Il assure également la mise en valeur et l'animation du site par toute initiative appropriée. Il entreprend toute réalisation en rapport avec son objet, qu'il s'agisse d'améliorer la qualité de vie du quartier d'affaires ou de garantir le niveau des prestations bénéficiant à ses usagers ou à ses habitants.
Il exerce cette compétence dans le respect du pouvoir de police des maires des communes concernées.
Article 3
Pour l'exercice de sa mission, les ouvrages visés à l'article 2 sont, soit mis à disposition, soit transférés en pleine propriété à l'établissement public de gestion du quartier d'affaires de « La Défense » par l'établissement public d'aménagement de la région dite de « La Défense » ou les collectivités territoriales concernées.
Pour l'exercice de la mission de l'établissement public d'aménagement de la région dite de « La Défense », les ouvrages visés à l'article 2 appartenant ou mis à la disposition de l'établissement public de gestion du quartier d'affaires de La Défense peuvent être remis à la disposition de l'établissement public d'aménagement de la région dite de « La Défense ». Lorsque la mise en oeuvre de ces dispositions affecte les ressources de l'établissement public de gestion, une compensation financière est instituée. Les modalités de ces mises à disposition sont fixées par décret en Conseil d'État.
Le transfert ou la cession des biens est constaté par un procès verbal établi entre l'établissement public de gestion du quartier d'affaires de La Défense et l'établissement public d'aménagement de la région dite de « La Défense », l'État ou les collectivités territoriales. Les modalités d'établissement et le contenu de ce procès-verbal sont fixés par décret en Conseil d'État.
Article 4
L'ensemble des transferts prévus ci-dessus est réalisé à titre gratuit et ne donne lieu à aucun versement ou honoraires, ni à aucune indemnité ou perception de droit ou taxe.
L'établissement public bénéficiaire de la mise à disposition assume l'ensemble des obligations du propriétaire. Il possède tous pouvoirs de gestion définis à l'article L. 1321-2 du code général des collectivités territoriales.
Un décret en Conseil d'État précise les modalités d'application de ces dispositions.
Article 5
L'établissement public est administré par un conseil d'administration composé des représentants des communes de Courbevoie et de Puteaux et du département des Hauts-de-Seine.
Le Conseil général des Hauts-de-Seine dispose de la majorité des sièges. Les autres sièges sont répartis à parts égales entre les communes de Courbevoie et de Puteaux.
Le Conseil d'administration élit son président en son sein.
Le conseil d'administration règle par ses délibérations les affaires de l'établissement. À cet effet, notamment :
- il détermine l'orientation de la politique à suivre ;
- il vote l'état prévisionnel des dépenses et des recettes, autorise les emprunts, approuve les comptes et se prononce sur l'affectation du résultat ;
- il nomme le directeur sur proposition du président et met fin à ses fonctions dans les mêmes conditions.
En cas de création d'un EPCI à fiscalité propre, comprenant les communes de Courbevoie et de Puteaux, compétent en matière « d'aménagement de l'espace communautaire », cet établissement peut être autorisé par délibérations concordantes du conseil communautaire et des conseils municipaux des deux communes, à siéger en lieu et place de ces deux communes au sein du conseil d'administration de l'établissement public de gestion du quartier d'affaires de La Défense.
Les statuts de l'établissement sont fixés et modifiés par décret en Conseil d'État après avis du département des Hauts-de-Seine et des communes de Puteaux et de Courbevoie. Cet avis est réputé donné, à défaut de réponse, dans un délai de deux mois à compter de la saisine.
Article 6
Les charges résultant pour les collectivités publiques de l'exercice des compétences visées à l'article 2 de la présente loi sont à répartir entre ses membres dans les conditions fixées par les statuts de l'établissement public. Ces contributions ont un caractère obligatoire.
Une majorité qualifiée des deux tiers des membres présents ou représentés est requise pour fixer et modifier la répartition de ces contributions entre eux.
Article 7
Le directeur est ordonnateur des dépenses et des recettes. Il représente l'établissement en justice et dans tous les actes de la vie civile. Il passe des contrats et signe tous les actes pris au nom de l'établissement. Il prépare et exécute les décisions de l'assemblée générale et du conseil d'administration. Il recrute le personnel et a autorité sur lui. Il peut déléguer sa signature.
Article 8
Les ressources de l'établissement public comprennent notamment :
1- Les concours financiers des collectivités territoriales membres de l'établissement public ;
2- Les produits du domaine dont il assure la gestion ou qu'il a reçus en propriété ;
3- Les sommes perçues en contrepartie de services rendus ;
4- Le produit des dons et legs ;
5- Les versements au titre du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée ;
6- Les subventions de l'Europe, de l'État, d'établissements publics, des collectivités territoriales et de leurs groupements ;
7- Le produit des emprunts qu'il est autorisé à contracter ;
8- Les produits de cession du domaine dont il est propriétaire .
Article 9
Le contrôle de légalité et le contrôle budgétaire des actes et délibérations de l'établissement public sont exercés par le préfet des Hauts-de-Seine dans les conditions prévues par le code général des collectivités territoriales.
Le comptable de l'établissement public est un comptable public nommé par le préfet des Hauts-de-Seine.
Chapitre II
Dispositions relatives aux règles d'urbanisme
applicables
dans le périmètre de l'opération
d'intérêt national de La Défense
Article 10
La modernisation et le développement du quartier d'affaires de La Défense, dans le département des Hauts-de-Seine, présente un caractère d'intérêt national.
Un décret en Conseil d'État arrête les orientations générales du plan de modernisation et de développement prévu à l'alinéa précédent.
Les constructions, travaux, installations et aménagements nécessaires à la mise en oeuvre du plan de modernisation et de développement du quartier de La Défense peuvent être qualifiés par l'autorité administrative de projets d'intérêt général, au sens de l'article L. 121-9 du code de l'urbanisme, dans les conditions définies par le décret en Conseil d'État pris pour l'application de cet article.
Article 11
Pour permettre la mise en oeuvre du plan de modernisation et de développement prévu à l'article 10, un décret en Conseil d'État, pris sur le fondement de l'article L. 111-1 du code de l'urbanisme, précise les règles d'urbanisme applicables, jusqu'à l'approbation d'un plan local d'urbanisme, sur les parties du territoire du quartier de La Défense qui ne sont pas couvertes par un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu.
Article 12
Jusqu'au 1 er janvier 2014, les dépendances du domaine public routier de l'État situées à l'intérieur du périmètre du quartier de La Défense et nécessaires à la mise en oeuvre du plan de modernisation et de développement prévu à l'article premier, sont apportées à titre gratuit à l'établissement public pour l'aménagement de la région dite de « La Défense », lorsqu'elles font l'objet d'un déclassement, à l'exception de celles qui ont vocation à être utilisées par un service de l'État, dont la liste et les affectataires sont fixés par un décret en Conseil d'État . L'apport est réalisé par l'acte administratif constatant le déclassement.
Article 13
Les pertes de recettes pour l'État résultant des articles ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.