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Table des matières
Création sur Internet (Nouvelle lecture)
Hôpital, patients, santé et territoires (Urgence-Suite)
Mise au point au sujet d'un vote
Hôpital, patients, santé et territoires (Urgence-Suite)
Discussion des articles (Suite)
SÉANCE
du mercredi 13 mai 2009
99e séance de la session ordinaire 2008-2009
présidence de M. Bernard Frimat,vice-président
Secrétaires : Mme Sylvie Desmarescaux, Mme Anne-Marie Payet.
La séance est ouverte à 9 h 45.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Création sur Internet (Nouvelle lecture)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet.
Discussion générale
Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication. - Vous avez approuvé ce projet de loi en première lecture le 30 octobre dernier, après l'avoir amélioré par 84 amendements. Le 9 avril, vous avez adopté le texte de compromis équilibré établi par la commission mixte paritaire. Les circonstances de son rejet par l'Assemblée nationale, sans rapport avec le fond du sujet, nous ont fait perdre plusieurs semaines alors que le temps presse. Ce texte, issu d'une nouvelle lecture devant l'Assemblée nationale, est fidèle au projet retenu par la commission mixte paritaire. Ont seules été modifiées les garanties de procédures au profit des internautes.
Cette nouvelle lecture me donne l'occasion de rendre hommage à l'esprit non partisan qui a guidé les travaux du Sénat, conscient de l'enjeu culturel et économique du piratage : un milliard de fichiers piratés chaque année en France, une perte de chiffre d'affaires de 50 % pour la musique et de 35 % pour le DVD, soit 1,1 milliard d'euros par an. Dans notre pays, les ventes numériques, avec 10 % des ventes contre 30 % aux États-Unis et 20 % en moyenne dans les autres pays européens, ne prennent pas le relais des supports physiques.
Ce texte apporte une réponse pragmatique et pédagogique. Il propose aussi un choix de société : quelle place entendons-nous réserver aux artistes et aux acteurs de la diversité culturelle ? Les créateurs ont le droit de vivre de leur travail. Ils ne doivent pas être spoliés en contrepartie d'une licence globale dont eux-mêmes ne veulent pas. Entre leur droit de propriété et les habitudes de certains internautes, nous avons choisi le droit. Entre s'incliner devant le fait accompli et restaurer le sens, nous avons choisi le sens. Internet, formidable instrument de partage, ne doit pas se développer sans règles.
Le numérique n'abolit pas les principes de la vie en société et internet n'est pas une zone de non-droit. Nous voulons assurer une régulation raisonnable. Je regrette, à cet égard, que les défenseurs de la régulation économique soient, dans ce domaine, partisans du laisser-faire, et même d'un ultralibéralisme surprenant.
M. Didier Guillaume. - Ce n'est pas le sujet !
Mme Christine Albanel, ministre. - La mobilisation en faveur de ce projet n'a cessé de s'amplifier et a rassemblé, en France, 10 000 artistes ou techniciens de la musique, 1 300 labels de musique indépendants, les cinéastes et comédiens les plus renommés, et au plan international, 4 000 labels de musique indépendants, les fédérations de producteurs de films et d'éditeurs de vidéos, la Guilde des réalisateurs américains, etc.
L'approche pédagogique et interprofessionnelle adoptée pour les accords de l'Élysée intéresse. Cette réflexion a également lieu dans d'autres pays et donne lieu à des procédures graduées d'avertissements et de sanctions, judiciaires ou non. Des accords ont été conclus en Grande-Bretagne, en Irlande, au Japon et sont en cours de négociation aux Pays-Bas, en Australie, à Hong Kong. Des lois ont été adoptées en Suède, en Corée du Sud, à Taiwan, et bientôt en Norvège.
Les premiers résultats observés sont significatifs. La simple entrée en vigueur de la loi suédoise a occasionné une chute de 37 % du trafic sur internet dans ce pays et une envolée du recours à l'offre légale. En Grande-Bretagne, l'envoi de deux avertissements, sans même qu'une sanction soit prévue, a fortement dissuadé les pirates concernés. Il y a donc une convergence internationale, et nous avons eu raison d'oser être pionniers. Je regrette que l'amendement Bono, refusé par les États membres du conseil Télécom, ait été présenté au Parlement européen au lieu de l'amendement de compromis. Il s'agissait visiblement de peser sur nos débats, mais je ne le crains pas car ce projet de loi ne porte atteinte à aucune liberté fondamentale.
La liberté de l'utilisation d'internet doit se concilier avec le droit des créateurs, défendu en France depuis Beaumarchais, et peut-être même avant. Le conseil des ministres de la culture et de l'audiovisuel a reconnu, en novembre dernier, le droit de mener des expérimentations, dans le cadre d'accords interprofessionnels, pour lutter contre le piratage.
Nous ne prétendons pas éradiquer le piratage sur internet mais nous souhaitons provoquer une prise de conscience et aider au développement de l'offre légale. Avec ce texte, nous voulons que l'internaute soit gagnant, avec la collaboration des maisons de production, tout comme les créateurs et les auteurs, qui demandent davantage de régulation et de sécurité dans l'univers numérique. Il s'agit d'un premier pas dans ce sens. Nous pourrons ensuite travailler ensemble pour mieux reconnaître le droit des auteurs et la place des indépendants dans la musique comme dans le cinéma. Je vous remercie encore pour l'esprit qui a présidé à nos débats. (Applaudissements sur les bancs UMP)
M. Michel Thiollière, rapporteur de la commission des affaires culturelles. - Si notre hémicycle était un terrain de sport, nous pourrions parler de prolongations. Nous avons déjà débattu de ce texte et la partie semblait jouée. Tout semblait avoir été dit sur un projet de loi présenté par Mme la ministre il y a près d'un an et adopté ici même en première lecture il y a plus de six mois. Des amendements ont alors été présentés et discutés par tous les groupes de notre assemblée. Après le temps de l'Assemblée nationale, de la commission mixte paritaire, de l'adoption par le Sénat, l'Assemblée nationale a fait défaut. L'adoption semblait acquise mais on avait oublié qu'il s'agissait d'auteurs et de créations. On avait oublié que les bonnes histoires recèlent un ultime rebondissement pour tenir en haleine le public : celui-là tenait davantage du vaudeville, et pas du meilleur goût !
Quand on sait qu'internet compacte le temps, que penser de ces dix-huit longs mois passés à étudier ce texte ? II aurait fallu légiférer plus vite quand, sur l'essentiel, tout le monde était d'accord. Notre société se concentre sur des sujets anodins mais elle dérape en confondant vitesse et précipitation, en refusant d'aborder les fondements mêmes de notre civilisation. Elle croit être moderne en suivant le courant au lieu de le canaliser.
Nous voilà donc replongés dans une discussion que nous aurions dû éviter. Nous ne devons pas, pour autant, tourner la page d'une main désinvolte. Au passage, avez-vous remarqué que l'intitulé de ce texte a glissé de « Loi Création et internet » à « Loi Hadopi », nous faisant passer subrepticement du sens au sigle, d'un univers complexe à une marque ? En confondant le sujet et l'outil, ce qui devrait faire sens devient épouvantail. On nous répondra qu'on doit faire court : dans ce cas, ouvrons tout de suite les vannes d'une mondialisation essentiellement marchande, cessons de nous rengorger en évoquant la diversité, l'identité et la litanie de nos droits !
Si nous ne traitons pas le sujet au fond, si nous laissons le rouleau compresseur de l'uniformisation laminer l'artiste, nous aurons un monde plat comme un écran sans profondeur. C'est à cela que ressemble internet si l'outil magique n'est pas canalisé, s'il n'est pas appréhendé en fonction des valeurs qui doivent mettre l'homme, et non la machine, au centre de tout.
Nos collègues eurodéputés viennent d'adopter un amendement qui empêcherait d'interrompre l'usage d'internet. Ont-ils voulu dire que celui-ci est aussi important dans notre vie quotidienne que l'eau ou l'électricité ? Pour les approuver, nous devons convenir que les biens culturels sont d'une nature spécifique et que le talent créatif n'est pas le fruit d'une activité productrice classique. Comment comptent-ils protéger alors ce que l'Europe a de plus précieux, ce qui lui assurera l'essentiel de ses revenus et de ses emplois : sa capacité à créer, à imaginer, à innover, à inventer...
Se sont-ils demandé comment se poursuivra l'aventure des communications si les découvertes sont pillées ? Et à quoi bon protéger les innovations technologiques s'il n'y a plus d'eau à faire circuler dans les tuyaux ?
Si cet amendement signifie que la machine est autorisée à broyer le créateur, si l'Europe cède au populisme de la fausse gratuité, nous devons le dénoncer. Souhaitons que le futur Parlement européen ait à coeur d'aider aussi les créateurs !
Étonnant paradoxe : alors que le monde entier entend aujourd'hui réguler le capitalisme outrancier, certains veulent banaliser un outil symbole de la mondialisation dérégulée, de la société qui s'avilit dans une négation de ses valeurs ! Pour redonner du sens au monde, il faut à la fois étendre l'accès à internet et défendre la création, non la sacrifier sur l'autel de cette nouvelle déesse. Gardons-nous de cette fascination pour la machine, de cette dépendance. Jamais une invention ne nous aura autant donné l'illusion de condenser le temps et l'espace. Mais l'intelligence des générations passées a permis à la fois le développement des machines et protégé l'invention.
Qui penserait, en ces temps de crise, à brader les découvertes scientifiques et les inventions technologiques au motif que l'argent est rare ? Qui oserait réclamer des découvertes à nos chercheurs, sachant que leur travail ne sera ni protégé ni rémunéré ? La France dirait-elle à ses artistes : partez, si vous ne voulez pas être pillés ?
Certains voudraient remplacer la suspension de l'accès à internet par une simple amende. Autant dire : « Pour piller, payez ! ». Le piratage serait tarifé forfaitairement, et accessible à ceux qui en auront les moyens...
Les débats, ici et en commission mixte paritaire, ont abouti à un texte adapté et à la hauteur des enjeux, je n'y reviens pas. La Haute autorité sera irréprochable et efficace. La nécessité d'une réconciliation entre internaute et créateur a été reconnue. Nous avons voulu renforcer la pédagogie, concilier les droits des créateurs et des internautes, améliorer l'information des internautes et renforcer le volet consacré à l'offre légale. Le texte est équilibré. Les députés ont retenu hier l'essentiel des avancées du Sénat et repris le texte adopté par la CMP, avec trois modifications mineures visant à conforter le caractère contradictoire de la procédure.
Les principales avancées portées par le Sénat ont été conservées. Ainsi, la CMP a rétabli l'élection du président du collège de la Haute autorité par ses membres, plutôt qu'une nomination par décret. En cas de suspension de l'accès à internet, l'internaute continuera à payer la totalité de son abonnement. Sinon, les fournisseurs d'accès auraient été fondés à se retourner contre l'État, qui aurait dû payer pour les contrevenants ! Les médias ont parlé à tort de « double peine » pour l'internaute, alors qu'il s'agit simplement de respecter un contrat. C'est une question de bon sens et de pédagogie.
M. Didier Guillaume. - C'est absurde !
M. Michel Thiollière, rapporteur. - La CMP a exclu toute amnistie des pirates sanctionnés en vertu du délit de contrefaçon de droits voisins, qui sont de véritables trafiquants. Enfin, elle a confirmé les dispositions introduites par l'Assemblée nationale en faveur de la presse.
Le 9 avril dernier, l'Assemblée nationale a rejeté les conclusions de la CMP, fait rarissime qui a entraîné la reprise de la navette. (M. Yannick Bodin se gausse) Les députés ont adopté ce texte hier. Votre commission des affaires culturelles l'a adopté hier soir sans modification, et vous demande de faire de même.
Pressentant que les plus permissifs et libertaires suivraient la pente de la démagogie, j'avais fait adopter par notre Assemblée la possibilité de limiter, en cas de sanction, le débit de l'accès à internet. Je regrette que cette mesure n'ait pas reçu plus de soutien : nous aurions aujourd'hui une réponse crédible aux critiques qu'encourage l'adoption de l'amendement Bono au Parlement européen le 6 mai dernier.
Cet amendement, qui prévoit qu'aucune atteinte ne peut être imposée aux libertés et droits fondamentaux des utilisateurs finaux d'internet sans décision préalable des autorités judiciaires, visait à peser dans le débat français. Rejeté à l'unanimité par le Conseil à l'issu de la première lecture, il a été à nouveau déposé, et adopté par les députés. Le Conseil se prononcera à nouveau le 12 juin. S'il réitère son rejet, l'ensemble de la directive serait renvoyée devant le comité de conciliation à l'automne 2009.
Les défenseurs de l'amendement Bono estiment qu'il fait obstacle au présent projet de loi, le juge judiciaire n'intervenant qu'au stade des recours contre les décisions de la Haute autorité. Cette interprétation se heurte à plusieurs arguments. L'accès à internet n'a le statut de « droit fondamental » ni en droit français ni en droit européen ; la Commission européenne ne s'est pas opposée à la poursuite du processus législatif français ; l'amendement Bono est sans rapport avec l'objet du paquet Télécoms ; il se heurterait au principe de subsidiarité et à la jurisprudence de la Cour de justice des communautés européennes relative à la nécessaire conciliation entre les différents droits et libertés ; compte tenu de sa composition et des garanties procédurales prévues, la Hadopi peut constituer un « tribunal indépendant et impartial » au sens de la Convention européenne des droits de l'homme ; enfin, seuls les traités constitutifs de l'Union peuvent édicter de nouveaux droits et libertés fondamentaux. Notre commission souhaite donc que le Gouvernement demande au Conseil européen de maintenir sa position initiale. Les auteurs, les artistes et les professionnels de la culture méritent mieux. Faisons confiance aux vertus pédagogiques de notre démarche.
Ce long et chaotique processus législatif aura au moins permis d'améliorer le texte initial, sans en dénaturer l'esprit. Il est désormais urgent de le mettre en application. L'objectif est de favoriser l'accès à cet espace de liberté qu'est internet tout en défendant la création culturelle, et de garantir le respect des droits parfois antagonistes à travers une légitime régulation.
Deux pistes sont à creuser, faute de quoi la démagogie, le leurre de la gratuité, du tout technologique auront raison de la création et de son économie fragilisée. Première urgence : les professionnels doivent mettre en ligne des formules simples, économiques, et respectueuses du droit d'auteur, pour offrir une véritable alternative au piratage.
M. Jacques Legendre, président de la commission des affaires culturelles. - Très bien.
M. Michel Thiollière, rapporteur. - Ce qui a été fait à ce jour n'est pas suffisamment incitatif.
Deuxième urgence : inventer un nouveau modèle économique. Comme l'écrivait les Echos, « les majors restent encore trop dépendantes du modèle économique de l'âge d'or du disque ». Il faut un modèle simple, associant opérateurs, fabricants, fournisseurs d'accès, créateurs. Il faut aller vite. Cela ne dépend plus du législateur. Les signataires des accords de l'Élysée ont promis de faire les efforts nécessaires une fois la loi votée. Nous y sommes.
Le festival de Cannes ouvre ce soir, madame la ministre. Vous pourrez annoncer l'adoption de la loi Création et internet par la représentation nationale. Le monde de la création devra y voir non pas une fin en soi mais le début d'une nouvelle complicité entre internautes et les créateurs. (Applaudissements à droite et sur quelques bancs au centre)
Mme Françoise Laborde. - Pour la troisième fois, nous examinons le projet de loi favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet. L'adoption de ses dispositions -attendues même si leur forme est contestée- aura été retardée par les polémiques dues à la passion et à l'émotion, qui l'ont parfois emporté sur la réflexion et le discernement. Car l'enjeu majeur est de protéger la création culturelle.
Finalement, nous examinons ce matin une version du texte qui ne diffère guère de celle que nous avions adoptée le 9 avril, après la CMP. Que de temps perdu ! Sans, évidemment, revenir encore une fois sur le fond, je souhaite insister sur deux éléments fondamentaux qui doivent nous guider dans la lutte contre le piratage des oeuvres culturelles sur internet.
La dimension pédagogique du texte vient en premier car l'éducation, notamment des plus jeunes citoyens, est fondamentale. Il est essentiel de sensibiliser les consommateurs au respect des droits d'auteur, clé du sauvetage de la production artistique. Avant de les réprimander, nous devons informer et responsabiliser ceux qui téléchargent illégalement des oeuvres culturelles. Ce sera fait grâce à ce texte car la riposte graduée appliquée dans la sphère familiale sera un outil efficace envers des utilisateurs dont le comportement irresponsable compromet la création culturelle. L'ère numérique offre une grande chance à la culture mais nous devons apprivoiser son accès au plus grand nombre.
Le deuxième volet porte sur la responsabilité du groupe RDSE pour obtenir du Gouvernement qu'il consacre davantage de crédits et qu'il oriente la politique culturelle en anticipant les progrès techniques à venir. Il faut, par exemple, développer une offre légale de qualité et mettre en place la licence globale. A l'heure où beaucoup pensent que notre politique culturelle s'essouffle, la démocratisation et la diversité doive être non des leitmotivs mais des réalités concrètes.
Au bout d'un travail de très longue haleine, espérons que les polémiques auxquelles nous avons assisté favoriseront une réelle prise de conscience quant aux enjeux d'une politique culturelle de l'ère d'internet ! Ne sommes-nous pas au XXIe siècle ?
La grande majorité de notre groupe votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs RDSE, au centre et à droite)
M. Jean-Pierre Plancade. - Très bien !
M. Serge Lagauche. - Après l'échec de la loi Dadvsi, la discussion du nouveau texte tendant à défendre les droits des auteurs sur internet aura été marquée par de nombreux rebondissements que nous regrettons.
Le rejet par l'Assemblée nationale du compromis élaboré par la CMP illustre la maladresse et la légèreté du Gouvernement sur un texte fondamental pour notre pays. Nous regrettons ce dernier examen, imposé par le retard du Gouvernement pour protéger les droits de nos auteurs, de nos créateurs et de nos artistes.
Le texte que vous présentez en nouvelle lecture est analogue à celui que nous avions examiné le 9 avril après les travaux de la CMP mais le Parlement européen a voté entre-temps une disposition qui semble compromettre la riposte graduée. Conformément au droit en vigueur, nous n'estimons pas que l'accès à internet soit assimilable à une liberté fondamentale. Il vous appartient toutefois de respecter la règle européenne, sans porter atteinte au droit d'auteur.
Nous avons déjà évoqué à maintes reprises les pertes de chiffre d'affaires des entreprises culturelles : elles avoisinent 50 % pour la musique enregistrée et quelque 35 % pour la vidéo. En 2008, un milliard de fichiers culturels ont été volés par les échanges de pair à pair ; 450 000 films sont illégalement téléchargés par jour.
Ces chiffres imposent d'agir rapidement, ce que vous pouviez faire depuis le 23 novembre 2007 puisque la signature des accords de l'Élysée traduisait l'accord de tous les intéressés en faveur d'une riposte graduée, pédagogique et proportionnée. Or, il vous aura fallu presque deux ans pour faire voter ce texte ! Dans l'intervalle, le piratage s'est amplifié, les offres légales peinant toujours à trouver leur public.
En effet, 1,4 milliard de titres musicaux ont été illégalement téléchargés dans le monde en 2007 mais, selon la Fédération internationale de l'industrie phonographique, en 2008, 95 % des titres musicaux téléchargés sur internet l'ont été illégalement. Le piratage, c'est-à-dire le vol, écrase donc l'offre légale. C'est un fait reconnu par les majors du disque comme par les labels indépendants. On a voulu présenter ce projet de loi comme le bras armé des industries culturelles contre les artisans de la contre-culture mais c'est inexact, ce que démontre le soutien apporté par la très grande majorité des ayants droit.
Le texte a l'avantage de graver dans le marbre législatif une sanction graduée et proportionnée du vol des oeuvres culturelles via le piratage, mais il manque cruellement d'un volet pédagogique car nous devons expliquer avec force aux internautes les dangers que le piratage fait courir à la création artistique. Il faut l'expliquer aux jeunes internautes et à leurs parents, titulaires de l'abonnement à internet. Développons une grande campagne de sensibilisation pour expliquer que la gratuité n'existe jamais : tout se paye et cette rémunération est indispensable au cinéma, à la musique et à l'ensemble de la création artistique. Une telle campagne permettrait de mieux faire accepter la riposte graduée.
La Ligue des droits de l'homme estime que ce texte rompt l'équilibre entre la protection des auteurs et le droit du public à la culture. Bien que nous soutenions l'action conduite par la Ligue des droits de l'homme en faveur des libertés fondamentales, nous estimons, en l'espèce, que l'équilibre sera maintenu par le développement de l'offre légale de musique et de films. Si le pillage des oeuvres se poursuit, le financement des entreprises culturelles sera tari, compromettant la diversité des oeuvres disponibles et accessibles.
La riposte graduée doit donc être adossée au développement d'une offre légale attractive. Certes, la nouvelle chronologie des médias rendra désormais les films disponibles en DVD et en vidéo à la demande quatre mois après leur sortie en salle. Mais cet effort de la filière cinématographique ne suffira pas. Comment rémunérer la création à l'ère numérique ? La question reste posée.
Vu l'érosion générale des chiffres d'affaires publicitaires, on ne peut s'en remettre à un modèle économique faisant reposer la rémunération des auteurs sur le partage de recettes devenues incertaines. Dans la foulée de l'introduction en bourse, il y a cinq ans, du plus célèbre moteur de recherche, de nombreux sites ont espéré que la gratuité d'accès serait compensée par la publicité. Or, la crise actuelle infirme clairement ces espoirs.
La riposte graduée doit être impérieusement adossée à un mécanisme -encore à concevoir- de régulation et de soutien à la création. Vous pariez sur le fait que le nouveau dispositif reportera automatiquement les internautes sur les offres légales, directement payantes ou faussement gratuites via la publicité. Nous en doutons mais souhaitons sincèrement que l'avenir vous donne raison et réitérons notre disponibilité à rechercher un système de régulation et de soutien à la création sur internet permettant de respecter le droit d'auteur tout en favorisant une diffusion culturelle massive.
La position du groupe socialiste n'a donc pas varié depuis le 9 avril. Afin de manifester son soutien indéfectible aux créateurs, il avait voté en faveur du projet de loi Création et internet, lors de la première lecture. Le retard pris par le Gouvernement et l'introduction d'un cavalier législatif disposant que la collaboration des journalistes dans une entreprise de presse serait désormais multi-support, ce qui contredisait les états généraux de la presse, avaient provoqué notre abstention sur le texte de la CMP. Aujourd'hui, nous regrettons profondément que le Gouvernement n'ait pas rassemblé sa majorité à l'Assemblée nationale pour protéger rapidement les droits des auteurs sur internet.
Tout en renouvelant son soutien aux créateurs, le groupe socialiste refuse d'être le supplétif d'une majorité parlementaire défaillante. (Marques de désaccord au centre et à droite) Il refusera donc aujourd'hui de participer au vote, en regrettant que la défense des auteurs n'ait pas suscitée, du Gouvernement et de sa majorité, l'intérêt majeur qu'il méritait. (M. Jean-Pierre Plancade manifeste sa désapprobation alors qu'on applaudit sur la plupart des bancs socialistes)
Mme Catherine Morin-Desailly. - Nous sommes parvenus à la dernière étape d'un parcours législatif mouvementé. En effet, ce projet de loi examiné depuis un an a été marqué par un événement dont on ne retrouve que trois précédents sous la Ve République : le rejet par l'Assemblée nationale d'un texte de CMP.
Cet incident a provoqué une nouvelle lecture par nos collègues députés, dont la commission des lois a quasiment repris la version de la CMP. On peut donc regretter le retard pris, vu l'urgence de répondre au téléchargement illégal, contre lequel plus de 10 000 artistes et créateurs se sont manifestés. Cette atteinte massive à la propriété intellectuelle et à la création compromet les industries culturelle, musicale et cinématographique. Contrairement à ce que certains prétendent, il ne s'agit pas seulement des grandes majors.
Il fallait simultanément remplacer l'inapplicable loi Dadvsi, contre laquelle le groupe centriste avait voté. Aujourd'hui, le contournement sur internet des règles régissant la propriété intellectuelle demeure assimilé à de la contrefaçon, un délit puni par trois ans de prison et 300 000 euros d'amende.
Or notre groupe a toujours montré son attachement à la prévention et à un système mesuré de gradation des sanctions, même si certains de ses membres émettent des réserves sur la double peine, suspension de l'abonnement mais non de son paiement. Nous mesurons la difficulté d'individualiser le coût d'accès à internet dans le cadre des offres triple play, ainsi que le coût de cette individualisation. La vraie question est de savoir qui doit le supporter. Il paraît difficile de faire subir aux fournisseurs d'accès les conséquences du téléchargement illégal, difficile aussi de ponctionner les contribuables...
Notre groupe est sensible aux avancées d'un texte qui ne remet pas en cause les grands équilibres des accords de l'Élysée non plus que ceux adoptés ici en première lecture à la quasi-unanimité. Nous nous félicitons que le président de l'Hadopi soit désormais élu parmi les membres du collège, comme nous l'avions demandé, et non plus nommé par décret ; cette solution inspirée de celle en vigueur pour la Cnil garantit l'indépendance et l'impartialité de la Haute autorité. Le texte confirme en outre les dispositions favorisant une mise à disposition immédiate de l'offre légale, qu'il s'agisse de la musique avec la suppression des DRM ou des oeuvres cinématographiques avec la réduction du délai entre la sortie en salle et l'exploitation en vidéo.
Pour autant, ce texte ne règle pas définitivement la question : il va limiter, et non éradiquer le téléchargement illégal. Les technologies vont toujours plus vite que le droit. Le législateur devra y revenir à la lumière de l'application de la loi.
Ce texte est une étape importante dans la prise de conscience collective que la culture a un coût et que les droits des auteurs doivent être respectés, sauf à voir la diversité des contenus disparaître et la création française s'assécher. Il favorise et accompagne de nouveaux usages, à la fois protecteurs des oeuvres et ouverts au monde de la création, venant se substituer aux pratiques qui nuisent à la création.
Prise de conscience des consommateurs, qui naviguent aujourd'hui d'une plateforme de téléchargement à l'autre, d'un baladeur à l'autre en ayant la jouissance d'oeuvres légalement acquises, tandis que se substitue au marché du disque vendu à l'unité une profusion de nouveaux modèles.
Prise de conscience aussi des créateurs qui doivent se remettre en cause, s'adapter, trouver de nouveaux modèles économiques, se rendre compte en un mot que le phénomène internet est une réalité durable qu'il leur faut transformer en atout plutôt que le combattre. Les acteurs concernés doivent se rapprocher davantage ; le monde de la création et le monde numérique ne peuvent continuer à s'ignorer. Il leur faut réfléchir ensemble au développement de moyens innovants qui permettront demain d'offrir aux internautes l'accès aux savoirs et aux oeuvres de la création.
S'agissant enfin des sanctions, je suis heureuse que le texte favorise la transaction, plus pédagogique, ce qui reste l'objectif premier de cette réforme. Certains ont vu dans le retour à un minimum de deux mois de suspension un renforcement de la répression ; il s'agit en réalité de renforcer l'attractivité de la transaction face à la sanction sèche. La nouvelle lecture à l'Assemblée a permis de réelles avancées relatives à la procédure de suspension de l'accès internet. L'article L. 331-25, en particulier, dispose désormais que l'Hadopi devra toujours informer l'abonné « de la possibilité de se faire assister d'un conseil, de consulter l'intégralité du dossier le concernant et de présenter des observations écrites et orales ».
Un mot enfin de la prévention. L'objectif de la réponse graduée est de faire évoluer les mentalités et les comportements, notamment des jeunes générations. Nous avions souligné en 2006, lors de l'examen de la loi Dadvsi, l'importance de l'éducation de nos concitoyens à la culture, les pratiques de téléchargement accréditant l'idée que la culture ne coûte rien. C'est méconnaître l'investissement personnel, intellectuel et financier des artistes. Comment dès lors peut-on dire qu'encadrer l'utilisation des oeuvres est une atteinte aux droits fondamentaux de l'homme, un acte liberticide ? Ces propos démagogiques sont à mes yeux consternants. Je me félicite que le texte prévoit une information des élèves dans le cadre de l'éducation nationale ; il est également bienvenu que les fournisseurs d'accès participent à la sensibilisation des internautes.
L'enjeu du texte est d'assurer l'avenir de la création culturelle, et pour cela d'atteindre un juste équilibre entre les droits légitimes des auteurs et ceux des citoyens à l'accès, au partage et à la diffusion de la culture, des savoirs et de l'information que permet ce formidable espace de liberté qu'est internet. Tout en soulignant qu'il faut rester humble devant un sujet aussi sensible et évolutif, le groupe Union centriste votera ce texte. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Jack Ralite. - Ce texte, qui nous est proposé après des péripéties insupportables, n'est pas la solution aux rapports du droit d'auteur avec les nouvelles technologies. Sortons le débat de sa béatitude conflictuelle pour parler de notre tâche, élaborer la loi. Nous avons eu la loi relative au CPE, votée mais non appliquée : un certain ministre de l'intérieur n'y fut pas étranger. Puis la loi sur l'audiovisuel public, partiellement appliquée avant même le vote du Parlement, dont l'auteur était ce même ancien ministre. Ce n'est pas encore public, mais le chef de l'État, toujours le même homme, veut nommer un chargé de mission -qui sera encore un homme venu du monde de l'entreprise- pour étudier comment le texte d'aujourd'hui sera appliqué. Le travail législatif n'est plus bousculant pour construire mais bousculé, humilié, affaibli même s'il crée. Il devient inefficace, et la loi réduite à un outil de communication. Le travail législatif est toujours difficile, qui consiste à mettre le monde en lois, en mots, sans rien abandonner à la prison de l'inexprimé. La loi Création et internet met en cage cet inexprimé. Je me souviens de la Mise en mots d'Elsa Triolet et de son devenir qu'est le lecteur, qu'elle commentait ainsi : « j'appelle au téléphone mais il n'y a pas d'abonné au numéro que je demande ». Ce n'est pas aujourd'hui à l'absence d'abonnés que notre mise en loi est confrontée.
En 1793, Le Chapelier disait le droit d'auteur « la plus inattaquable des propriétés », ajoutant : « cependant c'est une propriété d'un genre tout à fait différent des autres propriétés. Quand un auteur a livré son ouvrage au public, il semble que dès ce moment l'écrivain ait associé le public à la propriété ou plutôt la lui ait transmise tout entière. » Nous sommes au moment où l'impossible rêve d'hier peut devenir le possible d'aujourd'hui et de demain. Braque, interrogé sur une de ses natures mortes avec deux pommes, répondait : « ce qui est important dans cette toile, ce ne sont pas les pommes, c'est l'entre-deux ». Cette réflexion sur le lien doit nous aider à penser les rapports entre auteurs et internautes en les libérant des lobbies des industries culturelles, qui veulent accaparer le droit d'auteur et verrouiller le développement d'internet.
La directive européenne du 22 mai 2001 précise que « le cadre législatif communautaire relatif à la protection du droit d'auteur doit être adapté au bon fonctionnement du marché intérieur ». Son considérant 19 dispose que « le droit moral reste en dehors (de son) champ d'application. » Pour certains, le droit moral est un hochet ; pour nous, c'est un fondement, une spiritualité, c'est le droit de celui qui crée une oeuvre et de l'humanité qui la reçoit. Hugo disait : « comme livre, le livre appartient à l'auteur, mais comme pensée, il appartient au genre humain ».
C'est cette équation qu'il faut faire vivre dans la présence immense des réseaux. Or nous n'avons aucune étude autre que des industries, aucune commission pluraliste pour explorer la réalité. Nous devons provoquer la clarté sur des données multiples et contradictoires. Je propose, comme je l'avais fait lors de la loi Dadvsi, la création immédiate d'un conseil appelé Beaumarchais-internet-responsabilité publique, comprenant, je veux les citer tous, auteurs, artistes, écrivains, juristes, bibliothécaires, parlementaires, universitaires, chercheurs, architectes, informaticiens, internautes, fournisseurs d'accès, industriels pour négocier une alternative à la pensée vulgaire et triviale d'aujourd'hui. Ceux qui font et ceux qui reçoivent sont toujours oubliés -ainsi dans la commission Copé ; le résultat, c'est l'approximatif donc le mépris, c'est le contradictoire devenu impasse, c'est la dissonance devenant cacophonie.
La stratégie du pouvoir est là, provoquer les clivages, déstabiliser la société. Clivages qui sont dans toutes les catégories. Voyez les auteurs-interprètes, avec qui j'ai des rapports profonds. Arditi, Piccoli, Gréco sont pour la loi, Deneuve, Garrel, Balibar sont contre. Qui gagne ? Aucun de ceux que je viens affectueusement de nommer. La pratique de l'Élysée ne fait ni société, ni humanité ; pire, elle casse face aux « nouveaux nouveaux mondes » décrits par Georges Balandier l'unité des acteurs de leur nécessaire civilisation. Cette loi glorifie la concurrence libre et non faussée. Je n'en suis pas. Je suis pour la remise sur le métier pour aller vers un accord que pourront signer, pour avoir participé à son élaboration, Piccoli et Gréco, Garrel et Balibar.
Nous continuerons de révéler l'instrumentalisation des questions artistiques par des questions techniques. Elle concerne les artistes, dont la création se nourrit des nouvelles technologies, comme les jeunes, qui viennent par internet au monde de la connaissance et de l'image. Les laisserons-nous avoir soif auprès de la fontaine ?
Pour ne pas prendre de retards d'avenir, fidèles à Aragon, nous ne cesserons de nous souvenir de l'avenir. Voilà ce qui inspire notre position dans ce débat compliqué par la prise de position du Parlement européen. Vous créez un monde d'issues fermées, nous voulons qu'elles soient ouvertes. Plutôt qu'à la fin de l'éternel, à l'instar de René Crevel, nous travaillons à la fin de l'immobile. Soyons décoincés et décoinçants. Il n'y a pas d'incompatibilité durable, sinon la démagogie qui veut tout faire payer sauf la création et les créateurs. A ce noeud de contradictions qu'est le texte, nous opposons un refus de vote catégorique. (Applaudissements à gauche)
Mlle Sophie Joissains. - (Applaudissements sur les bancs UMP) Nous voici de nouveau réunis pour ce texte après avoir adopté le 9 avril les conclusions de la commission mixte paritaire. On ne peut que regretter que le travail si bien accompli ait été remis en cause par un incident de séance au moment du vote. Les artistes ont déploré publiquement ce piètre épisode ainsi que l'attitude de la gauche. Ce ne sont pas simplement quelques voix qui se sont élevées, mais les professionnels, les signataires des accords de l'Élysée, et les 10 000 signataires d'une pétition.
Le piratage de masse a des conséquences désastreuses pour la création parce que les artistes et les créateurs ne vivent pas simplement d'amour et d'eau fraiche. Les ventes de CD et de DVD ont reculé de 18,5 % au premier trimestre et elles ont été divisées par trois depuis sept ans. Cette chute est loin d'être compensée par les ventes numériques légales qui ne représentent que 15 % des ventes.
Si l'on veut que ces dernières progressent, il faut stopper le piratage. Le projet adopte à cet effet une approche préventive, graduée et pédagogique. Des préjugés ont été exprimés, sur la violation de la vie privée, d'abord, alors que l'Hadopi n'exercera aucune surveillance généralisée ou a priori ; sur les sanctions, ensuite, qui seraient trop lourdes, alors que le projet permet d'éviter la voie pénale et les trois ans d'emprisonnement actuellement encourus pour contrefaçon. Dorénavant, la contrefaçon sera réservée aux actes en série, constitutifs d'un véritable commerce, la sanction retenue pour les autres étant administrative : la suspension de la connexion.
La lutte sera essentiellement préventive et pédagogique : 90 % des internautes déclarent qu'ils renonceront au piratage après deux avertissements. L'Hadopi, qui présente toutes les garanties d'indépendance, sera la seule à pouvoir se procurer les renseignements strictement nécessaires à l'envoi des avertissements. Cette autorité marque d'ailleurs l'originalité de l'approche française, plus protectrice de la vie privée.
On a affirmé que la loi serait liberticide. La suspension provisoire de la connexion ne porte cependant aucune atteinte aux libertés fondamentales. Le projet établit un équilibre entre le respect de la vie privée de l'internaute et les droits des créateurs. La liberté, affirme la Déclaration des droits de l'homme, est le droit de pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui. Or la seule liberté à laquelle il est mis fin est celle de se servir dans le répertoire des artistes sans leur rendre de comptes.
Certains auront la possibilité de passer entre les mailles du filet, a-t-on dit. Est-ce une raison pour ne pas légiférer et les moyens d'identification ne progresseront-ils pas ?
Enfin, la licence globale est difficilement évaluable et pourquoi tous les internautes devraient-ils payer pour les 30 % d'entre eux qui téléchargent ?
Le Sénat a enrichi le texte par son débat constructif. Le texte issu de l'Assemblée nationale reprend la plupart de ses apports et il est quasiment identique à celui de la commission mixte paritaire. Il est plus urgent chaque jour de légiférer. Le groupe UMP exprime sa gratitude envers le rapporteur et le président de la commission des affaires culturelles qui ont étudié et amélioré le texte en recherchant un juste équilibre. Il félicite la ministre de sa ténacité et de sa magnanimité. Il votera ce projet qui répond à une attente forte. Ce qui nous rassemble aujourd'hui, c'est la protection des auteurs et de la création, que la gauche met en danger par sa démagogie. (Applaudissements à droite)
Mme Marie-Christine Blandin. - Voici une nouvelle étape, car ce ne sera qu'une étape, de l'incapacité des gouvernements successifs à inventer un soutien à la création et aux créateurs qui prenne en compte sans les réprimer l'évolution des pratiques culturelles et le progrès. Ceux qui nous vantaient la Dadvsi et ne l'ont jamais appliquée, ceux qui décrivaient les cryptages idéaux, et ne les ont jamais mis en pratique, ont repris leur bâton de pèlerin pour présenter des solutions bancales car faire reposer la défense des internautes de bonne foi sur des logiciels anti-espion ou des pare-feux dont les plus grandes entreprises n'ont pu se doter, est un pari sur la société de la connaissance dont même les plumes les plus ambitieuses du traité de Lisbonne n'auraient osé rêver. C'est faire peu de cas de ceux qui ne sont pas Microsoft-compatibles, des usagers de logiciels libres, pour lesquels ce genre d'artifice est impossible, et c'est ne pas entendre les opérateurs qui se déclarent incapables de couper la connexion sans couper la télévision et le téléphone.
Ceux qui nous promettaient une création resplendissante avec la Dadvsi, en appelleraient presque aux valeurs de gauche pour défendre l'instruction du dossier par le privé, l'inversion de la preuve et la fin de la présomption d'innocence. Manque de dialogue entre générations ou lecture superficielle du texte ? On mesure en revanche fort bien le poids des intermédiaires, de ceux qui ne créent pas mais s'enrichissent de la création, tout comme l'on perçoit la proximité entre les décisions recherchées et les aspirations des majors -quand un citoyen, dans sa sphère privée, accomplit son devoir de questionnement auprès de sa députée, il ne se doute pas que son licenciement pour délit d'opinion en assurera la traçabilité publique.
M. Jean-Luc Fichet. - Très bien !
Mme Marie-Christine Blandin. - Pourquoi regarder comme des délinquants ceux qui se sont adaptés plus vite que les adultes mais qui, éduqués par la société marchande dans les leurres du gratuit, ont considéré l'accès aux oeuvres comme une opportunité ? S'ils ne se sont pas sentis liés par les difficultés des créateurs, ils ont cru les publicités des opérateurs et du capitalisme de droite... (Rires à droite et au centre)
Faute d'un vrai travail sur la place de la culture dans la société, nous allons de replâtrage en replâtrage : débats en urgence et conclusions de la commission mixte paritaire, et cette lecture au Sénat tellement verrouillée qu'aucune modification ne sera acceptée et que si une bonne idée passait entre les mailles du filet, elle tomberait à l'Assemblée nationale. Mes collègues sont très courageux...
M. Jean-Patrick Courtois. - De vous écouter ! (Rires à droite)
Mme Marie-Christine Blandin. - ...d'être là. Le changement constitutionnel donne vraiment beaucoup d'autonomie aux parlementaires ! Ce texte sortira validé de nos débats dans quelques heures.
Sauver la création et les créateurs ? Nous partageons tous ce souci.
Mlle Sophie Joissains. - Heureuse de vous l'entendre dire !
Mme Marie-Christine Blandin. - Protéger le droit d'auteur ? Même si l'on n'approuve pas la méthode, cela nous rassemble tous. Alors, je ne doute pas (même mouvement) que vous accueillerez avec enthousiasme l'amendement des Verts qui supprime le cavalier introduit par le député Kert et qui priverait les journalistes d'une part significative de leurs droits d'auteur. (Applaudissements à gauche)
M. Jean-Luc Fichet. - Bravo !
M. Henri de Raincourt. - Il ne faut pas rêver.
La discussion générale est close.
M. Jacques Legendre, président de la commission. - Je demande une courte suspension de séance pour permettre à la commission d'examiner les amendements qui viennent d'être déposés.
La séance, suspendue à 11 heures, reprend à 11 h 20.
Discussion des articles
L'article premier A est adopté.
Articles additionnels
M. le président. - Amendement n°2, présenté par M. Renar et les membres du groupe CRC-SPG.
Avant l'article premier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'accès à l'Internet est reconnu comme un droit fondamental qui doit être garanti à tous les citoyens de manière égalitaire sur l'ensemble du territoire.
M. Michel Billout. - Cet article additionnel garantit solennellement l'accès à internet pour tous dans les mêmes conditions et, ce faisant, il reconnaît le caractère essentiel de cet accès au réseau dans notre « société de l'information ». Cette proposition a déjà été rejetée par le Gouvernement en première lecture à l'Assemblée nationale -un refus en dépit du bon sens puisque, le 29 avril, le Parlement européen a, pour la deuxième fois, affirmé le caractère fondamental de l'accès à internet, en adoptant une résolution affirmant que « garantir l'accès de tous les citoyens à internet équivaut à garantir l'accès de tous les citoyens à l'éducation ». Ce texte, adopté à une très large majorité, ne peut être ignoré. L'accès à internet est un droit fondamental d'abord à cause de son usage administratif, juridique et de son rôle dans la transmission du savoir. C'est ce qui a poussé le député européen Stavros Lambrinidis à déclarer que « l'illettrisme informatique sera l'illettrisme du XXIe siècle ».
C'est aussi un droit fondamental parce que si, avec les nouvelles technologies, le citoyen a gagné le triste privilège d'être fiché de multiples manières, il doit au moins accéder au versant positif de ces nouvelles technologies et notamment aux informations numériques de son choix.
N'en déplaise à nos collègues de l'UMP, l'accès à internet doit devenir un droit fondamental. Si vous refusez de le reconnaître aujourd'hui, vous y serez contraints demain. C'est le sens de l'histoire. En plus, il s'agit aussi de protéger la vie privée, ce qui est une forme de droit fondamental.
M. Michel Thiollière, rapporteur. - Avis défavorable.
Mme Christine Albanel, ministre. - Avis défavorable. L'accès à internet n'est pas un droit fondamental comme la liberté de croyance ou d'expression. Preuve en est qu'on peut couper cet accès lorsqu'on ne paye pas l'abonnement. Et il convient de concilier droits et liberté.
M. le président. - Amendement n°3, présenté par M. Renar et les membres du groupe CRC-SPG.
Avant l'article premier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l'article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle, il est inséré un alinéa rédigé : « Ce droit est un droit fondamental, un droit de l'homme. Il s'applique à toutes les oeuvres de l'esprit, ainsi qu'à leurs reproductions, quel que soit le support matériel qui les accueillent. »
M. Ivan Renar. - Cet article additionnel réaffirme solennellement la nature fondamentale du droit d'auteur. C'est par là sans doute qu'il eût fallu commencer ; c'est par là que nous vous proposons de clore temporairement un débat qui ne manquera pas de rebondir. Et il faut reconnaître la nature fondamentale du droit d'auteur dans toutes ses dimensions, patrimoniale, certes, mais également morale. Cette dimension morale permet à l'auteur de jouir du respect de son nom, de sa qualité et de son oeuvre (art. L. 121-1). Il s'agit d'un droit imprescriptible -c'est-à-dire d'une durée illimitée-, inaliénable -il ne peut être cédé à un tiers- et perpétuel, c'est-à-dire transmissible aux héritiers. Par sa dimension morale, le droit d'auteur se révèle avant tout un droit du créateur. En cela c'est un droit de l'homme. De plus, aborder le droit auteur sous l'angle des droits de l'homme permet aussi d'éviter tout conflit avec d'autres intérêts fondamentaux : la liberté d'expression, l'intérêt culturel du public...
M. Michel Thiollière, rapporteur. - Avis défavorable parce que le code affirme déjà de façon précise la réalité du droit d'auteur.
Mme Christine Albanel, ministre. - Avis défavorable.
M. Serge Lagauche. - Je suis contre l'amendement n°2 ; quant au n°3, j'admets que le droit d'auteur est un droit fondamental mais aller jusqu'à en faire un droit de l'homme revient à tout mélanger ! Les droits de l'homme ont une autre dimension.
Mme Catherine Morin-Desailly. - Je partage cet avis. Les droits fondamentaux, ce sont par exemple le droit à la santé, les libertés de culte et d'expression, le droit à l'information, à l'éducation. Le Sénat a toujours eu le souci d'une égalité d'accès aux nouvelles technologies, à la TNT, etc. Mais je voterai contre ces amendements. (Applaudissements sur les bancs UMP)
Mme Marie-Christine Blandin. - Je perçois tout l'intérêt de cet amendement : l'Hadopi ne pourrait suspendre un droit fondamental ! Je m'abstiendrai cependant car d'autres droits fondamentaux me paraissent prioritaires : Mme Morin-Desailly a mentionné le droit à la santé, j'insisterai pour ma part sur le droit à l'eau potable, sur tout le territoire français. Les Amérindiens de Guyane en sont privés. Je profite de l'occasion pour lancer un appel à ce sujet.
L'amendement n°2 n'est pas adopté, non plus que le n°3.
Les articles premier et premier bis A sont adoptés.
Article 2
Mme Samia Ghali. - Regardant à la télévision les discussions sur le téléchargement à l'Assemblée nationale, mes enfants de 18 et 15 ans m'ont dit : « C'est quoi ce débat ? On va nous interdire de télécharger ? Nous ne sommes pas des voleurs ! Nous voulons l'accès à la culture. Si l'on s'oppose au téléchargement, pourquoi ne défend-on pas le disque vinyle ? »
C'est le bon sens. Nous sommes en pleine révolution numérique, il faut l'accepter et faire un effort d'imagination. Les formes de protection collective n'ont jamais affaibli les droits sacrés des auteurs. Au nom du bien commun qu'est la culture, on a construit des espaces de gratuité, bibliothèques, musées, radios libres, mais jamais l'on a pensé que la gratuité dévalorisait l'oeuvre ou l'artiste. Avez-vous remarqué que ceux qui téléchargent sont aussi ceux qui vont le plus au cinéma ? Vos enfants, vos petits-enfants téléchargent. Vous ne pouvez, en réponse à l'avènement de la civilisation numérique, vous borner à ouvrir la chasse aux pirates, la chasse aux jeunes ! Ni à instaurer la surveillance généralisée sur internet. Les Américains ont finalement adopté le principe de la licence globale, nous serons obligés de suivre et c'est tant mieux. A côté des réseaux commerciaux, il doit y avoir place pour des échanges non marchands, dans un espace où la copie est un acte de partage.
La gratuité n'est pas un vol, elle ne signifie pas absence de rémunération du travail de l'artiste. Le droit d'auteur est plus que jamais nécessaire à l'ère numérique, mais il doit être adapté. Une redevance de 2 ou 3 euros mensuels pour chaque abonnement à internet rapporterait plus de 500 millions d'euros. On peut avoir une connaissance très précise du nombre de téléchargements -sans chercher à savoir qui télécharge quoi- donc procéder à la répartition des sommes.
Votre loi est inefficace, complexe, archaïque, liberticide.
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement. - N'en jetez plus !
Mme Samia Ghali. - Elle est obsolète et ne réglera rien car le modèle que vous avez choisi est déjà dépassé. Vous mettez en place une véritable usine à gaz, les contentieux seront nombreux. Et la mesure phare de ce texte est en contradiction flagrante avec l'objectif d'un accès pour tous à internet. C'est là un droit fondamental, le Parlement européen vient de l'affirmer, rendant caduc votre projet. La suspension de l'abonnement est une sanction incongrue, résultant d'une conception très en retard sur l'évolution de la société. Votre loi est liberticide, elle organise une surveillance généralisée de la toile et remet en cause les libertés individuelles. Bref, elle est ringarde. (MM. Michel Billout et François Autain applaudissent)
L'article 2 est adopté. Les articles 3, 4 bis A, 4 bis, 6, 7, 7 bis, 8, 9 bis A, 9 bis, 9 ter, 9 quater, 10 A et 10 sont adoptés.
Article 10 bis A
M. le président. - Amendement n°5, présenté par M. Renar et les membres du groupe CRC-SPG.
Compléter le texte proposé par le 2° du I de cet article pour l'article L. 132-38 du code de la propriété intellectuelle par un alinéa ainsi rédigé :
« Une rémunération complémentaire est due aux journalistes professionnels mentionnés à l'article L. 132-36.
M. Jean-François Voguet. - Le 2 avril dernier, un sous-amendement avait été adopté pour compléter l'article L. 132-37 par un alinéa posant le principe de la rémunération complémentaire des journalistes au titre des droits d'auteur. Il a été supprimé par la CMP. Nous proposons de le réintroduire. Il n'y a nulle redondance mais une utile clarification, afin que les grands groupes ne puissent contourner ce principe essentiel.
M. Michel Thiollière, rapporteur. - Défavorable : la suppression était purement rédactionnelle.
Mme Christine Albanel, ministre. - Effectivement, l'alinéa faisait double emploi avec les dispositions régissant l'exploitation des oeuvres et la rémunération des auteurs, qui imposent un accord d'entreprise ou un accord collectif. Une redondance a été supprimée. Je le répète car les journalistes s'en sont émus : cette suppression est purement rédactionnelle et ne change rien sur le fond.
Cet amendement risquerait en outre de créer une confusion pour la rémunération des autres droits d'exploitation, dits secondaires.
Avis défavorable.
L'amendement n°5 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°1, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et MM. Desessard et Muller.
Supprimer le 1° A du II de cet article.
Mme Marie-Christine Blandin. - L'empressement de certains à mettre fin à ce débat et la volonté du Gouvernement d'aboutir à un texte voté par les deux chambres ont limité le dépôt d'amendements à l'étroite fenêtre du mardi entre 17 et 18 heures. Si la majorité est certaine de sa victoire et l'opposition, privée de marge de manoeuvre, nous ne pouvons cependant voter des dispositions contraires au code du travail, au livre blanc des états généraux de la presse et aux positions du Sénat dans la loi Dadvsi.
Cet amendement supprime un ajout sauvage du député Kert. Présenté à l'Assemblée lors d'une procédure d'urgence, sans que le Sénat en ait pris connaissance, il est passé inaperçu à la CMP et est revenu au Sénat sans possibilité d'amendement. En outre, il nie les subtils équilibres obtenus au cours des états généraux. Madame la ministre, vous n'y avez d'ailleurs pas été favorable car, avez-vous dit, « c'est un sujet complexe et sensible ».
Du fait de l'évolution de la société et des technologies de communication, il avait été reconnu que les écrits et les images d'un journaliste pour un titre sur support papier étaient désormais utilisables en version numérique, comme le précisait l'amendement du Gouvernement déposé en séance. L'amendement Kert étend ce droit à tout support, ce qui contredit les fondements de la propriété intellectuelle à la française tout en malmenant le code du travail et en bafouant le droit de retrait des journalistes.
Sans présumer des postions des uns et des autres sur ce texte, je vous demande donc de respecter la ligne éthique de protection de la propriété intellectuelle qui a toujours éclairé le Sénat. (Applaudissements à gauche)
M. le président. - Amendement identique n°4, présenté par M. Renar et les membres du groupe CRC-SPG.
M. Jean-François Voguet. - Les deux alinéas issus d'un amendement introduit de façon discutable lors du débat en commission à l'Assemblée nationale remettent en cause le droit moral et patrimonial des journalistes : alors que le code du travail prévoyait jusqu'ici que ces derniers sont employés par un titre, l'employeur pourra désormais leur imposer de travailler pour tous les supports d'un groupe : journal, site internet, radio, chaîne de télévision, etc. Au lieu d'être rémunérés à chaque publication, ils ne seront payés qu'une fois pour toutes. De plus, ils perdront leur droit de regard sur la reproduction de leurs articles.
Jusqu'à ce jour, la publication d'un article non autorisée par son auteur et non rémunérée relevait de la contrefaçon et enfreignait le code du travail. Comment, au sein d'un texte censé défendre le droit d'auteur, peut-on ainsi s'attaquer à celui des journalistes ? Le droit d'auteur n'est-il que le masque derrière lequel se cachent d'autres projets ? (Applaudissements à gauche)
M. Michel Thiollière, rapporteur. - Le président de la commission a diffusé dès vendredi soir les conclusions des débats à l'Assemblée. Chacun a donc pu en prendre connaissance.
Le fonctionnement sous la forme de média global est une question de survie pour les entreprises de presse. L'amendement présenté par Christian Kert concerne les modalités de collaboration entre l'employeur et le journaliste, et non la cession des droits d'auteur, qui relève du code de la propriété intellectuelle.
Avis défavorable.
Mme Christine Albanel, ministre. - Du fait de la révolution numérique, les journalistes peuvent être amenés à travailler sur des supports papier ou internet. Le contrat de travail peut cependant prévoir une collaboration pour un support unique.
Les nouvelles dispositions ne sont pas un motif de rupture des contrats de travail en cours. J'avais émis des réserves sur la méthode adoptée, qui sortait du cadre des états généraux de la presse. En outre, on aurait pu procéder par des accords d'entreprise. Toutefois, le compromis obtenu par la CMP, que reflète ce texte, est équilibré. Il est préférable de ne pas le remettre en cause : avis défavorable.
Mme Marie-Christine Blandin. - Vous êtes passée d'un avis de sagesse à l'Assemblée nationale à l'approbation de dispositions qui desservent les journalistes. Il est paradoxal, au sein d'une loi destinée à soutenir les droits des créateurs, de saboter les droits d'auteur par le biais d'un cavalier. Le Sénat ne devrait pas changer une virgule de ce texte pour qu'il soit adopté ? Selon que les groupements d'intérêts tirent ou non bénéfice des droits d'auteur, le Parlement est sommé de les défendre ou pas : les droits voisins profitent aux grands groupes, les articles et images des journalistes pourront en revanche circuler. Ce n'est pas ainsi que l'on aidera la presse à diversifier ses contenus, à collaborer avec de vrais professionnels et à garantir aux lecteurs la pluralité des regards. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Serge Lagauche. - Comme je l'ai dit au cours de la discussion générale, nous soutenons sans restriction cet amendement que nous aurions signé si le délai de dépôt nous l'avait permis. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
L'amendement n°1, identique à l'amendement n°4, n'est pas adopté.
L'article 10 bis A est adopté.
Les articles 10 bis B à 13 sont successivement adoptés.
Article additionnel
M. le président. - Amendement n°6, présenté par M. Renar et les membres du groupe CRC-SPG.
Après l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Il est créé un conseil pluraliste réunissant des auteurs, des artistes, des écrivains, des journalistes, des chercheurs, des juristes, des architectes, des informaticiens, des représentants des internautes, des fournisseurs d'accès, des industriels, des parlementaires et les pouvoirs publics. Ce conseil élabore de manière collégiale la définition des conditions de rémunération des auteurs à l'heure numérique.
Les conditions de désignation des membres du conseil sont fixées par décret.
M. Jack Ralite. - Nous proposons de créer un conseil véritablement pluraliste pour traiter de la rémunération des auteurs. Les discussions ont jusqu'ici laissé de côté de nombreux acteurs concernés. L'accord Olivennes est essentiellement un accord industriel, qui ne traite pas de la question de société que constituent les droits d'auteur. Rien n'a été réglé, et les positions se sont même parfois durcies. Il en résulte une grande confusion et un projet de loi inapplicable.
La page de cette loi est donc déjà tournée avant d'avoir été lue. Nous proposons d'écrire une nouvelle page en prévoyant une règle commune pour la création à l'heure d'internet, grâce à la concertation et au pluralisme.
M. Michel Thiollière, rapporteur. - Cette idée est intéressante mais n'a pas une portée législative. Rien n'empêche les signataires des accords de l'Élysée de se réunir pour suivre les évolutions dans ce domaine. Avis défavorable.
Mme Christine Albanel, ministre. - Dans cette optique, j'ai l'intention d'ouvrir une nouvelle phase de concertation pour traiter des ressources des créateurs, du développement de l'offre légale et de la situation des indépendants. Je souhaite y associer le Parlement.
Il est inutile de créer un nouveau conseil, d'autant que les acteurs de la création sont déjà représentés au sein du Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA). Avis défavorable.
M. Serge Lagauche. - Nous soutenons cet appel. J'espère, madame la ministre, que cette commission sera mise en place rapidement. On ne peut pas perdre encore deux ou trois ans !
L'amendement n°6 n'est pas adopté.
Vote sur l'ensemble
M. Jean-Pierre Plancade. - Ce qui s'est passé à l'Assemblée nationale n'honore par le Parlement, et donne prise aux adversaires de la démocratie, alors que l'immense majorité des élus travaille sérieusement. Je déplore cet incident. (« Très bien » et applaudissements à droite et sur le banc de la commission)
Ce texte n'est guère plus qu'une ligne Maginot. Pouvait-on faire autrement ? Probablement. Faire mieux ? Je ne sais. Mais, même si le texte est imparfait, il fallait envoyer un signe aux créateurs. (« Très bien » à droite) Plus largement, il fallait faire passer le message que l'on ne peut plus laisser faire n'importe quoi sur la Toile. (« Très bien » et applaudissements à droite)
Le RDSE n'est pas un « supplétif ». J'ai de la compassion pour ceux qui, après avoir voté pour, vont aujourd'hui voter contre ou s'abstenir. Le RDSE, dans sa quasi-totalité, parce qu'il est composé d'hommes et de femmes libres, votera ce texte sans états d'âme. (Applaudissements à droite et au centre)
Mlle Sophie Joissains. - Bravo.
M. Jean Louis Masson. - Je déplore que ce projet de loi technique ait donné lieu à un clivage droite-gauche. La démocratie aurait gagné à ce que la situation soit plus pacifiée, d'autant que les torts sont partagés : si l'incident à l'Assemblée nationale n'était guère reluisant pour l'image du Parlement, nombre de députés de la majorité avaient délibérément omis d'aller voter... Hier encore, ils étaient quarante à refuser de cautionner ce texte, malgré les amicales pressions de leur groupe. Qu'on ne s'étonne pas de l'absentéisme des parlementaires, quand ils reçoivent ainsi les instructions de leur parti qui veut les transformer en presse-bouton ! J'ai également peu apprécié la hâte avec laquelle ce projet de loi est revenu dans l'hémicycle.
Le problème du droit d'auteur était-il le plus urgent ? La diffamation sur internet me paraît bien plus préoccupante ! J'aurais souhaité un projet de loi global traitant des problèmes causés par l'anarchie qui règne sur le net.
Je voterai contre ce texte, car je suis farouchement hostile à la multiplication des organismes administratifs, non juridictionnels, qui s'arrogent le droit d'imposer des pénalités. Payer un abonnement sans en bénéficier, c'est payer une amende ! Il y a des règles à respecter dans une société : nous ne sommes pas encore en dictature ! (Exclamations amusées à gauche) L'absence de garde-fou est grave. Le vote du Parlement européen montre bien l'étendue du problème. (Applaudissements à gauche)
Mme Marie-Christine Blandin. - La hâte et la précipitation ont une motivation quasi-philosophique : la fin justifie les moyens. On sait que le dispositif ne fonctionnera pas, mais on envoie un « message » aux créateurs ! La création vaut mieux que cela. Que l'on cesse plutôt de saboter le régime de l'intermittence...
M. Roland du Luart. - Ça n'a rien à voir.
Mme Marie-Christine Blandin. - Nous voterons contre ce texte, ne serait-ce qu'à cause du cavalier scélérat contre les journalistes que vous y avez subrepticement introduit. (Applaudissements sur les bancs socialistes ; M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement lève les yeux au ciel)
M. François Autain. - Votre projet de loi porte atteinte au respect de la vie privée et professionnelle. Depuis 2002, vous instaurez une surveillance générale du net, intrusive et injuste. Pas de possibilité de recours, pas de procès équitable avant la coupure par une énième Haute autorité : ce texte restreint un peu plus la liberté de nos concitoyens, singulièrement des plus jeunes, que vous avez décidément du mal à comprendre. Le Parlement européen, à une écrasante majorité, l'a d'ailleurs rendu obsolète.
Le système repose sur une identification des coupables inefficace parce qu'hasardeuse et arbitraire. Le Gouvernement envisage des « listes blanches » pour filtrer les accès au wi-fi qui a gagné jusqu'au jardin du Luxembourg ; une triple peine additionne suspension de la connexion, paiement de l'abonnement et poursuites civiles ou pénales. Vous avez promis aux acteurs de la création de proscrire ce qui ne peut l'être techniquement. L'adresse IP peut être aisément masquée ou détournée par un tiers. La présomption de culpabilité, comme le non-respect du principe de l'imputabilité, est contraire à la Constitution. Vous ne sanctionnez pas le téléchargement mais le défaut de sécurisation de la connexion : l'internaute devra installer un logiciel « mouchard » dont la désactivation pourra être sanctionnée.
Au lieu de défendre l'indéfendable pour vous attirer les faveurs électorales de quelques grands industriels de la culture, madame la ministre, il aurait mieux valu vous pencher sur le droit d'auteur à l'heure du numérique. La loi Dadvsi promettait déjà tout et ne réglait rien. Vous concevez toujours la création comme un patrimoine statique qu'il faut défendre, et non rendre accessible au plus grand nombre. Il faut adapter le droit d'auteur à internet, et non l'inverse !
Cette loi aurait pour but de créer un cadre « psychologique », dites-vous. Après celui de gendarme du net, voilà que vous endossez le rôle d'analyste du monde virtuel ! Mieux vaudrait rester simplement ministre de la culture... Parce que ce projet de loi est liberticide, structurellement inefficace, et ne saisit pas l'occasion de repenser les rapports économiques de la culture, les sénateurs du Parti de gauche, M. Mélenchon et moi-même, voterons contre. (Applaudissements sur les bancs CRC ; M. Jean Desessard applaudit également)
M. Jack Ralite. - Ayant déjà exposé les arguments du groupe CRC, je souhaite tout d'abord évoquer notre travail législatif, marqué par l'organisation de clivages artificiels et par la réduction de la loi à un simple outil de communication. Pilotée d'une main de fer par l'Élysée cette pratique excessivement grave humilie les législateurs en disqualifiant le travail parlementaire, elle crée une nouvelle catégorie de citoyens : en colère, mais réduits au désoeuvrement et démobilisés par leur impuissance. On finira par aboutir à une minorité majoritaire ! Cette démarche politique apporte une nuance comique, mais grave, à la révision constitutionnelle censée accroître les droits du Parlement.
Notre amendement proposant de faire payer les fournisseurs d'accès à internet a été repoussé. On épargne donc une fois de plus les grandes affaires riches et prospères, qui accumulent actuellement !
De même, l'article 40 est invoqué contre un amendement communiste tendant à imposer la création d'une plateforme publique de téléchargement. Nous l'avons repris aujourd'hui, car il était resté inappliqué deux ans après son adoption à l'unanimité de l'Assemblée nationale et par la majorité du Sénat.
Le droit d'auteur est un droit de civilisation et un droit de l'homme, dont la malléabilité s'est adaptée à tous les progrès techniques. Il n'y a pas de raison pour qu'il n'y parvienne pas dans les conditions actuelles. Encore faut-il une réflexion pluraliste. Or, pas un journaliste, pas un artiste, pas un chercheur, pas un syndicaliste, pas un téléspectateur et pas un internaute ne siégeaient à la commission Copé ! Quoi que d'aucuns prétendent, telle est la vérité, d'ailleurs conforme à la mode actuelle !
A propos des droits fondamentaux, il faudrait réfléchir à une charte dont l'article premier disposerait : « La protection du vivant, de l'environnement et de la création de l'esprit constitue un cercle sacré ; elle constitue un bien commun de l'humanité, non marchand et inviolable ».
En conclusion, j'incite le Président de la République à méditer cette phrase de René Char : « A tous les repas pris en commun, nous invitons la liberté à s'asseoir. La place de plus en plus demeure vide, mais le couvert est mis ». (Applaudissements sur les bancs CRC)
M. Jacques Legendre, président de la commission. - Commencé à l'automne, ce débat fut marqué au Sénat, non par l'affrontement binaire droite contre gauche, mais par la recherche d'une réponse à une question difficile.
M. Roland du Luart. - Exact !
M. Jacques Legendre, président de la commission. - Chaque pays tâtonne entre des réponses différentes.
Dès le mois d'octobre, nous avons été animés sur tous les bancs par la volonté de protéger les créateurs, qui sont les plus faibles et les plus menacés, car il est facile de capter la création d'autrui, mais le monde de la création peine à récupérer la rémunération de son travail.
En octobre, notre texte a été voté par la quasi-unanimité du Sénat, dont l'honneur est d'avoir évité l'affrontement partisan. Mais l'Assemblée nationale n'a pas été aussi sage que le Sénat.
M. Roland du Luart. - C'est souvent le cas.
M. Michel Charasse. - A qui profite tout cela ?
M. Jacques Legendre, président de la commission. - Nous débattons aujourd'hui en raison d'un incident dont nous ne sommes pas responsables, alors que le texte équilibré de la CMP protégeait les droits des créateurs tout en ménageant l'accès des internautes -notamment des plus jeunes, qui ont souvent peu de moyens- aux produits culturels auxquels ils ont droit.
M. Michel Charasse. - Le droit d'écouter, car ils ne savent plus lire !
M. Jacques Legendre, président de la commission. - Nos débats ayant été marqués par la recherche de la synthèse, je n'ai pas compris la leçon faite par M. Masson. Vous êtes membres de la commission des affaires culturelles : venez-y ! (Rires et applaudissements à droite)
La loi doit prendre en compte l'évolution technique. En pointe pour la création, la France doit protéger ses créateurs. Tel est le sens de nos travaux, dont la commission et le Sénat doivent être fiers !
L'ensemble du projet de loi est mis aux voix par scrutin public à la demande du groupe UMP.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 206 |
Nombre de suffrages exprimés | 203 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 102 |
Pour l'adoption | 189 |
Contre | 14 |
Le Sénat a adopté.
(Applaudissements à droite et au centre)
La séance est suspendue à midi et demi.
présidence de M. Bernard Frimat,vice-président
La séance reprend à 14 h 35.
Hôpital, patients, santé et territoires (Urgence-Suite)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires.
Discussion générale (Suite)
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité. - Je me félicite tout d'abord de l'implication du Sénat sur le volet médico-social du texte. Mes remerciements s'adressent en particulier à votre rapporteur, qui y a porté une attention constante, ainsi qu'au président About. J'en veux pour preuve les améliorations que M. Milon a apportées au texte -je pense notamment à l'introduction des objectifs de qualité dans les contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens ou à la création de la notion d'établissements médico-sociaux d'intérêt collectif. Les avancées du débat à l'Assemblée nationale et lors de la discussion dans votre commission ont montré que ce secteur était complètement pris en compte dans cette réforme.
Nous devrons veiller, monsieur Milon, monsieur Vasselle, à ce que l'organigramme des agences régionales de santé (ARS) traduise clairement l'importance et les spécificités de ce secteur et que le recrutement des directeurs et de leurs collaborateurs directs reflète l'ensemble des compétences des agences. Le mode de gouvernance des ARS, qui accorde une place importante aux collectivités locales et aux partenaires médico-sociaux, doit aussi se retrouver dans leur organisation.
Vous avez, monsieur le rapporteur, ainsi que Mme Desmarescaux, évoqué la continuité du service dans les établissements médico-sociaux. Je vous proposerai une autre méthode pour traiter ce problème complexe.
Vous avez souligné avec force, madame Hermange, l'objectif premier de la création des ARS : décloisonner les champs sanitaires et médico-sociaux et réduire les fractures territoriales. Dans le même esprit, madame Dini, vous avez relevé à juste titre que les ARS permettraient une meilleure articulation entre la ville, l'hôpital et le médico-social. C'est en effet un des enjeux majeurs de la réforme.
Vous vous interrogez, monsieur Cazeau, sur le rôle des présidents de conseils généraux dans le dispositif des ARS. Je réaffirme que cette réforme ne remet en rien en cause ni les prérogatives des collectivités locales, ni celles de l'État ; elle crée une instance de concertation, la commission de coordination médico-sociale, qui permettra, dans le respect des compétences de chacun, d'articuler les outils de programmation et de planification. Les ARS ne sont pas la superpuissance décrite par certains ; dans le domaine médico-social, les acteurs du secteur seront présents à tous les échelons de la gouvernance. Il s'agit de simplifier les politiques publiques et de les rendre plus lisibles, en aucun cas de modifier la répartition des compétences issues des lois de décentralisation.
J'entends bien votre question, monsieur Autain, monsieur Daudigny, sur le risque de chevauchement des compétences. Je le crois faible : le Gouvernement a fait le choix de la concertation et non celui de la mainmise de l'un ou de l'autre secteur. Le rôle de chef de file du conseil général en matière gérontologique n'est pas remis en cause ; c'est même le contraire dès lors que le schéma régional médico-social et la programmation financière seront concertés avec les collectivités territoriales au sein de la commission de coordination.
La suppression des comités régionaux de l'organisation sociale et médicosociale (CROSMS) ne conduit pas, monsieur Autain, à réduire les prérogatives des associations. Leur capacité d'initiative sera au contraire renforcée. Aujourd'hui, les promoteurs de projets ne savent pas, au moment où ils les déposent, s'ils s'inscrivent ou non dans l'approche collective des besoins ; et même lorsqu'ils obtiennent l'avis favorable du comité régional, les projets ne sont pas assurés d'être retenus et financés par l'autorité publique compétente. La confusion actuelle des niveaux stratégiques et opérationnels est source d'incertitudes et d'opacité. La procédure d'appel à projets interviendra désormais en aval de la détermination des besoins à laquelle auront participé l'ensemble des acteurs. Dans les domaines de la recherche, de l'enseignement ou de la culture, la procédure est courante et n'empêche pas l'innovation.
Il faut en effet, monsieur Vasselle, donner aux ARS les moyens en personnel leur permettant de fonctionner. Je vous confirme l'existence d'une délégation départementale dans chaque département.
Vous avez souligné, monsieur Blanc, monsieur Vall, l'importance des hôpitaux locaux tant dans leur rôle sanitaire que dans celui de pivots de la filière gérontologique locale ; on voit bien ici tout l'intérêt des ARS qui auront dorénavant une vision globale de l'activité de ces structures si importantes pour l'accès aux soins des personnes âgées et handicapées.
Le débat de discussion générale a été intéressant et constructif. Je ne doute pas qu'il préjuge de la qualité des échanges que nous aurons sur le titre IV. (Applaudissements au centre et à droite)
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports. - Mme Hermange l'a rappelé, l'être humain a besoin d'obstacles pour parvenir à son but. Certains se sont étonnés qu'une grande réforme comme celle qui nous occupe suscite interrogations et inquiétudes ; d'autres y voient une remise en cause de leurs habitudes ou de leur prés carrés ; les opposants y trouvent eux l'occasion de remobiliser leurs troupes... (Exclamations à gauche) Il faut savoir avec sérénité faire la part des polémiques et se poser les vraies questions, examiner les propositions qui sont autant de pistes à explorer.
M. Jean-Louis Carrère. - Si vous nous cherchez, vous nous trouverez !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Il faut aussi entendre ceux qui, moins bruyants, veulent se saisir des outils que le Gouvernement leur propose pour remédier aux défaillances et aux fractures de notre système de santé. (Mouvements divers à gauche)
Il est paradoxal de reprocher au Gouvernement de tenir compte des travaux de la commission. Non, monsieur Cazeau, le Gouvernement ne considère pas les sénateurs comme des élus godillots.
M. Jean-Louis Carrère. - Les sénateurs UMP !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Ils sont au contraire des acteurs majeurs de notre vie démocratique. J'attends donc beaucoup du débat qui vient, au cours duquel je dirai les éclairages et arguments qui ont fondé ma démarche. Je présenterai des amendements, ce qui n'est pas contraire avec la volonté du Gouvernement de respecter le Parlement. Chacun est dans son rôle.
Je relèverai trois types d'interpellations. Les premières sont polémiques. (Exclamations à gauche) Je m'y attendais et je n'ai pas été déçue. Procès d'intention, accusations infondées, allégations hasardeuses, rien n'a manqué. A l'exception de l'intervention modérée de M. Daudigny, je n'ai entendu aucune proposition. (Vives protestations à gauche) Pardon, j'en ai entendu une : celle de prolonger le débat. Mais en l'absence de contre-projet, je me demande bien à quoi cela pourrait servir... (Applaudissements à droite, exclamations à gauche) « Quand on est dans l'opposition, on s'oppose » : cet adage a été remarquablement illustré par les propos de M. Le Menn ou ceux de M. Autain, que j'ai connu plus inspiré. (Exclamations à gauche)
Je veux redire mon attachement à l'hôpital public, à ses personnels, aux administrations sanitaires de l'État et de l'assurance maladie, aux professionnels de santé libéraux...
M. Jean-Louis Carrère. - C'est une technique pour remobiliser la majorité !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - ...aux associations, à tous ceux qui m'ont tant aidée à préparer ce texte. L'hôpital public ne sera jamais une entreprise...
M. René-Pierre Signé. - Si !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - ...mais un service public pour tous les Français. Je veux le conforter avec des moyens nouveaux. (On le nie vivement à gauche)
Son budget augmente de 3,1 % cette année, alors que notre pays est en récession. Un plan d'investissement de 10 milliards d'euros est prévu d'ici 2012, qui profitera aussi à l'emploi local.
Si ma politique était une politique de rentabilité, monsieur Vall, croyez-vous que nous aurions consenti un tel effort ? La seule rentabilité que j'attends de l'hôpital public est d'améliorer la santé de tous nos concitoyens. (Exclamations prolongées à gauche) Si j'avais une vision marchande, monsieur Mirassou, croyez-vous que l'emploi y serait non seulement maintenu mais augmenté ?
M. Guy Fischer. - C'est faux : 20 000 emplois vont être supprimés !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Depuis neuf ans, les effectifs y ont progressé de 11,4 %, et ils vont encore s'accroître. Bien sûr, l'hôpital est un corps vivant. Des réductions d'effectifs peuvent exister mais vous ne parlez jamais des hôpitaux qui embauchent.
M. Jean-Louis Carrère. - Toujours la même logique : tout pour les riches !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Et l'emploi n'est pas une variable d'ajustement (MM. François Autain et Guy Fischer le contestent) On peut concilier équilibre et nouveaux emplois. Il y a ainsi eu l'année dernière 56 créations de postes à Angers et 67 à Poitiers.
Si je voulais privatiser l'hôpital public, Monsieur Desessard, croyez-vous que j'aiderais les établissements en difficulté à se redresser, comme je viens de le faire pour les Hospices civils de Lyon à la demande de Gérard Collomb, avec 20 millions l'année dernière et 25 cette année ? (Vives exclamations à gauche) Si je voulais aligner l'hôpital public sur le privé, croyez-vous, monsieur Cazeau, que je maintiendrai un écart de 30 % des tarifications en faveur du public, que j'attribuerai 90 % des missions d'enseignement, de recherche, de référence et d'innovations aux CHU, que je reporterai la convergence, que je modifierai la T2A pour favoriser les hôpitaux qui accueillent les plus précaires et les cas les plus graves ? Cette année, près de 50 millions supplémentaires seront versés à l'AP-HP.
M. René-Pierre Signé. - C'est l'arbre qui cache la forêt !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Si vous me trouvez un système ultralibéral qui paie plus ceux qui accueillent les plus pauvres, faites-moi signe ! (Applaudissements à droite) Si j'avais une démarche comptable, madame David, croyez-vous que je défendrais, bec et ongles, nos hôpitaux de proximité ?
M. Jean-Louis Carrère. - Ne vous en faites pas ! Nous ferons sans vous !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Oui, on peut concilier maillage sanitaire et aménagement du territoire, à condition de faire de la gradation des soins un principe cardinal : les CHT seront donc un outil précieux. La proximité ne saurait être l'excuse pour des soins de mauvaise qualité. Je n'ai pas fermé un seul hôpital et je n'en fermerai pas. J'ai transformé des services et, à chaque fois, nous avons investi et embauché. (On le conteste à gauche)
La vérité est simple : si vous me faites ce procès absurde et insultant, c'est que vous n'avez pas de solution alternative à proposer. (On se récrie bruyamment sur les mêmes bancs) Oui, nous serons peut-être amenés un jour à dépenser plus de notre richesse nationale pour la santé. Mais il ne faut pas oublier que nous sommes déjà sur le podium des trois pays qui dépensent le plus dans ce domaine et ces dépenses hospitalières sont payées à 95 % par l'assurance maladie. (Nouvelles exclamations à gauche) En définitive, ce sont les Français qui financent cette solidarité grâce aux cotisations, aux impôts et aux taxes qui grèvent leur pouvoir d'achat. Tout arbitrage en faveur des dépenses de santé doit se traduire par de vrais progrès et non par du laxisme. (On se récrie sur les mêmes bancs) Enfin, selon les spécialistes en santé publique, les formidables progrès en durée et en qualité de vie ne sont dus que pour 10 % à ces dépenses de santé. Avant de puiser dans le porte-monnaie des Français, assurons-nous des marges de progression et de modernisation de notre hôpital.
M. René-Pierre Signé. - Allez aux urgences !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Heureusement, après les interpellations polémiques, il y eut aussi les félicitations et les encouragements. (Marques d'ironie à gauche) Merci à tous les orateurs de la majorité : à Gérard Dériot qui a qualifié ce texte d'ambitieux et de volontaire, à Marie-Thérèse Hermange, femme de coeur dont je reprendrai la proposition sur le mi-temps thérapeutique, à Dominique Leclerc pour son appui sur la médicalisation de la biologie, à André Lardeux pour sa haute vision sur les agences régionales de santé, à Jean-Claude Etienne pour son adhésion aux modifications spécifiques dans les CHU. D'autres ont fait aussi d'importantes contributions : toutes ne sont pas de nature législative mais elles trouveront place dans la mise en oeuvre pratique de ce texte, comme le concept du case-manager défendu par Alain Vasselle ou les riches propositions de Muguette Dini sur la démographie médicale. D'autres, encore, sont de nature financière et seront discutées lors du projet de loi de financement de la sécurité sociale. D'autres, enfin, relèvent de la vie conventionnelle comme la nomenclature des actes médicaux ou les honoraires.
Des polémiques, des encouragements, mais aussi beaucoup de propositions. Nous avons bien avancé sur la gouvernance : j'ai mené un travail approfondi avec les présidents de Conférence et nous en sommes à régler les nuances. Un très grand merci à Alain Milon et à Nicolas About pour le travail accompli.
M. René-Pierre Signé. - Vous avez de la chance de les avoir !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Sur tous les sujets, j'aurai l'occasion en cours de discussion de revenir sur les déclarations des uns et des autres et je prie ceux que je n'ai pas cités de m'excuser.
Nous allons maintenant entrer dans le vif du sujet. Pour citer une nouvelle fois Mme Hermange, je m'efforcerai de déployer une stratégie de la confiance ! (Applaudissements à droite et au centre)
La discussion générale est close.
Exception d'irrecevabilité
M. le président. - Motion n°901, présentée par M. Fischer et les membres du groupe CRC-SPG.
En application de l'article 44, alinéa 2, du Règlement, le Sénat déclare irrecevable le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires (texte de la commission n° 381, 2008-2009).
M. Guy Fischer. - (Applaudissements à gauche) Le projet de loi que nous examinons aujourd'hui, dans des conditions de travail que nous avons déjà dénoncées, notamment après le dépôt des amendements dus au rapport Marescaux, aurait pu être une chance pour les établissements publics de santé et pour nos concitoyens. Malheureusement, il n'en est rien. Sur bien des aspects, il est largement insuffisant et il sera, sur d'autres, inefficace voire contre-productif. Mais surtout, il est contraire, sur plusieurs points, aux principes fondamentaux du bloc de constitutionnalité.
Nous aurons l'occasion de revenir, au cours de nos débats, sur notre opposition au démantèlement du service public hospitalier au profit des établissements de santé commerciaux, à la fermeture de 200 à 300 hôpitaux de proximité, à la suppression de 20 000 emplois qui se traduira par près de 4 milliards d'économies par an pour l'assurance maladie, comme vous l'avez rappelé, madame la ministre, lors d'une conférence de presse en juillet dernier.
En outre, la nomination possible de non-fonctionnaires aux postes de directeurs des établissements publics de santé contrevient au principe général du droit d'égalité d'accès des citoyens aux emplois publics, découlant lui-même du principe constitutionnel d'égalité.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. - C'est tout le contraire !
M. Guy Fischer. - Le principe d'égal accès aux emplois publics dans la fonction publique hospitalière est identique à celui des autres fonctions publiques. Pour garantir le principe républicain d'égalité le concours a été instauré comme mode de recrutement, car dans le secret de celui-ci et dans la force de la collégialité du jury, il n'y a de places ni pour l'arbitraire ni pour les discriminations. Or, l'article 7 du projet de loi ouvre les postes de directeurs d'établissements publics de santé à des non-fonctionnaires...
M. Nicolas About, président de la commission. - Il s'agit d'une sorte de validation des acquis de l'expérience !
M. Guy Fischer. - ...et aucune disposition n'encadre le recours à des contractuels pour diriger les hôpitaux. Il s'agit simplement de casser le statut de fonctionnaires hospitaliers. (Applaudissements à gauche) En laissant les directeurs des agences régionales de santé libres de recruter des directeurs d'hôpitaux, nous courons le risque de voir des élèves sortant de la haute école de santé publique ne pas obtenir de postes. Il conviendrait donc de prévoir un nombre de postes réservés aux non-fonctionnaires, ce qui constituerait une mesure discriminatoire à l'égard des élèves sortant de l'ENSP.
M. François Autain. - C'est tout à fait exact !
M. Guy Fischer. - Nous pourrions assister à un mouvement des élèves directeurs, contestant massivement la nomination des directeurs non fonctionnaires, au motif que ces derniers les empêcheraient de bénéficier de leur concours, les reléguant à des postes de directeurs-adjoints.
Ce motif n'est malheureusement pas le seul. Votre projet de loi, madame la ministre, se caractérise en effet par votre refus de garantir l'application du onzième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, qui dispose que la Nation « garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé ».
M. René-Pierre Signé. - Cela fait longtemps qu'il a été oublié !
M. Guy Fischer. - L'article 13 de ce projet de loi autorise en effet le directeur de l'agence régionale de santé à imposer aux hôpitaux des fusions sur la base d'un projet régional de santé dont le seul objectif est de réduire les dépenses publiques. Tel est d'ailleurs la logique de ce texte qui subordonne les besoins à l'offre de soins. Certes, la rédaction actuelle intègre formellement les besoins en santé de la population.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Évidemment !
M. Guy Fischer. - Mais ces besoins passent par pertes et profits, dès lors qu'il s'agit d'appliquer à l'hôpital la révision générale des politiques publiques (RGPP).
M. Alain Fauconnier. - C'est exact !
M. Guy Fischer. - Ainsi, la commission a prévu que le directeur de l'ARS pourrait exiger du directeur de l'hôpital qu'il procède à la suppression d'emplois publics dans le but de réduire ses déficits. Cette suppression ne correspond à aucune logique sanitaire ni solidaire. Il s'agit d'une mesure purement comptable. Pourtant, les hôpitaux ont un manque criant de personnel. Des praticiens sont ainsi obligés de programmer des interventions plusieurs mois à l'avance, obligeant les malades à s'inscrire sur des listes d'attentes tant décriées Outre-manche. Mais, si ces mesures contreviennent aux principes constitutionnels, celles que vous refusez de prendre en font tout autant ! Suite à une réunion organisée à Matignon en votre présence, madame la ministre, la commission a dû revenir sur l'une des rares dispositions contraignantes qu'elle avait prévu à l'égard des médecins libéraux. Alors que la première difficulté d'accès aux soins est due aux « zones blanches », vous n'avez pas voulu demander aux nouveaux médecins de s'y installer. Ce phénomène risque de s'aggraver avec la fermeture des hôpitaux décidée par le directeur de l'ARS et celle de nombreux centres de santé gérés par les mutuelles.
Vous avez renoncé à la seule garantie contre les dépassements d'honoraires et qui ne consistait qu'en une proportion minimale d'actes facturés sans dépassement. La seule idée d'entraver les médecins libéraux dans la fixation des tarifs, fussent-ils déraisonnables, est impossible pour ce Gouvernement. Votre recul est-il sans lien avec les prochaines élections ? Tout le monde le sait, pourtant, de plus en plus de patients ne peuvent plus payer des honoraires fixés sans tact ni modération, surtout là où on manque le plus de médecins. Vous avez fait un choix contraire à l'histoire de notre pays comme au caractère social de la République de préférer un intérêt catégoriel à l'intérêt général. Notre Constitution impose pourtant de garantir aux citoyens l'accès à la santé. Or il suffit de les entendre pour savoir que cet accès est chaque jour remis en cause.
M. René-Pierre Signé. - Contre les règles du service public !
M. Guy Fischer. - La permanence de soins est le seul service public entièrement confié à des personnes privées et vous avez renoncé à le leur faire appliquer. Votre renoncement joue contre l'intérêt général alors que vous aviez trouvé pour imposer le service minimum dans les transports ou à l'école, la détermination qui vous fait aujourd'hui défaut. (Mme Christiane Hummel s'exclame)
On pouvait légitimement attendre des propositions concrètes pour limiter la libre installation ; vous vous contentez de créer 200 bourses et des contrats de solidarité. Au lieu de les sanctionner, vous aménagez les refus grâce au schéma régional. Bien sûr, vous n'avez pas accepté, comme nous l'avions proposé, que les manquements à la permanence des soins soient sanctionnés. Ce Gouvernement fait rarement preuve d'une telle compréhension à l'égard des salariés, des ouvriers, des étudiants ! (Applaudissements à gauche)
Les contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens contraindront les établissements à la rigueur. Ils font en effet mention d'objectifs quantifiés comme si limiter le nombre d'actes les plus coûteux n'était pas contraire aux intérêts des patients. S'établiront ainsi entre les établissements des inégalités en fonction de leur situation comptable.
Nous sommes très inquiets des conséquences de ce projet qui transpose l'accord général sur le commerce des services de 1995, accord dont se sont inspirés le traité constitutionnel et le traité de Lisbonne en prévoyant que les services marchands doivent être soumis à la concurrence. Comme l'Union européenne se refuse à reconnaître que la santé est exclue de ces services, il y a de quoi s'inquiéter !
Le traité de Lisbonne vise à la privatisation progressive de tous les services publics, vus comme des entraves à la concurrence. Au contraire, nous considérons ceux-ci comme des lieux de satisfaction des besoins légitimes de la population. En soumettant ces derniers à une offre encadrée de soins, vous imposez des règles qui ont déjà montré leur inefficacité dans le secteur médico-social.
L'hôpital est malade de la multiplication des réformes, malade de sous-financement, malade de manque de personnel. Certes, il souffre de problèmes d'organisation, mais la seule réponse autoritaire d'un directeur patron ne suffira pas. Nous devons tous chercher à assurer une organisation plus performante, ce qui ne se mesure pas uniquement par des critères comptables ou des indicateurs de qualité...
M.le président. - Il faut conclure.
M. Guy Fischer. - ...mais par l'accessibilité à tous, sans distinction de maladie, de territoire ou de revenu.
Au moment de voter cette motion, je vous invite à vous rappeler le sens que les constituants ont voulu donner à notre République et le principe de solidarité, que vous les compariez au texte. Rappelez-vous que derrière les patients, les usagers, il y des hommes et des femmes qui peinent chaque jour un peu plus pour boucler leurs fins de mois et qui retardent leurs soins.
M. René-Pierre Signé. - Déshumanisation !
M. Guy Fischer. - C'est pour eux que les constituants avaient rédigé ce onzième alinéa, pour eux que je vous demande de voter cette motion et de refuser l'hôpital entreprise ! (Vifs applaudissements à gauche)
M. Alain Milon, rapporteur de la commission des affaires sociales. - Je m'étonne de la motivation de cette motion...
M. François Autain. - Je m'étonne de votre étonnement !
M. Alain Milon, rapporteur. - ...puisque le projet tend à garantir le droit à la santé pour tous, en réduisant les inégalités territoriales...
M. François Autain. - Il les aggrave !
M. Alain Milon, rapporteur. - ...en assurant que tous bénéficient des missions de service public...
M. René-Pierre Signé. - En ne considérant que la rentabilité ?
M. Alain Milon, rapporteur. - ...et en assurant la veille sanitaire trop souvent négligée. Comme M. Fischer lui-même, je pense donc que le Sénat suivra l'avis négatif de la commission. (Applaudissements à droite)
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - L'un des grands bonheurs de la vie parlementaire et ministérielle est d'entendre un vibrant hommage de la Constitution de la Ve République dans la bouche de ceux qui l'ont toujours combattue. (Applaudissements à droite ; protestations sur les bancs du CRC-SPG)
M. Guy Fischer. - Je parlais du Préambule de 1946 !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - En quoi le recrutement des directeurs d'hôpitaux pourrait-il être contraire au principe d'égalité ? Beaucoup de ces médecins que vous nous demandez d'entendre, le demandent. Pourquoi priver l'hôpital public de compétences ? Ce recrutement diversifié, qui donnera lieu à une formation complémentaire au sein de l'institut des hautes études de santé publique, n'est nullement contraire au principe d'égalité.
M. Christian Poncelet. - Très bien !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Quand une maternité connaît quatre fois plus d'accidents graves ou que tel hôpital connaît un taux de fuite des malades supérieur à 90 %, il faut rétablir la confiance entre la patientèle et l'établissement en développant la qualité : c'est l'objet des coopérations.
Les mesures coercitives que vous souhaitez à l'encontre des médecins libéraux, loin de régler quoi que ce soit, aggraveraient les difficultés alors que les conventions pluriannuelles d'objectifs et de moyens, qui existent déjà, n'ont jamais donné lieu aux reproches que vous formulez. Je demande donc au Sénat de ne pas voter votre motion de procédure.
M. Michel Billout. - La santé n'est pas une marchandise et les partenariats avec le privé se font au détriment du public ainsi que le montrent les clauses restrictives pour le service public du contrat d'objectifs et de moyens passé en 2007 à Melun, préfecture de Seine-et-Marne, entre le centre hospitalier Marc Jacquet et la clinique des Fontaines : le patient n'aura plus le choix entre le public et le privé pour se faire soigner.
Ce nouvel établissement verra le jour en 2014 avec 50 % de crédits publics. L'hôpital public conservera les contraintes, sans aucun avantage en contrepartie. Il assurera les urgences de nuit, que le privé se refuse à prendre en charge, tandis qu'il s'arrogera des services comme la cardiologie ou la chirurgie. Ainsi, pour un patient accueilli en chirurgie d'urgence la nuit et qui subira une intervention le lendemain matin, tout le bénéfice ira au secteur privé.
En économie, on appelle cela une distorsion de concurrence. Aux uns, les charges, aux autres les bénéfices. Le bloc opératoire appartiendra entièrement au privé et sera loué au secteur public pour les urgences. Est-ce donc ainsi que vous entendez assurer les missions de service public ? Pour Melun et sa région, ce n'est pas autre chose que la santé que vous mettez radicalement en cause. Déjà, depuis février, le bloc opératoire de nuit du centre hospitalier a été fermé. Passé 17 heures, mieux vaut ne pas avoir d'accident grave. Si vous êtes transportable, on vous transfèrera à Montereau, qui n'a cependant reçu aucun moyen supplémentaire.
La même politique prévaut dans tous les établissements de la Seine-et-Marne. C'est pourquoi je voterai cette motion. (Applaudissements à gauche)
M. Bernard Cazeau. - La démonstration de M. Fischer a été claire et complète. Nous voterons sa motion. (Applaudissements à gauche)
A la demande du groupe CRC, la motion n°901 est mise aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 171 |
Pour l'adoption | 138 |
Contre | 203 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Question préalable
M. le président. - Motion n°281, présentée par M. Teulade et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires (texte de la commission n°381, 2008-2009).
M. René Teulade. - C'est avec conviction et esprit de responsabilité qu'au nom du groupe socialiste, je vous demande de mesurer la gravité de la situation pour notre système de santé. (Exclamations à droite) Je vous demande solennellement d'adopter la question préalable et d'ajourner l'examen de ce texte.
Je connais, madame la ministre, la difficulté de votre tâche et les embûches nombreuses que nous devons surmonter pour faire changer les comportements. Nous avons connu une situation similaire, lorsque nous avons fait voter la loi relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de santé, alors que le déficit global de la sécurité sociale était de 15 milliards. Il s'élève aujourd'hui à plus de 100 milliards. La gravité de la situation nous appelle à une réflexion sereine.
Nos travaux sont suivis de près par la communauté médicale et par l'ensemble des Français. Nous en avons des échos quotidiens. J'en profite pour remercier l'ensemble de mes collègues de l'opposition qui ont su les enrichir car c'est un discours qu'ils n'ont pas souvent l'occasion d'entendre. (Applaudissements à gauche)
Ce texte, lors de sa présentation en conseil des ministres en octobre 2008, comportait 33 articles. Il en compte 103 à l'issue des débats à l'Assemblée nationale. Mon expérience me permet de vous dire, sans polémique, que votre réforme échappe à toute cohérence globale. L'empiètement sans précédent des amendements présentés par des élus de la majorité a déstabilisé votre projet, qui aura plus souffert des contradictions de votre majorité que des assauts de l'opposition. (Applaudissements sur les bancs socialistes) Vous êtes victimes de vos amis et des conservatismes médicaux.
Ce texte porte aussi les stigmates d'une méthode dont est coutumier le Président de la République, pressé d'intervenir sur tous les chantiers du Gouvernement. Après vous avoir demandé un texte ferme sur les prérogatives des directeurs d'hôpitaux, au risque de susciter le conflit, il vous invite, sous la pression des mécontentements, à reculer, quitte à créer plus de confusion encore sur le futur système de gouvernance des hôpitaux.
M. Jean-Louis Carrère. - Un pas en avant, deux pas en arrière !
M. René Teulade. - Et que dire de l'urgence décrétée par le Gouvernement en octobre ? Ce n'est pourtant que huit mois plus tard que le Sénat est invité à procéder à l'examen de ce texte. Pourquoi donc l'urgence sur un tel enjeu ? Nous aurions pu la comprendre sur un texte relatif à la sécurité sanitaire, face au risque de pandémie, mais sur la réforme hospitalière, couplée à la création des agences régionales de santé ? (Applaudissements à gauche) D'autant que les changements incessants sur le fond interdisent au Parlement toute discussion sereine. Pour satisfaire aux préconisations du rapport Marescaux, vous déposez des amendements en séance publique, avec cette conséquence que, l'urgence étant déclarée, seule la CMP pourra se prononcer sur le fond : l'Assemblée nationale sera privée de débat.
M. Guy Fischer. - M. Accoyer n'est pas content.
M. René Teulade. - L'examen du texte au Sénat se fait dans la précipitation parce que vous voulez gagner du temps sur le débat parlementaire. Est en cause, même si nous sommes favorables au renforcement des droits du Parlement par la revalorisation du travail en commission, l'application de la réforme constitutionnelle.
M. Henri de Raincourt. - Que vous n'avez pas votée.
M. René Teulade. - Autre motif de rejet : l'absence de réelle concertation. M. Milon, vous-même, madame la ministre, vos collaborateurs, ceux du Premier ministre, ceux du Président de la République n'ont pas lésiné sur leur temps pour réunir organisations sociales et professionnelles. Mais paradoxalement, la multiplication des rencontres n'est pas la garantie d'un dialogue sérieux. Tous les acteurs ont dit leur déception.
L'accumulation des changements d'orientation, les annonces reportées, la pluie des amendements ont transformé votre texte en un fourre-tout peu compréhensible, peu lisible et peu opérationnel.
Notre déception est d'autant plus forte que nous avons été nombreux à croire, lorsque vous avez organisé les états généraux sur l'offre de soins, que la réforme s'appuierait sur un authentique dialogue social et une approche structurelle des défis de santé. Nous espérions une réforme courageuse, « la plus importante depuis 1945 » promettiez-vous. Or, que reste-t-il aujourd'hui du souffle des états généraux ? Que reste-t-il des recommandations du rapport Flageolet, du retour par vous annoncé à l'opposabilité des tarifs des soins ambulatoires à l'hôpital ? Tout cela pour en arriver à ces reculs inacceptables ! (Applaudissements à gauche)
Des expertises non ministérielles démontrent que l'égal accès à des soins de qualité est impossible en de nombreux points du territoire. Il est insupportable que désormais presque tous les actes chirurgicaux pratiqués dans les cliniques privées donnent lieu à dépassement d'honoraires. (Même mouvement) Et cela ne concerne pas les seuls Franciliens, Lyonnais et habitants de la Côte d'Azur ; le phénomène se répand partout ! (On renchérit à gauche)
M. Jean-Louis Carrère. - Médecine de classe !
M. René Teulade. - Pourquoi avez-vous promis des actes forts, sur un sujet sensible, pour ensuite revenir en arrière ?
M. Roland Courteau. - Eh oui...
M. René Teulade. - Sur le refus des soins, après avoir promis le testing, vous reculez. (« C'est vrai ! » sur les bancs socialistes) Vous proposez une définition intéressante de la médecine de premier recours mais renoncez à toute projection concrète. Peut-être avez-vous souhaité une grande réforme ; mais vous finissez par défendre les corporatismes établis.
M. Nicolas About, président de la commission. - Ce n'est pas vrai.
M. René Teulade. - Vous négligez aussi les attentes et le potentiel des jeunes générations de médecins qui aspirent à une pratique conforme à une haute éthique et à l'intérêt général. Enfin, entre les besoins des Français et l'intérêt particulier de certains médecins, il faut savoir choisir.
Votre projet, c'est l'avènement de l'hôpital entreprise, organisé autour d'un patron, gestionnaire financier. Les professionnels de santé sont écartés des décisions, y compris du projet médical de l'établissement ou de la politique d'amélioration des soins. (M. le président de la commission le conteste) Vous voulez imposer le modèle de la gouvernance d'entreprise à l'hôpital, qui est un service public et n'a pas pour finalité de réaliser des bénéfices... (« Très bien ! » sur les bancs CRC-SPG)
M. Nicolas About, président de la commission. - Il n'a pas non plus vocation à devenir une machine à gâchis !
M. René Teulade. - ...même si l'équilibre budgétaire doit être une préoccupation.
Votre projet de loi fait une place importante aux cliniques privées. Vous acceptez que les missions de service public ne soient plus l'exclusivité du secteur non lucratif. Le privé non lucratif a bien failli voir son statut remis en question, avant que des amendements à l'Assemblée nationale ne créent les établissements de santé privés d'intérêt collectif.
Vous transformez le conseil d'administration des établissements en conseil de surveillance : la mission change donc, non plus définition de la politique de l'établissement mais contrôle. Vous vous inspirez finalement de l'exercice du pouvoir par le Président de la République : un chef-directeur puissant qui décide de tout, un directoire qui le conseille et un parlement, ici conseil de surveillance, qui enregistre ses volontés. (Rires et applaudissements à gauche) La réforme fait la part belle à l'administratif au détriment du médical. Vous ne renouez pas avec la tradition humaniste de l'hôpital mais privilégiez le pouvoir administratif et technocratique. Les gestionnaires seront contraints de sabrer les prestations médicales peu rentables du fait de la tarification actuelle ; un hôpital déficitaire devra couper un pan de son activité et supprimer des emplois. Du reste, la T2A n'est autre qu'une forme de paiement à l'acte. Vous prétendez le réduire en médecine de ville et le systématisez à l'hôpital ! Vos prédécesseurs sont allés trop loin dans la réforme du financement à l'activité. Tellement loin que vous êtes à présent obligée de freiner des quatre fers en annonçant le report à 2018 de la convergence tarifaire entre les hôpitaux et les cliniques privées.
M. le président. - Il faut conclure. (On approuve à droite)
M. René Teulade. - Autant dire que cette convergence ne verra jamais le jour. Et c'est tant mieux parce qu'elle est dépourvue de sens : la concurrence ne vaut que s'il y a égalité de principe entre compétiteurs. Est-ce souhaitable en matière d'hospitalisation ?
Nous en sommes à la onzième version de la T2A : 2 200 tarifs différents, qui montrent bien le malaise de la haute administration quand il s'agit de définir le juste prix des actes. Nous ne sommes pas opposés à une réforme du financement. Mais pas de cette manière-là ! Pour réussir une réforme des hôpitaux, il faudrait remettre à flot les établissements. Notre économie serait-elle en danger parce que le Gouvernement dégagerait un milliard d'euros pour rétablir l'équilibre comptable des hôpitaux ?
M. le président. - Concluez ! (On renchérit bruyamment sur les bancs UMP)
M. René Teulade. - Élu d'un département rural, je connais les inégalités d'accès aux soins. Et je déplore que nos collègues de la majorité aient, en commission, supprimé l'obligation d'un contrat santé solidarité, par lequel les médecins exerçant en zones sur-dotées prêteraient main-forte à leurs collègues des zones sous-dotées. Le Parlement doit se pencher au plus tôt sur les difficultés d'accès aux soins. Le groupe socialiste vous demande d'adopter la question préalable, afin de procéder à une large réécriture concertée, au nom du rassemblement nécessaire de toutes les sensibilités de notre assemblée. (Vifs applaudissements à gauche)
M. Alain Milon, rapporteur. - Je n'ai pas eu le sentiment que notre collègue parlait du texte issu des réflexions de la commission. (Exclamations à gauche)
M. Alain Gournac. - Il a lu une version ancienne !
M. Alain Milon, rapporteur. - Il a pourtant participé à nos 33 heures de réunion : mais a-t-il tout compris ? (Vives protestations à gauche ; on s'esclaffe à droite)
M. Daniel Raoul. - Retirez ces mots !
M. François Autain. - Quelle arrogance !
M. Alain Milon, rapporteur. - Nous ne prétendons pas résoudre tous les problèmes. Mais vous ne pouvez dire à la fois que le texte a été enrichi et qu'il ne résout rien. C'est en outre faire peu de cas de notre travail.
M. Jean-Louis Carrère. - Monsieur le rapporteur, vous n'avez rien compris.
M. Alain Milon, rapporteur. - Le projet de loi contient des avancées importantes, sur l'organisation du parcours de soins, sur la cohérence de la politique de santé, la rationalisation de l'action au niveau régional. Comme l'a dit Mme la ministre, c'est une loi d'organisation et l'effort est indispensable pour éviter de mettre en péril notre système de santé.
M. François Autain. - Il l'est déjà.
M. Alain Milon, rapporteur. - Je confirme l'avis défavorable de la commission. (Applaudissements sur les bancs UMP)
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Le texte n'est pas suffisamment concerté, affirme M. Teulade. Or depuis un an et demi...
M. François Autain. - Quelle concertation y a-t-il eu sur les CHU ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - La médecine de premier recours a fait l'objet d'états généraux durant lesquels tous les partenaires ont été consultés. Il n'est dans ce projet de loi pas une seule mesure qui ne soit le résultat d'expérimentations, certaines menées par l'organisation qui émettait les plus vives critiques... La mission Larcher a auditionné des centaines de professionnels et de spécialistes, son rapport a suscité des commentaires élogieux de toutes parts et la loi a repris quasi intégralement ses conclusions. La commission Marescaux...
M. François Autain. - Nous ne connaissons pas le contenu de son rapport !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Je vous ai fait part des idées qu'elle a émises.
M. Jean-Pierre Godefroy. - Il fallait nous transmettre le rapport !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Je n'oublie pas également d'innombrables et précieux rapports parlementaires, tel celui de Jean-Marc Juilhard, ici présent, ainsi que des colloques, des études, des travaux d'étudiants.
M. Jean-Louis Carrère. - Il y en a eu trop !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - On en a tiré la substantifique moelle... et cette étape parlementaire est aussi l'occasion d'une nouvelle concertation. Je ne considère pas qu'il faille accepter mon texte tel quel, nous pouvons l'enrichir. Mais il y a urgence à agir pour réduire les fractures et résoudre les difficultés que connaît notre système de santé.
M. Alain Gournac. - Très bien !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Pour ces raisons, je suis défavorable à la motion présentée par René Teulade. (Applaudissements sur les bancs UMP)
M. René-Pierre Signé. - Comme René Teulade et Guy Fischer, j'estime que les hôpitaux souffrent d'une déshumanisation.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - C'est pour cela que nous faisons cette loi.
M. René-Pierre Signé. - Cela est lié à la tarification à l'activité, aux impératifs de rentabilité. L'hôpital devient une entreprise. Pour cela, on éloigne de la direction de l'hôpital les élus et les médecins, qui ont des liens plus affectifs avec les malades, et ont même pour eux une certaine tendresse.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - C'est du joli ! (Sourires)
M. René-Pierre Signé. - J'ai été longtemps médecin dans un hôpital, et je sais que les directeurs n'ont pas les mêmes liens avec les patients.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Ce ne sont pas des êtres humains ?
M. René-Pierre Signé. - Ils sont plus sévères, car ils doivent équilibrer les comptes.
Hier, le Président de la République a osé s'interroger : serait-on mieux soigné dans un hôpital non rentable ? La formule semble habile, mais elle est affligeante, injuste et fausse. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Certains hôpitaux équilibrent leurs comptes en n'acceptant pas les urgences, en réduisant le personnel et en refusant les malades qui occupent trop longtemps leur lit, c'est-à-dire les patients en soins palliatifs, en cancérologie, etc.
Il est prévu de remplacer le conseil d'administration par un conseil de surveillance sans grands pouvoirs. Le directeur arrêtera les comptes financiers et règlera l'organisation interne de l'établissement, la qualité et la sécurité des soins, les conditions d'accueil et de prise en charge des urgences... Et pourquoi pas des malades ? Il est saugrenu d'assurer que la direction sera collégiale car le directeur sera assisté du doyen de la faculté de médecine et du représentant du secteur de la recherche : cela sera difficile dans les hôpitaux de proximité.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Cela ne concerne que les CHU !
M. René-Pierre Signé. - Madame la ministre, vous avez été une élue locale...
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Et j'ai fait partie du conseil d'administration d'un hôpital pendant vingt ans.
M. René-Pierre Signé. - Vos origines nivernaises justifient de ma part une certaine indulgence... (Sourires) Néanmoins, vous savez que les élus et les médecins sont les réceptacles des griefs, des désillusions, des déceptions, des plaintes des malades avec qui ils sont familiers. Or on les prive de leur pouvoir dans la gestion de l'hôpital au profit du directeur.
Votre projet de loi pèche ici par manque de dialogue, pourtant nécessaire entre les malades et les soignants. Les élus de gauche ne sont pas les seuls à s'y opposer. Il en va ainsi du Dr Michel Chassang, président de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF), qui souhaite, comme nous, son retrait. (Applaudissements à gauche)
M. François Autain. - Nous soutenons la motion de René Teulade, qui exprime clairement nos critiques.
Vous parlez d'une concertation tous azimuts, mais nous n'en trouvons pas trace dans ce texte, notamment pour ce qui concerne l'accès de tous à des soins de qualité. Pour l'hôpital, la concertation n'a pas été aussi importante que pour l'organisation des soins, alors que les médecins hospitaliers demandaient la tenue d'états généraux.
A vous entendre, l'hôpital public n'aurait pas de problèmes.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - J'ai dit le contraire !
M. François Autain. - Ainsi, l'accroissement des recettes n'est que d'un peu plus de 3 % par an alors que l'augmentation des dépenses incompressibles est de 4 %. Cela fait au moins 0,5 % de manque à gagner chaque année. Il y a donc un malentendu, si ce n'est plus...
Vous estimez que 33 heures de réunion en commission garantissent une concertation suffisante ? Elles n'ont pas permis de dégager des solutions acceptables. Pour ce qui est de l'organisation des soins, on ne retrouve pas dans ce texte les préconisations des différents rapports. Les seules mesures contraignantes, pour le contrat de solidarité, ont été retirées par la commission et vous ne le regrettez pas au point d'y revenir par un amendement. Certes, le rapporteur a agi en toute indépendance... mais je décèle sur ce sujet une pointe de connivence. Rien ne permet donc de remédier aux dépassements d'honoraires et aux déserts médicaux.
Un réexamen de ce texte en commission s'impose. Une deuxième lecture aura d'ailleurs peut-être lieu car le président de l'Assemblée nationale n'est pas satisfait des conditions de dépôt des amendements sur les CHU, inspirés par le rapport Marescaux, du fait d'une bizarrerie du timing gouvernemental. De même, le rapport sur la santé mentale a été rendu en décembre alors qu'un projet de loi sur ce sujet a été adopté en octobre par le conseil des ministres.
M. Guy Fischer. - C'est un problème institutionnel !
M. François Autain. - Les députés n'auront jamais à débattre des amendements déposés après la remise du rapport Marescaux. Nous voyons dans toute cette démarche des contraintes, non une concertation. (Applaudissements à gauche)
A la demande du groupe socialiste, la motion n°281 est mise aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 328 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 165 |
Pour l'adoption | 138 |
Contre | 190 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Renvoi en commission
M. le président. - Motion n°282, présentée par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
En application de l'article 44, alinéa 5, du Règlement, le Sénat décide qu'il y a lieu de renvoyer à la commission des affaires sociales le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires (texte de la commission n°381, 2008-2009).
M. Jean-Pierre Godefroy. - Si nous défendons cette motion, ce n'est pas pour faire durer le débat ou remettre en cause l'énorme travail fourni par le président, le rapporteur et les membres de la commission.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Et la ministre !
M. Jean-Pierre Godefroy. - Ce fut long et difficile, mais chacun a rempli son rôle. C'est pourquoi nous regrettons les propos du rapporteur à l'égard de M. Teulade. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
C'était une bien mauvaise idée de vouloir expérimenter la nouvelle procédure législative avec un texte aussi important et protéiforme (approbation sur les bancs socialistes), d'autant que rien ne nous y obligeait : le projet de loi avait été déposé bien avant l'entrée en vigueur de la loi organique, et le règlement de la Haute assemblée n'a pas encore été modifié ! (Applaudissements à gauche) Résultat, nous avons navigué à vue entre les anciennes, les nouvelles et les futures règles. Est-ce seulement régulier ? Le président Larcher, inquiet, s'est d'ailleurs dit pressé de voir adopter sa proposition de résolution modifiant le Règlement pour assurer, dit-il, la sécurité juridique des textes en cours d'examen ! (« Ah ! » sur les bancs socialistes) Qu'en pensera le Conseil constitutionnel ?
La nouvelle procédure fait la part belle au travail en commission, censé mieux préparer la séance plénière. La théorie, c'est une discussion en quatre temps, qui devrait utiliser au mieux les six semaines garanties entre le dépôt du texte et son examen par la première chambre, puis les quatre semaines avant son examen par la seconde : un premier débat préalable d'orientation en commission ; une deuxième réunion pour examiner le rapport et établir le texte de la commission, quinze jours au moins avant la séance plénière, en associant les sénateurs de la majorité et de l'opposition au travail préparatoire du rapporteur ; une troisième pour examiner les amendements en vue de la séance ; enfin, la séance plénière avec la garantie que tous les amendements seront présentés.
La pratique ? Nous avons commencé à travailler sur ce texte très en amont. Je sais gré au rapporteur d'avoir organisé, dès décembre 2008, de nombreuses auditions, ouvertes à tous. Mais cette belle mécanique a vite déraillé... Lors de l'audition des ministres et du débat général sur le texte, le président About avait pris soin de diviser le débat en trois temps afin de faciliter l'examen d'un texte qui comptait une centaine d'articles, sur des sujets très variés. Néanmoins, cette réunion du 7 avril fut une séance marathon, très formelle, de nombreuses questions restant sans réponse.
Les problèmes sont allés croissant lors de l'examen des amendements internes à la commission. Je rends hommage à la disponibilité, à l'écoute et au sang-froid du président. Les parlementaires jouant le jeu, 1 420 amendements avaient été déposés. Preuve que, même lorsque le Parlement ne siège pas, les parlementaires travaillent ! (Applaudissements à gauche) Ayant tous mis à profit les prétendues « vacances » parlementaires d'avril pour rédiger nos amendements, nous sommes nombreux à ne pas avoir goûté les propos de M. Karoutchi, justifiant une session extraordinaire en juillet au motif que « personne ne comprendrait qu'en période de crise, le Parlement se mette en vacances trois mois ». Je n'ai jamais connu trois mois de vacances, ni comme sénateur ni comme maire !
Mme Isabelle Debré. - Moi non plus !
M. Jean-Pierre Godefroy. - A l'issue de la journée prévue à cet effet, nous n'avions examiné que 300 amendements... Pour « écluser » le reste, il a fallu trois journées et sept séances supplémentaires. Difficile, pour les parlementaires, de se libérer à la dernière minute pour défendre leurs amendements... La Conférence des Présidents n'a pas su anticiper ce qui était pourtant prévisible, car ce texte est loin d'être consensuel ! Il aurait fallu prévoir plus de temps pour la commission et décaler l'examen en séance.
La présence du Gouvernement lors de l'examen des amendements, certes demandée par le Conseil constitutionnel, soulève des interrogations : alors que les divergences entre commission et Gouvernement étaient réelles, nous avons vu Mme la ministre donner, « avec tact et mesure », des orientations de vote à certains sénateurs de la majorité. C'est une atteinte à la liberté de délibération des commissions, au fonctionnement libre et démocratique du Parlement. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Les sénateurs sont-ils des enfants pour être si facilement influencés ?
M. Jean-Louis Carrère. - L'ordre vient d'en haut !
M. Jean-Pierre Godefroy. - Par ailleurs, pour être à armes égales avec le Gouvernement et le rapporteur, les groupes devraient pouvoir eux aussi bénéficier de l'assistance de collaborateurs.
Le délai pour le dépôt des amendements destinés à être examinés en séance a été loin des quinze jours prévus par la nouvelle procédure : le texte complet de la commission n'a été en ligne que le 6 mai dans la soirée alors que le délai limite était fixé au 7 à 17 heures, et au 11 mai à midi pour le titre IV. Je remercie les fonctionnaires de la commission et nos collaborateurs, qui se sont démenés pour tenir les délais. Si nous déposons à nouveau des amendements déjà présentés en commission, ce n'est pas par goût de l'obstruction mais pour faire connaître nos divergences sur certains points et tenter de convaincre une majorité en séance plénière. Les membres des autres commissions ont eu très peu de temps pour prendre connaissance du nouveau texte. Élus locaux, souvent membres du conseil d'administration d'un hôpital, ils ont pourtant toute légitimité pour amender le texte ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Bref, les dysfonctionnements ont été nombreux. Point n'est besoin d'attendre un an, comme nous le propose le président Larcher, pour évaluer la nouvelle procédure : les anomalies sont d'ores et déjà patentes.
Le Gouvernement a déclaré l'urgence, on l'a dit. Vu les divergences entre les professionnels, le Gouvernement, l'Assemblée nationale et le Sénat, il n'est pas normal de renvoyer à une commission mixte paritaire le soin de trancher tous ces débats. Dans ces conditions, comment s'étonner que les hémicycles soient vides ! Si la CMP ne trouve pas d'accord, vous n'aurez pas gagné de temps. M. Copé a rappelé que le dernier mot appartenait à l'Assemblée nationale : il reste donc au Sénat à défendre le texte de la commission avant la CMP...
Enfin, les déclarations contradictoires du Président de la République changent la donne. L'objectif de ces interférences extérieures n'est pas simplement de court-circuiter le Parlement...
M. Jean-Louis Carrère. - Convoquez le Président en commission !
M. Jean-Pierre Godefroy. - Le Gouvernement s'appuie sur un rapport dont nous n'avons pas connaissance pour intégrer in extremis les CHU dans la réforme, par voie d'amendements, sans que les députés n'aient pu en débattre ! Des voix s'élèvent déjà dans la majorité contre ce passage en force. Le Conseil constitutionnel se prononcera. Nous n'avons pu commencer à étudier les amendements du Gouvernement, qui reviennent largement sur le texte de la commission, que pendant l'heure du déjeuner.
Le Président de la République a enjoint hier aux sénateurs de s'en tenir à l'équilibre atteint. Aujourd'hui, le Gouvernement veut pratiquement revenir à la version initiale de l'Assemblée nationale.
Rien ne justifie l'urgence, à l'heure où la contestation grandissante impose le recours à la procédure normale. Nous pourrions ainsi avoir un débat transparent et apaisé, gage d'un travail sérieux. Comme le président de notre groupe l'a fait hier, je vous demande donc solennellement de lever l'urgence, pour que la navette face vivre le Parlement. C'est une absolue nécessité démocratique !
Aucune explication convaincante n'a été fournie en faveur de l'urgence, car nous avons le temps d'examiner un texte qui doit entrer en vigueur le 1er janvier 2010.
M. Nicolas About, président de la commission. - M. Évin attend !
M. Jean-Pierre Godefroy. - Votre obstination à maintenir l'urgence me rappelle celle d'un autre gouvernement à propos du CPE. (On apprécie à gauche) Le renvoi en commission permettrait au Parlement de se prononcer dans des conditions respectant le fonctionnement démocratique normal.
Je regrette que vous ne leviez pas l'urgence, car cela permettrait aux commissions parlementaires d'examiner à nouveau ce texte. (Applaudissements à gauche)
M. Alain Milon, rapporteur. - Je rends hommage à tous les membres de la commission, dont certains ont consacré plus de 34 heures -parfois des nuits entières- à ce projet de loi très important.
Il est vrai que la nouvelle procédure change profondément nos habitudes, mais l'apprentissage n'a pas été favorisé par le tsunami d'amendements.
M. Jean-Louis Carrère. - C'est une pluie de printemps !
M. Alain Milon, rapporteur. - Nous sommes néanmoins allés au fond du sujet, notamment grâce à une présidence particulièrement efficace. On ne saurait donc prétendre que le texte issu de nos travaux porte atteinte à l'image de sérieux de notre assemblée.
La commission est défavorable à la motion. (Applaudissements à droite)
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Sans m'immiscer dans une discussion qui porte sur le fonctionnement interne de votre assemblée, j'ai constaté comme ministre que la nouvelle procédure nécessitait encore quelques réglages concrets. Cela dit, contrairement à ce qui a été affirmé, je ne me suis pas offusquée d'avoir été accueillie dans des conditions évoquant le camping...
M. Nicolas About, président de la commission. - Un camping de luxe...
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - ...le président About ayant fait preuve d'une grande gentillesse. L'important, c'est la qualité de l'échange intellectuel, pas le rembourrage des fauteuils.
Le rapporteur a rappelé que la commission avait consacré à ce texte de nombreuses heures de débats, outre les réunions annexes. (A gauche : « Et connexes ») L'orateur m'a flattée en prétendant que ma seule présence suffisait à suborner les sénateurs de la majorité.
M. Guy Fischer. - J'en ai été témoin !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Et je dirai aux sénateurs de la majorité que je ne partage pas le dédain avec lequel vos collègues de l'opposition vous considèrent ! (Applaudissements à droite)
M. Jean-Louis Carrère. - C'est pour les godillots !
A la demande du groupe UMP, la motion n°282 est mise aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 329 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 165 |
Pour l'adoption | 139 |
Contre | 190 |
Le Sénat n'a pas adopté.
La séance, suspendue à 16 h 20, reprend à 16 h 40.
Discussion des articles
M. le président. - Je rappelle que les articles additionnels avant l'article premier ont été réservés jusqu'après l'article 13 quater.
Article premier
(Texte modifié par la commission)
I. - L'article L. 6111-1 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Art. L. 6111-1. - Les établissements de santé publics, privés et privés d'intérêt collectif assurent, dans les conditions prévues par le présent code, le diagnostic, la surveillance et le traitement des malades, des blessés et des femmes enceintes.
« Ils délivrent les soins avec hébergement, sous forme ambulatoire ou à domicile.
« Ils participent à la coordination des soins en relation avec les membres des professions de santé exerçant en pratique de ville et les établissements et services médico-sociaux, dans le cadre défini par l'agence régionale de santé et de l'autonomie en concertation avec les conseils généraux pour les compétences qui les concernent.
« Ils participent à la mise en oeuvre de la politique de santé publique et des dispositifs de vigilance destinés à garantir la sécurité sanitaire.
« Ils mènent, en leur sein, une réflexion sur l'éthique liée à l'accueil et la prise en charge médicale. »
II. - L'article L. 6111-2 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 6111-2. - Les établissements de santé élaborent et mettent en oeuvre une politique d'amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins et une gestion des risques visant à prévenir et traiter les évènements indésirables liés à leurs activités.
« Dans ce cadre, ils organisent la lutte contre les événements indésirables, les infections associées aux soins et l'iatrogénie, définissent une politique du médicament et des dispositifs médicaux stériles et mettent en place un système permettant d'assurer la qualité de la stérilisation des dispositifs médicaux. »
III. - L'intitulé du chapitre II du titre Ier du livre Ier de la sixième partie du code de la santé publique est ainsi rédigé : « Missions de service public des établissements de santé ».
IV. - Les articles L. 6112-1, L. 6112-2 et L. 6112-3 du même code sont ainsi rédigés :
« Art. L. 6112-1. - Les établissements de santé peuvent être appelés à assurer, en tout ou partie, une ou plusieurs des missions de service public suivantes :
« 1° La permanence des soins ;
« 1° bis La prise en charge des soins palliatifs ;
« 2° L'enseignement universitaire et post-universitaire ;
« 2° bis La recherche ;
« 3° La formation continue des praticiens hospitaliers et non hospitaliers ;
« 4° La formation initiale et continue des sages-femmes et du personnel paramédical et la recherche dans leurs domaines de compétence ;
« 5° Supprimé par la commission........
« 6° Les actions d'éducation et de prévention pour la santé et leur coordination ;
« 7° L'aide médicale urgente, conjointement avec les praticiens et les autres professionnels de santé, personnes et services concernés ;
« 8° La lutte contre l'exclusion sociale, en relation avec les autres professions et institutions compétentes en ce domaine, ainsi que les associations qui oeuvrent dans le domaine de l'insertion et de la lutte contre l'exclusion et la discrimination ;
« 9° Les actions de santé publique ;
« 10° La prise en charge des personnes hospitalisées sans leur consentement ;
« 11° Les soins dispensés aux détenus en milieu pénitentiaire et, si nécessaire, en milieu hospitalier, dans des conditions définies par décret ;
« 12° Les soins dispensés aux personnes retenues en application de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
« 13° Les soins dispensés aux personnes retenues dans les centres socio-médico-judiciaires de sûreté.
« Art. L. 6112-2. - Outre les établissements de santé, peuvent être chargés d'assurer ou de contribuer à assurer, en fonction des besoins de la population appréciés par le schéma régional d'organisation des soins, les missions de service public définies à l'article L. 6112-1 :
« - les centres de santé et les maisons de santé ;
« - l'Institution nationale des invalides dans le cadre de ses missions définies au 2° de l'article L. 529 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
« - le service de santé des armées, dans des conditions fixées par décret en Conseil des ministres ;
« - les groupements de coopération sanitaire ;
« - les autres personnes titulaires d'autorisation d'équipement matériel lourd ;
« - les praticiens exerçant dans les établissements ou structures mentionnés au présent article.
« Lorsqu'une mission de service public n'est pas assurée sur un territoire de santé, le directeur général de l'agence régionale de santé et de l'autonomie, sans préjudice des compétences réservées par la loi à d'autres autorités administratives, désigne la ou les personnes qui en sont chargées.
« Le contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens prévu à l'article L. 6114-1 ou un contrat spécifique précise les obligations auxquelles est assujettie toute personne assurant ou contribuant à assurer une ou plusieurs des missions de service public définies au présent article et, le cas échéant, les modalités de calcul de la compensation financière de ces obligations.
« La signature ou la révision du contrat afin d'y intégrer les missions de service public peut être à l'initiative de l'un ou l'autre des signataires.
« Les missions de service public, qui à la date de publication de la présente loi, sont déjà assurées par un établissement de santé sur un territoire donné, font l'objet d'une reconnaissance prioritaire dans le contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens.
« Art. L. 6112-3. - L'établissement de santé, ou toute personne chargée d'une ou plusieurs des missions de service public définies à l'article L. 6112-1, garantit à tout patient accueilli dans le cadre de ces missions :
« 1° L'égal accès à des soins de qualité ;
« 2° La permanence de l'accueil et de la prise en charge, ou l'orientation vers un autre établissement ou une autre institution, dans le cadre défini par l'agence régionale de santé et de l'autonomie ;
« 3° La prise en charge aux tarifs fixés par l'autorité administrative ou aux tarifs des honoraires prévus au 1° du I de l'article L. 162-14-1 du code de la sécurité sociale.
« Les garanties mentionnées aux 1° et 3° sont applicables à l'ensemble des prestations délivrées au patient dès lors qu'il est admis au titre de l'urgence ou qu'il est accueilli et pris en charge dans le cadre de l'une des missions mentionnées au premier alinéa, y compris en cas de réhospitalisation dans l'établissement ou pour les soins, en hospitalisation ou non, consécutifs à cette prise en charge.
« Les obligations qui incombent, en application du présent article, à un établissement de santé ou à l'une des structures mentionnées à l'article L. 6112-2 s'imposent également aux praticiens qui y exercent. »
V. - Après l'article L. 6112-3 du même code, il est inséré un article L. 6112-3-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 6112-3-1. - Tout patient d'un établissement public de santé bénéficie des garanties définies aux 1° et 2° de l'article L. 6112-3.
« Les établissements publics de santé appliquent aux assurés sociaux les tarifs prévus aux articles L. 162-20 et L. 162-26 du code de la sécurité sociale.
« Dans le cadre des missions de service public assurées par l'établissement, les tarifs des honoraires des professionnels de santé visés au premier alinéa de l'article L. 6146-2 et des praticiens hospitaliers exerçant dans le cadre de l'activité libérale prévue à l'article L. 6154-1 sont ceux prévus au 1° du I de l'article L. 162-14-1 du code de la sécurité sociale. »
V bis. - 1° L'article L. 162-22-10 du code de la sécurité sociale est complété par un V ainsi rédigé :
« V. - Le Gouvernement présente avant le 15 octobre de chaque année au Parlement un rapport sur la tarification à l'activité des établissements de santé et ses conséquences sur l'activité et l'équilibre financier des établissements publics et privés. Le rapport précise notamment les dispositions prises :
« - pour prendre en compte les spécificités des actes réalisés dans les établissements publics de santé et mesurer l'impact sur leurs coûts de leurs missions de service public ;
« - pour mesurer et prévenir les conséquences de la tarification à l'activité sur la multiplication artificielle des actes, la qualité des soins, les activités de santé publique et la prise en charge des pathologies chroniques. »
2° Jusqu'en 2012, le rapport prévu au V de l'article L. 162-22-10 du code de la sécurité sociale est transmis au Parlement en même temps que le bilan d'avancement du processus de convergence mentionné au VII de l'article 33 de la loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003 de financement de la sécurité sociale pour 2004.
VI. - Les deuxième et troisième alinéas de l'article L. 6122-7 du code de la santé publique sont ainsi rédigés :
« Elle peut également être subordonnée à des conditions relatives à la participation à une ou plusieurs des missions de service public définies à l'article L. 6112-1 ou à l'engagement de mettre en oeuvre des mesures de coopération favorisant l'utilisation commune de moyens et la permanence des soins.
« L'autorisation peut être suspendue ou retirée selon les procédures prévues à l'article L. 6122-13 si les conditions mises à son octroi ne sont pas respectées. »
VI bis. - Après le premier alinéa de l'article L. 6122-10 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Il peut également être subordonné aux conditions mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 6122-7. »
VII. - L'article L. 6161-4 du même code est remplacé par deux articles L. 6161-4 et L. 6161-4-1 ainsi rédigés :
« Art. L. 6161-4. - Le contrat pour l'exercice d'une profession médicale conclu entre toute personne chargée d'assurer une ou plusieurs des missions de service public définies à l'article L. 6112-1 et un praticien précise, en tant que de besoin, les conditions de la participation de ce dernier à ces missions et les obligations qui s'imposent à lui en application du dernier alinéa de l'article L. 6112-3.
« Si ce contrat est antérieur à celui confiant une ou plusieurs missions de service public au cocontractant du praticien, il est, en tant que de besoin, révisé pour intégrer les stipulations mentionnées au premier alinéa dans un délai de six mois à compter de la date de la signature du contrat conclu en application du dernier alinéa de l'article L. 6112-2.
« L'agence régionale de santé et de l'autonomie est informée des termes de cette révision.
« Si le praticien refuse de procéder à sa révision, il peut prétendre à des indemnités en cas de résiliation du contrat par l'établissement dès lors que la durée d'activité consacrée aux missions de service public proposée par le contrat révisé excède 30 % de son temps travaillé.
« Art. L. 6161-4-1. - Supprimé par la commission....
VII bis. - L'article L. 6161-5 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 6161-5. - Sont qualifiés d'établissements de santé privés d'intérêt collectif :
« 1° Les centres de lutte contre le cancer ;
« 2° Les établissements de santé privés gérés par des organismes sans but lucratif qui en font la déclaration auprès de l'agence régionale de santé et de l'autonomie.
« Les obligations à l'égard des patients prévues aux 1° et 2° de l'article L. 6112-3 sont applicables aux établissements de santé privés d'intérêt collectif pour l'ensemble de leurs missions.
« Les établissements de santé privés d'intérêt collectif appliquent aux assurés sociaux les tarifs prévus aux articles L. 162-20 et L. 162-26 du code de la sécurité sociale.
« Les modalités d'application du présent article sont déterminées par décret. »
VIII. - Le premier alinéa de l'article L. 6162-1 du même code est ainsi rédigé :
« Les centres de lutte contre le cancer sont des établissements de santé qui exercent leurs missions dans le domaine de la cancérologie. »
IX. - L'article L. 162-20 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 162-20. - Les assurés sociaux sont hospitalisés dans les établissements publics de santé aux tarifs fixés par l'autorité administrative compétente. »
X. - L'article L. 6311-2 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Art. L. 6311-2. - Seuls les établissements de santé peuvent être autorisés, conformément aux dispositions du chapitre II du titre II du livre Ier de la présente partie, à comporter une ou plusieurs unités participant au service d'aide médicale urgente, dont les missions et l'organisation sont fixées par voie réglementaire.
« Un centre de réception et de régulation des appels est installé dans les services d'aide médicale urgente. Ce centre peut être commun à plusieurs services concourant à l'aide médicale urgente.
« Le fonctionnement de ces unités et centre peut être assuré, dans des conditions fixées par décret, avec le concours de médecins d'exercice libéral.
« Dans le respect du secret médical, les centres de réception et de régulation des appels sont interconnectés avec les dispositifs des services de police et d'incendie et de secours.
« Les services d'aide médicale urgente et les services concourant à l'aide médicale urgente sont tenus d'assurer le transport des patients pris en charge dans le plus proche des établissements offrant des moyens disponibles adaptés à leur état, sous réserve du respect du libre choix. »
XI. - L'article L. 6112-5 du même code est abrogé.
XII. - L'article L. 6323-1 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 6321-1. - Les centres de santé sont des structures sanitaires de proximité dispensant principalement des soins de premier recours. Ils assurent des activités de soins sans hébergement et mènent des actions de santé publique ainsi que des actions de prévention, d'éducation pour la santé, d'éducation thérapeutique des patients et des actions sociales et pratiquent la délégation du paiement du tiers mentionné à l'article L. 322-1 du code de la sécurité sociale. Ils peuvent pratiquer des interruptions volontaires de grossesse par voie médicamenteuse dans le cadre d'une convention conclue selon les modalités prévues à l'article L. 2212-2 et dans les conditions prévues aux articles L. 2212-1 à L. 2212-10 du présent code.
« Ils constituent des lieux de stages pour la formation des différentes professions de santé.
« Ils peuvent soumettre à l'agence régionale de santé et de l'autonomie et appliquer les protocoles définis à l'article L. 401182 dans les conditions prévues à l'article L. 401183.
« Ils sont créés et gérés soit par des organismes à but non lucratif, soit par des collectivités territoriales, soit par des établissements de santé publics ou des établissements de santé d'intérêt collectif.
« Les centres de santé élaborent un projet de santé incluant des dispositions tendant à favoriser l'accessibilité sociale, la coordination des soins et le développement d'actions de santé publique.
« Le projet médical du centre de santé géré par un établissement de santé est distinct du projet d'établissement.
« Les médecins qui exercent en centre de santé sont salariés.
« Les centres de santé sont soumis pour leur activité à des conditions techniques de fonctionnement prévues par décret, après consultation des représentants des gestionnaires de centres de santé. Ce texte détermine également les modalités de la période transitoire. »
XIII. - L'article L. 632382 du même code est abrogé.
XIV. - L'article L. 611183 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les établissements de santé peuvent créer et gérer les centres de santé mentionnés à l'article L. 632381 du présent code. »
XV. - Les articles L. 6161-3-1, L. 6161-6, L. 6161-7, L. 6161-8, L. 6161-9 et L. 6161-10 du même code sont abrogés.
XVI. - Les établissements de santé privés qui ont été admis à participer à l'exécution du service public hospitalier à la date de publication de la présente loi peuvent continuer d'exercer, dans les mêmes conditions, les missions pour lesquelles ils y ont été admis ou celles prévues par leur contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens jusqu'au terme de ce contrat ou, au plus tard, jusqu'à la date mentionnée au VII de l'article 33 de la loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003 de financement de la sécurité sociale pour 2004. Ils prennent la qualification d'établissement de santé privé d'intérêt collectif sauf opposition expresse de leur part notifiée par leur représentant légal au directeur général de l'agence régionale de santé et de l'autonomie, par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception.
Jusqu'à la date retenue en application de l'alinéa précédent, les articles L. 6112-3-1, L. 6112-6, L. 6112-7, L. 6143-2 et L. 6143-2-1, les cinquième et sixième alinéas de l'article L. 6143-4 et les articles L. 6145-1 et L. 6155-1 du code de la santé publique leur sont applicables. Jusqu'à cette même date, les dispositions relatives au financement par l'assurance maladie de leurs activités de soins et à la participation de l'assuré social leur sont applicables dans les mêmes conditions qu'aux établissements publics de santé.
Jusqu'à la date retenue en application du premier alinéa du présent XVI, les dispositions du dernier alinéa de l'article L. 6161-7 du code de la santé publique, dans sa rédaction antérieure à la présente loi, leur sont applicables.
XVII. - Les établissements de santé privés qui ont opté pour le financement par dotation globale, en application de l'article 25 de l'ordonnance n° 96-346 du 24 avril 1996 portant réforme de l'hospitalisation publique et privée, continuent d'exercer, dans les mêmes conditions, les missions prévues à leur contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens jusqu'au terme de ce contrat ou, au plus tard, jusqu'à la date mentionnée au VII de l'article 33 de la loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003 précitée.
Jusqu'à la date retenue en application de l'alinéa précédent, les articles L. 6143-2 et L. 6143-2-1, les cinquième et sixième alinéas de l'article L. 6143-4 et l'article L. 6145-1 du code de la santé publique leur sont applicables. Jusqu'à cette même date, les dispositions relatives au financement par l'assurance maladie de leurs activités de soins et à la participation de l'assuré social leur sont applicables dans les mêmes conditions qu'aux établissements publics de santé.
Jusqu'à la date retenue en application du premier alinéa du présent XVII, les deuxième à sixième alinéas du XVIII bis leur sont applicables.
XVIII. - Les centres de lutte contre le cancer mentionnés à l'article L. 6162-1 du code de la santé publique continuent d'exercer, dans les mêmes conditions, outre les missions qui leur sont assignées par la loi, les missions prévues à leur contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens jusqu'au terme de ce contrat ou, au plus tard, jusqu'à la date mentionnée au VII de l'article 33 de la loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003 précitée.
Jusqu'à la date retenue en application de l'alinéa précédent, les dispositions relatives au financement par l'assurance maladie de leurs activités de soins et à la participation de l'assuré social leur sont applicables dans les mêmes conditions qu'aux établissements publics de santé.
Jusqu'à l'entrée en vigueur de l'ordonnance prévue au 2° de l'article 33 de la présente loi, les articles L. 6112-3, L. 6112-6, L. 6112-7, L. 6143-2 et L. 6143-2-1, les cinquième et sixième alinéas de l'article L. 6143-4 et les articles L. 6145-1 et L. 6155-1 du code de la santé publique leur sont applicables.
Jusqu'à la date mentionnée au troisième alinéa du présent XVIII, le dernier alinéa de l'article L. 6161-7 du code de la santé publique, dans sa rédaction antérieure à la présente loi, leur reste applicable. Les deuxième à sixième alinéas du XVIII bis leur sont applicables.
XVIII bis. - Jusqu'à la date retenue en application du premier alinéa du XVI, les dispositions suivantes sont applicables aux établissements de santé privés qui ont été admis à participer à l'exécution du service public hospitalier à la date de publication de la présente loi.
Lorsque le directeur général de l'agence régionale de santé et de l'autonomie estime que la situation financière de l'établissement l'exige et, à tout le moins, lorsque le suivi et l'analyse de l'exécution de l'état des prévisions de recettes et de dépenses prévus à l'article L. 6145-1 du code de la santé publique ou le compte financier font apparaître un déséquilibre financier répondant à des critères définis par décret, ou lorsque sont constatés des dysfonctionnements dans la gestion de l'établissement, le directeur général de l'agence régionale de santé et de l'autonomie adresse à la personne morale gestionnaire une injonction de remédier au déséquilibre financier ou aux dysfonctionnements constatés et de produire un plan de redressement adapté, dans un délai qu'il fixe. Ce délai doit être raisonnable et adapté à l'objectif recherché.
Les modalités de retour à l'équilibre financier donnent lieu à la signature d'un avenant au contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens prévu à l'article L. 6114-1 du même code.
S'il n'est pas satisfait à l'injonction, ou en cas de refus de l'établissement de signer l'avenant susmentionné, le directeur général de l'agence régionale de santé et de l'autonomie peut désigner un administrateur provisoire de l'établissement pour une durée qui ne peut être supérieure à six mois renouvelable une fois. Si l'organisme gestionnaire gère également des établissements ou services qui relèvent de la compétence tarifaire du représentant de l'État ou du président du conseil général, l'administrateur provisoire est désigné conjointement par le représentant de l'État dans le département et le directeur général de l'agence régionale de santé et de l'autonomie. L'administrateur doit satisfaire aux conditions définies aux deuxième à quatrième alinéas de l'article L. 811-2 du code de commerce.
L'administrateur provisoire accomplit, pour le compte de l'établissement, les actes d'administration urgents ou nécessaires pour mettre fin aux dysfonctionnements ou irrégularités constatés et préparer et mettre en oeuvre un plan de redressement. La rémunération de l'administrateur est assurée par les établissements gérés par l'organisme et répartie entre les établissements ou services au prorata des charges d'exploitation de chacun d'eux. L'administrateur justifie, pour ses missions, d'une assurance couvrant les conséquences financières de la responsabilité conformément aux dispositions de l'article L. 814-5 du code de commerce, prise en charge dans les mêmes conditions que la rémunération.
En cas d'échec de l'administration provisoire, le directeur général de l'agence régionale de santé et de l'autonomie peut saisir le commissaire aux comptes pour la mise en oeuvre de l'article L. 612-3 du même code.
XIX. - Les contrats de concession pour l'exécution du service public hospitalier conclus en application de l'article L. 6161-9 du code de la santé publique, dans sa rédaction antérieure à la présente loi, ne sont pas renouvelés. Ils prennent fin au plus tard à la date mentionnée au VII de l'article 33 de la loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003 précitée.
M. le président. - J'ai cru comprendre que notre discussion serait longue... (Sourires) J'appelle chacun à respecter son temps de parole.
Mme Samia Ghali. - Nous avons un point d'accord, madame la ministre : ce texte est très attendu. La crise est globale d'un système de santé qui répond de moins en moins aux besoins. Nous assistons au recul progressif du droit à la santé tandis que les inégalités sociales s'accroissent. Selon une étude du Secours populaire d'octobre 2008, la dégradation de la santé se conjugue à la dégradation du pouvoir d'achat. La pauvreté touche de nouvelles catégories de salariés : 39 % des Français disent avoir déjà retardé des soins ou y avoir renoncé. A quoi s'ajoutent les inégalités territoriales et la désertification médicale en milieu rural comme à la périphérie des villes. Dans les quartiers défavorisés, les cabinets médicaux disparaissent ; dans ceux qui restent, il faut attendre des mois pour obtenir un rendez-vous.
Cette réalité dégradée, c'est le résultat de la politique idéologique du Gouvernement. Que de promesses faites, que de réformes engagées depuis celle de M. Douste-Blazy, augmentation des franchises, autorisation des dépassements d'honoraires, multiplication des déremboursements... Avec pour résultat, le creusement des déficits sociaux et des inégalités croissantes devant la santé.
La priorité était de refonder un système public de santé de proximité : malgré les échecs financiers de vos prédécesseurs, vous vous obstinez dans le tout-libéral. Au lieu de traiter les questions structurantes, la permanence des soins, la liberté d'installation, la rémunération à l'acte, les discriminations, vous préférez accabler l'hôpital pour affaiblir le service public. C'est tout le sens du titre premier et de son article inaugural.
Les discours du Président de la République ne trompent personne. Comme on veut cacher les problèmes de la médecine de ville, de la médecine libérale, on choisit de mettre en avant la crise de l'hôpital. Il est exaspérant, ce discours qui cible l'hôpital public, alors que celui-ci est à l'évidence loin de concentrer les défauts du système, alors qu'il est malade des insuffisances de la politique de santé publique et de l'offre de soins libérale. La crise de l'hôpital public, c'est la faillite de votre politique, d'une médecine libérale sans règle, d'un Ondam hospitalier volontairement sous-estimé année après année, d'une tarification à l'activité (TAA) inadéquate. Vous nous dites que va se mettre en place la onzième version de la TAA, qu'on va enfin tenir compte de la précarité ou de la gravité de certaines pathologies : vous avouez, mais vous insistez ! Vous prévalant de vos propres turpitudes, vous accentuez l'emprise comptable et évacuez la démocratie sanitaire. Nous sommes profondément choqués que votre texte marginalise sans raison la pensée médicale.
Vous voulez disposer de directeurs d'hôpitaux qui accepteront de se soumettre aux contraintes budgétaires que vous imposez à l'hôpital public. ll ne reste plus qu'à libéraliser le secteur lui-même.
En invoquant vos propres turpitudes (exclamations indignées à droite), vous dénoncez l'impasse budgétaire des établissements que les acrobaties comptables ont de plus en plus de mal à masquer, tant le manque de moyens et d'investissements est patent dans certaines régions. Vous allez invoquer les carences du service public et vous ferez appel, grâce à cet article, aux établissements de santé privés pour remplir, nouvelle étape de la privatisation, des missions de service public.
Au-delà de notre réserve de principe, nous exigeons que les établissements privés ne puissent pas sélectionner à la carte leurs missions de service public : ce qui est imposé au secteur public devra l'être au secteur privé.
La question du socle de missions de service public est, à nos yeux, fondamentale. (M. Jean-Pierre Godefroy applaudit)
Mme Annie David. - Avec cet article, vous entendez privatiser le service public hospitalier en confiant aux acteurs privés les mêmes missions publiques de santé. Cette privatisation repose sur un postulat libéral : la nature juridique de ceux qui réalisent les missions importe peu, puisque c'est le service rendu qui compte. Il s'agit donc de l'application déguisée de la directive Bolkenstein aux établissements de santé. Vous l'avez d'ailleurs vous-même reconnu, madame la ministre, lorsque, à l'occasion d'un débat organisé par le Cercle des Européens, vous déclariez « vouloir imprégner la politique de santé française d'une couleur européenne ». (Mme la ministre lève les yeux au ciel)
Certes, la directive « services » épargne la santé, considérant que cette question relève de la seule compétence nationale. Il n'en demeure pas moins que l'on assiste en France, comme dans les autres pays européens, à une révision des politiques sociales et sanitaires qui prône l'unification des règles de protection sociale. D'ailleurs, depuis 1987, le thème de la santé est mentionné dans les traités alors que tel n'aurait jamais dû être le cas.
Cet article premier traduit donc ce mouvement de libéralisation qui a entraîné la révision du code de la mutualité et qui vous conduit, aujourd'hui, à privatiser les missions de service public. Ce faisant, vous répondez à l'exigence du traité constitutionnel européen, rejeté par les Hollandais, les Irlandais et les Français, et qui a été reprise dans le traité de Lisbonne, à savoir « un marché intérieur où la concurrence est libre et non faussée ». Ce dogme s'impose naturellement à tous les domaines, santé comprise. La question n'est pas de savoir si vous privatisez l'hôpital public pour satisfaire aux exigences européennes. Une chose est sûre : l'Europe se construit contre les intérêts des usagers du système de santé et elle favorise la concentration et la domination économique de quelques structures privées.
A un mois des élections européennes, ce débat permet de souligner les oppositions qui existent entre votre conception de l'Europe libérale et celle que nous entendons défendre. Nous voulons une Union qui reconnaisse l'existence d'un certain nombre de droits fondamentaux, inaliénables, qui ne peuvent être sacrifiés sur l'autel de la concurrence et de la rentabilité. Profondément attachés à notre système public de santé, nous souhaitons que tous les peuples européens puissent bénéficier d'un système semblable au nôtre.
M. Jacky Le Menn. - Cet article propose, entre autres, une nouvelle rédaction de l'article L. 6112-1 du code de la santé qui prévoit que les missions de service public prises essentiellement en charge par l'hospitalisation publique, pourront être découpées en treize tranches parmi lesquelles tous les établissements de santé, y compris les cliniques privées à but lucratif, pourront choisir une ou plusieurs missions. Les hôpitaux publics n'auront pas grand choix puisqu'ils seront tenus d'accueillir tous les patients. Les cliniques privées commerciales auront tout intérêt à choisir les missions qui conforteront leur mode d'exercice. Il est certain qu'elles se renforceront dans le domaine de la chirurgie et notamment de la traumatologie légère.
Aujourd'hui, une majorité des chirurgiens exerce déjà en secteur libéral. Les nouvelles installations en clinique privée plutôt qu'à hôpital public vont s'accélérer : ne resteront plus à la chirurgie publique que les cas les plus lourds, les plus compliqués, les plus risqués et les plus coûteux.
Les hôpitaux publics de province mesureront rapidement les effets de cet article : devant la diminution de leurs actes chirurgicaux, ils se verront enjoints par les ARS de fermer leurs services de chirurgie au profit des cliniques commerciales, ce qui a d'ailleurs déjà commencé. Une telle évolution pénalisera les usagers, car 80 % des chirurgiens exerçant en secteur libéral pratiquent des honoraires libres. Si le projet de loi interdit à ces chirurgiens d'appliquer des honoraires de secteur II pour les missions de service public qu'ils accomplissent, il n'empêche qu'en augmentant le volume global de leur activité, ils fidéliseront une nouvelle clientèle qu'ils opèreront, en d'autres occasions, au tarif du secteur Il.
Les gagnants de cette réforme ne seront pas les malades les moins aisés, l'hôpital public de proximité ni les mutuelles. En revanche, nous assisterons à la mise en place accélérée d'une médecine à deux vitesses.
Il s'agit donc bien d'un basculement dans la conception du service public de la santé, basculement qui est déjà amorcé dans d'autres secteurs, notamment dans l'enseignement supérieur. Nous avons le choix entre deux conceptions : des réformes inspirées par le souci du bien commun ou des changements qui laissent libre court aux intérêts des plus riches et des plus puissants. Le sociologue Robert Castel rappelle dans son dernier ouvrage, La montée des incertitudes que « c'est un choix de société entre la volonté de vivre dans une formation sociale dont les membres resteraient unis par des relations de réciprocité et capables de structurer ce que Karl Polanyi appelle aussi, en reprenant une notion d'Aristote, « la vie bonne » et une société clivée en fonction des pures exigences de la concurrence économique entre gagnants et perdants, nantis et sacrifiés, inclus et désaffiliés ».
La conception de la réforme qui privilégie « le bien commun » s'inscrit dans un réformisme de gauche. Celle qui vise à privilégier la concurrence et l'intérêt des plus riches s'enracine dans un réformisme libéral, le vôtre, madame la ministre. Cet article qui émiette la conception du service public de santé jusqu'ici en vigueur, signe de façon caricaturale la dichotomie de nos conceptions de la réforme. Non, votre conception de la réforme de l'hôpital, réforme que nous souhaitons aussi, n'est pas la nôtre : il y manque de la solidarité, de l'humanisme et du réalisme financier. Attendez-vous donc à ce que nous mettions toute notre force de conviction pour combattre votre réforme qui nous semble néfaste pour l'immense majorité de nos concitoyens !
M. Guy Fischer. - Cet article traduit les finalités mêmes de ce texte. En effet, il substitue la notion d'établissements de santé en charge d'une ou plusieurs missions de service public, à la notion claire de service public hospitalier.
Le Gouvernement veut achever la privatisation du service public de santé, en autorisant qu'une partie de ses missions puissent être transférées à des établissements de santé privés à but commercial. Déjà, les établissements privés commerciaux pouvaient bénéficier de délégations de missions de service public et accueillir les urgences, sous prétexte de modernisation du système. Aujourd'hui, vous proposez le transfert total de ces missions aux établissements qui poursuivent des objectifs lucratifs. Bref, vous confiez au directeur général de l'agence régionale de santé, qui est en définitive un superpréfet sanitaire aux ordres du Gouvernement, la charge d'organiser, région par région, la privatisation de notre système de santé. Certes, le directeur de l'agence ne pourra confier les missions de service public aux établissements de santé privé commerciaux que si l'offre de soins, assurée prioritairement par les établissements de santé publics, n'est pas satisfaite. En vingt ans, à grands coups de réformes budgétaires, de révisions des schémas régionaux sanitaires, de cartes hospitalières, de fermetures de lits et de services, vous avez créé, vous et vos prédécesseurs, une situation qui ne permet plus à nos concitoyens d'être accueillis dans les établissements publics de santé. Sous prétexte de sécurité, et en réalité de rentabilité, vous avez fermé de nombreux services de chirurgie, au point qu'aujourd'hui 66 % de l'activité chirurgicale est pratiquée dans le secteur privé lucratif. Vous entendez appliquer cette même logique aux maternités.
Nous sommes donc étonnés, madame la ministre, de vous entendre utiliser cet argument, alors même que vous êtes responsable de la situation. Tel le pompier pyromane qui allume un incendie pour l'éteindre, avec ses propres méthodes, vous pratiquez de même avec l'hôpital. Notre analyse de la situation est toute autre : l'agence régionale de santé doit en effet analyser les besoins en soins de la population, mais sa structure doit être plus démocratique. En outre, la satisfaction des besoins de la population doit d'abord reposer sur les établissements publics de santé ou sur les établissements privés ne poursuivant pas d'intérêts lucratifs.
Il y a aussi des établissements privés à but non lucratif. La question du service public de santé n'est pas anodine. La santé n'est pas une marchandise comme les autres mais un bien inaliénable qu'il appartient à l'État de protéger. La structure privée des établissements auxquels vous entendez confier le service public est incompatible avec l'intérêt général car ils sont voués à la recherche du profit pour satisfaire une poignée d'actionnaires ou de fonds spéculatifs qui font le bonheur de retraités américains, britanniques ou italiens. Vous entretenez ainsi la marchandisation et la spéculation avec les cotisations des salariés. Il est inacceptable que ce qui est issu de la socialisation du travail de tous ne profite qu'à une minorité. (Applaudissements à gauche)
Mme Isabelle Pasquet. - Mes amis de groupe l'ont dit mais je veux y revenir, l'article premier organise la privatisation du service public hospitalier. Car c'est bien de cela qu'il s'agit lorsque l'on transfère des missions d'intérêt général à des opérateurs privés poursuivant un objectif commercial. Il est vrai que c'est cohérent avec la tarification à l'activité ou avec la convergence public-privé. Vous organisez l'appauvrissement du public mais vous n'oubliez pas les aides aux établissements commerciaux. A Aubagne, l'IRM est allé à la clinique de la Casamance et tandis que l'hôpital Edmond Garcin attend celui qu'on lui avait promis, la Casamance profite de son monopole.
A Marseille, où le tiers de la population vit en dessous du seuil de pauvreté et où les besoins sont immenses, le plan Hôpital 2012 a refusé le pôle parents-enfants de la Timone, projeté par l'Assistance publique, qui devra vendre une partie de son patrimoine immobilier. (M. Bruno Gilles le conteste) Avec la non-revalorisation des actes et la T2A, les établissements publics devront compter sur eux-mêmes.
A Aix, la maternité de l'Étoile, bien connue des professions de robe, reçoit une subvention de 5,3 millions, soit 50 % de son budget d'investissement, mais l'hôpital public ne recevra rien. Certes, la maternité est un établissement à but non lucratif mais elle ne participe pas au service public hospitalier.
Quant aux 50 millions attribués à Euro-méditerranée, ils contribueront au développement d'un projet immobilier. Ils auraient été plus utiles à Marseille-nord mais ils iront à un quartier qui a été vidé de ses habitants pour donner une meilleure image de la ville. Le maire de Marseille obtient un centre ville débarrassé de ses pauvres mais où les promoteurs réaliseront de juteux profits. Si vous aviez vraiment voulu améliorer la prise en charge sanitaire à Marseille-nord, pourquoi ne pas avoir débloqué les 200 millions nécessaires ? (« Très bien ! » sur les bancs CRC-SPG)
M. Yves Daudigny. - Le service public est mort, vive le service public ! Voilà ce que m'inspirent les serments que vous réitérez lorsque je lis l'article premier car les mots « service public hospitalier » ne figureront plus dans le code de la santé publique. Il sera remplacé par treize missions qui pourront être ou ne pas être exercées simultanément ; aussi a-t-on parlé de vente à la découpe ou de gré à gré. Ce démantèlement en réduit la portée. C'est ainsi qu'au lieu d'une obligation d'admission des patients, si besoin est, dans un autre établissement, il ne s'agit plus que d'orientation. Quelle différence !
Le passage d'un service public unique et singulier à des missions plurielles ne s'opère pas à l'identique, ce dont pâtiront les usagers. Il est essentiel de maintenir un bloc de missions de service public, incluant la permanence des soins, la lutte contre l'exclusion, les actions d'éducation et de prévention.
Le projet ne prévoit aucun critère pour répartir ces missions entre des établissements désormais tous confondus. La décision reviendra au seul directeur de l'Arsa, qui la prendra dans l'opacité. Tiendra-t-il compte des difficultés d'accès aux soins, de l'intérêt général ? Ce n'est pas acceptable ! Cela ouvrirait d'ailleurs la porte à bien des contentieux.
Qu'en est-il des tarifs opposables ? Les péripéties de l'amendement correspondant à l'Assemblée puis en commission montrent qu'on ne garantit plus l'accès aux soins. Nous tenterons de vous convaincre de modifier le projet sur ce point qui devrait faire l'unanimité. Il faut que tous aient accès aux soins grâce au service public. (Applaudissements à gauche)
Mme Claire-Lise Campion. - Cet article inventorie très strictement les missions de service public que pourront assumer en tout ou partie les hôpitaux publics et les établissements privés. On aurait pu espérer une amélioration de l'offre de soins et un renforcement des hôpitaux publics de proximité qu'on contraint aujourd'hui à fermer des maternités. Bernard Cazeau le disait hier, le scénario que nous entrevoyons est prévisible : acte 1, on organise la carence du service public ; acte 2, on conclut à son absence de fiabilité ; acte 3, on réoriente vers le privé et le secteur marchand pourra alors bénéficier de nouveaux marchés ; le tour est joué !
Juvisy en offre un exemple criant, où le service chirurgie et la maternité ont été fermés sans justification aucune. Le tribunal administratif de Versailles vient d'annuler cette décision prise par le conseil d'administration sur la pression de l'ARH -donc indirectement des services du ministère. Était-elle fondée sur des éléments approximatifs, voire erronés ? En tous cas, les arguments avancés pour la fermeture n'ont pas détourné de grands groupes privés de formuler des offres de reprise. Cependant, en le privant de son plateau technique, on a mis en danger le service des urgences qui desservait 200 000 habitants. C'est ainsi qu'on condamne le service public et qu'on contrevient à l'intérêt général, et cela, nous ne l'acceptons pas. (Applaudissements à gauche)
M. Robert Hue. - Nous aurions pu espérer un autre texte car, les Français le disent, ou plutôt le disaient, notre système de santé représente une garantie exceptionnelle. Cependant, ils expriment aussi des inquiétudes devant la sérieuse dégradation de l'offre de soins comme de leur accessibilité.
L'article premier de ce texte aurait pu et dû s'appuyer sur les difficultés constatées pour amorcer une réforme attendue, légitime, ambitieuse visant à assurer qualité et égal accès aux soins. Tel n'est pas le cas. A ce réel besoin de changement, vous n'apportez que des réponses technocratiques et financières qui ne manquent pas d'inquiéter. Vous refusez d'entendre les praticiens, les associations, les élus, dont certains de votre majorité et optez pour un texte sans concertation. Pire, une nouvelle fois, le Président de la République marque son mépris du Parlement en imposant de modifier un texte déjà débattu en commission.
Alors que l'article premier avait vocation à réaffirmer le rôle structurant et incontournable des établissements hospitaliers, vous vous employez au contraire à gommer leur apport à notre système de santé. Et tout cela au nom de la cohérence dont il a besoin. Mais est-ce cohérence que de confondre la place respective de l'hôpital public et des cliniques privées dans la notion fourre-tout d'« établissements de santé », sans définir les responsabilités de chacun ? C'est une véritable rupture. Non point que le processus date d'hier, mais vous souhaitez aujourd'hui l'inscrire dans la loi.
Permettre à des établissements privés de remplir une mission de service public sans en endosser les responsabilités, c'est un coup porté à l'hôpital public, qui accueille et prend en charge les populations les plus défavorisées. Pourtant, cliniques privées et hôpitaux, notamment en Ile-de-France, se sont longtemps côtoyés en bonne intelligence. Mais sans même attendre cette loi, nombre de cliniques privées, qui effectuaient un travail utile de proximité, ont fermé, victimes des regroupements imposés par les grands groupes de santé. Ces réorganisations traduisent aussi une évolution de la carte hospitalière, au détriment du secteur public. Le secteur de la chirurgie en constitue un bon révélateur : 65 % de l'activité est aujourd'hui réalisée dans le privé, sans doute pas par philanthropie...
Je constate, dans mon département, qu'une clinique privée équipée de plateaux ultramodernes se construit à quelques centaines de mètres de l'hôpital de Pontoise, qui se débat pour résorber un déficit cumulé de 12 millions, supprimant 200 emplois et réduisant les services rendus à la population de l'agglomération. Et le cas n'est hélas pas isolé : le déficit de l'hôpital d'Argenteuil, qui supprime aussi 200 emplois, s'élève à 35 millions. On parle de fermer, en 2012, l'hôpital de Montmorency, qui a pourtant rempli ses engagements auprès de l'agence régionale de l'hospitalisation au moment de la fusion avec l'hôpital d'Eaubonne.
Tout cela traduit l'assujettissement du service public à des règles financières, à une tarification à l'activité inopérante et mortifère. L'intention qui s'exprime, dès cet article premier, est contraire à l'effort de réforme dont notre pays a besoin en matière de santé publique. Puissions-nous vous empêcher de le livrer au seul principe de la rentabilité égoïste, au bénéfice d'une rentabilité sociale et humaine fidèle à son histoire. (Applaudissements à gauche)
M. Michel Billout. - Cet article premier ouvre à la privatisation des services entiers de l'hôpital public. Sous couvert de partenariat avec le privé, il va ainsi permettre de privatiser les urgences, véritable rente à patients pour les établissements privés. D'autres unités sont visées, pour leur rentabilité. Le cas du service de radiologie de l'hôpital de Lagny-Marne-la-Vallée illustrera bien mon propos. La direction de l'hôpital, aux prises avec un déficit de 5 millions, obligée de mettre en oeuvre un plan de retour à l'équilibre, fait feu de tout bois : suppression de postes administratifs, externalisation... La crise de la démographie médicale alourdit un peu plus le climat : le service radiologie a perdu la moitié de ses effectifs en quelques années et compte deux postes vacants. Car l'hôpital, victime de l'attractivité du privé, peine à recruter des radiologues. A cela s'ajoutent les conséquences de la tarification à l'activité, qui pousse les hôpitaux à privilégier les soins rémunérateurs au détriment de ses missions de service public, et les médecins à mener une course à l'activité.
Dans ces conditions d'asphyxie financière, la direction a dévoilé son intention de privatiser en grande partie l'activité de radiologie. Pour répondre aux besoins du bassin de Lagny-Marne-la-Vallée, en pleine expansion, l'hôpital doit s'agrandir. D'ici à 2011, un nouvel établissement doit être construit, dans la commune voisine de Jossigny. Vous vous souviendrez sans nul doute, madame la ministre, de la pose de la première pierre, puisqu'à en croire Le Parisien, les agents ont sifflé votre apparition. Comme vous le savez, la plupart des activités y seront transférées. Et bien qu'en grande difficulté financière, l'hôpital de Lagny est sommé de participer. Pour réduire les coûts, la direction envisage donc d'offrir aux « investisseurs libéraux » d'acheter des matériels, coûteux, de diagnostic (IRM et scanner), et d'en partager l'usage. Des discussions ont démarré avec l'un des plus puissants cabinets privés de la région qui a décidé de construire, à 400 mètres du futur hôpital, un immense cabinet d'une capacité de seize salles d'examen. Un chantier que les personnels voient comme une provocation. Car comment concilier les missions de service public avec des objectifs de rentabilité qui privilégieront, ici comme partout ailleurs, les examens rapides pour patients sélectionnés ? On peut s'attendre à un partage inégalitaire des équipements, qui réservera aux médecins libéraux les examens les plus intéressants et les plus rémunérateurs, laissant au public les examens peu rentables et les épuisantes gardes de nuit et de week-end. Une perspective de nature à accélérer encore la fuite des radiologues vers le privé. La plupart des radiologues libéraux exercent en secteur 2, à honoraires libres. Sachant qu'une IRM avec dépassement d'honoraires, non remboursée par la sécurité sociale, est facturée entre 114 et 150 euros, contre 69 dans le public, on peut être inquiet pour la prise en charge universelle des usagers. Cette question concerne également les assurés, la majorité des médecins libéraux pratiquant des dépassements que seules remboursent, dans le meilleur des cas, les assurances privées et les mutuelles. On peut s'attendre à une hausse des cotisations et à des contrats à prestations variables, creusant encore l'inégalité face aux soins.
Cet exemple montre assez que loin d'engager une modernisation des établissements, ainsi que vous tentez sans succès de nous en convaincre, votre politique met en cause le financement public et solidaire de la santé au bénéfice d'une entreprise commerciale et spéculative.
Mme Dominique Voynet. - Aux interrogations de M. Teulade, le rapporteur a apporté une réponse frappée au coin du bon sens : la loi ne règlera pas seule tous les problèmes auxquels nous sommes confrontés. Certes. Encore faut-il se demander à quoi sert une loi qui, loin de régler les problèmes -difficultés dans l'accès et la permanence des soins dans certains quartiers de nos villes et dans les zones rurales, dépassements d'honoraires hors de mesure, refus de certains praticiens, qui semblent oublier leur serment d'Hippocrate, de recevoir les patients à la CMU, dégradation des conditions de travail des personnels, confrontés à des patients chez lesquels problèmes sociaux et de santé sont étroitement imbriqués- ne fait que menacer les équilibres existants, tissés au fil du temps au sein des conseils d'administration, où élus, usagers, médecins et personnels dialoguent avec l'administration et l'agence régionale d'hospitalisation. Y aurait-il, au sein de ces conseils, d'un côté de bons gestionnaires, de l'autre des idéalistes inconséquents ?
Tout le monde a maintenant compris qu'il ne faut pas confondre rationalisation et rationnement, équilibre budgétaire et logique de profit. C'est grâce à la confrontation des points de vue que l'on a pu mettre en évidence les effets pervers de la T2A. Vous en avez-vous-même convenu, le report de l'exigence de convergence des équilibres en témoigne. C'est grâce à elle encore que l'on a fait ressortir l'effet de rente de la dotation globale pour les établissements les moins innovants, tandis que les efforts des établissements qui recherchent des réponses adaptées ne se voient pas récompensés.
Les établissements publics et privés ne sauraient fonctionner sur le même modèle, parce qu'ils ne réalisent pas les mêmes actes, auprès des mêmes patients, selon la même organisation. Il est plus facile d'opérer d'une myopie un patient en bonne santé que de traiter un décollement de la rétine durant un week-end estival. Il est plus facile de gérer un établissement privé, doté d'une équipe aux compétences ciblées pour une clientèle triée sur le volet qu'un hôpital public qui accueille tous les patients, en permanence, avec le souci de prendre en charge non une simple pathologie mais une personne.
La tentation est forte, déjà, de privilégier l'examen, l'acte invasif, bien rémunéré. Au détriment du conseil.
Je suis en décalage par rapport à certains de mes camarades car il ne me dérange nullement que l'on confie à des établissements privés des actes relevant du service public. La belle affaire ! La coopération public-privé est déjà la règle dans bien des domaines et elle n'est pas forcément fondée sur une logique de profit. Elle concrétise souvent une démarche citoyenne, voire militante, elle est le fruit du travail d'associations -je songe à l'accompagnement de la naissance ou à la prise en charge de patients en ALD, diabète, VIH... Je ne suis pas hostile à ce que des établissements privés soient admis par contrat à participer au service public. Mais nous attendons toujours de savoir qui fait quoi ou comment éviter les abus ! On n'ose pas exiger des établissements privés candidats un volume suffisant d'actes au tarif conventionné du secteur I, sans dépassement : cela n'est pas de bon augure pour le rapport de forces et le niveau d'exigence que l'on aura à l'égard des établissements privés. (Applaudissements sur la plupart des bancs socialistes)
Mme Marie-Thérèse Hermange. - Vous prétendez que l'hôpital accueille mal les patients. (A gauche, on crie à la caricature)
M. François Autain. - Il ne faut pas généraliser.
Mme Marie-Thérèse Hermange. - Mais l'hôpital n'a pas à s'excuser d'être ce qu'il est, l'un des plus hauts lieux de la médecine ; il accueille ceux dont on ne veut pas ailleurs. Il suffirait de tenir séance ce soir au service des urgences de Lariboisière pour nous en rendre compte.
M. Robert Hue. - Cette caricature n'est pas acceptable.
Mme Marie-Thérèse Hermange. - Sans une politique de dialogue et de restructuration, la maternité des Bleuets n'aurait jamais été sauvée. Mais il est vrai que des difficultés territoriales existent, c'est pourquoi le projet vise à coordonner tous les acteurs et tous les secteurs afin de mieux assurer, partout, les missions des établissements de santé. Je fais confiance à Mme la ministre et au dialogue en séance publique...
M. François Autain. - Pas nous !
Mme Marie-Thérèse Hermange. - ...pour améliorer le texte.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Les missions de service public seront désormais définies dans un seul article du code de la santé publique. Ces missions sont étendues en raison de la complexité du parcours de soins et de la diversité des modes de prise en charge. L'hospitalisation à domicile est reconnue comme une hospitalisation au sens strict, assortie de toutes les obligations qui s'y attachent. La durée du séjour n'est plus un critère d'appréciation significatif -une chirurgie en ambulatoire peut être lourde et de haute technicité. La coordination des soins est organisée, sous l'autorité des ARS. Les missions de service public peuvent être partagées entre tous les établissements ; ce sont les besoins de la population, non le statut des établissements, qui guideront les attributions. Les obligations de service public sont également rappelées : permanence des soins, service d'urgences, formation et recherche, accueil des personnes en situation précaire, soins palliatifs. En l'absence d'offre publique, ou pour mobiliser telle compétence de tel établissement privé, les agences pourront confier à des établissements privés des missions de service public. Et ce, afin d'assurer l'accès aux soins hospitaliers sur tout le territoire.
Certains parlent de démantèlement du service public. (On le confirme à gauche) Je vois, pour ma part, dans cette réforme un renforcement du droit de chaque patient à bénéficier d'un service public de qualité. Les contrats d'objectifs et de moyens signés entre l'ARS et l'établissement privé identifieront les missions confiées et les contreparties exigées, accueil de tous les patients, tarifs conventionnés sans dépassement, etc. La mission d'enseignement et de recherche sera exercée sous le contrôle des CHU dans le cadre d'une convention spécifique. La définition des missions, inscrite à l'article premier, esquisse ce que doit être une offre de soins complète. Quant à la dénomination d'Espic, le secteur l'a déjà intégrée.
M. François Autain. - Ce n'est pas grâce à vous.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Certains établissements privés exerçaient déjà de telles missions, je songe aux centres de lutte contre le cancer. Ils continueront, bien sûr ! Du reste, la place des centres de santé est redéfinie. Les 1 457 établissements existants sont une composante de l'offre de proximité. Mais leur cadre juridique est obsolète et il faut moderniser leur fonctionnement.
Votre commission a conduit un travail fructueux sur l'article premier, la rédaction a gagné en précision et en clarté. Je présenterai un amendement relatif à la participation des professionnels libéraux de l'établissement privé aux missions de service public confiées à ce dernier : je crois que votre commission y est favorable.
Un mot de l'hôpital de Juvisy : la décision de justice ne tient pas à un motif de fond et si la délibération relative au projet médical a été annulée, c'est que le maire s'est absenté, se faisant remplacer durant la séance. Mais l'hôpital de Juvisy a un rôle social indéniable. La volonté de renforcer certains services, urgences, soins de suite, a imposé d'en fermer d'autres, chirurgie et maternité. Le choix n'est pas celui de l'administration sanitaire mais de la communauté médicale. C'est qu'en 2007, seulement 3,3 % des séjours duraient plus de 48 heures ; et 80 % des parturientes de Juvisy recouraient à d'autres maternités, hôpital de Longjumeau, hôpital de Villeneuve-Saint-Georges. L'hôpital de Juvisy a préféré se recentrer sur des activités qui sont ses points forts. Du reste, les habitants de Juvisy avaient depuis longtemps voté... avec leurs pieds.
M. le président. - Amendement n°371, présenté par M. Autain et les membres du groupe CRC-SPG.
Supprimer cet article.
M. Guy Fischer. - Nous sommes hostiles à la privatisation du service public hospitalier. Avant la réécriture complète de l'article 13 par la commission, vous nous proposiez de privatiser les hôpitaux eux-mêmes : des groupements d'établissements publics, établissements privés non lucratifs et établissements commerciaux auraient pu recevoir la qualification d'établissements publics de santé. Sur ce point, vous avez reculé mais d'autres dispositions toutes aussi dangereuses sont maintenues, recours encouragé aux cliniciens hospitaliers, instauration d'éléments variables de rémunération et de critères quantitatifs, remplacement du conseil d'administration par un conseil de surveillance...
L'article premier confère des missions actuellement exercées par les services publics hospitaliers à des établissements commerciaux.
Cette mesure s'inspire des réformes menées par les gouvernements libéraux, tels ceux des États-Unis ou de l'Allemagne, où le mouvement de privatisation s'est considérablement amplifié depuis quelques années. Une réforme d'ampleur du financement des hôpitaux allemands, le Diagnosis Related Grouping... (sourires), très similaire à la tarification à l'activité, a aggravé les déficits de ces établissements, que les autorités fédérales ont ensuite privatisés. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, il y a de quoi s'inquiéter ! D'autant plus que l'ouverture du système hospitalier public allemand a surtout profité aux cliniques privées lucratives, passées de 14,8 % des établissements de santé en 1991 à 27 % en 2006, contre seulement 34 % aujourd'hui pour les établissements publics.
Cette privatisation, qui transfère des richesses collectives vers une richesse individuelle, se traduit par une dégradation de la qualité du système hospitalier due à la recherche de rentabilité. Dans les établissements privés commerciaux allemands, la masse salariale a diminué de 9 % alors que la charge de travail explosait. Quant à l'index de satisfaction des patients, il s'est clairement détérioré... Sur ce sujet, vous pouvez lire l'article très instructif du Dr Nicolas Daly-Schveitzer, cancérologue-radiothérapeute à l'institut Gustave Roussy.
La privatisation des missions de service public jouera contre l'intérêt des malades et de la santé publique. Cette logique politique de libéralisation vise à déstructurer notre modèle social et à marchandiser une économie qui reposait sur la solidarité, quitte à satisfaire les intérêts financiers des boursicoteurs contre ceux du plus grand nombre. Cet article constitue le socle de ce projet de loi : en l'adoptant, inéluctablement, d'ici une à deux décennies, la santé sera privatisée. Les grands groupes européens à capitaux étrangers sont en embuscade ; nous risquons d'ouvrir la porte à la Compagnie générale de santé.
M. Alain Milon, rapporteur. - Je rends hommage au groupe CRC pour sa logique et sa constance : il nous présentera un amendement de suppression pour chaque article. La commission des affaires sociales fera preuve d'une logique et d'une constance semblables en donnant à chaque fois un avis défavorable. D'autant qu'il ne s'agit pas, avec cet article, de privatiser l'hôpital public.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Même avis. Je me suis longuement expliquée lors des propos liminaires.
M. Guy Fischer. - Nous n'allons pas nous laisser abattre de cette façon ! (Sourires)
Depuis plus de 30 ans, les hôpitaux publics français s'inspirent du mode de gouvernance et de gestion des établissements privés lucratifs, obéissant ainsi aux directives données par un pouvoir politique toujours plus préoccupé par la rentabilité et la baisse des dépenses publiques. Ce mouvement s'inscrit dans le cadre des politiques libérales menées partout, et que Nicolas About et Alain Vasselle nous ont fait mieux connaître grâce à leur tour d'Europe des établissements de santé. Un principe nouveau a émergé, celui de la corporate gouvernance, ou l'art de gouverner les hôpitaux comme des entreprises. Ainsi, certains anciens établissements publics allemands ont pris le statut de sociétés. Partout en Europe, certains services sont externalisés, quand on ne confie pas entièrement au privé la gestion de l'hôpital.
Vous procédez comme en Allemagne, au Portugal ou en Angleterre en décentralisant les régimes de santé et les services publics qui les accompagnent. Ce transfert vous permet aussi de renforcer le rôle du Gouvernement dans la gestion des hôpitaux et dans la diminution des dépenses. Ainsi, la gestion des risques va être transférée aux directeurs des agences régionales de santé, c'est-à-dire à votre ministère : ce sera l'étatisation régionalisée de la santé ! Comme pour les universités, vous jouez la carte de l'autonomie, censée renforcer les établissements. Pour vous et vos amis, Angela Merkel, Silvio Berlusconi et consorts, la décentralisation politique doit s'accompagner de réformes du secteur public hospitalier et de son démantèlement.
Le processus se décompose en trois étapes. La première vise à développer l'autonomie, grâce à la tarification à l'activité notamment. La deuxième, que nous connaissons actuellement, consiste à transformer une administration en entreprise para-étatique. La Banque mondiale qualifie cette mutation de corporatization. Vous tentez de dissimuler la troisième étape, mais nos concitoyens ne sont pas dupes : il s'agit du transfert complet de la gestion de l'hôpital au secteur privé commercial. Voilà comment, pas après pas, vous privatisez l'hôpital public et confiez au privé commercial une partie de la santé de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs CRC)
M. Bernard Cazeau. - J'ai développé une argumentation similaire hier lors de la discussion générale, c'est-à-dire un scénario en trois actes : organisation des carences, constat du manque de fiabilité, puis réorientation des décisions et des financements vers le privé. Nous voterons cet amendement. (Applaudissements à gauche)
A la demande du groupe communiste, l'amendement n°371 est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 171 |
Pour l'adoption | 137 |
Contre | 203 |
Le Sénat n'a pas adopté.
M. le président. - Amendement n°185, présenté par M. Beaumont.
Compléter le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 6111-1 du code de la santé publique par une phrase ainsi rédigée :
Le domicile peut être un établissement avec hébergement régi par le code de l'action sociale et des familles.
M. René Beaumont. - Depuis 2007, les établissements de santé, au travers des structures d'hospitalisation à domicile et des équipes mobiles gériatriques ou de soins palliatifs, peuvent intervenir dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). Cet amendement leur permettrait d'intervenir dans les autres structures médico-sociales accueillant des personnes âgées. Il s'agit d'améliorer l'accès aux soins hospitaliers, notamment en zone périurbaine ou rurale.
M. Alain Milon, rapporteur. - Les structures d'hospitalisation à domicile doivent pouvoir intervenir partout où se trouvent les patients. Avis favorable.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Je remercie M. Beaumont pour cet excellent amendement auquel, avec Mme Létard, je suis très favorable. Beaucoup d'établissements attendaient cette précision.
M. Charles Revet. - Très bien.
M. Jacques Blanc. - Cela ne change en rien la notion de domicile de secours.
M. Nicolas About, président de la commission. - Bien sûr.
L'amendement n°185 est adopté.
M. Adrien Gouteyron. - Unanimité ! Bravo !
M. le président. - Amendement n°309, présenté par M. Le Menn et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Dans le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 6111-2 du code de la santé publique, après le mot :
santé
insérer les mots :
, dans le cadre d'une démarche partenariale impliquant l'ensemble des corps professionnels concernés par la démarche de soins,
M. Jacky Le Menn. - L'amélioration de la qualité et de la sécurité des soins est un enjeu de taille : les événements indésirables graves liés aux soins en cours d'hospitalisation sont estimés à 190 000 par an. La démarche doit associer tous les corps professionnels intervenant dans l'établissement.
M. Alain Milon, rapporteur. - Il est évident que les médecins n'assurent pas seuls l'amélioration de la qualité et de la sécurité des soins. L'article premier traite des missions qui incombent à l'établissement dans son ensemble. L'amendement est inutile : avis défavorable.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Cette disposition ne relève pas de la loi. Avis défavorable.
L'amendement n°309 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°310, présenté par M. Desessard et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Dans le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 6111-2 du code de la santé publique, après le mot :
soins
insérer les mots :
, de l'accueil, de l'information et du droit d'accès des patients à leur dossier médical,
Mme Dominique Voynet. - La lutte contre les maladies nosocomiales est certes fondamentale mais la sécurité des soins est supposée acquise. Le champ de la politique de qualité doit être étendu aux conditions d'accueil, à l'information et au droit d'accès des patients à leur dossier, qui, selon les associations d'usagers, est loin d'être évident.
L'encombrement des urgences, les diagnostics tardifs ont parfois des conséquences irréversibles. Il faut des réponses concrètes. Les patients peinent souvent à obtenir des renseignements sur les examens ou les traitements prescrits : la charge de travail du personnel hospitalier est telle qu'il lui est difficile de répondre de façon intelligible et non anxiogène. Les accidents médicaux qui ont entraîné des décès dans la région parisienne étaient liés à un manque d'attention dû à cette surcharge de travail. En réservant du temps à l'écoute et à la prise en compte des besoins des patients, en dégageant les moyens nécessaires, on réduira ce type de dysfonctionnements. La commission des relations avec les usagers ne remplace pas le législateur !
M. Alain Milon, rapporteur. - L'article 71-2 traite exclusivement de la politique d'amélioration de la qualité et de la sécurité des soins. L'accueil et le droit à l'information relèvent d'autres dispositions du code de santé publique. Avis défavorable.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Les intentions louables de Mme Voynet sont déjà reconnues dans les faits. Des dispositions complémentaires sont prévues plus loin dans le texte. Avis défavorable.
M. François Autain. - Cet amendement a toute sa place dans le code de santé publique. Pour obtenir leur dossier médical, les malades sont obligés de passer par la commission d'accès aux documents administratifs (Cada) ! La loi de 2002 sur les droits des malades fait obligation aux établissements d'améliorer l'information des patients.
M. Nicolas About, président de la commission. - Vous êtes donc satisfaits !
M. François Autain. - Mais elle n'est pas toujours respectée ! Il faut que tous les patients aient accès à leur dossier.
L'amendement n°310 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°586 rectifié bis, présenté par MM. Barbier, Collin, Baylet, Charasse et Chevènement, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Marsin, Mézard, Milhau, de Montesquiou, Plancade, Tropeano et Vall.
Dans le second alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 6111-2 du code de la santé publique, après le mot :
médicament
insérer les mots :
, en particulier des génériques,
M. Gilbert Barbier. - Le pharmacien de l'établissement fournit souvent un seul type de chaque molécule prescrite par les chefs de service, en fonction des contrats passés.
Mais cela influence parfois la suite du traitement.
Les médecins de ville sont encouragés à prescrire des génériques. Or, lorsqu'un patient quitte l'hôpital, l'ordonnance de sortie mentionne habituellement la spécialité administrée pendant le séjour hospitalier. Bien que Mme Voynet et moi-même soyons souvent d'avis contraires, nous partageons en l'occurrence la même opinion.
Le sous-amendement n°1215 n'est pas soutenu.
M. le président. - Amendement n°311, présenté par M. Desessard et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Dans le second alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 6111-2 du code de la santé publique, après le mot :
stériles
insérer les mots :
, notamment en faveur de l'usage des médicaments génériques,
Mme Dominique Voynet. - M. Barbier dévoile nos secrets ! (Sourires) Au cours d'une vie antérieure, nous avons travaillé ensemble dans un bloc opératoire, sans parler politique (rires), pour nous concentrer sur la qualité des soins.
Le coût des génériques est inférieur de 30 % à celui des spécialités identiques. Les hôpitaux ne sont pourtant pas incités à les prescrire, à l'heure où l'assurance maladie presse les médecins libéraux et les pharmaciens pour que leurs patients utilisent des génériques.
M. Nicolas About, président de la commission. - Les princeps reviennent parfois moins cher à l'hôpital.
Mme Dominique Voynet. - Il faut combattre la croyance encore trop répandue que les génériques sont d'une moindre efficacité.
Certaines dépenses hospitalières sont choquantes. Je pense notamment à l'utilisation en grand nombre de dispositifs stériles à usage unique dont les prix peuvent être extravagants : une sonde urinaire avec sac de recueil coûte plusieurs centaines d'euros ! Établir une relation plus serrée avec les fournisseurs permettrait des améliorations.
M. Alain Milon, rapporteur. - Les génériques étant des médicaments, la précision proposée est inutile.
En outre, l'administration de génériques n'apporterait pas nécessairement d'économie à l'hôpital, contrairement à ce qui se passe en ville.
M. Nicolas About, président de la commission. - Absolument !
M. Alain Milon, rapporteur. - Néanmoins, sensible aux intentions des auteurs, la majorité de la commission est favorable aux amendements.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Nul n'est plus attaché que moi aux médicaments génériques, évalués dans des conditions identiques à celles applicables aux princeps. Aucun médicament n'est mis sur le marché au sein de l'Union européenne sans avoir bénéficié d'une AMM délivrée par l'autorité compétente.
Le recours aux génériques est encouragé pour des raisons économiques.
M. François Autain. - Pas seulement !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Leur usage dans les hôpitaux est toutefois commandé par la politique d'achat des établissements, qui procèdent par appels d'offres. Dans ce cadre, les princeps peuvent être moins chers. Selon les cas, les pharmaciens hospitaliers achètent donc le générique ou le princeps, en fonction des ristournes accordées par les laboratoires.
A l'hôpital, nous devons surtout développer la prescription en dénomination commune internationale...
M. François Autain. - Très bien !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - ...en particulier pour les ordonnances de sortie et pour celles remises aux consultations externes.
Les textes d'application contiendront des dispositions favorisant un bon usage des prescriptions et la lutte contre les pathologies iatrogènes.
Le Gouvernement est donc défavorable aux deux amendements, dont les intentions sont au demeurant satisfaites.
Mme Dominique Voynet. - Nous sommes confrontés au syndrome du lait maternisé, dont les fabricants fournissent larga manu les maternités, en espérant que les mamans utiliseront le même produit après leur retour au domicile.
Le princeps peut être moins cher à l'hôpital, pas en officine.
M. Nicolas About, président de la commission. - Le pharmacien lui substituera le générique.
Mme Dominique Voynet. - Dans l'esprit des gens, l'usage du seul princeps à l'hôpital atteste sa supériorité. Il est donc souhaitable que l'hôpital prescrive des génériques.
M. Nicolas About, président de la commission. - Nul ne prétend le contraire !
M. François Autain. - La loi de financement pour 2008 impose théoriquement à tous les médecins de prescrire en dénomination commune internationale. La meilleure façon de l'obtenir consiste à intégrer cette pratique dans leur formation initiale.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Cela n'a rien à voir !
M. François Autain. - Je voterai l'amendement pour sa vertu pédagogique. Je ne comprends pas l'opposition du Gouvernement !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Je soutiens la prescription en dénomination commune internationale, mais cela n'a rien à voir avec l'amendement. D'ailleurs, les établissements retiennent le mieux-disant à l'issue d'un appel d'offres formulé en dénomination commune internationale.
Les pharmaciens d'officine substituent des génériques aux princeps dans 80 % des cas. C'est un vrai succès de notre politique !
L'amendement n°586 rectifié bis est adopté.
L'amendement n°311 est satisfait.
M. le président. - Amendement n°676, présenté par Mme Hermange.
Compléter le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 6111-2 du code de la santé publique par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les établissements de santé mettent à la disposition du public les résultats, publiés chaque année, des indicateurs de qualité et de sécurité des soins dans les conditions définies par arrêté du ministre chargé de la santé.
« Lorsque le directeur général de l'agence régionale de santé constate le non-respect des dispositions prévues à l'alinéa précédent, il peut prendre les mesures appropriées, notamment une modulation des dotations de financement mentionnées à l'article L. 162-22-13 du code de la sécurité sociale. »
Mme Marie-Thérèse Hermange. - Cet article porte aussi sur l'amélioration continue de la qualité des soins et de leur sécurité. Il est donc opportun que les établissements de santé portent à la connaissance du public les résultats annuels des indicateurs correspondants, qui doivent être identiques pour les établissements publics et privés.
M. le président. - Sous-amendement n°1222 à l'amendement n°676 de Mme Hermange, présenté par le Gouvernement.
Après les mots :
les mesures appropriées
rédiger comme suit la fin du dernier alinéa de l'amendement n°676 :
. Un décret détermine les conditions d'application des dispositions mentionnées à l'alinéa précédent. »
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Le Gouvernement est favorable à l'amendement mais la modulation financière n'est évidemment applicable qu'aux établissements de santé financés via les agences régionales de santé, ce qui n'est pas toujours le cas.
M. Alain Milon, rapporteur. - La commission n'a pas pu examiner le sous-amendement.
Elle estime par ailleurs que l'amendement devrait porter sur l'article 2, au sein des dispositions communes aux établissements publics et privés.
Ces dispositions s'intégreraient mal à l'article L. 6111-2. Le sous-amendement du Gouvernement ne change pas substantiellement l'avis de la commission.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - L'amendement renforce l'obligation de publier des indicateurs de qualité et de sécurité des soins, et précise les mesures que prend le directeur général de l'ARS en cas de non-respect de cette obligation. Il met en cohérence les dispositions applicables aux établissements publics et privés. Ces indicateurs ont le double avantage d'affermir la confiance de nos concitoyens dans leur système hospitalier et de mobiliser les professionnels de santé. Je comprends que la commission n'est pas opposée à ces dispositions, mais plutôt à leur intégration à cet endroit du texte ... (M. le rapporteur le confirme)
M. Nicolas About, président de la commission. - Elles figurent en effet à l'article 2.
Mme Marie-Thérèse Hermange. - Il paraît plus logique qu'elles figurent à l'article premier. Le sous-amendement du Gouvernement me convient.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Si la commission accepte mon sous-amendement à l'article 2...
M. Alain Milon, rapporteur. - Bien sûr !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Je retire mon sous-amendement.
Le sous-amendement n°1222 est retiré.
L'amendement n°676 est retiré.
M. le président. - Amendement n°372, présenté par M. Autain et les membres du groupe CRC-SPG.
Supprimer le III de cet article.
M. François Autain. - L'intitulé du chapitre n'est plus « Service public hospitalier » mais « Missions de service public des établissements de santé ».
M. Nicolas About, président de la commission. - C'est bien !
M. François Autain. - Le service public hospitalier disparaît purement et simplement.
M. Guy Fischer. - C'est très grave !
M. François Autain. - Il faut bien en mesurer les conséquences. Notre service public hospitalier est mixte depuis la loi du 31 décembre 1970. L'article L. 6112-2 du code de la santé publique dispose que ce service est assuré par les établissements publics de santé, les centres de lutte contre le cancer et les établissements de santé privés à but non lucratif qui répondent à certaines conditions légales. Tous les établissements sont tenus à des obligations spécifiques et communes, qui déclinent les principes de continuité, d'égalité et d'adaptation aux besoins des patients.
En dépit de vos dénégations, madame la ministre, votre réforme fait éclater ce cadre protecteur pour les malades ; les établissements privés commerciaux pourront choisir parmi les missions de service public celles qui présenteront un intérêt pour eux -inutile de préciser que cet intérêt a plus à voir avec la rentabilité et le profit qu'avec la santé publique.
Le remplacement du service public hospitalier par une série de missions de service public ne permettra pas d'offrir aux patients le service qu'ils sont en droit d'attendre. C'est une grave mutation de notre système de santé qui aura, dans les années qui viennent, des conséquences non moins graves sur la dispensation et la qualité des soins. Vous mettez en avant une meilleure orientation des patients ; mais le risque est grand de voir les établissements privés à but lucratif, chargés par exemple de la permanence des soins, faire le tri des malades, n'accepter que ceux qui sont rentables et orienter les autres vers les établissements publics.
Il n'est en outre pas acceptable que les misions d'enseignement et de recherche soient confiées à des établissements privés, quelles que soient les précautions qu'on prenne.
Nous aurions tout intérêt à conserver le service public hospitalier en l'état, dont les dysfonctionnements sont avant tout liés -ce que vous refusez de voir- à leur manque de financement. Vous préférez les appauvrir pour ensuite transférer au privé les missions qu'ils ne sont plus en mesure d'assurer...
M. Alain Milon, rapporteur. - Il n'y avait jusqu'à présent que des statuts ; il y aura désormais des missions. Avis défavorable.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Aujourd'hui, les établissements publics de santé, et eux seulement, ont l'obligation d'assurer toutes les missions de service public. Ce système a ses limites : il n'est pas possible de dispenser un établissement d'une mission particulière, même si un établissement proche la remplit ; pas plus d'en imposer une à un établissement privé alors qu'elle fait défaut sur un territoire. On marche sur la tête. Vous ne cessez de regretter, monsieur Autain, que les établissements privés ne remplissent pas les missions de service public qui pèsent tant sur les établissements publics ; la réforme a pour but de les faire participer.
Si notre modèle a fait la preuve, depuis plus d'un siècle, de sa souplesse et de son efficacité, c'est qu'on s'est moins focalisé sur le statut que sur la capacité à répondre aux besoins.
L'autorisation d'activité de soins donne le droit de prodiguer des soins et de percevoir un financement par l'assurance maladie ; elle confère aussi des devoirs. La mission de service public devra être assurée dans le cadre des tarifs de la sécurité sociale, sans dépassement d'honoraires ; tous les patients devront être accueillis ou orientés...
M. François Autain. - Voilà !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Toutes ces obligations s'imposeront aux médecins libéraux qui exercent dans les cliniques -ils en sont d'accord : c'est une question de déontologie.
Je veux rassurer ceux qui s'inquiètent de voir l'hôpital public perdre son âme et ses missions de service public. Tous les hôpitaux continueront à exercer des missions de service public, et il n'est pas question que tel ou tel établissement choisisse celles qu'il veut assurer et celles dont il ne veut pas.
M. François Autain. - Mais si !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - C'est le directeur général de l'ARS qui décidera en fonction des besoins.
M. François Autain. - Nous aurons bien un système à la carte !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Il n'y aura pas deux régimes d'obligations, les permanentes et les autres... Vous devriez être les premiers à accepter cette réforme !
Si ces missions de service public sont réellement coûteuses pour l'hôpital public et peu rémunératrices, les établissements privés ne vont peut-être pas se précipiter !
Cet outil juridique est une chance et je vous invite surtout à ne pas le supprimer.
M. François Autain. - Je n'ai pas dit que les missions de service public pesaient sur l'hôpital public mais que vous ne lui donnez pas les moyens d'exercer ses missions et c'est pourquoi elles vont progressivement être transférées aux cliniques à but lucratif. C'est donc vous qui organisez le démantèlement du service public en l'asphyxiant financièrement ! Il aurait suffi de mieux organiser la médecine générale, mais vous vous y refusez. Depuis 2002, la mission de service public de la permanence des soins est soumise au libre choix des médecins. Il est très difficile d'organiser une permanence des soins lorsqu'on la rend facultative et c'est ce qui explique que, depuis lors, les urgences des hôpitaux sont submergées. Votre politique est donc directement responsable des problèmes actuels rencontrés par l'hôpital public.
L'amendement n°372 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°289, présenté par M. Le Menn et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Rédiger comme suit le texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-1 du code de la santé publique :
« Art. L. 6112-1. - Les établissements de santé peuvent être appelés à assurer complètement ou à participer à des missions de service public.
« I. - Les établissements de santé qui s'engagent à assurer complètement ou à participer à des missions de service public doivent obligatoirement exercer les missions suivantes :
« 1° La permanence des soins ;
« 2° La lutte contre l'exclusion sociale, en relation avec les autres professions et institutions compétentes en ce domaine, ainsi que les associations qui oeuvrent dans le domaine de l'insertion ;
« 3° Les actions d'éducation et de prévention pour la santé et leur coordination ;
« 4° Les actions de santé publique ;
« 5° la prise en charge des soins palliatifs.
« II. - Ils peuvent en outre exercer une ou plusieurs des missions de service public suivantes :
« 1° La formation continue des praticiens hospitaliers et non hospitaliers ;
« 2° La recherche ;
« 3° L'aide médicale urgente, conjointement avec les praticiens et les autres professionnels de santé, personnes et services concernés ;
« 4° La prise en charge des personnes hospitalisées sans leur consentement ;
« 5° Les soins dispensés aux détenus en milieu pénitentiaire, dans des conditions définies par décret ;
« 6° Les soins dispensés aux personnes retenues en application de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
« 7° Les soins dispensés aux personnes retenues dans les centres socio-médico-judiciaires de sûreté.
M. Jacky Le Menn. - Avec cet article, on ne parle plus en termes de statut mais de missions. Les missions spécifiques du service public seront assurées par tous les établissements de soin. Quoi que vous disiez, les établissements privés à but lucratif pourront choisir les missions qui leur conviennent.
Nous proposons donc de prévoir un bloc de missions de services publics que devront obligatoirement assurer les établissements de santé retenus par le directeur de l'ARS. Le service public a besoin de la participation de tous aux missions essentielles qui sont rappelées dans cet amendement.
M. le président. - Amendement n°290, présenté par M. Le Menn et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Rédiger comme suit le premier alinéa du texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-1 du code de la santé publique :
« Les établissements publics de santé et les établissements de santé privés d'intérêt collectif sont appelés prioritairement à mener ou à participer à une ou plusieurs des missions de service public suivantes :
M. Jean-Pierre Godefroy. - La grande nouveauté de cet article, c'est qu'il n'y a plus de distinction entre les établissements publics et privés. Tout établissement de santé est désormais susceptible d'être concerné par les missions de service public qui ne sont plus l'apanage du secteur non lucratif. L'ironie de l'histoire, c'est que le privé non lucratif considéré comme un modèle par la commission Larcher a bien failli voir son statut remis en cause avant que l'Assemblée nationale ne décide de prendre en compte sa spécificité en créant une nouvelle catégorie : les établissements de santé privés d'intérêt collectif (Espic).
Nous précisons donc que les établissements de santé publique et les Espic sont sollicités en priorité.
M. le président. - Amendement n°639 rectifié, présenté par MM. Collin, Baylet, Charasse, Chevènement et Fortassin, Mme Laborde et MM. Marsin, Mézard, Milhau, Plancade et Tropeano.
Dans le premier alinéa du texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-1 du code de la santé publique, après les mots :
établissements de santé
insérer les mots :
, prioritairement les établissements publics de santé et les établissements de santé privés d'intérêt collectif,
M. Jean-Pierre Chevènement. - Vous avez rappelé, madame la ministre, que vous êtes attachée aux missions de service public, mais il y a aussi les statuts. A l'éducation nationale, les établissements privés sont associés par contrat à une mission de service public ou ils ne le sont pas. Il convient donc de marquer la priorité donnée au service public hospitalier ainsi qu'aux établissements de santé privés d'intérêt collectif
M. le président. - Amendement n°574, présenté par M. Autain et les membres du groupe CRC-SPG.
I. - Au début du 3° du texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-1 du code de la santé publique, remplacer les mots :
La formation continue
par les mots :
Le développement professionnel continu
II. - Dans le 4° du même texte, remplacer le mot :
continue
par les mots :
le développement professionnel continu
M. François Autain. - Amendement rédactionnel : il s'agit en effet de reprendre la modification introduite par l'Assemblée nationale sur recommandation de la Haute autorité de santé.
M. le président. - Amendement n°292, présenté par M. Desessard et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après le 6° du texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-1 du code de la santé publique, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Les actions de prospective et de prévention en matière de santé environnementale ;
Mme Dominique Voynet. - Il convient de préciser les conditions dans lesquelles les établissements de santé peuvent être appelés à assurer une mission de service public négligée dans notre pays : la santé environnementale. Les conditions de vie sociale et familiale ainsi que la qualité du cadre de vie jouent un rôle déterminant sur la santé. Le corps humain ne fonctionne pas comme une boîte étanche : sa santé dépend des comportements alimentaires, sportifs, mais aussi des conditions de travail, de la précarité, des expositions à des nuisances de toutes sortes. A l'hôpital, le corps médical, recevant des patients qui souffrent de maladies chroniques, peut repérer ce qui, dans l'environnement du patient, peut être le facteur déclenchant de sa maladie. La santé environnementale est une science de terrain et elle s'appuie sur des constatations empiriques, comme lorsque des salariés ou des médecins du travail constatent un agrégat de cancers. En mettant en place des mesures simples de dépistage et de prévention, on pourrait réduire considérablement les risques : il aura ainsi fallu 30 ans à l'usine de vitamines pour animaux, Adisseo, anciennement Rhône-Poulenc, à Commentry, dans l'Allier pour s'inquiéter de la déclaration de 25 cancers du rein dans le même atelier. Le traitement des cancers coûte chaque année 15 milliards à l'assurance maladie. Avec cet amendement, nous pourrions réaliser des économies considérables et épargner de nombreuses vies.
M. le président. - Amendement n°668 rectifié, présenté par Mme Hermange et M. Gilles.
Compléter le 9° du texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-1 du code de la santé publique par les mots :
, notamment la collecte des tissus, cellules et produits du corps humain au sens de l'article L. 1245-2
Mme Marie-Thérèse Hermange. - Je sais que les « notamment » ne vous plaisent guère, madame la ministre. Il nous semble malgré tout important de mettre l'accent sur la collecte des tissus, des cellules et des produits du corps humain. La France se situe au treizième rang mondial, derrière la Tchécoslovaquie, en cette matière. Nous proposons donc de souligner l'importance d'une telle politique, faute de quoi nous risquons d'être confrontés à des pratiques mercantiles.
M. le président. - Amendement n°291, présenté par M. Le Menn et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Compléter le 9° du texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-1 du code de la santé publique par les mots :
, celles-ci portant sur l'éducation thérapeutique du patient et de ses proches, son orientation dans le système de soins et le secteur médico-social mais aussi sur l'éducation et la prévention pour la santé en relation avec les membres des professions de santé exerçant en pratique de ville et les établissements médico-sociaux ; elles assurent une prise en charge globale du patient seul, ou en coopération
M. Jacky Le Menn. - Parmi les treize missions de service public, figurent les actions de santé publique. Le but de cet amendement est de préciser leur contenu.
M. le président. - Amendement n°159, présenté par M. Gouteyron.
Après le 9° du texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-1 du code de la santé publique, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ...° La participation à des filières de soins et d'accompagnement ou à des dispositifs de coordination des prises en charge qui articulent les interventions de la médecine ambulatoire, les établissements et services de santé et médico-sociaux, en direction des personnes rencontrant des difficultés dans l'accès à des soins adaptés et aux différentes formes d'accompagnement médico-social, notamment les personnes âgées ou les personnes handicapées ;
M. Adrien Gouteyron. - C'est un heureux hasard qui me fait me rencontrer avec nos collègues du groupe CRC... Je veux exprimer la nécessité, dans le cadre de la liste des missions de service public, de ne pas exclure des établissements qui participent aujourd'hui au service public hospitalier pour des activités de soins de suite et de réadaptation ou qui déploient une activité psychiatrie sans habilitation à dispenser des soins sous contrainte. L'amendement sera utile aux établissements publics comme aux établissements privés d'intérêt collectif grâce à la constitution de filières de soins sanitaires et médico-sociales pour les personnes âgées ou encore pour les traumatisés crâniens. Cela contribuerait à développer une offre décloisonnée correspondant à la politique publique prônée par les administrations centrales et déployées par les agences régionales. Il s'agit donc de les structurer et les encourager en réorganisant l'offre.
M. le président. - Amendement identique n°374, présenté par M. Autain et les membres du groupe CRC-SPG.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - La définition des missions auxquelles sont appelés à participer les établissements publics comme des établissements privés d'intérêt collectif est la conséquence de la disparition de la notion de service public hospitalier. Nous nous opposons aux restrictions conséquentes. Notre amendement vise en outre à réparer un oubli fâcheux. Certes, on nous annonce un projet sur la dépendance, mais est-il besoin d'attendre pour considérer que sa prise en charge relève du service public ? Cela évitera que des établissements d'intérêt collectif, exerçant des activités de soins de suite et de réadaptation ou déployant une activité de psychiatrie sans habilitation à dispenser des soins sous contrainte, soient privés de financements parce qu'ils ne contribuent plus au service public. Notre amendement garantit donc la continuité de l'exercice de ces missions.
M. le président. - Amendement n°581 rectifié quater, présenté par M. Etienne, Mme Desmarescaux, M. Thiollière, Mmes Descamps, Rozier, Troendle, Le Texier, Hermange, Férat et Laborde, M. Lefèvre, Mmes Klès, Jarraud-Vergnolle et Blondin et M. Desessard.
Compléter le texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-1 du code de la santé publique par un alinéa ainsi rédigé :
« ...° L'accueil des jeunes de moins de vingt-cinq ans en situation de mal-être d'origine organique ou fonctionnelle.
Mme Janine Rozier. - De nombreux membres de la nouvelle mission commune d'information sur la politique en faveur des jeunes ont signé cet amendement parce que cette population, parfois en déshérence et cherchant une prise en charge adaptée, mériterait une réponse plus spécifique et plus globale, comme on l'a expérimentée avec les points d'accueil Jeunes.
M. le président. - Amendement n°293, présenté par M. Le Menn et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Compléter le texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-1 du code de la santé publique par un alinéa ainsi rédigé :
« Sur chaque territoire de santé, les missions de service public mentionnées aux 1°, 6°, 8° et 9° sont dispensées à un niveau de proximité.
M. Jacky Le Menn. - Nous voulons préciser le périmètre d'un service public hospitalier de proximité afin que la loi fixe le cadre dans lequel agira l'agence régionale et précise, pour des territoires intermédiaires, les missions consubstantielles aux hôpitaux de proximité.
M. le président. - Amendement identique n°587 rectifié, présenté par MM. Barbier, Collin, Baylet et Charasse, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Marsin, Mézard, Milhau, de Montesquiou, Plancade, Tropeano et Vall.
M. Gilbert Barbier. - Dans cette longue énumération, certaines missions méritent d'être exercées de manière rapprochée et, dans un souci d'efficacité, ce niveau de proximité vaut particulièrement pour les quatre objectifs que nous visons.
M. le président. - Amendement n°375 rectifié, présenté par M. Autain et les membres du groupe CRC-SPG.
Compléter le texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-1 du code de la santé publique par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Lorsqu'une mission de service public n'est pas assurée sur un territoire de santé par un établissement public de santé ou un établissement de santé privé d'intérêt collectif, le directeur général de l'agence régionale de santé, sans préjudice des compétences réservées par la loi à d'autres autorités administratives, désigne les personnes physiques ou morales qui en sont chargées, après analyse :
« a) Des besoins et des flux de la population ;
« b) De l'organisation de l'offre de soins existante ;
« c) Des ressources humaines médicales et soignantes disponibles ;
« d) Des caractéristiques géographiques du territoire.
Mme Mireille Schurch. - La commission n'a pas retenu notre amendement au motif qu'il ne relève pas de la loi. Nous pensons au contraire qu'il faut débattre sur le fond afin que l'intérêt général soit équitablement assuré, grâce à des règles claires et identiques sur tout le territoire. Le Gouvernement, qui appelle les établissements publics à la maîtrise des dépenses, serait bien inspiré de vérifier les conditions d'intervention des établissements privés.
M. Alain Milon, rapporteur. - La commission est opposée au principe d'un bloc de missions de service public qu'un établissement public ne pourrait exercer en totalité ; pourquoi interdire à un établissement public d'accueillir un étudiant ou de participer à la formation du personnel paramédical ? Avis défavorable à l'amendement n°289.
L'amendement n°290 n'est pas conforme à la position de la commission non plus qu'à l'esprit du texte. S'il y a carence, on confiera la mission à l'établissement le plus apte, quel que soit son statut. Même avis défavorable à l'amendement n°639 rectifié.
L'amendement n°574 opère une coordination utile, avis favorable.
Les thèmes de l'amendement n°292 sont inclus aux 6e et 9e ; les détailler à l'infini n'ajouterait rien mais nous exposerait aux inconvénients des lois trop bavardes, qui font penser qu'on a exclu certains cas.
L'amendement n°668 rectifié aborde un sujet important mais ponctuel. Qu'il ne soit pas nécessaire de le mentionner ici n'empêche pas qu'il faille développer la collecte de tissus et de produits du corps humains tels que les cellules souches.
Mais il ne serait pas raisonnable de l'inscrire ici dans la loi. A regret, donc, avis défavorable. Défavorable aussi à l'amendement n°291 : outre qu'il me semble de nature réglementaire, une définition par énumération de l'expression de « santé publique » pourrait toujours être jugée incomplète. L'amendement n°159 est satisfait par l'article L. 61-11-1. Retrait ou rejet. Même diagnostic sur l'amendement identique n°374. L'amendement n°581 rectifié quater fait une nouvelle mission de ce qui relève de plusieurs missions de service public. Le premier recours pour les jeunes concernés est dans la consultation prévue à l'article 18. Si nous définissions ici une mission si spécifique, il faudrait en prévoir bien d'autres, qui justifieraient tout autant une prise en charge particulière. Retrait ou rejet. L'amendement n°293, outre qu'il ne précise pas ce qu'il faut entendre par proximité, n'ajoute rien à ce que prévoit déjà l'article 26. Défavorable. Même avis sur l'amendement identique n°587 rectifié. Les dispositions qu'entend introduire l'amendement n°375 rectifié sont de nature réglementaire. Il est bien évident, en outre, que l'agence régionale de santé se fondera sur les besoins de la population, l'offre existante, etc. Défavorable.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Je souscris entièrement aux remarquables explications du rapporteur et suis son avis, y compris sur l'amendement de M. Autain.
L'amendement n°289 n'est pas adopté.
M. Jean-Pierre Godefroy. - Votre argumentaire sur notre amendement n°290 ne nous a pas convaincus, monsieur le rapporteur. Nous tentions précisément d'aller dans le sens du texte. Dès lors qu'existe un service public ou d'intérêt collectif, il est normal qu'il soit saisi en priorité. Ce n'est que s'il n'existe pas d'autre possibilité qu'une convention peut être passée avec le privé.
Mais peut-être y a-t-il derrière ce texte la volonté de déshabiller le service public pour habiller, magnifiquement, le privé ? (Mme Dominique Voynet applaudit). Sinon, comment expliquer que vous vous refusiez à reconnaître au service public priorité pour assurer des missions de service public ? Nous demandons donc un scrutin public sur cet amendement.
A la demande du groupe socialiste, l'amendement n°290 est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 171 |
Pour l'adoption | 153 |
Contre | 188 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n°639 rectifié n'est pas adopté.
L'amendement n°574 est adopté.
L'amendement n°292 n'est pas adopté.
Mme Marie-Thérèse Hermange. - Je retire l'amendement n°668 rectifié, en remerciant le rapporteur de ses observations.
L'amendement n°668 rectifié est retiré.
L'amendement n°291 n'est pas adopté.
M. Adrien Gouteyron. - Je retire mon amendement n°159, non point que je considère qu'il ne soit pas fondé, mais parce qu'il n'a plus de raison d'être. Le rapporteur m'assure que l'objectif est déjà prévu dans les textes, je me fie à sa parole.
L'amendement n°159 est retiré.
M. François Autain. - En ce qui me concerne, je préfère vérifier. (Exclamations à droite) Je maintiens le mien.
M. Dominique Braye. - Mauvais esprit !
M. François Autain. - Non, mais le rapporteur peut se tromper. Cela lui est déjà arrivé.
M. Paul Blanc. - Je me range à l'avis de M. Gouteyron. La notion de filière de soins est essentielle. Dans le cas, par exemple, des accidents vasculaires cérébraux, le diagnostic doit être le plus précoce possible. Le service d'urgence doit différencier très vite une hémorragie cérébrale d'une thrombose. Suit une prise en charge jusqu'aux soins de suite qui exige la collaboration du public et du privé. Les assurances que nous a données le rapporteur me satisfont (M. Jacques Blanc acquiesce)
M. Alain Milon, rapporteur. - Pour compléter votre information, monsieur Autain, je vous invite à vous reporter au troisième alinéa de l'article, qui précise bien que les établissements de santé « participent à la coordination des soins en relation avec les membres des professions de santé exerçant en pratique de ville et les établissements et services médico-sociaux, dans le cadre défini par l'agence régionale de santé ».
L'amendement n°374 n'est pas adopté.
Mme Janine Rozier. - L'amendement n°581 rectifié quater a mis en lumière les problèmes identifiés par la mission jeunes. Après les explications fournies par M. le rapporteur, je le retire.
Mme Raymonde Le Texier. - Je le reprends. Son adoption serait une bonne chose, d'autant que, malgré le travail de la commission, malgré la pression de la rue, le texte contient bien des dispositions dangereuses. Il marque l'avènement de l'hôpital entreprise ; la finalité économique l'emportera sur l'intérêt des patients. L'amendement a été présenté au nom de la mission et je le reprends, car nos auditions et nos échanges ont révélé les carences immenses de l'accès des jeunes aux soins. Ces lacunes sont liées au manque de financements, mais aussi à l'absence de structures adaptées, au-delà d'initiatives locales. Il faut généraliser les accueils pour les jeunes. L'hôpital est le lieu approprié, car les jeunes refusent souvent de parler de leurs problèmes avec le médecin de famille.
La formulation est volontairement générale, afin de couvrir le champ le plus large. Mais il faut des moyens ! Si le Gouvernement est enfin décidé à dépasser les annonces d'affichage et les arguments infantiles -« ce n'est pas ma faute, mais celle de la crise »- il serait bien inspiré de prévoir des crédits supplémentaires : je demande à Mme la ministre de s'engager à les inscrire dans la prochaine loi de financement de la sécurité sociale. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs socialistes et CRC-SPG)
Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°581 rectifié quinquies, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.
Les amendements identiques n°s293 et 587 rectifié ne sont pas adoptés, non plus que le n°375 rectifié.
La séance est suspendue à 19 h 40.
présidence de M. Jean-Léonce Dupont,vice-président
La séance reprend à 21 h 45.
Mise au point au sujet d'un vote
Mme Françoise Laborde. - Ce matin, lors du scrutin public sur l'ensemble du projet de loi favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet, j'ai commis, troublée, une erreur matérielle que je ne m'explique pas... Résultat, MM. Collin et Fortassin ainsi que Mme Escoffier ont été considérés comme n'ayant pas pris part au vote alors qu'ils entendaient voter pour. Le groupe RDSE a donc voté comme suit : 14 pour, 2 contre et 1 abstention.
M. le président. - Je vous en donne acte. Cette mise au point figurera au Journal officiel ainsi qu'à la suite de l'analyse politique du scrutin.
Hôpital, patients, santé et territoires (Urgence-Suite)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires.
Discussion des articles (Suite)
M. le président. - Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de l'article premier, à l'amendement n°376.
Article premier (Suite)
M. le président. - Amendement n°376, présenté par M. Autain et les membres du groupe CRC-SPG.
Rédiger comme suit les quatre premiers alinéas du texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-2 du code de la santé publique :
« Les missions du service public hospitalier sont assurées en fonction des besoins de la population appréciés dans le schéma régional d'organisation des soins par :
« - les établissements de santé publics et privés d'intérêt collectif ;
« - l'Institution Nationale des Invalides dans le cadre de ses missions définies au 2° de l'article L. 529 du code de pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
« - les établissements de santé privés en cas de carence dans les zones de sous densité d'offres de soins ;
Mme Annie David. - Aux termes de cet article premier, les groupements de coopération sanitaire, les GCS, créés à l'article 13, peuvent se voir confier des missions de service public. Or ces groupes peuvent être composés d'établissements de santé privés commerciaux qui poursuivent des buts contraires à l'intérêt général.
Au-delà de cette position de principe, soulignons une difficulté juridique qui devrait vous alerter. La commission a modifié la rédaction de l'article 13 pour transformer les GCS, initialement groupes de soins, en groupes de moyens ; modification que nous trouvons opportune, quoique pour d'autres raisons que le rapporteur. Or un groupe de moyens peut-il remplir une mission de service public ? Mieux vaut donc, par cohérence, supprimer la référence aux GCS.
Enfin, nous précisons que le transfert de missions de service public au secteur privé ne doit intervenir qu'en cas de carence afin d'éviter que le directeur de l'ARS, dont la première mission sera de réduire les dépenses, (Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre, le conteste) ne favorise le secteur privé lucratif comme le fait craindre l'exemple allemand développé tout à l'heure par M. Fischer. De fait, ce système est connu pour facturer sous forme de dépassements d'honoraires ce qu'il fait économiser à la collectivité.
M. le président. - Amendement n°294, présenté par M. Le Menn et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après le premier alinéa du texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-2 du code de la santé publique, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« - les communautés hospitalières de territoires ;
M. Jacky Le Menn. - Dans un souci d'exhaustivité, nous souhaitons préciser que les communautés hospitalières de territoire, définies comme des établissements de santé à l'article L. 6141-2, peuvent exercer des missions de service public.
M. Alain Milon, rapporteur. - Concernant l'amendement n°376, je note que sa rédaction ne correspond pas à l'intention de ses auteurs puisque vous voulez supprimer la référence aux GCS au quatrième alinéa tout en la maintenant au cinquième... (Sourires) En outre, le principe défendu n'est pas cohérent avec le texte voté par la commission. Avis défavorable. En ce qui concerne l'amendement n°294, les communautés hospitalières de territoire, dans le texte de la commission comme dans le projet de loi initial, n'ont pas de personnalité morale distincte des éléments qui les composent ; éléments qui sont, eux, bénéficiaires du transfert de la mission de service public. La précision est donc inutile : avis défavorable.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Même avis.
L'amendement n°376 n'est pas adopté.
M. Jacky Le Menn. - Puisque ces communautés n'ont pas la personnalité morale, je m'incline.
L'amendement n°294 est retiré.
M. le président. - Amendement n°295, présenté par M. Le Menn et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Dans le huitième alinéa du texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-2 du code de la santé publique, après les mots :
territoire de santé
insérer les mots :
par un établissement public de santé ou un établissement de santé privé d'intérêt collectif
M. Jacky Le Menn. - Nous précisons que le directeur de l'ARS ne pourra confier une mission de service public à un établissement privé commercial qu'en cas de carence du service public hospitalier et des établissements privés à but non lucratif.
M. le président. - Amendement identique n°588 rectifié bis, présenté par MM. Collin, Baylet, Charasse et Chevènement, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Marsin, Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano et Vall.
Dans le huitième alinéa du texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-2 du code de la santé publique, après les mots :
territoire de santé
insérer les mots :
par un établissement public de santé ou par un établissement de santé privé d'intérêt collectif
Mme Françoise Laborde. - J'y insiste, les établissements publics et privés d'intérêt collectif doivent vraiment apparaître en premier.
M. Alain Milon, rapporteur. - L'amendement n°295 fait référence à une carence, la précision est inutile. Avis défavorable, comme à l'amendement n°588 rectifié bis.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Même avis.
L'amendement n°295 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°588 rectifié bis.
M. le président. - Amendement n°296, présenté par M. Le Menn et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
I. - Compléter le huitième alinéa du texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-2 du code de la santé publique par les mots :
après analyse :
II. - Après ce même alinéa, insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
« - des besoins et des flux de la population ;
« - de l'organisation de l'offre de soins existante ;
« - des ressources humaines médicales et soignantes disponibles ;
« - des caractéristiques géographiques du territoire et notamment les temps d'accès.
M. Jacky Le Menn. - Les établissements privés à but lucratif ne doivent exercer des missions de service public qu'en cas de carence. D'où cet amendement qui précise les conditions du transfert.
M. Alain Milon, rapporteur. - Cet amendement poursuit le même but que le n°375, donc même avis défavorable.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Également.
L'amendement n°296 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°108 rectifié, présenté par MM. Gilles, Pointereau et Leclerc, Mme Goy-Chavent, M. Vasselle, Mlle Joissains et Mme Bruguière.
Dans le neuvième alinéa du texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-2 du code de la santé publique, remplacer les mots :
le cas échéant
par les mots :
chaque fois qu'il y a lieu
M. Bruno Gilles. - La formulation retenue est ambiguë car elle laisse entendre que la compensation versée pour l'exercice d'une mission de service public serait aléatoire, voire dérogatoire. Pour différencier les cas où la prise en charge des missions est déjà intégrée, notamment dans la T2A, et ne nécessite pas de nouvelles compensations financières des autres cas, je propose de remplacer « le cas échéant » par « chaque fois qu'il y a lieu ».
M. Nicolas About, président de la commission. - Bref, vous expliquez ce que veut dire « le cas échéant ».
M. Alain Milon, rapporteur. - Il y aura compensation quand il y aura quelque chose à compenser. Le texte proposé n'a rien d'ambigu. Retrait ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Je comprends bien cet amendement mais la formulation proposée risque d'entraîner un financement automatique, alors qu'il s'agit seulement de financer les missions qui ne sont pas comprises dans le financement de base. La formule « le cas échéant » renvoie à une décision du directeur de l'ARS et limite donc mieux l'ambiguïté.
L'amendement n°108 rectifié bis est retiré.
M. le président. - Amendement n°589 rectifié, présenté par MM. Barbier, Collin, Baylet et Chevènement, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Marsin, Mézard, Milhau, de Montesquiou, Plancade, Tropeano et Vall.
Compléter l'avant-dernier alinéa du texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-2 du code de la santé publique par une phrase ainsi rédigée :
Elle fait l'objet au préalable d'une concertation avec les praticiens de l'établissement.
M. Gilbert Barbier. - Il est difficile de signer un contrat si ceux qui devront l'appliquer ne sont pas consultés.
M. Alain Milon, rapporteur. - Nous n'avons pas d'objections de principe à la concertation mais celle-ci ne doit pas être obligatoire ; mieux vaut donc ne pas la mettre dans la loi. Sagesse.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - La concertation est tellement indispensable que, pour les établissements privés, cet amendement est satisfait par le paragraphe 4 de l'article 2 avec la consultation de la conférence médicale et que, pour les établissements publics, cette disposition ne relève pas de la loi mais du pouvoir réglementaire, et je m'engage à publier un texte en ce sens. L'amendement est donc satisfait et peut être retiré.
M. Gilbert Barbier. - La précision me paraît cependant utile pour rassurer le monde médical. Je maintiens donc mon amendement.
L'amendement n°589 rectifié est adopté.
M. le président. - Amendement n°379, présenté par M. Autain et les membres du groupe CRC-SPG.
Dans le premier alinéa du texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-3 du code de la santé publique, remplacer les mots :
L'établissement de santé, ou toute personne chargée d'une ou plusieurs des missions de service public définies à l'article L. 6112-1,
par les mots :
Le service public hospitalier
M. François Autain. - C'est un amendement de cohérence avec un amendement qui n'a pas été adopté. La tâche du rapporteur va être simple... (Sourires)
M. Alain Milon, rapporteur. - Je ne suis pas persuadé que ce soit un amendement de cohérence : comment un établissement privé pourrait-il recevoir une mission de service public sans en assumer en même temps les obligations ?
M. Guy Fischer. - Il veut nous faire la leçon !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Cet amendement m'étonne beaucoup : vous supprimez une disposition précisant que tous les établissements respectent les conditions d'accueil des patients. Vous vous attaquez à ce que vous voulez défendre !
M. François Autain. - Ce que nous voulons dire, nous l'avons déjà dit et je ne pense pas nécessaire de le redire. (Sourires)
L'amendement n°379 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°297, présenté par M. Le Menn et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Compléter le premier alinéa du texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-3 du code de la santé publique par les mots :
, y compris en hospitalisation à domicile
M. Jacky Le Menn. - L'hospitalisation à domicile correspond à une demande croissante des usagers, en particulier dans la cancérologie, les soins palliatifs, les techniques de nutrition parentérale, l'assistance respiratoire, les épisodes aigus chez les personnes âgées dépendantes. Or certaines techniques, comme des injections pour lutter contre la douleur, ne sont pas ou pas assez pratiquées car « le domicile » n'est pas considéré comme une extension du secteur de soins hospitaliers pour la sécurité.
L'activité de soins en HAD doit être considérée comme une activité de soins hospitaliers à partir du moment où une démarche de qualité et de sécurité est garantie. En intégrant l'hospitalisation au domicile à l'établissement public de santé, on s'assure que les patients ainsi pris en charge pourront bénéficier des soins et des techniques adaptées à leurs besoins, avec les mêmes garanties de qualité et de sécurité qu'en hospitalisation traditionnelle.
M. le président. - Amendement identique n°590 rectifié bis, présenté par MM. Collin, Baylet, Charasse et Chevènement, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Marsin, Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano et Vall.
Mme Françoise Laborde. - Cet amendement vise à intégrer explicitement l'hospitalisation à domicile à l'établissement public de santé afin que les patients ainsi pris en charge bénéficient des mêmes garanties de qualité et de sécurité dan les soins que les patients en hospitalisation traditionnelle.
M. Alain Milon, rapporteur. - Dès lors qu'un établissement de santé est chargé d'une mission de service public, celle-ci s'impose à lui quelle que soit la manière dont les soins sont dispensés : l'article L. 6111-1 n'introduit aucune distinction. L'amendement est donc inutile.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Cet amendement aurait été compréhensible du temps où la HAD n'était qu'une alternative à l'hôpital. Mais un des acquis essentiels de cet article est de la considérer comme une hospitalisation en toute rigueur. L'amendement est donc satisfait et peut être retiré.
Les amendements identiques n°s297 et 590 rectifié bis sont retirés.
M. le président. - Amendement n°591 rectifié, présenté par MM. Barbier, Collin, Baylet et Charasse, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Marsin, Mézard, Milhau, de Montesquiou, Plancade, Tropeano et Vall.
A la fin du deuxième alinéa (1°) du texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-3 du code de la santé publique, remplacer les mots :
de qualité
par les mots :
performants et sûrs
M. Gilbert Barbier. - J'apporte une petite précision. Si l'amendement n°206 rectifié est défendu, je retirerai peut-être le mien à son profit.
M. Alain Milon, rapporteur. - Je ne vois pas en quoi ce serait une précision. Défavorable.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Une des missions des établissements de santé est précisément l'amélioration continue de la qualité des soins, et celle-ci est déjà définie dans le projet de loi.
L'amendement n°591 rectifié est retiré.
M. le président. - Amendement n°206 rectifié, présenté par Mmes Morin-Desailly, Dini et Férat, MM. Détraigne, J.L. Dupont et Pozzo di Borgo, Mme Payet et M. Amoudry.
Après le troisième alinéa (2°) du texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-3 du code de la santé publique, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Un accueil et une prise en charge dignes et respectueux ;
Mme Anne-Marie Payet. - Les établissements de santé doivent aussi garantir aux patients un accueil digne et respectueux de la personne humaine. Cet objectif apparaît dans la charte de la personne hospitalisée, mais il doit être expressément inscrit dans la loi, dont l'article premier prévoit que les établissements de santé « mènent, en leur sein, une réflexion sur les questions éthiques posées par l'accueil et la prise en charge médicale ».
M. Alain Milon, rapporteur. - On ne peut que souhaiter que l'accueil soit bel et bien digne et respectueux de la personne, mais pas seulement dans les établissements chargés d'une mission de service public ! L'adoption de cet amendement pourrait en outre être ressentie comme désobligeante par le personnel soignant.
Il est toutefois utile que ces exigences figurent dans la charte de la personne hospitalisée et soient rappelées au personnel. Retrait, sinon rejet.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Je connais le souci éthique de Mme Payet mais l'amendement laisse supposer que cette exigence ne s'impose pas à tous les établissements ! Retrait ?
L'amendement n°206 rectifié est retiré.
M. le président. - Amendement n°380, présenté par M. Autain et les membres du groupe CRC-SPG.
Rédiger comme suit le quatrième alinéa (3°) du texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-3 du code de la santé publique :
« 3° La prise en charge aux tarifs fixés à l'article L.162-20 du code de la sécurité sociale.
Mme Isabelle Pasquet. - Dès lors que l'on transfère les missions de service public à des d'établissements commerciaux, la tarification doit être la même que dans le secteur public. A l'Assemblée nationale, Mme la ministre a minimisé les différences de statut ; vous ne serez donc pas opposée, madame, à une harmonisation du mode de tarification, d'autant qu'il s'agit de renforcer la transparence.
L'article L. 162-14-1 prévoit que les patients soignés dans des établissements de santé privés qui se voient confier une ou plusieurs missions de service public seront assujettis aux tarifs opposables, « en dehors des cas de dépassement autorisés par la convention pour les médecins et les chirurgiens-dentistes ». Cette tentative de légaliser le dépassement d'honoraires est un premier pas vers une généralisation de cette pratique, au détriment des plus modestes. C'est inacceptable pour qui défend une médecine publique égalitaire et solidaire.
Enfin, l'affichage d'un prix « tout inclus », comme dans le public, est une de nos anciennes revendications.
M. le président. - Amendement n°238 rectifié, présenté par MM. Vasselle et P. Blanc.
Compléter le quatrième alinéa (3°) du texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-3 du code de la santé publique par les mots :
, qu'ils soient pratiqués par des professionnels conventionnés dans le cadre de leur secteur conventionnel aux tarifs opposables ou dans le cadre du secteur conventionnel à caractère optionnel
M. Paul Blanc. - C'est un amendement d'appel...
M. Alain Milon, rapporteur. - L'amendement n°380 est satisfait par le texte de la commission, qui prévoit que le patient est pris en charge -et non « peut être » pris en charge- au tarif opposable de secteur 1. Même s'il ne s'agit pas d'un tarif unique, le texte offre la même garantie. Avis défavorable. Sur l'amendement n°238 rectifié : retrait, sinon rejet.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Le projet de loi prévoit explicitement l'obligation, pour les établissements privés chargés de missions de service public, de respecter les tarifs opposables : l'amendement n°380 est satisfait.
Il est fondamental que les patients aient la garantie qu'ils ne seront pas exposés à des dépassements d'honoraires dans le cadre de missions de service public. L'amendement n°238 rectifié introduirait une rupture d'égalité. Qui plus est, il n'a pas de base juridique, le secteur optionnel n'étant pas défini. Défavorable, sur le fond comme sur la forme !
M. Paul Blanc. - S'il n'a pas de base juridique, je le retire. (Sourires)
L'amendement n°238 rectifié est retiré, ainsi que l'amendement n°380.
M. le président. - Amendement n°637, présenté par M. Barbier.
Après les mots :
au titre de l'urgence
supprimer la fin du cinquième alinéa du texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-3 du code de la santé publique.
M. Gilbert Barbier. - Il s'agit de lever une ambigüité. Dès lors que l'établissement de santé privé dans lequel je travaille s'est vu confier des missions de service public, le médecin pratique naturellement le tarif opposable lorsqu'il intervient dans le cadre de l'urgence, par exemple pour une opération en pleine nuit. Mais l'urgence peut aussi être la visite d'un patient affolé, qui ne nécessite pas forcément une intervention immédiate. Admettons que celle-ci se révèle cependant nécessaire et exige dans un second temps, après une hospitalisation, des examens : dans le cadre normal, la couverture complémentaire du patient permettrait au praticien d'appliquer un dépassement d'honoraires. Si le patient est traité pendant tout son séjour au tarif opposable, il y a une distorsion difficile à admettre pour le praticien.
M. Alain Milon, rapporteur. - La commission s'est prononcée pour une prise en charge garantie au tarif opposable dans le cadre des missions de service public, comme le prévoyait le texte initial et comme le préconisait le rapport Larcher. Avis défavorable. (M. François Autain approuve)
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Même avis.
L'amendement n°637 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°1173, présenté par le Gouvernement.
A la fin du dernier alinéa du texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 6112-3 du code de la santé publique, remplacer les mots :
aux praticiens qui y exercent
par les mots :
à chacun des praticiens qui y exercent et qui interviennent dans l'accomplissement d'une ou plusieurs des missions de service public
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Les obligations découlant des missions de service public s'imposent également aux praticiens de l'établissement dont la contribution est indispensable à la réalisation de ces missions. Cet amendement de simplification renvoie aux parties le soin d'en définir contractuellement les modalités.
M. Alain Milon, rapporteur. - Amendement de simplification, avis favorable.
L'amendement n°1173 est adopté.
M. le président. - Amendement n°381, présenté par M. Autain et les membres du groupe CRC-SPG.
Rédiger comme suit le deuxième alinéa du texte proposé par le V de cet article pour l'article L. 6112-3-1 du code de la santé publique :
« Les établissements de santé appliquent aux assurés sociaux qu'ils accueillent dans le cadre de l'accomplissement d'une ou plusieurs missions de service public, les tarifs prévus aux articles L. 162-20 et L. 162-26 du code de la sécurité sociale.
M. Guy Fischer. - On ne m'y reprendra pas, je le jure, mais cet amendement étant satisfait, comme l'amendement n°380, il n'y a plus qu'à le retirer... (Sourires)
L'amendement n°381 est retiré.
M. Jacques Blanc. - Il ne faut jamais dire : « Fontaine, je ne boirai pas de ton eau. »
M. le président. - Amendement n°659, présenté par M. Houpert.
Dans le dernier alinéa du texte proposé par le V de cet article pour l'article L. 6112-3-1 du code de la santé publique, après le mot :
honoraires
insérer les mots :
fixés par les conventions
M. Alain Houpert. - Plusieurs collègues n'ont pas eu le temps de signer cet amendement, qu'ils souhaitaient soutenir pour apaiser le monde professionnel.
Lorsque l'établissement de santé offre à ses patients la possibilité d'être pris en charge aux tarifs fixés par l'autorité administrative ou aux tarifs des honoraires conventionnels, ces derniers comprennent les dépassements autorisés par la convention, notamment si le parcours de soins n'est pas respecté. Il ne s'agit pas d'appliquer les tarifs du secteur II.
M. le président. - Amendement n°660, présenté par M. Houpert.
A la fin du dernier alinéa du texte proposé par le V de cet article pour l'article L. 6112-3-1 du code de la santé publique, remplacer les mots :
prévus au 1° du I de l'article L. 162-14-1 du code de la sécurité sociale
par les mots :
comprenant le cas échéant un dépassement autorisé
M. Alain Houpert. - C'est le même objet.
M. Alain Milon, rapporteur. - Souhaitant conserver la référence exclusive aux tarifs opposables dans le cadre du service public, la commission repousse les amendements.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - La philosophie du texte repose sur l'application des tarifs opposables au sein de la mission de service public, car toute distorsion entre malades est exclue s'agissant de soins indispensables.
L'amendement n°659 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°660.
M. le président. - Amendement n°1172, présenté par le Gouvernement.
Compléter le texte proposé par le V de cet article pour l'article L. 6112-3-1 du code de la santé publique par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions du premier alinéa sont applicables aux centres de lutte contre le cancer. Les centres appliquent également aux assurés sociaux les tarifs mentionnés aux articles L. 162-20 et L. 162-26 du code de la sécurité sociale. »
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Les spécificités des centres de lutte contre le cancer, les CLCC, justifient des modalités de gestion et de gouvernance qui leur sont propres. Leur statut particulier donnant satisfaction, je me range au souhait de la commission, qui veut supprimer l'ordonnance prévue dans la version initiale du texte et qui devait le faire évoluer. Je vous propose donc trois dispositions nouvelles permettant de leur appliquer le présent texte.
Le présent amendement assure aux patients traités dans ces centres qu'ils seront pris en charge aux tarifs opposables, comme dans les établissements publics de santé.
Tout à l'heure, l'amendement n°1212 proposera d'aligner l'approbation de l'état prévisionnel des dépenses et des recettes sur le régime applicable aux établissements privés à but non lucratif, de mettre en place un contrôle des décisions prises par le conseil d'administration et d'organiser une éventuelle administration provisoire, avec des modalités spécifiques pour la Fondation Curie et l'Institut Gustave Roussy.
Enfin, l'amendement n°1213 rétablira des dispositions provisoires semblables à celles applicables aux établissements privés à intérêt collectif.
Ces novations conforteront la sécurité juridique des actes pris par les centres de lutte contre le cancer, elles renforceront le contrôle exercé par la tutelle et permettront si besoin d'adopter des mesures assurant le retour à l'équilibre.
La Fédération nationale des centres de lutte contre le cancer a bien accueilli cette évolution, gage de gouvernance efficace pour ces établissements.
M. Alain Milon, rapporteur. - La commission ne boude pas son plaisir : elle est favorable.
Je précise à l'avance qu'il en ira de même pour les amendements n°s640 rectifié et 90 rectifié, sous réserve d'une nouvelle rectification pour ce dernier.
L'amendement n°1172 est adopté.
M. le président. - Amendement n°640 rectifié, présenté par M. Barbier, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Mézard, Milhau, de Montesquiou et Vall.
Dans le dernier alinéa du 1° du V bis de cet article, remplacer les mots :
la multiplication artificielle
par les mots :
le nombre
M. Gilbert Barbier. - L'avis favorable du rapporteur me facilite la tâche... (Rires) Je propose de supprimer une agression contre les médecins.
M. Alain Milon, rapporteur. - Je confirme que la commission est favorable.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Le Gouvernement aussi.
M. François Autain. - Où est l'agression contre les médecins, lorsque certains abusent de la tarification à l'activité ? Bien sûr, le cas est exceptionnel ! Je ne prétendrai pas le contraire, pour que l'on ne m'accuse pas d'agresser moi-même les médecins. On me reproche déjà d'être très sévère pour mes anciens confrères... Il reste que les actes sont parfois inutiles. Des médecins ont été recrutés avec pour seule fonction de veiller à la codification, afin qu'elle rapporte plus à la clinique.
Certains établissements fractionnent les séjours, car c'est plus rentable. Mais ce n'est conforme ni à l'intérêt des patients, ni à celui de l'assurance maladie.
Pour être bien défendus, les médecins n'ont pas besoin que je rejoigne la majorité (M. Jacques Blanc approuve), alors que notre renfort sera peut-être utile aux patients. (On s'indigne à droite) Je ne voterai pas cet amendement.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Ceux qui multiplient les actes savent ce qu'ils risquent. Ainsi, le recours aux césariennes dans les maternités fait l'objet d'une surveillance permanente, efficace, et que je veux renforcer. Tout abus conduirait à récupérer l'indu.
M. François Autain. - Les césariennes, parlons-en !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Je fais confiance à la déontologie médicale.
Après avoir proclamé à juste titre votre soutien aux médecins, vous les soupçonnez aujourd'hui d'abus ? Vous m'étonnez, monsieur Autain ! (Applaudissements à droite)
M. Jean Desessard. - On nous dit « tout va bien », « la surveillance est efficace », « ayez confiance », et, en même temps Mme la ministre nous dit qu'elle va « renforcer » cette même surveillance. Si celle-ci ne fonctionne pas bien, pourquoi la renforcer ? Vous dites une chose et son contraire.
Pourquoi étoffer ce qui donne satisfaction ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - On peut toujours progresser !
M. Jean Desessard. - Dans la même phrase, vous dites une chose et son contraire ! C'est fort !
M. Nicolas About, président de la commission. - Il vaut mieux mentionner le nombre d'actes que leur multiplication artificielle, car la difficulté est parfois de les codifier.
L'audit effectué dans un hôpital public de mon département a permis de redresser sa situation financière grâce à une meilleure codification des actes, bien sûr au détriment de l'assurance maladie.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - On peut toujours s'améliorer !
M. Nicolas About, président de la commission. - Cet amendement est bienvenu. Un audit, dans un hôpital de mon département en difficulté financière, a révélé que de nombreux actes n'avaient pas été codifiés. La recodification a amélioré la situation... mais a augmenté les dépenses de l'assurance maladie.
L'amendement n°640 rectifié est adopté.
M. le président. - Amendement n°90 rectifié, présenté par MM. J. Blanc, P. Blanc et Jarlier, Mme Payet et MM. Amoudry, Hérisson, Laménie, Bailly, Faure, Gouteyron, Thiollière, Carle, Bernard-Reymond, Alduy, Juilhard, Saugey, B. Fournier, Béteille, J. Boyer et Revet.
Compléter le 1° du V bis de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« - pour tenir compte d'un niveau d'activité plus faible du fait de leur implantation géographique dans les zones à faible densité géographique, zones de revitalisation rurale ou de montagne, où leur maintien exige des crédits spécifiques au titre des actions de contractualisation ou missions d'intérêt général. »
M. Jacques Blanc. - Dans le rapport prévu à cet article, il faut réserver un sort particulier aux établissements situés dans des zones à faible densité, comme les zones de montagne ou les zones de revitalisation rurale, qui risquent de voir les crédits affectés aux missions d'intérêt général diminuer en raison de leur plus faible activité. Nous devons tout faire pour sauver ces établissements qui dispensent des soins de proximité.
M. Alain Milon, rapporteur. - Avis favorable sous réserve d'une modification rédactionnelle : après les mots « niveau d'activité plus faible » il convient d'ajouter « des établissements ». (M. Jacques Blanc accepte la rectification)
M. le président. - Il s'agit donc de l'amendement n°90 rectifié bis.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Cette problématique est déjà prise en compte dans le nouveau schéma de financement des établissements de santé au titre des missions d'intérêt général et de l'aide à la contractualisation. Le rapport annuel sur celles-ci permettra d'en rendre compte de manière appropriée. Je m'engage à améliorer l'information sur cette question. Cependant, pour vous être agréable, je m'en remets à la sagesse du Sénat.
M. Jacques Blanc. - Merci, madame la ministre !
L'amendement n°90 rectifié bis est adopté.
M. le président. - Amendement n°573, présenté par M. Autain et les membres du groupe CRC-SPG.
Au début du 2° du V bis de cet article, remplacer le millésime :
2012
par le millésime :
2018
M. François Autain. - Cet article prévoit qu'un rapport sur la convergence intersectorielle sera présenté au Parlement jusqu'en 2012. Je propose de tirer les conséquences de votre annonce récente, madame la ministre, de reporter la convergence à 2018. Si vous refusez mon amendement, j'en conclurai que vous abandonnez celle-ci ; si vous l'acceptez, c'est que le report sera acté, ce qui ne réjouira pas M. Vasselle, rapporteur général du projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui aurait préféré que vous lui en réserviez l'annonce.
M. Paul Blanc. - Quel cirque !
M. Alain Milon, rapporteur. - Je constate avec plaisir que M. Autain prend la défense de M. Vasselle ! Cet amendement est au plus près de l'actualité, mais comme cette nouvelle échéance ne figure dans aucun texte législatif, je m'en remets à la sagesse en attendant l'avis du Gouvernement.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - M. Autain ayant été agréable avec moi il y a quelques instants, je suis favorable à son amendement. (Exclamations amusées)
M. Nicolas About, président de la commission. - Cela risque de ne pas se reproduire !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - En effet... (On s'amuse)
M. Guy Fischer. - C'est quand même la deuxième fois dans la même journée !
L'amendement n°573 est adopté.
M. le président. - Amendement n°382, présenté par M. Autain et les membres du groupe CRC-SPG.
Rédiger comme suit le deuxième alinéa du VI de cet article :
« La délivrance ou le renouvellement de l'autorisation peut être subordonné à la participation à une ou plusieurs des missions de service public prévues à l'article L. 6112-1, à l'engagement de mettre en oeuvre des mesures de coopération de nature à favoriser une utilisation commune des moyens, le service public de la permanence de soins ou à la pratique exclusive de tarifs opposables.
M. Guy Fischer. - Jamais deux sans trois, peut-être...
M. Jean Desessard. - Vous avez mangé votre pain blanc ! (Sourires)
M. Guy Fischer. - Avec cet article, vous entendez conditionner les projets relatifs à la création, la conversion et le regroupement des activités de soins et l'installation des équipements matériels lourds, à une autorisation délivrée par l'ARS. Cette autorisation sera soumise à de nouvelles conditions, comme l'engagement de participer à une ou plusieurs missions de service public ou de favoriser la permanence des soins. Nous ne critiquons pas ces dispositions, même s'il n'est pas de la compétence des établissements de santé d'assurer la permanence des soins, qui repose historiquement sur les médecins libéraux.
Notre amendement conditionne l'autorisation à la pratique des tarifs opposables. Des milliers de malades sont contraints de renoncer aux soins en raison de l'importance des dépassements d'honoraires. D'après un sondage réalisé en 2007, 14 % de nos concitoyens se sont présentés aux urgences pour des raisons financières. Ayant été conseiller général d'un grand quartier populaire, j'ai constaté l'afflux de patients aux urgences de l'hôpital Édouard Herriot ou des Hospices civils. D'autre part, 32 % des Français ont renoncé à consulter un spécialiste en raison des difficultés à obtenir rapidement un rendez-vous. Enfin, 13 % ont renoncé aux soins. Voilà la réalité vécue par des millions de personnes qui sont souvent les plus modestes. C'est pourquoi la santé est aujourd'hui, après le chômage, la première préoccupation des Français.
Il ne s'agit pas ici de limiter l'installation des cliniques privées lucratives, mais de préciser qu'elles doivent respecter les tarifs opposables afin de satisfaire les besoins en santé, seul objectif qui doit guider nos réflexions.
M. Alain Milon, rapporteur. - Sur la forme, cet amendement n'est pas cohérent avec le texte de la commission qui a distingué les conditions d'autorisation de celles de non-renouvellement.
Sur le fond, il nous parait difficile de subordonner certaines autorisations à la pratique exclusive des tarifs opposables...
M. François Autain. - C'est dommage !
M. Alain Milon, rapporteur. - ...en dehors des cas d'exercice d'une mission de service public pour lesquels cette obligation est déjà prévue. La commission est défavorable.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Il ne faut pas confondre la délivrance ou le renouvellement des autorisations avec le fait que les patients, dans le cadre des missions de service public, seront bien accueillis avec des tarifs opposables. Votre demande est à tel point légitime que cette garantie est prévue dans le texte. Avis défavorable.
M. François Autain. - En rejetant cet amendement, je regrette que vous priviez le directeur général de l'ARS d'un moyen de faire bénéficier les patients du tarif opposable dans les régions où il n'y a pas de praticien qui l'applique. C'est d'autant plus dommage que vous allez supprimer l'amendement de l'Assemblée nationale qui permettait de remédier à une carence hélas de plus en plus répandue dans certains territoires.
L'amendement n°382 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°70, présenté par M. Lardeux.
Supprimer le VII de cet article.
M. André Lardeux. - Je trouvais le texte de l'Assemblée nationale particulièrement déséquilibré. Même si la rédaction en a sensiblement été améliorée par la commission, je maintiens mon amendement de suppression car la question peut se régler par la voie contractuelle classique et il me semble inutile d'alourdir la procédure. Si mon amendement pose problème, je me rallierai volontiers à l'amendement suivant. (Sourires)
M. le président. - Amendement identique n°1203, présenté par le Gouvernement.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Je vais retirer mon amendement au bénéfice du précédent. (Applaudissements et rires à droite)
M. Henri de Raincourt. - Admirable !
L'amendement n°1203 est retiré.
M. le président. - Amendement n°658, présenté par M. Houpert.
Dans le deuxième alinéa du texte proposé par le VII de cet article pour l'article L. 6161-4 du code de la santé publique, remplacer le mot :
révisé
par le mot :
renégocié
M. Alain Houpert. - La commission Larcher avait souhaité que la renégociation des contrats soit bien sécurisée.
M. le président. - Amendement identique n°840, présenté par MM. P. Blanc et Laménie.
M. Paul Blanc. - Il vient d'être défendu.
M. le président. - Amendement n°541, présenté par M. Autain et les membres du groupe CRC-SPG.
Supprimer le dernier alinéa du texte proposé par le VII de cet article pour l'article L. 6161-4 du code de la santé publique.
M. François Autain. - Bien que l'amendement de suppression rende les autres virtuels, je souhaite montrer que les conditions de résiliation du contrat de travail d'un praticien en établissement privé reviennent à limiter la capacité de soins des personnels relevant du service public au tiers des personnes accueillies, ce qui est contraire à l'esprit du projet.
M. le président. - Amendement identique n°608 rectifié, présenté par M. Barbier, Mme Escoffier et MM. Marsin, de Montesquiou et Vall.
M. Gilbert Barbier. - Cet amendement n'aura plus de raison d'être si l'amendement de M. Lardeux est adopté.
M. le président. - Amendement identique n°661, présenté par M. Houpert.
M. Alain Houpert. - Même position.
M. le président. - Amendement identique n°841 rectifié, présenté par MM. P. Blanc, Laménie et Gilles.
M. Paul Blanc. - Défendu !
M. le président. - Amendement n°383, présenté par M. Autain et les membres du groupe CRC-SPG.
Rédiger comme suit le dernier alinéa du texte proposé par le VII de cet article pour l'article L. 6161-4 du code de la santé publique :
« Le refus par le praticien de réviser son contrat constitue un motif de rupture qui est mis à la charge du praticien.
Mme Isabelle Pasquet. - En cohérence avec celui de M. Autain, cet amendement souligne combien une telle disposition modifierait notre droit du travail et la jurisprudence. Pour la première fois, un texte de loi disposerait, ce qui est loin du droit commun, qu'une rupture de contrat à la suite d'une modification substantielle de celui-ci donne lieu à indemnité. Si une telle disposition était votée, il faudrait que tous les salariés en profitent. On ne savait pas le Gouvernement aussi progressiste... Notre amendement est une mesure de justice envers les salariés mais aussi envers les malades.
M. le président. - Amendement n°298, présenté par M. Le Menn et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Rédiger comme suit le dernier alinéa du texte proposé par le VII de cet article pour l'article L. 6161-4 du code de la santé publique :
« Lorsque le directeur général de l'agence régionale de santé et de l'autonomie désigne un établissement de santé pour remplir une mission de service public, le praticien ne peut ni refuser cette révision ni résilier le contrat pour un motif lié à la participation de l'établissement à une ou plusieurs des missions mentionnées à l'article L. 6112-1.
M. Jean-Jacques Mirassou. - Nous interdisons explicitement la rupture du contrat d'exercice au motif que l'établissement est engagé dans une mission de service public. La rédaction n'offre pas la sécurité juridique que la commission Larcher jugeait nécessaire à la renégociation. La loi ne peut pas se contenter de prévoir celle-ci sans envisager le risque de rupture du contrat et l'obligation d'une indemnisation.
M. le président. - Amendement n°273, présenté par M. Houpert.
A la fin du dernier alinéa du texte proposé par le VII de cet article pour l'article L. 6161-4 du code de la santé publique, remplacer les mots :
de son temps travaillé
par les mots :
du nombre d'actes réalisés
M. Alain Houpert. - Malgré l'adoption probable de l'amendement de M. Lardeux, j'expliquerai que la durée du temps de travail n'est pas un bon critère ; les praticiens effectuant des actes longs pour des pathologies lourdes seraient pénalisés.
M. le président. - Amendement n°384, présenté par M. Autain et les membres du groupe CRC-SPG.
Compléter le texte proposé par le VII de cet article pour l'article L. 6161-4 du code de la santé publique par un alinéa ainsi rédigé :
« L'agence régionale de santé qui constate une carence dans l'offre de soins, ne pouvant être palliée par un établissement public de santé, peut décider, afin d'y remédier, de conclure avec un établissement privé de santé ou un titulaire d'autorisation, un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens mentionnés à l'article L. 6114-1, assurant, pour certaines disciplines et pour les missions de service public qui leur sont confiés, une tarification opposable. L'établissement de santé ou le titulaire de l'autorisation modifie le cas échéant les contrats conclus pour l'exercice d'une profession médicale mentionnés aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 4113-9. Le refus pour le praticien de réviser son contrat constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement.
Mme Annie David. - La rédaction de cet article ne garantit pas suffisamment un accès aux soins aux tarifs opposables. C'est pourtant un enjeu fondamental pour notre système de santé. Veut-on laisser les médecins exerçant dans des cliniques commerciales fixer librement leurs tarifs ou notre priorité est-elle de garantir l'accès de tous à des soins de qualité ? Nous avons choisi et trouvons insupportable que les patients dirigés, à la suite d'un contrat conclu par le directeur de l'agence régionale de santé, vers un établissement privé ne bénéficient pas des mêmes tarifs que dans un établissement public.
M. le président. - Amendement n°299, présenté par M. Le Menn et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Rétablir le texte proposé par le VII de cet article pour l'article L. 6161-4-1 du code de la santé publique dans la rédaction suivante :
« Art. L. 6161-4-1. - Afin de remédier à une difficulté d'accès aux soins constatée par l'agence régionale de santé, un établissement de santé ou un titulaire d'autorisation peut être assujetti, par son contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens mentionné à l'article L. 6114-1, à garantir, pour certaines disciplines ou spécialités selon des critères et dans une limite fixée par décret, une proportion minimale d'actes facturés sans dépassement d'honoraires, en dehors de ceux délivrés aux bénéficiaires du droit à la protection complémentaire en matière de santé et des situations d'urgence. L'établissement de santé ou le titulaire de l'autorisation modifie le cas échéant les contrats conclus pour l'exercice d'une profession médicale mentionnés aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 4113-9. Le refus par le praticien de réviser son contrat en constitue un motif de rupture sans faute. »
M. Jean-Pierre Godefroy. - Nous rétablissons le texte de l'Assemblée nationale qui obligeait un établissement de santé à garantir une proportion minimale d'actes sans dépassement d'honoraires. Peut-on accepter que dans certains territoires, on soit contraint de renoncer à des soins faute de moyens financiers ? Personne n'y songe. Le texte de l'Assemblée nationale, supprimé malgré notre avis en commission, apportait un début de solution. Aussi notre amendement précise-t-il les conditions des dépassements d'honoraires. Bien que rédactionnel, un ajout au texte adopté par l'Assemblée nationale garantit que les critères objectifs de fixation des proportions minimales d'actes facturés sans dépassement seront identiques à l'échelon national, d'où la référence au décret.
Mais puisque la ministre est favorable à la suppression du VII, tous les autres amendements vont tomber. Peut-elle alors nous donner sa position sur la grave question à laquelle nous essayons de répondre ? Le texte de l'Assemblée nationale était plus favorable et plus respectueux des malades.
M. le président. - Amendement n°377, présenté par M. Autain et les membres du groupe CRC-SPG.
Rétablir le texte proposé par le VII de cet article pour l'article L. 6161-4-1 du code de la santé publique dans la rédaction suivante :
« Art. L. 6161-4-1. - Afin de remédier à une difficulté d'accès aux soins constatée par l'agence régionale de santé, un établissement de santé ou un titulaire d'autorisation est assujetti, par son contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens mentionné à l'article L. 6114-1, à garantir des actes facturés sans dépassement d'honoraires. L'établissement de santé ou le titulaire de l'autorisation modifie le cas échéant les contrats conclus pour l'exercice d'une profession médicale mentionnés aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 4113-9. Le refus par le praticien de réviser son contrat en constitue un motif de rupture sans faute. »
M. François Autain. - Cet amendement présente une ressemblance étrange avec le précédent. La commission a supprimé un paragraphe qui corrigeait les inégalités territoriales en obligeant les praticiens à accomplir une certaine proportion d'actes au tarif opposable. Elle a cédé, comme le Gouvernement, aux pressions des praticiens et surtout des internes qui craignaient des conséquences négatives sur leurs revenus. La question est sans doute de savoir si le tarif opposable est suffisant et si son relèvement ne remédierait pas à des pratiques que tout le monde dénonce. Je cherche des solutions mais je n'en vois pas beaucoup dans ce texte.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Même si l'adoption de l'amendement de M. Lardeux fait tomber les autres, je me dois de présenter mon argumentation à MM. Godefroy et Autain. Leur texte tend à rétablir l'amendement de M. Préel, supprimé par la commission des affaires sociales. Je partage leurs préoccupations mais cet amendement n'aurait pas les effets qu'ils en attendent car il concernerait d'abord les territoires isolés, ceux où les praticiens exercent déjà dans les conditions les plus difficiles : l'amendement rendrait paradoxalement ces territoires encore moins attractifs et créerait des inégalités entre praticiens sans apporter de solution au problème posé.
M. Guy Fischer. - Que faire, alors ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Vous permettrez certes à certains patients d'avoir accès au secteur 1, mais les dépassements d'honoraires se reporteront sur les autres. Vous susciterez ainsi une inégalité d'accès aux soins contraire à vos objectifs. Nous avons résolu une grande partie du problème dans le cadre des missions de service public, avec les tarifs opposables. Les prises en charge en urgence, celles où les patients n'ont pas le choix, se feront au tarif opposable.
M. Guy Fischer. - Gare, si l'on n'est pas pressé !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Dans les autres cas, ils peuvent se déplacer.
J'ajoute que ne viser que les seuls praticiens exerçant dans les établissements de santé et non l'ensemble des médecins libéraux pose problème.
Pour remédier au problème, il me semble plus pertinent de privilégier la négociation conventionnelle (exclamations sur les bancs du groupe CRC-SPG), qui seule nous permettra de parvenir à un dispositif à la fois équitable et acceptable.
M. le président. - Amendement n°592 rectifié bis, présenté par MM. Chevènement, Marsin, Milhau, Vall et Charasse.
Rétablir le texte proposé par le VII de cet article pour l'article L. 6161-4-1 du code de la santé publique dans la rédaction suivante :
« Art. L. 6161-4-1. - Lorsqu'une difficulté d'accès aux soins est constatée par l'agence régionale de santé dans un territoire de santé, un arrêté du ministre chargé de la santé peut prévoir la possibilité d'imposer à certains établissements de santé ou titulaires d'autorisation, pour certaines disciplines ou spécialités, de garantir une proportion d'actes facturés sans dépassement d'honoraires, qui ne peut excéder 20 % du nombre total des actes effectués. Un avenant au contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens prévu à l'article L. 6114-1 précise les modalités de cette obligation. L'établissement ou le titulaire de l'autorisation modifie le cas échéant les contrats conclus pour l'exercice d'une profession médicale mentionnés aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 4113-9. »
M. Jean-Pierre Chevènement. - Il est défendu.
M. Alain Milon, rapporteur. - Il n'est pas inutile, à ce stade, de revenir sur l'historique de ce texte. Il a fallu des mois de négociation pour parvenir à un projet qui était, dans son ensemble, accepté par tous. Lorsqu'il est arrivé devant l'Assemblée nationale...
M. François Autain. - En urgence...
M. Alain Milon, rapporteur. - ...avec ses 33 articles, il a été modifié par des amendements substantiels, qui ont valu quelque notoriété, d'ailleurs à double tranchant, à leurs auteurs. S'ils ont été adoptés, c'est après un avis de sagesse plutôt négatif du Gouvernement. A partir de là, les acteurs de l'hôpital et de la médecine libérale sont venus y regarder de près et les ont rejetés, avant de rejeter le texte lui-même. A sa sortie de l'Assemblée nationale, c'est l'ensemble de la population qui, par leur médiation, s'est intéressée au texte. Quand elle s'en est saisie, notre commission a proposé la suppression de l'amendement Préel et la renégociation de l'amendement Bur. Puis, après s'être d'abord déclarée défavorable à la proposition de M. Lardeux, elle a fini par le suivre : elle est aujourd'hui favorable à son amendement, qui, s'il est adopté, rendra tous les autres sans objet.
M. le président. - Je mets aux voix l'amendement n°70.
M. Jean-Pierre Godefroy. - Je vous remercie, madame la ministre, d'avoir répondu à mon interpellation, mais je constate que vous n'apportez pas de réponse aux patients. Qu'en sera-t-il en dehors des urgences ? Les patients auront le choix entre payer un dépassement d'honoraires ou payer leur déplacement en plus de la consultation. Ils seront les dindons de la farce. Je comprends bien que les choses ne sont pas faciles, qu'on se heurte à des lobbies, mais si l'on ne fait rien, on restera face au même constat de carence. Nous sommes tous des élus locaux ; tous, nous devrions nous soucier des difficultés, des médecins certes, mais aussi des populations.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Sur l'identification des soins à tarif opposable, je vous rappelle que j'ai travaillé à développer le système d'information des caisses d'assurance maladie, qui peuvent donner toutes les indications aux patients. Quant aux déplacements, il est toujours possible de prévoir, sur l'ordonnance, un déplacement en véhicule sanitaire.
M. Jean-Pierre Godefroy. - Voilà qui fera du bien à l'assurance maladie !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Il s'agit d'être pragmatique : je ne cherche pas à faire des économies, mais à assurer, partout, la qualité des soins. Vous voyez que je fais le maximum !
M. François Autain. - Vous ne faites rien ! Tout ce que ce texte comportait de positif a été supprimé ou édulcoré. Les contrats de solidarité, même si le système était difficilement applicable, ouvraient la perspective d'une contrainte à terme : le rapporteur a supprimé leur caractère obligatoire. Un amendement a été introduit à l'Assemblée nationale pour préserver le minimum : vous dites que ce serait contre-productif. Vous faites confiance à la négociation conventionnelle, dites-vous ? Mais elle est enlisée ! Celle sur le secteur optionnel dure depuis cinq ans, et elle n'a toujours pas débouché ! Et pendant ce temps, les dépassements d'honoraires se multiplient ! Il faut savoir quelquefois arbitrer en faveur des patients. Quand vous le voulez, vous savez imposer vos arbitrages. N'est-ce pas ce que vous avez fait pour les retraites, à la RATP, à la SNCF ? Tout le monde est maintenant à 40 trimestres.
M. Nicolas About, président de la commission. - Et les bonifications ?
M. Jean-Pierre Godefroy. - La seule chose qui manque ici, c'est la volonté. Celle de lutter contre les dépassements dont les plus démunis sont les premières victimes. Il est vrai que quand on est riche et en bonne santé, il n'y a pas de problème ! Je dénonce votre immobilisme. (Applaudissements à gauche)
M. Nicolas About, président de la commission. - Je m'agace d'entendre sans cesse évoquer les lobbies médicaux. Mais je connais peu de professions qui demandent tant d'années d'étude sans offrir aucun profil de carrière. Je suis pour l'accès aux soins, pour le maillage territorial, mais aussi pour les carrières des médecins. Il n'est pas normal qu'un médecin qui a vingt, trente, quarante ans d'exercice derrière lui soit rémunéré comme un débutant. On ne peut lutter contre les dépassements sans réfléchir aux profils de carrière.
MM. Autain et Fischer - Nous sommes d'accord !
M. Nicolas About, président de la commission. - Qui accepterait, sans un grand amour du métier, sans un grand amour des hommes, de s'engager dans cette voie ? Ceux qui veulent gagner des sommes autrement substantielles préfèrent les grandes entreprises publiques... Si les médecins défilent, c'est pour demander un système mieux conçu, plus juste, qui les rémunère décemment. Les actes médicaux ne sont pas correctement revalorisés, c'est cela qui pousse aux dépassements. Les médecins doivent faire face à des charges parfois très lourdes.
En secteur 1, on ne trouve plus un obstétricien, tant les primes d'assurance sont élevées : ils ne peuvent tout simplement plus payer ! (Applaudissements sur les bancs de l'UMP)
Ils n'accouchent plus que dans les hôpitaux, ou en secteur II avec des dépassements systématiques, pour compenser le prélèvement des assurances et faire face aux risques...
M. François Autain. - Mais non ! Il y a l'assurance maladie !
M. Guy Fischer. - La sécurité sociale prend en charge une partie des cotisations !
M. Nicolas About, président de la commission. - Pas du tout ! J'ai fait le texte sur la responsabilité civile, je le sais ! Au-delà de 3 millions d'euros, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux se retourne contre les médecins, or les décisions de justice prononcent souvent des indemnisations supérieures à cette somme. Les risques sont là...
M. Guy Fischer. - Même une partie de leur taxe professionnelle est prise en charge !
M. Nicolas About, président de la commission. - Au-delà de 3 millions, vous n'êtes pas assuré et si vous êtes condamné, c'est vous qui payez, et peut-être après vous vos enfants ! Alors cessez donc de parler de lobbies ! Exprimer de la haine contre les médecins (exclamations à gauche ; MM. Guy Fischer et François Autain s'indignent) ne réglera pas les problèmes de santé en France ! (Applaudissements sur les bancs UMP)
M. Jacques Blanc. - Dans ce débat fondamental, il y a ceux qui défendent les médecins et ceux qui restent enfermés dans une idéologie dépassée. (Applaudissements à droite, soupirs à gauche) On ne fera pas de médecine sans médecins ! Si vous faites partir les praticiens des secteurs isolés, en les montrant du doigt alors qu'ils ne sont guère coutumiers des dépassements, que deviendront nos territoires ? Moi je sais ce que c'est que l'exercice de la médecine en Lozère...
M. Jean Desessard. - Où voulez-vous en venir ? Que proposez-vous ?
M. Jacques Blanc. - Je souscris à la position de Mme la ministre et je remercie la commission de nous faire sortir de l'ornière dans laquelle les députés ont versé.
M. Jean Desessard. - Les députés de droite !
M. Jacques Blanc. - L'utilité du Sénat est une fois encore illustrée ; nous sommes au service des patients et des médecins, nous n'opposons pas les intérêts des uns et ceux des autres. (Applaudissements sur les bancs UMP)
M. Jean-Pierre Godefroy. - C'est vous qui les opposez !
M. Yves Daudigny. - Ce genre de débat n'est pas admissible. Il n'y a pas ici d'ennemis des médecins.
M. Nicolas About, président de la commission. - Qui parle sans cesse de lobbies ? Quand les cheminots défilent, parle-t-on de lobbies ?
M. Yves Daudigny. - Comme patients, nous sommes tous un jour ou l'autre amenés à apprécier leurs compétences ; mais comme législateurs, nous recherchons le meilleur système, celui où le médecin a sa juste place et le patient aussi. Je suis totalement opposé aux amendements de suppression. Après le vote de l'amendement de M. Bur, il fallait trouver une solution : la proposition de notre commission était équilibrée, empreinte de sagesse. Mais on nous demande maintenant de la supprimer...
Je m'étonne qu'un établissement de santé puisse conclure un contrat qui ne lierait pas les praticiens qui y exercent. Je m'étonne que des praticiens qui ont choisi de travailler dans un établissement ne se sentent pas liés par les contrats conclus par lui. Il faut peut-être améliorer la rédaction du VII, mais certainement pas le supprimer !
M. Jean Desessard. - Très bonne intervention !
M. Jean-Jacques Mirassou. - Le débat a malheureusement dérapé et je suis choqué des anathèmes qui ont été lancés ; je déplore également qu'interviennent dans une discussion de nature politique des incidences à composante corporatiste, touchant une profession que je connais bien pour l'avoir exercée longtemps y compris dans des quartiers difficiles. Il n'y a pas ici le camp des médecins et celui des patients. Mme la ministre devrait veiller à ce que la rédaction du projet de loi évolue dans le bon sens. Une sortie par le haut sera difficile, mais au moins ayons à l'esprit l'objectif de pérenniser un système où tous les patients sont à égalité face à la distribution des soins.
M. Bernard Cazeau. - Je n'aurai pas le ton enflammé et un peu déplacé de M. Blanc. La proposition de M. Daudigny, que nous avons réfléchie ensemble, me paraît mesurée. Aucune autre ne me semble acceptable pour les patients et les médecins. Si l'on supprime le VII, on crée un vide : il faudrait savoir comment le combler. La proposition de la commission, meilleure que le texte de l'Assemblée nationale, est cependant insuffisante. Serons-nous capables de sortir de nos conditions politiques et professionnelles pour trouver ensemble une solution ?
A la demande du groupe socialiste, l'amendement n°70 est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 333 |
Nombre de suffrages exprimés | 323 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 162 |
Pour l'adoption | 179 |
Contre | 144 |
Le Sénat a adopté.
Les autres amendements relatifs au paragraphe VII deviennent sans objet.
M. le président. - Amendement n°300, présenté par M. Le Menn et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
I. - Après le VII bis de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les articles L. 6161-6 à L. 6161-10 du même code sont ainsi rédigés :
« Art. L. 6161-6. - Les établissements de santé privés d'intérêt collectif assurent, outre les missions visées au I de l'article L. 6112-1, la mission d'éducation thérapeutique des patients.
« Art. L. 6161-7. - Les établissements de santé privés d'intérêt collectif exercent l'ensemble de leurs missions en respectant, pour tous les patients, les garanties suivantes :
« 1° L'égal accès à des soins de qualité ;
« 2° L'accueil et la prise en charge vingt-quatre heures sur vingt-quatre ou son orientation vers un autre établissement ou une autre institution, dans le cadre défini par l'agence régionale de santé ;
« 3° Une prise en charge globale et coordonnée, en lien avec les autres professionnels de santé et les autres établissements et services de santé ainsi que les établissements et services sociaux et médico-sociaux ;
« 4° La transparence de leur gestion par la certification et la publication de leurs comptes annuels.
« Dans le cadre de l'exercice de leurs missions de service public, les établissements de santé privés d'intérêt collectif garantissent aux patients leur prise en charge aux tarifs fixés par l'autorité administrative ou aux tarifs des honoraires prévus au 1° de l'article L.162-14-1 du code de la sécurité sociale.
« Art. L. 6161-8. - Les établissements de santé privés à but non lucratif visés à l'article L. 6161-5 déclarent à l'agence régionale de santé leur qualité d'établissement de santé privé d'intérêt collectif. Cette déclaration comprend l'engagement pris par l'établissement de respecter les garanties prévues à l'article L. 6161-7. Cette qualité d'établissement de santé privé d'intérêt collectif et l'engagement de respecter les garanties prévues à l'article L. 6161-7 sont inscrits dans le contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens mentionné à l'article L. 6114-1.
« Art. L. 6161-9. - Les cinquième et sixième alinéas de l'article L. 6143-4 et l'article L. 6145-1 sont applicables aux établissements de santé privés d'intérêt collectif. Ces établissements doivent, pour la transparence de leur gestion, certifier et publier leurs comptes annuels.
« Ils bénéficient pour leur équipement des avantages prévus pour les établissements publics de santé.
« Ils peuvent faire appel à des praticiens hospitaliers dans les conditions prévues par les statuts de ces praticiens.
« Ils peuvent faire appel à des médecins, sages-femmes et odontologistes exerçant à titre libéral. Un contrat est conclu entre ces professionnels de santé et les établissements de santé privés d'intérêt collectif, qui fixe les conditions et modalités de leur intervention et assure le respect des garanties mentionnées à l'article L. 6161-7.
« Ils peuvent, par dérogation aux dispositions des articles L. 1242-1, L 1242-2, L. 1242-7, L. 1242-8 et L. 1243-13 du code du travail, recruter des praticiens par contrat à durée déterminée pour une période égale au plus à quatre ans.
« Art. L. 6161-10. - Les dispositions des articles L. 6143-2 et L. 6143-2-1 sont applicables aux établissements de santé privés d'intérêt collectif. Le projet d'établissement est approuvé par le directeur général de l'agence régionale de santé dans un délai de six mois. »
II. - En conséquence, rédiger comme suit le XV de cet article :
XV. - L'article L. 6161-3-1 du même code est abrogé.
M. Jacky Le Menn. - Nous précisons les modalités de fonctionnement des établissements de santé privés d'intérêt collectif, les Espic : nous leur appliquons certaines des dispositions applicables au secteur public hospitalier, nous les soumettons à l'obligation de certification des comptes et leur offrons la possibilité de faire appel à des praticiens libéraux selon le dispositif déjà expérimenté dans certaines régions avec les tutelles.
M. le président. - Amendement n°160, présenté par M. Gouteyron.
Après le VII bis de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les articles L. 6161-6 et L. 6161-7 du même code sont ainsi rédigés :
« Art. L. 6161-6. - Les établissements de santé privés d'intérêt collectif peuvent faire appel à des praticiens hospitaliers dans les conditions prévues par les statuts de ces praticiens.
« Ils peuvent, par dérogation aux articles L. 1242-1, L. 1242-2, L. 1242-7 et L. 1242-13 du code du travail, recruter des praticiens, ainsi que des auxiliaires médicaux, par contrat à durée déterminée pour une période au plus égale à cinq ans.
« Art. L. 6161-7. - Les dispositions de l'article L. 6143-2 sont applicables aux établissements de santé privés d'intérêt collectif. »
M. Adrien Gouteyron. - Cet amendement inaugure une série de propositions sur les Espic. Ces établissements doivent, comme les établissements privés participant au service public hospitalier (PSPH), être autorisés à recruter, par dérogation au code du travail, non seulement des praticiens, comme cela est prévu au dernier alinéa de l'article L. 6161-7 du code de la sécurité sociale, mais aussi des auxiliaires médicaux par contrat à durée déterminée d'une durée maximale de cinq ans -durée alignée sur celle des autorisations.
M. le président. - Amendement n°161, présenté par M. Gouteyron.
Après le VII bis de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - L'article L. 6161-8 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 6161-8. - Les établissements de santé privés d'intérêt collectif peuvent conclure, pour un ou plusieurs objectifs déterminés, soit avec un établissement public de santé, soit avec une communauté hospitalière de territoire, des accords en vue de leur association à la réalisation des missions de service public. Ces accords sont conclus sur la base du projet régional de santé défini à l'article L. 1434-1, notamment du schéma régional d'organisation des soins défini aux articles L. 1434-6 et L. 1434-7 ou du schéma interrégional défini à l'article L. 1434-8. Ils sont approuvés par le directeur général de l'agence régionale de santé. »
M. Adrien Gouteyron. - Les Espic doivent pouvoir poursuivre leur coopération avec leurs partenaires historiques que sont les hôpitaux sous la forme d'accords d'association privilégiée conformes aux orientations du projet régional de santé.
M. le président. - Amendement n°162, présenté par M. Gouteyron.
Après le VII bis de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - L'article L. 6161-9 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 6161-9. - Dans des conditions fixées par voie réglementaire, un établissement de santé privé d'intérêt collectif peut admettre des médecins, sages-femmes et odontologistes ainsi que des auxiliaires médicaux qui exercent à titre libéral à participer à la mise en oeuvre de ses missions de service public et de ses activités de soins. Les honoraires des professionnels libéraux sont à la charge de l'établissement de santé privé d'intérêt collectif, qui peut recourir à des conditions de rémunération particulières autres que le paiement à l'acte. Par exception aux dispositions de l'article L. 162-2 du code de la sécurité sociale, l'établissement de santé privé d'intérêt collectif verse aux intéressés les honoraires, le cas échéant minorés d'une redevance.
« Les professionnels libéraux mentionnés au premier alinéa participent aux missions de service public et aux activités de soins de l'établissement dans le cadre d'un contrat conclu avec l'établissement de santé privé d'intérêt collectif, qui fixe les conditions et modalités de leur participation et assure le respect des garanties mentionnées à l'article L. 6112-3. »
M. Adrien Gouteyron. - Il s'agit de donner aux Espic la faculté de recruter médecins, sages-femmes, odontologistes et auxiliaires médicaux exerçant à titre libéral. (M. Charles Revet approuve)
M. le président. - Amendement n°163, présenté par M. Gouteyron.
Rédiger comme suit le XV de cet article :
XV. - Les articles L. 6161-3-1 et L. 6161-10 du même code sont abrogés.
M. Adrien Gouteyron. - Par cohérence avec mes amendements précédents, je propose la suppression d'articles du code de la santé publique.
M. le président. - Amendement n°301, présenté par M. Le Menn et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
I. - Après le VII bis de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les articles L. 6161-6 et L. 6161-7 du même code sont ainsi rédigés :
« Art. L. 6161-6. - Les établissements de santé privés d'intérêt collectif peuvent faire appel à des praticiens hospitaliers dans les conditions prévues par les statuts de ces praticiens.
« Ils peuvent, par dérogation aux articles L. 1242-1, L. 1242-2, L. 1242-7 et L. 1243-13 du code du travail, recruter des praticiens par contrat à durée déterminée pour une période égale au plus à quatre ans. »
« Art. L. 6161-7. - Les dispositions de l'article L. 6143-2 sont applicables aux établissements mentionnés à l'article L. 6161-5. »
II. - En conséquence, dans le XV de cet article, supprimer les références :
L. 6161-6, L. 6161-7,
M. Jacky Le Menn. - Les amendements nos301, 302, 303 et 304 sont des amendements de repli. Le premier accorde aux Espic la possibilité de recruter, comme les établissements de santé privé PSPH, des médecins pour une durée maximale de quatre ans, comme le prévoient les dispositions du dernier alinéa de l'article L. 6161-7 du code de la santé publique. Il leur impose d'établir un projet d'établissement.
M. le président. - Amendement n°302, présenté par M. Le Menn et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
I. - Après le VII bis de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les articles L. 6161-6 et L. 6161-7 du même code sont ainsi rédigés :
« Art. L. 6161-6. - Les établissements de santé privés d'intérêt collectif peuvent faire appel à des praticiens hospitaliers dans les conditions prévues par les statuts de ces praticiens.
« Ils peuvent, par dérogation aux articles L. 1242-1, L. 1242-2, L. 1242-7 et L. 1243-13 du code du travail, recruter des praticiens, ainsi que des auxiliaires médicaux, par contrat à durée déterminée pour une période égale au plus à cinq ans.
« Art. L. 6161-7. - Les dispositions de l'article L. 6143-2 sont applicables aux établissements mentionnés à l'article L. 6161-5. »
II. - En conséquence, dans le XV de cet article, supprimer les références :
L. 6161-6, L. 6161-7,
M. Jacky Le Menn. - Cet amendement élargit la possibilité accordée aux Espic de recruter des professionnels de santé en CDD.
M. le Président. - Amendement n°304, présenté par M. Le Menn et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
I. - Après le VII bis de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - L'article L. 6161-8 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 6161-8. - Les établissements de santé privés d'intérêt collectif peuvent conclure, pour un ou plusieurs objectifs déterminés, soit avec un établissement public de santé, soit avec une communauté hospitalière de territoire, des accords en vue de leur association à la réalisation des missions de service public. Ces accords sont conclus sur la base du projet régional de santé défini à l'article L. 1434-1, notamment du schéma régional d'organisation des soins défini aux articles L. 1434-6 et L. 1434-7 ou du schéma interrégional défini à l'article L. 1434-8. Ils sont approuvés par le directeur général de l'agence régionale de santé. »
II. - En conséquence, dans le XV de cet article, supprimer la référence :
L. 6161-8
M Jacky Le Menn - Les Espic doivent poursuivre leur collaboration avec leurs partenaires historiques et la mener avec les CHT.
M. le président. - Amendement n°303, présenté par M. Le Menn et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
I. - Après le VII bis de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - L'article L. 6161-9 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 6161-9. - Dans des conditions fixées par voie réglementaire, un établissement de santé privé d'intérêt collectif peut admettre des médecins, sages-femmes et odontologistes ainsi que des auxiliaires médicaux qui exercent à titre libéral à participer à la mise en oeuvre de ses missions de service public et de ses activités de soins. Les honoraires des professionnels libéraux sont à la charge de l'établissement de santé privé d'intérêt collectif, qui peut recourir à des conditions de rémunération particulières autres que le paiement à l'acte. Par exception aux dispositions de l'article L. 162-2 du code de la sécurité sociale, l'établissement de santé privé d'intérêt collectif verse aux intéressés les honoraires, le cas échéant minorés d'une redevance.
« Les professionnels libéraux mentionnés au premier alinéa participent aux missions de service public et aux activités de soins de l'établissement dans le cadre d'un contrat conclu avec l'établissement de santé privé d'intérêt collectif, qui fixe les conditions et modalités de leur participation et assure le respect des garanties mentionnées à l'article L. 6112-3. »
II. - En conséquence, dans le XV de cet article, supprimer la référence :
L. 6161-9
M. Jacky Le Menn. - Les Espic peuvent faire appel à des professionnels de santé libéraux comme les établissements publics.
M. le président. - Amendement n°386, présenté par M. Autain et les membres du groupe CRC-SPG.
I. - Après le VII bis de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - L'article L. 6161-8 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Art. L. 6161-8. - Les établissements de santé privés d'intérêt collectif peuvent conclure, pour un ou plusieurs objectifs déterminés, soit avec un établissement public de santé, soit avec une communauté hospitalière de territoire, des accords en vue de leur association à la réalisation des missions de service public. Ces accords sont conclus sur la base du projet régional de santé défini à l'article L. 1434-1, notamment du schéma régional d'organisation des soins défini aux articles L. 1434-6 et L. 1434-7 ou du schéma interrégional défini à l'article L. 1434-8. Ils sont approuvés par le directeur général de l'agence régionale de santé. »
II. - En conséquence, dans le XV de cet article, supprimer la référence :
L. 6161-8,
M. Guy Fischer. - Les établissements privés non lucratifs, désormais dénommés Espic, travaillent en complémentarité avec les hôpitaux, particulièrement en matière de soins de suites et de réadaptation. Pour favoriser cette coopération, que nous entendons ouvrir aux communautés hospitalières de territoire, nous proposons d'instituer une convention d'association. Cette coopération est, pour nous, l'avenir du service public hospitalier ; coopération que l'institut Montaigne qualifie de « modèle invisible » et qui fait contrepoids à la logique de privatisation de la santé.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - N'importe quoi !
M. Guy Fischer. - Bref, ce modeste amendement vise à reconnaître l'importance des Espic ,qui représentent près de 28 % du secteur hospitalier, et à mettre fin à la concurrence déloyale que l'État organise contre ses propres services publics.
M. le président. - Amendement n°593 rectifié ter, présenté par MM. Barbier, Alfonsi, Charasse et Chevènement, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Marsin, Mézard, Milhau, de Montesquiou, Vall et Vendasi.
I. - Après le VII bis de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les articles L. 6161-6 et L. 6161-7 du même code sont ainsi rédigés :
« Art. L. 6161-6. - Les établissements de santé privés d'intérêt collectif peuvent faire appel à des praticiens hospitaliers dans les conditions prévues par les statuts de ces praticiens.
« Ils peuvent, par dérogation aux articles L. 1242-1, L. 1242-2, L. 1242-7 et L. 1243-13 du code du travail, recruter des praticiens par contrat à durée déterminée pour une durée au plus égale à quatre ans.
« Art. L. 6161-7. - Les dispositions de l'article L. 6143-2 sont applicables aux établissements mentionnés à l'article L. 6161-5. »
II. - En conséquence, dans le XV de cet article, supprimer les références :
L. 6161-6, L. 6161-7,
M. Gilbert Barbier. - Sans aller aussi loin que M. Fischer, il nous semble important que les Espic puissent recruter des praticiens hospitaliers ou non pour la continuité des soins.
M. Le President. - Amendement n°594 rectifié ter, présenté par MM. Barbier, Collin, Baylet et Charasse, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Marsin, Mézard, Milhau, de Montesquiou, Plancade, Tropeano et Vall.
I. - Après le VII bis de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - L'article L. 6161-9 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 6161-9. - Dans des conditions fixées par voie réglementaire, un établissement de santé privé d'intérêt collectif peut admettre des médecins, sages-femmes et odontologistes ainsi que des auxiliaires médicaux qui exercent à titre libéral à participer à la mise en oeuvre de ses missions de service public et de ses activités de soins. Les honoraires des professionnels libéraux sont à la charge de l'établissement de santé privé d'intérêt collectif, qui peut recourir à des conditions de rémunération particulières autres que le paiement à l'acte. Par exception aux dispositions de l'article L. 162-2 du code de la sécurité sociale, l'établissement privé d'intérêt collectif verse aux intéressés les honoraires, le cas échéant minorés d'une redevance.
« Un contrat conclu entre les professionnels libéraux mentionnés au premier alinéa et l'établissement fixe les conditions et modalités de leur participation aux missions de service public et aux activités de soins de l'établissement et assure le respect des garanties mentionnés à l'article L. 6112-3.
II. En conséquence, dans le XV de cet article, supprimer la référence :
L. 6161-9
M. Gilbert Barbier. - Nous visons cette fois les médecins, sage-femmes, odontologistes et auxiliaires médicaux.
M. le président. - Sous-amendement n°1219 à l'amendement n°162 de M. Gouteyron, présenté par le Gouvernement.
I. - Rédiger comme suit, le troisième alinéa de l'amendement n° 162 :
« Art. L. 6161-9- Un établissement de santé mentionné aux b) et c) de l'article L.162-22-6 du code de la sécurité sociale peut être admis par le directeur général de l'agence régionale de santé à recourir à des professionnels médicaux et auxiliaires médicaux libéraux dans la mise en oeuvre de ses missions de service public et de ses activités de soins. Ils sont rémunérés par l'établissement sur la base des honoraires correspondant aux tarifs prévu au 1° de l'article L. 162-14-1 du code de la sécurité sociale, minorés d'une redevance. Les conditions d'application du présent alinéa sont fixées par décret.
II. - Dans le dernier alinéa du même amendement, supprimer les mots :
de santé privé d'intérêt collectif
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Oui à l'amendement n°162 de M. Gouteyron qui permettra utilement aux Espic de recruter des professionnels de santé libéraux pour gérer les pics d'activité, notamment aux urgences, mais sous deux conditions. Premièrement, le directeur de l'ARS, le plus apte à juger de l'interaction entre secteur hospitalier et médecine de ville sur son territoire, devra vérifier si leur recrutement correspond à un besoin réel. Ensuite, leur rémunération s'établira sur la base des tarifs opposables de secteur 1 -j'y suis particulièrement attachée par cohérence avec l'esprit de ce texte. Enfin, par souci d'équité, nous étendons ce dispositif à tous les établissements privés dits « ex dotation globale » compte tenu de l'identité de leur mode de financement. (Marques d'approbation à droite)
M. Alain Milon, rapporteur. - L'amendement n°300 n'est pas compatible avec le choix retenu par la commission : retrait ou rejet.
L'amendement n°160 traduit un intérêt pour les Espic que la commission partage mais comment employer ce personnel hospitalier dans les mêmes conditions que dans les établissements publics ? Le CDD de cinq ans ne nous choque pas mais est-ce cohérent ici ? On restaure la catégorie des PSPH... Défavorable, comme aux amendements nos301, 593 rectifié ter et 302, qui ont le même sens.
La formule proposée par l'amendement n°161 est intéressante ; nous y sommes favorables, comme aux amendements nos304 et 386, puisque c'est la même chose.
La commission n'a pas vu le sous-amendement du Gouvernement à l'amendement n°162 ; pour ma part, je crois qu'il contient une erreur de référence et que sa deuxième phrase devrait être rectifiée de la façon suivante : « Ils sont rémunérés par l'établissement sur la base des honoraires correspondant aux tarifs prévus au 1° du I de l'article L. 162-14-1 du code de la sécurité sociale, minorés d'une redevance. »
Dans ces conditions, nous sommes favorables à l'amendement n°162, ainsi qu'aux nos303 et 594 rectifié qui ont le même objet, ainsi qu'au n°163 par coordination.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - J'accepte la rectification demandée pour mon sous-amendement.
Je comprends votre souci de ne pas laisser se créer une nouvelle catégorie d'établissements sans lui donner de règles de fonctionnement, mais ce n'est pas vraiment une nouvelle catégorie et ces établissements relèvent de dispositions réglementaires qui existent déjà. Je suis donc défavorable aux amendements nos300 et 160 au nom de la hiérarchie des normes.
Sur les amendements nos301, 593 rectifié ter et 302, je vais donner mon avis paragraphe par paragraphe. Le premier relève du règlement, et je ne supprimerai pas cette possibilité déjà prévue par le statut des praticiens hospitaliers. En revanche, je suis défavorable sur le fond aux autres paragraphes : ne dérogeons pas à la législation sur les contrats à durée déterminée et laissons aux Espic toute liberté de s'organiser différemment des établissements publics. Les amendements nos161, 304 et 386 n'apportent rien par rapport au droit actuel. J'inviterai les ARS à accorder une attention particulière aux coopérations instituées selon la logique de l'organisation territoriale de l'offre de soins.
M. Guy Fischer. - Sagesse ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Non, retrait, plutôt.
M. Guy Fischer. - La commission était favorable...
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Enfin, je suis favorable aux autres amendements sous réserve de mon sous-amendement n°1219 rectifié.
M. François Autain. - Encore !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - C'est un travail collaboratif.
M. Jean Desessard. - Il y a la commission pour cela.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Et la maïeutique du débat parlementaire ?
Je veux que soient respectées des conditions à cette entrée des praticiens libéraux dans les Espic : l'accord du directeur de l'ARS, le mode de rémunération.
L'amendement n°300 n'est pas adopté.
M. Adrien Gouteyron. - Mme la ministre a donné un avis défavorable à mon amendement n°160 au motif d'une part que l'appel à des praticiens hospitaliers était d'ordre réglementaire, d'autre part que ces CDD de cinq ans dérogeaient au code du travail. Je regrette cette opposition de principe sur ce dernier point, car, dans ces conditions particulières, la mesure me paraissait adaptée. Je retire néanmoins mon amendement.
L'amendement n°160 est retiré.
L'amendement n°301, identique à l'amendement n°593 rectifié ter, n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°302
L'amendement n°161 est adopté.
Les amendements n°s304 et 386 deviennent sans objet
M. François Autain. - Le groupe CRC-SPG est défavorable à l'amendement n°162. Les hôpitaux PSPH avaient le grand avantage de ne pas accueillir d'activité libérale. Je sais que, faute de praticiens dans certaines spécialités, les hôpitaux peuvent être obligés de recruter des médecins libéraux. S'ils n'ont pas été capables de retenir ces praticiens, c'est faute d'avoir pu leur offrir des conditions suffisamment favorables. Il aurait été plus sage de se pencher sur ce problème, mais le Gouvernement a préféré laisser les hôpitaux aux prises avec leurs difficultés, qui, -ce qui n'est pas pour lui déplaire- font le lit du succès du secteur privé... Nous voterons également contre à l'article 10.
M. Adrien Gouteyron. - J'adhère au sous-amendement du Gouvernement sur le contrôle de l'ARS et le mode de rémunération, sous réserve de la rectification proposée. M. Autain fait preuve d'une belle souplesse intellectuelle : il exprime la répulsion que suscite la médecine libérale...
M. François Autain. - Je n'ai pas employé ce terme !
M. Adrien Gouteyron. - ....mais reconnaît que faire appel à des médecins libéraux permet de répondre à certaines situations. L'avis de l'ARS est alors essentiel.
M. François Autain. - Absolument.
Le sous-amendement n°1219 rectifié est adopté.
L'amendement n°162 sous-amendé est adopté.
Les amendements n°303 et n°594 rectifié ter deviennent sans objet.
L'amendement n°163 est adopté.
(Mme la ministre s'en étonne)
Prochaine séance aujourd'hui, jeudi 14 mai 2009 à 9 h 30.
La séance est levée à minuit et demi.
Le Directeur du service du compte rendu analytique :
René-André Fabre
ORDRE DU JOUR
du jeudi 14 mai 2009
Séance publique
A NEUF HEURES TRENTE
Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires (n°290, 2008-2009).
Rapport de M. Alain Milon, fait au nom de la commission des affaires sociales (n°380, 2008-2009).
Texte de la commission (n°381, 2008-2009).
A QUINZE HEURES ET LE SOIR
- Questions d'actualité au Gouvernement.
- Suite de l'ordre du jour du matin.
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DÉPÔTS
La Présidence a reçu de :
- M. Yves Détraigne un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale sur la proposition de résolution européenne présentée au nom de la commission des affaires européennes en application de l'article 73 bis du Règlement, par M. Simon Sutour, sur la proposition de décision-cadre relative à l'utilisation de données des dossiers passagers (Passenger Name Record - PNR) à des fins répressives (E 3697) (n°252, 2008-2009) ;
- la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, le texte sur la proposition de résolution européenne présentée au nom de la commission des affaires européennes en application de l'article 73 bis du Règlement, par M. Simon Sutour, sur la proposition de décision-cadre relative à l'utilisation de données des dossiers passagers (Passenger Name Record - PNR) à des fins répressives (E 3697) (n°252, 2008-2009) ;
- M. Michel Boutant un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de l'État des Émirats Arabes Unis (n°351, 2008-2009) ;
- la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, le texte sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de l'État des Émirats Arabes Unis (n°351, 2008-2009) ;
- M. Michel Sergent un rapport d'information fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur l'Institut national du sport et de l'éducation physique (Insep).