Don de jours de repos pour les proches aidants

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, créant un dispositif de don de jours de repos non pris au bénéfice des proches aidants de personnes en perte d'autonomie ou présentant un handicap.

Discussion générale

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées .  - « Le besoin de s'aider engendre la bienveillance, une indulgence mutuelle, l'absence de toute rivalité », disait George Sand.

La bienveillance change le regard sur les plus fragiles. Les difficultés d'une famille sont l'affaire de tous en réalité, puisque tous, un jour, nous pourrions en avoir besoin.

Quelque huit à onze millions de Français, en majorité des femmes, aident un proche.

Maman d'un enfant en situation de handicap, je connais les contraintes, le dévouement des aidants et je salue leur courage.

Le rôle des aidants s'amplifiera avec le vieillissement de la société.

Les aidants ont 60 % de risques supplémentaires de maladie liée au stress et au surmenage. La moitié d'entre eux sont des actifs.

Le don de jours de repos est un enjeu majeur, déjà à l'oeuvre dans certaines entreprises. Il faut en sécuriser le dispositif juridique et soutenir l'engagement des entreprises.

Cette proposition de loi n'est pas parfaite mais elle constitue une avancée.

Avec Mmes Buzyn et Pénicaud, j'ai confié une mission sur les aidants à Dominique Gillot ; ses conclusions seront rendues en mars, nous pourrons en tenir compte dans le projet de loi sur la formation professionnelle.

Une société inclusive ne peut exister sans le soutien des proches aidants.

Le Gouvernement donne un avis favorable à cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, UC, RDSE et Les Indépendants)

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure de la commission des affaires sociales .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) La commission des affaires sociales s'est prononcée à une large majorité en faveur de l'adoption sans modification de cette proposition de loi. Sa portée sera toutefois limitée.

Plus de 8,3 millions de personnes - on parle parfois de 11 millions - aident un proche fragilisé par l'âge ou le handicap.

Les proches aidants connaissent une détresse profonde ; sourde et digne, souvent inexprimée, elle n'en est pas moins réelle et nous avons tardé à la distinguer du simple soutien que se doivent les membres d'un même entourage, que la loi n'a pas à régir. Quand la personne s'abîme doucement, qu'elle vit deux vies, la sienne et celle du proche, nous devons agir.

Le texte de Paul Christophe transpose aux proches aidants la loi du 9 mai 2014 sur les proches d'enfants atteints d'une maladie grave. L'idée était fort belle, installation dans la loi d'un élément de solidarité dans l'entreprise.

Pour les grandes entreprises, un certain nombre d'accords d'entreprise souvent plus favorables existaient déjà.

Pour les PME, il y a peu de jours de congé inemployés. Mais le Parlement l'a pourtant votée car il s'agissait d'une main tendue, qui disait la considération, l'empathie et l'appui des pouvoirs publics. C'est ce geste que je vous demande de renouveler aujourd'hui, même si je suis consciente que cette proposition de loi passe à côté de la réforme d'envergure que réclame la condition des aidants : aménagement du temps de travail, droits à la retraite, et pourquoi pas un véritable statut de l'aidant ?

Dans l'attente d'une consolidation de ces droits, je m'engage à veiller à ce que l'engagement pris par le Gouvernement de façonner une stratégie nationale en faveur des aidants, pris lors de la dernière Conférence nationale du handicap, soit tenu, et surtout à ce qu'il y intègre la condition des proches aidants de personnes âgées.

Je vous demande de voter cette proposition de loi en l'état. La modification de ce texte contraindrait nos assemblées à poursuivre une navette rendant son sort incertain.

Adressons aux aidants un geste fort, riche de promesses ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UC, Les Indépendants et Les Républicains)

Mme Patricia Schillinger .  - Cette proposition de loi s'inscrit dans le mouvement de reconnaissance des plus de huit millions d'aidants qui soutiennent bénévolement un proche dans sa vie quotidienne.

Longtemps, ils, ou plutôt elles, ont été invisibles. La spécificité de leurs besoins a longtemps été ignorée car elle semblait obéir à une solidarité perçue comme naturelle.

Peu à peu, nous avons pris conscience qu'il fallait aider les aidants, notamment en leur offrant un droit à congé. Je salue le droit au répit créé par la loi sur le vieillissement pour les proches de titulaires de l'Allocation personnalisée d'autonomie (APA).

Cette proposition de loi étend la loi dite Mathys du 9 mai 2014, au « salarié qui vient en aide à une personne atteinte d'une perte d'autonomie d'une particulière gravité ou présentant un handicap ». Certes, quelques jours de repos ne permettent pas de faire face sur le long terme mais ce pas est bienvenu.

Le groupe LaREM votera cette proposition de loi. Toutefois, nous déplorons l'émiettement des dispositifs. Il faut un texte global.

Tout le monde, un jour ou l'autre, peut devenir aidant tout en conservant une activité professionnelle - c'est le cas de 50 % d'entre eux. Leur rôle d'aidant touche leur parcours professionnel : refus de promotion, fatigue, et parfois hostilité ou discrimination.

Femmes à 60/70 %, les aidants souffrent déjà des inégalités entre les femmes et les hommes au travail. Il faut réfléchir avec les entreprises pour garantir que cela ne soit pas mal perçu dans le collectif du travail.

Le vote d'aujourd'hui n'épuise pas, loin s'en faut, la question du soutien aux aidants, mais il est gage de notre engagement. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, RDSE et sur quelques bancs du groupe UC)

M. Dominique Watrin .  - Merci, Madame la rapporteure, pour votre travail de qualité, qui ne cache pas les limites de cette proposition de loi. Pour nous aussi, la générosité est une valeur à promouvoir. Toutefois, ce texte suscite notre réticence. D'abord, parce qu'il introduit une inégalité inacceptable selon la taille de l'entreprise : un salarié d'une très petite entreprise ne pourra quasiment rien mobiliser quand celui d'une grande aura plus de facilité.

Surtout, cette solidarité relève de l'État, c'est à l'État de donner l'exemple. Cette proposition de loi ne corrige pas toutes les carences du rôle d'aidant, vous l'avez dit. Nous proposons d'aller plus loin : c'est le sens de notre amendement d'appel, qui sondera le Gouvernement sur ses intentions envers les aidants. Le député Pierre Dharréville a émis plusieurs propositions pour les aider : indemnisation de 43,14 euros par jour pour remédier au faible recours au congé pour proche aidant - ce qui ne coûterait que 300 millions d'euros, si peu par rapport aux milliards qu'il faudra mobiliser pour la dépendance ; extension de la majoration des droits à la retraite et prise en charge intégrale des dépenses de santé.

La rapporteure nous demande de voter la proposition de loi en l'état, pour éviter une navette supplémentaire, mais ce serait dédouaner le Gouvernement. Pourquoi avoir attendu un an les décrets d'application de la loi sur les enfants malades ? La mise en place du droit au répit tarde elle aussi, deux ans après sa promulgation. Le groupe CRCE votera contre la proposition de loi.

Mme Laurence Rossignol .  - La rapporteure a fait un rapport généreux et lucide. Le don de jours a existé avant la loi, grâce à des accords de branche - la plasturgie vient d'en adopter un.

Mme la rapporteure a souligné la limite de la proposition de loi par rapport à l'ampleur des besoins.

Entre huit et onze millions d'aidants... Le chiffre est flou car les situations sont parfois mêlées et parce qu'on devient aidant progressivement. Certains ne se reconnaissent pas dans ce terme. C'est l'un des succès de la loi d'adaptation au vieillissement, en les reconnaissant, que de les aider à se prendre en compte eux-mêmes.

Un médecin qui rencontre une personne en perte d'autonomie se tourne-t-il vers la conjointe pour savoir comment elle va ?

Quelque 54 % des aidants sont des femmes ; la proportion est de trois quarts pour les personnes âgées en perte d'autonomie. Travail invisible, non rémunéré et ô combien bénéfique pour nos finances publiques.

Le droit au répit reste très méconnu, est-ce que les conseils départementaux en font une promotion suffisante ?

Nous avons suivi la préconisation de la rapporteure et n'avons pas déposé d'amendements. Toutefois, pourquoi pas un droit au congé pour les personnes dont les parents sont âgés et dépendants, à l'image du congé enfant malade ? J'espère, Madame la Ministre, que vous entendrez les propositions faites pour soutenir les aidants. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et UC)

M. Jean-Pierre Decool .  - Un accident de voiture, l'annonce d'une maladie auto-immune ? On ne s'y attend pas, mais la vie bascule et il faut faire face, il faut du courage et de la force morale - et aussi des moyens financiers. Nous payons souvent les carences de l'État. Mais la vie est plus forte et l'on s'organise.

Autrefois, on accueillait les parents au domicile, sans que leur dépendance soit évoquée : c'était une affaire de famille. Face au handicap, on gardait un silence pudique... Mais désormais, les langues se délient...

Les situations de dépendance se multiplient et les pouvoirs publics s'en emparent.

Les « aidants familiaux », voilà un vocable technocratique. L'expression devrait être le langage du seul élan du coeur, de la générosité, mais le législateur n'est pas un poète, il lui faut qualifier juridiquement des faits.

Il faut aider les aidants. Le député Paul Christophe a donc rédigé cette proposition de loi, qui étend le don de jours de repos aux proches d'aidants : c'est un message d'espérance, nous nous y rallions ! (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe UC)

M. Guillaume Arnell .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE) Un étudiant en master 2 de Poitiers, Mohamadou Oumarou Danni, le constatait déjà il y a onze ans : le vieillissement progressif de la population française et l'accroissement de la dépendance constituent un phénomène lourd que toutes les projections démographiques confirment ; la hausse du nombre de personnes en situation de handicap pose une question car il n'y a pas assez de places en établissement ; pour faire face, les pouvoirs publics privilégient le maintien à domicile, ce qui rend nécessaire de créer un environnement favorable aux conditions de travail d'aidant.

Plusieurs lois ont apporté des améliorations, comme celles du 9 mai 2014, 28 décembre 2015, 8 août 2016. Cette proposition de loi s'inscrit dans cette lignée. On ne peut que la saluer, même si elle n'est pas parfaite et qu'il faudra sans doute l'adapter au contexte de chaque entreprise. Mais surtout l'État doit agir pour aider les aidants : il faut développer des structures d'accueil de jour, faciliter l'hébergement temporaire en Ehpad ou favoriser le remplacement des aidants familiaux par des professionnels pendant quelques jours ou quelques semaines mais aussi valoriser les emplois d'aides à domicile et mieux informer sur les aides pour les patients et les aidants.

Je rends hommage à toutes les femmes et les hommes qui donnent leur temps aux autres au détriment de leur propre épanouissement. Les outre-mer ont des difficultés parfois accrues dans le domaine.

Pourquoi ne pas avoir déposé d'amendements ? Pour saluer le travail de la rapporteure et favoriser une entrée en application la plus rapide possible. Le groupe RDSE votera cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes UC, RDSE)

M. Bernard Bonne .  - (M. Philippe Mouiller applaudit.) Cette proposition de loi a fait l'objet d'un large consensus à l'Assemblée nationale. Elle s'inspire largement de la loi du 9 mai 2014, portée par le député Paul Salen qui était aussi le premier vice-président du conseil général de la Loire dont j'étais président.

Cette proposition de loi sécurise juridiquement le don de jours de repos. Les aidants, souvent de la génération pivot, offrent la solution la plus simple et la moins coûteuse.

La loi d'adaptation de la société au vieillissement a fait progresser le rôle des aidants et la prise en compte de leurs besoins, en créant en particulier le congé de proche aidant et le droit au répit.

La santé des aidants est un enjeu de santé publique, il faut que les mesures récentes soient mises en oeuvre.

Cette proposition de loi complète le dispositif actuel mais est très parcellaire.

Louable et respectable dans ses intentions, la proposition de loi risque de poser des problèmes de mise en oeuvre.

Le don concernant les jours de repos excédant les 24 jours de congés payés annuels, les salariés ne seront pas dans la même position selon que leur entreprise est petite ou grande, c'est regrettable.

Ensuite, la prise en charge de pathologies lourdes d'adultes dépendants est un engagement qui s'inscrit dans la durée : comment des salariés pourront-ils aider un collègue sur une longue période ?

Troisièmement, comment le mécanisme s'appliquera-t-il dans la fonction publique ?

Enfin, quelle mesure de soutien pour ceux qui, pour s'occuper d'un proche, ont abandonné leur travail ?

Plus généralement, ne faudrait-il pas limiter le don aux personnes brusquement confrontées à un accident de la vie, que celui-ci soit lié ou non à une personne âgée ou handicapée ?

Mais cette proposition de loi est une première et importante étape qui renforce les liens intergénérationnels.

Le groupe Les Républicains votera ce texte à l'unanimité. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC et Les Indépendants)

Mme Nassimah Dindar .  - Cette proposition de loi constitue une belle initiative. Il s'agit de pallier à des difficultés conjoncturelles et de donner du répit aux aidants. Aidant naturel, c'est une jolie expression pour qualifier une situation de souffrance.

Parler d'aidant, c'est évoquer la vie de tous les jours.

Cette proposition de loi appelle pragmatisme et humanité. Inspirons-nous du travail remarquable de la rapporteure.

En proposant l'adoption conforme, Madame la Rapporteure, vous avez fait preuve de courage.

La condition de proche aidant ne fait l'objet que de mentions dans divers textes.

La mise en oeuvre du droit au répit n'est pas parfaite partout. À La Réunion, j'ai mis en place un Groupement d'intérêt public (GIP) avec l'État pour organiser des bourses d'heures. Je vous invite, Madame la Ministre, à visiter cette structure.

Cette proposition de loi complète la loi du 9 mai 2014. Elle offre une plus-value, malgré ses limites. Elle permet ponctuellement à des élans de solidarité de s'exprimer. Mais elle ne doit pas masquer la nécessité de la solidarité nationale. Il faut réfléchir au statut juridique de proche aidant.

Le groupe UC souhaite une approche plus globale, avec une allocation dédiée comme pour les proches de bénéficiaires de l'APA par exemple.

J'appelle mes collègues à un vote unanime sur cette proposition de loi.

Nombre de personnes renoncent à des carrières pour aider leur proche. Cela doit être pris en compte.

Comme mon collègue Bonne, j'appelle au développement de l'accueil temporaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes UC et Les Indépendants)

Mme Nadine Grelet-Certenais .  - Les aidants, souvent conjoints, enfants, petits-enfants, représentent une population en croissance, 57 % de femmes et dont la moitié d'actifs.

Les carences de la prise en charge de la société ne sont pas masquées par les efforts des aidants.

Les 5 000 places supplémentaires en Ehpad, votées en loi de financement de la Sécurité sociale, ne combleront pas les besoins d'accueil à temps plein et à temps partiel.

Il est nécessaire de renforcer les Ehpad-relais ou « hors les murs », et les liens entre urgences, domiciles et Ehpad pour éviter les ruptures dans les parcours de soin.

L'accompagnement humain est fondamental. Si l'on ne veut pas voir la santé des aidants se détériorer, il faut les aider.

Élargissons le droit à la retraite pour les aidants, comme le recommande le rapport de la mission de l'Assemblée nationale.

Insufflons une politique en direction des aidants dont je salue le dévouement. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et UC)

M. Daniel Chasseing .  - Cette proposition de loi complète les avancées de la loi du 9 mai 2014 sur les dons de jours aux proches d'enfants malades.

Les professionnels apportent une aide nécessaire aux aidants, qui sont la condition du maintien à domicile. Je rappelle qu'on compte 1,2 million de personnes âgées percevant l'APA et qu'elles sont entourées de quelque 2,8 millions d'aidants.

La proposition de loi est un pas de plus en direction des aidants.

Le groupe Les Indépendants soutient ce texte de terrain accompagnant un acte humaniste et solidaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants).

M. Philippe Mouiller .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Je salue cette proposition de loi et le travail des députés. Elle est l'occasion d'un débat plus général sur le statut des huit à onze millions d'aidants.

Nombre de familles choisissent, ou sont contraintes de maintenir leur proche à domicile.

Les aidants sont évoqués dans la loi du 9 janvier 2014, permettant le don de jours de repos à un collègue dont un parent est gravement malade, celle du 28 décembre 2015 d'adaptation au vieillissement, la loi El Khomri du 8 août 2016 qui accorde deux jours en plus par an aux parents d'enfants handicapés, mais nous ne pourrons faire l'économie d'un texte global sur les aidants.

Le Parlement doit s'emparer de ce sujet pour rendre effectifs les droits des aidants et les leur faire connaître.

Étendons le droit au répit à l'ensemble des aidants ; faisons en sorte que ceux-ci puissent être suivis, formés, accompagnés. D'autres mesures pourraient être proposées : congé parental spécifique pour les parents d'enfants handicapés ou en longue maladie, prise en compte de cette expérience pour les droits à la retraite et au chômage, facilitation de la reconversion professionnelle. Sur le coût des mesures, n'oublions pas que le maintien en milieu ordinaire est moins coûteux que la création de places dans les institutions.

Enfin, l'engagement des aidants doit être reconnu à travers la création d'un statut.

Le groupe Les Républicains votera cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC, Les Indépendants et RDSE)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

ARTICLE ADDITIONNEL avant l'article premier

Mme la présidente.  - Amendement n°1 présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans les six mois qui suivent la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant le coût pour la protection sociale et les avantages pour les assurés sociaux d'une disposition portant indemnisation du congé de proche aidant, extension de la majoration de la durée d'assurance vieillesse aux proches aidants et indemnisation intégrale des dépenses de santé des proches aidants.

M. Dominique Watrin.  - Cet amendement d'appel vise à obtenir des engagements précis de la part du Gouvernement. À notre sens, l'accompagnement des aidants doit relever de la solidarité nationale, et pas seulement des salariés. Entre autres choses, il revient à l'État de garantir le droit au répit, qui existe depuis deux ans. Pour avancer, nous proposons d'appliquer trois recommandations de Pierre Dharréville. Le Gouvernement est à la tête du pays depuis neuf mois, nous ne pouvons plus nous contenter de groupes de travail et de missions. Nous attendons des actes, et plus des paroles.

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure.  - Lorsqu'on me tend une main, mon habitude est de la prendre ; faites-en de même, cher collègue. Ne prenons pas le risque de retarder l'adoption de ce texte pour une demande de rapport. Retrait, sinon avis défavorable.

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État.  - Le Gouvernement a engagé un chantier sur les proches aidants, que je mène avec la ministre des solidarités et de la santé. Cet amendement est satisfait par l'article premier bis qui prévoit déjà un rapport dont l'objet est très général. Nous discuterons des propositions de Pierre Dharréville quand son texte viendra en discussion dès le 8 mars à l'Assemblée nationale. Enfin, votre commission a oeuvré pour que le texte soit adopté conforme pour une mise en oeuvre rapide. Suivons-la. Avis défavorable.

M. Dominique Watrin.  - Je prends note que le débat aura lieu. J'aurais retiré l'amendement si j'avais entendu une vraie volonté politique d'aller de l'avant.

M. Philippe Mouiller.  - C'est le cas !

M. Dominique Watrin.  - Les aidants ont besoin de soutien. Or le secteur de l'aide à domicile est en crise, notamment de recrutement, à cause de la précarité des emplois. Quand le Gouvernement refuse l'amendement à la convention collective qui prévoyait une petite augmentation de 0,4 % par an, nous sommes loin des bonnes intentions affichées. Nous attendons de lui des engagements précis, chiffrés.

L'amendement n°1 n'est pas adopté.

ARTICLE PREMIER

Mme Fabienne Keller .  - Nous ne pouvons ignorer ce défi majeur pour la société qu'est l'accompagnement des personnes en situation de grande fragilité. Hier encore, les professionnels des établissements ont manifesté leurs attentes, ils demandent un plus grand respect pour leurs missions, souvent mal connues. C'est dans cette situation particulière que nous sommes réunis dans une grande convergence pour examiner cette proposition de loi. Saluons Paul Christophe et son implication sur le terrain, d'où nous vient cette idée simple mais remarquable de transmission de jours de congés. Ce n'est pas la solution à tous les problèmes, mais c'est une partie de la solution. C'est en additionnant les mesures pour les aidants familiaux, le temps de répit, l'aide à domicile et les maisons de retraite que nous bâtirons l'édifice de la prise en charge de la dépendance. J'invite, moi aussi, le Sénat à adopter cette proposition de loi sans modification. (Applaudissements sur les bancs des groupes UC et sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

M. Maurice Antiste .  - Après les lois du 9 mai 2014 et du 28 septembre 2015, voici que nous examinons un texte marquant la reconnaissance officielle des aidants par les pouvoirs publics. Les aidants, si leurs situations sont diverses, ont en commun de devoir assurer une présence quotidienne auprès des personnes dont ils prennent soin. Cette lourde charge tant sur le plan psychologique, physique, financier que social pèse sur 8,3 millions de personnes en France, dont 18 000 en Martinique où elles sont une clé de voûte de la société. Parmi les personnes en situation de handicap, 74 % sont aidées seulement par leur famille en Martinique contre 55 % en France hexagonale ; seuls 3 % reçoivent une aide professionnelle contre 15 % en France hexagonale. Le vieillissement programmé de la Martinique entraînera des besoins de plus en plus importants, je voterai donc ce texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et RDSE, ainsi que sur quelques bancs du groupe UC)

L'article premier est adopté.

L'article premier bis est adopté, de même que l'article 2.

Explications de vote

Mme Catherine Deroche .  - Étendre les dispositions du texte à la fonction publique, comme cela est prévu à l'article 2, est une excellente chose. Des dispositions semblables étaient prévues dans la loi de 2014 sur le don de RTT que je rapportais. Tout était parti d'une affaire à Nancy : un policier voulait accompagner sa petite fille qui devait subir une greffe de moelle. Or les décrets d'application ont tardé à être publiés. Il a fallu attendre une autre affaire, en décembre dernier : un agent de la fonction publique voulait accompagner son enfant, atteint d'un cancer, en fin de vie.

Madame la Ministre, nous faisons encore aujourd'hui le choix d'un vote conforme pour que cela aille vite, il faut que le Gouvernement aille vite lui aussi. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

M. Jean-Pierre Decool .  - Notre groupe Les Indépendants se réjouit de l'accueil fait à ce texte : la solidarité citoyenne appelle la solidarité politique pour les plus de 8 millions d'aidants. Plus de 60 % d'entre eux présentent des signes de stress et de surmenage, plus de 80 % appartiennent à la famille du malade. Or les plus de 65 ans seront 20 millions en 2030, 24 millions en 2060. Nous sommes la première génération à devoir assumer enfants et petits-enfants, la nôtre et celle de nos parents ; nous n'avons guère le choix. Cette proposition de loi a le mérite de la simplicité, retarder son adoption serait amplifié des souffrances. Nous voulons modestement encourager les élans de générosité dont les Français sont capables.

« La grande chose de la démocratie, c'est la solidarité », disait Victor Hugo. Nous voterons ce texte avec conviction. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants et sur quelques bancs du groupe UC)

La proposition de loi est définitivement adoptée.

(Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)