Le mardi 5 mars 2024, le Sénat a accueilli M. David Gum AWNG, opposant à la junte militaire birmane et membre du gouvernement d'unité nationale en exil, au titre du Programme d'invitation des personnalités d'avenir du ministère de l'Europe et des affaires étrangères.

M. AWNG s'est entretenu avec Mme Laure DARCOS, Présidente déléguée pour la Birmanie du groupe d'amitié France-Asie du Sud-Est. Cette dernière s'est enquise de l'état de santé de Aung San SUU KYI, désormais emprisonnée depuis le coup d’État militaire du 1er février 2021. Les informations sur sa situation sont très parcellaires, tant il est difficile de l'approcher en prison ; seul son fils a pu avoir un contact avec elle, et un ancien ministre thaïlandais l'aurait récemment rencontrée. Une lettre rédigée de sa main est la seule preuve de vie récente.

Le gouvernement d'unité nationale (NUG) en exil, dont M. AWNG, qui vit en Thaïlande, est ministre délégué à la coopération internationale, s'est donné deux principales tâches : préparer l'avenir de la Birmanie une fois la démocratie rétablie, et gérer l'aide humanitaire destinée à la population civile birmane dans un contexte marqué par la dictature militaire et la guerre civile. Mme DARCOS a rappelé que le Sénat avait adopté, le 5 octobre 2021, une résolution, sur le fondement de l’article 34-1 de la Constitution, portant sur la nécessité de reconnaître le NUG birman. Selon le Programme alimentaire mondial des Nations Unies, 2 millions de Birmans seraient en état de grande détresse et plus de la moitié de la population vivrait en-dessous du seuil de pauvreté, la situation allant empirer.

La loi sur la conscription militaire récemment adoptée par la junte a provoqué une nouvelle vague de migrations, notamment vers la Thaïlande, où les réfugiés birmans ne sont pas très bien accueillis. Le NUG tente de convaincre les pays de l'ASEAN de respecter le principe du droit international de non refoulement des réfugiés.   

Si, à l'époque du gouvernement démocratique, l'essentiel de l'aide humanitaire et des investissements dans les infrastructures routières et portuaires provenaient du Japon, les investissements chinois sont aujourd'hui les plus importants dans le pays. Le quasi-monopole de la junte sur la vie économique et le haut niveau de corruption rendent extrêmement difficile la vie des affaires pour les entreprises occidentales.

Par ailleurs, la rébellion armée des nombreux groupes ethniques composant la population birmane gagne du terrain : 45% du territoire est désormais sous son contrôle, en général les zones périphériques du pays. Le NUG a le projet d'instituer un véritable système fédéral accordant une importante autonomie aux groupes ethniques. Il a d'ailleurs établi une charte de la démocratie fédérale, endossée par de nombreux groupes de résistance ethniques. Les relations sont traditionnellement difficiles entre les groupes ethniques, mais le coup d’État les a soudés contre la junte militaire. Celle-ci s'est pour l'instant montrée incapable de regagner le terrain conquis par la rébellion. Par ailleurs, la Force de défense du peuple, qui constitue la branche armée du NUG, continue de se battre contre la junte dans les plaines centrales du pays. Le NUG a adopté une Constitution transitoire qu'il souhaite appliquer après la défaite des militaires, et qui prévoit de donner la parole aux différents groupes ethniques birmans, aucun d'eux n'ayant exprimé de volonté sécessionniste.

Pour terminer, M. AWNG a visité le Palais du Luxembourg.

Xavier DUPRIEZ – Tél : 01.42.34.32.06 – Courriel : x.dupriez@senat.fr