NOTE DE SYNTHÈSE
La
perspective d'une éventuelle révision de la loi n° 70-9
du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice des
activités relatives à certaines opérations portant sur les
immeubles et les fonds de commerce, dite loi Hoguet, conduit à
s'interroger sur les modalités d'exercice des activités de
transaction immobilière dans les pays voisins.
En France, les activités de transaction immobilière ne sont pas
exercées par une seule catégorie de professionnels. Outre les
agents immobiliers, qui agissent dans le cadre de la loi Hoguet, les notaires
peuvent également réaliser de telles opérations, dans la
mesure où ils le font à «
titre
accessoire
», le caractère accessoire de l'activité
de transaction étant établi lorsque le notaire procède
à la vente.
Pour chacun des pays étudiés, l'Allemagne, la Belgique, le
Danemark, l'Espagne, les Pays-Bas, le Portugal, le Royaume-Uni et la
Suède, il est donc apparu nécessaire de recenser les
différentes professions susceptibles d'avoir des activités de
transaction immobilière, avant d'analyser les principales règles
applicables aux agents immobiliers.
L'examen des dispositions étrangères permet de mettre en
évidence la grande disparité des situations nationales :
- en Allemagne, en Belgique, au Danemark, au Portugal et en
Suède, des règles normatives plus ou moins contraignantes
encadrent les activités de transaction immobilière ;
- dans les autres pays, l'exercice des activités de transaction
immobilière étant libre, la profession est conduite à
s'organiser.
1) En Allemagne, en Belgique, au Danemark, au Portugal et en Suède, des
règles normatives plus ou moins contraignantes encadrent l'exercice des
activités de transaction immobilière
a) Des textes spécifiques régissent la profession
En Allemagne, un texte réglementaire de 1974 définit les
obligations qui pèsent sur les professions - parmi lesquelles celle
d'agent immobilier - qui, d'après l'ordonnance sur les
métiers, ont besoin d'une autorisation.
En Belgique, l'arrêté royal du 6 septembre 1993 protège le
titre professionnel et l'exercice de la profession d'agent immobilier.
Au Danemark, la loi de 1993 sur les transactions immobilières comporte
des dispositions propres aux agents immobiliers.
Au Portugal et en Suède, la profession est régie par des textes
spécifiques : un décret-loi de 1999 pour le premier pays
cité et une loi de 1995 pour le second.
b) L'autorisation d'exercice est subordonnée à plusieurs
conditions
En Allemagne, en Belgique, au Danemark, au Portugal et en Suède,
l'accès à la profession requiert une autorisation. Celle-ci est
délivrée par l'administration,
sauf en Belgique, où
elle est accordée par l'ordre professionnel des agents immobiliers.
Dans aucun de ces cinq pays, l'autorisation ne peut être accordée
si le demandeur ne remplit pas des conditions générales de
moralité et de situation patrimoniale.
En outre, sauf en Allemagne, les textes en vigueur exigent un niveau minimal de
formation : l'autorisation suppose que l'intéressé ait suivi
une
formation
générale de
niveau
supérieur (Belgique et Suède) ou une formation
spécifique (Danemark et Portugal). Ils exigent aussi qu'il justifie
d'une
expérience professionnelle préalable
(un an en
Belgique, deux au Danemark, trois au Portugal) ou d'un stage pratique (dix
semaines en Suède).
Ces cinq pays imposent également aux agents immobiliers de s'assurer
contre les risques professionnels.
En Allemagne et en Suède, un
dispositif unique couvre l'ensemble de ces risques. En revanche, la Belgique,
le Danemark et le Portugal exigent des agents immobiliers à la fois la
présentation d'une garantie financière, qui est destinée
à permettre le remboursement aux clients des créances ou des
versements de fonds réalisés à l'occasion d'une
opération effectuée par le mandataire dans le cadre de son
activité de transaction, et la souscription d'une assurance en
responsabilité civile, qui permet de couvrir les dommages nés
d'une erreur ou d'une négligence commise dans le cadre professionnel.
L'autorisation d'exercice obtenue par les professionnels qui remplissent toutes
les conditions est en principe permanente. Seul le Portugal délivre des
autorisations valables seulement trois ans, chaque renouvellement étant
subordonné à la vérification que les conditions d'exercice
continuent à être remplies.
c) Les activités de transaction immobilière sont
contrôlées
Même lorsqu'elles sont permanentes, les autorisations d'exercice peuvent
être suspendues, voire supprimées, à la suite d'un
contrôle.
En Belgique, au Danemark, au Portugal et en Suède, ce
contrôle
est organisé par l'entité qui octroie les
autorisations d'exercice. Il est de nature plutôt disciplinaire en
Belgique, tandis que dans les trois autres pays, il est d'ordre administratif,
les autorités de contrôle disposant d'un large pouvoir
d'inspection sur pièces et sur place.
En Allemagne, les agents immobiliers ont l'obligation de faire vérifier
chaque année par un
commissaire aux comptes
qu'ils respectent les
obligations que la réglementation de la profession leur impose. Le
rapport du commissaire aux comptes est transmis à l'administration,
celle-ci pouvant en cas de besoin faire intervenir un commissaire aux comptes
entre deux contrôles annuels normaux.
*
L'existence de dispositions législatives et réglementaires n'exclut pas d'importants efforts des professionnels pour encadrer l'exercice des activités de transaction immobilière. C'est notamment le cas en Allemagne, où les organisations professionnelles prennent en charge la formation, et en Suède, où la principale association professionnelle a créé un label, attribué aux agents qui présentent le plus de garanties.
*
2) En
Espagne, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni, l'exercice des activités de
transaction immobilière étant libre, la profession est conduite
à s'organiser
a) Aux Pays-Bas et au Royaume-Uni, la profession s'est organisée
Dans ces deux pays, l'exercice des activités de transaction
immobilière est libre et toute personne peut donc se prévaloir du
titre d'agent immobilier.
Cette situation est récente aux Pays-Bas, puisqu'elle remonte au
1
er
mars 2001, date de l'abrogation, d'une part, de l'article du
code pénal protégeant le titre de
« courtier » et, d'autre part, de l'article du code de
commerce relatif à la prestation de serment des courtiers. Elle est plus
ancienne au Royaume-Uni, où, par ailleurs, la
loi de 1979 relative
aux agents immobiliers
comporte quelques dispositions d'organisation de la
profession.
En contrepartie de la quasi-absence de dispositions normatives,
les
groupements professionnels anglais et néerlandais ont adopté
leurs propres règles
.
Ainsi, ils
assurent la
formation
des agents
immobiliers
dans leurs propres
établissements
et
selon des programmes qu'ils
définissent. Ils édictent des
codes de bonne conduite
,
que
leurs adhérents sont tenus de respecter et qui constituent
des garanties pour les clients. Aux Pays-Bas, ils imposent à leurs
membres la souscription d'une assurance en responsabilité civile
professionnelle, tandis que, au Royaume-Uni, la principale association
professionnelle exige de ses sociétaires qu'ils adhèrent au
système de garantie financière qu'elle a mis en place.
Aux Pays-Bas, les groupements professionnels assurent même le
contrôle de la profession : les inscriptions sur leurs fichiers ne
sont valables que pendant cinq ans et le renouvellement est subordonné
à la vérification des compétences des
intéressés, qui ont l'obligation de suivre des stages de
formation continue.
En revanche, au Royaume-Uni, le contrôle de la profession a
été confié par la loi confie à l'administration
chargée de la concurrence et de la protection des consommateurs : pour
cela, ses agents disposent d'un large pouvoir de contrôle sur
pièces et sur place.
b) L'Espagne connaît actuellement une situation de transition
En Espagne, la profession est régie par un
décret de 1969
.
Ce texte prévoit que les agents immobiliers qui répondent
à tous les critères requis (bonne moralité,
réussite à l'examen national, versement d'une caution...)
adhèrent à des
collèges
professionnels
provinciaux
chargés du contrôle de la profession.
Cependant, un décret-loi entré en vigueur le 25 juin 2000
a abrogé l'article premier du décret de 1969, qui
réservait les activités de courtage immobilier aux agents
immobiliers diplômés et inscrits dans un collège.
Depuis juin 2000, l'accès à la profession d'agent immobilier
est donc libre.
Ce texte a donc confirmé la décision prise en 1993 par le
Tribunal constitutionnel, qui avait alors estimé que l'infraction
d'exercice illégal d'une profession, prévue par le code
pénal, ne pouvait pas s'appliquer aux agents immobiliers.
La profession se trouve actuellement dans une situation de transition. En
effet, l'organisation antérieure au décret-loi de juin 2000 n'a
pas été remise en cause, de sorte que les anciens agents
immobiliers continuent à exercer leur activité dans le respect
des règles fixées par le décret de 1969. Toutefois, depuis
l'entrée en vigueur du décret-loi de juin 2000, le
ministère chargé du logement n'organise plus l'examen national
prévu par le décret de 1969 qui ouvrait la voie à la
profession. Les collèges professionnels ont donc mis au point, en
collaboration avec les universités, des formations spécifiques.
Cette démarche peut être considérée comme un premier
signe de l'autodiscipline de la profession.
*
Les activités de transaction immobilière fournissent un bon exemple des différentes méthodes permettant de réglementer une profession : dispositions législatives et réglementaires avec création soit de structures administratives ad hoc soit d'un ordre professionnel, ou autodiscipline avec élaboration de codes de bonne conduite, rédaction de manuels de bonnes pratiques, création de labels, de diplômes, de procédures de certification...