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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Prorogation de l'état d'urgence sanitaire (Procédure accélérée - Suite)

Mise au point au sujet d'un vote

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 2 (Suite)

ARTICLES ADDITIONNELS

M. Patrick Kanner

ARTICLE 3

ARTICLE 3 BIS

ARTICLE 4

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE 5

Mme Esther Benbassa

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE 6

M. Philippe Bas, président de la commission des lois, rapporteur

Mme Catherine Morin-Desailly

M. Pierre Ouzoulias

Mme Esther Benbassa

M. Julien Bargeton

M. Loïc Hervé

M. Philippe Bonnecarrère

M. Bruno Retailleau

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

Modification de l'ordre du jour

Prorogation de l'état d'urgence sanitaire (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 6 (Suite)

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE 7

M. Jean-Pierre Sueur

Interventions sur l'ensemble

M. Patrick Kanner

M. Max Brisson

Mme Éliane Assassi

M. Philippe Bonnecarrère

Mme Véronique Guillotin

M. Julien Bargeton

M. Dany Wattebled

M. Stéphane Ravier

M. Olivier Véran, ministre

Annexes

Ordre du jour du mercredi 6 mai 2020

Analyse des scrutins




SÉANCE

du mardi 5 mai 2020

78e séance de la session ordinaire 2019-2020

présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires : M. Éric Bocquet, M. Dominique de Legge.

La séance est ouverte à 14 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Prorogation de l'état d'urgence sanitaire (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions (procédure accélérée).

Notre séance se déroule dans les conditions de respect des règles sanitaires mises en place depuis le mois de mars.

Afin de limiter la circulation de documents, vous êtes invités à utiliser vos tablettes et la fonctionnalité « en séance » sur notre site Internet pour prendre connaissance du dérouleur et des amendements.

Mise au point au sujet d'un vote

M. Alain Richard.  - Je souhaite préciser que, sur le scrutin n°101, Frédéric Marchand et Georges Patient veulent voter contre tandis que Bernard Cazeau et Arnaud de Belenet s'abstiennent.

M. le président.  - Acte vous est donné de cette mise au point. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l'analyse politique du scrutin.

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 2 (Suite)

M. le président.  - Amendement n°112, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 12

Après les mots :

les lieux d'hébergement

insérer le mot :

adapté

M. Jean-Pierre Sueur.  - Cet amendement précise que les lieux d'hébergement pour la mise à l'isolement sont adaptés. Il y a là une avancée idéologique qui n'échappera à personne. (Sourires)

M. Philippe Bas, président de la commission des lois, rapporteur.  - Avis favorable, avec une particulière sympathie.

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé.  - Même avis. (On s'en félicite sur diverses travées.)

M. le président.  - Cet hémicycle prend l'habitude de l'unanimité ! Il s'agit d'une allusion tout à fait particulière. (Sourires)

L'amendement n°112 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°98, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'alinéa 13

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les victimes des violences mentionnées à l'article 132-80 du code pénal, y compris les bénéficiaires d'une ordonnance de protection prévue aux articles 515-9 à 515-13 du code civil, ne peuvent être mises en quarantaine, placées et maintenues en isolement dans le même domicile que l'auteur des violences, y compris si les violences sont présumées. Si l'éviction du conjoint violent ne peut être exécutée, un lieu d'hébergement permettant le respect de leur vie privée et familiale leur est attribué.

Mme Laurence Rossignol.  - Cet amendement précise que la victime de violences conjugales ne peut être confinée avec son auteur. Si l'éviction du conjoint ne peut être exécutée, cette victime doit bénéficier d'un lieu d'hébergement. Cela peut sembler évident, mais en matière de lutte contre les violences faites aux femmes, j'ai appris à me méfier. J'aime autant l'inscrire dans la loi.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Le confinement a pu aggraver certaines situations. En France, la pratique consiste trop souvent à faire quitter le domicile conjugal à la victime plutôt qu'à l'agresseur, ce qui est déjà un problème.

Cet amendement semble de bon sens, mais je ne voudrais pas donner un avis favorable sans être sûr, monsieur le ministre, que vous vous en donnerez les moyens nécessaires. Êtes-vous prêts à le faire ? Si tel est le cas, la commission sera prête à suivre Mme Rossignol.

M. Olivier Véran, ministre.  - Le Gouvernement est non seulement disposé à le faire mais il le doit car ce que vous proposez figure déjà dans la loi. C'est une évidence législative.

Mme Laurence Rossignol.  - Pas du tout !

M. Olivier Véran, ministre.  - Bien sûr que si ! Il est certes possible d'inclure dans cette loi une disposition qui existe déjà, mais est-ce nécessaire puisque l'amendement est satisfait ? La question des moyens à mettre en oeuvre découle du fait que cette obligation de protection de la victime figure dans la loi. Retrait ?

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Je ne suis pas convaincu par cette réponse. Existe-t-il vraiment une offre d'hébergement suffisante pour accueillir ces victimes de violences conjugales, plus nombreuses pendant cette période de confinement ?

Je confirme l'avis favorable de la commission : en cette période particulière, il faut que des dispositions particulières s'appliquent en faveur des personnes victimes de violences conjugales.

M. Olivier Véran, ministre.  - Je ne suis pas juriste et je fais confiance à mon administration. Comme je ne veux pas qu'on puisse conclure que je ne suis pas favorable à cette disposition, je donne un avis de sagesse. (Marques de satisfaction sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Bruno Retailleau.  - Je ne souhaite pas compromettre Laurence Rossignol (Sourires) mais, avec la plupart de mes collègues, je voterai avec plaisir son amendement. Le confinement crée des circonstances exceptionnelles et les violences conjugales sont un fléau qu'il faut combattre par tous les moyens.

Mme Laurence Rossignol.  - Lorsque nous nous battons pour des causes communes, nous ne nous compromettons jamais, monsieur Retailleau ! (Sourires)

La loi prévoit qu'une femme peut obtenir une ordonnance de protection et une décision d'éviction de son conjoint violent. Mais ce qu'elle ne prévoit pas, c'est le confinement. L'absence d'exécution de l'ordonnance de protection ou de la mesure d'éviction du conjoint n'est pas prévue par la loi à l'heure du confinement.

Cet amendement n'est donc pas superfétatoire. Les forces de l'ordre sont fréquemment appelées pour des violences pendant cette période alors que la justice ne fonctionne aujourd'hui pas bien et que les centres d'hébergement sont saturés.

Cet amendement aidera grandement les travailleurs sociaux, les policiers et les gendarmes.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Dans tous les départements, nous nous interrogeons sur la prise en charge des femmes victimes de violences pendant le confinement. À chaque réunion avec le préfet, nous n'obtenons pas précisément le décompte des moyens dédiés pour lutter contre ce fléau. Cet amendement est donc utile et le Gouvernement doit nous préciser les modalités et les moyens mis à disposition de cet hébergement.

Mme Laurence Cohen.  - J'ai beaucoup de sujets d'opposition avec M. Véran mais je connais son engagement en la matière. Dans nos départements, nous observons une recrudescence des violences - les procureurs et les préfets nous le disent. Les femmes doivent pouvoir les dénoncer et trouver des lieux d'hébergement. Il convient donc de trouver des solutions et le soutien du ministre est un point d'appui important qui ne peut qu'aider ces femmes.

Mme Catherine Dumas.  - Je ne comprends guère votre réponse, monsieur le ministre. Le dispositif proposé ici ne peut pas figurer déjà dans la loi, qui ne prévoit forcément rien pour la situation exceptionnelle que nous vivons. Votons cet amendement !

Ces femmes méritent toute l'attention du Sénat et nous comptons sur vous, monsieur le ministre, pour que des solutions concrètes soient proposées.

M. Marc Laménie.  - Nous abordons souvent ce sujet hautement sensible au sein de la délégation aux droits des femmes. Il y a la loi, certes, mais aussi son application sur le terrain. Chaque semaine, lors de la réunion entre les représentants de l'État et les parlementaires, j'aborde la question des violences intrafamiliales.

Nous sommes désormais très sensibilisés, mais il reste beaucoup à faire. Aucun territoire n'est à l'abri. Je soutiens donc la démarche de Mme Rossignol.

Mme Sylvie Robert.  - Dans le deuxième projet de loi de finances rectificative, nous avions voté un million d'euros pour la lutte contre les violences faites aux femmes. Hélas, la CMP l'a effacé. J'ose espérer qu'il n'en sera pas de même pour le présent amendement.

Mme Catherine Deroche.  - Je voterai cet amendement. N'oublions pas non plus les violences perpétrées contre les enfants, aggravées aussi par le confinement. Nos services départementaux peuvent en témoigner.

Mme Françoise Laborde.  - Je suis ravie par cette belle unanimité. Il faudra se rapprocher de Bercy pour obtenir les moyens nécessaires. Mme Schiappa devra ensuite mettre en oeuvre les solutions pratiques.

M. Olivier Véran, ministre.  - Moi qui ai été député longtemps et qui suis un ministre récent, j'ai le plus grand respect pour les débats parlementaires. Ma réserve était d'ordre juridique, mais le sujet est d'importance et doit nous engager collectivement. Mon avis définitif est donc favorable. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

L'amendement n°98 est adopté.

M. le président.  - Belle unanimité !

Amendement n°114, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 15, première phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

S'astreindre à des horaires ou des modalités de sorties extrêmement limités par l'autorité administrative.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Il semble concevable qu'une personne contaminée puisse démontrer que l'aménagement de ses nouvelles conditions de vie est compatible avec le respect des gestes barrières. Tel est l'objet de cet amendement.

M. Philippe Bas.  - Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°114 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°118, présenté par M. Raynal et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 15, seconde phrase

Remplacer les mots :

téléphonique ou électronique

par les mots :

téléphonique et électronique

M. Jérôme Durain.  - Cet amendement permet un cumul des moyens de communication pour l'accès au juge.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Sagesse. (M. Jérôme Durain s'en désole.)

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Monsieur le président, vous y étiez favorable en commission...

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Un avis de sagesse n'est pas forcément négatif. Je vous confirme que l'avis était de sagesse en commission. En l'occurrence, il s'agit d'une sagesse bienveillante. (On s'en félicite sur les travées du groupe SOCR.)

L'amendement n°118 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°21 rectifié, présenté par Mmes M. Carrère, Costes, N. Delattre et Guillotin, M. Labbé, Mme Laborde, MM. Requier, Cabanel, Collin, Dantec, Gabouty, Gold et Guérini, Mmes Jouve et Pantel et MM. Roux et Vall.

Alinéa 15

Compléter cet alinéa par les mots :

, à peine de nullité

Mme Maryse Carrère.  - Cet amendement prévoit qu'une personne en quarantaine ou à l'isolement doit disposer de moyens de communication téléphonique ou électronique suffisants. Sans cette précision, la mise en quarantaine doit être considérée comme nulle et non avenue.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°21 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°16 rectifié bis, présenté par M. Requier, Mmes M. Carrère, Costes et N. Delattre, M. Labbé, Mme Laborde, MM. Cabanel, Collin, Dantec, Gabouty et Gold, Mmes Jouve et Pantel et MM. Roux, Vall et Guérini.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

...) Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Elles tiennent compte de la densité de population ».

M. Jean-Claude Requier.  - Cet amendement prévoit la prise en compte d'un critère de densité. En effet, la lutte contre la propagation d'une épidémie repose essentiellement sur la distanciation sociale. Beaucoup d'observateurs ont noté des incongruités : ainsi, on a vu de nombreux promeneurs dans les centres-villes des stations balnéaires alors que les plages étaient fermées. De même, il était contre-productif de réduire dans les villes les plages horaires pour faire du sport, cette mesure ayant eu pour effet d'accroître la densité aux heures où cette pratique était permise.

L'Aubrac et ses deux habitants au km2 n'est pas comparable au front de mer de Biarritz, aux berges de la seine ou au canal de l'Ourcq !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Ce paramètre doit être pris en compte, mais il en existe bien d'autres et tous ne peuvent être cités dans la loi. Retrait ?

M. Olivier Véran, ministre.  - Même demande. La mise en oeuvre des mesures de distanciation sociale prend en compte divers critères. Votre amendement est satisfait.

L'amendement n°16 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°15 rectifié bis, présenté par M. Labbé, Mmes M. Carrère, Costes, N. Delattre, Guillotin et Laborde, MM. Requier, Cabanel, Collin, Dantec, Gabouty et Gold, Mme Jouve et MM. Roux, Vall et Guérini.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

...) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Les interdictions susmentionnées se limitent aux circonstances d'urgence absolue et sont motivées par l'absence de solutions alternatives. »

Mme Françoise Laborde.  - Dans un État démocratique, même faisant face à une épidémie, la liberté doit rester la règle et l'interdiction l'exception. Durant la phase de prorogation, des adaptations sont à rechercher. Tous les moyens matériels et humains doivent être déployés pour préserver l'exercice des libertés individuelles et collectives.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Les mesures sont limitées aux circonstances de cette catastrophe sanitaire. Cet amendement n'est pas nécessaire pour parvenir à l'objectif que vous voulez atteindre : retrait ou avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°15 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°131, présenté par MM. Maurey, Bockel et L. Hervé, Mme Gatel, MM. Bonhomme et Daubresse, Mme Eustache-Brinio, MM. Frassa, Reichardt, Wattebled, Janssens, Laugier et Paccaud, Mme N. Goulet, MM. Mizzon, Bonne, Bizet et Guerriau, Mme Ramond, MM. Lefèvre et Pellevat, Mme Guidez, MM. Canevet, Panunzi, Le Nay, Houpert, Luche et Husson, Mmes Noël et Lassarade, MM. Vaspart et Courtial, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Danesi, Pemezec, Regnard, Gilles, Kern et Fouché, Mme F. Gerbaud, M. Cazabonne, Mmes Raimond-Pavero et L. Darcos, M. Pointereau, Mmes Billon, C. Fournier, de la Provôté et Férat, MM. Cuypers, Bouchet et Détraigne, Mmes de Cidrac, Létard et Imbert et MM. H. Leroy, Mandelli et Vogel.

Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :

...° Il est ajouté un paragraphe ainsi rédigé :

« ....  -  Les dispositions du 5° ne font pas obstacle à la faculté, pour le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent, d'ordonner, au titre du pouvoir de police municipale, des mesures de fermeture provisoire ou règlementant leur ouverture lorsque des raisons impérieuses liées à des circonstances locales en rendent l'édiction indispensable. »

Mme Françoise Gatel.  - Cet amendement prolonge le débat que nous avons eu hier soir en séance sur la responsabilité des maires.

Aujourd'hui, nous avons 30 000 maires élus au mois de mars mais non encore entrés en fonctions : ce sont donc les sortants qui prennent des décisions d'ouverture d'école qui engageront leur successeur.

Un maire doit pouvoir décider la fermeture d'une école si les gestes barrières ne peuvent être respectés à l'intérieur de l'établissement.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Cet amendement soulève une question intéressante. Beaucoup de maires ressentent la décision de réouverture des écoles comme relevant de leur responsabilité, et je le comprends ; mais il faut également apprécier les données de fait.

Visant les écoles, vous avez inclus, sans le vouloir, dans votre amendement tous les établissements recevant du public et les lieux de réunion. Cela fait beaucoup.

Évitons également d'introduire une compétition entre les pouvoirs de police spéciale des services déconcentrés de l'État, mis en place pour lutter contre le fléau sanitaire, et les pouvoirs de police générale du maire qui ne s'exercent que par exception.

Enfin, les maires nous ont demandé de limiter l'engagement de leur responsabilité dans l'ouverture des écoles ; or, en les rendant implicitement responsables de cette ouverture, vous élargissez le champ des poursuites pénales dont ils pourraient faire l'objet.

Il serait préférable de rassurer les élus en leur expliquant le droit applicable : la décision de réouverture des écoles ne leur incombe pas. Retrait, sinon avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - La décision rendue par le Conseil d'État il y a quinze jours concernant la ville de Sceaux confirme les explications du président Bas, dont je partage donc l'avis.

M. Olivier Paccaud.  - J'ai cosigné cet amendement qui répond à un besoin de clarification. Dans l'Oise, et ma collègue Laurence Rossignol pourra le confirmer, il y a une épidémie d'arrêtés municipaux annulant la réouverture des écoles.

D'après le raisonnement du président Bas, ils seraient illégaux. Pourtant, l'article L.411-1 du code de l'éducation nationale ne dit pas clairement que le responsable de l'ouverture des établissements est le directeur d'école. À l'inverse, l'article L.2212-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT) autorise le maire à fermer des établissements municipaux dans les cas de maladie épidémique ou contagieuse.

Je pourrais citer, dans mon département, l'arrêté pris par le maire de la ville de Méru, qui est remarquablement rédigé et dont je ne suis pas sûr qu'il soit hors la loi.

M. Alain Richard.  - Je propose que le maire qui estime qu'il ne peut assurer soit le fonctionnement des services publics périscolaires, soit l'organisation des locaux pour la réouverture d'une école écrive à l'inspecteur d'académie. Il reviendra à ce dernier, face à ce non possumus, de prendre la décision. Les services périscolaires, je le rappelle, ne sont pas indispensables au fonctionnement des établissements de l'Éducation nationale.

Nous allons rencontrer des déficits de capacités d'accueil scolaire : en primaire, ces capacités sont comprises entre 10 % et 15 %. Le Gouvernement devrait activer le système minimum d'accueil créé en 2008, il est vrai dans des circonstances controversées. Le code de l'éducation le soumet à un préavis de grève. Il faudrait donc modifier cette disposition : c'est un complément utile et compatible avec l'enseignement à distance.

M. Loïc Hervé.  - Peut-être suis-je trop crédule, mais le Président de la République n'a parlé, dans son intervention d'aujourd'hui, que du rôle du maire dans l'ouverture des écoles. Il a dit que si les circonstances locales n'étaient pas réunies, les écoles n'ouvriraient pas. L'amendement de Mme Gatel va dans ce sens.

La récente décision du Conseil d'État portait sur le port du masque dans le domaine public, alors que cet amendement traite notamment des bâtiments, qui parfois hébergent aussi une garderie ou une cantine relevant directement des pouvoirs du maire.

Les maires souhaitent du temps et de l'accompagnement. Les arrêtés qu'ils ont pris seraient-ils tous illégaux ? Voyez les arrêtés de couvre-feu pris au début du confinement, qui n'ont pas été déférés ; certains sont toujours en vigueur, et ont été appliqués par la gendarmerie et la police nationale. Donnons aux maires la possibilité de ne pas ouvrir une école.

M. Max Brisson.  - Hier, j'ai tempêté contre le protocole sanitaire que l'on demandait aux maires d'appliquer.

Je remercie le président Bas d'avoir fait voter un dispositif qui protège les maires et les directeurs d'école. Tous ces arrêtés de non-réouverture s'expliquent par une absence de consultation préalable.

Cela étant dit, j'ai un peu de mal avec cet amendement, car la réouverture des écoles est nécessaire, notamment pour les décrocheurs et les enfants victimes de violences. Il faut aider les maires à prendre leurs responsabilités. (Mme Catherine Dumas et M. Ladislas Poniatowski approuvent.)

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Cet amendement me laisse perplexe, puisqu'il fait du maire un acteur dans la réouverture des écoles, que celui-ci le souhaite ou non. Philippe Bas nous a pourtant démontré hier qu'il n'avait pas la responsabilité juridique de cette décision.

De plus, le champ de l'amendement n'inclut que les maires et présidents d'établissements publics de coopération intercommunale. Or Hervé Morin, président du conseil régional de Normandie, a fait savoir qu'il était prêt à ne pas rouvrir les lycées... Je crains par conséquent des effets pervers, si chacun endosse une responsabilité que la législation ne lui donne pas.

Mme Frédérique Espagnac.  - Comme l'a souligné Max Brisson, beaucoup d'enfants ont besoin de revenir en classe, à commencer par les décrocheurs et ceux qui vivent une situation difficile au foyer familial.

Cet amendement risque de compliquer davantage la tâche des maires. Déjà, certains enseignants hésitent à revenir en classe... Faut-il créer en plus une forme de droit de retrait du maire, qui l'incitera à se dire : on arrête tout ? Le dispositif que nous avons voté hier était important pour protéger les maires et chefs d'établissement. N'ajoutons pas un obstacle à la réouverture des écoles, qui est urgente - dans des conditions sanitaires optimales, naturellement. Ne mettons pas le maire en situation de se protéger en laissant les écoles fermées.

M. Mathieu Darnaud.  - J'apporterai une nuance aux propos de Max Brisson. Les maires et les directeurs d'école vivent une réalité bien différente de nos débats juridiques. En Ardèche, les services de l'État demandent un zéro défaut pour l'ouverture des cantines. Dans le même temps, puisque, au-delà de quinze élèves par classe, on ne peut avoir que deux jours de classe par semaine, on demande aux collectivités de mettre en place des activités périscolaires y compris pendant le temps scolaire.

L'État territorial demande aux maires une agilité et une réactivité qu'ils n'ont pas les moyens d'assurer, et leur donne une responsabilité qu'ils ne peuvent endosser. Il faut clarifier la feuille de route.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Évitons de compliquer les choses. Hier, la majorité du Sénat a voté le dispositif général de la commission des lois - auquel le Gouvernement s'est opposé avec le succès que l'on sait... Nous avons bien fait de le voter, même si le groupe socialiste et républicain préférait un article spécifique sur la responsabilité du maire.

Cet amendement risque de compliquer la situation des maires alors que le droit commun leur permet déjà de fermer des établissements en cas de danger. Ne multiplions pas les dispositions de circonstance.

Mme Françoise Laborde.  - Je partage la position de Max Brisson. Élus, enseignants et directeurs d'école doivent travailler ensemble et non se rejeter les responsabilités.

Mme Françoise Gatel.  - La proposition du président Bas, que nous avons votée hier, était bienvenue pour sécuriser les élus. Néanmoins je ne retirerai pas cet amendement, que j'ai présenté au nom du président Maurey, car il ne vise aucunement à exempter les maires de leurs responsabilités. Je n'en connais pas un, d'ailleurs, qui souhaite se défiler !

La situation cependant est extraordinaire : au-delà du Covid-19, rappelons que des décisions vont être prises par des maires qui ne siègeront plus dans trois semaines. Je connais des communes où les passations de pouvoir sont difficiles, et où les maires qui prendront leurs fonctions auront des décisions délicates à prendre sur les écoles.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Cet amendement fait porter aux maires une responsabilité qui incombe à l'État. Pis, il donne au juge les moyens de condamner un maire qui n'aurait pas fermé une école alors que les circonstances locales rendaient cette fermeture indispensable. Enfin, il porte sur tous les établissements recevant du public.

Ce débat a néanmoins le mérite de rappeler aux maires que la décision d'ouverture des écoles relève de l'Éducation nationale.

L'amendement n°131 n'est pas adopté.

L'amendement n°163 est retiré.

L'article 2, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°200, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au deuxième alinéa de l'article L. 3131-16 du code de la santé publique, après la référence : « 9° » , est insérée la référence : « du I ».

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Coordination.

L'amendement n°200, accepté par le Gouvernement, est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Madame Delattre étant absente, c'est Mme Guillotin qui va défendre cet amendement, qui devient dès lors l'amendement n°130 rectifié ter.

Amendement n°130 rectifié ter, présenté par Mme N. Delattre, MM. Requier, Collin, Roux et Gold et Mmes Pantel et Guillotin.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 3131-15 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 3131-15-... ainsi rédigé :

« Art. L. 3131-15-....  -  Dans le cadre des mesures décrétées sur le fondement de l'article L. 3131-15, le maire peut prendre un arrêté précisant les gestes et équipements individuels obligatoires dans l'espace public et dans les lieux recevant du public à des strictes fins de préservation de la santé publique. »

Mme Véronique Guillotin.  - L'extension du port du masque me tient à coeur. Cet amendement permet aux maires de prendre des arrêtés rendant obligatoire le port de masques dans leur commune. La territorialisation est importante : ce qui ne s'impose pas dans des communes rurales peut être précieux dans les agglomérations, où le risque de formation de nouveaux clusters est plus important.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°130 rectifié ter n'est pas adopté.

M. Patrick Kanner .  - Rappel au Règlement ! Monsieur le Président, vu les conditions dans lesquelles nous travaillons, je vous ai proposé par courrier, en application de l'article 44 de la Constitution et de l'article 46 bis de notre Règlement, que lorsqu'un amendement ne peut être défendu par son signataire, il puisse l'être par un membre du même groupe. C'est une suggestion de Mme de la Gontrie.

M. le président.  - Vous voyez que je sais être souple : je vous propose de rectifier l'amendement n°51 pour pouvoir le défendre.

Amendement n°51 rectifié, présenté par Mmes Ghali, Perol-Dumont et Conway-Mouret et MM. Antiste et Kanner.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 3131-19 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Il est réuni sans délai un conseil de scientifiques dans chaque département. Les membres de ce conseil sont nommés par le préfet de région. Le comité dispose d'un avis consultatif. Il rend périodiquement des avis sur l'état de la catastrophe sanitaire et sur les applications au niveau départemental des mesures propres à y mettre un terme. Le comité est dissous lorsque l'état d'urgence sanitaire prend fin. »

M. Patrick Kanner.  - Merci. Cet amendement propose la création de conseils scientifiques indépendants dans chaque département pour accompagner la réflexion des élus locaux.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Je ne voudrais pas qu'il y ait autant d'avis sur le Covid-19 qu'il y a de départements... (Rires)

M. le président.  - Ou de chaires d'épidémiologie ! (Sourires)

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Nous avons réuni les meilleures compétences au sein de l'instance nationale.

M. Olivier Véran, ministre.  - Je plussoie. Le consensus scientifique face à un virus émergeant varie grandement en fonction des données, des informations qui remontent. Les territoires sont représentés au sein du Conseil scientifique, qui ne compte pas que des experts des hôpitaux parisiens : je pense notamment au professeur Malvy, de Bordeaux. Restons-en à un Conseil scientifique, une agence Santé publique France, une direction générale de la santé : c'est déjà bien !

L'amendement n°51 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°67 rectifié, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le quatrième alinéa de l'article L. 3136-1 du code de la santé publique est abrogé.

Mme Esther Benbassa.  - La loi du 23 mars 2020 a créé un délit de violation réitérée des mesures d'urgence sanitaire. Le discernement doit être de mise. Va-t-on punir des femmes ou des enfants qui cherchent à échapper à des violences intrafamiliales ? Les témoignages indiquent que des verbalisations abusives et ciblées se multiplient, notamment dans les quartiers populaires. On compte trois fois plus de contraventions en Seine-Saint-Denis qu'ailleurs ! Il n'y a vraiment pas lieu de stigmatiser ces territoires qui sont en détresse sanitaire, sociale et alimentaire.

La garde à vue, la comparution immédiate, l'incarcération sont inopportunes et risquent de favoriser la propagation de l'épidémie.

Cet amendement abroge donc la sanction du délit de violation réitérée des mesures d'urgence sanitaire.

présidence de M. Thani Mohamed Soilihi, vice-président

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable. Les personnes fuyant des violences familiales ne sont pas verbalisées mais secourues par la police et la gendarmerie.

Je ne vois aucune raison de supprimer la possibilité de sanctionner pénalement, par des amendes, le non-respect des règles sanitaires : même avec le déconfinement, restera le cas des quarantaines. Le Gouvernement peut en outre être amené à reprendre des mesures de confinement - il ne faudrait pas qu'il soit incapable de le faire respecter.

M. Olivier Véran, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°67 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°168, présenté par M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Pour prévenir le risque d'incendie, peuvent déroger aux obligations prévues par le 1° du 3131-15 du code de la santé publique, les propriétaires forestiers particuliers tels que définis à l'article L. 311-1 du code forestier pour se déplacer dans leurs domaines forestiers respectifs et dans la limite du territoire national afin d'y effectuer tous les travaux d'aménagements, tels que le débroussaillage, coupes des rémanents et branchages, et nettoyages de parcelles, en application des dispositions des articles L. 134-1 et suivants du code forestier, relatives aux obligations de débroussaillement communes aux territoires, bois et forêts exposés aux risques d'incendie.

Mme Laurence Cohen.  - Alors que nous entrons dans la saison sèche, il est nécessaire de permettre aux propriétaires forestiers de se déplacer pour entretenir leurs parcelles afin de prévenir les risques de feux saisonniers.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Comme le Parti communiste, je défends la propriété forestière et foncière. (Sourires) Mais cet amendement est inutile : ils ont déjà le droit d'entretenir leur parcelle pour prévenir les incendies qui d'ailleurs menaceraient leurs revenus. Retrait ?

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis. Cela relève du décret. Dès maintenant - et encore plus à partir du 11 mai - les propriétaires peuvent déjà se rendre dans leur forêt pour s'y promener et y travailler.

Mme Laurence Cohen.  - J'apprécie l'esprit teinté d'humour du rapporteur et je retire bien volontiers mon amendement. (Sourires)

L'amendement n°168 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°184 rectifié, présenté par MM. Magras et Darnaud.

 Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Par dérogation, aux fins de lutter contre la propagation de l'épidémie de covid-19 pour une durée d'un an à compter de la publication de la présente loi, dans les collectivités mentionnées à l'article 72-3 de la Constitution, par arrêté réglementaire du représentant de l'État sur proposition du directeur régional de l'Agence régionale de santé, des examens de dépistage du virus, à la charge de la personne entrante, peuvent être prescrits lors de l'arrivée dans l'une de ces collectivités. En cas de refus de s'y soumettre, l'entrée sur le territoire peut être refusée ou une mise en quarantaine ou des mesures de placement et de maintien en isolement prononcées par décision individuelle motivée du représentant de l'État dans la collectivité, sur proposition du directeur général de l'Agence régionale de santé, sans que l'absence de constatation médicale de l'infection de la personne concernée y fasse obstacle. Ces dispositions ne sont pas applicables aux personnes justifiant résider habituellement dans la collectivité concernée.

M. Mathieu Darnaud.  - Cet amendement permet aux territoires ultramarins qui le souhaitent de soumettre les passagers entrants à un protocole de dépistage et de suivi dès l'arrivée sur le territoire, sous le contrôle du préfet et de l'ARS. Ce protocole, prévu pour Saint-Barthélemy, a été présenté par M. Magras au Président de la République, qui l'a approuvé, en visioconférence, en présence de la ministre des Outre-mer, des exécutifs et des préfets d'outre-mer.

Le Gouvernement oppose l'absence de fiabilité des tests, mais prévoit par ailleurs que le préfet peut prononcer une mesure individuelle de confinement « sur constatation médicale ». Comment sera-t-elle obtenue, sinon par un test ?

Dans les faits, la quarantaine systématique à l'arrivée interdirait toute reprise de l'activité touristique.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - La quarantaine imposée à l'arrivée sur un territoire d'outre-mer empêche la reprise de l'activité touristique, c'est vrai. Mais si celle-ci devait se faire au prix d'une reprise de l'épidémie, ce serait un marché de dupes.

Le test de dépistage n'est pas infaillible. Un patient en phase d'incubation peut obtenir un résultat négatif, alors qu'il est contagieux. La quarantaine vise à éviter ces contaminations.

Votre amendement subordonne la mise en quarantaine au test positif ; ce serait prendre une lourde responsabilité. Certes, les touristes reviendront moins vite, mais nous espérons que notre sévérité permettra de tenir en échec le Covid-19. Demande de retrait, mais vous avez l'assurance que nous sommes très sensibles à ce problème.

M. Olivier Véran, ministre.  - Imaginons qu'en venant au Sénat, j'ai été contaminé : cela ne se voit pas, je me sens parfaitement bien. Si je pars en outre-mer, vous ne trouverez pas de virus à mon arrivée même avec un écouvillonnage naso-pharyngé bien appuyé, ni même quelques jours après... Pendant la phase d'incubation, si je ne suis pas en quatorzaine, je vais contaminer de nombreuses personnes. Preuve par l'exemple que votre proposition ne fonctionne pas ! Nous devons préserver ces territoires. Retrait ?

M. Vincent Segouin.  - Certes !

M. Mathieu Darnaud.  - Vous m'avez convaincu. Mais si l'on admet que la fiabilité des tests est douteuse, pourquoi en faire l'un des critères qui déterminera la couleur rouge ou verte des départements ? De l'Ardèche à l'outre-mer, il n'y a qu'un pas vu nos capacités hospitalières. Et mon département risque d'être en rouge faute de capacités de test...

Mme Jocelyne Guidez.  - J'espère que cet amendement ne sera pas retiré. J'ai de la famille dans les Antilles, je ne voudrais pas être confinée à chaque fois que je m'y rends ! Il faut bien sûr protéger les populations de ces territoires, mais il faut aussi pouvoir s'y rendre. Allez-vous l'interdire même pour les grandes vacances ?

M. Olivier Véran, ministre.  - Même sans racines antillaises, j'aime beaucoup trop les Antilles pour prendre le risque d'apporter le virus dans ces territoires où les évacuations sanitaires sont impossibles.

Même avec des faux négatifs, le nombre de tests positifs reste un indicateur pour mesurer la circulation virale dans un territoire. Un nombre important de tests positifs est l'indication d'un cluster. Mais vous avez la chance de vivre dans la plus belle région du monde, Auvergne Rhône-Alpes ! (Sourires et exclamations) À l'échelle régionale, les capacités de test de l'Ardèche sont tout à fait correctes. (Mme Cécile Cukierman s'exclame.)

L'amendement n°184 rectifié bis est retiré.

ARTICLE 3

M. le président.  - Amendement n°68 rectifié, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Rédiger ainsi cet article :

Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Les 2° et 3° de l'article L. 3131-15 sont abrogés ;

2° Après l'article L. 3131-17, il est inséré un article L. 3131-17-... ainsi rédigé :

« Art. L. 3131-17-....  -  I.  -  Si cette mesure constitue l'unique moyen de lutter contre la propagation de l'épidémie, le représentant de l'État dans le département peut ordonner le placement à l'isolement d'une personne dont il est médicalement attesté qu'elle souffre de l'infection à l'origine de l'épidémie. Dans les mêmes conditions, le représentant de l'État dans le département peut ordonner le placement en quarantaine d'une personne dont il est médicalement attesté qu'elle est susceptible d'être porteuse de l'infection à l'origine de l'épidémie.

« La décision de mise à l'isolement ou en quarantaine est motivée et prise après certificat médical. Elle entraîne pour la personne l'obligation de demeurer à son domicile, sous réserve des déplacements indispensables aux besoins familiaux, de santé ou d'approvisionnement et dont les modalités sont fixées par la décision en fonction de la nature et des modes de propagation de l'infection. La décision fixe la durée de la mesure, qui ne peut excéder la période durant laquelle la personne est susceptible de transmettre l'infection.

« La prolongation de la mesure au-delà de quatorze jours ne peut être autorisée que par le juge des libertés et de détention, saisi à cette fin par le représentant de l'État dans le département. Le juge des libertés et de détention statue en chambre du conseil, après avoir entendue la personne et, le cas échéant, son avocat. L'audience peut être assurée par vidéoconférence. La durée totale de la mise à l'isolement ou en quarantaine ne peut excéder un mois.

« À tout moment, la personne placée en isolement ou en quarantaine peut demander la mainlevée de cette mesure devant le juge des libertés et de détention.

« II.  -  À peine de nullité, toute personne placée à l'isolement ou en quarantaine est immédiatement informée, par écrit et dans une langue qu'elle comprend de la nature, de la durée et des motifs de la mesure à laquelle est soumise, ainsi que des droits qui lui sont reconnus.

« III.  -  Le fait, pour une personne placée à l'isolement ou en quarantaine, de ne pas respecter les conditions de la mesure à laquelle elle est soumise, est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe.

« IV.  -  Un décret précise, en tant que de besoin, les conditions d'application des présentes dispositions. »

Mme Esther Benbassa.  - L'article 3 précise les modalités de placement en isolement des personnes potentiellement contagieuses, sur décision du préfet et sur proposition du directeur de l'ARS, après constatation médicale. Seul garde-fou, le juge des libertés et de la détention peut être saisi par le patient. La mise à l'isolement pour raison médicale est une privation de liberté alors que le porteur du virus n'a rien fait d'illégal. Cet amendement garantit la nécessité et la proportionnalité de la mesure. Plus respectueux des droits de la personne, il prévoit la présence d'un avocat lors de l'audience devant le juge des libertés et de la détention et l'information du requérant par écrit, dans une langue qu'il comprend, de la nature, de la durée et des motifs de la mesure et des droits qui lui sont reconnus.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°68 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°196, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois.

Alinéa 3

Après les références :

5° à 9°

insérer la référence :

du I

L'amendement de coordination n°196, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°127, présenté par M. Leconte et Mmes Conway-Mouret, de la Gontrie et Lepage.

Après l'alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ...  -  Le placement en quarantaine est subordonné à la constatation médicale de l'infection de la personne concernée ou de son refus de se soumettre à un dépistage.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Nos collègues représentant les Français de l'étranger considèrent que, telle que proposée dans le projet de loi, la distinction entre quarantaine et isolement est insuffisamment claire.

Aucune disposition aux frontières n'a été prise jusqu'à présent, il est donc disproportionné d'installer une mesure privative de liberté au moment du déconfinement. Mieux vaut un dépistage, avec le cas échéant une mise à l'isolement solide, plutôt qu'une quarantaine sans test préalable.

Ajoutons que depuis la mi-mars, le Gouvernement a incité les Français installés à l'étranger à ne pas rentrer en France. L'organisation des rapatriements fut concentrée sur les personnes qui étaient de manière provisoire à l'étranger. Il est inacceptable que les Français vivant à l'étranger soient placés en quarantaine à leur retour en France. Cette disposition est inutilement inégalitaire.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Les tests de dépistage ne suffisent pas pour nous tranquilliser sur le risque de contamination. Nous n'avons pas accepté ces dispositions pour Saint-Barthélemy, nous ne pouvons pas les accepter pour les Français de l'étranger.

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis défavorable.

L'amendement n°127 n'est pas adopté.

L'amendement n°17 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°117, présenté par M. Leconte et Mmes Conway-Mouret et Lepage.

Alinéa 6, au début

Insérer les mots :

Une mesure de mise en quarantaine,

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Je le reprends.

M. le président.  - Ce sera l'amendement n°117 rectifié.

Amendement n°117 rectifié, présenté par M. Leconte et Mmes Conway-Mouret, Lepage et de la Gontrie.

Alinéa 6, au début

Insérer les mots :

Une mesure de mise en quarantaine,

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - C'est le même que le précédent : je le retire également.

L'amendement n°117 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°18 rectifié, présenté par Mmes M. Carrère, Costes et N. Delattre, M. Labbé, Mme Laborde, MM. Requier, Cabanel, Collin, Dantec, Gabouty, Gold et Guérini, Mmes Jouve et Pantel et MM. Roux et Vall.

Alinéa 6, après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Ils ne peuvent concerner les personnes mineures.

Mme Maryse Carrère.  - Cet amendement exclut la possibilité de prendre des mesures individuelles de placement en quarantaine ou de mise à l'isolement contre des mineurs.

Les modalités de la quarantaine sont très floues mais peuvent vraisemblablement affecter ces mineurs.

M. le président.  - Amendement n°23 rectifié bis, présenté par Mmes N. Delattre, M. Carrère, Costes et Guillotin, M. Labbé, Mme Laborde, MM. Requier, Cabanel, Collin, Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve et MM. Roux et Vall.

Après l'alinéa 9

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque l'intéressé est mineur, ces mesures font l'objet d'un recours devant le juge des enfants.

Mme Maryse Carrère.  - Cet amendement de repli prévoit un recours devant le juge des enfants.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable à l'amendement n°18 rectifié et sagesse pour l'amendement n°23 rectifié bis.

M. Olivier Véran, ministre.  - Avis défavorable aux deux.

Mme Laurence Rossignol.  - Ces amendements nous permettent de comprendre comment le Gouvernement compte gérer le retour d'un enfant rentrant en France, par exemple parce qu'il a un parent à l'étranger et un parent en France. Que se passe-t-il si ce mineur ne peut être hébergé dans un lieu familial ?

M. Olivier Véran, ministre.  - Il y aura un décret qui définira les modalités de cette situation.

Mme Laurence Rossignol.  - Mais encore ?

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - C'est un peu court !

L'amendement n°18 rectifié n'est pas adopté.

L'amendement n°23 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°19 rectifié, présenté par Mmes M. Carrère, Costes, N. Delattre et Guillotin, M. Labbé, Mme Laborde, MM. Requier, Cabanel, Collin, Dantec, Gabouty, Gold et Guérini, Mmes Jouve et Pantel et MM. Roux et Vall.

Alinéa 6

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Le procureur de la République est informé de la décision individuelle prononcée.

Mme Maryse Carrère.  - Cet amendement prévoit l'information du procureur de la République en cas de décision individuelle de mise en quarantaine ou à l'isolement. Comment pourrait-il être saisi s'il n'est pas informé ?

M. Philippe Bas, rapporteur.  - C'est prévu. Retrait ?

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°19 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°203, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 7

Rédiger ainsi cet alinéa :

 « Lorsque les modalités de la mesure ayant pour objet la mise en quarantaine et le placement ou le maintien en isolement interdisent toute sortie de l'intéressé hors du lieu où la quarantaine et l'isolement se déroulent, ces mesures peuvent à tout moment faire l'objet d'un recours devant le juge des libertés et de la détention qui statue dans les 72 heures. Celui-ci peut également se saisir d'office à tout moment.

M. Olivier Véran, ministre.  - Cet amendement précise que le juge des libertés et de la détention (JLD) n'est saisi que pour les privations de liberté, donc pas pour l'ensemble des mesures.

M. le président.  - Amendement n°22 rectifié, présenté par Mmes M. Carrère, Costes, N. Delattre et Guillotin, M. Labbé, Mme Laborde, MM. Requier, Cabanel, Collin, Dantec, Gabouty, Gold et Guérini, Mmes Jouve et Pantel et MM. Roux et Vall.

Alinéa 7

Compléter cet alinéa par les mots :

par une ordonnance motivée

Mme Françoise Laborde.  - Cet amendement est inspiré des observations de la Commission consultative nationale des droits de l'Homme. Il précise que le JLD statue par ordonnance motivée, afin de garantir des conditions de recours satisfaisantes. L'urgence sanitaire ne doit pas faire reculer des droits acquis au terme d'une longue construction jurisprudentielle et législative.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - L'amendement du Gouvernement est un hommage au Conseil d'État. Et pourtant, je n'y suis pas favorable. La commission a décidé de traiter à l'identique la quarantaine et l'isolement - quoique différentes car dans un cas on aura le droit d'aller faire ses courses, et dans l'autre, non, la différence est ténue... (M. Alain Richard approuve.)

Mais cela n'a pas une si grande importance qu'il faudrait confier la première à la justice administrative et le second au JLD. D'où ma position, suivie par la commission, mais qui n'est pas de principe, de confier l'ensemble à un seul juge, le JLD. Avis défavorable si M. le ministre ne le retire pas.

Avis favorable à l'amendement n°22 rectifié.

M. Olivier Véran, ministre.  - Nous considérons que le JLD n'est nécessaire qu'en cas de privation totale de liberté, quand la personne, ne pouvant sortir de chez soi, fait l'objet d'une mesure d'isolement strict.

Or beaucoup de personnes vont se retrouver dans une situation de privation, très partielle de liberté : ainsi, un cas contact sera mis en quatorzaine allégée, avec autorisation de sortie. Le bon niveau de recours, dans ce cas, est le juge administratif. Ce sera à la fois plus classique et plus simple.

Le recours au JLD doit être réservé à la privation totale de liberté.

L'amendement n°22 rectifié est totalement satisfait. Retrait ?

M. Alain Richard.  - Cette distinction entre les mesures privatives et limitatives de liberté a été discutée à l'initiative, malencontreuse à mes yeux, et toujours très discutée au sein des professions juridiques, en particulier chez les avocats, du précédent premier président de la Cour de cassation.

Le sujet est de nature constitutionnelle et appelle à une très grande rigueur. Or le Conseil constitutionnel a judicieusement tranché qu'une mesure privative de liberté est une mesure qui vous prive de la liberté d'aller et venir plus de douze heures par jour. C'est le cas, me semble-t-il, en vous écoutant décrire les modalités de ces tests et de ce confinement, pour l'isolement « allégé ».

Je le dis, monsieur le ministre, à travers vous aux autorités les plus éminentes de l'État, en particulier au Secrétariat général du Gouvernement, Il est recommandable de maintenir l'unité du traitement des mesures majoritairement ou totalement privatives de liberté.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Des juristes auront des débats passionnants, que nous aurons la joie de lire plus tard, dans la littérature spécialisée, sur la pertinence de la saisine du juge administratif ou du juge judiciaire. (Sourires)

Mais plaçons-nous deux secondes du point de vue juridique et pratique des personnes concernées ! La situation est inédite et suffisamment désagréable pour elles. S'il pouvait n'y avoir qu'une seule juridiction compétente, ce serait plus pratique. Monsieur le ministre, foin de juridisme et de finesses ; simplifions la vie des Français !

Veuillez retirer votre amendement sinon notre groupe votera contre celui-là et, en revanche, pour le 22 rectifié.

M. Olivier Véran, ministre.  - J'ai été convaincu par les arguments d'Alain Richard. Mais j'ai échoué à vous convaincre que la quatorzaine, et encore plus la quatorzaine allégée, ne se situe pas à l'aune des douze heures par jour, dans la catégorie des mesures privatives de liberté : vous pouvez sortir avec un masque faire des courses, mais aussi pour promener vos enfants, dans certaines conditions, et plusieurs fois par jour, donc la limite des douze heures que vous indiquiez n'est pas franchie. Je pense donc que le recours au juge administratif s'impose dans ces situations.

L'amendement n°203 n'est pas adopté.

L'amendement n°22 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°91, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé? :

 « Le juge des libertés et de la détention est saisi dans les quarante-huit heures suivant la notification de la mise en quarantaine ou du maintien en isolement de l'intéressé. Il statue dans les quarante-huit heures suivant sa saisine par ordonnance au siège du tribunal judiciaire dans le ressort duquel se situe le lieu de mise en quarantaine ou de maintien en isolement de l'intéressé après audition du représentant de l'administration et de l'intéressé ou de son conseil, s'il en a un. L'intéressé peut demander au juge des libertés et de la détention qu'il lui soit désigné un conseil d'office.

M. Jean-Pierre Sueur.  - L'article 3 met en place de nouvelles mesures d'isolement et de mise en quarantaine, imposant des mesures de privation de liberté très restrictives pour les personnes concernées. En effet, le placement à l'isolement ou la mise en quarantaine serait prononcé par le préfet sur proposition de l'agence régionale de santé. Le dispositif proposé par le Gouvernement ne comporte aucun contrôle de cette privation de liberté. Nous vous proposons une saisine automatique du juge des libertés, appelé à statuer dans les 48 heures sur un placement en isolement décidé par le préfet.

Cela peut paraître contraignant, mais il s'agit des libertés.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Nous avons mis beaucoup de garanties dans ce régime. Cet amendement en ajoute une qui me semble inutile. Avis défavorable.

L'amendement n°91 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°86, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les mesures de mise en quarantaine ou le placement et le maintien en isolement sont mises en oeuvre sous la propre responsabilité de l'intéressé.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Lors de la présentation de la stratégie nationale de de?confinement devant l'Assemblée nationale le 28 avril 2020, M. Édouard Philippe a déclaré ceci - et, monsieur le ministre, je ne doute pas que ce soit gravé en lettres d'or sur la cheminée de votre bureau...

M. Olivier Véran, ministre.  - Je n'ai pas de cheminée dans mon bureau...

M. Jean-Pierre Sueur.  - « Notre politique repose, a? cet égard, sur la responsabilité individuelle et la conscience que chacun doit avoir de ses devoirs a? l'égard des autres. Nous prévoirons des dispositifs de contrôle, s'ils devaient être nécessaires, mais notre objectif est de nous reposer largement sur le civisme de chacun ».

Cet amendement fait reposer la responsabilité du respect de la quarantaine et du maintien en isolement sur les personnes concernées. Vous savez que le Sénat, à juste titre, est très vétilleux sur ces questions.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - « Nous prévoirons des procédures de contrôle ». Le Gouvernement se sert de cette phrase pour justifier qu'on pratique la quarantaine et l'isolement. Celle-là, faite pour les personnes dont on ne sait pas si elles sont atteintes par une affection contagieuse, existe depuis bien longtemps dans notre droit. Celui-ci vise les personnes dont on sait qu'elles sont contagieuses, et a été consolidé par un règlement sanitaire international de 2005, préparé en lien avec tous les États membres de l'OMS.

Par nature, ces deux régimes exercent des contraintes privatives de liberté, à la différence de la quatorzaine, sur prescription médicale, pour les cas contacts, qui repose sur le sens des devoirs que l'on a à l'égard des autres. Nous ne pouvons pas accepter ce type d'amendements.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Quelquefois, nous cédons au plaisir de citer des déclarations importantes... (Sourires) Mais nous cédons aux arguments du président de la commission, qui ne manquent pas de pertinence.

L'amendement n°86 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°202, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 9, au début

Insérer les mots :

Sauf si l'intéressé y consent,

M. Olivier Véran, ministre.  - Lorsque la personne mise en quarantaine ou placée à l'isolement consent à la prolongation de la mesure au-delà d'un délai de quatorze jours, la saisine du juge des libertés et de la détention ne doit pas être systématique. Simplifions les démarches en retrouvant le texte original du Gouvernement.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

L'amendement n°202 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°20 rectifié, présenté par Mmes M. Carrère, Costes, N. Delattre et Guillotin, M. Labbé, Mme Laborde, MM. Requier, Cabanel, Collin, Dantec, Gabouty, Gold et Guérini, Mmes Jouve et Pantel et MM. Roux et Vall.

Alinéa 9

Après les mots :

Lorsque la mesure

insérer les mots :

limite ou

M. Jean-Claude Requier.  - Cet amendement garantit l'accès au juge des libertés et de la détention de toutes les personnes visées par une décision individuelle, non seulement celles visées par une interdiction totale de sortie.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°20 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°43 rectifié, présenté par MM. Reichardt, Paccaud, Morisset et Kennel, Mmes L. Darcos et Eustache-Brinio, MM. Cuypers et Pellevat, Mmes Thomas, Chain-Larché et Raimond-Pavero, MM. Pemezec, Frassa et Regnard, Mmes Duranton et Noël, M. Bonne, Mme Dumas, MM. Cardoux et Grosperrin, Mme Lavarde, MM. Brisson et de Nicolaÿ, Mmes Troendlé et Imbert, MM. Daubresse, Courtial, Charon, Danesi et Houpert, Mmes Ramond et Deromedi, M. Vaspart, Mme Lamure, MM. Kern, Chatillon, Savary, Gremillet, Bascher, Lefèvre et Vogel, Mmes Dindar et N. Goulet, M. H. Leroy et Mme Malet.

Compléter cet article par trois alinéas ainsi rédigés :

...° Il est ajouté un paragraphe ainsi rédigé :

« ....  -  Le régime de police spéciale mis en place par la loi n°2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19, telle que modifiée par la loi n°... du .... prorogeant l'état d'urgence et complétant ses dispositions, ne fait pas obstacle à la compétence du maire, au titre de ses pouvoirs de police administrative générale au sens des articles L. 2212-1 et L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales, pour adopter des mesures plus protectrices de la santé publique que celles adoptées sur l'ensemble du territoire national, dès lors qu'elles sont nécessaires au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques dans sa commune et justifiées par des circonstances locales particulières.

« Si, dans le cadre de la réouverture des établissements recevant du public, des établissements d'accueil des enfants, des établissements d'enseignement scolaire pour les classes maternelles et élémentaires et des services dont il a la responsabilité, les moyens matériels et humains dont dispose la commune sont insuffisants ou inadaptés pour pouvoir assurer la protection de la santé publique, faire respecter les règles de sécurité sanitaire et de distanciation sociale, le maire peut décider de refuser ou de reporter leur réouverture. »

M. Olivier Paccaud.  - Cet amendement de M. Reichardt ressemble comme deux gouttes d'eau à celui de Mme Gatel. Il donne au maire le pouvoir de fermer les écoles. À ceux qui arguaient que l'ouverture des écoles était essentielle aux enfants en situation difficile, je dirai qu'il ne faudrait pas réserver aux maires ouvrant les écoles le monopole du coeur.

Je salue le pragmatisme et la souplesse du préfet de l'Oise, qui se montre compréhensif avec les maires qui ne rouvrent pas les écoles.

Le maire de Laboissière-en-Thelle a écrit aux parents d'élèves pour dire qu'il ne rouvrirait pas, invoquant un devoir de protection de ses administrés. Certes, il ne faut pas rouvrir une boîte de Pandore, mais il faut écouter la voix des maires.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Nous avons eu un long débat sur de tels amendements et le Sénat a tranché. Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis.

M. Alain Richard.  - Comme le disait Olivier Paccaud, il y a une défectuosité dans le code de l'éducation. Le code part de l'hypothèse que les écoles fonctionnent tout le temps et que personne n'a à prendre de décision sur leur ouverture ou leur fermeture. Or l'article L.411-1 décrit la situation de fonctionnement des établissements scolaires mais ne statue pas sur l'hypothèse d'une réouverture des écoles. On a déduit de cet article que le pouvoir de décision revenait aux directeurs d'école, mais les choses seraient plus rigoureuses si le texte était explicite.

M. Max Brisson.  - Le débat parlementaire fait évoluer les positions. Ces débats donnent tout son sens au travail que je co-anime avec Françoise Laborde sur le rôle des directeurs d'école. Le code de l'éducation trouve ici ses limites et il faut toute la finesse du président de la commission des lois pour interpréter, en s'appuyant sur la jurisprudence, cet article L. 411-1, qui mériterait d'être revu, afin de conforter et préciser le rôle des directeurs d'école.

L'amendement n°43 rectifié est retiré.

L'article 3, modifié, est adopté.

ARTICLE 3 BIS

M. le président.  - Amendement n°197, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois.

Alinéas 3, 5 et 7

Après la référence :

insérer la référence :

du I

L'amendement de coordination n°197, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 3 bis, modifié, est adopté.

ARTICLE 4

M. le président.  - Amendement n°122, présenté par M. Leconte et les membres du groupe socialiste et républicain.

Supprimer cet article.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Notre amendement supprime l'article 4 qui exclut les mesures administratives individuelles de quarantaine et d'isolement des procédures de référés d'urgence, référé-suspension et référé-liberté.

C'est une curiosité ! Pourquoi ne pourrait-on pas saisir un juge ? Soit, comme le prévoit l'article 3, seul le juge des libertés et de la détention est compétent et l'article 4 n'a pas de raison d'être ; soit le juge administratif peut se prononcer et il n'y a pas de raison de limiter les procédures. Dans les deux cas, cet article doit être supprimé.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°122 n'est pas adopté.

L'article 4 est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°77, présenté par M. Daudigny et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la troisième phrase de l'article L. 3131-19 du code de la santé publique, après la seconde occurrence des mots : « personnalités qualifiées », sont insérés les mots : « et un représentant de l'Union nationale des associations agréées d'usagers du système de santé mentionnée à l'article L. 1114-6 ».

Mme Laurence Rossignol.  - Cet amendement a été élaboré par M. Daudigny. Il élargit la composition du Comité scientifique Covid-19 à un représentant des usagers du système de santé.

Cet amendement pose la question de la démocratie sanitaire en période de crise. La démocratie parlementaire ne fonctionne pas comme d'habitude, ni comme elle le devrait. Nous constatons la chape qui pèse sur elle. Cependant, elle ne résume pas toute la démocratie.

Il existe aussi une démocratie qui vient des usagers, des corps intermédiaires et des associations. La loi du 23 mars a mis en place un comité scientifique composé de scientifiques et de personnalités qualifiées. Si nous choisissons la responsabilisation au lieu de la coercition, il faut aussi inclure les usagers du système de santé au sein de cette instance.

Les corps intermédiaires ne doivent pas être tenus à l'écart des décisions. La démocratie sanitaire, ce n'est pas seulement les médecins, les scientifiques et les pouvoirs publics.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable. Le Sénat s'est prononcé il y a cinq semaines sur la composition du Conseil scientifique. Il pourrait bien sûr se déjuger, mais je crois que cette instance doit rester un comité d'experts qualifiés conseillant le Gouvernement. Cela ne dispense pas ce dernier d'être en dialogue avec les usagers, bien au contraire.

M. Olivier Véran, ministre.  - La loi du 4 mars 2002, que nous devons à Bernard Kouchner, a ancré la France dans la démocratie sanitaire. Les associations d'usagers se sont ensuite structurées, ce dont je me félicite. Je les rencontre très régulièrement, je les consulte en continu, mais hors du cadre du Conseil scientifique dont la mission est de donner un avis scientifique éclairé par des études internationales.

Le professeur Delfraissy a estimé nécessaire de réunir les représentants des usagers dans un organe consultatif. Je lui ai demandé d'élaborer une proposition concrète. La démocratie sanitaire se développe et fonctionne très bien dans certains territoires, tandis que d'autres sont encore frileux. Nous referons le point sur ce sujet. Avis défavorable.

L'amendement n°77 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°47, présenté par M. Devinaz, Mmes de la Gontrie et Guillemot, M. Todeschini, Mme G. Jourda et M. Vaugrenard.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après la troisième phrase de l'article L. 3131-19 du code de la santé publique, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Les membres du comité scientifique covid-19 et du comité analyse recherche et expertise sont désignés selon les modalités de nomination prévues au cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution. »

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Le Conseil scientifique a pris depuis quelques semaines une place considérable dans notre vie publique et il a même donné parfois l'impression d'imposer ses décisions. Or le mode de nomination de ses membres n'est pas connu. Nous souhaitons plus de transparence, comme le prône également la Commission nationale consultative des droits de l'homme.

Le président Bas dira peut-être que puisque nous en avons décidé le 23 mars, il n'y a pas lieu d'y revenir ? Mais la question est loin d'être anecdotique. Le Parlement doit jouer un rôle plus important dans ces désignations, dont la transparence importe aussi, car les intéressés guident les décisions qui sont prises en cette période.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - N'est-ce pas un abus de langage que de parler de démocratie sanitaire quand il s'agit de représentants d'associations, des personnes qui ne doivent pas leurs fonctions à une élection ni à une assise populaire ? Je comprends bien sûr l'utilité de consulter toutes les personnes qui ont des choses à dire, mais de grâce, ne parlons pas de démocratie alors que l'essence de celle-ci est le suffrage universel.

Par conséquent, la réponse est la même que précédemment. Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°47 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°78 rectifié, présenté par M. Daudigny et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 3131-19 du code de la santé publique est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Il est réuni sans délai une conférence de citoyens choisis de manière à représenter la société dans sa diversité. Sa composition et sa nomination sont fixées par décret. Après avoir reçus une formation préalable, ses membres débattent et rédigent périodiquement un avis ainsi que des recommandations qui sont rendus publics sans délai. Les experts participant à la formation des citoyens et aux débats de cette conférence sont choisis en fonction de critères d'indépendance, de pluralisme et de pluridisciplinarité.

« Les citoyens membres de cette conférence et les experts qui les forment ne sont ni rémunérés, ni défrayés. »

Mme Laurence Rossignol.  - Le professeur Delfraissy a eu un propos très fort concernant la confiance des citoyens à reconquérir. Il a publiquement regretté la lenteur de la mise en place de la Conférence des citoyens. Là encore, la démocratie, ça s'organise.

Les tête-à-tête et les consultations des acteurs au téléphone, ce n'est pas de la démocratie. Le Parlement n'est pas consulté parce que les présidents des groupes politiques sont appelés au téléphone ! Il en va de même pour les associations. Il faut se réunir, parler, afin de créer une dynamique.

Certes, certains de nos amendements corrigent nos votes du 23 mars, et je m'en excuse auprès de M. Bas, mais nous légiférons dans l'urgence, ce qui explique qu'il faille y revenir.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°78 rectifié n'est pas adopté.

L'article 4 bis est adopté.

ARTICLE 5

Mme Esther Benbassa .  - Alors que l'État français disposait de 723 millions de masques FFP2 en 2009, seuls 80 millions d'entre eux étaient encore utilisables en janvier 2020. Nombre de responsables politiques s'appliquent depuis des années à démanteler notre système de santé. La France globalisée a abandonné son indépendance sanitaire à des puissances étrangères comme la Chine.

Il est désormais reconnu que le port du masque est essentiel à la lutte contre la propagation du virus - contrairement à ce que vous disiez au début. Vous vous êtes heureusement décidé à le rendre obligatoire dans les transports.

Votre orientation libérale est illustrée une fois de plus par votre choix de laisser le privé à la manoeuvre, alors que cela aurait pu être l'occasion d'une grande politique industrielle nationale. Dans les jours à venir, 500 millions de masques inonderont des grandes surfaces et les pharmacies. Où étaient-ils quand nos soignants en avaient besoin ? Allez-vous en plafonner le prix, pour les rendre abordables pour tous ?

Décidément, le nouveau monde n'a rien appris des erreurs de l'ancien.

M. le président.  - Amendement n°169, présenté par M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Avant l'alinéa 1

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

....- Après le troisième alinéa de l'article L. 3136-1 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« S'agissant des obligations prévues par le 1° de l'article L. 3131-15 du présent code relatives aux transports publics, il ne peut être dressé de contravention pour non-port de masque, que si la fourniture de masques gratuits est assurée par les régies de transports mentionnées à l'article L. 1221-7 du code des transports. »

Mme Laurence Cohen.  - Désormais, il est obligatoire de porter un masque dans les transports, et c'est une bonne chose. Encore faut-il pouvoir s'en procurer. Sanctionner les personnes qui ne portent pas de masques serait injustifié s'il leur était impossible de s'en procurer. Dans les grandes métropoles, notamment en Île-de-France, il est très difficile d'en trouver.

Les responsables des transports en commun, la SNCF, la RATP appellent au secours : ils craignent des bousculades voire des émeutes quand les trains et les rames recommenceront à circuler. Ils redoutent une distanciation impossible... et l'impossibilité de trouver des masques.

Aujourd'hui, rien ne certifie que les passagers pourront bénéficier d'une distribution de masques dans leur gare de départ. Il faut sanctionner ceux qui refusent de porter un masque mais pas ceux qui n'en ont pas trouvé. Il y a une défaillance dans l'acheminement des masques. Nous le savons tous, quels que soient nos territoires. Nous sommes alertés chaque jour par des professionnels de santé.

Pour nous, le masque doit être gratuit et pris en charge à 100 % par la sécurité sociale.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis.

Mme Catherine Deroche.  - Je suivrai le rapporteur. Néanmoins, j'ai été alertée ce matin par un médecin du 94 ayant reçu des masques chirurgicaux inutilisables, car trop petits et pas étanches. Or ces masques avaient été fournis par les ARS aux pharmacies. J'espère que les masques vendus par la grande distribution seront, eux, de qualité...

Les soignants sont largement touchés, certains sont décédés. Le président Milon citait le cas d'un hôpital psychiatrique de Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA) dont les masques étaient périmés. Une commande a été effectuée en Chine, mais elle est bloquée à l'aéroport.

M. Olivier Véran, ministre.  - Les masques commandés par l'État sont conformes aux normes sanitaires et testés par les autorités de santé dans les aéroports. Parfois, ils sont périmés de quelques mois, mais ils restent efficaces.

Madame Deroche, gardons-nous des petites phrases... Les masques de la grande distribution sont les mêmes que ceux de l'État, car ils sont commandés auprès des mêmes fabricants et livrés par les mêmes avions.

Certes, sur 400 millions de masques, quelques-uns peuvent être défectueux, et je suis le premier à le regretter.

Quelque 70 millions de masques ont été déstockés la semaine dernière. C'est désormais 100 millions par semaine, ce qui permettra d'en fournir à tous les professionnels et de commencer à en donner aux personnes vulnérables. Ils pourront aussi être fournis sur ordonnance aux malades et aux plus fragiles. L'offre correspond désormais à la demande.

Depuis mon arrivée aux commandes au début de cette crise, j'ai eu un discours de vérité sur la difficulté à fournir les soignants.

La bibliothèque du ministère a été transformée en cellule de crise : sept jours sur sept, nuit et jour, des bénévoles travaillent pour améliorer la situation.

Mme Laurence Cohen.  - Vous n'avez pas répondu sur la différence entre ceux qui ne parviennent pas à se procurer de masques et ceux qui ne veulent pas en porter.

Monsieur le ministre, je ne doute nullement de votre engagement personnel et de votre mobilisation pendant cette crise, mais je critique les décisions prises par ce Gouvernement et je regrette qu'il n'écoute pas les élus qui l'alertent sur les dysfonctionnements.

Le Val-de-Marne est mon département. Une pharmacienne de Gentilly m'a dit samedi dernier avoir été informée par son fournisseur qu'elle ne recevrait pas les masques le 18 mai comme promis. Je n'ai pas trouvé un seul masque dans les pharmacies de ma ville. C'est du vécu ! Je devrai donc venir au Sénat à vélo, tant mieux car c'est du sport, ou en voiture, ce qui est mauvais pour l'environnement. Il est inadmissible que les grandes surfaces vendent des masques alors que des patients ne peuvent suivre leurs séances de psychothérapie faute de matériel de protection.

M. Vincent Segouin.  - Le ministre vient de dire que certains masques périmés sont pourtant testés conformes.

On en a donc sans doute jeté certains qui étaient encore bons, alors que nous en manquions... Il faudra tirer des leçons de cet épisode.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales, rapporteur pour avis.  - Considérez mes propos comme constructifs : je préside la Fédération hospitalière de France (FHF) PACA, or j'ai reçu ce matin une lettre du directeur d'un hôpital psychiatrique de PACA. Il m'explique qu'il a commandé le 6 avril des masques FFP2 en Chine. Or ce pays ne livre plus que des produits à la norme GB26-26, qui correspondrait cependant à la norme CE. Les masques sont à présent bloqués par les services des douanes, précisément la cellule Covid-19 à Roissy, qui exige une revalidation par un laboratoire français...

Alors que la pénurie persiste dans les hôpitaux, au point qu'ils ne peuvent rouvrir certaines structures, il est intolérable de constater que les masques sont en vente libre dans la grande distribution ! (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains ; Mmes Laurence Cohen et Esther Benbassa applaudissent également.)

M. Max Brisson.  - Je souhaite également citer un courrier que j'ai reçu du président du conseil départemental de l'ordre des chirurgiens-dentistes : il m'indique que les masques FFP2 ne seront pas disponibles avant lundi, car les pharmacies sont obligées d'attendre les instructions ministérielles de délivrance. Seuls quatre masques par praticien leur seront distribués. Si cela n'est pas du rationnement, cela y ressemble fort !

M. Michel Vaspart.  - Le dirigeant de Lidl expliquait hier matin, dans une émission de Pascal Praud sur RTL, qu'il avait depuis le mois de mars passé des commandes de masques avec l'autorisation du Gouvernement, car il a besoin de 500 000 masques par mois pour la protection de ses salariés ; il précisait qu'il en avait acheté bien plus. Cela signifie qu'il constituait des stocks en prévision du 11 mai.

Si les grandes enseignes ont procédé pareillement, alors que les soignants manquaient de masques, cela pose question. (M. Antoine Lefèvre et Mme Laurence Cohen applaudissent.)

M. Marc Laménie.  - Des problèmes se poseront dès le 11 mai pour les usagers des transports en commun. Je suivrai la position du rapporteur, mais cet amendement a le mérite de nous alerter.

Beaucoup de couturiers bénévoles se sont dévoués et ont fabriqué des masques mais le problème demeure.

Les inquiétudes sont légitimes, notamment dans la fonction publique, comme parmi nos concitoyens. Les pharmacies ne sont pas toutes équipées.

M. Olivier Henno.  - Masques en tissu, masques chirurgicaux : la situation se régule progressivement. En revanche, le problème des masques FFP2 demeure, pour les professions les plus exposées comme les dentistes. Le président du conseil départemental du Nord nous a alertés sur ce problème. La pénurie doit être traitée en toute urgence, car les dentistes sont classés à risque à 98 sur une échelle de 100.

M. Olivier Véran, ministre.  - Je vois qu'il est encore nécessaire de revenir sur la question. Il y a deux moments clés dans la gestion des masques.

D'abord, explosion de la demande de 5 millions à 100 millions d'unités par semaine et effondrement de la production avec la fermeture des usines à l'échelle mondiale. La puissance publique a alors pris un décret de réquisition, elle a adopté un monitoring intelligent avec dispatching entre les territoires, de manière à éviter les stocks cachés, en appliquant une doctrine d'utilisation fonction du nombre de masques disponibles.

Habituellement, ce n'est pas l'État qui fournit les masques aux professionnels de santé de ville, je le rappelle. Or aucun professionnel de santé n'a pu se fournir par ses circuits traditionnels. D'où le pont aérien. L'État a pris ses responsabilités et assuré la réquisition. Il ne faut pas inverser les choses !

Depuis, la production a repris en Chine. Nous avons été les premiers à commander massivement et donc à être livrés - je passe sur les épisodes de western sur les tarmacs d'aéroport chinois... Dès lors, chacun pouvait participer à l'effort d'importation.

Madame Cohen, le fournisseur de votre pharmacienne n'est pas l'État mais un acteur privé. Depuis le début de la crise, les dentistes ont été exceptionnels. Ils ne pouvaient exercer et ont fermé leurs cabinets faute de masques. Mais ils ont assuré la permanence des soins aux urgences et dans 400 centres. Ils ont été irréprochables de bout en bout, et ils ont même donné des masques à l'hôpital. J'ai assuré que l'État donnerait à chaque dentiste 24 masques FFP2 par semaine à compter du 14 mai. Ensuite, ils achèteront leur matériel de protection via leurs fournisseurs habituels.

Les hôpitaux psychiatriques ont également fait un travail remarquable, dans des conditions difficiles. Monsieur Milon, si vous me donnez le nom de l'hôpital que vous avez évoqué, je verrai comment je peux l'aider.

Les réquisitions sont plus proches de la philosophie du groupe CRCE que de la mienne. Le nouveau monde ne change pas, n'entend pas ? « Dans tout l'univers, ne reste immuable que l'esprit » écrit Tchekhov dans La Mouette. Madame Benbassa, sachez aussi écouter mes arguments.

M. Bruno Retailleau.  - Monsieur le ministre, je ne serais pas intervenu si vous n'aviez pas justifié comme vous l'avez fait, posteriori, la pénurie de masques en France comme entièrement causée par la pénurie mondiale. Il n'y aurait pas eu de problème de stocks ? Vous n'auriez pas pris des décisions qui ont eu des conséquences ?

Ces 600 millions de masques seront-ils disponibles lundi ou non ? Agnès Pannier-Runacher a donné les chiffres de production et d'importation. Le compte n'y est pas.

M. Salomon avait pourtant reçu une note en 2018 l'alertant sur la faiblesse des stocks. On nous avait annoncé en février des centaines de millions de commandes, on ne les a jamais vues. L'État a été incapable de commander ! Nous avons insisté, et c'est à force de lutter au Sénat que vous avez plié : les collectivités territoriales ont pu commander 5 millions de masques, que l'État a ensuite réquisitionnés.

Ne dites pas que tout a été fait en temps voulu car ce n'est pas vrai ! C'est du storytelling mais il nuit à la crédibilité de la parole gouvernementale.

M. Olivier Véran, ministre.  - La question des masques n'est ni de droite ni de gauche ni en marche. Je suis factuel.

Citez-moi un pays qui a été capable de communiquer sur le nombre de masques dont il disposait.

M. Bruno Retailleau.  - Mais vous avez annoncé de fausses quantités !

M. Olivier Véran, ministre.  - Vous portez des accusations ; il ne s'agit plus de débat. Le stock dont nous disposions était alors de 117 millions de masques chirurgicaux adultes. Il sera temps d'en reparler lorsque vous aurez constitué une commission d'enquête, mais les accusations que vous portez pourront aussi être évoquées...

Je conçois que la réquisition ait pu avoir des externalités négatives. Des responsables de collectivités territoriales m'ont communiqué leurs difficultés, car les canaux habituels étaient asséchés.

Vous dites que les collectivités locales ne pouvaient participer aux commandes...

M. Bruno Retailleau.  - Pas avant le décret du 23 mars, pris sur notre insistance !

M. Olivier Véran, ministre.  - Les élus nous alertaient, car ils avaient passé commande et payé, mais les livraisons tardaient. Mon collègue Djebbari s'est ingénié à trouver des solutions d'acheminement, souvent fondées sur le système D...

Tout le monde, depuis le début, a fait le maximum. Vous avez le droit de critiquer la façon dont nous avons agi, mais je m'appuie sur des chiffres et des faits. Dire que nous aurions menti, travesti les faits, cela va plus loin que de mettre en question l'efficacité de notre action. Vous dites que nous avons menti : c'est faux ! (M. Martin Lévrier applaudit.)

L'amendement n°169 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°211, présenté par le Gouvernement.

Au début

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

....  -  Après le quatrième alinéa de l'article L. 3136-1 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les agents mentionnés aux 1°, 1° bis et 1° ter de l'article 21 du code de procédure pénale peuvent constater par procès-verbaux les contraventions prévues au troisième alinéa du présent article lorsqu'elles ne nécessitent pas de leur part d'actes d'enquêtes. » ;

M. Olivier Véran, ministre.  - Cet amendement ajoute les agents de police judiciaire adjoints dans la liste des personnes pouvant contrôler le respect des mesures liées à l'état d'urgence sanitaire, et dresser des contraventions.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Le Gouvernement souhaite rétablir son texte, c'est normal. Avis défavorable. Le comité de suivi de la commission des lois s'est aperçu des difficultés d'application du contrôle du confinement. Ici, on vérifie le contenu d'un caddie, là on demande un ticket de caisse, ailleurs on reproche d'être allé acheter son pain à vélo plutôt qu'en voiture. Il faut du discernement dans l'interprétation des mesures, et c'est déjà compliqué pour ceux qui ont l'habitude de verbaliser.

Si l'on investit de cette mission des agents dont ce n'est pas le métier de verbaliser, le manque d'harmonie sera encore plus fort. La seule exception, que nous avons acceptée, concerne les agents verbalisateurs du chemin de fer et de la RATP, ils sont rompus à cet exercice.

Nous l'avons en revanche refusé à de nouvelles catégories comme les gendarmes réservistes et les gendarmes adjoints en formation.

J'ajoute que les occasions de verbalisation vont naturellement refluer avec la fin du confinement, qui a conduit à l'établissement de quelque 900 000 procès-verbaux.

Cette demande du Gouvernement est à contre-courant. Avis défavorable.

M. Alain Richard.  - Les arguments du président Bas sont importants mais le personnel dont on parle a une connaissance du droit pénal. Les contrôles dans les transports en commun devront en outre être accrus, et pas seulement dans le métro parisien.

Les autres fonctions de la police et de la gendarmerie vont reprendre et il faudra redéployer les effectifs. Comme après la période des attentats, ils devront également prendre quelque repos. N'en faisons pas un point de blocage en commission mixte paritaire.

L'amendement n°211 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°155, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

Mme Laurence Cohen.  - Cet article habilite un certain nombre d'agents à exercer des contrôles dans les transports publics : il est incroyable que les organisations syndicales du secteur n'aient pas été consultées ! Comment réussir sans dialogue social ?

Cet article n'est ni souhaitable ni nécessaire. Quelque 17 000, voire 20 000 agents seront mobilisés pour les règles de distanciation, l'accueil des voyageurs, la régulation des flux... voire la distribution gratuite de masques ?

Les agents des transports auront déjà fort à faire pour faire respecter la distanciation sociale, voire, ce qui serait souhaitable, distribuer des masques.

Monsieur le ministre, notez que nous avons des propositions. Considérez-les.

M. le président.  - Amendement n°212, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 2

Remplacer les mots :

aux 4° et 5°

par les mots :

aux 4°, 5° et 7°

M. Olivier Véran, ministre.  - Je crains que mon amendement ne connaisse le même sort que le précédent. Monsieur le président Bas, j'ai donné un avis favorable à beaucoup de vos amendements, mais vous ne m'avez pas rendu la pareille ! (On feint de s'en désoler sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mais qui ne tente rien n'a rien, comme disait ma grand-mère. (Sourires) Cet amendement rétablit la possibilité pour les agents chargés des gares de la SNCF de procéder à des contrôles.

M. le président.  - Amendement n°198, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois.

I. - Alinéa 2

Après la référence:

insérer la référence :

du I

II. - Alinéa 3

Après la référence :

10°

insérer la référence :

du I

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Coordination.

M. le président.  - Amendement n°89, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Les agents mentionnés aux 4° et 5° du I de l'article L. 2241-1 du code des transports ne peuvent verbaliser ou appréhender une personne sans que leur référentiel des identités de l'organisation ne puisse être clairement visible et consultable par l'usager dès le début de l'opération de contrôle et ce, jusqu'à la fin de cette dernière.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Cet amendement rappelle l'obligation édictée par article R434-15 du code de sécurité intérieure : les membres des forces de l'ordre, à de très rares exceptions, doivent porter un numéro d'identification sur leur uniforme.

Je suis inquiet après les propos du Premier ministre qui dit avoir pris connaissance par la presse de la lettre des dirigeants des entreprises de transports publics. À quelques jours du 11 mai, comment savoir ce qui se passera lorsque des centaines de passagers se retrouveront à une bouche de métro et que seul un dixième pourra rentrer ?

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Défavorable à l'amendement n°155 car les agents assermentés des chemins de fer et de la RATP sauront verbaliser en cas d'infraction aux règles sanitaires.

Avis défavorable également à l'amendement n°212 qui rétablit le texte du Gouvernement.

Chacun sait la haute idée que M. Sueur se fait du travail parlementaire et du rôle de la loi. Son amendement n°89, qui rappelle une obligation réglementaire, ne semble pas à la hauteur de cette exigence. Pourriez-vous le retirer, si le Gouvernement s'engage à prendre une circulaire ?

M. Olivier Véran, ministre.  - Avis favorable à l'amendement n°198, défavorable aux amendements nos155 et 89.

J'entends les interrogations de M. Sueur et les relaierai auprès de Jean-Baptiste Djebbari.

L'amendement n°155 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°212.

L'amendement n°198 est adopté.

L'amendement n°89 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°64, présenté par Mme Benbassa et M. Gontard.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« Les procès-verbaux et contraventions ne peuvent être dressés par les agents susmentionnés que si les conditions matérielles des mesures édictées en application du 1° de l'article L. 3131-15 du présent code sont réunies. »

Mme Esther Benbassa.  - L'article 5 prévoit que les agents de la SNCF et de la RATP pourront verbaliser les voyageurs ne portant pas de masques. Nous comprenons l'utilité sanitaire de la mesure, mais les Français ne sont pas des mineurs. Leur sens du civisme aurait dû suffire ! Mais l'heure n'est pas à la polémique... Il serait toutefois injuste de pénaliser nos concitoyens alors que l'État est le principal responsable de la pénurie de masques.

Cet amendement limite la verbalisation aux situations où l'application des normes est matériellement possible. Les voyageurs doivent pouvoir obtenir un masque facilement, voire gratuitement pour les précaires.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°64 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°213, présenté par le Gouvernement.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« Les personnes mentionnées au 11° de l'article L. 5222-1 du code des transports peuvent également constater par procès-verbaux les contraventions prévues au troisième alinéa du présent article consistant en la violation des interdictions ou obligations édictées en application des dispositions du 1° de l'article L. 3131-1 en matière de transport maritime lorsqu'elles sont commises par un passager à bord d'un navire. »

M. Olivier Véran, ministre.  - Cet amendement rétablit la possibilité pour les capitaines de navire de procéder à des contrôles pour lutter contre la diffusion épidémique.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Le Gouvernement ne doute de rien : nous avons reçu cet amendement il y a trente minutes ! Cela étant dit, la mesure ne paraît pas déraisonnable : j'émets, à titre personnel, un avis favorable, en espérant que la navette ne me réservera pas de mauvaises surprises.

L'amendement n°213 est adopté.

L'article 5, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°36 rectifié, présenté par M. Kerrouche, Mme Lubin, MM. Marie, Durain et Montaugé, Mme Lepage, M. P. Joly, Mme Meunier, MM. Vaugrenard et Houllegatte, Mme Préville, M. Lurel, Mmes Harribey, Féret et Ghali, MM. Tissot, Courteau et Fichet et Mmes Blondin, G. Jourda, Conway-Mouret, S. Robert et Conconne.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 2213-23 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque l'état d'urgence sanitaire prévu par l'article L. 3131-15 du code de la santé publique est déclaré, sous réserve de la validation d'un protocole incluant des moyens de surveillance et de contrôle, défini et validé conjointement par le maire et le représentant de l'État territorialement compétent, l'accès aux plages du littoral et aux plans d'eau intérieurs peut être autorisé aux fins exclusives de pratiques sportives dynamiques ou de pleine nature, par dérogation au 1° du même article L. 3131-15. »

Mme Sylvie Robert.  - Dans le cadre du déconfinement progressif, les activités sportives dites de pleine nature seront de nouveau autorisées. Mais l'accès aux plages et aux plans d'eau intérieurs reste interdit, ce qui empêchera de facto la pratique d'activités sportives, aquatiques ou terrestres, pourtant moins risquées que le sport en salle...

Leur autorisation, dans un cadre raisonné, permettrait une réappropriation progressive de l'accès aux plages.

L'objectif est d'ouvrir l'accès aux plages avec discernement. Les maires connaissent bien la typologie de leurs plages et les habitudes de leurs concitoyens. Redonnons un peu de vie à nos territoires : nos plages sont vos parcs !

M. le président.  - Amendement n°175, présenté par Mmes Billon et Loisier et M. L. Hervé.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dès la publication de la présente loi, un décret définit les conditions dans lesquelles les plages et les forêts sont ouvertes au public pour la pratique d'une activité sportive individuelle, par dérogation aux mesures prises dans le cadre du 1° de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique.

M. Loïc Hervé.  - Plages et forêts sont assez grandes pour ne pas constituer des lieux de regroupement. Les familles peuvent s'y rendre, s'y promener, y pratiquer des activités sportives : il est important de les rouvrir rapidement afin de retrouver une vie aussi normale que possible. Psychologiquement, cela aiderait à supporter les contraintes qui demeurent !

Les Français ne comprennent pas que les supermarchés restent ouverts alors que les grands espaces sont interdits.

Un dialogue entre le maire et le préfet pourrait ici être fructueux.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Ces amendements portent sur la liberté de circulation. L'interdiction générale et absolue d'accès aux plages est plus difficile à justifier en période de déconfinement. Une telle limitation du droit d'aller et venir n'est-elle pas disproportionnée par rapport à l'objectif poursuivi ?

Nos plages sont diverses. Il y en a de petites et de grandes ; certaines sont à la ville, d'autres à la campagne, comme les 365 kilomètres de plage du Cotentin, où l'on voit plus d'ânes du Cotentin, de goélands et de chevaux que de promeneurs, et où les risques de contamination semblent maîtrisés. Il y a les plages où on se tient debout et celles où l'on privilégie la position horizontale...

Il serait prudent que le Gouvernement revoie sa position et rende les plages accessibles, sauf exception, limitée dans le temps, lorsqu'il est impossible d'éviter la promiscuité.

Le Sénat pourrait fort bien adopter ces amendements.

M. Ladislas Poniatowski.  - Très bien !

M. Olivier Véran, ministre.  - Avis défavorable sur le fond, mais demande de retrait car l'amendement est satisfait sur la forme. Cela relève du décret du Premier ministre et n'a pas à figurer dans la loi.

Le problème n'est pas la possibilité de respecter la distanciation physique sur la plage - je ne doute pas que les maires sauraient le faire - mais d'éviter l'afflux de touristes.

Je comprends le maire du Calvados avec qui je dialoguais la semaine dernière sur un plateau télévisé. Il soulignait combien ses plages étaient consubstantielles à l'activité touristique de sa commune : en les fermant, on tue le tourisme qui, aux beaux jours, fait vivre les crêperies, les loueurs de vélo... Mais c'est bien pour cela que laisser les plages ouvertes provoquera des mouvements de population. L'été, la population de la commune en question passe de 2 200 à 20 000 habitants, qui vont disséminer le virus un peu partout. Faire repartir le tourisme, c'est formidable pour l'économie... et pour le virus. Nous vous demandons encore un délai, un effort, avant de pouvoir - comme j'y aspire moi aussi - marcher les pieds dans l'eau et se dorer au soleil.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Je précise que ma préférence va à l'amendement n°175 car il renvoie à un décret les conditions de fermeture par exception.

Mme Catherine Morin-Desailly.  - En Normandie, nous avons 600 kilomètres de côtes - je ne pouvais pas ne pas citer celles de Seine-Maritime ! Si l'on rouvre les parcs, pourquoi pas les plages ? D'autant qu'à marée basse, elles sont immenses et laissent largement la place de s'égailler !

Je voterai donc l'amendement n°175. Le président de la région Normandie, soutenu par de nombreux maires, a d'ailleurs écrit au président de la République pour réclamer une réouverture des plages.

Mme Françoise Gatel.  - La France est riche de ses territoires et de son littoral. En Bretagne, on peut se tenir debout, allongé, mais aussi courbé sur la plage pour pêcher les bigorneaux ou les crabes. (Sourires)

À Ouessant, pour aller chez son voisin, il faut parfois traverser une plage et marcher les pieds dans l'eau : cela fait partie de la qualité de vie, de l'art de vivre. Preuve que le sujet ne saurait être traité depuis Paris ! Il y a de grandes différences d'usage et de fréquentation entre les plages du Nord, de l'Ouest et du Sud.

Le maire et le préfet pourraient établir des protocoles d'accès pour les plages comme ils l'ont fait pour les marchés. La plage est le jardin de certains.

M. Ladislas Poniatowski.  - Je vais voter l'amendement de M. Hervé qui, en prévoyant un décret, vous laisse la main, monsieur le ministre.

Le 11 mai, vous allez autoriser beaucoup d'activités dangereuses, notamment dans les écoles et, surtout, les transports publics. Si le Covid-19 revient, ce sera par-là ! Il est logique d'interdire l'accès aux plages très fréquentées où les serviettes se touchent, mais pas la pratique de sports individuels en forêt ou sur l'eau. Ouvrir des portes pour en fermer d'autres serait une erreur psychologique profonde. L'un de ces deux amendements sera voté ; j'espère que vous changerez de position d'ici le passage à l'Assemblée nationale.

M. Patrick Kanner.  - La patience pèse sur la situation psychique de nos concitoyens. Ma région compte trois départements côtiers, le Nord, le Pas-de-Calais et la Somme, avec de très belles et grandes plages, où la distanciation sociale est aisée. Il faut faire confiance aux Français. Dans les Hauts-de-France, 4 millions de personnes habitent à moins de cent kilomètres d'une plage. Donnez-leur l'espoir de reprendre un semblant de vie normale ! La liberté n'est pas incompatible avec la sécurité sanitaire.

M. Michel Vaspart.  - Je voterai l'amendement n°175. Nous sommes plusieurs élus à avoir adressé au Premier ministre, avec M. Castaner et Mme Gourault en copie, un courrier dans le même sens. Les plages de la Manche et de l'Atlantique sont des espaces immenses et, puisqu'une limite de cent kilomètres sera fixée aux déplacements, leur réouverture concernera surtout la population locale. Les plages sont les parcs de la Bretagne, de la Vendée et de la Normandie.

Qui plus est, le risque de propagation est limité car les départements littoraux sont tous en vert.

M. le président.  - Mayotte ne l'est pas.

Mme Sylvie Robert.  - Notre amendement a pour objet d'ouvrir les plages à la pratique sportive, pas d'autoriser tout le monde à aller faire bronzette. Pourquoi autoriser le judo, comme la ministre des sports l'a annoncé, et pas la planche à voile ou le surf ?

Nous prônons un dialogue de confiance entre le maire et le préfet plutôt qu'un décret. Il faut faire confiance au maire, qui connaît ses plages et les activités qui y sont pratiquées.

Dans ma région comme dans d'autres, une ouverture progressive faciliterait une réappropriation du littoral et ferait beaucoup de bien.

M. Alain Milon, rapporteur pour avis.  - Dans ma région, les plages sont petites, et la position allongée y est plus fréquente... Les 4,5 millions de Provençaux vont s'y agglutiner, comme à Nice ou à Mougins, et remettre en route le virus. Déjà, hier, l'avenue Masséna était bondée. Imaginez qu'une personne ait été porteuse du virus : trois, quatre cents personnes peuvent l'être aujourd'hui, en grossissant à peine le trait.

Nous sommes encore en période d'épidémie. Ceux qui ont soigné les malades du virus, comme Mme Guillotin, en connaissent la dangerosité. Mme Catherine Lemorton, ancienne présidente de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, qui a depuis repris son activité médicale, m'écrivait ce matin encore que ce virus est, si vous me passez l'expression, « une véritable saloperie ».

Je ne suis donc pas favorable à la réouverture des plages par décret. Dès qu'un décret paraîtra, même si c'est pour fixer la réouverture au 14 juillet, les foules vont s'y précipiter. La vie de nos concitoyens est plus importante que l'économie.

Je sais, monsieur Kanner, que les Français en ont assez du confinement. Nous rêvons de retourner à la plage ; moi le premier, qui pratique la plongée. Mais ne faisons pas en sorte que ce rêve ne se change en cauchemar. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains ; Mme Esther Benbassa applaudit également.)

M. Max Brisson.  - L'eau est froide mais je vais m'y risquer... Il y a des plages des villes et des plages de la campagne. Au Pays basque, les surfeurs rêvent de pouvoir revenir sur les plages ; les hôteliers me disent que les fêtes, les plages, font partie de la culture basque.

Mais la côte basque, c'est 25 kilomètres. Les maires concernés ne veulent pas d'une réouverture, qui créerait un appel d'air. Eux qui ont vu les images de Saint-Sébastien ce week-end - la plage de la Concha noire de monde - ne croient pas au respect de la règle des cent kilomètres et des distanciations sociales.

Le combat contre l'épidémie n'est pas terminé. J'aurais du mal à comprendre que l'on puisse aller faire du surf, mais pas aller à la messe ou pratiquer un autre culte. Cela ne correspond pas à l'échelle des valeurs de notre société. Les plaisirs devront attendre un peu.

M. Alain Richard.  - Le Gouvernement prendra position sur la question des déplacements régionaux le 2 juin. Nous ne savons pas à quelle vitesse circulera le virus à cette date. Je serais étonné que le Gouvernement prenne un risque : ouvrir la fréquentation des lieux de vacances, des plages et des sentiers de montagne aux locaux, cela enverrait le signal qu'ils sont ouverts à tous.

Mme Frédérique Espagnac.  - Après sept semaines de déconfinement, les Français souhaitent naturellement revoir la mer ; certains l'ont sous leurs fenêtres... Les signataires de l'amendement viennent des territoires les moins touchés par l'épidémie : Bretagne, littoral atlantique, Manche, Aquitaine, Sud-Est également. Je comprends la démarche.

Cependant, en Australie, les plages dites dynamiques ont été ouvertes, puis fermées à nouveau après deux semaines. Idem en Californie. Certes, il y a des enjeux économiques, psychologiques, touristiques importants ; mais allons-nous expérimenter une ouverture, incitant les restaurants, les hôtels à ouvrir et à embaucher, pour fermer à nouveau ? Évitons que nos départements en vert ne repassent en rouge.

M. le président.  - Veuillez conclure.

Mme Frédérique Espagnac.  - Je voterai donc contre ces amendements et en appelle à notre responsabilité.

M. Olivier Henno.  - La question est complexe et je suis sensible à l'argumentaire d'Alain Milon sur la gravité de la maladie.

Le déconfinement obéit à des impératifs sanitaires, économiques et sociaux, mais ce n'est pas un retour à la vie d'avant. La réouverture des plages serait un mauvais signal, même si quelques exceptions peuvent être envisagées.

M. Olivier Paccaud.  - Dans l'Oise, nous avons surtout des forêts. Si nous allons au bout du raisonnement d'Alain Milon, à qui son statut de médecin apporte une indéniable autorité, il ne faut pas déconfiner.

Pour être comprise par la population, la loi doit être simple et proportionnée. S'agissant des marchés, nous avons appliqué ce principe en ouvrant là où c'était possible. Nous pourrions le faire pour les forêts, d'autant plus si nous laissons la population s'entasser dans les supermarchés... Je voterai ces amendements.

M. Jérôme Durain.  - Le déconfinement nécessite de se poser la question des pratiques, et non des lieux. L'amendement n°36 rectifié prend en compte la notion de pratique dynamique. Ce n'est pas la même chose de marcher sur une grande plage ou au milieu de la forêt et d'expectorer ses miasmes sur ses voisins de plage.

Ne mettons pas en regard des activités très différentes. S'il est dangereux de se rendre dans un lieu de culte, il faut l'interdire. Le discernement local doit primer.

Il faut des soupapes : l'adhésion, évoquée par le Premier ministre, sera d'autant plus forte que nous aurons des respirations. Certains disent que Mme Merkel s'adresse à des adultes alors qu'en France, on infantilise. L'adhésion responsable est aussi importante que la force de la règle.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Je ne voterai pas ces amendements. Mon département du Val-d'Oise est parmi les plus touchés par l'épidémie. Moi aussi, je rêve d'horizons lointains mais nous vivons une période exceptionnelle.

En Île-de-France, nous prenons les transports en commun parce que nous y sommes obligés ; c'est la même chose pour les courses. Cette épidémie nous apprend qu'il y a des choses essentielles, et d'autres qu'il faudra remettre à plus tard.

Si nous autorisons l'accès aux plages, des milliers de personnes vont s'y précipiter et nous n'aurons pas les moyens de gérer ces foules. Le déconfinement doit être progressif, car rien ne serait pire qu'une deuxième vague.

M. Loïc Hervé.  - Le contenu de notre amendement a été quelque peu extrapolé. Le confinement présente une dimension d'acceptation psychologique et sociale, qui repose sur des espaces de respiration.

Nos propositions, territorialisées, sont raisonnables. Ainsi, nos voisins suisses n'ont pas imposé le confinement selon les mêmes modalités et au même moment que nous. Les restaurants vont rouvrir le 11 mai à Genève, qui se trouve dans le même bassin de vie qu'une partie de mon département. Un déconfinement en bon ordre implique une territorialisation : faisons confiance à l'intelligence des territoires.

M. Olivier Véran, ministre.  - Ce débat est intéressant et attendu, mais il n'est pas encore tranché à l'heure où je vous parle.

Cet amendement ne prévoit pas la réouverture des plages mais vise à ce qu'un décret l'autorise. Hormis le côté injonction qui pourrait mettre la pression, le Gouvernement peut décider demain par décret de rouvrir les plages. Il n'y a pas besoin d'un véhicule législatif. A partir du 2 juin, il pourra décider par décret de laisser les plages ou certaines d'entre elles libres d'accès.

Selon les chiffres fournis par Santé publique France, dans les dernières 24 heures, il y a 111 nouveaux patients admis en réanimation, 1 104 patients diagnostiqués par la méthode PCR, près de 1 000 nouveaux patients hospitalisés. Certes, la saturation des hôpitaux diminue, puisque nous comptons 266 lits de moins occupés en réanimation mais il y reste 6 400 patients tandis qu'il y a actuellement 24 775 malades hospitalisés pour Covid-19.

Tout cela montre que l'épidémie n'est pas terminée et que la levée du confinement ne signifie pas le retour à la vie d'avant. Les conditions fixées ne l'ont pas été au doigt mouillé. Il ne pourra pas y avoir de rassemblements de plus de dix personnes ; il n'y aura pas de mariages festifs en mai, et peut-être pas en juin. J'ai entendu aussi des élus du littoral me dire de faire en sorte que la population de Paris ou de Lyon ne se rue pas sur les plages lorsqu'elles seront ouvertes.

J'entends certes l'exemple suisse. Mais pourquoi le Haut-Rhin et pas l'Isère ? Pourquoi certains départements ont-ils été touchés et pas d'autres ? Grâce au confinement !

Ne commettons pas l'erreur de laisser de nouveaux foyers se développer. Lorsque nous aurons la conviction que le virus est au tapis, qu'il ne reste plus qu'à l'achever, alors, oui, nous rouvrirons les plages et plus largement nos frontières pour faire découvrir les beautés de notre pays.

Les forêts n'ont jamais été fermées. C'est l'interdiction de se déplacer qui a fait qu'on n'y a plus été (Exclamations ironiques sur diverses travées) Il faut bien distinguer entre la fermeture d'un endroit et l'interdiction de se déplacer qui fait que l'on ne peut aller jusqu'à cet endroit !

Je sais bien que l'impact ne sera pas le même pour les forêts - en dépit de la beauté de la montagne - que si l'on rouvre les plages de Bretagne. Notre objectif reste, et a toujours été, de protéger la santé des Français.

L'amendement n°36 rectifié n'est pas adopté.

L'amendement n°175 est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°44 rectifié ter, présenté par Mmes Guidez et Létard, M. de Montgolfier, Mme Doineau, M. Détraigne, Mmes Loisier et Vermeillet, MM. Longeot et P. Martin, Mme Billon, MM. Kern, Canevet et Moga, Mmes Sollogoub, C. Fournier et Perrot, MM. Regnard, Paccaud, Bonne, Guerriau et Mandelli, Mme Micouleau, MM. Vogel, Chasseing et Bonhomme et Mmes Goy-Chavent, L. Darcos et Garriaud-Maylam.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code pénal est ainsi modifié :

1° Après le 11° de l'article 311-4, il est inséré un 12° ainsi rédigé :

« 12° Lorsqu'il est commis en période de menace ou crise sanitaires graves au sens du titre III du livre Ier de la troisième partie du code de la santé publique et qu'il porte sur un bien de première nécessité pour prévenir ou limiter cette crise ou cette menace. » ;

2° Après le troisième alinéa de l'article 131-22, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque la personne a été condamnée sur le fondement du 12° de l'article 311-4, elle accomplit de préférence la peine de travail d'intérêt général dans un établissement spécialisé dans l'hébergement des personnes âgées dépendantes, dans un établissement de santé ou dans un établissement médico-social. »

Mme Jocelyne Guidez.  - Durant cette pandémie, de nombreux vols de masques et de gels hydroalcooliques ont été constatés partout sur le territoire, comme en témoignent des directeurs d'établissement et des acteurs locaux.

Les premières victimes sont avant tout les personnels de santé qui, notamment au début de cette crise sanitaire, manquaient parfois de matériel de protection.

En outre, les bénéfices financiers qu'ils peuvent générer sont à la fois choquants et intolérables. La presse a relaté à plusieurs reprises des cas de trafics illégaux. Certains ont même organisé du porte à porte pour revendre des masques, jusqu'à 15 euros l'unité.

Le message de la République doit être d'une grande fermeté et d'une sévérité affirmée.

Cet amendement crée une nouvelle circonstance aggravante dans le code pénal, pour tout vol commis en période de menaces et crises sanitaires graves et qui porte sur un bien de première nécessité pour prévenir ou limiter cette crise ou cette menace. Les peines sont ainsi portées à cinq ans d'emprisonnement et à 75 000 euros d'amende.

Cet amendement permet aussi à la juridiction, qui prononcerait une peine de travail d'intérêt général de prévoir que le condamné l'accomplisse de préférence dans un établissement spécialisé dans l'hébergement des personnes âgées dépendantes, dans un établissement de santé ou dans un établissement médico-social afin de le sensibiliser sur les conséquences de son geste.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°44 rectifié ter n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°46 rectifié ter, présenté par Mmes Guidez et Létard, M. de Montgolfier, Mme Doineau, M. Détraigne, Mmes Loisier et Vermeillet, M. Longeot, Mme Gatel, M. P. Martin, Mme Billon, MM. Kern, Canevet, Henno et Moga, Mmes Sollogoub, C. Fournier, Perrot et Férat, MM. Regnard, Paccaud, Bonne, Guerriau et Mandelli, Mme Micouleau, MM. Vogel, Bouchet, Lefèvre et Chasseing et Mmes N. Delattre, Goy-Chavent, L. Darcos, Vérien et Garriaud-Maylam.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les examens de biologie médicale de dépistage du covid 19 sont effectués en respectant l'ordre des priorités suivant :

- le dépistage des personnes présentant des symptômes d'infection ;

- le dépistage des personnels soignants ayant été en contact avec des personnes infectées ;

- le dépistage des personnes ayant, au cours des dix jours précédents, assisté des personnes infectées au domicile de ces dernières.

Mme Jocelyne Guidez.  - De nombreuses inquiétudes ressurgissent sur l'accès aux tests pour les aides à domicile ou d'aidants qui oeuvrent quotidiennement auprès d'un proche malade, en situation de dépendance ou de handicap. Ils méritent l'attention des pouvoirs publics.

Il est important qu'ils puissent également bénéficier des tests de dépistage, afin de s'assurer qu'ils ne soient pas contaminés par le Covid-19. Sans cela, ils risqueraient de propager le virus, sans le vouloir.

Entre contraintes professionnelles et familiales, leur intervention n'est pas toujours facile en temps normal. Mais en pareilles circonstances, elle l'est encore moins. À l'épuisement physique et psychologique, ne rajoutons pas une prise de risques.

Cet amendement prévoit que priorité sera donnée, après le dépistage de ceux qui présentent des symptômes d'infection et les personnels soignants, aux personnes ayant, au cours des dix jours précédents, assisté des personnes infectées au domicile de ces dernières.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis.

M. Philippe Mouiller.  - Il faut tirer les enseignements de ce qui s'est passé pour les aidants qui ont pris en charge des personnes handicapées ou isolées. Les aidants ont été les derniers à obtenir des moyens de prophylaxie pendant le confinement. Il faudra penser à une reconnaissance et à une revalorisation financière. J'espère que nous reverrons leur statut.

Sans les aidants, les établissements vont à la catastrophe.

M. Bruno Retailleau.  - Monsieur le ministre, je souhaiterais vous interroger sur le dépistage dans les espaces clos, comme les Ehpad mais aussi les instituts qui reçoivent des personnes handicapées. Jusqu'à présent, la doctrine était de tester lorsqu'il y avait un cas confirmé dans les quinze jours précédents. J'ai demandé il y a deux semaines au Premier ministre de massifier ce dépistage. Quand le ferez-vous ?

Quid de la participation des laboratoires vétérinaires aux tests sérologiques qui peuvent en effectuer 80 000 par jour ? Qu'est-ce qui bloque ?

Le Premier ministre, à l'Assemblée nationale, a estimé que nous serions en capacité de réaliser 700 000 tests par semaines. Il a parlé de 3 000 cas journaliers, ce qui entraînerait le dépistage des 25 personnes avec qui ces malades auraient été en contact, le tout sur sept jours, soit 525 000 tests. Mais sur quels repères s'appuyer ?

L'institut Pasteur parle de 2,6 % de personnes hospitalisées parmi toutes celles qui sont touchées par le Covid-19. Cela signifierait qu'avec les 600 nouveaux cas admis hier à l'hôpital, nous aurions 26 000 personnes infectées par le virus. Éclairez-nous, monsieur le ministre, puisque du nombre de nouveaux cas dépendra la levée du confinement le 11 mai.

M. Olivier Véran, ministre.  - Dans les Ehpad, il y a eu 50 000 tests sur une semaine. Les retours des ARS montrent que ces dépistages massifs dès le premier cas donnent de bons résultats. Cela a bien fonctionné pour connaître la prévalence dans les Ehpad. Certains départements sont allés beaucoup plus loin que la doctrine selon laquelle on attendait d'avoir un cas. Je note que certains établissements testent systématiquement les patients qui vont être hospitalisés : ce n'est pas inintéressant et si la capacité de tests est suffisante, nous verrons s'il faut généraliser la mesure.

Le Centre national de référence de la résistance aux antibiotiques (CNR) a validé une sérologie de haut niveau de fiabilité. Mais selon la HAS, l'usage en pratique de cette sérologie n'est pas encore complètement clair. Même lorsque nous voudrons l'utiliser à grande échelle, l'apport des laboratoires vétérinaires ne serait pas indispensable puisque nos 3 800 laboratoires médicaux peuvent réaliser des analyses de sang.

Dimanche dernier, j'ai fait frissonner les Français en disant que le 11 mai, il se pourrait que le déconfinement ne se fasse pas, mais je n'ai fait que reprendre les propos du Premier ministre de mardi dernier à l'Assemblée nationale. Nous devrons être capables de tester et d'isoler tout le monde pour casser les chaînes de contamination. Nous devrons être sûrs que l'épidémie soit suffisamment descendue pour qu'on puisse lever les contraintes sans qu'une deuxième vague ne surgisse.

Monsieur Retailleau, je comprends vos interrogations qui proviennent d'extrapolations. Je me suis posé les mêmes questions. J'ai donc appelé les modélisateurs de l'institut Pasteur. Comment travaillent-ils ? Ils prennent les données d'un jour tels que les indicateurs Sentinelles et ils calculent le R zéro (R0) en fonction de l'évolution de la courbe. S'il y a trois fois plus de malades la semaine suivante, le R0 est à 3, s'il y a trois fois moins de malades, le R0 est à 0,33. Ensuite, ils utilisent le modèle pour faire de la prospection, par exemple au 11 mai.

Aujourd'hui, on est encore dans les clous pour déconfiner, mais les marges sont étroites. Jeudi, je donnerai les dernières modélisations. C'est pourquoi, il faut faire très attention ! S'il y a trop de relâchement, nous ne pourrons déconfiner. La modélisation est aux alentours de 3 000 malades par jour, avec 15 à 25 personnes de l'entourage à tester et à tracer. Peut-être qu'à la fin de la semaine prochaine, nous ferons moins de tests, non pas parce que nous ne pourrons pas les faire, mais parce qu'il y aura moins de malades que prévus en contact avec moins de personnes. Ce serait une bonne nouvelle !

Nous visons une montée en charge jusqu'à 700 000 tests. Il est important que les Français restent chez eux jusqu'au 10 mai pour rester dans les prévisions des modélisateurs.

Mme Jocelyne Guidez.  - Je veux insister un peu plus sur mon deuxième amendement. Il faut tendre la main aux aides à domicile et aux aidants, qui ont l'impression d'être transparents. Je vous demande de voter cet amendement pour qu'ils sachent que le Sénat est à leur écoute.

L'amendement n°46 rectifié ter est adopté et devient un article additionnel.

présidence de M. Gérard Larcher

M. le président.  - Amendement n°100, présenté par Mme de la Gontrie et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  La période mentionnée au troisième alinéa de l'article L. 115-3 du code de l'action sociale et des familles et au premier alinéa de l'article L. 412-6 du code des procédures civiles d'exécution est prolongée jusqu'au 1er novembre 2020.

II.  -  Les durées mentionnées aux articles L. 611-1 et L. 641-8 du code des procédures civiles d'exécution sont prolongées jusqu'au 1er novembre 2020.

Mme Sophie Taillé-Polian.  - Cet amendement comble une lacune : l'urgence sociale n'est pas prise en compte par ce projet de loi.

La trêve hivernale des expulsions locative pourrait être prolongée jusqu'au mois de novembre. Nous avions proposé dans les collectifs budgétaires des aides pour que les locataires - au-delà des aides de 100 ou 150 euros - puissent payer leur loyer. Il faut éviter que les familles se retrouvent à la rue car, pour certaines, elles sont en grande difficulté. Évitons une crise sociale de grande ampleur.

M. le président.  - Amendement identique n°159, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Laurence Cohen.  - C'est le même.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Avis défavorable.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Il est dommage que l'on consacre un long moment - justifié - à la pratique du sport sur les plages et que le Gouvernement comme le rapporteur rejettent cet amendement d'un mot.

M. Olivier Véran, ministre.  - C'est en effet un sujet important qui peut être fait par ordonnance. Vous nous avez habilités à cette fin. Nul besoin d'indiquer une date dans la loi.

Mme Sophie Taillé-Polian.  - Qu'avez-vous prévu ?

Les amendements identiques nos100 et 159 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°59, présenté par Mme de la Gontrie et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  La durée de validité des documents de séjour suivants, qu'ils aient été délivrés sur le fondement du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou d'un accord bilatéral, arrivés à expiration à compter du 13 mars 2020 et jusqu'à cessation de l'état d'urgence sanitaire, est prolongée de cent-quatre-vingts jours :

1° Visas de court et de long séjour ;

2° Titres de séjour, à l'exception de ceux délivrés au personnel diplomatique et consulaire étranger ;

3° Autorisations provisoires de séjour ;

4° Récépissés de demandes de titres de séjour ;

5° Attestations de demande d'asile.

II.  -  Une autorisation provisoire de séjour est délivrée à tout étranger dont la demande de titre de séjour ou son renouvellement n'a pu être engagé ou n'a pu aboutir en raison de l'état d'urgence sanitaire.

III.  -  Le présent article est applicable à Saint-Martin et Saint-Barthélemy, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et en Nouvelle-Calédonie.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - La première loi d'urgence a prolongé un certain nombre de titres de séjour. Mais la situation n'est pas revenue à la normale. C'est compréhensible, compte tenu de l'arrêt des préfectures. Cet amendement prolonge en conséquence un certain nombre d'autres titres pendant 180 jours.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Les délais ont déjà été allongés. À partir du 11 mai, le travail reprend. Pourquoi prolonger à nouveau ces titres ? Gardons-nous d'une évolution insidieuse vers une pérennisation du séjour en France d'étrangers dépourvus de titres légaux. Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°59 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°60, présenté par Mme de la Gontrie et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Pendant la durée de l'état d'urgence sanitaire déclaré par l'article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19, les centres de rétention administrative prévus par l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont fermés.

M. Rémi Féraud.  - Cet amendement propose la fermeture des centres de rétention administrative (CRA) - je vous rassure, pour la durée de l'état d'urgence sanitaire.

Le 18 mars, le Défenseur des droits alertait, comme récemment encore le 18 avril, sur leur situation, et la légalité de leur maintien en activité.

Il y a eu des incidents dans plusieurs centres et notamment au Mesnil-Amelot et des contaminations à Vincennes.

Le risque est grand que les centres de rétention administrative deviennent eux-mêmes des clusters. Le tribunal administratif de Paris, mi-avril, a demandé à ce qu'il n'y ait pas de nouveaux placements à Vincennes. Ces centres ont pour objectif de retenir les personnes avant leur reconduction à la frontière - or c'est impossible, puisqu'il n'y a plus de liaisons aériennes. C'est ce qu'a rappelé la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté. Fermons-les, pendant ce temps, assez court, de l'état d'urgence sanitaire, puisqu'ils ne servent à rien et présentent même un risque sanitaire.

M. le président.  - Amendement n°69 rectifié, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'état d'urgence sanitaire suspend les procédures de placement en centres de rétention prévues aux articles L. 551-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Mme Esther Benbassa.  - C'est le même.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Le Gouvernement a fermé la plupart des centres de rétention administrative. Il est vrai qu'il est difficile d'éloigner les étrangers sans titre. Il y a pourtant une activité résiduelle ; pour les anciens condamnés sortis de prison. Le ministre de l'Intérieur nous a indiqué qu'il arrivait qu'on parvienne à en reconduire - même si c'est rare. Cela vaut mieux donc que de les laisser se disperser sur le territoire à condition - ce qui semble le cas - que les conditions de sécurité sanitaire soient correctes. Naturellement, il appartient aux autorités administratives indépendantes compétentes en matière de défense des droits de l'Homme de le vérifier.

M. Olivier Véran, ministre.  - Des mesures ont en effet été prises pour les assurer : chambres individuelles. Avis défavorable.

Mme Esther Benbassa.  - Les associations comme l'Anafé et la Cimade nous disent qu'il n'y a pas que d'anciens condamnés, mais aussi des personnes qui viennent d'être arrêtées sur la voie publique ou dans le métro.

Elles ne confirment donc pas les propos du ministre de l'Intérieur lors de son audition devant la commission, monsieur le président Bas.

L'amendement n°60 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°69 rectifié.

L'amendement n°102 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°110, présenté par Mme de la Gontrie et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le mandat du Défenseur des droits est prolongé à titre exceptionnel jusqu'à la cessation de l'état d'urgence sanitaire déclaré dans les conditions de l'article 4 de la loi n° 2020 - 290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Cet amendement et le suivant prolongent deux mandats qui, sinon, expireraient inopportunément le 17 juillet, en ce temps difficile pour les droits et libertés : celui du Défenseur des droits et de la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté.

M. le président.  - Amendement n°107, présenté par Mme de la Gontrie et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le mandat de la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté prévu à l'article 2 de la loi n° 2007-1545 du 30 octobre 2007 instituant un Contrôleur général des lieux de privation de liberté est prorogé à titre exceptionnel, jusqu'à la cessation de l'état d'urgence sanitaire déclaré dans les conditions de l'article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Défendu.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°110 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°107.

La séance, suspendue à 19 h 10, reprend à 19 h 20.

ARTICLE 6

M. Philippe Bas, président de la commission des lois, rapporteur .  - Nous arrivons à l'article qui est la raison d'être de ce texte. Les autres dispositions dont nous avons débattu auparavant n'étaient qu'une mise en jambes... (Sourires) Elles n'y ont été introduites que parce que le système d'information qui fait l'objet de cet article nécessitait une loi. Je propose donc de vous rappeler de manière synthétique le dispositif qu'il contient et que la commission des lois a approuvé.

C'est l'outil central du déconfinement - nous pourrons poser toutes les questions au Gouvernement sur sa capacité à le mettre en place lundi prochain... Je crains que ce ne soit que très progressif. C'est le nouveau moyen de lutte contre l'épidémie, qui sera appliqué en substitution du confinement.

Laissons de côté le système d'information, pour examiner la politique de santé publique qui devra être mise en oeuvre pour identifier les sources de contamination.

Ce que le Gouvernement veut faire et que la commission des lois et la commission des affaires sociales - le président Milon nous l'exposera - ont approuvé, c'est qu'à chaque cas testé et médicalement déclaré comme contaminé par le virus, ses contacts - évalués entre 20 et 25 personnes - devront être identifiés. Ce sont les personnes qu'il aura croisées dans les 48 à 72 heures précédentes.

Le plus simple, pour les trouver, c'est de le dire au médecin qui vous aura fait faire le test. Mais le médecin ne pourra pas lui-même aller les chercher. Son action devra donc être prolongée par d'autres, avec l'aide du laboratoire d'analyses biologiques, qui déclare, pratiquement, la personne porteuse du virus. L'assurance maladie appelle cette dernière pour identifier ses contacts. Chacun sera appelé pour faire dans les 24 heures un test de dépistage et se mettre en quatorzaine.

Si le test est positif, l'assurance maladie leur demandera à elles aussi à leur tour d'identifier leurs cas contacts et de transmettre à l'assurance maladie une première liste de noms, afin qu'elle puisse approfondir les questions à leur poser.

Mais ce circuit n'est pas optimal, car il repose sur le bon vouloir du médecin. Or celui-ci peut être plus ou moins coopératif et nous souhaitons qu'il le soit le plus possible.

Cela peut-il être fait sans un système d'information national ? Je ne le crois pas. Certains aimeraient qu'il y en ait plusieurs, territoire par territoire - pourquoi par un par CPAM ? Mais cela ne peut pas fonctionner et nous devons autoriser l'accès à ce fichier de personnes qui ne sont pas médecins.

Les questions posées sont considérables, c'est pourquoi nos deux commissions ont voulu multiplier les garanties. Ainsi, nous avons prévu un contrôle du système d'information par une instance indépendante chargée d'en auditer le fonctionnement. Toute personne désignée à tort comme cas contact pourra demander à ne pas être maintenue dans le système d'information : droit d'information, droit de rectification et droit d'opposition donc. À l'initiative du président Milon, nous avons prévu le limiter les informations médicales figurant dans le système d'information au seul résultat, positif ou négatif, du test au Covid-19. Bien sûr, il est important, médicalement, de connaître les comorbidités pour bien soigner, mais cela n'a pas d'intérêt pour juguler la contagion. La recherche épidémiologique ne doit être possible que sur des données anonymisées.

Surtout, il faut une étanchéité parfaite entre ce système d'information et l'application Stop Covid, qui n'a rien à voir...

M. Loïc Hervé.  - Très bien !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Nous ne signerons pas de chèque en blanc...

M. Patrick Kanner.  - Surtout pas !

M. Bruno Retailleau.  - Certes non !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - ... pour son développement ni ne donnerons de base juridique par le biais de cet article...

M. Mathieu Darnaud.  - Ah !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Le Gouvernement veut les mains libres et être autorisé à prendre des ordonnances pour modifier la loi. Nous disons non. S'il fallait modifier ce système d'information, il faudrait nous solliciter à nouveau. Preuve de notre disponibilité, nous discutons depuis hier d'un projet de loi dont nous avons été saisis seulement samedi.

Nous sommes prêts à accepter ce système d'information car il n'y a pas d'alternative pour sortir du confinement, mais pas à n'importe quel prix. Voilà la philosophie qui a guidé notre rédaction (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Françoise Gatel applaudit également.)

Mme Catherine Morin-Desailly .  - Cet article 6 fait couler beaucoup d'encre, et la discussion générale a fait entendre des protestations sur tous les bancs. Il met en place un système de collecte de données de santé, ô combien sensibles et convoitées dans la nouvelle économie de la santé. Les Gafam sont en embuscade. Je ne crois pas à un processus réversible - nous mettons le doigt dans l'engrenage.

Déjà, le décret du 22 avril 2020 prévoit la collecte de données par la plateforme Health Data Hub, gérée par Microsoft. Les enjeux sont immenses, or nous n'avons pas le temps d'expertiser le dispositif. Un recours aux ordonnances serait inacceptable.

Je ne doute pas de la volonté du Gouvernement de trouver des solutions innovantes, mais je m'inquiète du retour annoncé de l'application Stop Covid. Si ces deux systèmes se conjuguaient, nous entrerions vraiment dans la société du contrôle !

M. le Président.  - Veuillez conclure.

Mme Catherine Morin-Desailly.  - L'Anssi nous alerte sur la fragilisation de nos systèmes de données. Faute de solution souveraine, nous nous exposons à un risque de captation et de mésusage de nos données par des acteurs aux intentions bien moins nobles...

M. Pierre Ouzoulias .  - Nous eussions souhaité que le Gouvernement expliquât son projet avec autant de clarté que l'a fait le président Bas. Hélas, le tintamarre se poursuit...

Ainsi, on avait cru comprendre, lors de l'intervention du Premier ministre, que l'application Stop Covid était différée et que le Parlement serait consulté. Or M. Cédric O a annoncé que les tests commenceraient la semaine prochaine pour un déploiement à partir du 2 juin - en évoquant une interconnexion avec tous les fichiers de santé. « On suit la feuille de route », conclut-il. Nous aimerions que le Parlement soit consulté sur cette application, qui ne doit pas ressurgir en catimini !

Mme Esther Benbassa .  - Cet article prévoit le fichage des citoyens malades pour identifier leurs proches, un système plus humain que celui de l'application Stop Covid. Celle-ci n'était pas prête, mais ce système d'information ne semble pas l'être davantage.

Les « brigades d'anges gardiens », la terminologie militaire ayant été adoucie par l'emprunt au vocabulaire religieux, constituées de 5 000 agents de l'assurance maladie, auront pour mission d'informer les personnes susceptibles d'être touchées par le virus. C'est attentatoire à notre vie privée, plus intrusif encore que l'application, sans garantie d'efficacité. Ne débattons-nous pas d'une usine à gaz ?

« Protéger, tester, isoler » ? Seule cette dernière dimension est abordée. Rien sur la stratégie de dépistage massif, et certainement pas de protection de nos données personnelles !

M. Julien Bargeton .  - Il y a une dimension fallacieuse dans ce débat. On opposerait les partisans de la liberté et les défenseurs de l'intérêt général. C'est un débat récurrent dans notre Histoire. Mais ce système d'information n'est pas une possibilité, c'est un devoir impérieux. On pourrait dire, a posteriori, à l'État : vous aviez les moyens d'empêcher la propagation du virus, et ne l'avez pas fait.

Les géants du numérique pourraient s'emparer de notre bien le plus précieux, le lien social, si nous renonçons à notre souveraineté. Ils construiraient bientôt un État-plateforme...

Gardons-nous d'oppositions simplistes qui feraient oublier un plus grand danger.

M. Loïc Hervé .  - Cet article 6 m'interroge et m'inquiète. Nous avons eu peu de temps pour l'examiner. Les conditions de travail sont mauvaises : nous avons connu le texte samedi, après-midi, l'avons examiné en commission lundi matin et nous en débattons ce mardi.

La présidente de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) a été auditionnée ce matin à l'Assemblée nationale. Si nous avions eu plus de temps, nous aurions pu l'interroger également.

Nous sommes dans le solutionnisme technologique face à des problèmes avant tout humains. Mon département a été l'un des premiers touchés par un cluster et il y a eu des enquêtes et un traçage social. Elles seront menées demain par des standardistes : dans quelles conditions de formation, monsieur le ministre ?

Pour éviter de passer de la société de bienveillance à la société de surveillance, je convoque les grands principes qui nous guident depuis quarante ans. Si nous faisons sauter ces verrous une fois, ce sera une fois pour toutes. Je ne crois pas à un retour à l'antérieur.

M. Philippe Bonnecarrère .  - Santé et libertés publiques doivent être complémentaires, comme santé et économie. Évitons un débat entre croyants et incroyants.

Un système centralisé national agrégeant nos données médicales avec une identification serait-il indispensable ? Si nous pensons que oui, il faudra discuter des garanties.

Le but est de casser les chaînes de contamination. Nous en sommes tous d'accord. Cela nécessite des enquêtes de terrain par les médecins généralistes, avec éventuellement des équipes de la CPAM autour d'eux. Cela ne me pose pas de problème de leur communiquer mes données, même si le secret médical est partagé. Nul besoin en revanche, dans ce travail d'équipe, d'un fichier local et encore moins d'un fichier national centralisé.

M. Bruno Retailleau .  - Je ne suis pas suspect de complaisance vis-à-vis du Gouvernement, depuis le départ. (M. le ministre en convient volontiers.) Nous ne devons pas écarter le principe du traçage. Depuis le début, je prône la prévention et la détection pour isoler les cas. Ne nous jetons pas tout de suite dans le débat des modalités. Penchons-nous sur les finalités. Peut-on mettre fin à cette saloperie contagieuse sans une stratégie audacieuse ? Nous pouvons fermer nos plages et nos forêts pendant des mois, mais il n'y aura pas de déconfinement sans dépistage et traçage...

L'article 6, profondément modifié par la commission des lois et je l'en remercie, pose les premiers jalons.

Cédric O a annoncé un débat la semaine du 25 mai sur Stop Covid, qui pourrait être opérationnel début juin.

Un système d'information est utile. Et les six garanties posées par le malicieux président Bas et la commission des lois bordent le sujet. Nous en ferons un point fondamental d'accord en CMP. Écarter les ordonnances, prévoir un contrôle indépendant, limiter les données médicales à celles du test Covid représentent des garanties essentielles. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé .  - J'entends beaucoup d'éléments importants : sans tracing, pas de déconfinement. Nous devons être efficaces pour casser les chaînes de contamination. Ce tracing, nous l'avons fait au stade 1, puis au début du stade 2, sans outils numériques il est vrai. Au sein des ARS, les agents ont appelé chacun de ces contacts en urgence, de jour ou de nuit.

Néanmoins, si le numérique irrigue toutes nos industries, c'est qu'il a des avantages : il est plus simple, plus rapide, il est capable de fournir la même protection dans la Creuse et à Paris.

L'article 6 n'est en rien une révolution. Il ne change pas la méthode de tracing mais la simplifie, la facilite, la rend plus fiable et évite les ruptures géographiques. Je ne suis pas opposé à une instance de contrôle indépendante. Il n'y a rien à cacher. Sur le droit d'opposition, je présenterai un amendement pour atténuer votre rédaction, car je comprends que quelqu'un ne souhaite pas être affiché comme le parent zéro mais on ne peut pas s'opposer à figurer dans le fichier, sans quoi on empêche ses proches d'être protégés.

Limiter les informations médicales fichées au test sérologique Covid : positif ou négatif, c'est l'information essentielle mais peut-être y en a-t-il d'autres à inscrire pour déterminer les chaînes de contamination : je vais interroger les spécialistes avant la reprise de la séance ce soir.

Je n'ai pas d'opposition à l'anonymisation des données pour la recherche. D'ailleurs, il existe tellement de précautions en la matière qu'on parle davantage de closed data que d'open data sur les données de santé, en France !

Il n'y a pas de lien entre ce système d'information et Stop Covid, je vous rassure. Le seul lien, ce sera entre le Sidep, le système d'information national sur le Covid, et Contact Covid, le service de l'assurance maladie.

Je prends acte de votre volonté qu'il n'y ait pas d'ordonnance. Je ne dépose pas d'amendement au Sénat tendant à en rétablir. Nous verrons ce que fera l'Assemblée nationale. (Mme Laurence Rossignol proteste.)

Je ne peux interdire aux députés de s'intéresser au sujet ! Mais je ne demande pas la suppression de l'article 6 tel que vous l'avez rédigé en commission.

M. Loïc Hervé.  - Très bien !

M. Olivier Véran, ministre.  - Soyons clairs, sans outil numérique digne de ce nom, pas de tracing et sans tracing, pas de déconfinement. Et il ne s'agit nullement d'une menace. Les outils numériques sont bien utiles.

Nous sommes très contents de la télémédecine. Si nous avions débattu en séance sur l'opportunité d'en ouvrir l'usage aux infirmières, cela aurait duré des heures, c'est certain. (Protestations) Pourtant, cela a été bien utile ces derniers temps. Nous avons même vu des kinésithérapeutes faire des consultations en ligne pour la rééducation après la pose d'une prothèse de hanche. Et je ne parle pas de la prolongation de validité des ordonnances pour les maladies chroniques. Cela a bien rendu service aux Français.

M. le président.  - Le Gouvernement demande l'ouverture de la séance de ce soir pour terminer l'examen du présent projet de loi. Acte est donné de cette demande.

La séance est suspendue à 20 h 5.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 21 h 35.

Modification de l'ordre du jour

M. le président.  - Par lettre en date de ce jour, le Gouvernement demande l'inscription le vendredi 8 mai, le soir et le samedi 9 mai, le matin, sous réserve de leur dépôt, des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions.

Par ailleurs, en cas de nouvelle lecture sur ce texte, il en demande l'inscription le dimanche 10 mai après-midi.

Acte est donné de ces demandes.

La discussion générale sur les conclusions de la commission mixte paritaire ou la nouvelle lecture serait fixée à 45 minutes.

Je tiendrai les présidents de groupe informés de l'évolution météorologique ! (Sourires)

En cas de nouvelle lecture, le délai-limite pour le dépôt des amendements de séance serait fixé à l'ouverture de la discussion générale.

Il en est ainsi décidé.

Prorogation de l'état d'urgence sanitaire (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 6 (Suite)

M. le président.  - Amendement n°53, présenté par Mme Ghali.

Supprimer cet article.

L'amendement n°53 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°63, présenté par M. Ravier.

M. Stéphane Ravier.  - Le 18 février, le nouveau ministre des Solidarités et de la santé estimait que le régime communiste chinois avait bien géré la crise. La fascination pour les solutions autoritaires et liberticides semble monnaie courante dans cet état d'urgence... Chacun accepte que l'on ponctionne ses données personnelles auprès des opérateurs. A une époque pas si lointaine, nous aurions été scandalisés d'une telle atteinte à nos libertés fondamentales. Comme le disait Saint Augustin : « À force de tout voir, on finit par tout supporter ; à force de tout supporter, on finit par tout tolérer ; à force de tout tolérer, on finit par tout accepter ; à force de tout accepter, on finit par tout approuver » et par tout voter, serai-je tenté d'ajouter.

Plutôt que de traquer nos compatriotes, le Gouvernement devrait renforcer la cybersécurité de nos concitoyens, de nos entreprises et de nos institutions. Comme le préconise la CNIL, adoptons une stratégie globale plutôt que d'abandonner chacun à lui-même. La priorité devrait être de fournir aux Français masques et tests de dépistage pour leur permettre de reprendre une vie normale.

M. le président.  - Amendement identique n°136, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

M. Pierre Ouzoulias.  - Le groupe communiste républicain citoyen et écologiste n'est pas opposé au dépistage, mais le droit commun y suffit. Pourquoi ce système dérogatoire et nouveau, qui porte atteinte aux libertés individuelles ?

Les mesures de protection du secret médical sont d'ordre législatif ; or, ce projet de loi les relègue dans l'ordre réglementaire, ce qui crée une dégradation dans la hiérarchie des normes.

Le système actuel garantit dans la loi la protection des données individuelles, sous le contrôle du Parlement. C'est le sens de notre opposition à l'article 6. Nous ne souhaitons pas pour autant laisser les professionnels de santé sans armes. Nos propositions seront présentées dans notre amendement n°153.

M. le président.  - Amendement identique n°172 rectifié, présenté par Mmes Joissains, Morin-Desailly et Létard, MM. L. Hervé, Détraigne, Cadic et Bonnecarrère et Mmes Billon et C. Fournier.

M. Philippe Bonnecarrère.  - Avec plusieurs de mes collègues, nous voulons la suppression de cet article. Monsieur le ministre, je vous ai demandé tout à l'heure en quoi l'inscription de données personnelles sur un fichier centralisé national était nécessaire. Vous m'avez répondu que l'on n'était plus à l'époque du crayon et de la gomme. Soit.

Je ne m'oppose pas à ce que M. Dupont Antoine vivant à Belfort, atteint du Covid-19, fasse l'objet d'une déclaration, que ses contacts soient identifiés et qu'une recherche soit entreprise. Mais une fois guéri, pourquoi conserver ces données dans un fichier national ? Vous ne m'avez pas répondu sur ce point.

Mme Morin-Dessailly a rappelé l'arrêté publié le 22 avril créant une base de données commune au Health Data Hub et à la CNAM. Le système d'information dont nous parlons ce soir a-t-il déjà été créé ? Nous subodorons que c'est le cas.

Selon BFM TV, l'application Stop Covid serait opérationnelle le 2 juin.

Si le système d'information est déjà créé et l'installation de l'application décidée, quelle est l'utilité du Parlement ? (Mme Catherine Morin-Desailly et M. Patrick Kanner applaudissent.)

M. Philippe Bas, rapporteur.  - La commission est défavorable à ces amendements : il est indispensable de donner à l'État la capacité de dépister plusieurs centaines de milliers de personnes par semaine, sur la base de l'identification de nos concitoyens au contact des porteurs du virus. C'est une tâche titanesque, et il faut pour cela des outils efficaces.

Chaque jour perdu, ce sont des contaminations supplémentaires. Il faut un outil massif et centralisé pour répondre au caractère tout aussi massif de l'épidémie. Il n'y a pas de déconfinement possible si la France n'est pas en mesure de procéder à cette identification.

Ce texte n'est porté à notre connaissance que pour une raison : le dispositif mis en oeuvre va manipuler des informations médicales, qui doivent être limitées à la seule question de savoir si la personne est porteuse ou non du virus. Toute autre information médicale est inutile. Néanmoins, il faut une loi pour déroger au secret médical. Un décret ne suffit pas, car la loi protège mieux les libertés que le pouvoir exécutif. Le Gouvernement pourrait fort bien mettre en place un système d'information centralisé, sans le concours du législateur : l'article 9 du Règlement général sur la protection des données (RGPD) prévoit des dérogations à la confidentialité des données de santé pour des impératifs de santé publique. Nous y sommes !

La question du système numérique utilisé par le Gouvernement est tranchée. Ce qu'il n'a pas le droit de faire, c'est d'autoriser des non-médecins à utiliser les données recueillies sans que la loi l'y autorise.

C'est pourquoi la commission des lois a demandé des garanties en ce sens, notamment l'avis conforme de la CNIL sur le décret mettant en oeuvre le système d'information, comme le prévoit un amendement du groupe socialiste.

M. Loïc Hervé.  - C'est une excellente idée !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Il n'est pas possible de traiter 700 000 dossiers manuellement comme dans les années cinquante, et le dispositif ne peut être mis en oeuvre sans l'extension de l'accès aux données, sous couvert du secret, à d'autres personnes que des médecins. Je vous demande donc de ne pas adopter ces amendements.

M. Olivier Véran, ministre.  - Le système d'information, je dis et je le redis, n'est pas Stop Covid. (M. Philippe Bonnecarrère en doute fortement.) Une telle application ferait, le cas échéant, l'objet d'un débat parlementaire. Je le répéterai autant de fois que nécessaire...

De plus, ce dispositif n'est pas une nouveauté. Il existe déjà plusieurs fichiers accessibles à des salariés non-médecins de l'assurance maladie. Ce sont, par exemple, le fichier national des arrêts de travail, qui contient le motif de l'arrêt et qui est transcrit par des salariés de l'assurance maladie dans le fichier national de l'assurance maladie. Il existe aussi le fichier des affections longue durée, telles que le diabète ou l'hypertension. Tous deux sont liés au logiciel amelipro. Cela n'a jamais posé de difficulté, depuis une quinzaine d'années que ces systèmes existent.

Le recours à la loi marque l'extension du cadre dérogatoire de ce dispositif qui peut contrevenir au strict respect du secret médical à la lutte contre l'épidémie du Covid-19. La loi en décrit toutes les dérogations potentielles. Vos inquiétudes sont parfois légitimes et rationnelles, parfois non. Mais nous ne sommes pas en train d'inventer un nouveau dispositif. Il n'y a aucune rupture avec l'État de droit ; nous sommes dans la continuité d'outils qui existent déjà. Avis défavorable.

M. Olivier Henno.  - Ce débat est passionnant : il s'agit de trouver l'équilibre entre protections collectives et libertés individuelles, entre éthique de conviction et éthique de responsabilité. Quand j'ai découvert ce texte, ma réaction première fut d'estimer qu'il fallait supprimer cet article.

À ces questions s'ajoutent les problèmes de souveraineté numérique et de protection des données de santé contre les cyberattaques. Je vous renvoie au Bureau des légendes !

En commission des affaires sociales, nous nous sommes rendu compte que nous étions dans une situation bien particulière : la fin du confinement n'est pas du tout le retour à la vie normale : c'est un équilibre entre impératifs sanitaire, économique et social.

Si l'on n'arrive pas à tester, à tracer et à isoler, la contagion reprendra très vite. Et nous serions à nouveau privés de la liberté essentielle d'aller et venir.

Initialement hostile à l'article 6, j'ai été convaincu par le président Bas.

M. Bruno Retailleau.  - Le groupe Les Républicains votera contre ces amendements. Le confinement, c'est la stratégie de la cloche. Il était nécessaire pour désengorger les services de réanimation. Nous y sommes parvenus. Mais le Président de la République l'a dit ce midi : on n'a pas gagné la bataille, on l'a ralentie. Il faut absolument tracer les malades pour gagner la bataille.

Un premier système de traçage a été envisagé dans l'avant-projet de loi. Puis, le texte est passé en Conseil d'État. Enfin, la commission des lois a posé six garanties. Cédric O a déclaré ce matin qu'il viendrait au Parlement durant la semaine du 25 mai pour discuter de Stop Covid qui devrait être opérationnel le 2 juin. Aucun scoop, donc.

Notre métier consiste à trouver un juste équilibre entre les libertés publiques et la santé publique. Nous en sommes à plus de 30 000 morts, en incluant le décompte des médecins généralistes. La commission des lois a mis des garanties, ceinture et bretelles, sur la question des libertés.

Il faut savoir si on utilise de nouveaux moyens, très bordés, ou non ! La commission des lois n'a pas l'habitude de prendre ces questions à la légère.

Cher Olivier Henno, éthiques de responsabilité et de conviction se confondent, ici. Il faut voter les amendements tels que modifiés par la commission des lois.

Mme Catherine Morin-Desailly.  - Abandonnons l'application Stop Covid : Singapour vient de le faire, faute de résultat. L'épidémie est repartie et Singapour va opter pour des solutions plus radicales.

Je suis favorable à un traçage encadré. Dans une tribune du 8 décembre, les experts en cryptologie et sécurité nous alertent sur l'absence de solution souveraine pour le traitement des données. On connaît le CLOUD Act américain : à tout moment Microsoft USA peut demander des données européennes, y compris de santé.

Plus récemment, les chercheurs de l'Institut national de recherche en informatique et en automatique (INRIA) et du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) nous ont alertés sur les systèmes de traçage dont l'anonymisation n'est pas définitive.

Je ne suis pas contre les avancées technologiques et il faut trouver des solutions pour lutter contre le virus, mais pas au prix des libertés individuelles. La concentration de toutes les données sur un fichier central pose problème alors que nous ne sommes pas sûrs de notre souveraineté.

M. Philippe Bonnecarrère.  - Ne tombons pas dans le manichéisme : nous sommes tous favorables aux tests et au traçage. Mais en quoi un fichier central national détenant des données personnelles nous aidera-t-il dans l'exercice du déconfinement ?

Le système de recueil des données autorisé par le décret du 22 avril a-t-il, oui ou non, déjà été créé ? Qui ne dit mot consent. C'est donc qu'il a été créé, ce qui ne manque pas d'interroger sur le rôle du Parlement.

Le président Bas nous dit que la loi n'est pas nécessaire à la création de ce fichier. Mais l'article 9 du RGPD conditionne la création d'un tel fichier au respect de l'essence du droit à la protection des données. C'est tout le débat. Je regrette que le ministre ne réponde pas.

M. Alain Milon, rapporteur pour avis.  - Je ne voterai pas ces amendements. Le dossier est plus qu'utile pour l'information des médecins et le traçage.

Les dossiers d'affections de longue durée (ALD) existent déjà. Ils contiennent nom, prénom, date de naissance, adresse et habitudes alimentaires de la personne concernée, ainsi que le type de diabète dont elle souffre, par exemple. Ces données sont utilisées pour connaître la prévalence géographique d'affection comme celle-ci.

Autre exemple, dans certaines régions de France, il y a plus d'appendicectomies ou d'opérations obstétricales que dans d'autres. Nous avons constaté qu'il y en avait moins en 2020 qu'en 2010, et moins en 2010 qu'en 1990. Les données recueillies dans les dossiers ont été très utiles pour produire ces analyses.

La rougeole et la tuberculose sont à déclaration obligatoire et non anonyme. Il n'y a pas d'anonymat des données ALD, manipulées par des salariés de l'assurance maladie, sauf pour le HIV, pour des raisons évidentes. Le fichier de la CNAM existe depuis trente ans. Il vise à mieux prévenir et mieux traiter les maladies.

Avec la commission des lois, nous avons bordé l'ensemble. Si la maladie est éliminée, ces dossiers disparaîtront. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains)

M. Pierre Ouzoulias.  - Ce débat n'oppose pas ceux qui seraient pour ou contre le dépistage. Nous voulons tous donner à l'État le maximum de moyens pour assurer le dépistage.

La discussion porte sur l'opportunité de créer un système dérogatoire quand d'autres systèmes existent déjà qui permettent ce dépistage et qui ont été éprouvés en matière de libertés individuelles et de respect du secret médical.

Monsieur le ministre, nous attendons de la précision car ce projet de loi sera examiné par le Conseil constitutionnel et l'intention du législateur sera cruciale dans cet examen.

J'aimerais un argumentaire plus fin, précis et médical.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Ce dispositif est un pari que fait le Gouvernement. C'est un pari que certains d'entre nous sont prêts à accompagner, d'autres non. Nous avons tous le même objectif, celui d'éradiquer l'épidémie. Mais, dans cette chambre, nous savons bien que la protection des libertés publiques est incontournable.

Or vous proposez un dispositif qui inquiète. Les propos du secrétaire d'État au numérique, qui annonce un débat à l'Assemblée nationale sur l'application Stop Covid pour le 28 mai, ajoutent à la confusion.

Au groupe socialiste et républicain, nous ne voterons pas ces amendements de suppression car nous souhaitons poser nos exigences, dont certaines rejoignent les propositions de la commission des lois, notamment quand il s'agit de refuser les ordonnances. Certains sujets, comme les données personnelles, le consentement de l'usager et le secret médical nous ont opposés. Nous souhaitons que le débat ait lieu. Ce pari arrivé très tardivement sera peut-être inutile et inefficace. À moins que nous ne puissions le gagner.

M. Marc Laménie.  - J'ai été convaincu par le président Bas. L'article 6 est au coeur de ce texte. L'urgence sanitaire exige que nous soyons efficaces. Il faut retrouver la confiance. Même si nous parlons de données privées, l'objectif reste de sauver des vies. Il y va de l'intérêt de notre pays. C'est du bon sens.

M. Julien Bargeton.  - Dans le RGPD, l'une des six bases juridiques autorisant l'exception, c'est l'intérêt public supérieur. Cette condition est sans doute trop large et mal définie. La gravité meurtrière de cette pandémie la remplit indéniablement, malgré toutes les préventions légitimes qui peuvent s'exprimer. J'ai peur que vos réticences n'incitent les citoyens à se tourner vers des systèmes que nous ne contrôlons pas. (Mme Catherine Morin-Desailly proteste.)

M. Loïc Hervé.  - Avec Sophie Joissains, j'ai été rapporteur pour la commission des lois des conséquences de l'application en droit interne du RGPD. Il a été utile de montrer, d'ailleurs, qu'un continent entier, l'Europe, protégeait ses données contrairement aux États-Unis.

J'ai du mal à considérer que tout système informatique serait par nature une innovation et que le progrès est forcément devant nous. Je ne partage pas la fascination de certains pour la technologie.

Notre rôle est de poser des questions de principe. Certaines choses ont été acceptables pour le confinement et ne le sont plus. Je suis cosignataire d'un des trois amendements et je le voterai.

Mme Véronique Guillotin.  - Le groupe RDSE votera contre ces amendements. Le traçage est un outil indispensable de la lutte contre le Covid-19. Le débat doit avoir lieu.

La commission des affaires sociales et celle des lois ont amendé le texte dans le sens d'une plus grande sécurité juridique.

Les amendements identiques nos63, 136 et 172 rectifié ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°153, présenté par M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Rédiger ainsi cet article :

L'article L. 3113-1 du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Après le 2°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Les maladies entraînant un état d'urgence sanitaire prévu aux articles L3131-14 et suivants du code la santé publique. » ;

2° À la première phrase du quatrième alinéa, les mots : « et 2° » sont remplacés par les mots : « , 2° et 3° ».

M. Pierre Ouzoulias.  - L'article L.3113-1 du code de la santé publique définit un régime particulier pour une trentaine de maladies infectieuses : celui des maladies à déclaration obligatoire.

Ce régime prévoit, sous le contrôle de l'État, je cite son article d'application R3113-4 : « de mettre en place d'urgence des mesures de prévention individuelle et collective et, le cas échéant, de déclencher des investigations pour identifier l'origine de la contamination ou de l'exposition ».

Il autorise l'organisation de mesures d'investigation et d'intervention et la collecte des informations indispensables pour la mise en oeuvre des mesures de prévention individuelle et collective.

On voit que son champ d'application est extrêmement large.

La CNIL a validé ce processus de traitement des informations de santé à plusieurs reprises. Le Gouvernement a ajouté la rubéole à cette liste de maladies infectieuses le 7 mai 2018.

Ce dispositif est parfaitement éprouvé et encadré. Pourquoi serait-il inadapté sur le Covid-19 ? En quoi avons-nous besoin d'un système dérogatoire ? Ce qui comptera, ce seront les moyens humains. L'outil informatique sera accessoire. Quels moyens avez-vous mis en place ?

M. le président.  - Amendement n°173, présenté par M. Bonnecarrère et les membres du groupe Union Centriste.

Rédiger ainsi cet article :

I.  -  Par dérogation à l'article L. 1110-4 du code de la santé publique, aux fins de surveillance épidémiologique aux niveaux national et local, ainsi que pour la recherche sur le virus covid-19 et les moyens de lutter contre sa propagation, des données relatives aux personnes atteintes par ce virus et aux personnes ayant été en contact avec elles peuvent être partagées dans le cadre d'un système d'information créé par décret en Conseil d'État et mis en oeuvre par le ministre chargé de la santé.

Ce ministre, ainsi que l'Agence nationale de santé publique, un organisme d'assurance maladie et les agences régionales de santé, peuvent en outre, aux mêmes fins, adapter les systèmes d'information existants et prévoir le partage des mêmes données dans les mêmes conditions que celles prévues au premier alinéa du présent I.

II.  -  Le système d'information mentionné au I, qui peut comporter des données de santé, a pour finalités la surveillance épidémiologique aux niveaux national et local, ainsi que la recherche sur le virus et les moyens de lutter contre sa propagation.

L'intégralité des données ayant vocation à alimenter ce système d'information seront anonymisées préalablement à leur saisie.

III.  -  Outre les autorités mentionnées au I, le service de santé des armées, les communautés professionnelles territoriales de santé, les établissements de santé, maisons de santé, centres de santé et médecins prenant en charge les personnes concernées, ainsi que les laboratoires autorisés à réaliser les examens de biologie médicale de dépistage sur les personnes concernées, participent à la mise en oeuvre de ce système d'information et peuvent, dans cette stricte mesure, avoir accès aux seules données nécessaires à leur intervention.

IV.  -  Les modalités d'application du présent article sont fixées par le décret en Conseil d'État mentionné au I après avis public de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. Ce décret en Conseil d'État précise notamment, pour chaque autorité ou organisme mentionné aux I et III, les services ou personnels dont les interventions sont nécessaires aux finalités mentionnées au II et les catégories de données auxquelles ils ont accès, ainsi que les organismes auxquels ils peuvent faire appel, pour leur compte et sous leur responsabilité, pour en assurer le traitement.

M. Philippe Bonnecarrère.  - Nous ne pourrions accepter un tel système - mise à part la question des équipes épidémiologiques sur le terrain - que s'il y avait anonymisation des données personnelles remontées dans le système d'information central.

Cette maladie, on l'a dit, est une saloperie. Un travail d'analyse et de recherche sur l'influence du diabète ou de l'hypertension, par exemple, nous paraît de bon aloi mais ne nécessite pas d'identification des données.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable à l'amendement n°153. Le régime des maladies à déclaration obligatoire, très artisanal, est inadapté. Les informations sont anonymes en théorie, mais pas en réalité. Les maladies concernées sont suffisamment rares, heureusement, pour ne pas exiger un système d'information à grande échelle. En l'espèce, ce système n'est pas opérant.

Au demeurant, le Parlement pourrait apporter un toilettage bienvenu à ce régime des maladies à déclaration obligatoire.

Monsieur Bonnecarrère, un fichier anonymisé à vocation épidémiologique est une bonne idée, mais pas pour remonter des filières de contamination, qui réclament précisément des données nominatives. Je ne doute pas que le ministère de la Santé développe déjà un tel projet épidémiologique pour mieux connaître le virus. Vous ouvrez un débat intéressant mais votre proposition ne répond pas à notre finalité. Avis défavorable aux amendements nos153 et 173.

M. Olivier Véran, ministre.  - Avis défavorable aussi ; le premier sera satisfait si un amendement du Gouvernement sur le caractère obligatoire de la déclaration est adopté.

Monsieur Bonnecarrère, nous ne créons pas de fichier national, mais nous nous greffons sur l'existant, à savoir le fichier amelipro, qui comporte des données non anonymisées sur l'état de santé des patients. Ce cadre législatif, ancien, n'a jamais été remis en cause.

Nous créons par ailleurs le Sidep, qui n'est pas un fichier mais un système d'information permettant au laboratoire de constituer la chaîne du prélèvement au résultat du test. Ce n'est pas une application de « traçage » - terme anxiogène auquel je préfère celui de suivi épidémiologique - mais d'étiquetage harmonisé quelles que soient les modalités de prélèvement, afin d'éviter les pertes de données.

M. Philippe Bonnecarrère.  - Je crains que l'énergie mise à créer des systèmes d'information divers et variés ne se heurte à la mise en oeuvre pragmatique - voyez nos amis allemands. Autant je soutiens la mise en place d'équipes épidémiologiques de terrain, autant cet acharnement à monter des systèmes me laisse sceptique. (Applaudissements)

M. Pierre Ouzoulias.  - Certes, la peste figure parmi les maladies infectieuses à déclaration obligatoire, mais aussi le chikungunya, la tuberculose et la dengue... Ma proposition émane de l'Académie nationale de médecine, qui n'a pas compris pourquoi le Gouvernement n'a pas ajouté le Covid à la liste par décret, comme il peut le faire, ce qui aurait permis de faire remonter une masse d'informations sur l'épidémie.

Comme M. Bonnecarrère, je souhaite que l'on soit efficace et opérationnel, et qu'on évite les usines à gaz.

M. Alain Milon, rapporteur pour avis.  - La commission des affaires sociales avait envisagé d'intégrer le Covid-19 dans la liste des maladies à déclaration obligatoire. Elle y a renoncé parce qu'il s'agit d'une maladie épidémique et non chronique, qui pourrait être éradiquée si l'on trouve un vaccin, que le virus pourrait muter. Cela dit, le régime des maladies à déclaration obligatoire est obsolète et mériterait d'être revu.

L'amendement n°153 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°173.

M. le président.  - Amendement n°72, présenté par MM. Sueur, Kanner, Antiste et Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Jomier, Lurel et Marie, Mmes Monier, Préville et de la Gontrie et MM. P. Joly, Lozach, Montaugé, Éblé et Vaugrenard.

Alinéa 1

Rédiger ainsi cet alinéa :

Aux seules fins de lutter contre la propagation de l'épidémie de covid-19 et pour la durée strictement nécessaire à cet objectif ou, au plus tard, pour une durée d'un an à compter de la publication de la présente loi, les données relatives aux personnes atteintes par ce virus et aux personnes ayant été en contact avec elles peuvent être partagées, sous réserve du recueil du consentement des personnes intéressées, dans le cadre d'un système d'information créé par décret en Conseil d'État et mis en oeuvre par le ministre chargé de la santé.

M. Jean-Pierre Sueur.  - La langue de bois n'est jamais très utile. Le groupe socialiste et républicain a beaucoup travaillé pour trouver une rédaction conciliant l'impérieuse nécessité de la santé publique et l'impérieuse nécessité du respect de la vie privée et des libertés publiques. Nous ne sommes pas parvenus à un accord, disons-le.

D'où cet amendement, signé par 17 d'entre nous, imposant le consentement des personnes concernées ainsi que le respect du secret médical. Nous le présentons pour la clarté du débat. Nous rejoignons par ailleurs le reste du groupe, et la commission, sur les six garanties, indispensables à nos yeux. Le procédé est inhabituel, mais l'engagement politique n'a de sens qu'assis sur le parler vrai.

M. le président.  - Amendement n°73, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 1, au début

Supprimer les mots :

Par dérogation à l'article L. 1110-4 du code de la santé publique,

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nous maintenons le principe du secret médical.

M. le président.  - Amendement n°82, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 1

Après la première occurrence du mot :

aux

insérer  le mot :

seules

M. Jean-Pierre Sueur.  - Cet amendement encadre les finalités de la création d'un système d'information et l'adaptation des systèmes existants.

M. le président.  - Amendement n°204, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 1

Remplacer les mots :

de l'état d'urgence sanitaire déclaré par l'article 4 de la loi n°2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19

par les mots :

strictement nécessaire à cet objectif ou, au plus tard, pour une durée d'un an à compter de la publication de la présente loi

M. Olivier Véran, ministre.  - Il se peut que la fin de l'état d'urgence sanitaire ne coïncide pas avec l'extinction totale de l'épidémie. Il sera toujours nécessaire de pouvoir briser les chaînes de contamination.

M. le président.  - Amendement n°83, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Alinéa 1

Remplacer les mots :

des données

par les mots :

les données

M. Jean-Pierre Sueur.  - Amendement rédactionnel.

M. le président.  - Amendement n°65, présenté par Mme Benbassa et M. Gontard.

I.  -  Alinéa 1

Supprimer les mots :

, le cas échéant sans le consentement des personnes intéressées,

II.  -  Après l'alinéa 11

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ....  -  Les données mentionnées au I et II ne peuvent être collectées qu'avec le consentement des personnes intéressées.

Mme Esther Benbassa.  - Le mécanisme prévu à cet article est particulièrement intrusif et bureaucratique. Aucun garde-fou n'est prévu sinon un simple rapport non contraignant de la CNIL. Le Gouvernement légifère en solitaire... La création d'un fichier recensant nos concitoyens n'a rien d'anodin -  notre Histoire l'a démontré  - et doit être strictement encadré. C'est ce que fait cet amendement en prévoyant le consentement de la personne concernée au recueil des données. Ce droit de regard préalable contribuera à la relation de confiance.

M. le président.  - Amendement n°177, présenté par M. Bonnecarrère et les membres du groupe Union Centriste.

Alinéa 1

Supprimer les mots :

, le cas échéant sans le consentement des personnes intéressées,

M. Philippe Bonnecarrère.  - Cet amendement impose le recueil du consentement des personnes intéressées pour traiter et intégrer leurs données dans ce qu'on nous présente tantôt comme un fichier, tantôt comme un système d'information.

Or autant nous sommes favorables aux équipes épidémiologiques de terrain pour casser les chaînes de contamination, autant nous considérons que les données médicales sont des données personnelles et qu'il vous appartient de consentir à ce qu'elles soient mises ou pas sur un système d'information national...

M. Loïc Hervé.  - Très bien !

M. Philippe Bonnecarrère.  - S'il m'est permis, pour une fois, d'évoquer un élément personnel, il y a un an, je faisais campagne pour les élections européennes pour la liste Renew Europe. J'expliquais à mes concitoyens tarnais que s'ils étaient Américains, leurs données personnelles appartiendraient aux sociétés commerciales qui les recueillent ; que s'ils étaient Chinois, elles appartiendraient à l'État ; mais qu'étant Européens, c'est à eux qu'elles appartiennent. Je suis profondément contrarié que cela ne soit bientôt plus vrai. Ne vous y trompez pas, mon propos n'est pas politique - j'ai voté le soutien au Premier ministre hier- mais d'une autre nature.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable aux amendements nos72 et 73. Je le redis, nous ne pouvons compter sur les seuls médecins pour recueillir des centaines de milliers de données par semaine. C'est bien parce qu'il faut déroger au secret médical que nous sommes réunis pour légiférer.

Je n'échangerai pas la satisfaction de savoir que le secret médical est sauf contre celle de savoir que nous avons construit un système efficace pour casser les filières de contamination et protéger nos concitoyens.

Avis favorable, en revanche, à l'amendement n°82, qui apporte une précision heureuse.

Quant à l'amendement n°204, monsieur le ministre, vous ne pouvez nous demander de faire survivre ce système que vous nous demandez d'approuver à la fin de l'état d'urgence sanitaire. Nous sommes dans un régime juridique d'exception qui s'éteindra de lui-même le 22 mars 2021. S'il s'avère qu'il faut une prolongation, nous en délibérerons ensemble. Avis défavorable.

Défavorable à l'amendement n°83, qui apporte une précision inutile.

Avis défavorable aux amendements nos65 et 177 : nous avons préféré un autre système, plus efficace, celui du droit d'opposition, classique en matière de traitement des données. Le consentement préalable compromettrait la faculté de remonter efficacement les filières de contamination pour protéger nos concitoyens.

M. Olivier Véran, ministre.  - Avis défavorable aux amendements nos72 et 73 ; avis favorable à l'amendement n°82.

L'amendement n°204 du Gouvernement permet à mon avis de gagner du temps. Mais s'il faut revenir devant le Parlement pour proroger les dispositifs, soit.

Sagesse sur l'amendement n°83. Avis défavorable aux amendements nos65 et 177.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Ce n'est pas seulement le secret médical qui nous préoccupe mais l'absence de consentement des personnes, traditionnellement exigé pour la collecte de données. Le président Bas n'a peut-être pas pris assez au sérieux les amendements nos207 et 208 du Gouvernement qui incluent dans les listings les résultats négatifs, mais aussi les organismes assurant l'accompagnement social des intéressés, comme les associations ou les collectivités territoriales. Du coup, le champ des personnes concernées devient considérable. Avez-vous lu l'article du Journal du dimanche sur l'aréopage de personnes qui, au sein de l'AP-HP, réalisent ce travail de traçage ? On y trouve des ingénieurs, ou encore des hôtesses de l'air !

Secret médical et consentement de l'intéressé sont des valeurs fondamentales. C'est le sens de l'amendement déposé par une partie des membres du groupe socialiste et républicain. Je n'abuse pas de la bienveillance du président Larcher...

M. le président. - Bienveillance maîtrisée ! (Sourires)

M. Patrick Kanner.  - Notre groupe était en effet, non pas divisé, mais partagé sur ce point. Il y a une frontière fragile entre respect des libertés individuelles et efficacité de la protection sanitaire. Nous en sommes conscients. Certes, une majorité de notre groupe s'est alignée sur la commission des lois.

Mme Sylvie Robert.  - Nous avons accepté l'examen de cet amendement gouvernemental mais ce n'est pas un blanc-seing. L'encadrement de l'article n'en est que plus essentiel. Je salue les avancées importantes de la commission.

Le comité de suivi sera crucial. Il reste beaucoup de zones d'ombre et de flou.

La personne qui fait l'objet du recueil des données doit donner son accord.

Il faut bien expliquer la démarche et la finalité et préciser les droits en aval des personnes concernées. Mais je regrette qu'en amont, rien ne soit fait pour rechercher le consentement des personnes.

Nous avons fait un pari qui ne sera gagnant que si la stratégie sanitaire tient bon.

Mme Laurence Rossignol.  - Je ne suis pas signataire de cet amendement et ne le voterai pas car, à défaut de vaccin et de traitement, en France comme en Haïti et en Centrafrique, il n'y a pas d'autre moyen de combattre le vaccin que de repérer les malades et leurs contacts et de les isoler.

Monsieur le ministre, évaluez le risque que nous prenons en ne votant pas l'amendement exigeant le consentement, qui rendrait le fichier inopérant. Le climat des discussions est cordial mais n'invite pas à la confiance. On apprend que des fichiers ont déjà commencé à être construits, que les cas négatifs seraient inclus dans les listings... Vous étendez votre système.

Or le président de votre parti a le mauvais goût de qualifier le Sénat d'irresponsable parce qu'il n'est pas d'accord avec vos méthodes, vos procédés et vos arrière-pensées.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Je préfère le consentement au non-consentement mais il ne faut pas que la personne contaminée refuse de dire qui elle a rencontré. C'est pourquoi le maintien de ce système d'information est incompatible avec le consentement. Le droit d'opposition, c'est autre chose.

En revanche, il est important que les personnes de la plateforme de l'assurance-maladie qui appellent les cas contacts ne donnent pas l'identité de la personne malade, ni ne divulguent celle de ces cas, pour éviter les suspicions et insister sur la nécessité du dépistage.

M. Bruno Retailleau.  - Nous ne connaissons que peu de choses sur la propagation du virus et les systèmes épidémiologiques nous permettront d'y voir un peu plus clair, sinon de sortir de la nuit pour entrer dans le brouillard.

Le RGPD est le régime le plus protecteur. Son article 15 est très clair, en cas de crise, on peut déroger à certains principes.

Je veux dire à Philippe Bonnecarrère que le RGPD ne constitue pas une patrimonialisation de nos données. Elles vont chez les Gafam ! Preuve en est qu'ils ont donné des informations aux autorités de 131 pays sur les mouvements de population, la fréquentation des pharmacies et des parcs publics. Les Gafam ont plus d'informations sur les mouvements des Français dans leur propre pays que l'État !

L'amendement n°72 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°73.

L'amendement n°82 est adopté.

L'amendement n°204 n'est pas adopté.

L'amendement n°83 n'est pas adopté.

L'amendement n°65 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°177.

M. le président.  - Amendement n°39, présenté par Mme Rossignol, MM. Daudigny, P. Joly et Kerrouche, Mmes Préville et Meunier, M. Assouline, Mme Féret, M. Lurel, Mme Taillé-Polian, MM. Gillé, Leconte et Manable, Mme Lepage, MM. Tourenne, M. Bourquin et Antiste et Mmes Conway-Mouret et Perol-Dumont.

Alinéa 2

1° Après les mots :

en outre

insérer les mots :

, sous la direction d'un médecin,

2° Supprimer les mots :

être autorisés par décret en Conseil d'État à

3° Supprimer la seconde occurrence du mot :

à

Mme Laurence Rossignol.  - On évalue à quel point le système dont nous débattons est dérogatoire aux principes fondateurs du droit de la santé. Le secret médical est avant tout un droit des patients. Il faut préciser que les données ne peuvent être recueillies et exploitées que sous l'autorité d'un médecin.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°39 n'est pas adopté.

L'amendement n°185 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°84, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 3

Après le mot :

collectées

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

ou partagées par ces systèmes d'information créés ou adaptés à ces fins ne peuvent être conservées à l'issue de la durée définie au premier alinéa.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Cet amendement propose une nouvelle rédaction de l'alinéa 3.

L'amendement n°48 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°188, présenté par Mme Joissains et M. Bonnecarrère.

Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Ces données ne peuvent en aucun cas être hébergées à l'extérieur de l'Union Européenne. 

M. Philippe Bonnecarrère.  - Cet amendement a été rédigé par Mme Joissains. Il porte sur la localisation des données, sur le territoire européen et correspond au combat de longue date de la présidente Morin-Desailly pour la souveraineté numérique.

M. le président.  - Amendement n°182 rectifié, présenté par MM. Gremillet et de Legge, Mme Deromedi, MM. Perrin et Raison, Mmes Deroche, Chauvin et Noël, M. Priou, Mme Malet, MM. Cuypers, Pellevat et Pierre, Mmes Thomas et Chain-Larché, MM. Kennel, Bascher, Lefèvre, Charon et B. Fournier, Mme Lamure, MM. Houpert, Piednoir et Bonne, Mme Micouleau, MM. Bouchet, Vogel et Vaspart, Mme Ramond, M. Danesi, Mme Canayer, MM. Joyandet, de Montgolfier, Grosdidier, Sido, Leleux et Regnard, Mmes Garriaud-Maylam et Lassarade, M. Bonhomme, Mme Morhet-Richaud, M. Brisson et Mme Dumas.

Alinéa 5

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Il fixe également les conditions de protection des données recueillies dès l'installation des brigades sanitaires jusqu'au terme de leur mission et les conditions de leur hébergement en open data dans un data center situé sur le territoire national.

M. Max Brisson.  - Cet amendement se justifie par son texte même.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable à tous ces amendements.

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°84 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°188.

L'amendement n°182 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°190, présenté par MM. Malhuret, Wattebled et Capus.

Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Dans l'hypothèse où une exploitation statistique à des fins de recherche scientifique se révèle nécessaire, celle-ci est réalisée uniquement sur des données anonymisées.

M. Dany Wattebled.  - La protection de la vie privée implique que soient supprimées toutes les données à caractère personnel dès lors que leur utilité n'est plus avérée. Ce système d'information ne doit pas enrichir des systèmes d'information existants.

Cet amendement est issu d'un échange avec l'Association des départements de France concourant à la protection des données personnelles.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°190 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°205, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

M. Olivier Véran, ministre.  - La commission a limité le périmètre des données de santé qui pourront être renseignées dans les systèmes d'information mis en place. Or les catégories de données seront fixées par décret en Conseil d'État, pris après avis de la CNIL. Il n'est donc pas opportun de fixer ces éléments dans la loi.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Nous ne voulons pas laisser de blanc-seing au ministre pour qu'il écrive son décret comme il l'entend.

Toute donnée étrangère à la contamination par le Covid doit être écartée, sinon ce fichier donnera toutes les informations de santé d'une personne, qu'il s'agisse de diabète, de maladies cardio-vasculaires, respiratoires ou autres, d'antécédents de cancers, etc. sans qu'elles présentent un intérêt pour la lutte contre l'épidémie.

Monsieur le ministre, renoncez à cet amendement.

M. Philippe Bonnecarrère.  - Cet amendement est passionnant car il porte sur l'essentiel, dont nous débattons depuis le début de la soirée. Nous avons un problème. Soit nous respectons l'anonymat et il n'y a aucune difficulté pour faire figurer les informations de santé, pour un bon travail de recherche. Soit nous acceptons l'identification et il ne faut pas inscrire toutes ces informations.

Si le Gouvernement veut maintenir l'identification ainsi que l'ensemble des données, il est certain qu'il nous placerait dans une situation impossible.

M. Olivier Véran, ministre.  - Il ne s'agit pas d'une liste exhaustive des données de santé sans intérêt pour l'épidémie.

Je vais, une fois n'est pas coutume, parler en médecin. Ceux qui siègent parmi vous y seront sans doute particulièrement attentifs. Pour tester un patient, il y a la PCR, le test biologique. Mais imaginons qu'il y ait aussi à disposition un scanner pulmonaire pour identifier des lésions sous-jacentes, signes de la présence du virus, même en l'absence de symptômes, et de réaction positive aux tests.

Avec l'article tel qu'il est rédigé par la commission, cela ne peut plus être inscrit dans le dossier. Idem pour l'agueusie et l'anosmie, signes pathognomoniques de la maladie. Il ne faut pas empêcher les médecins d'indiquer les données qui leur semblent essentielles pour le suivi des malades. En outre, la CNIL donnera son avis sur le décret.

L'amendement n°205 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°206, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 5

Supprimer les mots :

garantit et

M. Olivier Véran, ministre.  - Cet amendement précise la notion de droit d'opposition. Un malade peut ne pas vouloir apparaître comme le patient zéro, mais il ne peut refuser de figurer dans le système d'information. Sinon, le traçage de la chaîne de contamination serait rompu.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Bruno Retailleau.  - Je ne comprends pas l'enjeu de cet amendement.

M. Olivier Véran, ministre.  - Votre commission a voulu garantir un droit d'opposition vis-à-vis du Sidep. Mais un malade pourrait s'opposer à la recherche de la chaîne de contamination en refusant de figurer dans le fichier...

L'amendement n°206 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°71 rectifié, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéas 6 à 12

Supprimer ces alinéas.

Mme Esther Benbassa.  - Le dispositif de brigade proposé par le Gouvernement est flou. Pour détecter les chaînes de contamination, le projet de loi prévoit un système d'information reposant sur un recueil de données accessibles à des agents agréés.

C'est problématique car cela implique le recueil de données privées, transmises à des non-médecins, à des agents du ministère, sans garantie d'anonymisation et d'absence d'utilisation ultérieure.

La CNIL a alerté sur les dangers que pourrait représenter la création d'un listing des personnes malades. Rien ne garantit que celui-ci ne sera pas utilisé pour prendre des mesures discriminatoires à leur encontre. En outre, cet article porte atteinte au principe essentiel de secret médical. La santé publique est notre objectif commun, mais pas au prix de la diffusion de nos données personnelles.

Cet amendement expurge l'article 6 de sa substance la plus attentatoire à la vie privée.

M. le président.  - Amendement n°207, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 7

Après le mot :

résultats

insérer les mots :

, y compris non positifs,

M. Olivier Véran, ministre.  - Cet amendement très important permet la transmission de résultats y compris non positifs dans le cadre du Sidep, afin que le système puisse parvenir à son objectif. Il faut éviter les pertes de données.

M. le président.  - Amendement n°85, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 12

Rédiger ainsi cet alinéa :

III.  -  Outre les autorités mentionnées au I, tout organisme peut participer à la mise en oeuvre de ces systèmes d'information que dans la mesure où il répond strictement aux finalités et pour les seules données de santé définis au II. L'accès et la consultation de ces données sont exercés par ou sous le contrôle d'un professionnel de santé.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nous encadrons fortement la liste des organismes pouvant participer à la mise en oeuvre des systèmes d'information, selon les critères de finalités retenus, et pour les seules données de santé dont l'accès et la consultation sont réservés à un professionnel de santé, ou effectués sous son contrôle.

M. le président.  - Amendement n°208, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 12

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Les organismes qui assurent l'accompagnement social des intéressés dans le cadre de la lutte contre l'épidémie peuvent recevoir les données nécessaires à l'exercice de leur mission.

M. Olivier Véran, ministre.  - Cet amendement permet la transmission de données nécessaires à l'accompagnement social des personnes vulnérables, dans le cadre des mesures prises pour lutter contre l'épidémie du Covid-19, à des organismes comme les services des collectivités territoriales, de l'État dans les territoires ou des associations, chargés spécifiquement du suivi des intéressés dans le cadre de la crise sanitaire.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable à l'amendement n°71 rectifié qui supprime du texte la mention des finalités du système d'information. Alors, il pourrait servir à n'importe quoi ! Le vote de cet amendement se retournerait contre les intentions de ses auteurs.

Avis favorable à l'amendement n°207 : il est important de suivre les personnes après un premier test négatif.

Avis défavorable à l'amendement n°85 qui supprime la liste des autorités pouvant accéder aux données de santé. De plus, il ne sera pas toujours possible d'avoir un professionnel de santé pour examiner les données collectées.

Sur l'amendement n°208, je propose une transaction : avis favorable si vous rectifiez, monsieur le ministre, votre amendement en ajoutant « strictement » devant « nécessaires ».

M. Olivier Véran, ministre.  - C'est entendu.

M. le président.  - Ce sera l'amendement n°208 rectifié.

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis négatif sur les amendements nos71 rectifié et 85.

L'amendement n°71 rectifié n'est pas adopté.

L'amendement n°207 est adopté.

L'amendement n°85 n'est pas adopté.

L'amendement n°208 rectifié est adopté.

L'amendement n°49 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°38 rectifié ter, présenté par M. Kerrouche, Mme Harribey, MM. Marie, Durain, Kanner et Sueur, Mme Ghali, M. Dagbert, Mmes Lubin et de la Gontrie, M. Antiste, Mme S. Robert, MM. Daudigny et J. Bigot, Mme Monier et M. Duran.

Après l'alinéa 11

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

....  -  Tout traitement automatique par un algorithme d'intelligence artificielle des données des systèmes d'information prévus au présent article est interdit.

M. Jérôme Durain.  - Le projet de loi bioéthique toujours en cours d'examen encadre le recours à des traitements algorithmiques dans le cas d'actes de santé « à visée préventive, diagnostique ou thérapeutique ». Le patient devra être préalablement informé.

Cet amendement interdit l'utilisation par l'intelligence artificielle des données collectées par les systèmes d'information prévus à cet article. La consultation préalable des patients est obligatoire. Le défenseur des droits avait attiré notre attention sur le risque couru.

L'amendement n°38 rectifié ter, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°90, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'alinéa 12

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

L'Assemblée nationale et le Sénat peuvent requérir toute information complémentaire dans le cadre du contrôle et de l'évaluation de ces systèmes d'information.

Chaque semestre à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement adresse au Parlement un rapport détaillé sur l'application des dispositions du présent article.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Il convient de supprimer l'habilitation à légiférer par ordonnances demandée par le Gouvernement et de la remplacer par des dispositions assurant le contrôle effectif du Parlement au cours de l'année d'application du présent article.

Cela est conforme à la position de la commission des lois, qui ne souhaite pas recourir aux ordonnances.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - En vous écoutant, puis en relisant votre amendement, je me rends compte qu'il faudra le réexaminer dans le cadre de la CMP : son objet est en contradiction avec son dispositif. Nous avons supprimé le recours aux ordonnances dans cet article ! Avis défavorable, en attendant.

M. Jean-Pierre Sueur.  - En effet, nous avons eu tort de mentionner la suppression des ordonnances, déjà acquise. Je vous donne acte de votre lecture...

L'amendement n°90 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°81, présenté par M. Kerrouche et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'alinéa 12

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

....  -  Le Défenseur des droits établit un rapport spécial et public relatif à l'impact, notamment social, du traitement des données des systèmes d'information prévus au présent article sur les droits et libertés individuelles.

M. Jérôme Durain.  - Cet amendement pourvoit aux risques de discrimination sur lesquels le Défenseur des droits a attiré notre attention. Confions à ce dernier un rapport spécial et public relatif à l'impact social du traitement des données par les systèmes d'information mis en place.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - le Défenseur des droits ne nous a pas attendus ! Il vient de remettre son rapport. Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°81 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°99, présenté par Mme de la Gontrie et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 13, première phrase

Après les mots :

avis public

insérer le mot :

conforme

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Selon cet article, le décret prévu sera pris après avis de la CNIL. Nous demandons un avis conforme. La présidente de la CNIL a indiqué ses exigences aujourd'hui devant la commission des lois de l'Assemblée nationale, concernant aussi bien le questionnaire que la durée de conservation des données.

M. le président.  - Amendement identique n°176 rectifié, présenté par M. Bonnecarrère et les membres du groupe Union Centriste.

M. Philippe Bonnecarrère.  - Compte tenu de notre faible appétence pour les fichiers, l'avis conforme et public de la CNIL serait une garantie pertinente.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis favorable. Il y a d'autres cas connus de lien entre un avis conforme d'une autorité administrative indépendante (AAI) et le contenu d'un décret, et ce depuis plusieurs décennies. Cela a été le cas pour la CNIL jusqu'en 2004.

M. Olivier Véran, ministre.  - J'ai un doute constitutionnel. Il me semble que le Conseil constitutionnel a estimé que le Premier ministre ne pouvait exercer son pouvoir réglementaire sous la contrainte de l'avis conforme d'une AAI.

C'est pourquoi j'émets un avis défavorable même si je comprends la logique de ce dispositif.

Les amendements identiques nos99 et 176 rectifié sont adoptés.

M. le président.  - Amendement n°209, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 13, seconde phrase

Après les mots :

aux finalités mentionnées au II

insérer les mots :

et rendues obligatoires à ce titre

M. Olivier Véran, ministre.  - Il convient de donner un caractère obligatoire aux interventions des différentes personnes et organismes autorisés à accéder aux systèmes d'information mis en place en vue de lutter contre l'épidémie de Covid-19, notamment pour les laboratoires et les personnels de santé. Le caractère exhaustif du système est un élément essentiel pour atteindre les objectifs qui lui sont assignés.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Cet amendement, très tardif, n'a pu être examiné par la commission. Il est difficile de l'interpréter.

Mais peut-être le président de la commission des affaires sociales nous livrerait-il son opinion ? (M. Alain Milon fait signe que non.)

Monsieur le ministre, si vous discutez de ce point avec l'Assemblée nationale, nous pourrons en reparler par la suite. Avis défavorable, donc.

L'amendement n°209 n'est pas adopté.

L'amendement n°189 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°80, présenté par M. Leconte et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 14

Rétablir le V dans la rédaction suivante :

V.  -  En vue du rétablissement progressif de la libre circulation dans l'espace Schengen et dans l'Union européenne, le système d'information est conçu pour pouvoir être interopérable avec les systèmes équivalents mis en place dans l'Union européenne, dès lors que leur finalité est commune et que les conditions posées à l'exploitation et à la conservation des données respectent les conditions posées au IV du présent article.

M. Jérôme Durain.  - Nous proposons un dispositif destiné à faciliter le retour à la libre circulation dans l'Espace Schengen, dès lors que la recherche des chaînes de contamination est possible, dans le respect de nos exigences relatives au traitement des données personnelles, au sein de l'Union européenne.

L'amendement n°80, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°170, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 19 

Rédiger ainsi cet alinéa :

Sa composition, qui inclut un représentant de chaque groupe parlementaire, est fixée par décret.

M. Pierre Ouzoulias.  - Cet amendement assure une représentation pluraliste du comité de contrôle et de liaison que notre commission se propose de créer. Chaque groupe parlementaire doit pouvoir y être représenté.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - L'Assemblée nationale et le Sénat respectent déjà leurs configurations politiques respectives pour les nominations aux organismes extérieurs. Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°170 est retiré.

M. Bruno Retailleau.  - Quel sera l'effectif des brigades, monsieur le ministre ? On a évoqué 5 000, 20 000, 30 000 personnes. Qu'en est-il ?

M. Olivier Véran, ministre.  - Plutôt que de parler de brigades, je préfère les qualifier de brigades d'anges gardiens. Je ne peux vous donner un chiffre précis : tout dépend du périmètre concerné. S'il s'agit de tous les professionnels de santé chargés du suivi épidémiologique, nous sommes bien au-delà de 100 000 personnes en théorie, puisque la totalité des médecins libéraux et hospitaliers est concernée, ainsi que les agents de l'assurance maladie et tous les salariés des ARS.

Le niveau 1 du suivi inclut tous les médecins de terrain de premier recours. Ils sont très nombreux. Le niveau 2 se situe au niveau de l'assurance maladie : quelque 3 000 personnes en sont chargées. Le niveau 3 repose sur les salariés des ARS et il s'agit encore de plusieurs milliers de personnes. La version anglo-saxonne ou coréenne du tracing inclut les personnes réalisant le portage des repas à domicile, par exemple.

Concrètement, au moins un salarié de l'assurance maladie sera mobilisé par jour pour 15 personnes, soit un malade et ses cas contacts.

M. Loïc Hervé.  - Je voterai l'article 6, bien que j'aie voté les amendements de suppression. Mes inquiétudes demeurent, mais l'avis conforme de la CNIL est une évolution importante. Il faut consolider la rédaction sénatoriale, dans la perspective de la navette.

Mme Catherine Morin-Desailly.  - Je suis dans le même état d'esprit. Les deux commissions ont fait un excellent travail.

Il y a cependant une tension entre l'objectif de protection des libertés individuelles sur le long terme, en évitant le stockage de données dans le temps, et les nécessités de l'intelligence artificielle qui a besoin de beaucoup de données. Les Gafam savent déjà tout de nous, pourquoi leur confier nos marchés ? Pourquoi n'avoir pas choisi une entreprise française à dimension européenne et internationale comme OVH, pour le traitement des données ?

Je salue Martin Hirsch, directeur de l'AP-HP, qui a refusé la proposition de collecte et de traitement gratuits des données par l'entreprise Palantir, qui a travaillé avec la CIA.

Mme Laurence Rossignol.  - En matière sociale et particulièrement en droit de la santé, il faut souvent faire la balance entre libertés fondamentales et protection des plus faibles ou du plus grand nombre. J'ai fait le choix, grâce à la rédaction exigeante de la commission des lois, d'adhérer à cette méthode d'éradication de l'épidémie.

Cependant le Gouvernement n'a pas convaincu certains de mes collègues de groupe. Ce vote est sous haute surveillance. Je crains que vous ne rétablissiez votre texte à l'Assemblée nationale par amendement, ce qui remettrait en cause notre démarche de soutien.

À la demande du groupe CRCE, l'article 6 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°102 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 307
Pour l'adoption 278
Contre   29

Le Sénat a adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°37, présenté par MM. P. Joly et Durain, Mmes Lepage, Grelet-Certenais et Préville, MM. Antiste, J. Bigot et Devinaz, Mme Conway-Mouret, MM. Mazuir et Tissot, Mme Perol-Dumont, M. Duran et Mme Jasmin.

Après l'article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'établissement d'une carte de classification des départements selon leur état sanitaire épidémique est élaborée sur la base de critères comprenant le taux de circulation du virus, les capacités hospitalières en réanimation, la capacité locale de tests de détection des porteurs du virus mais aussi sur la base d'un dialogue à l'échelon départemental entre l'État, ses services sur le terrain, les professionnels et les élus locaux.

M. Jérôme Durain.  - Cet amendement revient sur la carte verte et rouge. Il interpelle le Gouvernement sur les erreurs qui ont été commises dans la classification : l'absence de pertinence de certains critères retenus et l'absence de dialogue préalable.

Plusieurs départements se sont étonnés de se découvrir en zone rouge alors que les critères ne laissaient pas apparaître de risques supérieurs à ceux de départements similaires. Cela a été le cas du Lot, du Cher ou de la Haute-Corse, mais aussi de la Nièvre. Dans ce département, la surprise a été grande, car si l'on a compté quatre patients en réanimation, le service hospitalier mobilisé dispose de quinze respirateurs et peut adapter sa capacité de lits.

Notre collègue Joly note que le critère de saturation des équipements sanitaires à l'échelle régionale n'a aucun sens dans un département situé à l'extrémité d'une région : les malades potentiels peuvent parfaitement être orientés vers la région voisine.

L'image de la Nièvre a été écornée. Or c'est une campagne protégée. Il faut plus de dialogue.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Sagesse.

M. Olivier Véran, ministre.  - Défavorable.

M. Jean-Claude Requier.  - Le Lot, dans la carte publiée, était un nez rouge au milieu d'un océan de vert ! (Rires) Un médecin urgentiste avait comptabilisé tous les patients testés aux urgences... Cela a fait exploser le baromètre. Il en est résulté un grand émoi, dans ce département qui accueille de nombreux touristes. Le lendemain, le préfet est monté au créneau et tout est rentré dans l'ordre.

L'amendement n°37 est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°121, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les personnes définies à l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles et les personnes en situation de fragilité financière définies au deuxième alinéa de l'article L. 312-1-3 du code monétaire et financier sont exonérées des commissions perçues par un établissement de crédit à raison du traitement des irrégularités de fonctionnement d'un compte bancaire et des facturations de frais et de services bancaires durant toute la durée de l'état d'urgence sanitaire déclaré par l'article 4 de la loi n°2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face l'épidémie de covid-19.

Mme Laurence Rossignol.  - Ce texte doit aussi être d'urgence sociale. Les banques ne semblent pas toutes avoir compris quelle est la situation exacte des entreprises et des particuliers actuellement...

L'amendement précise que pendant la durée de l'état d'urgence sanitaire, les frais bancaires ne sont pas prélevés, pour les personnes fragiles financièrement. Car 500 euros, pour une famille en difficulté, c'est beaucoup.

Or les banques n'ont pas totalement répondu aux incitations du Président de la République et du Gouvernement en ce sens.

Cet amendement est simple. La « situation de fragilité financière » est définie par le code monétaire et financier.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis.

M. Philippe Mouiller.  - Je soutiens cet amendement et j'espère qu'une partie de mes collègues de groupe me suivront. Je rappelle que l'on n'a pas trouvé de solution sur les masques.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Je regrette que les amendements présentant une dimension sociale fassent toujours l'objet d'explications particulièrement lapidaires de la commission et du Gouvernement.

M. Dany Wattebled.  - Je voterai cet amendement à dimension sociale, sans problème.

L'amendement n°121 est adopté et devient un article additionnel.

ARTICLE 7

M. Jean-Pierre Sueur .  - Notre groupe a déposé un amendement, écarté au titre de l'article 45 de la Constitution. Nous avions pris des engagements devant les associations d'élus pour que l'élection du maire et des adjoints dans une commune où le conseil municipal est au complet ait lieu avant fin mai.

M. le président.  - Amendement n°201 rectifié, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois.

Alinéas 5 et 13

Supprimer ces alinéas.

L'amendement de coordination n°201 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°199, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois.

Alinéa 10

Après la seconde occurrence de la référence :

insérer la référence :

du I

L'amendement de coordination n°199, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°210, présenté par le Gouvernement.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

.... - Par dérogation au troisième alinéa du II de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique, le lieu où est effectuée la quarantaine par les personnes entrant dans l'une des collectivités mentionnées à l'article 72-3 de la Constitution est décidé par le représentant de l'État.

M. Olivier Véran, ministre.  - Compte tenu de la situation spécifique des outre-mer, la lutte contre la propagation du virus passe dans ces territoires par les contrôles sanitaires aux frontières, en complément du confinement et de la montée en puissance des capacités sanitaires. C'est pourquoi une quatorzaine stricte est mise en oeuvre, en plus d'une interdiction forte sur les mouvements de personnes vers ces territoires.

Cet amendement confie au représentant de l'État le soin de déterminer le lieu de la quarantaine.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Nous avons souhaité quant à nous laisser une possibilité de choix, par exemple celui de passer la période de quarantaine à son domicile. Défavorable.

L'amendement n°210 n'est pas adopté.

L'article 7, modifié est adopté.

Les amendements nos193 et 52 ne sont pas défendus.

Interventions sur l'ensemble

M. Patrick Kanner .  - Le bureau exécutif de LaREM s'est fendu d'une saillie peut-être habituelle dans cette formation, regrettant la « démarche irresponsable qui a conduit une majorité de sénateurs à ne pas voter en faveur de la déclaration du Premier ministre, plaçant ainsi les logiques politiciennes avant l'intérêt national du pays ».

C'est une telle caricature, tant sur le fond que sur la forme ! Considérer la contradiction démocratique comme un danger pour la Nation relève d'une vision autoritaire. Nous nous considérons comme des lanceurs d'alerte sur la politique menée par le Gouvernement et sa stratégie de déconfinement.

Nous sommes globalement favorables à la prolongation de l'état d'urgence sanitaire. Cette délégation de pouvoir, dans la loi du 23 mars, a permis au Gouvernement de prendre 55 ordonnances relevant normalement de l'article 34 de la Constitution. Du jamais vu sous la Ve République ! Nous avons pris nos responsabilités. Mais ce soir, nous mettons un point d'arrêt à ce qui aurait pu constituer une dérive institutionnelle.

Je me félicite du vote de l'amendement de Mme Rossignol pour prévenir les violences conjugales. Nous nous sommes opposés au Stop Covid, un monstre du Loch Ness qui sort de plus en plus le museau au-dessus du lac.

Nous avons défendu les employeurs du secteur public, qui vont être surexposés dans les semaines à venir et qui doivent être protégés contre les démarches judiciaires - ce n'est pas du corporatisme, simplement du bon sens.

Nous déplorons l'absence totale d'anticipation de l'urgence sociale qui va suivre l'urgence sanitaire. Cela mettra en péril la confiance des Français.

En responsabilité, et avant un probable recours que nous porterons devant le Conseil constitutionnel, le groupe socialiste et républicain dans son immense majorité s'abstiendra. (M. Jean-Pierre Sueur applaudit.)

M. Max Brisson .  - Malgré l'urgence sanitaire et le calendrier imposé par le Gouvernement, le Sénat a légiféré sérieusement. C'est sa marque.

Je salue les travaux de la commission des lois et de la commission des affaires sociales.

Artisans, commerçants, chefs d'entreprise, TPE, PME, directeurs d'école, inspecteurs de l'Éducation nationale, maires : tous auront à prendre des mesures capitales dans l'urgence. Chacun est prêt à prendre un risque pour que l'activité économique, culturelle, sociale reprenne.

Lorsqu'il y aura des plaintes des citoyens estimant qu'une réouverture d'école a mis en danger la santé de leurs enfants, quelles seront les protections des élus ?

Pour qu'il y ait confiance, il faut des réassurances. Le Sénat a clarifié le régime de responsabilité des élus. Il fallait dire le droit, fixer la règle, lever les incertitudes juridiques.

Il ne s'agit d'exonérer personne, encore moins le Gouvernement ou la haute administration, mais de protéger les petites mains opérationnelles du déconfinement qui mettront en oeuvre des protocoles qu'elles n'ont pas décidés. Il s'agit de tenir compte de la situation exceptionnelle, c'est la clé de l'engagement confiant. Le rejet unanime par le Sénat de l'amendement de suppression est un message fort.

C'est par le traçage, sécurisé mais de notre temps, que l'on cassera les reins de l'épidémie. L'outil numérique est le plus simple et le plus efficace pour vaincre. Nous serons attentifs au sort des six garanties introduites par le Sénat, socle de l'équilibre entre libertés publiques et santé publique. Elles constituent les garde-fous qui nous paraissent essentiels.

Le groupe Les Républicains votera ce texte et sera attentif à ce que les apports du Sénat ne soient pas remis en cause dans la navette. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Éliane Assassi .  - Nous ne sommes pas en guerre, c'est peut-être pire, dit Régis Debray. Le Covid-19 n'a ni drapeau, ni haine, ni buts de guerre. Dans une guerre, on meurt pour quelque chose, il y a deux camps. Tout le monde est contre une catastrophe. Le tragique, c'est l'absence de sens, l'absurde.

Par son vote, hier, le Sénat a signifié que le déconfinement proposé était improvisé, confus et incohérent. Le désastre social et économique ne sera qu'aggravé. Ce qui nous est demandé aujourd'hui est anecdotique, tant la part du réglementaire et des ordonnances est large. Comment ne pas s'interroger sur le peu de cas qui est fait du Parlement, vu les conditions de travail, inédites, qui lui sont imposées ?

En Espagne, les policiers distribuent des masques gratuits ; ici, on prévoit que les agents des transports verbalisent ceux qui n'en ont pas.

Le Gouvernement accentue la coercition à tout va, alors que masques et tests manquent, que l'impréparation des transports publics est criante, que la queue s'allonge devant les soupes populaires.

Le groupe CRCE proposait le libre choix des parents pour le retour à l'école, l'interdiction des licenciements et des expulsions locatives, la gratuité des masques, un renforcement du pouvoir du Parlement. Rien n'a été retenu.

Aucune précision n'a été donnée sur les modalités de la quarantaine. Tout ne peut pourtant être renvoyé au décret ! On met en place un système d'information inédit. À cet égard, les apports de la commission des lois, certes bienvenus, sont insuffisants : ni consentement au recueil des données, ni anonymisation.

Enfin, les maires ne doivent pas subir les conséquences des défaillances graves de l'État. Mais nous refusons l'élargissement incontrôlé de la déresponsabilisation. Nous devons déconfiner la démocratie. La lutte contre l'épidémie peut se poursuivre en dehors de l'état d'urgence.

En toute responsabilité, le groupe CRCE votera contre ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)

M. Philippe Bonnecarrère .  - Nous soutenons la prorogation de l'état d'urgence, première brique de ce texte. En situation de crise exceptionnelle, il est normal que l'exécutif dispose de moyens d'action. Nous avons ainsi prorogé l'ensemble des habilitations à légiférer par ordonnances, ce n'était pas une petite décision.

Deuxième brique : la responsabilité pénale des décideurs. Les différents groupes se sont félicités du vote du Sénat sur ce sujet. Prudence toutefois. Si l'Assemblée nationale nous demandait, en échange, de renoncer aux garanties posées par la commission à l'article 6, il faudrait être vigilant. Le Conseil constitutionnel ne s'est pas prononcé sur la loi Fauchon de 2000, la Cour de cassation s'étant refusée à lui transmettre une QPC sur le sujet.

S'agissant de l'assignation à résidence pour les malades, un équilibre nous semble avoir été trouvé.

Reste le débat sur l'article 6, que le groupe UC approuve pour l'essentiel, même si certains auraient souhaité dissocier l'action épidémiologique locale du système d'information national. Dans sa large majorité, il votera ce texte.

Malgré tout, l'économie de notre pays tient surtout grâce à la clé de voûte qu'est la Banque centrale européenne. Or la dernière décision de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe remet en cause sa faculté de rachats de créances pour injecter des liquidités dans l'économie. Les choses peuvent encore rebondir ; espérons que ce ne sera pas le cas de l'épidémie ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

Mme Véronique Guillotin .  - À l'issue de ces débats riches et condensés, des incertitudes demeurent sur la mise en oeuvre du déconfinement progressif, mais quoi de plus normal ? C'est un exercice inédit pour le Parlement comme pour le Gouvernement.

Dans l'attente de solutions médicales, comment arbitrer entre préservation de nos libertés et principe de précaution ? Faut-il ou non imposer le port du masque ?

Le système d'information est utile mais engendre des craintes légitimes. La mise en quarantaine est une privation de libertés qui a été correctement cadrée.

Nous sommes heureux que la responsabilité pénale et morale des maires ait été allégée.

Sur l'article 6, la question du consentement partage notre groupe. Nous considérons cependant le traçage comme un outil efficace.

Nous nous félicitons des mesures prises au sujet de l'accès de nos concitoyens d'outre-mer au territoire métropolitain, ainsi que de la transparence des prix du matériel médical.

Nous serons vigilants sur l'évolution du texte à l'Assemblée nationale.

Le groupe RDSE votera ce texte dans sa majorité, avec une minorité partagée entre abstention et vote contre.

M. Julien Bargeton .  - Je salue l'ensemble de ceux qui ont pris part à ce débat. Je rends hommage à la hauteur de vue du ministre, à la performance du président Bas dans des délais aussi courts, ainsi qu'aux prises de position du président Milon, toujours extrêmement éclairantes.

Nos échanges ont été riches, denses, évitant le piège du sectarisme, approfondissant les principes fondamentaux de notre République.

Quatre sujets restent en suspens : la date de fin de l'état d'urgence sanitaire, certaines mesures comme la quarantaine, le degré de responsabilité de ceux qui agissent dans le cadre de l'état d'urgence et l'article 6 qui ne mérite à mon sens ni excès d'honneur, ni excès d'indignité.

Sur chaque question nous avons dû arbitrer entre des principes, toujours en respect de celui de la proportionnalité. Je souhaite que cet état d'esprit prospère jusqu'à un accord en CMP.

« Je dis seulement qu'il y a sur cette terre des fléaux et des victimes et qu'il faut, autant qu'il est possible, refuser d'être avec le fléau », écrivait Albert Camus. Soyons donc de ceux qui combattent le fléau. Nous partageons cet objectif ; trouvons les solutions.

M. Dany Wattebled .  - Ce que nous craignions tant a pu être évité grâce aux efforts de tous : les hôpitaux n'ont pas été débordés. L'épidémie ralentit mais n'est pas vaincue. Dans les mois à venir, il nous appartient de rester sur nos gardes pour faire reculer le virus.

Nos concitoyens devront poursuivre leurs efforts. Le confinement, salutaire, ne saurait pourtant être davantage prolongé sans causer de dégâts sur la santé, la justice ou l'activité économique de notre pays.

Le groupe Les Indépendants se félicite que le Sénat ait mis fin à la prolongation automatique des détentions provisoires.

La reprise générale de l'activité doit être encadrée. L'augmentation de la propagation du virus doit rester la plus faible possible. L'outil numérique doit y contribuer. Ne nous en privons pas, mais encadrons son utilisation. Il fallait aussi préciser les conditions de la quarantaine.

Le groupe Les Indépendants se félicite du rôle renforcé donné au juge des libertés et de la détention, garant des libertés individuelles.

La quarantaine sera nécessaire pour enrayer l'épidémie, notamment dans les outre-mer.

La solution de cette crise ne saurait entièrement venir du Gouvernement. Chacun doit maintenir ses efforts. Le débat a mis en lumière le rôle incontournable des élus locaux. Le Sénat a eu raison de les protéger contre l'engagement de leur responsabilité pénale. Aujourd'hui plus que jamais, nous avons besoin de chacun pour réussir. C'est ensemble que nous vaincrons la maladie.

Ce projet de loi, amendé par le Sénat, a trouvé un équilibre satisfaisant. C'est heureux car rien ne saurait justifier le sacrifice de nos principes. « Vivre sans espoir, c'est cesser de vivre », écrivait Dostoïevski.

Le groupe Les Indépendants votera ce projet de loi.

M. Stéphane Ravier .  - Après six semaines et au moins 25 000 morts, le Gouvernement demande la prolongation de l'état d'urgence sanitaire. Le peuple français est un grand peuple, capable d'affronter les pires souffrances et d'accomplir les plus grands exploits, mais cela à condition que son chef lui dise la vérité et lui montre le cap. « On les aura ! », lançait Clemenceau, casque sur la tête, fournissant armes et munitions ; et on les a eus.

Mais ce Gouvernement est resté en seconde ligne, incapable d'offrir aucune protection aux Français. Les masques ? Trop techniques, a dit la porte-parole du Gouvernement. Inutiles selon le Premier ministre. Et voilà qu'ils seront bientôt obligatoires dans les transports publics sous peine d'amende.

Il est difficile de suivre des chefs qui ne savent pas où ils vont. Tout n'est que désordre et confusion. En banlieue, des émeutes éclatent dans une ambiance de racailles où l'on s'attaque aux policiers et aux pompiers.

Je l'ai dit il y a six semaines : vous avez menti, des Français sont morts et maintenant vous tremblez. Vous avez peur de la réaction des Français et peur de la justice.

Vous traitez nos concitoyens comme des enfants. Vous êtes prêts, dites-vous. Mais les Français ne sont plus prêts à subir des coupes budgétaires, à perdre leur emploi, à voir leurs anciens abandonnés et leurs proches mourir.

Restez chez vous, mais allez voter ; respectez les gestes barrières, mais mettez vos enfants à l'école, nous dites-vous. Les parents auront le choix entre perdre leur emploi et mettre leur enfant en danger - et vous vous défaussez sur les maires. Quand il y a le feu à la Nation, c'est à eux que vous faites appel ! La mort d'un enfant serait un drame impardonnable. Qu'un seul élève meure du coronavirus, et la sentence du peuple de France sera implacable. Vous serez reconnus comme responsables et coupables d'une politique criminelle. Naturellement, je voterai contre ce projet de loi.

À la demande du groupe CRCE, le projet de loi est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°103 :

Nombre de votants 345
Nombre de suffrages exprimés 265
Pour l'adoption 240
Contre   25

Le Sénat a adopté.

M. le président.  - Je remercie le président de la commission des lois et celui de la commission des affaires sociales. Leur tâche était ardue ; ils ont su conduire, dans des conditions insatisfaisantes, un débat de qualité.

Je remercie aussi la présidente et les présidents de groupe. Nous avons abordé des sujets majeurs.

Nous ne pourrons pas poursuivre, de manière permanente, cette manière de légiférer. Notre assemblée, qui a un rôle de balancier stabilisateur, doit pouvoir prendre le temps, prendre de la hauteur.

Quant à la langue de bois qu'évoquait le président Sueur, monsieur le ministre, c'est une actinobacillose. (Sourires)

M. Olivier Véran, ministre .  - Je remercie les deux présidents de commission et l'ensemble des sénateurs. Nous avons fait un travail efficace, dans un temps contraint. J'étais heureux d'être avec vous pour mon premier texte législatif complet en tant que ministre.

L'essentiel a été maintenu. Il y a eu peu de velléités gouvernementales de revenir sur les décisions des commissions. Il s'agissait de faire valoir des arguments différents - et qui ne tente rien n'a rien. Ce projet de loi poursuit son chemin à l'Assemblée nationale. Je ferai mon possible pour que l'on puisse espérer une CMP conclusive. Les délais d'examen sont contraints, certes, mais ce sont les délais des Français qui le sont. Je comprends la saisine du Conseil constitutionnel, même si elle reportera d'autant l'application de ce texte.

Prochaine séance, aujourd'hui, mercredi 6 mai 2020, à 15 heures.

La séance est levée à 1 h 5.

Pour la Directrice des Comptes rendus du Sénat,

Jean-Luc Blouet

Chef de publication

Annexes

Ordre du jour du mercredi 6 mai 2020

Séance publique

À 15 heures

Présidence : M. Gérard Larcher, président

Secrétaires de séance : MM. Michel Raison et Joël Guerriau

- Questions d'actualité au Gouvernement

Analyse des scrutins

Scrutin n°102 sur l'article 6 du projet de loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions

Résultat du scrutin

Nombre de votants : 341

Suffrages exprimés : 307

Pour : 278

Contre : 29

Le Sénat a adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (144)

Pour : 142

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat, qui présidait la séance, Mme Colette Giudicelli

Groupe SOCR (71)

Pour : 44

Contre : 5 - Mme Samia Ghali, M. Patrice Joly, Mmes Gisèle Jourda, Angèle Préville, M. Jean-Claude Tissot

Abstentions : 21 - Mmes Viviane Artigalas, Nicole Bonnefoy, Hélène Conway-Mouret, MM. Gilbert-Luc Devinaz, Vincent Éblé, Mmes Frédérique Espagnac, Martine Filleul, Marie-Pierre de la Gontrie, Laurence Harribey, Victoire Jasmin, MM. Bernard Jomier, Patrick Kanner, Jean-Jacques Lozach, Victorin Lurel, Didier Marie, Mme Marie-Pierre Monier, M. Franck Montaugé, Mme Sylvie Robert, M. Jean-Pierre Sueur, Mme Sophie Taillé-Polian, M. Yannick Vaugrenard

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Maurice Antiste

Groupe UC (51)

Pour : 42

Contre : 5 - Mme Annick Billon, MM. Olivier Cadic, Yves Détraigne, Mmes Catherine Fournier, Sophie Joissains

Abstentions : 4 - MM. Philippe Bonnecarrère, Bernard Delcros, Mmes Valérie Létard, Catherine Morin-Desailly

Groupe RDSE (23)

Pour : 12

Contre : 2 - MM. Jean-Pierre Corbisez, Joël Labbé

Abstentions : 9 - MM. Stéphane Artano, Henri Cabanel, Joseph Castelli, Jean-Noël Guérini, Éric Jeansannetas, Mme Mireille Jouve, M. Olivier Léonhardt, Mme Guylène Pantel, M. Jean-Yves Roux

Groupe LaREM (23)

Pour : 23

Groupe CRCE (16)

Contre : 16

Groupe Les Indépendants (14)

Pour : 14

Sénateurs non inscrits (6)

Pour : 1 - Mme Christine Herzog

Contre : 1 - M. Stéphane Ravier

N'ont pas pris part au vote : 4 - M. Philippe Adnot, Mmes Sylvie Goy-Chavent, Claudine Kauffmann, M. Jean Louis Masson

Scrutin n°103 sur l'ensemble du projet de loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions

Résultat du scrutin

Nombre de votants : 345

Suffrages exprimés : 265

Pour : 240

Contre : 25

Le Sénat a adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (144)

Pour : 142

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat, qui présidait la séance, Mme Colette Giudicelli

Groupe SOCR (71)

Contre : 4 - M. Patrice Joly, Mmes Angèle Préville, Sophie Taillé-Polian, M. Jean-Claude Tissot

Abstentions : 67

Groupe UC (51)

Pour : 45

Abstentions : 6 - Mme Annick Billon, MM. Philippe Bonnecarrère, Olivier Cadic, Yves Détraigne, Mmes Catherine Fournier, Sophie Joissains

Groupe RDSE (23)

Pour : 14

Contre : 2 - MM. Jean-Pierre Corbisez, Joël Labbé

Abstentions : 7 - MM. Stéphane Artano, Henri Cabanel, Joseph Castelli, Éric Jeansannetas, Olivier Léonhardt, Mme Guylène Pantel, M. Jean-Yves Roux

Groupe LaREM (23)

Pour : 23

Groupe CRCE (16)

Contre : 16

Groupe Les Indépendants (14)

Pour : 14

Sénateurs non inscrits (6)

Pour : 2 - M. Philippe Adnot, Mme Christine Herzog

Contre : 3

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean Louis Masson