Rétention d'une personne dont la conduite violente apparaît manifestement dangereuse

N° 418

SÉNAT


SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2002-2003

Annexe au procès-verbal de la séance du 23 juillet 2003

PROPOSITION DE LOI

tendant à autoriser la rétention d'une personne dont la conduite violente apparaît manifestement dangereuse ,

PRÉSENTÉE

Par M. Claude BIWER,

Sénateur.

(Renvoyée à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).

Procédure pénale.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le titre IV du livre III de la troisième partie du code de la santé publique, intitulée « Lutte contre les maladies et les dépendances », est notamment consacré à la répression de l'ivresse publique. Son article L. 3341-1, en particulier, prévoit une procédure de rétention policière applicable à toute personne trouvée en état d'ivresse dans un lieu public, qui est alors conduite, par mesure de police, dans une chambre de sûreté, « pour y être retenue jusqu'à ce qu'elle ait recouvré la raison ».

Cette procédure ne peut intervenir qu'après qu'un médecin ait remis aux autorités un bulletin ou certificat de non-admission à l'hôpital, ce document ayant pour but de déclarer si l'état médical de l'individu permet sa remise aux forces de l'ordre ou, au contraire, nécessite une hospitalisation. En pratique, la majorité des certificats délivrés autorise la rétention par les forces de l'ordre.

Les individus retenus en cellule de dégrisement, pour cause d'ivresse manifeste constatée dans un lieu public, ne peuvent demander à bénéficier d'un examen médical, ce droit étant accordé aux seules personnes placées en garde à vue, conformément à l'article 63-3 du code de procédure pénale et à la jurisprudence de la Cour de cassation.

Il convient d'insister sur le fait que, dans l'état actuel du droit, un individu ne peut être retenu par les forces de l'ordre qu'au titre, soit de son état d'ivresse publique et manifeste, soit d'une garde à vue. La rétention n'est donc pas légalement justifiée si l'état d'ivresse n'est pas caractérisé, ni la garde à vue ordonnée.

Or, cette situation pose indéniablement un problème. En effet, elle met en évidence un vide juridique dans les cas où une personne présenterait un comportement violent sans être, néanmoins, ivre ou considérée comme tel et que le recours à la garde à vue n'est pas possible.

Il convient donc de prévoir une nouvelle procédure de rétention, en l'absence d'infraction ou de tentative d'infraction, destinée à prévenir un danger.

Cette nouvelle procédure de rétention serait, néanmoins, entourée de garanties procédurales, afin de respecter les exigences constitutionnelles existant en matière de liberté individuelle, dont la protection est confiée à l'autorité judiciaire par l'article 66 de la Constitution de 1958.

Dès lors, le dispositif proposé s'inspire fortement des dispositions de l'article 63 du code de procédure pénale qui fixe les conditions de la garde à vue. Il prévoit ainsi :

- de tenir informé le Procureur de la République, dès le début de la procédure, de la rétention décidée par l'autorité de police judiciaire ;

- de fixer un délai maximal pour la durée de cette rétention, soit six heures, c'est-à-dire la même durée que celle nécessaire à un individu retenu pour ivresse manifeste constatée dans un lieu public au titre de l'article L. 3341-1 du code de la santé publique pour recouvrer la raison ;

- de conditionner l'éventuel prolongement de la durée de rétention de six heures à une autorisation écrite du Procureur de la République qui peut, par ailleurs, subordonner cette autorisation à l'examen préalable, par un médecin désigné par lui, de la personne ainsi retenue.

Tel est l'objet de la proposition de loi que nous vous prions de bien vouloir adopter.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

Au chapitre I er du titre II du livre 1 er du code de procédure pénale, il est inséré, avant l'article 63-1, un article 63-1 A ainsi rédigé :

« Art. 63-1 A - L'officier de police judiciaire peut retenir, dans une chambre de sûreté, toute personne dont la conduite violente apparaît manifestement dangereuse pour des tiers, jusqu'à ce qu'elle ait recouvré son calme. Il en informe immédiatement le Procureur de la République.

« La personne ainsi retenue ne peut l'être plus de six heures. Toutefois, la retenue peut être prolongée pour un nouveau délai de six heures au plus, sur autorisation écrite du Procureur de la République. Celui-ci peut subordonner cette autorisation à l'examen préalable, par un médecin désigné par lui, de la personne ainsi retenue ».

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