Disponible au format PDF Acrobat


Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Retrait d'un projet de loi

CMP (Nominations)

Questions orales

Charge des poids lourds

Liaison est-ouest d'Avignon

Redevance d'assainissement

Liaison ferroviaire Belfort-Delle

Redevance domaniale des sociétés autoroutières

Petit éolien

Établissement public d'insertion de la défense

CCEFP

Création d'un "Pôle national de la statistique publique"

Application de la loi "handicap".

Vote électronique

Fermetures de tribunaux dans l'Aveyron

Cystite interstitielle

Bruit nocturne à l'hôpital

Prestations sociales des vieux migrants

Grand Prix de France

Instruction comptable relative aux SPIC

Aides directes à l'agriculture

Modification à l'ordre du jour

Organismes extraparlementaires (Appel à candidatures)

Mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement

Discussion générale

Commissions mixtes paritaires

Rappel au Règlement

Mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement (Suite)

Discussion générale (Suite)

Discussion des articles

Article additionnel

Article premier




SÉANCE

du mardi 27 janvier 2009

58e séance de la session ordinaire 2008-2009

présidence de M. Roger Romani,vice-président

Secrétaires : M. Jean-Pierre Godefroy, M. Bernard Saugey.

La séance est ouverte à 10 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Retrait d'un projet de loi

M. le président.  - M. le Premier ministre a fait connaître, le 26 janvier 2009, à M. le Président du Sénat, qu'il retirait du Sénat le projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre la République française et l'Organisation internationale de la francophonie relative à la mise à disposition de locaux pour installer la Maison de la francophonie à Paris, déposé le 22 mars 2007 sur le bureau du Sénat.

Acte est donné de ce retrait.

CMP (Nominations)

M. le président.  - M. le Président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi pour l'accélération des programmes de construction et d'investissement publics et privés, que nous avons adopté le 23 janvier 2009.

La liste des candidats établie par la commission des affaires économiques n'ayant fait l'objet d'aucune opposition, je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire M. Jean-Paul Emorine, Mme Élisabeth Lamure, MM. Laurent Béteille, Philippe Marini, Daniel Dubois, Daniel Raoul et Yannick Botrel comme membres titulaires, et MM. Philippe Darniche, Philippe Dominati, François Fortassin, Pierre Hérisson, Michel Houel, Charles Revet et Mme Odette Terrade comme membres suppléants.

Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les réponses du Gouvernement à dix-huit questions orales.

Charge des poids lourds

Mme Nathalie Goulet.  - Ma question est liée au projet de loi sur la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement dont nous commencerons l'examen sous peu. De fait, porter la charge des véhicules routiers de 40 à 44 tonnes, comme me l'ont demandé certains industriels en s'appuyant sur l'exemple de la Suède ou des Pays-Bas qui autorisent respectivement-50 et 60 tonnes, permettrait d'éviter bien des gaspillages écologiques, outre que le prix du carburant augmente... Le ministre de l'écologie n'ayant pas donné suite à mes interventions du 27 juin 2007 et du 10 juillet 2008 sur le même sujet, j'espère que j'obtiendrai aujourd'hui une réponse du Gouvernement conforme à l'esprit du Grenelle de l'environnement.

M. Hubert Falco, secrétaire d'État chargé de l'aménagement du territoire.  - Au nom de M. Jean-Louis Borloo, qui m'a demandé de le remplacer, je puis vous dire que le poids maximal autorisé de 40 tonnes, fixé à l'article R.312-4 du code de la route, retenu par la réglementation européenne pour le transport international, est appliqué en Allemagne ou encore en Espagne. Toutefois, la limite autorisée peut être portée à 44 tonnes lorsque la plus grande partie du trajet s'effectue par voie ferrée ou par voie navigable ainsi que pour la desserte des ports maritimes et des autoroutes ferroviaires, telle celle qui relie Perpignan à Luxembourg, dans un périmètre de 100 km. D'autres dérogations sont prévues pour répondre aux besoins de certains trafics, notamment celui du transport du bois -nous en aurions besoin dans les semaines à venir en Aquitaine !- ou encore des récoltes de betteraves.

A la suite du Grenelle de l'environnement, le ministre d'État a lancé une réflexion sur l'extension de la dérogation applicable aux ports maritimes aux dessertes des installations fluviales afin de rendre plus attractif ce mode de transport écologique. Enfin, la question des équilibres modaux sera sous peu abordée au niveau européen dans le cadre de l'évaluation de la directive de 1996 relative à la charge et aux dimensions des poids lourds demandée par la Commission européenne.

Mme Nathalie Goulet.  - Je vous remercie infiniment de cette réponse. Mais, selon l'entreprise Roxane Nord dont vous savez l'importance dans le secteur du transport routier, le seul intérêt que le Gouvernement aurait à refuser cette modification serait de placer le chemin de fer dans une situation encore plus inconfortable... Revoyons donc cette décision à l'aune du Grenelle de l'environnement. Pour l'heure, la solution envisagée ne convient pas à un département enclavé comme l'Orne, fort éloigné des ports de pêche...

Liaison est-ouest d'Avignon

M. Alain Dufaut.  - Une fois de plus, j'attire l'attention du Gouvernement sur le retard pris dans la réalisation de la liaison est-ouest d'Avignon. Cette infrastructure routière, qui reliera à terme les autoroutes A7 et A9, décongestionnera la rocade urbaine et désenclavera la gare TGV d'Avignon, difficilement accessible au confluent du Rhône et de la Durance. A l'étude depuis vingt ans, le projet a bénéficié d'une déclaration d'utilité publique le 16 octobre 2003. Or un seul pont sur la Durance est en construction, alors que le contrat de Plan État-Région prévoyait à ma demande la construction simultanée de deux ouvrages. La suite des travaux n'a pas été planifiée au-delà de la livraison de la première tranche en 2009, ce qui menace le développement économique de tout un bassin de vie. Seul le recours à un partenariat public-privé prévoyant une contribution partielle des collectivités territoriales peut garantir la réalisation de la liaison car la solution de la concession nécessiterait de reprendre la procédure de déclaration d'utilité publique au début. Hélas, le préfet de la région Paca n'a toujours pas organisé de tour de table entre les collectivités territoriales concernées, pas plus que le partenariat public-privé n'a été inscrit à la mission d'appui à la réalisation des contrats de partenariat.

Dans le cadre du plan de relance de 26 milliards, présenté par le Président de la République, une enveloppe de 10,5 milliards est prévue pour l'investissement. La réalisation des tranches suivantes de la liaison est-ouest, estimée à 250 millions, devra y faire figure de chantier prioritaire d'autant qu'elle ne représentera que 2,5 % seulement des crédits, 1,8 % si les collectivités territoriales contribuent pour moitié au projet. Monsieur le ministre, quand sera conclu le partenariat public-privé qui permettra de financer la suite des travaux ?

M. Hubert Falco, secrétaire d'État chargé de l'aménagement du territoire.  - A l'occasion d'un déplacement à Châteaurenard, j'ai mesuré l'inquiétude des élus quant à l'avenir de ce projet incontestablement utile pour Avignon, Châteaurenard et tout ce bassin de vie.

Les travaux sur la section centrale ont été déclarés d'utilité publique le 16 octobre 2003. La première tranche, entre Courtine et Rognonas, sera en service fin 2009. L'achèvement de la section a été envisagé dans le cadre d'un contrat de partenariat public-privé. Des discussions ont été conduites par le préfet avec les collectivités territoriales, sans aboutir à un accord. La liaison est-ouest d'Avignon doit, conformément aux conclusions du Grenelle de l'environnement, être réexaminée dans le cadre de la revue générale des projets. Après, les discussions sur le bouclage financier pourraient reprendre et, si elles aboutissent, la procédure d'évaluation préalable par la mission d'appui aux partenariats publics-privés pourra être achevée.

M. Alain Dufaut.  - Je sais que vous vous êtes rendu sur place avec le député M. Bernard Reynès et que vous êtes conscient de l'importance de cet ouvrage pour le bassin de vie d'Avignon. Mais votre réponse ne me satisfait pas : après l'achèvement de la première tranche, il y aura une rupture de continuité. Cela sera un dommage pour le Gard, le Vaucluse, les Bouches-du-Rhône. Il s'agit d'un élément essentiel d'aménagement du territoire et je compte sur vous, monsieur le ministre, pour relancer et finaliser le projet.

Redevance d'assainissement

Mme Esther Sittler.  - La loi du 30 décembre 2005 relative à la redevance d'assainissement renvoie à un décret le soin de fixer les conditions dans lesquelles les usagers du réseau d'assainissement doivent « installer un dispositif de comptage de l'eau qu'ils prélèvent sur des sources autres que le réseau de distribution ». Le décret fixe également les conditions dans lesquelles cette consommation d'eau est prise en compte dans le calcul de la redevance d'assainissement. Or, le décret du 11 septembre 2007 ne clarifie rien !

La loi sur l'eau créait une obligation, le décret offre une alternative à l'installation de dispositifs de comptage, en prévoyant que la redevance d'assainissement peut être calculée sur la base de critères tels que la surface de l'habitation et du terrain, le nombre d'habitants, la durée du séjour... Cela semble possible si l'alimentation en eau se fait entièrement à la même source, mais très difficile lorsque l'alimentation se fait pour une part seulement hors du réseau de distribution. Seul un dispositif de comptage permet d'évaluer les quantités rejetées dans le réseau de collecte des eaux usées. En outre, je souligne que le décret laisse l'autorité organisatrice fixer les conditions de transmission des relevés.

Depuis un arrêté du 21 août 2008, les propriétaires de bâtiments dotés d'un système de récupération des eaux de pluie et raccordés au réseau de collecte des eaux usées sont tenus de mettre en place « un système d'évaluation du volume » et de tenir à jour un carnet sanitaire comportant le relevé mensuel des consommations. Cependant, la déclaration des volumes en mairie est obligatoire une seule fois, au moment de la déclaration de l'installation d'un système de récupération des eaux de pluie !

Pourquoi le décret ouvre-t-il une possibilité non prévue par le législateur ? Comment les critères mentionnés sont-ils applicables en cas de prélèvement partiel ? Ne conviendrait-il pas de préciser les conditions de transmission des relevés ? La simple déclaration en mairie ne suffit manifestement pas. Des sanctions sont-elles prévues en cas de non-respect de l'obligation de déclaration ?

M. Hubert Falco, secrétaire d'État chargé de l'aménagement du territoire.  - Le dispositif de comptage, généralement implanté au point de prélèvement, enregistre les volumes prélevés pour le logement, l'arrosage du jardin ou l'abreuvage d'animaux. Dans ce dernier cas, la pose de compteurs divisionnaires est obligatoire. En tout état de cause, le comptage n'est possible que sur de l'eau propre.

Dans l'intérêt des collectivités, il fallait prévoir une solution, en cas d'absence de compteur ou lorsque le compteur enregistre des volumes prélevés pour d'autres usages que ceux du logement raccordé au réseau d'assainissement. C'est pourquoi la possibilité d'évaluation forfaitaire de l'assiette a été maintenue. L'arrêté du 21 août 2008 a précisé les possibilités d'utilisation des eaux pluviales dans l'habitation. Il est très difficile d'estimer le volume récupéré. Le plus souvent, seule est possible une évaluation selon les caractéristiques de l'installation. En cas de comptage, les volumes annuels utilisés pourront être retenus pour le calcul de la redevance communale d'assainissement.

Il apparaît donc désormais possible de compléter la rédaction de l'article R. 2224-19-4 en précisant les données de comptage prises en compte pour le calcul de la redevance d'assainissement. L'évaluation forfaitaire en l'absence de compteurs ou de compteurs aux normes doit être maintenue. Un projet de décret sera donc prochainement soumis à la concertation.

Mme Esther Sittler.  - Il est bon d'encourager comme vous le faites l'installation de dispositifs de comptage. Mais les collectivités, qui organisent le traitement des eaux usées, doivent aussi s'y retrouver financièrement.

M. Hubert Falco, secrétaire d'État.  - Oui !

Liaison ferroviaire Belfort-Delle

M. Martial Bourquin.  - Je veux évoquer la réouverture de la ligne de chemin de fer Belfort-Delle. La ligne à grande vitesse (LGV) Rhin-Rhône doit voir le jour en 2011. Il est indispensable de développer des transports collectifs en lien avec cette nouvelle gare, conformément aux objectifs du Grenelle de l'environnement. Cette ligne assurera l'intermodalité entre la LGV Rhin-Rhône et le réseau classique. Sept haltes pourraient être prévues entre Belfort et la Suisse, ce qui créerait un transport collectif performant, relié au réseau suisse et assurant l'accès des usagers suisses à la nouvelle gare LGV.

Pourtant, la concrétisation de ce projet est bien problématique ! Le financement est inscrit au contrat de projet État-région 2007-2013, il associe l'État, le conseil régional de Franche-Comté, RFF, le conseil général du Territoire de Belfort et l'État fédéral suisse. Le montant inscrit est de 64 millions d'euros, mais le coût désormais évalué se situe entre 84 et 90 millions d'euros. La région, ne pouvant envisager l'abandon du projet, est prête à assumer le surcoût au prorata de sa participation initiale. Mais elle ne peut faire d'effort seule. Faudra-t-il renoncer, faute de volonté politique ? Le Président de la République annonçait en décembre dernier un soutien massif de l'État aux investissements publics, en particulier de transport. Espérons qu'il ne s'agit pas d'un pur effet d'annonce... De quelle manière l'État prendra-t-il à sa charge une partie du surcoût ?

M. Hubert Falco, secrétaire d'État chargé de l'aménagement du territoire.  - La ligne Belfort-Delle améliorera le trafic ferroviaire en Franche-Comté, avec une desserte de la gare TGV de Méroux, des liaisons TER, des correspondances avec le réseau classique et, vous l'avez souligné, avec la Suisse. Oui, ce projet fait partie des priorités de l'État en Franche-Comté. Il est inscrit au contrat de projet pour un montant de 64 millions sur lesquels l'État apporte 19,85 millions. L'État a confirmé son engagement en ouvrant dès 2007 les crédits nécessaires à la signature de la convention d'études d'avant-projet. Ces études ont montré que le coût final serait supérieur à celui qui avait été inscrit dans le contrat de projet. La deuxième phase des études va permettre d'approfondir les scénarios de dessertes en tenant compte de la suppression des passages à niveau. Quand le coût sera arrêté, le surcoût méritera d'être discuté lors de la révision à mi-parcours du contrat de projet. Il sera possible de redéployer des crédits prévus pour des opérations qui n'auront pas été réalisées.

M. Martial Bourquin.  - Vous me faites part de l'intérêt local, régional et international de cette opération. Vous mettez aussi en avant la mise en place des études mais la question du surcoût ne se pose pas dans les mêmes termes pour les collectivités territoriales et pour l'État : nous ne pouvons monter une opération que si nous avons les crédits correspondants. La question est donc extrêmement concrète et il serait bon de tenir prochainement une réunion opérationnelle afin de mettre le projet sur les rails dès maintenant. Les entreprises du bâtiment et des travaux publics ont besoin de travail : le chantier est prêt ; il ne reste plus qu'à déterminer à quel niveau l'État est prêt à prendre en compte le surcoût.

Redevance domaniale des sociétés autoroutières

M. Éric Doligé.  - La relance passe par l'investissement et le plan du Gouvernement favorise heureusement les infrastructures, qui conditionnent le développement et dont l'Agence pour le financement des infrastructures du transport de France finance la diversification. Alors que la baisse du trafic autoroutier déstabilise les recettes attendues, l'État a décidé d'augmenter de 300 millions la redevance domaniale des sociétés autoroutières. Même si, après discussion, nous sommes revenus à 200 millions, l'économie générale des concessions risque d'être déstabilisée. Le refinancement représentant 80 % du plan financier, c'est tout le projet A19 Artenay-Courtenay qui est compromis par la dégradation conséquente des comptes de la société concessionnaire, celle-ci risquant même la faillite. Le Gouvernement change les règles d'un contrat auquel les collectivités apportent 40 millions, comme l'État, mais avec une clause de retour à meilleure fortune, qui ne pourra plus jouer ; est-ce légal ?

Quelle appréciation portez-vous sur l'avenir des concessionnaires et le Gouvernement ne risque-t-il pas de fragiliser les partenariats public-privé faute de confiance en la pérennité juridique et fiscale des projets ? Je sais que l'État envisage d'allonger la durée des concessions mais il faudrait sans doute revoir l'adossement.

M. Hubert Falco, secrétaire d'État chargé de l'aménagement du territoire.  - Vous évoquez le projet d'augmentation de la redevance domaniale sur les autoroutes afin de financer l'Agence de financement des infrastructures de transports de France. Je rappelle que la loi de finances pour 2009 prévoit une importante dotation budgétaire pour l'Agence en attendant qu'elle dispose de la ressource pérenne que sera l'éco-redevance sur les poids lourds utilisant le réseau national. Cette redevance va sensiblement modifier les choix des transporteurs ; d'après nos simulations, elle entraînera un report de trafic vers les autoroutes. Il est légitime de tenir compte de ce surcroît de recettes des sociétés autoroutières. Cela pourrait conduire à ajuster la redevance domaniale actuellement calculée en fonction du kilométrage multiplié par le nombre de voies et du chiffre d'affaires des sociétés concédantes. Il faudra examiner s'il y a lieu de modifier ces critères. Nous sommes attentifs à ne pas bouleverser les contrats de concession ; c'est particulièrement le cas de l'A19 qui doit garantir le financement de la dette contractée et est d'une ampleur plus limitée que d'autres contrats. Les ajustements ne rendront pas impossible le financement privé d'infrastructures que nous appelons de nos voeux.

M. Éric Doligé.  - Je vous remercie de cette réponse. Je suis tout à fait d'accord sur la nécessité de doter l'Agence d'une ressource pérenne et je n'ai pas de problème sur l'éco-redevance, dont on ignore encore le retour financier.

Des concours ont été négociés en fonction d'un niveau donné de taxe, un équilibre financier a été défini et un retour financier prévu pour les collectivités. Si l'État prélève plus, cela se traduira dans le compte d'exploitation et le retour financier sera moindre pour les collectivités : ce sont elles qui paieront indirectement l'augmentation de la redevance. J'insiste donc sur cette difficulté ainsi que sur l'éventuel déséquilibre des sociétés autoroutières concessionnaires de petites portions du réseau.

Petit éolien

M. Roland Courteau.  - Le petit éolien, c'est-à-dire les aérogénérateurs dont la puissance est inférieure à 36 KW, est encore accessible au monde rural et les agriculteurs y voient de plus en plus une forme de diversification de leurs activités. Cela représente un potentiel non négligeable de KWh verts pour les campagnes françaises avec un impact psychologique favorable. Plusieurs sources d'énergie renouvelables sont exploitables sur chaque territoire, de la biomasse au solaire, du vent à l'hydraulique ; l'essentiel est d'établir des complémentarités afin de répondre au mieux à la demande. Le petit éolien s'y adapte particulièrement bien, en complémentarité avec le photovoltaïque, tous deux permettant aux acteurs ruraux d'investir directement dans un outil de production de l'énergie renouvelable, à l'échelle d'un particulier, d'une exploitation agricole, d'une collectivité ou d'une collectivité locale. Or, faute de se situer en zone de développement éolien, les petites éoliennes ne bénéficieront pas de l'obligation d'achat et ne pourront donc être raccordées au réseau dans des conditions économiques acceptables. De ce fait, la pertinence économique d'une petite éolienne, déjà compromise par l'absence d'un tarif spécifique adapté, devient quasi nulle. Le Gouvernement veut-il atteindre les objectifs fixés pour 2020 et favoriser le développement de l'espace rural ?

Pour cela, il faut exclure les aérogénérateurs de moins de 36 KW de la réglementation lourde, même s'ils ne sont pas situés dans une ZDE. Il faut aussi réfléchir à la création d'un tarif d'achat adapté au petit éolien.

Quelles sont les intentions du Gouvernement ?

M. Hubert Falco, secrétaire d'État chargé de l'aménagement du territoire.  - M. Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, a présenté le 17 novembre dernier le plan de développement des énergies renouvelables issu du Grenelle de l'environnement. Ce programme a pour objectif de porter à 23 % la part des énergies renouvelables dans la consommation d'énergie à l'horizon 2020, grâce à une augmentation de 20 millions de tonnes équivalent pétrole de la production annuelle d'énergie renouvelable. II comprend 50 mesures opérationnelles, qui concernent l'ensemble des filières : bioénergies, éolien, géothermie, hydroélectricité, solaire, énergies de la mer. II a pour ambition un changement complet d'échelle : doublement de la production d'énergies renouvelables en douze ans, multiplication de la production par deux pour le bois-énergie, par six pour la géothermie, par douze pour les réseaux de chaleur, et un changement d'échelle sur le photovoltaïque : une production multipliée par 400.

M. Roland Courteau.  - Tout cela, nous le savons déjà !

M. Hubert Falco, secrétaire d'État.  - Ce plan sera à haute qualité environnementale. Le développement de chaque source d'énergie devra respecter le paysage, le patrimoine, la qualité de l'air et de l'eau, la biodiversité. Les mesures trouvent leur traduction dans le projet de loi portant engagement national pour l'environnement qui sera prochainement débattu au Parlement, la loi de finances pour 2009, la loi de finances rectificative pour 2008 et des textes réglementaires. (M. Roland Courteau marque son impatience, son irritation, enfin son amusement)

Concernant le petit éolien, le comité opérationnel du Grenelle, auquel ont participé les professionnels des énergies renouvelables, estime que les petites éoliennes, même en grand nombre, ne participeraient que fort peu aux objectifs 2020 et que reste à conduire de nombreuses études de gisement, de performance, de longévité du matériel. Il faut aussi mener un travail de fond sur les autorisations d'édifier et d'exploiter pour mettre en oeuvre de façon satisfaisante la filière et décrire les moyens de la soutenir.

Compte tenu de ces conclusions, il a été décidé de ne pas créer un régime d'exception pour les petites éoliennes. Néanmoins, outre le tarif préférentiel d'achat de l'énergie éolienne quand elles sont situées en zone de développement éolien, les petites éoliennes intégrées aux résidences principales peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt de 50 %.

M. Roland Courteau.  - Je m'attendais à autre chose !Que vous dire ? Vous n'avez fait que lire un texte rédigé par les services de M. Borloo, que nous ne voyons guère dans cet hémicycle... A quoi bon polémiquer avec vous sur la base d'une telle réponse ? Nous en reparlerons lors de l'examen du projet de loi sur le Grenelle de l'environnement ; nous verrons bien ce que sera la volonté du Parlement, qui seul peut décider.

Établissement public d'insertion de la défense

Mme Fabienne Keller.  - J'attire votre attention sur l'Établissement public d'insertion de la défense (Épide), appelé aussi « Défense deuxième chance », qui doit beaucoup à Mme Alliot-Marie, lorsqu'elle était ministre de la défense. Cet outil est de grande qualité est très efficace pour aider les jeunes adultes en difficulté. Ceux-ci sont structurés par l'accueil en internat, l'équilibre entre les enseignements, la pratique sportive et la démarche professionnelle, organisée autour de stages et de partenariats avec des entreprises. Ils peuvent ainsi retrouver un chemin constructif dans notre société. Cette structure, remarquable par la qualité de son encadrement, doit beaucoup au ministère de la défense et à son personnel d'encadrement, issu de l'armée française.

Je vous remercie vivement, monsieur le ministre, de vous être déplacé ce matin pour répondre à cette seule question : le Gouvernement entend-il confirmer son soutien à ce dispositif, par la coordination entre les trois ministères de la défense, de l'emploi et de la ville ? Je souhaite aussi connaître précisément le devenir et les perspectives de développement de ce dispositif, qui lui paraît être un élément important de notre politique de cohésion sociale. Je m'inquiète pour l'établissement de Strasbourg, que j'ai vu se développer et qui est désormais particulièrement bien intégré dans les processus d'insertion des jeunes.

Le rapport remis au Conseil économique et social le 21 janvier a souligné la qualité de ce dispositif.

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants.  - Je tiens tout d'abord à vous remercier pour cette question qui marque votre intérêt pour le dispositif « Défense deuxième chance » porté par l'établissement public d'insertion de la défense. Je vais vous répondre très directement : je m'exprime au nom du ministre de la défense, mais aussi en mon nom propre puisque j'avais personnellement souhaité que Mulhouse accueille un centre de la deuxième chance. Je suis responsable de ce dossier, dont je défends l'actualisation. J'étais la semaine dernière au Conseil économique et social pour y entendre l'excellent rapport de Mme Geng qui a dressé un bilan très positif, très réaliste et très constructif de cet excellent dispositif.

La Défense, tout comme les deux autres ministères de tutelle de cet établissement public, le ministère chargé de l'emploi et celui du logement et de la ville, soutient plus que jamais l'idée d'une insertion professionnelle des jeunes, sur une base volontaire à l'aide d'une pédagogie inspirée de la discipline militaire. La meilleure preuve de cet intérêt réside dans la validation, en novembre dernier, du premier contrat d'objectifs et de moyens de cet établissement public. Ce premier COM donne à l'établissement la visibilité nécessaire à sa stabilisation sur les trois prochaines années. Le format de 22 centres maximum est réaffirmé, ce qui permettra un redéploiement au profit de centres, déjà ouverts ou à ouvrir dans des bassins d'emploi et de vie adaptés à l'activité d'insertion professionnelle de jeunes en voie de marginalisation.

Les premiers résultats du centre de Strasbourg confirment la pertinence de son implantation. C'est un centre dont l'activité sera progressivement renforcée sur les prochaines années.

Mme Fabienne Keller.  - Je vous remercie pour votre implication personnelle dans ce dossier. Sans votre action, ce premier contrat d'objectifs et de moyens n'aurait peut-être pas été bouclé.

Chaque année, lors des journées d'appel et de préparation à la défense, on recense 60 000 jeunes en sérieuses difficultés. C'est peut-être sur cette base qu'on a évalué à 20 000 le nombre de places qui seraient utiles en Épide. On en est à dix fois moins... Il faut de nouvelles places pour donner une deuxième chance à ces jeunes, pour Mulhouse et pour Strasbourg !

CCEFP

Mme Claudine Lepage.  - J'attire votre attention sur les vives préoccupations que suscite dans l'Union européenne le devenir des comités consulaires pour l'emploi et la formation professionnelle. Leur fermeture évoquée éveille de grandes inquiétudes, exacerbées par la situation économique actuelle.

Il est ainsi question de fermer celui de Munich en 2010, voire dès 2009. Le bilan de ses activités est pourtant très satisfaisant : il comptabilise 112 embauches sur l'année 2008, malgré le ralentissement économique. Son taux de placement est comparable à celui de l'année précédente, pour un coût qui demeure bas : 300 euros en moyenne par placement.

On peut s'interroger sur la nécessité de transformer ces comités, pourtant performants, en services de type associatif. Cette mutation présente de multiples inconvénients. A service égal, le coût de ces nouvelles structures serait le double ! La philosophie même du service, qui évolue vers une logique d'aide à l'entreprise plutôt qu'aux candidats, suscite des interrogations et des préoccupations, au seuil d'une crise qui risque de durer et qui promet une recrudescence de licenciements économiques.

Certes, les Français établis à l'étranger peuvent se tourner vers les agences locales pour l'emploi. Mais le service offert leur est moins bien adapté : aucune information sur les spécificités du marché local de l'emploi ne leur est proposée. D'ailleurs les opérateurs locaux réorientent très souvent nos compatriotes vers les services des consulats, mieux aptes à leur répondre.

L'avenir des CCEFP suscite l'inquiétude de leurs employés, souvent recrutés localement par l'État français, et qui viendraient grossir les rangs des demandeurs d'emploi alors que les perspectives sont partout très sombres pour les années à venir.

Je souhaiterais donc connaître les intentions du Gouvernement à ce sujet.

Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des affaires étrangères et des droits de l'homme.  - L'avenir des CCEFP suscite, vous l'avez dit, quelques inquiétudes ; mais nous devons y réfléchir pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, la citoyenneté européenne et le principe de non-discrimination entre les ressortissants des pays membres de l'Union européenne nous conduit à nous interroger. Les enquêtes menées au cours de la présidence française ont révélé que la France était le seul pays de l'Union à intervenir à l'étranger en faveur de l'emploi de ses ressortissants : cela pose un problème de validité au regard du principe communautaire de non-discrimination. En outre, ces études ont montré que le droit européen était correctement appliqué à nos compatriotes, notamment en ce qui concerne l'accès aux services de placement.

Ensuite, le conseil de modernisation des politiques publiques a décidé de réorganiser la carte des ambassades et des consulats et de réduire le réseau consulaire dans l'Union : cela se traduira par la suppression en trois ans de six postes en équivalent temps plein dans le domaine de l'emploi.

J'ajoute que les dotations inscrites dans la loi de programmation des finances publiques sur la période 2009-2011 conduiront à une forte pression sur les crédits sociaux de ce département, et donc à une réorientation des moyens en faveur de la formation professionnelle et du placement de nos ressortissants en Afrique, dans l'Océan indien et au Maghreb.

Enfin, sur les 41 comités consulaires pour l'emploi et la formation professionnelle, seize sont implantés dans l'Union européenne. Ils ont réalisé en 2007 la moitié des placements et bénéficié de près de 44,5 % du montant des subventions attribuées par la commission permanente pour l'emploi et la formation professionnelle, contre 30,6 % pour le continent américain, 13,8 % pour l'Asie et 10 % pour l'ensemble formé par l'Afrique, le Maghreb et le Moyen-Orient.

Nous souhaitons mettre fin à l'activité de placement stricto sensu, mais les consulats généraux garderont un rôle de conseil et d'information. Pour les appuyer dans cette tâche, nos diplomates ont été invités à identifier des partenaires privés ou publics locaux avec lesquels ils pourraient travailler en partenariat. Une convention définissant les services attendus pourrait être signée entre le poste et le prestataire.

Les consulats généraux seront également invités à diffuser les informations utiles à nos compatriotes en les mettant en ligne ou en éditant des fascicules. Cela rejoint votre souhait de voir compléter l'activité des agences locales de placement par un service de conseil adapté au public français.

Nos ressortissants peuvent également avoir accès au réseau européen Eures, qui a pour objet de faciliter la mobilité des travailleurs en Europe et compte 700 conseillers, ainsi qu'au service international de l'ANPE et à l'Espace emploi international.

Le recours à des organismes de type associatif permet de réduire notablement les coûts de fonctionnement : 27 CCEFP sont hébergés par des structures associatives comme les chambres de commerce et d'industrie ou les associations consacrées à l'emploi. Le partenariat avec les chambres de commerce et d'industrie assure une plus grande proximité avec les entreprises et permet de réaliser des recettes grâce à la tarification du service rendu aux sociétés. La part d'autofinancement des centres progresse régulièrement depuis 2005 : 416 000 euros de recettes sont venus s'ajouter en 2007 aux 549 000 euros de subventions publiques. En outre, dix-sept chambres ont développé un service de l'emploi sans participation du ministère.

En ce qui concerne la situation des agents de droit local, le ministère s'attachera à organiser les suppressions de poste en prenant en compte les situations individuelles et en veillant à la stricte application du droit local. Il procédera par voie de consultation des CCEFP des ambassades et consulats.

Mme Claudine Lepage.  - Merci de votre réponse. La bonne application du droit européen aux ressortissants français est un voeu pieux : j'ai vécu 35 ans dans d'autres pays européens, et j'ai constaté que les discriminations prenaient parfois des formes insidieuses : on reproche à nos compatriotes de ne pas maîtriser assez bien la langue du pays, ou l'on refuse de reconnaître la valeur de leurs diplômes, surtout en ce qui concerne la formation professionnelle.

Je souhaite en outre que nos services conservent un rôle d'information sur les spécificités locales du marché du travail.

Création d'un "Pôle national de la statistique publique"

M. François Rebsamen.  - Je souhaite attirer l'attention de Mme la ministre de l'économie sur le projet de création d'un « Pôle national de la statistique publique », décidé sans concertation préalable au cours de l'été 2008. Je m'interroge sur les effets néfastes de cette décision, d'une part sur le droit des citoyens, des acteurs économiques, sociaux, syndicaux, associatifs et politiques à une information objective sur les réalités économiques et sociales, d'autre part sur l'avenir des directions régionales, notamment celle de Dijon qui compte aujourd'hui 145 agents.

Présenté dans un rapport remis au Premier ministre comme une création et un regroupement, ce projet apparaît plutôt comme le démantèlement d'activités existantes par le transfert de 543 postes dont 310 seraient issus des directions générale et régionale de l'Insee et 142 des centres nationaux informatiques. Or les deux tiers du personnel de l'Insee travaillent aujourd'hui en région pour répondre aux besoins d'expertise des territoires, assurer le suivi des enquêtes et mettre à profit leur connaissance du terrain. II serait incohérent et dangereux d'imposer une délocalisation de tout ou partie de ces services par une décision prise dans l'urgence et sans concertation.

La production de statistiques de qualité repose sur le savoir-faire d'un personnel spécialisé. Une délocalisation exposerait l'Insee à de nombreux départs d'experts en poste, comme l'illustre l'exemple britannique.

Début septembre, le Président de la République annonçait à des élus de Moselle, département le plus touché par les restructurations dans l'armée, des mesures de compensation, parmi lesquelles la délocalisation d'un millier d'emplois de la statistique publique à l'horizon 2011. Mais l'Insee ne doit pas servir à compenser d'autres réformes ! Ce projet, s'il arrivait à terme, menacerait l'existence même d'établissements régionaux, comme celui de Dijon qui approcherait du seuil de viabilité d'un établissement régional fixé à 80 agents.

Une délocalisation coûterait sans doute très cher, mais les éléments de chiffrage du coût de l'opération ont été supprimés du rapport public : je souhaite que le Gouvernement nous donne des précisions à ce sujet, et nous fasse savoir si les bénéfices de la délocalisation ont été évalués. Quelles mesures d'accompagnement sont prévues pour les agents démissionnaires ?

Ce projet risque de porter atteinte à la qualité et à l'indépendance des travaux de l'Insee et aux conditions de vie et de travail des agents, et de se solder par le démantèlement du service statistique public. Je demande donc au Gouvernement de revenir sur sa décision.

Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des affaires étrangères et des droits de l'homme. - Je vous prie tout d'abord d'excuser l'absence de Mme Lagarde.

Le Président de la République a souhaité relancer une politique d'implantation d'emplois publics en région, afin de contribuer à l'activité économique de nos territoires, de réduire le coût de gestion des administrations, notamment en matière immobilière, et d'augmenter les synergies entre les services publics.

Compte tenu de la restructuration des forces armées, il a souhaité que cette politique s'applique prioritairement à l'agglomération de Metz. Située à proximité de l'Office statistique européen et desservie par le TGV, cette ville se prêtait particulièrement bien à accueillir le service statistique public.

Le Premier ministre a donc demandé à M. Jean-Pierre Duport, vice-président du Conseil national de l'information statistique, et à M. Jean-Philippe Cotis, directeur général de l'Insee, de dessiner les contours de ce futur centre en prenant en compte les objectifs suivants : préserver la qualité de la production du service statistique public, apporter une valeur ajoutée au fonctionnement des administrations en exploitant toutes les synergies, créer à Metz un acteur important du service statistique public et un bassin d'emploi attractif pour les agents, et enfin faciliter l'installation des agents par des mesures d'accompagnement. MM. Duport et Cotis ont transmis le 2 décembre dernier leur rapport au Gouvernement, et le Premier ministre a rendu sa décision le 15 janvier.

Ce centre reposera sur quatre piliers : statistiques sociales et locales, produits de diffusion, ressources humaines et informatique. Il comptera environ 620 employés, dont 500 provenant du service statistique public -direction générale de l'Insee, directions régionales, centres nationaux informatiques, Dares et Drees- et 120 créés sur place, pour le centre d'enquêtes téléphoniques et le centre de formation aux statistiques européennes. La création du master de statistiques publiques européennes sera mise à l'étude, en lien avec le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Les modalités de mise en oeuvre du projet et les mesures d'accompagnement feront l'objet de concertations avec les organisations représentatives dans les meilleurs délais.

Il s'agit là d'une mesure d'aménagement du territoire et de solidarité nationale envers les régions touchées par la réforme de la carte militaire. Croyez, monsieur le sénateur, que le Gouvernement est attentif à la qualité de la statistique publique et à ses personnels, qui remplissent leur mission avec une compétence et un dévouement exemplaires.

M. François Rebsamen.  - Je suis moi-même, comme tous les habitants du grand Est, très soucieux de voir compensé, à Metz, le retrait de certains éléments militaires. Reste que l'opération de rapprochement entre l'Insee et Eurostat ne saurait se faire au détriment des activités de l'Insee. La relation étroite entre l'Insee, les autres services du ministère et la recherche doit être préservée. J'observe enfin, madame la ministre, que vous n'avez pas apporté de réponse sur le coût de l'opération pour les finances publiques, notamment en termes de personnel. Je m'inquiète des menaces qui pèsent sur les directions régionales, qui contribuent grandement à l'expertise des territoires, tandis que les élus travaillent à partir des statistiques fournies par l'Insee.

La séance est suspendue pour quelques instants.

Application de la loi "handicap".

M. Jean-Pierre Michel.  - Il n'est pas de coutume de rappeler au Règlement lors de ces séances de questions orales, mais je souhaite néanmoins appeler l'attention du Bureau sur les conditions dans lesquelles se déroulent souvent ces séances. Si M. Marleix, qui vient de nous rejoindre, a toute légitimité pour répondre en lieu et place de Mme Alliot-Marie, j'observe que Mme Yade a dû répondre à une question adressée à Mme Lagarde, et que M. Marleix devra répondre tout à l'heure à une question d'importance adressée à Mme Dati. Tout cela n'est pas très correct et je me demande si l'on ne se moque pas des sénateurs.

J'en viens à ma question, qui porte sur les conséquences, pour les collectivités locales et en particulier les communes, de l'application de la loi handicap, qui leur impose de rendre accessibles les bâtiments et les espaces publics aux personnes handicapées et à mobilité réduite d'ici à 2015. Cette volonté politique, parfaitement légitime, et que je partage, répond à une exigence d'intégration sociale pour ceux qu'ont frappés les aléas de la vie.

La solidarité n'a pas de prix mais elle a un coût, qu'il convient de mutualiser. Dans mon département, la Haute-Saône, le conseil général a décidé d'aider les communes rurales à conduire les études et à réaliser les travaux nécessaires à cette mise en conformité des lieux publics. Les communes doivent, en effet, supporter des charges de plus en plus lourdes et souvent imposées par l'État -passeports biométriques ou service minimum d'accueil dans les écoles, pour citer deux exemples récents. Les maires, sont vivement préoccupés par les dépenses publiques nouvelles que la mise aux normes des bâtiments, trottoirs, voiries impliquera pour les budgets communaux. Pour les élus de proximité, concilier respect de la loi, effort de solidarité et modération fiscale est devenu le triangle introuvable.

Ne serait-il pas opportun de mettre en place une enveloppe exceptionnelle et bonifiée, dans le cadre de la dotation globale d'équipement (DGE) à l'occasion des prochaines lois de finances, pour que l'État appuie l'engagement des communes au profit de la lutte contre les handicaps ?

M. le Président.  - Je vous donne acte de votre observation.

M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales.  - Je vous prie d'excuser Mme Alliot-Marie, ainsi que mon retard : il est vrai que les travaux sur le boulevard Saint-Michel font un peu du Sénat une citadelle inaccessible !

Vous vous inquiétez des difficultés d'application de la loi du 11 juillet 2005, en particulier pour les petites communes. Rendre la cité véritablement accessible aux handicapés impose de fait de nouvelles charges à l'État, mais aussi aux collectivités locales et aux entreprises. Cette exigence n'ouvre pas droit à compensation, puisqu'il s'agit d'une mesure de caractère général. Je suis néanmoins attentif aux charges imposées aux communes. Le Gouvernement est déterminé à mieux associer les collectivités à l'élaboration des normes qui les engagent et c'est dans cette optique qu'il a mis en place la Commission consultative d'évaluation des normes, laquelle est préalablement consultée sur l'impact financier des mesures réglementaires qui créent ou modifient des normes à caractère obligatoire pour l'ensemble des collectivités. Les projets qui lui sont soumis doivent être accompagnés d'une analyse de ces incidences financières, directes et indirectes.

Dans le cas qui nous occupe, la Commission a évalué le 8 janvier dernier le projet de décret relatif à l'accessibilité et à l'aménagement des lieux de travail Elle a souhaité différer son avis dans l'attente d'un chiffrage plus précis. Je veillerai à ce que ses recommandations, dès lors qu'elles seront compatibles avec les obligations fixées par la loi, soient prises en compte. Je vous rappelle aussi que la DGE peut être mobilisée pour subventionner les travaux d'accessibilité, sachant cependant que les catégories d'opérations prioritaires éligibles dépendent des choix arrêtés dans chaque département par la commission d'élus compétente. Enfin, dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2009 pour la mise en oeuvre du plan de relance, en cours d'examen devant le Parlement, le Gouvernement a proposé une mesure de soutien à l'investissement local. Le versement anticipé du Fonds de compensation pour la TVA constituera, en 2009, une recette supplémentaire importante pour les communes. Elle pourrait utilement être mobilisée pour réaliser les travaux d'accessibilité des personnes handicapées aux bâtiments publics. Croyez que le Gouvernement attache, comme nos concitoyens, la plus grande importance à ce dossier.

Vote électronique

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Les dysfonctionnements survenus à Paris lors du vote électronique aux élections prud'homales incitent à s'interroger à nouveau sur un mécanisme électoral pouvant donner lieu, comme l'a souligné le Conseil constitutionnel, à des incidents risquant d'accroître la réticence psychologique des citoyens en raison de la rupture du lien symbolique entre ces derniers et l'acte électoral. Dans ses observations de septembre 2007 sur les élections législatives, il avait souligné les errements potentiellement inhérents aux machines à voter. Sans se poser en adversaire de principe des ordinateurs de vote, le juge suprême rappelait qu'il avait été saisi d'un certain nombre de réclamations portant, notamment, sur l'impossibilité d'effectuer des tests de bon fonctionnement et d'imprimer des procès-verbaux. Aucun de ces dysfonctionnements n'a donné lieu à examen, compte tenu des écarts de voix entre les candidats.

Cependant la dématérialisation du bulletin constitue une rupture radicale, aux conséquences considérables sur le processus de vote, et dont les risques ne doivent pas être sous-estimés. Dans le système actuel le citoyen est impliqué dans le processus électoral, notamment par l'intermédiaire du dépouillement public. La simplicité du processus de vote est un élément essentiel de la confiance que peuvent y mettre les citoyens. Les innovations techniques liées au fonctionnement de notre vie démocratique ne doivent pas être subies mais pensées par l'ensemble de la société. Un large débat public à ce sujet s'impose, avant les prochaines échéances électorales.

M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales.  - Mon département ministériel n'étant pas chargé de l'organisation des élections professionnelles, je ne me prononcerai pas sur les difficultés rencontrées lors des dernières élections prud'homales : c'est l'affaire du ministère du travail. Il n'en est pas moins vrai que le vote électronique représente un enjeu pour la vie démocratique d'une société où se diffusent sans cesse davantage les outils numériques.

A la suite des problèmes rencontrés lors de l'élection présidentielle de 2007, un groupe de travail a procédé à une série d'auditions sur le vote électronique. Dans son rapport, il a estimé qu'il fallait continuer à utiliser les machines à voter, tout en recommandant de modifier certaines dispositions législatives et réglementaires ainsi que le règlement technique qui leur est applicable. Ces adaptations sont en cours ; elles pourraient être insérées au projet de loi relatif à la modernisation de la vie démocratique locale qui pourrait, je l'espère, être débattu avant la fin de l'année. La révision du règlement technique a également été engagée avec le secrétariat général de la défense nationale.

Au cours des débats sur le « paquet électoral », devant les deux assemblées, la question du vote par internet pour l'élection des députés des Français de l'étranger a été soulevée. Là encore, la réflexion doit être poursuivie, et rapidement : je m'y suis personnellement engagé lors de la discussion parlementaire. Le Bureau de l'Assemblée des Français de l'étranger, les associations qui les représentent et les parlementaires seront consultés et participeront à cette réflexion. Je note qu'au Sénat, le débat a été particulièrement dense et riche.

La fiabilité et la transparence des systèmes sont nécessaires. Nous avons donc besoin d'un débat objectif, c'est-à-dire éclairé par des avis techniques et scientifiques. Tel est le sens de l'action politique qui sera conduite, avec le souhait d'avancer dans ce dossier, car il n'est pas concevable qu'une société comme la nôtre, où les nouvelles technologies de l'information et de la communication se développent, en reste à des modes de votation obsolètes. La concertation se poursuivra.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - S'il est vrai que les nouvelles techniques imposent d'évoluer, il faut reconnaître que le vote électronique ne favorise pas la participation électorale. J'espère un débat qui parviendra à trouver un juste équilibre entre technologie et démocratie.

Fermetures de tribunaux dans l'Aveyron

M. Alain Fauconnier.  - Comme je l'ai dernièrement souligné dans cet hémicycle au sujet de la gendarmerie, le sud du département de l'Aveyron a connu, ces dernières années, une amputation brutale de ses services publics. Il n'est pas le seul à subir la politique purement comptable du Gouvernement. Mais la répétition des attaques contre l'hôpital, les écoles, la poste, la Banque de France, les trésoreries ou la gendarmerie font que, à la longue, les élus, de sensibilités différentes, comme la population, finissent par se dire que « trop c'est trop » !

La charge est aujourd'hui menée contre la justice. Au terme d'un processus commencé il y a deux ans, sans raison aucune, sans concertation et d'une manière toute souveraine, la garde des sceaux a décrété la suppression du tribunal de grande instance de Millau et celle du tribunal d'instance de Saint-Affrique, cité dont j'ai l'honneur d'être le maire ; cela, malgré les conséquences extrêmement néfastes pour le travail judiciaire comme en témoigne, par exemple, un fait divers tout à fait actuel, l'arrestation d'un criminel, à Millau, dont le tribunal instruit actuellement le dossier et dont on se demande à qui, après la fermeture, échoira cette mission. A Rodez ? A Montpellier ? A Toulouse ? Avec tout ce que cela impliquera de perte de temps et d'argent, dans un territoire particulièrement vaste où les gendarmes requis pour encadrer le prévenu passeront leur temps sur les routes, à moins que ce ne soit le juge d'instruction qui lui aussi se déplacera en permanence ! S'il reste encore un juge d'instruction...

En attendant la réponse aux légitimes recours déposés par les élus devant le Conseil d'État, la fermeture des tribunaux de Millau et de Saint-Affrique devait initialement être effective le 1er janvier 2011 ce qui, à défaut de satisfaire la population, les professionnels et les élus, leur laissait au moins un peu de temps pour se préparer. Or, récemment, ces derniers ont appris que, finalement, par une nouvelle décision aussi régalienne que la précédente, et qui n'est assortie d'aucune explication, cette fermeture vient d'être avancée au 1er octobre de cette année ! Qu'est-ce qui a motivé cette nouvelle décision, tout droit sortie du « bon plaisir » de l'Ancien Régime ? Qui l'a prise ? Et dans quel but ?

Le Gouvernement ne ferait-il pas mieux d'instituer un moratoire des services publics avant toute fermeture, cela afin de ne pas davantage « déliter » la Nation qui, au lendemain de la crise, a plus que jamais besoin de la présence de l'État ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales.  - Je vous prie d'excuser l'absence de Mme la garde des sceaux, retenue par la séance solennelle d'ouverture de la Cour des comptes sur la réforme de la carte judiciaire.

La révision des implantations judiciaires doit prendre effet pour tous les tribunaux d'instance le 1er janvier 2010 et pour tous les tribunaux de grande instance le 1er janvier 2011. Toutefois, dans l'intérêt tant des justiciables que du bon fonctionnement des juridictions, il importe que cette réforme se mette en place de manière progressive et échelonnée tout au long de l'année. Et un juge d'instruction peut se déplacer ; ce n'est pas déchoir que de se déplacer...

Ainsi, lorsque les situations individuelles de chacun des agents concernés par la réforme sont réglées et que l'infrastructure immobilière de la juridiction de rattachement est prête à accueillir la juridiction regroupée, la date du transfert de l'activité peut être avancée, sur proposition des chefs de cours d'appel, après avis des assemblées des juridictions concernées, des structures locales de dialogue social et des auxiliaires de justice.

C'est le cas du tribunal de grande instance de Millau dont la suppression pourrait intervenir dès le 1er octobre 2009. Pour cette juridiction, les services de la Chancellerie se sont assurés que toutes les conditions nécessaires à la fermeture anticipée étaient réunies et ils ont procédé aux consultations nationales nécessaires. Un projet de décret permettant cette anticipation est en cours de signature.

En revanche, le reclassement des fonctionnaires du tribunal d'instance de Saint-Affrique n'ayant pas encore trouvé de solution, il n'est pas, en l'état, envisagé de modifier la date de suppression de cette juridiction, fixée par le décret du 30 octobre 2008, au 1er janvier2010.

M. Alain Fauconnier.  - Cette réponse ne me surprend pas ni ne me satisfait. Déjà il était inacceptable de fermer ces deux tribunaux en 2011, sans aucune concertation. Lorsque le président du TGI de Montpellier est venu à Saint-Affrique pour annoncer cette réforme, j'étais dans ma mairie : je ne l'ai jamais vu ! Et maintenant, on nous annonce que la fermeture est avancée au 1er octobre ! Le bâtonnier de Millau aurait déclaré y être favorable : en tout cas, il n'y a eu aucune réunion des avocats et ceux-ci ont vigoureusement protesté contre cette déclaration...

Cystite interstitielle

M. Michel Houel.  - La cystite interstitielle est une maladie inflammatoire chronique de la vessie extrêmement douloureuse, qui débute en moyenne entre 30 et 40 ans et touche essentiellement les femmes. Plus fréquente qu'on ne le croit, elle se caractérise par un besoin urgent et très fréquent d'uriner avec des douleurs au niveau du bas ventre.

Le manque d'autonomie qui en découle peut avoir des conséquences importantes sur la vie professionnelle, sociale et familiale. Les patients doivent adapter leur mode de vie et l'impact psychologique est considérable : plus de 50 % d'entre eux sont déprimés et le taux de suicide est quatre fois plus élevé que dans le reste de la population. Une majorité de malades ne peuvent plus travailler à temps plein et leur qualité de vie est comparable à celle des dialysés.

Le décret du 3 mars 2008 facilite la prise en charge des patients souffrant de maladies rares ou graves, et le plan de 2007 pour l'amélioration de la qualité de vie des personnes atteintes de maladies chroniques vise à offrir des soins de qualité pour limiter la perte d'autonomie. Ce sont des avancées mais cela ne suffit pas : ces malades subissent un handicap quotidien, ils ne peuvent ni marcher ni rester debout très longtemps, ni rester en position assise.

Je demande à Mme la ministre de la santé de faire en sorte que ces malades disposent d'une carte officielle de priorité pour personnes handicapées, reconnaissant ainsi leur invalidité.

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports.  - La cystite interstitielle, qui provoque d'intenses douleurs ainsi que des mictions fréquentes et urgentes, de jour et de nuit, toucherait une femme sur 1 000 en France.

Son diagnostic, dit « d'exclusion », doit être établi dans une consultation spécialisée d'urologie. La prise en charge thérapeutique doit associer des mesures hygiéno-diététiques, un traitement médicamenteux ou neurophysiologique, des instillations vésicales et des séances de kinésithérapie.

Les personnes atteintes peuvent se prévaloir du décret du 3 mars 2008 qui organise la « prise en charge à titre dérogatoire de certaines spécialités pharmaceutiques, produits ou prestations ». Toute demande de carte d'invalidité est instruite par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées, au sein de la Maison départementale des personnes handicapées. Cette carte est délivrée à toute personne dont l'incapacité permanente est au moins de 80 % et qui perçoit une pension d'invalidité classée en troisième catégorie par la sécurité sociale.

M. Michel Houel.  - Pour la première fois, j'entends que la carte d'invalidité peut être demandée auprès de la Maison départementale du handicap. Je m'en félicite car il est très désagréable, pour une personne touchée par cette maladie, de devoir se justifier dans un café pour aller aux toilettes sans consommer ou de faire admettre sa situation par son employeur. Je vous remercie.

Bruit nocturne à l'hôpital

M. Alain Gournac.  - Le bruit nocturne à l'hôpital est un sujet d'importance majeure.

M. René-Pierre Signé.  - Surtout dans les couloirs !

M. Alain Gournac.  - Avec M. Neuwirth, nous avons beaucoup oeuvré ici pour combattre la douleur à l'hôpital.

Aujourd'hui, il est presque impossible de dormir la nuit à l'hôpital. Je ne mets nullement en cause le personnel hospitalier, qui est remarquable et accomplit un travail formidable, mais les hospitalisés ont un besoin accru de silence pour dormir.

J'ai passé une nuit auprès d'un ami mourant. Tantôt une porte claquait, tantôt quelqu'un écoutait la radio, parfois un chariot roulait en grinçant, on entendait aussi le bruit de pas et les conversations, sans oublier les interpellations d'urgence « Va au 6 !», en attendant le passage des consignes lors de la relève des équipes. Je pensais qu'il n'y avait pas de visiteurs la nuit, mais on les entend parler...

Un ancien ministre de la santé avait rappelé la plaisante pratique de la distribution du thermomètre de 6 heures, qui réveille au moment où l'on essaye de récupérer après une mauvaise nuit.

Je le répète : je ne mets pas en cause le personnel, qui est admirable, mais il doit être possible d'éviter la plupart des bruits. Le personnel, qui doit peut-être faire vite parce qu'il n'est pas assez nombreux, ne se rend pas nécessairement compte de la situation.

Passifs et fatigués, les malades ne disent rien. Mon ami est décédé à 7 heures du matin. Je sais bien comment la nuit se passe.

Comme nous l'avons fait dans bien d'autres domaines, c'est à nous qu'il revient d'intervenir pour améliorer la qualité de vie à l'hôpital, avec des objectifs à moyen terme. Les bruits résonnent très forts lorsqu'on est malade, quand on vient d'être opéré ou en situation de détresse. (M. René-Pierre Signé félicite l'orateur)

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports.  - Les désagréments liés au bruit dans l'hôpital font l'objet d'une attention constante au sein des établissements de santé.

Des solutions techniques et architecturales existent pour réduire les nuisances sonores ; des actions de sensibilisation ont été également engagées. Des actions de formation continue du personnel, notamment paramédical, sont régulièrement conduites pour améliorer la prise en charge des malades, notamment en ce qui concerne le bruit. Un arrêté du 25 avril 2003 consacré au bruit dans les établissements de santé a précisé les seuils et les exigences d'isolement acoustique.

La circulaire d'application précise en outre les dispositifs qui doivent atténuer les bruits extérieurs liés à la vie normale de l'établissement, comme le passage des véhicules d'urgence, les mouvements d'hélicoptères, les livraisons ou la collecte des déchets.

Le code de la santé publique impose à chaque établissement d'évaluer régulièrement la satisfaction de ses patients. Les questions portent notamment sur les conditions d'accueil et de séjour. L'absence de nuisances liées au bruit, à l'éclairage ou aux odeurs est un indicateur important de satisfaction. Chaque patient reçoit un livret d'accueil, auquel est annexée la Charte du patient hospitalisé.

La qualité de la prise en charge globale des patients, vous le voyez, est une préoccupation constante pour tous les professionnels des soins.

M. René-Pierre Signé.  - Qui craignent des représailles ! On sait comment cela se passe.

M. Alain Gournac.  - Code, arrêtés et circulaires sont très bien, mais je demande que l'on évalue la réalité. Je n'ai pas mentionné les hélicoptères, car j'en suis volontairement resté aux bruits internes. Il doit être simple d'éviter que l'on entende les portes qui claquent !

Le livret remis aux malades hospitalisés, je le connais par coeur mais nous devons améliorer la situation concrète la nuit, à l'hôpital, pendant que les personnes hospitalisées ont besoin de se reposer et de dormir. A défaut, elles somnolent pendant la journée, puis ont encore plus de mal à dormir la nuit suivante.

J'espère ne pas être hospitalisé bientôt, j'interviens surtout pour les autres...

M. René-Pierre Signé.  - Il a raison !

Prestations sociales des vieux migrants

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Je regrette l'absence de Mme Bachelot-Narquin, ministre de la santé, mais il est vrai que la situation des vieux migrants exige qu'ils fassent du sport...

Ceux que l'on appelle affectueusement les chibanis ont travaillé en France pendant des dizaines d'années, dans des conditions qui ont laissé des traces sur leur santé. Lorsqu'ils ont la chance d'arriver jusqu'à l'âge de la retraite, ils rencontrent des difficultés liées aux voyages qu'ils effectuent souvent entre les deux pays avec lesquels ils conservent des liens très forts. Même lorsqu'ils résident habituellement en France, les allers et retours dans le pays d'origine sont fréquents.

Plusieurs associations accueillant des chibanis ont attiré notre attention sur la précarité de ceux dont le relatif nomadisme compromet le versement de nombreuses prestations sociales, aggravant les difficultés dans l'accès au logement, aux soins et aux droits sociaux d'une population vulnérable particulièrement fragile.

Ainsi, le maintien des aides au logement est conditionné à l'absence de voyages d'une durée supérieure à trois mois. Conformément aux instructions données par l'assurance maladie aux pharmaciens, les traitements ne peuvent être délivrés que pour un mois, même lorsque l'ordonnance est renouvelable pendant une période bien plus longue. En cas de maladie chronique, les chibanis doivent donc rentrer en France après un mois d'absence pour suivre leur traitement. Les voyages étant onéreux, certains renoncent temporairement à se soigner, ce qui aggrave leur situation de santé, pourtant peu enviable, puisque l'on observe chez eux, dès l'âge de 55 ans, des pathologies observées chez les Français plus âgés de 20 ans.

De nombreux migrants n'ayant perçu que de très bas salaires perçoivent en outre le minimum vieillesse ou une retraite complémentaire, mais à condition de séjourner en France de façon stable et continue. Ils doivent parfois produire leur passeport pour prouver qu'ils ne se sont pas absentés pendant plus de deux mois. Ce contrôle est abusif pour les titulaires d'une carte de résidence « retraité ». On leur propose parfois une indexation de la retraite complémentaire sur la monnaie de leur pays d'origine, mais ils doivent alors commencer par perdre 90 % de leur pouvoir d'achat !

L'obligation de résidence imposée aux vieux migrants vulnérables ne doit plus être synonyme d'obligation continue.

Quelles dispositions compte prendre le Gouvernement pour garantir l'accès de ces personnes hautement vulnérables au logement, aux soins et aux prestations sociales ? Ne pensez-vous pas que ces personnes ont suffisamment cotisé par leur travail pour jouir du droit à la santé et aux soins durant leur retraite ?

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports.  - S'agissant de la retraite, la pension contributive que perçoivent les chibanis est « exportable », c'est-à-dire qu'elle peut être intégralement perçue quel que soit le pays de résidence, contrairement à l'allocation différentielle versée au titre du « minimum vieillesse » à ceux qui remplissent la condition de ressources. De fait, cette prestation complémentaire, parce qu'elle assure aux retraités les plus modestes une vie décente sur notre territoire, n'a pas vocation à être versée aux personnes qui quittent durablement la France. La règle n'est donc pas propre aux chibanis.

Pour bénéficier des allocations logement, il faut justifier d'une résidence de huit mois sur le territoire français et ne pas séjourner plus de quatre mois à l'étranger. Pour prendre en compte la situation des chibanis, le Gouvernement a préféré mettre en oeuvre le dispositif d'aide à la réinsertion des migrants dans leurs pays d'origine, institué à l'article 58 de la loi Dalo, dans le cadre d'accords bilatéraux avec les pays les plus concernés.

Enfin, pour ce qui est du traitement des maladies chroniques, les pharmaciens n'ont pas le droit de délivrer de médicaments pour une durée supérieure à un mois, non en raison d'une instruction comptable de la caisse nationale d'assurance maladie, mais pour éviter tout gaspillage aux termes de l'article L.5123-7 du code de la santé publique. Toutefois, le Gouvernement est favorable au développement des exceptions existantes pour les médicaments en grand conditionnement, soit les traitements de trois mois, destinés à lutter contre les pathologies chroniques telles que l'hypertension artérielle, plus économiques pour le patient et l'assurance maladie. En outre, la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, par une circulaire, a autorisé la prise en charge des médicaments des assurés obligés de se rendre à l'étranger pour des durées supérieures.

Madame la sénatrice, le Gouvernement apporte donc, à cette légitime question, des réponses adaptées !

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Merci. Reste qu'avec votre système, le pouvoir d'achat de la pension exploitable est diminué par dix. Concernant les aides au logement, nous demandons que l'interruption de résidence, actuellement de deux mois renouvelable une fois, soit portée à quatre mois en tout. Enfin, l'autorisation permettant aux pharmaciens de délivrer des traitements de longue durée est particulièrement difficile à obtenir. Je suggère donc une circulaire auprès de la caisse nationale d'assurance maladie ainsi que des pharmacies.

Grand Prix de France

M. François Patriat.  - Les sénateurs MM. René-Pierre Signé et Didier Boulaud ainsi que le président du conseil général de la Nièvre, M. Marcel Charmant, qui assiste à cette séance, s'associent à cette question sur l'avenir du circuit de Formule 1 de Nevers-Magny-Cours.

Frappée par la crise, la Bourgogne perd 100 emplois par jour depuis novembre dernier, soit 3 000 suppressions de postes auxquels s'ajoutent 1 000 disparitions d'emplois intérimaires. Alors que nous entamons l'examen du projet de loi « Grenelle I » cet après-midi, un amendement, porté par un sénateur des Bouches-du-Rhône et un sénateur de Poitou-Charentes, a été subrepticement adopté vendredi soir au projet de loi pour l'accélération des programmes de construction et d'investissement publics et privés, amendement qui facilite l'installation d'un circuit de Formule 1 à Flins, dans les Yvelines. C'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase ! Pourquoi cette décision ? Le circuit de Magny-Cours est construit, il est associé à un technopôle de 425 emplois et de 3 250 emplois dans la filière automobile dans la Nièvre, il génère 30 millions de retombées économiques dans un département déjà sinistré, sans parler de l'installation de l'Institut supérieur de l'automobile et des transports à Magny-Cours, au financement duquel l'État, la région et le département ont participé et qui accueillera bientôt 500 élèves dans le cadre du Polytechnicom bourguignon. Une telle annonce ne va-t-elle pas remettre en question cette activité économique indispensable pour notre région ? A l'heure où les fonds publics sont difficiles à trouver, cette décision ne va-t-elle pas être coûteuse ? Certes, selon M. le ministre de la relance, le Premier ministre aurait apporté son soutien à la construction de ce circuit à proximité de Paris pour un coût de 120 à 150 millions. Mais est-ce la bonne solution quand la région et le département ont dépensé 3 millions pour l'organisation des derniers Grand Prix de France sur le circuit de Magny-Cours, un circuit parfaitement « grenello-compatible », accepté par les populations et facile d'accès, et alors que l'État n'a même pas honoré sa promesse d'engager 300 000 euros pour la dernière édition de cette course ? L'État soutiendra-t-il l'organisation d'un Grand Prix en 2009 et en 2010 dans notre région ? J'attends une réponse claire de la part du Gouvernement ! (M. René-Pierre Signé applaudit)

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports.  - Seule la Fédération française de sport automobile a le pouvoir de décider l'inscription de l'épreuve du Grand Prix de France au calendrier de la saison internationale. Celle-ci a décidé en octobre dernier d'y renoncer pour 2009, ce que je regrette en tant que secrétaire d'État chargé des sports. De fait, malgré l'aide des collectivités, l'organisation de l'épreuve à Magny-Cours s'est révélée structurellement déficitaire, ce qui explique que la Fédération ait accepté d'assumer exceptionnellement des responsabilités de promoteur. Mais, pour ne pas compromettre sa santé financière et satisfaire à la demande de l'organisateur international de l'épreuve, M. Ecclestone, la Fédération a exploré en 2008 toutes les solutions pour organiser un Grand Prix de France qui soit économiquement viable, dont celle d'un deuxième Magny-Cours. Le Gouvernement partage cette préoccupation : le nouveau circuit devra s'autofinancer en comptant sur la billetterie afin d'éviter l'impasse financière de ces dernières années.

Enfin, le Gouvernement n'est nullement inquiet pour l'avenir de Magny-Cours, car les circuits automobiles sont généralement très rentables et induisent, de manière stable et durable, une activité économique importante.

M. François Patriat.  - S'agissant de la billetterie, les résultats seront les mêmes quel que soit le circuit retenu. Précisons que le déficit constaté ces dernières années n'est pas le fait des collectivités territoriales, mais du retrait des partenaires, Renault, Total et Michelin, dont la participation était de 1,5 milliard. Bref, cette décision procède de la volonté de certains de construire un circuit près de Paris, même si cela doit être sur un terrain destiné à promouvoir l'agriculture biologique ! Cela coûtera cher à la Bourgogne et à la France tout entière !

M. René-Pierre Signé.  - Très bien !

Instruction comptable relative aux SPIC

M. Yves Détraigne.  - J'attire l'attention de M. le ministre du budget sur la difficulté qu'éprouvent certaines collectivités territoriales à équilibrer le budget de leurs services publics industriels et commerciaux. De fait, l'instruction budgétaire M4 oblige les collectivités qui gèrent un Spic tel qu'un service d'assainissement ou un service de distribution d'eau potable, à constituer des dotations d'amortissement en vue de provisionner le remplacement des ouvrages et équipements affectés au service. Afin de réaliser ces opérations budgétaires, les collectivités sont parfois contraintes d'augmenter les redevances.

Elles accumulent ainsi en section d'investissement des réserves importantes et peuvent, dans le même temps, avoir des difficultés à équilibrer les opérations de la section d'exploitation ! Cette dernière doit être équilibrée par la seule redevance : la reprise sur excédents de la section d'investissement est interdite. Certaines collectivités, dont la mienne, n'ont donc pas d'autre choix que d'augmenter chaque année le montant de la redevance, alors même que leurs budgets accumulent des excédents. L'augmentation est difficile à justifier dans les circonstances économiques et sociales actuelles.

L'instruction budgétaire et comptable M4 ne pourrait-elle être modifiée, pour autoriser sous certaines conditions les collectivités à différer la constitution de dotations d'amortissement ou à reprendre en section de fonctionnement les excédents accumulés en investissement ?

M. André Santini, secrétaire d'État chargé de la fonction publique.  - Les Spic, qui interviennent dans un champ d'action ouvert à la concurrence, doivent tenir une comptabilité conforme au plan comptable général appliqué par les entreprises privées. La réglementation applicable aux Spic est conforme à l'objet de ces services, au respect des règles de concurrence et au principe de sincérité budgétaire et comptable. Le financement de l'activité est assuré par une redevance, laquelle couvre le coût complet des services aux usagers, y compris l'amortissement des équipements. Méconnaître l'obligation d'amortir ou différer la constatation des amortissements serait, monsieur Détraigne, vous qui appartenez à la Cour des comptes, source d'insincérité des comptes et de distorsion de concurrence.

La constatation des amortissements a un impact budgétaire. Elle crée une charge d'exploitation mais également une recette d'investissement, provenant directement de l'exploitation du service. Elle suffit généralement soit à financer de nouveaux investissements, soit à rembourser les emprunts en cours. Le suréquilibre de la section d'investissement dû à la constatation des amortissements, situation qui vous touche tout particulièrement, signifie que le Spic a totalement autofinancé l'acquisition de ses biens, qu'il ne procède pas à de nouvelles dépenses d'investissement et a peu de dette. Cette configuration fort atypique ne justifie pas une modification de la règle générale.

M. Yves Détraigne.  - Votre réponse est, d'un point de vue comptable, orthodoxe. Mais comment expliquer à nos administrés qu'au nom du purisme comptable, nous devons augmenter la redevance, quand nous ne manquons nullement d'argent ? Il faudra se pencher sur le problème, comme on l'a fait pour le cas des petites communes qui accumulent des excédents dont elles n'ont pas besoin en section d'investissement.

Aides directes à l'agriculture

M. René-Pierre Signé.  - Je veux attirer votre attention sur les difficultés dans le secteur de l'élevage, surtout dans le bassin allaitant. Le découplage des aides de la PAC, leur attribution sans obligation de produire -quel paradoxe-, la conditionnalité ont provoqué une baisse du nombre des agriculteurs, du nombre de têtes de bétail et une course à l'agrandissement. La répartition des aides est inégale selon les productions, les producteurs et les territoires.

Il convient de modifier le système d'attribution des aides, à la faveur de la révision de la PAC. La régionalisation de la gestion des aides semble envisageable, comme le maintien de la prime à la vache allaitante et de la prime à la brebis, comme aussi le découplage des deux. Une flexibilité serait introduite également dans l'utilisation de l'article 68, avec la possibilité d'augmenter de 2,5 à 3 % le plafond pour les aides couplées et de mobiliser la part non utilisée de l'enveloppe des aides directes de chaque État ainsi que la réserve.

Ces modifications seront-elles confirmées ? Si oui, elles vont dans le bon sens.

M. André Santini, secrétaire d'État chargé de la fonction publique.  - L'élevage, notamment dans le bassin allaitant, connaît des difficultés. C'est la raison pour laquelle, sans attendre les résultats de la Commission des comptes de l'agriculture fin décembre, le Gouvernement a arrêté un plan d'urgence de 205 millions d'euros, complété par la Mutualité sociale agricole à hauteur de 15 millions et les établissements de crédit, avec 30 millions. Plus de la moitié est consacrée à l'allègement des charges financières et à la prise en compte des cotisations sociales. Les enveloppes ont été attribuées à plus de 80 % aux départements d'élevage. Les premières avances seront versées en février. Des aides exceptionnelles -50 millions d'euros- ont été dégagées pour les éleveurs ovins, dont la moitié leur est définitivement acquise.

En ce qui concerne les objectifs de la politique agricole commune, la présidence française s'est mobilisée pour obtenir un accord sur le bilan de santé de la PAC, prévu dans la réforme de 2003. L'accord du 20 novembre, le premier à 27, permet de préparer 2013. Lors du conseil des ministres de l'agriculture, les conclusions présentées par M. Michel Barnier ont été adoptées par 23 de nos partenaires. Elles réaffirment la nécessité d'une PAC ambitieuse. C'est une première étape, incontournable.

Les objectifs que vous mettez en avant sont précisément ceux qu'a défendus M. Barnier : une PAC plus réactive, plus équitable, au service d'une agriculture durable. Il a négocié « une boîte à outils » qui sera utilisée pour rendre cette politique commune plus légitime dans la perspective de 2013. Le ministre annoncera ses orientations à l'issue de la concertation, mi-février.

Selon vous, un transfert aux régions de la gestion des aides directes serait le meilleur moyen de soutenir l'agriculture française. Ce n'est pas l'analyse du Gouvernement. Aujourd'hui, il faut rééquilibrer les soutiens au profit des productions en difficulté, quelle que soit leur localisation. Je pense à la production ovine, à la production laitière en montagne, à la production de protéagineux. Il faut aussi mettre en place une couverture des risques climatiques et sanitaires -les entreprises agricoles, les plus vulnérables, sont les moins protégées.

Ces choix stratégiques ne peuvent se décliner en de multiples politiques régionales. Après consultation de l'ensemble des partenaires, dont les régions, la décision doit clairement appartenir à l'État. Cela n'exclut pas, dans le cadre du bilan de santé de la PAC, des actions conjointes et largement déconcentrées relevant de la politique de développement rural, dont les moyens sont accrus.

C'est sur la régionalisation que nous avons un désaccord : j'en suis partisan.

La séance est suspendue à midi et demi.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 16 heures.

Modification à l'ordre du jour

M. le président.  - M. Henri de Raincourt, président du groupe UMP, m'a informé qu'il retirait sa demande d'inscription à l'ordre du jour réservé du mercredi 11 février de la proposition de loi de M. Philippe Marini visant à responsabiliser les acteurs du crédit à la consommation et à lutter contre le surendettement.

L'ordre du jour est ainsi modifié.

Organismes extraparlementaires (Appel à candidatures)

M. le président.  - M. le Premier ministre a demandé au Sénat de procéder à la désignation de sénateurs appelés à siéger au sein de plusieurs organismes extraparlementaires.

Conformément à l'article 9 du Règlement, j'invite : la commission des affaires sociales à présenter deux candidatures pour le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion et une candidature pour le Conseil national de la montagne ; la commission des finances à présenter une candidature pour la Commission centrale de classement des débits de tabac et une candidature pour l'Observatoire de la sécurité des cartes de paiement ; la commission des affaires économiques et la commission des lois à présenter respectivement trois et une candidature pour le Conseil national de la montagne.

Mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi de programme relatif à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement, adopté par l'Assemblée nationale.

Le Conseil économique, social et environnemental a demandé que M. Paul de Viguerie, rapporteur de la section du cadre de vie du Conseil économique, social et environnemental, puisse exposer l'avis du Conseil devant le Sénat. Conformément à l'article 69 de la Constitution et à l'article 42 de notre Règlement, huissiers, veuillez faire entrer M. de Viguerie. (M. de Viguerie est introduit dans la Salle des Séances)

C'est avec bonheur que j'accueille au Sénat Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie. (Applaudissements) Je forme des voeux pour le succès de sa mission aux côtés du ministre d'État.

Discussion générale

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.  - (Applaudissements sur divers bancs à droite) C'est avec plaisir que nous vous retrouvons pour ce deuxième acte parlementaire du Grenelle de l'environnement, après l'adoption de ce texte en première lecture par l'Assemblée nationale.

Le temps parlementaire est un temps nécessaire d'interrogations, de clarifications, et de validation démocratique de notre feuille de route. Le Parlement n'est pas un collège de plus du Grenelle, même s'il a été associé tout au long du processus, mais le dépositaire ultime de ses conclusions. Il fixe le cap et la stratégie de la Nation à un moment clé de notre histoire.

Nous nous retrouverons prochainement pour débattre du projet de loi portant engagement national pour l'environnement, volet territorial du Grenelle, qui vise à lever les obstacles juridiques et techniques, clarifier les compétences, simplifier le droit, afin de donner les outils nécessaires à nos collectivités locales. J'ai voulu que le Sénat en soit saisi en premier.

M. Daniel Raoul.  - Merci.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - Je remercie la commission des affaires économiques, et tout particulièrement son président, à qui l'on doit la création du Comité de suivi parlementaire du Grenelle, réunissant des sénateurs de tous bancs. Je salue le travail du rapporteur, M. Sido, la qualité de ses auditions et la profondeur de son rapport. (M. Jacques Blanc approuve)

Nous sommes à un moment charnière de notre histoire politique, économique et industrielle : le monde a décidé de gravir les premières marches du siècle. C'est un grand moment de rupture : des États-Unis au Japon, du Brésil à la Chine, en passant par l'Europe et ses 450 millions d'habitants, tout bascule. Des secteurs industriels entiers s'engagent, à un rythme différent, dans cette grande mutation économique, énergétique et écologique.

Sous l'impulsion du Président de la République, la France a mené un vaste exercice de radiographie et d'introspection, afin d'établir une nouvelle feuille de route pour les quinze années à venir. La grande distribution, l'aéronautique, la publicité ou les transports se sont déjà engagés dans cette mutation, sur la base du volontariat ; 62 millions de consommateurs informés exigent davantage de qualité, de sécurité sanitaire, de traçabilité, tout en préservant leur pouvoir d'achat et en réduisant leur facture énergétique.

En décembre, 27 États, aux histoires différentes, se sont engagés, à l'unanimité, sur des objectifs contraignants et quantifiables, dont ils devront rendre compte devant leur opinion publique ainsi que devant la Cour de justice des Communautés européennes. C'est l'objectif des « trois fois vingt » : réduire de 20 % les émissions de gaz à effets de serre de l'Union d'ici 2020, voire de 30 % en cas d'accord à Copenhague en décembre 2009 ; porter à 20 % la part des énergies renouvelables ; améliorer de 20 % l'efficacité énergétique. C'est la révision de la directive ETS sur les échanges de quotas d'émission, l'inclusion des activités aériennes, l'accord sur le règlement du CO2 des voitures, le retrait programmé de 4,2 milliards d'ampoules à incandescence (soit l'équivalent de 45 centrales thermiques).

C'est encore hier la signature à Bonn, par 75 pays, du traité fondateur de l'Irena, première agence internationale dédiée à la diffusion et à la coopération en matière d'énergies renouvelables. La France est candidate à la direction générale, à défaut d'en accueillir le siège.

Ce moment charnière, c'est également le discours d'investiture du Président Obama qui plaide pour une économie respectueuse de l'environnement, un « Green New Deal », pour réduire la dépendance énergétique des États-Unis. C'est sa proposition, hier, d'une coalition mondiale pour lutter contre le changement climatique, dont les États-Unis prendraient la tête, avec l'Inde et la Chine.

On voit donc bien que l'on est dans un moment décisif. Face à la violence et à la rapidité des changements qu'il nous était demandé d'accomplir, nous avions, nous, économie classiquement industrialisée, deux voies possibles.

Soit nous décidions d'imposer une mutation d'en haut, dans la précipitation, les convulsions et les crispations, au risque de bloquer toute la société et de dresser les différents membres du corps social les uns contre les autres.

Soit nous choisissions, comme l'a souhaité le Président de la République, de sortir des affrontements réducteurs, en refusant les anathèmes et le mépris de l'autre, pour élaborer, avec tous les acteurs de la société, un diagnostic à la fois réel, sincère, et sans concession, afin de trouver les moyens acceptables par tous d'assumer cette transition.

Notre plus grand défi était de savoir comment une société démocratique, aux intérêts contradictoires, parviendrait à effectuer, de façon collective et loyale, une remise en cause conceptuelle de ses modes de production et de consommation, de son organisation territoriale et de ses modes de gouvernance.

Alors, oui, le Grenelle est le fruit d'une triple conviction. Celle que la mutation touche tellement de sujets qu'elle requiert la mise en mouvement de tous les acteurs. Aucun corps social n'a, à lui seul, la capacité d'imposer aux autres ses solutions. Conviction qu'avant de proposer des solutions, il fallait procéder à une vaste radiographie politique, sociale et économique réunissant, pendant des milliers d'heures, scientifiques, économistes, biologistes, syndicalistes, politiques. Elle s'est poursuivie dans un cadre élargi avec 14 000 contributions sur internet, 300 000 internautes présents sur le forum du Grenelle, 15 000 participants aux dix-neuf réunions régionales, pour aller au-delà des slogans.

Ce qui m'a le plus frappé au cours des négociations sur le paquet « énergie climat », c'est la violence des débats que cette mutation écologique suscitait dans nombre de pays européens alors que, sur ces sujets, la France offrait à ses partenaires un visage relativement serein. Si elle a pu piloter des négociations si difficiles avec une certaine forme d'apaisement, c'est parce qu'elle avait fait cet immense travail d'introspection et de remise en cause dans le cadre du Grenelle. Grâce à quoi elle avait acquis la conviction unanime que se dessinait un nouveau modèle de croissance économique, un nouveau chemin de compétitivité fondé sur la sobriété en carbone et en énergie car une société qui consomme moins de ressources fossiles, moins de matières premières, moins d'emballages, dépense moins d'argent et est donc plus compétitive.

Fondé sur les nouvelles technologies de l'environnement, sur les moteurs hybrides, sur la capture et le stockage de carbone, sur les nouveaux matériaux de construction, sur les réseaux électriques intelligents, qui sont en train d'arriver à maturité et qui pour certaines d'entre elles, sont déjà en phase d'industrialisation. Fondé sur un saut qualitatif majeur : qualité de l'air, de l'eau, des paysages, de l'alimentation, des infrastructures, des constructions... Fondé sur le retour de la puissance publique dans l'économie et le retour du long terme dans les stratégies d'investissement industriel, afin de desserrer l'étau du court terme. Fondé sur la renaissance d'une économie locale, à côté de l'économie globalisée, s'appuyant sur le développement de l'énergie solaire, sur de nouveaux métiers de proximité et sur un soutien massif à l'agriculture locale. Voilà le compromis du possible, le changement radical de stratégie, le saut à la fois technologique et qualitatif, qui vous est proposé aujourd'hui dans les transports, dans l'énergie, dans l'aménagement urbain, dans la construction et dans l'agriculture : la division par quatre de nos émissions de CO2 entre 1990 et 2050, la réduction de 38 % de la consommation énergétique dans le bâti existant, la baisse de 20 % des émissions de CO2 dans les transports à l'horizon 2020, les 23 % d'énergie renouvelable dans le bouquet énergétique en 2020, 2 % du territoire placé sous protection forte d'ici dix ans, le bon état écologique des eaux à l'horizon 2015, 6 % de la SAU en bio en 2013 et 20 % en 2020, 50 % d'exploitations engagées dans une démarche environnementale en 2012.

Ce changement de stratégie, lourd, irréversible, que je vous propose aujourd'hui, se traduit de façon visible dans six grands chantiers.

C'est d'abord le chantier thermique avec, dans le neuf, la généralisation de la basse consommation dès 2010 pour les bâtiments publics et dès 2012 pour les logements privés ; avec, dans le domaine du bâti existant, l'obligation pour l'État et ses établissements publics de rénover l'ensemble de leurs bâtiments d'ici huit ans ; avec la rénovation des 4,2 millions de logements sociaux, en commençant par les 800 000 les plus dégradés ; avec un chantier thermique globalement autofinancé et des investissements de toute façon rentables, puisqu'ils permettront des économies d'énergie.

Pour enclencher le mouvement, nous avons prévu toute une série de dispositifs innovants : développement des contrats de performance énergétique au profit des collectivités locales ; dispositifs fiscaux et budgétaires. Un petit investissement pour de grandes économies. M. Bussereau vous présentera nos projets pour les transports, avec la construction de 2 000 kilomètres de lignes à grande vitesse. Pensez que, pour 80 % d'entre eux, les débouchés de nos ports sont exclusivement par la route !

L'idée, c'est que la part de l'engagement de l'État soit connue à l'avance : les partenaires doivent savoir à quoi s'en tenir sur les règles du jeu.

C'est le chantier énergétique, avec, là encore, des dispositifs d'aide au financement : le fonds chaleur renouvelable sera doté d'un milliard sur trois ans ; les collectivités locales pourront bénéficier des tarifs de rachat de l'électricité produite à partir de source renouvelable.

C'est le chantier de la biodiversité avec la mise en place de la trame verte et bleue sur l'ensemble du territoire et la création de dix aires marines protégées, dont le coût sera pris en charge par l'État.

C'est 2 milliards de prêts à taux bonifiés qui seront affectés à la mise aux normes des stations d'épuration. C'est le chantier de la santé avec l'élaboration d'un deuxième plan santé-environnement pour la période 2009-2012 et d'un plan de réduction des particules, c'est la lutte contre les pollutions sonores et lumineuses, c'est le renforcement des contrôles exercés sur les nanoparticules.

C'est, enfin, l'immense chantier de la gouvernance, encore à inventer, pour associer les acteurs aux décisions ayant un impact sur l'environnement.

Bref, avec le Grenelle, l'État facilite le financement de 20 milliards d'investissement sur la période 2009-2020 directement dans les collectivités locales.

Cela coûte trop cher ? D'abord, l'essentiel du processus est fondé sur des économies : économies d'énergie, d'intrants, de matières premières. Il s'agit essentiellement de substituer des investissements vertueux à des investissements non vertueux. Ensuite, le plan de relance sera en partie consacré à l'accélération des programmes du Grenelle.

Nous sommes à mi-chemin de ce qui s'est passé à Bali et de ce qui se passera à Copenhague en décembre 2009. La France, par sa méthode, par son organisation publique, par la qualité de ses collectivités territoriales, est objectivement un bon élève ; le premier pays de vieille industrie à avoir pris ce tournant. Si l'on devait échouer à Copenhague, ce serait grave car il faudrait expliquer quel pays en est responsable.

Ce texte est le résultat de milliers d'heures de réflexion associant tous les groupes de travail, les spécialistes et les cinq collèges. Ce ne fut pas une négociation traditionnelle mais l'élaboration d'un projet collectif.

Ce que je vous propose aujourd'hui, ce n'est pas seulement de voter un ensemble de dispositions, c'est d'envoyer un signal fort à toute la Nation, aux universités, aux laboratoires de recherche, aux entreprises, aux artisans et à tous les professionnels : oui, nous entrons résolument et sereinement dans une nouvelle ère économique. Je constate chaque jour l'enthousiasme que suscite cette idée partout dans le monde, notamment aux États-Unis où l'on a bien compris que la lutte contre la crise passait par le développement de nouvelles technologies au service du développement durable.

Rien n'est plus difficile que de concrétiser ce projet ; mais nous nous y attelons avec honnêteté, humilité et esprit de responsabilité, dans l'intérêt supérieur de notre pays et pour l'avenir de nos enfants. (Applaudissements au centre, à droite et sur quelques bancs socialistes)

M. Paul de Viguerie, rapporteur de la section du cadre de vie du Conseil économique, social et environnemental.  - Au nom du président du Conseil économique, social et environnemental, M. Jacques Dermagne, je vous remercie de m'inviter à rendre compte de l'avis de notre assemblée, adopté le 28 mai dernier par 154 voix sur 187 votants. Je remercie également M. le président Jean-Paul Emorine et M. le rapporteur Bruno Sido de nous avoir permis, dès le mois de juin dernier, de faire part de nos observations devant la commission des affaires économiques.

Le Conseil économique, social et environnemental est, depuis plus de dix ans, au premier rang des acteurs institutionnels qui participent à l'élaboration d'une politique nationale, européenne et mondiale de lutte contre les effets désastreux du changement climatique. Il a tenu toute sa place dans les débats du Grenelle en reprenant l'ensemble des 70 rapports et avis adoptés au cours des deux dernières mandatures, dont la plupart portaient sur les aspects économiques, sociaux et environnementaux du développement durable.

Depuis le mois de mai dernier, la dynamique du Grenelle s'est accélérée : en témoignent les amendements adoptés par l'Assemblée nationale sur ce projet de loi, la loi de finances et de nombreux textes réglementaires. Le projet de loi d'engagement national pour l'environnement, adopté en conseil des ministres le 7 janvier, devrait concrétiser nombre des engagements du Grenelle et du présent texte. Surtout, le paquet « énergie climat », adopté par l'Union européenne sous la présidence française, et le plan de relance de l'économie nous conduisent à redoubler d'efforts. Plusieurs des recommandations formulées par notre assemblée ont ainsi été suivies.

Le Conseil avait souhaité que l'ensemble des textes donnant corps et vie à l'avant-projet de loi vous soient soumis avant la fin de l'année 2008. L'actualité économique ne l'a pas permis mais ce devrait être chose faite avant l'été. Les débats que suscitaient déjà en mai dernier certaines dispositions relatives à l'agriculture, aux déchets ou à la définition des énergies renouvelables continuent : le processus du Grenelle n'est pas achevé, il vit. L'instauration d'un comité de suivi permettra de poursuivre ces discussions.

La démarche du Conseil s'est fondée sur quatre principes.

Tout d'abord, nous pensions qu'il fallait accorder une priorité absolue à la formation, à la recherche et à l'innovation pour développer une politique de l'offre à la hauteur des enjeux. Là réside d'ailleurs un formidable gisement d'emplois : la bataille pour l'emploi et la lutte contre le changement climatique se gagneront de concert et supposent que tous les corps professionnels s'approprient l'expertise, les technologies et les compétences nouvelles. Le Conseil estime que tous les moyens juridiques et financiers doivent être mis en oeuvre pour faire progresser ce chantier dans les prochains mois.

Cependant, deux questions restent pendantes. Dans le secteur du bâtiment, les innovations existent mais elles sont encore loin d'être à la portée de tous les métiers et de toutes les entreprises. Ce n'est pas le secteur de la construction neuve qui nous inquiète, mais celui de l'ancien. Le plan « bâtiment », présenté le 23 janvier dernier, devrait permettre de relever ce défi.

Dans le secteur des transports, il faut mettre les technologies nouvelles à la disposition de tous dans un délai acceptable. Cela prend nécessairement du temps pour réaliser de grandes infrastructures dans les domaines du fret ferroviaire et des transports urbains « propres ». Pourtant, il faut trouver le plus rapidement possible la solution au problème posé par les modes de transport individuels, toujours nécessaires compte tenu de la métropolisation.

Il est indispensable de repenser l'aménagement urbain. Le Grenelle II révise notre droit de l'urbanisme, et nous nous en félicitons.

Dans votre assemblée comme dans la nôtre, nombreux sont ceux qui s'inquiètent des conséquences financières et budgétaires du Grenelle ; il faut veiller à la cohérence des mesures prises dans ce domaine. Le Conseil s'est alarmé de l'absence de visibilité financière à court et moyen termes.

Les quatre observations que voici éclaireront peut-être les travaux de votre assemblée. Pour assurer la mise en oeuvre effective du Grenelle, il est indispensable de définir un nouvel équilibre entre les contributions de l'État, des collectivités, des entreprises et des usagers. Le signal prix est l'une des conditions du succès mais il faut aussi entretenir la dynamique de l'offre par une véritable politique industrielle. Le Conseil est attaché à la neutralité fiscale des nouvelles mesures et nous nous féliciterions que ce principe fût acté. Enfin, il convient de rendre cohérents tous les instruments financiers dont nous disposons et d'en inventer de nouveaux, par exemple des quotas énergie-carbone dans les bâtiments afin de favoriser les propriétaires vertueux.

La marge de manoeuvre des institutions concernées est chaque jour plus étroite : la diminution du pouvoir d'achat et la contraction de l'épargne dissuadent les gens d'investir dans de nouveaux équipements énergétiques.

En ce qui concerne la gouvernance, une étape importante a été franchie grâce à la réforme constitutionnelle du 3 juillet dernier. La stratégie nationale de développement durable doit être le fil rouge de tous les textes qui vont nous être soumis. Voilà pourquoi nous avons souhaité que cette stratégie fasse chaque année l'objet d'un débat sanctionné par un vote dans les deux assemblées parlementaires, précédé d'un avis du Conseil économique, social et environnemental.

Les collectivités locales jouent un rôle de plus en plus important dans la mise en oeuvre de cette politique. Le Conseil national des élus doit pouvoir délibérer de l'ensemble des mesures envisagées et programmées car l'action des élus a des conséquences directes sur les comptes publics.

Nous nous réjouissons que la protection de l'environnement figure désormais parmi les objectifs de gouvernance de toute entreprise.

Enfin, ce projet de loi exige de l'État un comportement exemplaire. Le titre III, qui traite de la politique de santé, nous paraît à cet égard extrêmement important : c'est la première fois qu'un texte de portée générale pose le principe d'une politique globale de santé publique prenant en compte les facteurs environnementaux.

Le Conseil se réjouit de poursuivre avec vous la réflexion sur ces thèmes, notamment à l'occasion de sa récente saisine par le Premier ministre sur le projet d'introduire un indicateur d'« empreinte écologique » dans l'analyse de la performance économique et du progrès social.

La réforme constitutionnelle a permis au Parlement de saisir le Conseil qui reste à votre disposition, sur ce sujet comme sur tout autre. (Applaudissements)

M. Bruno Sido, rapporteur de la commission des affaires économiques.  - Sept mois après son adoption en conseil des ministres et quinze mois après le discours du Président de la République clôturant les travaux du Grenelle, ce projet de loi de programme est enfin examiné au Sénat. Si ces délais peuvent paraître longs, n'oublions pas que bon nombre des 263 engagements du Grenelle ont commencé à être mis en oeuvre par voie réglementaire ou conventionnelle, dans d'autres textes législatifs comme la loi de finances pour 2009 ou la loi de finances rectificative pour 2008 ainsi que par l'action de la France, au niveau communautaire, au cours de sa présidence de l'Union. Loin d'être restés enlisés, nous avons donc avancé sur de nombreux sujets.

On peut s'interroger sur l'utilité d'une loi de programme qui, dénuée de dispositions normatives d'application directe, n'affiche que des objectifs. D'autant que le Parlement est bien souvent accusé par les plus hautes instances juridiques de voter trop de textes peu normatifs. Le président du Conseil constitutionnel disait lui-même, alors qu'il était président de l'Assemblée nationale, qu'affirmer que l'air doit être pur et l'eau limpide ne suffit pas à rendre l'air pur et l'eau limpide. La loi, ajoutait-il, doit arrêter des buts, dire comment les atteindre, selon quelles règles juridiques. A cela on peut répondre que le Conseil constitutionnel a autorisé le Parlement, dans le cadre des lois de programmation, à approuver « des dispositions dénuées d'effets juridiques mais fixant des objectifs qualitatifs et quantitatifs à l'action de l'État ». On peut encore ajouter qui si des parlementaires ont été associés au processus, le Grenelle s'est concrétisé par un dialogue mené entre le Gouvernement et la société civile. Ce texte rend la main aux parlementaires en leur permettant de se prononcer sur l'ensemble des engagements et de mieux contrôler, en aval, leur mise en oeuvre. Nous nous félicitons en outre que, conformément à nos souhaits, le Sénat soit la première assemblée saisie sur le projet de loi portant engagement national pour l'environnement.

Ce projet de loi de programme retranscrit fidèlement les engagements pris à l'automne 2007, qui proposent des modifications importantes dans tous les secteurs contribuant à la dégradation de l'environnement ou aux changements climatiques, notamment le bâtiment, avec un objectif de réduction des consommations énergétiques de 38 % d'ici à 2020, et les transports, où l'objectif est de réduire de 20 % d'ici à 2020 les émissions de gaz à effet de serre.

Ces objectifs ne sont-ils pas cependant devenus trop ambitieux au regard de l'état économique et budgétaire du pays ? La France a-t-elle aujourd'hui les moyens de ces ambitions ? Ne pourrait-elle se satisfaire de n'être pas en retard, sachant que ses émissions de gaz à effet de serre sont de 20 % inférieures à la moyenne de l'Union européenne et de 30 % à 40 % inférieures à celles de ses grands voisins. Mais c'est bien le mérite du Grenelle d'avoir accéléré la prise de conscience du potentiel de la « croissance verte » dont la crise économique fait au contraire ressortir tout l'intérêt. Deux chiffres suffiront à l'illustrer. Selon le programme des Nations Unies pour l'environnement, le marché des produits et services liés à l'écologie sera multiplié par deux d'ici à 2020, pour atteindre 2 740 milliards de dollars. En France, les mesures proposées dans le cadre du Grenelle devraient susciter des investissements dans des secteurs à forte intensité de main-d'oeuvre et peu délocalisables comme le bâtiment, les transports et l'énergie : l'étude d'impact réalisée en novembre 2008 par le ministère de l'écologie évalue les créations d'emploi à près de 500 000. Sans compter que de très nombreuses mesures seront, à terme, financées par les économies d'énergie réalisées. Reste, il est vrai, que la réalisation de ces prévisions requiert un certain nombre de conditions.

Notre commission s'est très tôt impliquée dans le processus du Grenelle. Elle est à l'origine de la création, à l'été 2007, du groupe sénatorial de suivi qui a travaillé parallèlement au Grenelle avant de procéder à 75 auditions sur le texte qui nous est soumis, lesquelles m'ont permis de mesurer pleinement l'ampleur des évolutions proposées et du chemin parcouru pour rapprocher des positions au départ éloignées en même temps qu'elles ont montré combien nous devons rester vigilants.

En premier lieu, la pression fiscale globale ne doit en aucun cas être alourdie et la fiscalité environnementale doit servir à financer des actions environnementales. Nous vous soumettrons un amendement visant à assurer le respect de ces principes.

Il serait également dommageable, juste après l'examen au Parlement d'un projet de loi de simplification des procédures pour relancer l'économie, que les nouveaux dispositifs alourdissent les contraintes qui pèsent sur les PME et, plus généralement, sur les projets d'investissements.

Un effort de formation devra impérativement être fait, sachant que le manque de compétences pourrait freiner les progressions envisagées en matière de créations d'emplois : à titre d'exemple, les 88 000 emplois supplémentaires prévus par l'Ademe d'ici à 2012 pour l'amélioration énergétique du secteur résidentiel dépassent largement le rythme actuel des formations.

Autre condition : toute adoption ou modification de réglementation nationale en matière d'environnement doit être précédée d'une étude de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques avant toute fixation de la modulation de la norme de consommation des nouveaux bâtiments.

Enfin, les collectivités territoriales ne doivent en aucun cas faire les frais des difficultés budgétaires de l'État. Les associations d'élus s'inquiètent en particulier du financement des transports collectifs et je souhaiterais, monsieur le ministre d'État, que vous puissiez les rassurer.

M. Daniel Raoul.  - Ce serait bien !

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Sur la forme, l'adoption, par les députés, de 390 amendements, dans des conditions d'examen qui n'ont pas toujours été optimales, a quelque peu éloigné le texte de son esprit initial. Votre commission vous proposera un certain nombre d'amendements visant à revenir à l'esprit d'une loi de programmation ainsi que certaines dispositions nouvelles parmi lesquelles une discussion entre partenaires sociaux en vue de la création d'un carnet de santé du travailleur lui permettant de disposer, tout au long de son parcours professionnel, d'informations précises sur les substances auxquelles il a été exposé sur son lieu de travail ; la remise, par le Gouvernement, d'un rapport sur les enjeux et l'impact de l'autorisation de circulation des poids lourds de 44 tonnes, de la réduction de la vitesse à 80 kilomètres/heure et de l'interdiction des dépassements pour tous les poids lourds circulant sur autoroute ; la création d'une instance de médiation des éco-organismes compétents en matière de gestion des déchets, particulièrement utile après le récent scandale lié à la gestion des fonds d'éco-emballages.

Ce texte devrait favoriser la mobilisation de toutes les énergies en fixant des objectifs très ambitieux qui trouveront leur déclinaison dans le projet de loi d'engagement national pour l'environnement. La commission des affaires économiques vous propose donc de l'adopter, sous réserve de la centaine d'amendements qu'elle vous soumettra. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Daniel Raoul.  - L'urgence écologique était une vérité qui dérange, c'est aujourd'hui une exigence partagée. Le film de l'ancien vice-président des États-Unis, Al Gore, et la récompense du prix Nobel qui a suivi ont indéniablement marqué une étape importante dans la prise de conscience écologique à l'échelle internationale.

« Nous allons exploiter l'énergie du soleil, du vent et du sol pour faire marcher nos voitures et nos usines. » Ces mots, prononcés il y a une semaine par Barack Obama lors sa cérémonie d'investiture, témoignent, dans leur évidente simplicité, d'un changement d'orientation de l'administration américaine qui ne peut que nous réjouir.

La prise de conscience a été longue à se dessiner, tant au niveau mondial que dans notre pays, et certains restent encore à convaincre. Les premiers militants de l'urgence écologique, dans les années 1970, étaient, à l'époque, bien seuls. Hommage leur soit ici rendu. Mais c'est aussi parce que ce texte vient de loin qu'il laissera sans doute une trace dans notre histoire législative.

Pour qu'il marque vraiment, il faut qu'il soit suivi d'effets. Or, les incertitudes sont grandes. Elles ont nom financement des engagements du Grenelle, recul des services publics, influence des lobbies. Peut-être, monsieur le ministre d'État, partagez-vous certaines d'entre elles.

Sans anticiper ni sur nos débats ni sur le vote final du groupe socialiste, je veux vous dire que nous nous engagerons dans la discussion avec la même responsabilité et le même pragmatisme que nos collègues de l'Assemblée nationale.

Oui, nous approuvons la démarche du Grenelle. Seul un diagnostic partagé peut faire bouger les consciences sur l'effet de serre et infléchir la courbe des certitudes. Oui, nous approuvons cette démarche concertée, élargie, coproductrice de pratiques nouvelles et de solutions innovantes.

Oui, nous approuvons l'idée d'un compromis du possible, car il serait présomptueux de donner des leçons sur un sujet aussi complexe. Oui, nous sommes pour le volontarisme en matière d'économies d'énergie.

Ce texte vient de loin. J'aurais pu dire aussi qu'il revient de loin, après un parcours parlementaire chaotique. Des voix se sont exprimées à l'Assemblée nationale pour le modifier, amoindrir sa portée, voire dénaturer son contenu. Ce risque existe ici aussi, comme le laissent supposer quelques apartés en commission. Il a fallu toute la ténacité des députés socialistes pour conserver sa force à ce texte et, sur certains points, pour en améliorer la portée : 150 de leurs amendements ont été adoptés et le texte a été voté à la quasi-unanimité. D'une certaine façon c'est la gauche qui a sauvé le Grenelle ! Preuve que des consensus sont possibles entre nous, preuve aussi de l'utilité du droit d'amendement parlementaire, à conforter.

Mais ce texte revient aussi de loin du point de vue gouvernemental. A quelques jours près, monsieur le ministre d'État, vous vous présentiez au Sénat pour le défendre sans secrétaire d'État ! Heureusement je peux saluer aujourd'hui une nouvelle secrétaire d'État dont je reconnais les compétences puisqu'elle a dirigé l'Ademe dont ma ville abrite le siège social.

Nous partageons le constat et les principes qui sous-tendent ce projet de loi : l'urgence écologique est majeure et il est juste qu'elle soit reconnue par la loi ; la démarche participative est innovante mais le rôle de l'État est nécessaire ; dans cette période de crise, le besoin d'investir massivement dans la croissance verte est réel. Mais, des interrogations subsistent et il existe de sérieuses contradictions entre ce texte et la politique gouvernementale.

Les moyens mobilisés dans le plan de relance permettent-ils une mise en oeuvre accélérée du Grenelle ? La crise, qui est une crise du système économique lui-même et pas seulement un retournement de conjoncture, appelle des réponses de long terme et une réorientation profonde des investissements et de la consommation en faveur de l'économie verte. Cette exigence est-elle prise en compte dans le plan de relance ? Non.

Le système ultralibéral démontre qu'il est incompatible avec le développement durable. La spéculation sur les matières premières en est un excellent exemple. La prise en otage des peuples qui ont faim en est un autre. Malheureusement, la privatisation de Gaz de France et sa fusion avec Suez montrent que les logiques libérales sont toujours à l'oeuvre.

Le désengagement de l'État et le recul des services publics sont-ils grenello-compatibles ? Le développement durable suppose qu'on pense global et qu'on agisse local, en apportant des réponses de proximité pour ne pas multiplier les déplacements. Or, votre gouvernement va dans le sens inverse. Quand on ferme un tribunal et qu'on demande au justiciable de faire une heure et demie de voiture pour régler un problème de tutelle, on ne respecte pas les principes du Grenelle. Même chose pour les hôpitaux, les bureaux de poste, les suppressions d'emplois dans l'éducation nationale. Avez-vous chiffré le bilan carbone du déménagement des services de l'État, qu'il s'agisse des administrations et de leurs agents comme des administrés ? Un amendement au plan de relance a été adopté ici, qui prévoit d'organiser un Grand Prix de Formule 1 dans les Yvelines, que connaît bien le président Larcher et où l'environnement est si sensible !

D'autres problèmes pourront surgir de l'opposabilité juridique des principes du Grenelle inscrits dans la loi. C'est d'ailleurs un des arguments avancés par les nombreuses communes qui ont déposé un recours devant le Conseil d'État contre la fermeture de leur tribunal. En clair, RGPP ou Grenelle, il faut choisir ! Une question financière maintenant : l'absence de garanties durables sur les financements annoncés et l'impasse budgétaire dans laquelle se trouvent des pans entiers de la politique nationale en faveur du logement, de la recherche, des transports, de l'agriculture. Le budget du logement pour 2009 diminuant de 7 %, comment les bailleurs sociaux pourront-ils satisfaire aux exigences de consommation énergétique pour les nouvelles constructions ou les réhabilitations ? L'objectif ambitieux de 50 kWh/m2/an pour les logements neufs sera difficile à atteindre avec l'actuelle crise immobilière et l'importante diminution des aides à la pierre.

Autre exemple : le financement des projets de transport en site propre sur lesquels les collectivités locales sont engagées. Là aussi, les besoins sont immenses et ce serait un puissant levier d'investissement et de relance pour l'économie. Les 15 milliards de la loi Tepa suffiraient à financer l'ensemble de ces projets !

Nous vous ferons des propositions : la création d'un prélèvement sur les superprofits des compagnies pétrolières pour financer les transports collectifs ; la baisse de la TVA sur les produits verts. Mais la question écologique est aussi, et peut-être avant tout, une question sociale, comme l'écrivaient MM. Fitoussi et Laurent dans un livre paru en septembre dernier : « La solution au problème écologique n'est donc pas la fin de la croissance des niveaux de vie, mais la décroissance des inégalités : il faudra alors moins de croissance pour satisfaire les besoins de la population car une part moins importante en sera accaparée par les plus riches, et les plus pauvres, délivrés des contraintes du quotidien, pourront de nouveau penser à l'avenir ». Le poids des dépenses énergétiques dans le budget des ménages n'a cessé d'augmenter, tandis que les inégalités s'accroissaient, si bien que les ménages les plus modestes y consacrent 15 % de leur revenu contre seulement 6 % pour les plus riches. C'est pourquoi nous déposerons plusieurs amendements visant à ce que les objectifs de sobriété énergétique n'empêchent pas certaines personnes d'accéder à l'énergie. Il faut prévoir un accès minimal à l'énergie pour tous en lui conservant un tarif abordable. Au-delà de l'objectif ambitieux de développer les énergies renouvelables, se pose la question de l'existence d'un service public de l'énergie qui garantisse ces tarifs abordables.

Au cours de ces débats, les sénateurs socialistes exerceront leur vigilance car certains pourraient être tentés, comme à l'Assemblée nationale, de dénaturer le texte et manifesteront leur sens des responsabilités. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Daniel Soulage.  - Je regrette le retard de quelques mois avec lequel ce texte nous est finalement soumis, d'autant que l'ordonnancement des textes initialement prévu a été totalement bouleversé. Nous avons déjà voté les dispositions du Grenelle III, incluses dans la loi de finances pour 2009. Et le Grenelle Il, déjà présenté en conseil des ministres, est désormais au coeur des débats entre les parties prenantes du Grenelle.

Tout cela court-circuite quelque peu ce projet de loi qui, fixant les orientations, est fondamental. En déclenchant une véritable prise de conscience de l'urgence environnementale chez l'ensemble de nos concitoyens, le Grenelle a été un véritable succès. Nous devons tous agir pour protéger notre environnement : chaque année la consommation d'énergie des ménages continue de croître, alors que le secteur industriel a déjà entrepris, depuis plusieurs années déjà, sa mue énergétique.

Ce projet de loi aborde pêle-mêle une multitude de secteurs d'activité et d'actions à mener. Je me limiterai aux activités agricoles. Je regrette d'abord l'image caricaturale qu'en donne ce texte, qui oppose une agriculture intensive qui détruit notre environnement, et l'agriculture biologique. Cela ne reflète pas la réalité. Notre agriculture s'est vu confier la mission de nourrir les hommes. Plus de 900 millions de personnes souffrent de la faim aujourd'hui, et ce n'est pas avec l'agriculture biologique que l'on pourra nourrir la planète. De nombreux agriculteurs se sont engagés dans des démarches responsables, prenant en compte la protection de l'environnement, tout en cherchant à maintenir des rendements élevés. C'est notamment le cas de l'agriculture raisonnée, qui n'est même pas citée, alors qu'elle s'inscrit dans la même logique que la certification environnementale des exploitations. J'ai déposé un amendement pour combler cette lacune.

Le Parlement européen a voté la semaine dernière un texte interdisant une vingtaine de pesticides en Europe, 22 substances cancérigènes, toxiques pour la reproduction ou perturbant le système endocrinien. Cette réglementation, s'accompagne d'une interdiction des pulvérisations aériennes. S'il est normal d'encadrer ces dernières, ne serait-ce que pour la santé des agriculteurs, les conditions d'application des phytosanitaires ne sont pas anodines et il faut veiller à ne pas être trop contraignants sous peine d'empêcher tout traitement. Dans un pays comme la France, troisième consommateur de pesticides dans le monde et premier dans l'Union européenne, la réduction des pesticides n'est pas un vain mot. Elle devrait entrer en vigueur par le biais de la directive européenne et aussi du plan Ecophyto présenté en conseil des ministres en septembre dernier. Ce dernier prévoit d'interdire les 53 molécules les plus dangereuses, et de réduire l'usage des pesticides. Nous sommes favorables à cette réduction mais cela ne doit pas se faire au détriment des filières de production qui ne disposent aujourd'hui d'aucune molécule de substitution à celles qui sont ou vont être interdites.

Les petites productions légumières et fruitières ne sont pas rentables pour les sociétés privées alors qu'elles comptent beaucoup au niveau local pour assurer la vitalité économique des territoires. Ces productions mineures doivent donc bénéficier d'un régime plus souple. Parallèlement, la recherche et l'innovation publique doivent être orientées vers ces secteurs, une responsabilité éminente incombant à l'Institut national de la recherche agronomique (Inra).

Enfin, je constate avec plaisir que ce texte aborde le stockage de l'eau. J'ai déposé un amendement précisant que l'objectif est d'obtenir des ressources supplémentaires, car stocker l'eau abondante en prévision des périodes sèches est une mesure de bon sens particulièrement utile aux agriculteurs du sud-ouest confrontés à des besoins en eau très élevés l'été alors que les pluies hivernales et printanières ne suffisent pas toujours pour mettre les nappes phréatique à niveau. Il est indispensable d'accroître les ressources en eau pour satisfaire aux besoins de la population et des activités économiques sans porter atteinte aux réserves profondes, afin de soutenir le débit des rivières en période d'étiage.

Enfin, j'ai une pensée pour ceux qui souffrent de la catastrophe qui vient de s'abattre sur le grand sud-ouest, en remerciant ceux qui se sont déjà emparés de ce dossier. (Applaudissements au centre et à droite)

M. le président.  - Nous étions hier à Gujan-Mestras, avec les maires des communes sinistrées, pour marquer la solidarité du Sénat.

présidence de M. Bernard Frimat,vice-président

Mme Évelyne Didier.  - S'ouvre aujourd'hui devant notre assemblée le débat tant attendu sur le projet de loi, adopté en conseil des ministres le 11 juin, devant mettre en oeuvre le Grenelle de l'environnement. Nous regrettons que l'urgence prive les parlementaires d'une seconde lecture, pourtant promise aux députés après l'accélération de leur débat. Je me suis trompée ? Magnifique !

Des travaux de grande qualité ont longuement réuni les représentants des collectivités territoriales, des organisations non-gouvernementales, des professionnels et des syndicats mais aussi de l'État et du Parlement. Nous remercions le président de la commission pour avoir constitué un groupe chargé de suivre le Grenelle de l'environnement. Ses nombreuses auditions ont débuté dès l'automne 2007. Les échanges ont permis d'éclairer le Parlement sur le réchauffement climatique, la biodiversité, les déchets et les enjeux de santé publique. Cette démarche louable illustre une gouvernance à laquelle nous souscrivons car le lien établi avec la société civile renforce la prise de conscience de nos concitoyens.

Monsieur le ministre, vous avez affirmé devant les députés qu'il est « plus facile d'être dans le déni ou dans le mépris de l'autre, de lancer des anathèmes plutôt que d'élaborer avec tous les acteurs de la société un diagnostic réel, sincère et sans concession. » Partageant le grave diagnostic posé par les scientifiques, nous sommes conscients de l'urgence à agir et déterminés à lutter jusqu'au bout.

Le constat est donc partagé mais nous affirmons que la protection de l'environnement nécessite des politiques publiques fortes au service de l'homme et de l'intérêt général. Environnement et droits sociaux sont intimement liés.

Le projet de loi Grenelle I traduit de bonnes intentions, avec certains objectifs précis, en répondant de façon inégale aux attentes suscitées. Nous pouvons esquisser la façon dont le Gouvernement souhaite le mettre en oeuvre.

Le projet de loi Grenelle II, portant engagement national pour l'environnement, a été déposé au Sénat le 12 janvier. Ce texte, à la fois technique et politique, n'a pas encore été examiné mais il semble manquer de mesures structurantes en termes de fiscalité, de santé, de protection des lanceurs d'alerte et de responsabilité sociale ou environnementale.

Les mesures en faveur de l'environnement inscrites dans les lois de finances ne sont pas satisfaisantes. Ainsi, les quatre cinquièmes du financement échappent à l'autorisation budgétaire annuelle, puisque sur les 7,3 milliards d'euros consacrés au Grenelle, seuls 17 % prendront la forme de crédits budgétaires contre 38 % consacrés aux nouveaux allégements fiscaux et 45 % affectés aux opérateurs ou à la Caisse des dépôts.

M. le rapporteur a mentionné le « verdissement des mesures fiscales » en visant des mesures comme le prêt acquisition à taux zéro, l'éco-prêt rénovation à taux zéro ou le crédit d'impôt développement durable. Or, le prêt à taux zéro est avant tout un cadeau fait aux établissements bancaires, dont on pourrait au demeurant discuter les pratiques discriminatoires en matière de prêts.

Que penser des objectifs ambitieux en faveur de la biodiversité sachant que la mission « Urbanisme, paysages, eau et biodiversité » est amputée d'une partie de ces crédits ? Que pèsent vos bonnes intentions lorsque l'Office national des forêts voit ces crédits diminuer chaque année ? En 23 ans, cet établissement public a perdu 37 % de ses effectifs !

Au cours de ce débat, nous ne manquerons pas de dénoncer d'autres coupes budgétaires comme celles qui ont provoqué récemment la colère des enseignants, des lycéens et des chercheurs, alors même que le Grenelle avait mis l'accent sur l'enseignement et la recherche comme moteurs du développement durable.

Vous attendez beaucoup des collectivités locales, qui n'ont pas perdu de temps pour s'engager dans la protection de l'environnement. Si l'État se désengageait financièrement à leur détriment, il compromettrait ce grand chantier. La révision générale des politiques publiques prive les collectivités territoriales de compétences qui leur apportaient jusque-là d'utiles expertises.

Le Grenelle I comporte certaines avancées alors qu'il est en recul sur d'autres points en regard des acquis des groupes de travail. En outre, les progrès sont à relativiser au vu des récentes décisions gouvernementales.

Nous approuvons les objectifs nationaux et européens affichés en matière de lutte contre le changement climatique : diviser par quatre nos émissions de gaz carbonique entre 1990 et 2050, réduire de 20 % les émissions de gaz carbonique dans les transports à l'horizon 2020 et porter à 23 % la part des sources d'énergie renouvelable d'ici 2020. La feuille de route est cohérente, même si nous en voudrions plus !

En revanche, la réduction des émissions de gaz à effet de serre ne sera pas servie par leur échange sur un marché « libre et non faussé ». Aucun bilan des mécanismes d'échange n'a été dressé. Cette spéculation sur la tonne de dioxyde de carbone est une fausse bonne idée.

D'autre part, l'ouverture à la concurrence du transport de marchandises et, bientôt, du transport de voyageurs provoquera l'abandon des lignes de proximité peu rentables, obligeant les collectivités territoriales à organiser leur desserte. Vous segmentez la SNCF -à l'origine, une entreprise intégrée- pour jeter les activités déficitaires et donner au privé ce qui est rentable. Est-ce un signe de développement durable ? En tout cas, cela compromet le report modal. Les futures « autoroutes ferroviaires » ne suffiront pas à relancer le fret ferroviaire.

La précarité énergétique dans le logement social et dans le logement privé n'apparaît pas aujourd'hui alors que de nombreuses personnes n'ont pas les moyens de financer les économies d'énergie. Je pense notamment aux propriétaires modestes ayant épargné toute une vie pour acquérir une petite maison.

En matière de biodiversité, nous approuvons la mise en place d'une « trame verte » rétablissant les continuités écologiques et celle de la « trame bleue », son équivalent dans les milieux aquatiques. Je reviendrai sur la politique de l'eau, très en retard sur certains points.

Nous approuvons l'objectif de réduire l'usage des produits phytosanitaires et de porter à 6 % la part des surfaces cultivées en agriculture biologique en 2013, puis à 20 % en 2020, contre 2 % aujourd'hui, mais comment oublier les débats sur les organismes génétiquement modifiés (OGM) et vos choix en faveur de l'agriculture intensive et libérale ? Le Grenelle I met l'agriculture biologique en avant, mais sans soutien réel.

J'en viens aux agro-carburants, dont le texte vise les deuxième et troisième générations. Nous nous en réjouissons car les agro-carburants présentent de graves inconvénients, notamment pour l'érosion des sols et la biodiversité. En outre, ces cultures réduisent les productions vivrières.

Les risques pour l'environnement, le traitement des déchets et la santé mériteraient une loi de programmation détaillée. En ce domaine, les avancées se font au prix de luttes difficiles. Ainsi, le règlement européen d'enregistrement, d'évaluation et d'autorisation de produits chimiques, connu sous son acronyme anglais Reach, est resté en deçà des objectifs initiaux, bien que l'engagement d'instaurer une responsabilité des producteurs de déchets constitue un premier pas.

Nous demandons un moratoire sur la construction d'incinérateurs, dont on connaît les conséquences sur la santé.

Enfin, nous accorderons une attention particulière à la responsabilité sociale des sociétés mères car le développement durable passe par la refonte de nos modes de production et consommation, mais aussi par la lutte contre les inégalités entre les peuples et entre les individus. Les sénateurs du groupe CRC-SPG soutiendront donc la protection de l'environnement et la promotion des intérêts sociaux. Tant que le Gouvernement croira que l'économie libérale et la croissance verte peuvent tout résoudre, les bonnes intentions du Grenelle I resteront lettre morte !

Notre collègue s'est demandé s'il faudrait choisir la RGPP ou le Grenelle. Je pense qu'il faudra choisir entre l'économie libérale et le développement durable. (Applaudissements à gauche)

M. Jean Bizet.  - Avec ce projet de loi, nous sommes en train de réussir un pari qui n'était pas gagné d'avance : après le formidable et inédit processus de dialogue démocratique appelé « Grenelle de l'environnement », nous allons concrétiser ses engagements et objectifs dans le présent projet de loi de programmation et dans l'engagement national pour l'environnement que nous discuterons dans quelques semaines.

Le groupe UMP apprécierait que ce dernier texte soit inscrit en premier lieu à l'ordre du jour du Sénat, eu égard au rôle central que jouent les collectivités territoriales dans sa mise en oeuvre.

Point n'est besoin de revenir en détail sur le texte soumis à notre examen aujourd'hui que M. Sido a excellemment rapporté. Dans son ensemble, le groupe UMP adhère à son objectif, conforme au paquet européen « énergie climat », des « trois fois vingt », c'est-à-dire réduire de 20 % la consommation d'énergie ainsi que les émissions de gaz à effet de serre et augmenter de 20% les énergies renouvelables dans notre production énergétique d'ici 2020. Nous saluons tous l'opportunité historique que nous offre ce texte d'adopter une économie de marché sobre en carbone. Au vrai, il s'agit plus d'une mutation que d'une révolution puisque nous conservons les fondamentaux actuels. La crise économique et financière est l'occasion idéale de modifier notre modèle de développement. De fait, la croissance verte, et non la décroissance ou tout autre retour en arrière, constitue un nouveau gisement de croissance et d'emplois à condition de ne pas perdre de vue les réalités économiques et les normes européennes, sans quoi nous créerions une fracture entre nos entreprises et leurs concurrentes étrangères. Le risque de distorsion de concurrence doit être impérativement écarté, dût la marche vers certains objectifs ambitieux en être plus longue. La France ne peut imposer ses normes au monde entier... Bref, pour ne pas fragiliser nos entreprises, privilégions la méthode pragmatique. N'oublions pas que l'OMC a prévu d'intégrer la contrainte environnementale dans les négociations seulement après le cycle de Doha... Ne jouons pas les chevaliers blancs, ce serait trop risqué. Reste que la croissance verte, cette économie sobre en carbone, est une grande ambition pour la France, pour l'Europe. Tous nos choix en matière d'énergie, d'investissement, de recherche, de transports et d'équipements doivent s'inscrire dans ce cadre.

Le mouvement vers une meilleure prise en compte des enjeux environnementaux est lent, car il est mondial. La France a attendu 25 ans avant d'inscrire, avec le Grenelle de l'environnement inspiré des travaux du climatologue britannique Stern et du Groupe intergouvernemental sur l'évolution du climat, la contrainte environnementale au coeur de son action politique. Malgré le contexte difficile, la présidence française a obtenu l'adoption du paquet « énergie climat » le 12 décembre dernier, dont elle avait fait une priorité, et une feuille de route sur la gouvernance mondiale du climat a été établie pour 2009 lors de la Conférence de Poznan en attendant la prochaine Conférence de Copenhague.

Pour conclure, n'oublions pas l'économie de marché, appréhendons la question de manière équilibrée en privilégiant, non la décroissance, mais la recherche constante de sauts technologiques. Je voterai ce texte et, par amitié, j'invite tous les membres de l'UMP à en faire autant ! (Applaudissements sur plusieurs bancs UMP et quelques bancs au centre)

M. Jean-Michel Baylet.  - Les tempêtes du week-end dernier, qui ont frappé le Tarn-et-Garonne...

M. Aymeri de Montesquiou.  - Et le Gers !

M. Jean-Michel Baylet.  - ... ainsi que d'autres départements du sud-ouest prouvent assez la gravité de la crise écologique que traverse la planète. Notre monde entre dans une ère nouvelle marquée par un climat instable, une raréfaction des ressources naturelles et une biodiversité en danger, et ce, sans parler de l'émergence de « conflits verts » où l'arme alimentaire pourrait devenir l'un des principaux facteurs de déséquilibres géopolitiques.

Depuis Michel Crépeau, les radicaux ont placé l'écologie au coeur de l'action politique. Rien d'étonnant, donc, à ce que nous ayons adhéré très tôt au constat établi par le Giec. Eh oui ! Nos industries, nos modes de vie, nos activités produisent des émissions de gaz qui compromettent jusqu'à la survie de l'espèce humaine. Il nous resterait seulement sept ans pour inverser cette tendance. Dans cette course contre la montre, la France, bien que ses émissions de gaz à effet de serre soient inférieures de 25 % à la moyenne européenne, n'a pas ménagé ses efforts. En témoignent l'adoption du paquet « climat » au niveau européen en décembre dernier et le Grenelle de l'environnement qui, malgré ses insuffisances, est porteur d'espoir. Parce qu'il est urgent d'agir, les radicaux ont approuvé la mise en oeuvre d'une fiscalité verte dans le cadre du dernier budget.

Ce texte doit adapter la législation à la croissance durable, concilier efficacité économique et respect de l'environnement. L'ambition des économies d'énergie dans les habitations devra être maintenue tout en évitant de provoquer une nouvelle fracture sociale. Il faut également agir dans le domaine des transports, qui représentent pas moins de 26 % des émissions de gaz à effet de serre. Les radicaux de gauche, qui ont pratiqué l'écologie urbaine dès les années 1980, soutiennent l'élaboration d'un schéma national des nouvelles infrastructures de transport à condition que l'État ne se décharge pas de son financement sur les collectivités territoriales. Or le Gouvernement ne garantit pour l'heure que 2,5 milliards quand les besoins sont estimés à 10 milliards !

M. Jean-Pierre Plancade.  - C'est insuffisant !

M. Jean-Michel Baylet.  - En temps de crise, comment financer ces mesures ? En attendant que la croissance verte produise ses effets, notamment sur la création d'emplois, évitons d'accroître la pression fiscale. La fiscalité écologique doit être incitative, et non punitive. A quelques semaines de l'examen du « Grenelle II », les radicaux de gauche attendent des réponses sur le volet financier.

M. Jean-Pierre Plancade.  - Absolument !

M. Jean-Michel Baylet.  - Les radicaux auront à coeur de contribuer à la réussite de ce grand pari écologique, persuadés que seule l'addition des volontés nationales garantira au monde sa survie ! (Applaudissements au centre)

M. Thierry Repentin.  - Nous aurons attendu 2009 avant que « consommer de moins en moins » apparaisse comme la seule solution permettant de « ménager des stocks naturels pour les générations futures », comme l'écrivait André Gorz dès 1977. Le « réalisme écologique », qu'il prônait, est encore trop souvent concurrencé par le réalisme politique. A preuve, l'écart entre les travaux des comités du Grenelle et leur traduction législative, l'embrouillamini du débat sur les OGM l'été dernier. Certes, monsieur le ministre, nous ne restons plus sans rien faire quand « notre maison brûle » mais si l'affichage et le volontarisme du Grenelle de l'environnement sont incontestables au regard du nombre des heures de concertation et de débats et des kilomètres de papier noircis de propositions, nous restons sur notre faim. Il ne suffit pas de prescrire des médicaments pour soigner. Prenons le logement, qui absorbe 42,5 % de l'énergie finale totale et représente 23 % des émissions nationales de gaz à effet de serre. Dans le secteur du bâtiment, le tertiaire est une piste de travail importante en raison des masses qu'il représente : 850 millions de m2 dont la moitié relève du secteur public. La mise à niveau de ce parc et des constructions est indispensable, ce qu'ont bien compris quelques grandes entreprises et promoteurs.

Ils testent des méthodes nouvelles mais leurs efforts se concentrent sur le neuf. Des collectivités territoriales travaillent aussi et expérimentent le bilan carbone élaboré par l'Ademe, mettant en oeuvre la RT 2010, voire 2020. Des panneaux photovoltaïques apparaissent sur les toits des bâtiments communaux, des salles polyvalentes ont des chaudières à bois... : l'État pourrait nous copier.

Avec 2 600 millions de mètres carrés, le logement représente le défi majeur. C'est là que les menaces sont les plus importantes, là aussi que les conséquences seront les plus concrètes. Les logements consomment mal, surtout des énergies fossiles, et trop : en moyenne 242 KW/h l'an au mètre carré. Les objectifs de construction en basse consommation pour 2012 et en énergie passive pour 2020 sont donc de bons objectifs à condition que les filières suivent, ce qui n'est pas encore le cas. Je suis inquiet pour la rénovation du parc ancien car 400 000 logements l'an, c'est beaucoup mais les moyens me laissent perplexe. L'article 5 fixe comme objectif la rénovation de l'ensemble des logements sociaux. Une telle formulation laisse supposer que tous les logements sociaux en ont besoin alors que leur performance moyenne est meilleure : 160 KW/h contre 250 dans le parc privé.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - C'est vrai.

M. Thierry Repentin.  - C'est dû à une attention constante aux charges des locataires. Les élèves dont l'appréciation serait « Peut mieux faire » ne sont pas où l'on croit.

Omission grave, les financements publics pour la rénovation des HLM restent introuvables alors que les 800 000 logements les plus énergivores méritent une mise à niveau. Le logement pour tous serait-il plus mal traité que le logement réservé à certains ? Il faut réduire la facture pour réduire la fracture énergétique. Concrétisez la cohérence entre les annonces volontaristes et les actes ! Nous proposons de relever le plafond du Livret A pour dégager des financements fléchés en faveur du logement social.

L'urgence est à l'aménagement durable du territoire et à la ville compacte. Il faut faire oeuvre de pédagogie et de conviction. J'en appelle à la réconciliation des Français avec la ville afin qu'y habiter ne résulte pas seulement d'un choix raisonné mais du désir d'une ville mixte et conviviale, dessinée dans le respect des acteurs locaux et de la pensée intercommunale. Il y faudra des outils puissants.

L'approche urbanistique du projet est trop timide. Le volet transports est insuffisant pour développer des transports performants -il s'agit pourtant du poumon de la vie urbaine ! Responsabiliser les territoires, c'est donc trouver des financements pour les transports. Nous proposerons la création d'une taxe de valorisation immobilière pour permettre aux collectivités d'investir ou d'assurer le portage de leurs emprises. Les élus locaux ont besoin d'outils plus incitatifs et d'une compatibilité entre documents d'urbanisme élaborés à des niveaux différents.

Nous prendrons notre rôle à coeur et formulerons nombre de propositions. Nous attendons du Gouvernement et de sa majorité le même esprit constructif, sans lequel il ne peut y avoir de vote favorable : le rendez-vous serait alors manqué. J'en appelle au ministre d'État qui se souvient que le projet d'engagement national pour le logement, qui comptait onze articles, en avait plus de cent à l'issue des débats. Je souhaite que vous puissiez permettre aux sénateurs de remplir leur rôle de législateur... (M. Dominique Braye s'exclame)

M. Charles Revet.  - Nous le faisons toujours.

M. Thierry Repentin.  - Ce texte place les acteurs locaux en première ligne ; les représentants des collectivités territoriales n'en ont que plus de légitimité à exiger des améliorations : c'est le seul chemin qui pourrait nous conduire à un vote. Vous avez les cartes en main, nous avons nos convictions, à vous de trouver les voies d'un rapprochement. (Applaudissements sur les bancs socialistes ainsi que sur certains bancs RDSE)

M. Marcel Deneux.  - Ce texte fondateur marque l'heureux aboutissement des assises de l'environnement qui se sont tenues après les présidentielles. Vous avez su réunir des personnes qui n'avaient pas l'habitude de se parler et avez dégagé un consensus qui va guider l'action politique pendant longtemps. Ces 283 engagements étaient impensables il y a deux ans ! Nous sommes maintenant au coeur de la période de débats qui permettront une prise de conscience de l'opinion. Il faut en effet beaucoup de pédagogie pour faire passer l'idée que les problèmes d'environnement sont prioritaires pour l'avenir de la planète et doivent être traités comme tels.

Vous avez choisi de procéder par étapes et ce texte en marque une. La loi de programme affirme des objectifs sans comporter de dispositions normatives. Il y aura ensuite d'autres textes, sur lesquels il sera plus difficile de réunir une majorité.

Le calendrier fait se télescoper l'examen de ce texte et la crise économique et financière. N'écoutez pas ceux qui vous disent que la réflexion sur l'environnement ne sied qu'aux pays riches en forte croissance. C'est faux, vous le savez bien. La vérité est que la France a un devoir de solidarité et d'exemplarité. Il faut redire que l'on peut se développer et créer des emplois dans le respect de l'environnement : toutes les études le montrent. Pour convaincre les plus réticents, il suffit de montrer le rapport Stern : ne rien faire nous coûtera plus cher que d'engager une part tout à fait supportable de notre PIB dans une politique de développement durable. Ceux qui trouvent qu'on en fait toujours trop invoqueront les équilibres budgétaires mais ce texte apporte toutes les réponses et je salue le travail de notre rapporteur qui l'a encore enrichi.

Rapporteur au Sénat sur un projet de résolution « énergie climat », je peux dire que la position commune que le Gouvernement a fait adopter aux Vingt-sept le 12 décembre nous convient. Ce texte est tout à fait en phase et il ne manque pas d'ambition puisqu'il retient des objectifs pour 2020. Il faudra néanmoins améliorer les échanges de quotas de CO2 et préciser les règles d'affectation du produit des enchères. Des ajustements aux frontières devront également éviter que les problèmes d'emploi ne s'aggravent dans les secteurs exposés aux fuites de carbone.

Nous nous sommes engagés sur 23 % d'énergies renouvelables, ce qui suppose de respecter les objectifs pour l'éolien, même si le véritable enjeu réside dans le développement de la biomasse et dans la deuxième génération de biocarburants. Il convient donc de lever tous les obstacles au développement des énergies renouvelables et d'accentuer la recherche.

Je lance à nouveau un appel à la sobriété, qui n'est pas privation : ce qui coûte le moins cher en CO2, c'est de consommer moins.

Élu de Picardie, je rappelle qu'Amiens n'a toujours pas le TGV et que le canal Seine-Nord mérite d'être accéléré avec un financement original.

La ligne Amiens-Boulogne n'est toujours pas électrifiée.

Agriculteur retraité, je sais que les agriculteurs n'ont pas attendu le Grenelle pour s'occuper d'environnement. La certification de haute valeur environnementale amorce le virage vers une véritable agriculture durable.

Après Poznan, il faut préparer Copenhague. C'est un grand chantier : nous comptons sur vous, monsieur le ministre. (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Gélita Hoarau.  - Dès les années 90, la Réunion s'est engagée dans une stratégie de développement durable, fondée sur la maîtrise de l'énergie, l'utilisation d'énergies renouvelables, la préservation de la biodiversité et la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Le président Vergès est à l'origine de la proposition de loi votée à l'unanimité en 2001, au Sénat puis à l'Assemblée nationale, faisant de la lutte contre le réchauffement climatique une priorité nationale.

Dès 1999, la Région s'est fixé pour objectif l'autonomie énergétique dès 2025, tablant sur la biomasse, le solaire et l'éolien, ainsi que sur la recherche sur les énergies marines et la géothermie. Cette politique, au coeur du plan régional de développement durable adopté en novembre 2006, a également inspiré le programme Gerri et le projet « Ile verte ». En juillet 2008, lors de la Conférence de l'Union européenne et l'outre-mer avec l'UICN, la Réunion s'engageait à réduire de 100 % la pollution en CO2 d'ici 2050. Dans le même temps, le G8 fixait un objectif de 50 %...

Les résultats ne se font pas attendre. La Réunion compte l'une des plus grosses fermes nationales de panneaux photovoltaïques. Grâce à des aides de la région et de l'État, son taux d'équipement en chauffe-eau solaires est l'un de plus élevés au monde. Pas moins de 36% de l'électricité provient d'énergies renouvelables, pourcentage qui devrait s'accroître avec les projets en cours.

La Réunion dispose encore d'une biodiversité unique au monde. L'Union européenne a souligné l'urgence d'agir pour préserver ce patrimoine, gravement menacé. La Réunion a ainsi décidé de créer une réserve naturelle marine et un parc national qui recouvre 42 % de son territoire. La sauvegarde de ce patrimoine suppose la création de milliers d'emplois. Nous avons proposé au Haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté de créer un vrai service public qui entrerait dans le champ du RSA.

Malgré les résultats obtenus, soulignés au plus haut niveau, il reste encore beaucoup à faire. Ce projet de loi pourrait aider la Réunion dans ses efforts, à condition d'être amendé. Ainsi, l'article 49 fixe à 50 % le taux de pénétration des énergies renouvelables pour l'ensemble de l'outre-mer, alors que la Réunion table sur 100 % ! Le programme relatif à la maîtrise des consommations se limite à l'adoption d'un plan climat dans chaque collectivité en 2012, alors qu'il faut dès maintenant mener des actions concrètes, et notamment déterminer la date d'application de la réglementation thermique, tout en tenant compte du niveau d'engagement dans chaque DOM, afin de n'en pénaliser aucun.

Votre projet de loi est ambitieux et innovant, malgré des insuffisances concernant les moyens financiers et leur répartition entre les partenaires. Mais le développement durable implique une remise en cause des comportements et des modèles de développement qui conduisent à des catastrophes économiques, sociales et écologiques. Il faut une nouvelle façon de penser, fondée sur la solidarité des humains entre eux et avec toutes les espèces animales et végétales. Cette prise de conscience collective passe aussi par des actions ponctuelles ou individuelles. Même une petite île peut apporter sa contribution. (Applaudissements sur les bancs CRC, ainsi que sur certains bancs à droite et au centre)

M. Philippe Richert.  - Ce texte est issu d'une démarche de concertation unique, pour ne pas dire révolutionnaire. Derrière, il y a la volonté d'aboutir à un texte prospectif, qui séduit tant par son architecture que par son contenu. Même si nous voudrions parfois aller plus loin, reconnaissons l'ampleur du défi relevé. J'adresse au Président de la République et au ministre d'État mes félicitations pour l'ampleur donnée à ce travail, et la détermination avec laquelle ils se sont engagés pour la réussite du Grenelle. Je suis fier d'appartenir à un groupe politique qui soutient l'action de ce gouvernement. Militant de mouvements environnementaux dans ma jeunesse, élu depuis 30 ans, ancien responsable de l'environnement à l'UDF, je n'ai jamais vu d'initiative d'une telle ampleur. C'est quelque chose d'unique, qui réhabilite le politique. Car la politique n'est pas qu'une juxtaposition d'actions, c'est le sens que l'on donne au vivre ensemble !

Nous savons faire face aux grandes pollutions visibles, mais quid des particules fines, qui causent 350 000 morts par an en Europe ? Les nanoparticules ont des conséquences désastreuses pour la planète ! Même notre air intérieur est vicié par les émanations dues au traitement des murs, des sols ou des meubles...

Autre défi, la persistance des polluants. On retrouve dans les eaux traitées les médicaments que nous absorbons, à commencer par la pilule contraceptive. La concentration des polluants dans les sols, les rejets atmosphériques dépassent les charges critiques. On va vers une stérilisation des milieux sensibles et une disparition de certaines espèces végétales et animales !

Troisième défi, les interactions et les transformations. L'ozone est un polluant secondaire, non maîtrisé !

Cependant, n'oublions pas que dans développement durable, il y a développement. Sans développement, pas de création de richesse ! Il faut tenir compte de l'environnement et de la solidarité, sans pour autant céder aux ayatollahs de la décroissance.

Il faut distinguer les conséquences sanitaires du réchauffement climatique, prendre systématiquement en compte l'air, le climat, l'énergie. J'y reviendrai dans mes amendements.

Dernier souhait : il faudra, à l'avenir, mieux mesurer les conséquences à long terme des décisions prises. Le bonus-malus m'a fait très mal : il a favorisé l'importation massive de voitures étrangères grosses productrices de particules fines.

Ces remarques n'atténuent pas mon enthousiasme pour ce texte extraordinaire qui illustre bien ce que les Français sont capables de faire quand ils acceptent de s'écouter et de travailler ensemble ! (Applaudissements à droite et au centre)

M. François Fortassin.  - Ce projet de loi marque une prise de conscience collective pour imposer un changement radical de mode de vie. Il s'inscrit dans un cadre à long terme. On peut toutefois regretter qu'il ne contienne aucune disposition normative.

Ce projet de loi fait honneur à notre Assemblée et je vous remercie de nous l'avoir proposé. Il suscite un large consensus qui se situe dans la durée. Les radicaux sont naturellement concernés par les valeurs humanitaires et la qualité de la vie. Nous devons engager une réflexion en profondeur afin d'éviter les écueils que nous allons rencontrer. Je voudrais qu'on fasse appel à la pédagogie du bon sens. (Marques d'approbation) Je vais prendre quelques exemples.

Quand on cultive des salades dans le Roussillon, qu'on les amène à Rungis pour les vendre le lendemain à Béziers, je ne suis pas sûr que l'on fasse quelque chose de très intelligent.

Pourquoi ne ferait-on pas campagne pour inciter à la consommation de fruits et légumes de saison ? Leur production consomme bien moins d'énergie.

Tout le monde est d'accord pour diminuer la consommation d'énergie mais on sait aussi que celle-ci est étroitement corrélée avec le développement. Je ne voudrais pas qu'on fasse payer aux pays pauvres le prix du sous-développement.

Il y a d'autres effets pervers qui feront peut-être grincer quelques dents...

Tout le monde est pour l'agriculture bio mais les rendements de celle-ci sont deux ou trois fois moindres. Parviendra-t-on à nourrir ainsi la population ? Ne serait-ce pas, d'ailleurs, l'occasion d'aborder le problème des organismes génétiquement modifiés ?

M. Christian Demuynck.  - Très bien !

M. François Fortassin.  - Je n'ai pas de religion en la matière : si l'on me démontre que les organismes génétiquement modifiés ne sont pas dangereux pour la santé, je ne vois pas au nom de quoi il faudrait les supprimer. Entre le bonheur de générations futures privées de nourriture et de celles qu'on pourrait nourrir abondamment, je sais quel camp choisir même si je n'appartiens pas à une génération qui a connu la faim.

Le problème est un peu le même pour l'eau : elle doit certes être de qualité mais d'abord en quantité, ce qui suppose qu'on la stocke. Il faut, pour cela, privilégier les systèmes gravitaires, plus rentables à terme que les pompages.

Et pourquoi ne pas adopter quelques attitudes courageuses ? Les compagnies aériennes à bas coût emmènent fort loin des touristes. Comme il ne s'agit que de voyages d'agrément, ils devraient être surtaxés puisque ces voyages consomment beaucoup de CO2. (Marques d'émotion)

M. Jean-Pierre Plancade.  - Voilà une solution radicale ! (Sourires)

M. François Fortassin.  - Les Polonais ont trois siècles de consommation de charbon sous les pieds ; allez leur expliquer qu'ils ne doivent plus en consommer !

On peut aussi prendre des mesures utiles qui ne coûtent rien. Vous avez le droit de planter un arbre à cinq mètres d'une maison ; quand il atteindra 25 mètres de haut et qu'il y aura une tempête, il tombera sur une maison, la vôtre ou celle du voisin. (Sourires) Il faudrait exiger des propriétaires qu'ils taillent à trois ou quatre mètres de haut les arbres plantés près des maisons. Ce n'est pas compliqué et cela ne coûte rien ! Je fais référence à l'histoire : les châteaux de la Renaissance ont été construits dans des espaces boisés ; pour que les hautes futaies de chênes ou de hêtres ne les écrasent pas, on a dégagé des clairières !

M. Roland du Luart.  - M. Fortassin est notre nouveau Colbert !

M. François Fortassin.  - Je suis généralement très sensible à l'idée de prendre des mesures économiques. Je vous proposerai un certain nombre d'amendements avec l'espoir, puisqu'ils sont intelligents, que vous les accepterez. (Sourires et applaudissements sur de nombreux bancs)

M. Jacques Muller.  - Nous vivons un moment sans précédent au sein de la Haute assemblée : nous débattons d'un projet de loi qui marque l'aboutissement d'un processus inédit, ayant fait se rencontrer et travailler ensemble les organisations de défense de l'environnement, les acteurs économiques et l'État. Je me réjouis de cette mobilisation sans précédent, au demeurant réussie, de la société civile. La crise écologique est grave et il fallait lancer un tel événement, qui marque les esprits et puisse être le point d'ancrage de la révolution écologique à laquelle nous sommes tous conviés.

Cela étant, permettez-moi de regretter un processus parlementaire chaotique marqué par l'adoption antérieure d'un projet de loi de finances 2009 et d'un plan de relance dont une grande partie des dispositions sont contraires à l'esprit et à la lettre du Grenelle.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - Pas la loi de finances !

M. Jacques Muller.  - D'où l'importance stratégique de ce texte de programmation qui va graver dans le marbre, avec toute la clarté requise, les nouveaux principes fondateurs de nos politiques publiques, de manière à éviter de nouvelles trahisons.

En l'état, le texte qui nous est soumis n'est pas satisfaisant. Je relève des lacunes graves au niveau de ses fondements scientifiques, des ambiguïtés au niveau des concepts mis en avant et, par conséquent, des dispositions qui ne sont pas à la hauteur des enjeux.

Tout d'abord, je relève qu'il a manqué un maillon clé dans le processus du Grenelle : les scientifiques. Les compromis issus de cette belle concertation traduisent plus l'état des rapports de force dans la société civile que les apports scientifiques sur lesquels ils auraient dû être aussi fondés. En témoigne l'objectif affiché de diviser par quatre nos émissions de gaz à effet de serre d'ici 2050. Vous nous proposez de suivre les préconisations du rapport 2001 du Giec alors que, au vu des derniers éléments disponibles, ce même Giec revoyait sa copie et, en 2007, invitait la France à diviser par douze ses émissions de ces gaz d'ici 2050. Aux États-Unis, il demande une division par vingt-cinq !

Nulle part ce texte ne fait état de la finitude de notre planète : il aborde certes la question de la biodiversité de l'air et de l'eau, mais il ignore celle des ressources fossiles. Cette dimension géologique très concrète a pourtant des conséquences essentielles sur le type de développement que nous voulons promouvoir. Le projet de loi tient compte du protocole de Kyoto et du problème de l'après-carbone, mais il oublie celui de la déplétion des matières premières non renouvelables, mis en évidence par Hubbert et ses successeurs : ce processus parfaitement décrit conduit à moyenne échéance à l'épuisement définitif des ressources fossiles.

L'uranium en fait partie. C'est pourquoi je regrette profondément la décision du Gouvernement d'écarter toute réflexion sur l'énergie nucléaire. Ce péché originel du Grenelle commence à produire ses effets, puisqu'il est désormais question de construire deux centrales EPR. Notre démocratie mérite mieux qu'un tel passage en force ! Au-delà des questions non résolues touchant à la gestion des risques liés aux matières fissiles et notamment aux déchets, se pose aussi celle de la déplétion des ressources fossiles : le Gouvernement s'apprête à reproduire avec le nucléaire les mêmes erreurs qu'avec le pétrole, tout en nous exposant à des risques incomparablement plus grands dans le monde instable d'aujourd'hui et de demain...

J'en viens à l'ambiguïté majeure de ce projet de loi, à savoir la référence au « développement durable ». Cette notion floue, non scientifique, donne lieu aux pires interprétations : l'article premier du projet de loi parle ainsi de « croissance durable », ce qui est tout simplement un oxymore !

Il aurait mieux valu retenir la notion beaucoup plus précise d' « empreinte écologique » : cet indicateur, dont le mode de calcul peut encore être affiné, vaut infiniment mieux qu'un PIB dit « durable » ! Il rend compte d'une réalité difficile à admettre, lorsqu'on fait partie de ce quart de la population mondiale qui accapare plus de 80 % des richesses : notre planète n'est ni infinie, ni extensible, et nous n'en n'avons pas de rechange... Je regrette profondément que l'idée d'une décroissance de notre empreinte écologique soit absente du projet de loi ; car le mode de développement de nos sociétés industrielles est en toute rigueur insoutenable.

La mobilisation remarquable des acteurs lors du Grenelle a marqué les esprits, et il serait malhonnête de nier les avancées figurant dans le texte qui nous est soumis. Cependant ce projet de loi, qui s'apparente beaucoup trop à une loi de programme, repose sur des fondements confus et non scientifiques qui ouvrent la voie aux interprétations les plus fantaisistes : on en a vu un exemple lors de l'examen du plan de relance.

Il revient aux parlementaires d'apporter à ce texte les clarifications nécessaires afin de faire réussir le Grenelle. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Claude Biwer.  - Dans le court délai qui m'est imparti, je me contenterai d'évoquer la question de l'énergie et celle des transports.

L'article 17 du projet de loi fixe l'objectif très ambitieux de 20 % d'énergies renouvelables dans la consommation d'énergie finale à l'horizon 2020, soit deux fois le taux actuel. Pour y parvenir, la France devrait produire 10 % d'électricité d'origine éolienne en 2020, soit une puissance installée de 25 000 mégawatts. Or, si l'énergie éolienne rejette moins de CO2, elle présente un certain nombre d'inconvénients.

Sur le plan économique, le développement de cette industrie s'explique sans doute par un retour sur investissement très élevé : EDF achète les kilowatts produits par les éoliennes plus cher que ce que lui coûte l'électricité qu'elle produit elle-même ! Le développement de ce mode de production d'énergie forcément aléatoire -les éoliennes ne fonctionnent qu'un quart du temps- nécessitera l'augmentation des réserves d'ajustement des centrales thermiques, ce qui est tout à fait contraire aux objectifs fixés par le Grenelle de l'environnement. J'avais eu l'occasion d'interroger le Gouvernement à ce sujet en octobre 2008, mais je n'ai toujours pas obtenu de réponse précise. C'est pourquoi je proposerai, par voie d'amendements, que le développement de l'éolien ne puisse entraîner un accroissement des réserves d'ajustement délivrées par des centrales thermiques.

Je regrette que la loi de finances pour 2009 ait réduit l'aide fiscale accordée aux biocarburants par l'intermédiaire de la taxe intérieure de consommation. C'est particulièrement dommageable pour les esters méthyliques d'huiles animales dont une unité de production est en cours de construction dans la Meuse. Il s'agit de biocarburants de deuxième génération, ceux que le Gouvernement souhaite promouvoir. J'ai déposé un amendement visant à tenir compte de la législation communautaire, qui prévoit que la contribution de ces biocarburants équivaut à deux fois celle des autres biocarburants pour le calcul de la TGAP.

En ce qui concerne les transports, je souscris pleinement aux objectifs affichés par ce projet de loi, qui consistent à favoriser les modes de transport les plus économes en carbone. En février 2008, MM. Reiner, Billout et moi-même avions présenté un rapport d'information sur le fonctionnement et le financement des infrastructures de transport terrestre ; je me réjouis que certaines de nos propositions aient été reprises.

Compte tenu des objectifs très ambitieux fixés par le Grenelle de l'environnement, nous avions calculé que l'Agence pour le financement des infrastructures de transport de France (Afitf) devrait trouver, en plus de ses ressources pérennes, 2,1 milliards d'euros supplémentaires par an sur la période 2009-2012 et 2,7 milliards d'euros sur la période 2013-2020.

Nous avions également proposé la mise en place d'une redevance kilométrique pour les poids lourds, prévue par l'article 10 du projet de loi. Je regrette pourtant la mise en oeuvre tardive de cette éco-redevance car l'Afitf a un besoin urgent de ressources. Je proposerai que cette taxe puisse être répercutée par tous les redevables sur les bénéficiaires de la circulation des marchandises, et minorée pour le transport routier de pré-acheminement ou de post-acheminement ferroviaire et fluvial.

J'observe avec plaisir que l'article 14 du projet de loi invite à prendre en compte dans la définition des politiques de transports l'impératif du désenclavement des territoires, y compris au niveau transfrontalier : nous vivons à l'heure européenne. Pour sanctuariser la politique de désenclavement, je proposerai, par voie d'amendements, de modifier les dispositions de l'article 9 afin que l'État soit dans l'obligation de programmer clairement les moyens financiers dévolus à l'augmentation des capacités routières liée aux besoins d'intérêt local.

Je suis heureux que l'État et RFF consacrent 400 millions d'euros supplémentaires par an à la régénération du réseau ferroviaire.

Des économistes ont évalué à près de 4 % la baisse de pouvoir d'achat entraînée pour les ménages par les mesures du Grenelle d'ici 2020, et à 800 000 le nombre d'emplois détruits contre 535 000 emplois créés. Le Grenelle de l'environnement rencontre pour le moment l'assentiment de nos concitoyens, mais prenons garde qu'il ne suscite pas un vif sentiment de rejet lorsqu'on leur présentera la facture, qui promet d'être salée. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean-Paul Virapoullé.  - Je tiens d'abord à exprimer ma solidarité et celle des habitants de l'outre-mer à l'égard de la population du sud-ouest, touchée ces derniers jours par la tempête. Nous comprenons son désarroi, car nous sommes nous-mêmes confrontés presque chaque année à des catastrophes de ce genre.

J'ai plaisir à constater une nouvelle fois que les promesses du candidat Sarkozy se traduisent dans les faits. Le Gouvernement compte deux succès à son actif : le consensus qui a prévalu sur ce texte à l'Assemblée nationale, et le paquet « énergie climat » récemment adopté par l'Union européenne. Mais la vraie difficulté, ce sera Copenhague : car le problème du climat n'est ni national ni européen, il est mondial.

Pour les résoudre, il faudra s'accorder sur des critères acceptables pour tous, qui prennent en compte la démographie des différents pays.

Il faudra tenir compte, aussi, de l'antériorité de l'activité polluante et du niveau de pollution atteint, principe fondamental pour assurer l'équité.

Ces trois principes de base devront guider les négociations de Copenhague. Si elles échouent, on aura beau avoir voté ce projet et avoir mis en route le paquet « climat », on n'aura pas résolu le problème du sauvetage des grands équilibres. Nous savons tous que la pollution, pas plus que le nuage de Tchernobyl, ne s'arrête aux frontières.

Comment décliner ces engagements outre-mer ? M. Deneux a appelé à des actions concrètes. Le Gouvernement vous soumettra le 9 mars un projet de loi sur le développement économique de l'outre-mer. Dans ces territoires qui constituent une richesse considérable pour la France et pour l'Europe, qui apportent à notre pays l'essentiel de son espace maritime, ses forêts tropicales, sa biodiversité, il consacre la mise en oeuvre de zones franches d'activité pour l'environnement et les énergies renouvelables. Nous ferons la preuve que dans des domaines comme l'agriculture, l'agro-nutrition, la protection de la planète n'est pas un frein mais un levier au développement. C'est une révolution culturelle et économique qui appelle une réflexion nouvelle. Un collègue me disait en aparté que si nous utilisons des pesticides propres mais qu'en Amérique centrale, où l'esclavage sévit encore, on continue d'utiliser des produits interdits, on ne s'en sortira pas. C'est pourquoi l'acte fondateur que nous allons voter a besoin d'une prolongation internationale. On ne peut accepter qu'il y ait deux poids deux mesures.

Je remercie le Gouvernement d'avoir posé cette première pierre. Je souhaite le succès des négociations de Copenhague. Sur nos îles, les effets dévastateurs des changements climatiques sont plus dévastateurs encore. Il n'est pas de plus beau combat pour les élus que le sauvetage des espèces, que le sauvetage des vies humaines car c'est bien aussi de cela qu'il s'agit : chaque grande catastrophe naturelle traîne derrière elle son lot de cadavres. Faisons aujourd'hui les sacrifices équitables qui s'imposent pour sauver demain les équilibres de la planète.

Nous apporterons notre voix à l'effort de protection national et international car le temps a trop duré de l'inconscience ou de l'indifférence, qui mettent en péril les équilibres de notre éco-système. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Michel Teston.  - Mon intervention portera sur le chapitre 3 du titre premier, relatif aux transports, dont les dispositions principales oscillent entre la logique d'une loi de programme et celle d'une loi-cadre, entre les déclarations de principe et l'édiction de quelques normes.

Les articles relatifs aux transports, adoptés par l'Assemblée nationale, qui a largement amendé le texte, comportent des aspects positifs. Les intentions sont louables et les objectifs largement partagés : réduire, dans le domaine des transports, les émissions de gaz à effet de serre de 20 % d'ici à 2020 ; faire évoluer la part du non-routier de 14 % à 25 % d'ici à 2022 ; créer de nouvelles lignes ferroviaires à grande vitesse qui libéreront des sillons sur les lignes classiques pour les TER et le fret ; accroître les moyens dévolus à la régénération du réseau ferroviaire ; développer les autoroutes ferroviaires à haute fréquence ; développer le transport collectif en site propre ; améliorer la compétitivité des ports et des voies d'eau...

Les députés ont donc bien fait de modifier la rédaction du II de l'article 10 qui disposait qu'en complément de l'effort des régions pour l'entretien et la régénération du réseau, les moyens dévolus par l'État et ses établissements publics à la régénération seraient accrus régulièrement : de fait, ce sont là des obligations qui relèvent de la compétence de l'État, l'intervention des régions restant facultative.

L'article 15 bis nouveau, qui vise la réalisation d'un schéma national des nouvelles infrastructures, en concertation avec les parties prenantes du Grenelle, est également bienvenu.

Enfin, à l'article premier, saluons le renversement de la charge de la preuve qui s'appliquera aux infrastructures de transport. Ce sera aux porteurs d'un projet non respectueux de l'environnement d'apporter la preuve qu'une décision alternative plus favorable à l'environnement est impossible à un coût raisonnable.

Restent cependant, dans ce texte, des insuffisances. On constate, à sa lecture, que l'État « encourage », « incite », « accompagne » « soutient », « étudie », « évalue », « veille ». Mais l'État « agit » peu. Mais l'État « finance » peu. L'insuffisance du financement est criante.

L'État, apprend-on, contribuera à hauteur de 16 milliards à la réalisation de 2 000 kilomètres de lignes ferroviaires nouvelles à grande vitesse d'ici à 2020. Mais ce programme représente au moins 79 milliards d'investissement, à réaliser dans le cadre de partenariats public-privé. La participation annoncée ne suffira vraisemblablement pas à attirer les investisseurs privés et ce sont une nouvelle fois les collectivités locales que l'on appellera en renfort.

Même remarque pour les investissements en faveur des transports en commun en site propre. L'État s'engage à hauteur de 2,5 milliards et non de 4 milliards, comme il était envisagé lors du Grenelle, alors que le coût prévisionnel pour porter en quinze ans la longueur de ces réseaux de 329 à 1 800 kilomètres est de 18 milliards, hors Ile-de-France.

L'incertitude demeure également sur les moyens consacrés à la régénération du réseau ferroviaire, essentielle au développement des TER et du fret. On apprend que les moyens apportés par l'État et ses établissements publics monteront en puissance pour atteindre, en 2015, un montant supérieur de 400 millions au plan de renouvellement 2006-2010. Comment ne pas rester sceptique alors que les crédits consacrés à cette action en 2009 par rapport à 2008, hors plan de relance, sont en légère diminution, tandis que ceux de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » devraient être ramenés d'un peu plus de 9 milliards en 2009 à 8,2 milliards en 2011 ? Seule une programmation pluriannuelle précise assurera la bonne application des dispositions relatives à la régénération.

Ce texte reste enfin peu précis sur la question de la lutte contre les nuisances sonores et les problèmes de sécurité. L'augmentation du ferroutage inquiète les riverains, tant dans la vallée de la Maurienne avec le Lyon-Turin qu'à Poitiers en raison de l'autoroute ferroviaire envisagée entre Paris et l'Espagne ou sur la rive droite de la vallée du Rhône avec le projet du contournement fret de Lyon.

Soucieux d'affirmer une vraie ambition pour le transport, les membres du groupe socialiste défendront des amendements instituant une contribution des compagnies pétrolières, prélevée sur leurs larges profits, à la réduction de la dépendance énergétique ; visant à la suppression des principaux points noirs de bruit ; prévoyant la réduction des péages pour les régions acceptant de participer financièrement, en complément de l'État, à la régénération du réseau ferré national. (Applaudissements à gauche)

M. Jean Boyer.  - Ce texte doit être l'occasion de jeter les fondements d'une nouvelle économie pour un développement durable dont la France et le monde ont besoin. C'est une question de société fondamentale. Notre groupe se veut, sur ce texte, élément fédérateur et force de proposition. Le Grenelle de l'environnement ouvre des chantiers majeurs comme l'amélioration de l'efficacité énergétique de nos bâtiments, l'évolution de nos modes de transport du tout automobile individuel vers une approche plus collective grâce au développement ferroviaire. Ces projets, s'ils doivent être portés par la volonté de l'État, doivent aussi emporter l'adhésion de nos concitoyens.

Enfin, ce projet de loi traduit la volonté de notre pays de désengager notre économie du « tout pétrole », pour des raisons d'indépendance nationale et de géopolitique, mais aussi pour des raisons écologiques. Oui, notre pays doit participer à ce nouveau défi mondial : la réduction des gaz à effet de serre ! D'autre part, le déséquilibre entre la demande et l'offre de pétrole entraîne des prix toujours plus élevés qui menacent notre balance commerciale et notre compétitivité économique.

Le trou de la couche d'ozone se résorbe, en partie grâce à l'action menée contre l'usage des aérosols : c'est la preuve que nous pouvons inverser les tendances lourdes quand cela devient vital pour notre monde.

Monsieur le ministre, vous avez été, avec vos collègues Nathalie Kosciusko-Morizet et Dominique Bussereau, les artisans de cette conférence qui a réuni les collectivités territoriales, les syndicats, les entreprises et les associations au sein de groupes de travail. Nous saluons le caractère innovant de votre démarche. Ce texte prévoit que la stratégie de développement durable est élaborée par l'État et que le Gouvernement en rend compte chaque année au Parlement. Mais comment prendre en compte les modifications des objectifs en fonction des évènements politiques et des percées technologiques à venir qui viendraient bouleverser ce projet de loi ? Que restera-t-il des objectifs du Grenelle si nous vivons à nouveau une crise géopolitique profonde dans certains pays pétroliers ?

La France doit construire un projet responsable, cohérent, réaliste et qui sera appliqué avec bon sens. Les objectifs du Grenelle doivent être réactualisés régulièrement ainsi que leurs moyens, selon l'évolution de certaines réalités. Il faut associer écologie et économie. Ce texte comporte certaines incohérences. Là, on nous parle de 2020, ici de 2012 ou de 2015 ; là, d'une augmentation de 20 %, ici de 25 % ; là nous avons des prêts à taux zéro, ici des crédits d'impôts et ici encore une étude sur les conditions de financement... A nous de faire de cet ambitieux programme un bel arbre qui s'enracine profondément. Il faut créer un état d'esprit. La volonté de travailler pour l'avenir n'a pas besoin de directives successives mais d'une prise de conscience collective. Oui, le Grenelle de l'environnement ne peut être une simple accumulation de mesures, il doit créer un état d'esprit, un engagement partagé par tous afin de transformer progressivement notre façon de vivre, avec plus de respect pour le monde qui nous héberge. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Rémy Pointereau.  - Avec le Grenelle de l'environnement, le Gouvernement rend irréversibles certains projets structurants pour notre territoire, ce qui n'était pas le cas lorsque les mêmes décisions étaient prises dans le cadre d'un comité interministériel d'aménagement du territoire. Il faudra sans doute veiller au respect des engagements pris, mais je veux saluer ici le travail accompli dans la plus grande concertation, parfois contre toute attente, avec les acteurs concernés.

Oui, il y a bien urgence à agir pour économiser l'énergie et pour en développer des formes alternatives. Oui, l'environnement doit être considéré comme une composante de notre politique de santé. Mais il faut trouver le point d'équilibre pour que les préoccupations environnementales ne nuisent pas au développement économique. Les professionnels du végétal et de l'énergie hydraulique ont eu le sentiment d'avoir été exclus des résultats du Grenelle alors qu'ils proposaient des avancées parfaitement compatibles avec ses objectifs : avec quelques amendements auxquels, je l'espère, vous serez sensibles, je souhaite poursuivre la discussion engagée à l'Assemblée nationale sur ces sujets.

La création d'une taxe kilométrique sur les poids lourds, l'éco-redevance, pénalise un peu plus des entreprises déjà très malmenées par la concurrence européenne et le cabotage. Il ne faudrait pas que cette taxe devienne, comme d'autres, un droit à polluer et je crois qu'il faut toujours privilégier la pédagogie et la prévention. Pourquoi ne pas expérimenter, comme plusieurs de nos partenaires européens, des véhicules plus volumineux mais non plus pollueurs ? J'ai déposé un amendement dans ce sens et un second visant à ce que les mesures d'accompagnement proposées par le texte bénéficient également aux chargeurs.

Dans le cadre d'une relance de notre économie, c'est une bonne chose qu'on ait pu trouver des financements pour quatre lignes de TGV. Mais la relance doit aussi s'inscrire dans le long terme. Permettez-moi de proposer une approche pragmatique et efficace qui privilégie le critère de l'état d'avancement du projet et le désenclavement sur tout autre critère. Dans l'article 11, il est indiqué que le maillage du territoire par des LGV sera renforcé, d'une part pour relier les capitales régionales à Paris, d'autre part pour les relier entre elles et connecter ainsi les réseaux français et européen. Cela semble être un principe d'avenir pour tous nos territoires. La réalisation -enfin- d'un TGV Paris-Orléans-Clermont-Lyon, reliant trois capitales régionales, ouvre de nouvelles perspectives pour les régions Centre, Auvergne et pour l'ouest de la Bourgogne aujourd'hui exclues des lignes grande vitesse. II s'inscrit parfaitement dans les lignes directrices fixées par le texte. Je défendrai avec plusieurs collègues des amendements au sujet de ce projet qui doublera la ligne Paris-Lyon, aujourd'hui saturée, tout en utilisant la gare d'Austerlitz aujourd'hui sous-exploitée. C'est un véritable projet d'aménagement du territoire en faveur de zones défavorisées et en grande difficulté économique. L'Association TGV Grand-Centre-Auvergne que je préside et dont votre collègue Brice Hortefeux est président d'honneur attend beaucoup de ce débat parlementaire. Plusieurs députés étant déjà intervenus lors de la discussion à l'Assemblée, la nouvelle rédaction de l'article 11 par le Gouvernement a permis des avancées. Les amendements que je proposerai ne dénaturent en aucun cas votre texte mais en clarifieront quelques aspects.

Le Grenelle de l'environnement est donc un début de réponse à l'urgence, et l'amorce d'un processus qui évoluera sans cesse. Sans doute a-t-il ses imperfections, mais l'essentiel est d'impulser un changement profond des logiques et des tendances actuelles. Monsieur le ministre d'État, nous souhaitons vous y aider avec ces quelques amendements. J'espère que vous les accepterez et je vous en remercie d'avance. (Applaudissements à droite)

M. Roland Ries.  - Mon intervention portera sur le volet « transports » de ce projet de loi. Réduire les émissions de gaz à effet de serre de 20 % d'ici 2020et promouvoir le transfert modal de la route vers les autres modes de transport constituent, de toute évidence, des objectifs louables. De même que donner aux autorités organisatrices de transport la possibilité de définir une politique globale de la mobilité durable. Sans oublier, bien sûr, la bonne idée qui consiste à reprendre les dispositions essentielles de la proposition de loi que j'ai fait voter à l'unanimité dans cette enceinte il y a deux ans et tendant à promouvoir l'autopartage dans les deux volets législatifs du Grenelle...

Mais, au-delà de ces déclarations de bonnes intentions, je suis au regret de dire qu'il y a loin de la coupe aux lèvres : la traduction budgétaire de ces belles orientations n'est pas au rendez-vous. Hélas ! Vous l'avez dit, le budget de 2009 devait être la traduction du Grenelle pour la période 2009 à 2011. Or, comme l'a justement souligné Michel Teston lors du débat sur le projet de loi de finances, les crédits du programme 203 « Infrastructures et services de transports » et, plus précisément, l'action 10 relative aux transports collectifs et ferroviaires sont loin de traduire concrètement les orientations du Grenelle. En un mot comme en mille, les lettres sont belles mais les chiffres ne suivent pas dans la loi de finances.

Permettez-moi de revenir à ce sujet sur un dossier particulièrement sensible pour nos grandes, mais aussi, et de plus en plus, pour nos moyennes agglomérations. Je veux parler des investissements nécessaires pour développer les transports collectifs en site propre. (TCSP). Le Gart les estime à un minimum de 18 milliards pour les dix ans qui viennent. Après avoir annoncé dans un premier temps une aide de 4 milliards, l'État l'a réduite à 2,5 milliards. Encore faut-il en défalquer les 500 millions du plan « Espoir banlieue », destinés au désenclavement des quartiers sensibles.

Dans le même ordre d'idée, et à plus court terme, l'appel à projets TCSP, dont la date limite de dépôt des dossiers est fixée au 31 janvier de cette année et qui concerne les projets susceptibles d'être mis en chantier rapidement, comporte une enveloppe de 710 millions d'euros, alors que le recensement effectué par le Gart montre que l'addition des projets répondant à ces critères exigeraient plus d'1,1 milliard.

Dans le domaine des transports, la qualité de l'offre détermine directement la demande et influe sur les choix modaux. Considérant la part croissante que prennent les collectivités territoriales dans le financement des transports -le poids des transports dans les budgets régionaux varie entre 20 et 25 % et s'élève même à 35 % pour l'Ile-de-France-, il devient chaque jour plus urgent de rechercher de nouvelles sources de financements. A cet égard, on ne peut que regretter que la fiscalité environnementale se situe souvent en deçà des engagements que vous évoquiez vous-même lors des discussions initiales du Grenelle. Passons sur l'instauration de l'éco-taxe poids lourds qui a connu un certain retard à l'allumage, notamment en Alsace, où la mesure n'a toujours pas vu le jour, trois ans après l'adoption du principe de l'expérimentation.

De toute évidence, il faudra remplacer « on pourra » par « il faudra » pour que la rédaction relative à l'instauration de cette éco-taxe soit compatible avec l'article 60 de la dernière loi de finances. Mais je regrette surtout que les nouveaux leviers de financement proposés par le Gart ne figurent ni dans la loi de finances, ni dans ce texte, ni dans le futur « Grenelle II ». Je pense notamment au « versement transport », outil essentiel à la disposition des autorités organisatrices. Des majorations spécifiques du taux plafond devraient être rendues possibles dans les agglomérations comptant moins de 100 000 habitants dès lors qu'elles organisent un transport collectif en site propre.

En outre, les régions devraient pouvoir instituer ce versement en dehors du périmètre des transports urbains pour financer le développement de services régionaux, comme l'avait préconisé le comité opérationnel 7 du transport urbain et périurbain. Cette ressource supplémentaire serait bienvenue pour les régions étranglées par leurs nouvelles compétences ferroviaires, mais elle réduirait aussi les distorsions de concurrence entre les entreprises situées à l'intérieur ou à l'extérieur d'un périmètre de transports urbains.

Les responsabilités accrues des collectivités territoriales en matière de transport justifient leur accès à de nouveaux financements, comme la taxation des plus-values foncières liées aux investissements dans les transports publics, l'introduction d'un péage urbain ou l'attribution d'une part de la TIPP. Ces pistes, proposées depuis longtemps par le Gart, sont absentes de votre texte. Nous proposerons plusieurs amendements pour y remédier.

En matière de transport fluvial, le texte ne manque pas d'intentions louables. Il comporte un plan de restauration et de modernisation du réseau fluvial. Depuis la discussion à l'Assemblée nationale, ce plan englobe deux projets concrets au lieu d'un. Toutefois, nous avons besoin non d'un canevas inachevé de projets, mais d'un schéma directeur des voies navigables, avec une planification d'ensemble des investissements de l'État. En la matière, l'Europe attend beaucoup de la France, dont les 8 500 kilomètres de voies d'eau forment le réseau fluvial le plus long de l'Union.

Bien sûr, nous proposerons d'améliorer ce texte sur certains points, tout en sachant que le Grenelle de l'environnement restera lettre morte sans les financements adéquats.

Un ancien président du Conseil constitutionnel a fort justement rappelé que « la loi n'est pas faite pour affirmer des évidences, émettre des voeux ou dessiner l'état idéal du monde. Elle est faite pour fixer des obligations ». J'ajouterai : « et des objectifs précis. » Le groupe socialiste attend des mesures concrètes. (Applaudissements à gauche)

M. Ambroise Dupont.  - Nous abordons aujourd'hui les premières traductions législatives des riches travaux du Grenelle de l'environnement, en attendant le Grenelle II. Enfin, les préoccupations environnementales ont cessé d'être un sujet dogmatique empêchant tout développement, pour devenir un autre moyen de penser l'économie. Comme vous, je suis persuadé que les métiers de l'environnement offrent de belles perspectives de croissance. Il est donc impératif d'adapter nos formations à ces nouveaux secteurs créateurs d'emplois.

Je m'éloignerai sans doute un peu du texte de loi, ce dont je vous prie par avance de m'excuser. Commençons par l'urbanisme. Je salue la lutte contre la régression des surfaces agricoles et naturelles due à l'urbanisation. L'attrait de notre territoire passe par la diversité des paysages et la possibilité pour les agriculteurs d'y vivre. Le sujet reste délicat, car le terrain a deux vocations naturelles : c'est le lieu où l'on produit et celui où l'on bâtit.

L'agglomération devient l'échelle de référence pour les documents de planification, sans doute au détriment des communes, ce qui rend le Scot essentiel en raison des instances qui l'élaborent.

L'article 8 bis permet de faire financer les transports grâce à la participation pour voirie et réseaux (PVR). Je comprends l'intention, mais la PVR, qui ne permet pas d'atteindre les objectifs initialement assignés, est totalement inadaptée aux coûts particulièrement élevés des infrastructures de transport. Je suis donc d'accord avec le rapporteur pour supprimer l'article.

A propos de la PVR, j'attire l'attention du Gouvernement sur le financement des raccordements électriques en vigueur depuis le 1er janvier. La réforme engagée tendait à rendre l'étalement urbain et le mitage coûteux pour les budgets locaux via leur participation financière aux extensions des réseaux. Or, le décret du 28 août 2007, pris en application de la loi du 10 février 2000, assimile tout renforcement des réseaux à leur extension, ce qui augmente notablement la contribution imposée aux communes, alors que le législateur entendait mettre le renforcement à la seule charge des usagers. Il faudrait donc modifier le décret pour le rendre compatible avec la loi. Je compte sur les services ministériels pour élaborer une solution efficace et juste.

Les trames vertes et bleues traduisent un engagement fort du Grenelle de l'environnement en faveur de la biodiversité, mais aussi des paysages. Certaines collectivités territoriales y travaillent déjà, mais des questions demeurent en suspens quant à leur prise en compte dans les documents d'urbanisme.

Le thème est sans doute hors sujet, mais je souhaite attirer votre attention sur une difficulté concrète souvent rencontrée par les maires : il est actuellement possible de mettre en demeure les propriétaires riverains de voies communales ou départementales, afin qu'ils réalisent les travaux d'élagage nécessaires, mais rien ne permet l'exécution d'office aux frais du propriétaire défaillant, alors qu'elle est autorisée le long des chemins ruraux. Il serait utile de compléter en ce sens la partie réglementaire du code de la voirie routière.

La réforme introduite en matière de publicité par la loi de 1979 tend à concilier la création, l'économie et la préservation des paysages. Hubert Falco et Nathalie Kosciusko-Morizet m'ont confié une mission de réflexion dont les conclusions devraient s'inscrire dans le Grenelle II. Des règles existent en ce domaine, mais elles sont peu ou mal appliquées. Certaines zones, notamment dans les entrées de ville, offrent un spectacle lamentable de pollution visuelle. Une application rigoureuse de la loi s'impose. Mais je relève l'inadéquation de l'article 36 bis du présent texte, introduit par l'Assemblée nationale pour remplacer la simple déclaration par une autorisation. Je proposerai de supprimer cette mesure technique inscrite dans une loi de programmation à vocation générale.

De nombreuses mesures du texte tendent à conforter la desserte par rail ou à créer des lignes à grande vitesse et j'espère que la Normandie ne sera pas oubliée dans les projets en gestation ! Je fais confiance à Dominique Bussereau. La métropole régionale de Caen est aujourd'hui moins bien reliée à Paris qu'il y a 30 ans ! Les usagers sont exaspérés à juste titre par ce triste constat et nombreux sont ceux qui optent pour la route.

Approuvant les orientations du projet de loi, j'espère que chacun comprendra la nécessité de cette grande évolution dans notre façon de vivre. La nécessité doit faire loi ! (Applaudissements à droite et sur certains bancs au centre)

M. Paul Raoult.  - Nous examinons ce projet de loi « Grenelle I » après le vote consensuel intervenu à l'Assemblée nationale en octobre. Ce texte emblématique est le fruit d'une longue procédure à laquelle j'ai eu l'honneur de participer en tant que vice-président de la Fédération des parcs naturels et comme « pilote » du comité opérationnel « biodiversité ».

La crise économique mondiale a bouleversé le regard sur la crise écologique, mais la longue concertation a sensibilisé l'opinion publique. C'est un mouvement de fond que le pouvoir politique doit prendre en compte. Nous savons tous désormais que nous vivons dans un monde fini dont les ressources naturelles limitées doivent être utilisées avec parcimonie. Sans verser dans le catastrophisme ni dans la sinistrose, il faut prendre conscience du fait que la survie de l'espèce humaine est en jeu.

Nous devons donc bâtir un autre monde prenant en compte les limites de la science et de la technique. Sans oublier la justice sociale, il doit être fondé sur les nouvelles valeurs d'environnement et de développement durable. Nous sommes appelés à une véritable conversion intellectuelle et morale ; nous sommes conviés à un sursaut, car le temps presse ! Au-delà des incantations, une volonté politique forte est donc nécessaire pour assurer l'inévitable transition.

Pour la première fois, les trames « bleues » et « vertes » sont introduites dans un texte législatif pour enrayer la chute de la biodiversité en incluant la lutte contre la fragmentation des habitats naturels, la préservation des réseaux écologiques et le déplacement des espèces principales. Il faut raisonner en termes de maillages et de fonctionnalités des écosystèmes.

Pour que la trame bleue et la trame verte soient réellement prises en compte dans les plans locaux d'urbanisme et les schémas de cohérence territoriale, l'État devra apporter davantage de moyens humains et financiers. Avouons que cela ne sera pas facile... Il est beaucoup question de la mise en oeuvre de grandes infrastructures linéaires de transport. A écouter les orateurs précédents, chacun semble tenir prêt un projet à sortir de son chapeau. Mais attention ! Commençons par entretenir l'existant plutôt que d'engager de nouveaux chantiers dont il faudra étudier l'impact sur l'environnement dans la plus grande concertation afin d'aménager, si besoin est, des crapauducs et autres installations facilitant les déplacements des animaux et protégeant la biodiversité... On demande parfois des compensations, mais comment l'évaluer quand il s'agit de biodiversité ? N'oublions pas le danger des plantes invasives et exotiques qui menacent nos écosystèmes, notamment atlantiques et méditerranéens... Sera-t-on capable d'instituer des servitudes contractuelles ? Elles donneront lieu à de délicates négociations avec le monde agricole. La trame verte et la trame bleue, soyons-en convaincus, représentent pourtant une assurance vie pour l'homme.

De surcroît, la crise écologique est une chance pour notre développement économique. Alors que la crise de l'emploi est aiguë, les seules activités liées au renforcement de l'efficacité énergétique généreraient 440 000 emplois directs, soit le double par rapport à l'an passé, et représenteraient un marché de 70 milliards d'ici 2012. Confortons cette chance par un soutien financier adapté et un changement de nos comportements. Pourquoi ne pas acheter des voitures plus petites ? Pourquoi ne pas réduire l'éclairage public quand 800 000 lampadaires à boule éclairent aujourd'hui le ciel en France ? Pour maîtriser l'emballement de la machine climatique, il faudrait parvenir à deux tonnes de CO2 par habitant alors qu'un Français en produit aujourd'hui neuf, un Américain dix-huit. La volonté politique sera-t-elle suffisante pour atteindre cet objectif ? Commençons à mettre en oeuvre une écologie quotidienne concrète qui va de la peinture naturelle, en passant par les couches recyclables de bébé (sourires) jusqu'aux légumes et fruits bio. De fait, quand les traces de pesticides trouvées dans les légumes et les fruits sont respectivement supérieures aux normes de 7 et 8 % et que la nocivité du désherbant Roundup est au coeur des débats actuels, nous devons soutenir le passage à l'agriculture bio ou orientée bio, particulièrement sur les aires d'alimentation des « champs captants ».

Pour conclure, nous souscrivons aux objectifs de ce texte, mais ils devront être accompagnés des moyens humains et financiers correspondants. Madame le ministre, il faudra continuer de résister aux groupes de pression industriels et financiers, obnubilés par le profit à court terme. A cet égard, que le Gouvernement, lors de l'adoption du plan de relance, ait accepté d'assouplir certaines règles au détriment de la santé, de l'environnement et de nos citoyens nous inquiètent. Madame le ministre, nous avons besoin d'être rassurés par des engagements précis !

Mme Fabienne Keller.  - Après mes collègues, je veux saluer la qualité des rencontres et des travaux auxquels a donné lieu le Grenelle de l'environnement. Puisse ce texte, qui fonde une stratégie de long terme, être encore amélioré de façon à recueillir l'adhésion de la quasi-totalité de notre assemblée ! (« On verra » sur les bancs socialistes) Le contexte dans lequel nous l'examinons s'est durci. La crise mondiale, avec la fin des CDD et des contrats d'intérim, fragilise désormais de nombreuses familles françaises. Certes, les aides sociales atténueront son impact sur les budgets familiaux, mais ce n'est pas suffisant. Plus que jamais, notre effort doit donc porter sur la qualité énergétique et l'isolation des logements. Investissons aujourd'hui pour réduire la facture énergétique demain, tant au plan financier qu'écologique. Saisissons l'opportunité de cette crise pour renforcer la performance énergétique des habitations, y compris dans le neuf. Aussi, monsieur le rapporteur, me semble-t-il plus judicieux de repousser l'amendement élaboré ce matin en commission : la notion d'énergie primaire doit être conservée pour maintenir à la mesure toute sa portée.

Mme Marie-Christine Blandin et M. Daniel Raoul.  - Très bien !

Mme Fabienne Keller.  - Je plaide aussi pour une mobilisation renforcée des communes pour le logement, car rien ne se fera sans elles.

J'en viens à l'éco-taxe sur les poids lourds, ces poids lourds qui encombrent nos routes et aggravent les niveaux de pollution aux particules fines dans nos villes. Son expérimentation en Alsace semble abandonnée ; je le regrette comme tous les élus de ma région. Cette ressource aurait enfin permis à l'Aftif de rééquilibrer la part du ferroviaire et du fluvial par rapport à celle du routier, de mettre en conformité d'anciennes déclarations avec nos actes, en engageant les programmes de TGV Le Mans-Rennes, Sud-Europe-Atlantique avec le contournement de Montpellier et, naturellement, la deuxième phase du TGV Est-européen. Cette politique, associée à l'aide aux transports urbains, au développement du vélo, de la marche et de l'autopartage, permettra de proposer une véritable alternative à la voiture individuelle, ce qui représentera un double gain, écologique et financier. Madame le ministre, mettez la pression pour que cette éco-taxe soit effective dès 2011 !

Ce texte pose les bases d'une nouvelle société, d'une économie durable. Je me réjouis qu'un certain nombre de mesures législatives aient été prises, malgré leur dispersion entre le budget, le plan de relance et le « Grenelle II ». Mais beaucoup reste à faire. Je forme donc le voeu que nous examinions ce texte dans des délais très courts afin de débattre au plus vite du « Grenelle II » qui conditionne son application. A l'impératif de l'urgence écologique s'ajoute aujourd'hui l'urgence d'agir contre la crise ! Entrons plus vite et plus fort dans l'ère de cette économie verte que nous voulons construire, madame le ministre, avec vous ! (Applaudissements sur plusieurs bancs UMP)

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Beau discours !

M. Claude Lise.  - « Je voudrais qu'à cet instant précis, tous les Français et les Européens qui nous écoutent prennent conscience de l'immense richesse que nous apporte l'outre-mer ». Ainsi s'exprimait le Président Nicolas Sarkozy, il y a un an, à Camopi en Guyane, rappelant que « l'outre-mer, c'est 97 % de la superficie des eaux maritimes françaises, qui sont les deuxièmes plus vastes du monde » et que « cette richesse, présente sur les trois océans, permet à la France de siéger dans la quasi-totalité des instances internationales de préservation de l'environnement. » Cet appel a reçu l'écho favorable qu'il méritait chez les ultramarins. Hélas, nous avons vite déchanté. Tout d'abord, parce qu'après avoir cru que l'outre-mer se contenterait d'un Grenelle de l'environnement à la Réunion, vous avez organisé dans la précipitation des Grenelles tropicaux, ce qui en a limité l'intérêt. Ainsi, en ouverture de la réunion organisée le 17 octobre 2007 en Martinique, ai-je souligné que cette « session de rattrapage » ne tenait même pas compte des préconisations de la démarche « agenda 21 » qu'applique le conseil général que je préside depuis deux ans... La déception des ultramarins n'a fait que croître à la lecture ce texte, amélioré par l'Assemblée nationale sur quelques points, mais insuffisant au regard de sa qualité de loi de programmation et des annonces du Président de la République sur l'outre-mer en Guyane.

Je veux d'abord souligner la nécessité d'une grande politique de prévention des risques naturels. Mme Nelly Olin avait annoncé les grandes lignes du plan séisme Antilles en janvier 2007. Quel en est le financement ? Je note encore que mon conseil général a mis en place un important réseau d'accéléromètres télégérés, intégré au réseau accélérométrique permanent.

S'agissant du risque de tsunami dans les Caraïbes, M. le ministre d'État a accepté de financer la quatrième rencontre du groupe intergouvernemental qui se tiendra les 17, 18 et 19 mars prochain mais la France est-elle décidée à s'engager pour réaliser dès 2010 un dispositif d'alerte opérationnel ?

Le plan d'action chlordécone 2008-2010 doit faire l'objet d'une attention soutenue : le laboratoire départemental attend toujours l'agrément pour les analyses de pesticides, qui sont toujours confiées à un laboratoire de la Drôme...

Il peut y avoir des coopérations régionales pour le traitement des déchets. Pourquoi ne pas mettre en valeur les initiatives et constituer des pôles d'excellence régionaux comme la Réunion pour l'agro-alimentaire et la recherche médicale, la Guadeloupe pour les énergies nouvelles, la Guyane pour la forêt, la Martinique pour le suivi et la prévention des phénomènes naturels. Notre conseil général, qui s'est, depuis 1992, doté d'un important système d'appareils de mesure, a envisagé un pôle de compétitivité adossé aux pôles Paca et Euro-Méditerranée.

Les résultats obtenus en Guadeloupe pour la géothermie devraient inciter le BRGM à donner les moyens nécessaires à la Réunion et à la Martinique. Le formidable potentiel que représentent les plantes médicinales doit être recensé systématiquement tout en évitant les risques réels de biopiratage.

Il ne suffit pas de reconnaître la richesse de l'outre-mer, il faut en prendre la mesure et, alors que se multiplient les cris d'alarme, engager une politique à la hauteur des enjeux. Cela suppose des moyens -ils sont aujourd'hui très insuffisants- pour soutenir une action dynamique et des initiatives innovantes. Prendre conscience de la diversité des outre-mer, c'est aussi reconnaître à leurs peuples un droit à l'initiative. Promouvoir la diversité des régions d'outre-mer et leur diversité culturelle contribue maintenant à l'invention de nouveaux modes de vivre ensemble. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. René Vestri.  - C'est un bleu qui s'adresse à vous parce que je m'adresse pour la première fois à cette auguste assemblée (« Très bien ! » et encouragements à droite) et parce que j'ai fondé SOS Grand bleu en 1999 pour lutter contre l'utilisation des filets dérivants, ces murs de la mort pour les mammifères marins. Je suis aussi à l'origine du projet Pelago, réunissant la France, Monaco et l'Italie, et qui a abouti le 25 novembre 1999 à la signature à Rome d'un accord pour la préservation des mammifères marins, qui bénéficieront d'un sanctuaire de 87 500 kilomètres carrés dans le bassin corso-liguro-provençal. Il s'agit du premier instrument juridique créant une aire marine protégée dans les eaux internationales.

La Méditerranée ne représente que 0,7 % des océans mais constitue une ressource majeure de la biodiversité, avec 28 % d'espèces qui ne se trouvent nulle part ailleurs. Présente dans la plupart des océans, la France possède le deuxième patrimoine maritime en termes de surface.

Mais en raison de la pollution exponentielle, du réchauffement climatique, de la salinité, de la pêche excessive et illégale, la Méditerranée appelle un traitement en profondeur. Le traitement des eaux usées doit être une priorité car le ruissellement des eaux entraîne une concentration de déchets rejetés dans la mer, où ils contaminent les fonds marins, se fixent sur les herbiers de posidonie qui ne protègent plus les franges côtières ni les plages. Les stations d'épuration sont insuffisantes et, malgré l'amendement de M. Trucy, la loi littoral en interdit souvent la construction. Il faut aussi persuader les autres riverains de ne pas annuler nos efforts. L'Union pour la Méditerranée voulue par le président Nicolas Sarkozy pourrait concrétiser là son volet environnemental.

Le développement de la plaisance constitue une chance pour notre littoral, sauf quand les ancres des navires au mouillage creusent des cratères marins. Deux phénomènes se conjuguent lorsque les prairies de posidonies sont dévastées par les plaisanciers. Elles représentent en effet le poumon de la Méditerranée. Cette plante marine a une importance fondamentale : elle fixe les fonds avec ses rhizomes et nourrit des milliers d'animaux marins. A la base d'une chaîne alimentaire, elle produit aussi de l'oxygène et contribue puissamment à la biodiversité. Un plan de conservation est impératif, qui favoriserait des mouillages écologiques. Il convient que les candidats au permis bateau soient formés au mouillage comme les candidats au permis de conduire le sont au créneau -après tout, le mouillage est la destination principale des navires... Il faut ensuite des zones de mouillage dotées d'un équipement léger en simplifiant le décret d'octobre 1991 car on ne peut actuellement établir une zone de mouillage en moins de 36 mois. Il importe enfin de développer les zones de mouillage propre, le préfet maritime imposant des équipements pour les déchets organiques.

Ces quelques mesures nous offrent une chance historique de laisser aux générations futures une mer en meilleur état. Protéger les fonds marins, c'est donner une chance aux petits marins-pêcheurs traditionnels -la pêche au gros qui ravage les fonds marins est une hérésie ! Je vous invite à vous pencher sur l'école de la mer que j'ai lancée avec le conseil général des Alpes-Maritimes pour montrer que la mer, si elle s'étend jusqu'à l'horizon, est aussi un volume profond habité par un monde fragile, qu'il faut apprendre à comprendre et à protéger. Mais nous, les « bleus », avons un phare à Paris : l'immeuble de la place Fontenoy qui abrite l'Enim. (Applaudissements à droite)

Commissions mixtes paritaires

M. le président.  - Les commissions mixtes paritaires chargées de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2009 et du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 sont parvenues à un texte commun.

La séance est suspendue à 20 heures.

présidence de Mme Catherine Tasca,vice-présidente

La séance reprend à 22 heures.

Rappel au Règlement

M. François Fortassin.  - Mon intervention sera brève mais solennelle. Nos départements du sud-ouest ont été très gravement touchés par la tempête.

M. Jean-Paul Alduy.  - Et le sud-est !

M. François Fortassin.  - Depuis trois jours, nous avons mesuré la mobilisation des services de l'État, des conseils généraux et des maires. Ce grand élan de solidarité est remarquable.

M. Charles Revet.  - C'est vrai.

M. François Fortassin.  - Il serait bienvenu que le Sénat, représentant des collectivités locales, manifeste sa solidarité, ne serait-ce que de façon symbolique, pour aider les collectivités les plus touchées. Je sais parler au nom de nombre de collègues, à commencer par MM. Plancade et Chatillon, élus de la Haute-Garonne, département particulièrement touché. (Applaudissements)

Mme la présidente.  - Je vous en donne acte. Cette émotion est unanimement ressentie sur nos bancs. Le président Larcher, hier en Gironde, a exprimé ce sentiment partagé. (M. Charles Revet approuve) Je suis sûre que chacun trouvera dans son département les voies pour exprimer cette solidarité.

Mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement (Suite)

Discussion générale (Suite)

M. Christian Demuynck.  - Le candidat Sarkozy s'était engagé à faire de l'environnement un enjeu national. Nul ne peut contester qu'il y soit parvenu. Dialogue inédit entre les différentes parties, le Grenelle est la preuve qu'une volonté politique permet de lutter contre le réchauffement climatique et le péril écologique. Le vote unanime de l'Assemblée nationale montre que le diagnostic et les solutions avancées transcendent les appartenances partisanes.

Monsieur le ministre, je vous invite à prendre en compte notre expérience de terrain et à écouter nos témoignages d'élus locaux. Nos collectivités sont susceptibles de constituer de véritables laboratoires pour compléter ce texte. Élu de Seine-Saint-Denis, je constate chaque jour le retard de notre région capitale par rapport aux autres métropoles européennes. La rénovation du parc immobilier, très énergivore, est le grand défi des prochaines années.

En construisant dans ma commune une crèche HQE, j'ai eu du mal à trouver des prestataires expérimentés. Le bâtiment doit s'adapter aux problématiques environnementales en renforçant notamment la formation des professionnels,

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - Exact.

M. Christian Demuynck.  - Je ne suis ni pro ni anti-OGM, mais je m'inquiète du retard pris dans l'application de la loi votée en juillet dernier. Le Haut comité sur les biotechnologies n'est toujours pas en place et la France ne sera pas en mesure d'expérimenter des OGM en 2009. Notre pays s'exclut volontairement de la compétition mondiale. Bayer a déjà délocalisé sa recherche. Nous ne sommes toujours pas en mesure de dire à nos concitoyens la vérité sur les OGM. J'aimerai disposer d'informations objectives sur ce sujet !

Il y a un an, la France activait la clause de sauvegarde concernant le maïs MON810, mais la Commission européenne, s'appuyant sur les avis convergents de plusieurs autorités scientifiques, dont I'Efsa, estime que cette clause n'est justifiée par aucun fait scientifique nouveau et devrait en demander la levée.

Je m'étonne en outre que l'avis de l'Afssa sur le rapport Le Maho, fourni par la France en appui de sa demande, en octobre, n'ait toujours pas été rendu public. Serait-ce une vérité qui dérange ? L'Efsa a publié le 29 octobre 2008 un texte qui démonte les arguments présentés dans ce rapport ! Entendez-vous lever cette clause de sauvegarde ? Nos concitoyens et nos entreprises attendent des réponses claires.

La loi est bien discrète sur la conservation et l'utilisation des ressources génétiques en lien avec la biodiversité cultivée. Les sélectionneurs privés à l'origine des 27 collections nationales actuelles souhaitent que la France investisse davantage pour créer et caractériser des collections supplémentaires dans de grandes espèces et définir le statut juridique des ressources génétiques françaises. La place accordée à la biodiversité cultivée est insuffisante face aux enjeux d'une agriculture dont la vocation reste avant tout de nous nourrir.

L'existence du monde tel que nous le connaissons est comptée et nous devons agir. Jamais une politique de l'environnement n'a été aussi ambitieuse, mais le plus dur reste de concrétiser les promesses. Les générations futures jugeront. (Applaudissements à droite)

Mme la présidente.  - Je vous remercie d'avoir scrupuleusement respecté votre temps de parole, et j'espère la même rigueur des autres orateurs.

M. Alain Vasselle.  - Cinq minutes, c'est long pour les auditeurs mais court pour l'orateur... (Sourires)

Je salue les avancées de ce texte. Nous attendons désormais avec impatience le Grenelle II.

L'impact financier et économique de ces nouvelles normes a-t-il été évalué ? Ancien maire de Valenciennes, vous savez, monsieur le ministre, que les élus locaux croulent sous le poids de normes diverses : il faut faire preuve de mesure ! Nous devons penser aux générations futures, tout en préservant l'avenir de nos entreprises.

Les agriculteurs, souvent montrés du doigt, sont accusés de polluer les sols et l'air, d'abuser de produits phytosanitaires, de pratiquer une agriculture intensive. Les cancers qui se multiplient chez eux après des années d'activité pourraient être dus au contact avec ces produits. Il faut protéger la santé de nos agriculteurs et leur assurer un revenu digne de notre époque et de notre pays ; il faut concilier la viabilité économique et le respect des normes.

Nous aimerions avoir un échange sur l'impact économique et financier des mesures liées à ce texte. J'espère que vous pourrez apaiser nos inquiétudes.

L'application des objectifs de l'article 41 pose de grandes difficultés d'interprétation et de traduction. De nombreuses interrogations portent sur l'objectif de diminution de 15 % d'ici à 2012 de la quantité de déchets partant en incinération ou en stockage : cette quantité doit-elle être comprise comme englobant l'ensemble des déchets produits sur un territoire ? De quels déchets s'agit-il ? Déchets ménagers et assimilés, ou bien aussi les déchets industriels banals ? La réponse est importante car les installations en question peuvent traiter ces différents types de déchets.

Partant de 360 kilogrammes par habitant et par an, l'article prévoit de réduire la production d'ordures ménagères et assimilées de 5 kilogrammes par habitant et par an pendant les cinq prochaines années. Ces 360 kilogrammes sont présentés comme étant des ordures ménagères et assimilées. Or la circulaire du ministre, en date du 25 avril 2007, relative aux plans de gestion des déchets ménagers, précise que l'Ademe évalue la production d'ordures ménagères au sens strict, c'est-à-dire hors déchets assimilés, à 360 kilogrammes par habitant et par an. Comment s'explique cette différence entre les deux textes ? Si l'on se réfère à la définition de l'Ademe et que l'on ajoute les 20 % de déchets assimilés aux ordures ménagères strictes, ce sont alors 450 kilogrammes qu'il faut considérer.

Voilà, j'ai déjà dépassé mon temps de parole d'une minute... (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Jean-François Le Grand.  - « C'est une triste chose de penser que la nature parle et que le genre humain n'écoute pas » Cette réflexion de Victor Hugo a été entendue puisque le Président de la République et vous-mêmes, monsieur le ministre d'État, avec Mme Kosciusko-Morizet avez eu l'audace du Grenelle de l'environnement. Sur votre proposition, j'ai présidé avec ma collègue Marie-Christine Blandin le groupe de travail consacré à la biodiversité. Nous avons considéré que nous avions devant nous une page blanche, et qu'on nous demandait de recodifier la société, en inscrivant l'environnement à sa juste place, place essentielle pour le temps présent mais plus encore pour les générations futures, à savoir au coeur du développement durable.

Ce projet de loi, globalement en phase avec la copie que nous avons rendue, le sera encore plus si vous prenez en compte l'excellent travail accompli par le rapporteur et par le groupe de travail qu'il a animé avec beaucoup de pertinence et de compétences.

Pendant l'été et l'automne 2007 le groupe biodiversité a, comme les cinq autres groupes, donné le meilleur de lui-même. Nous avons écarté toute idée de compromis, pour aller au-delà de nos différences vers le consensus. Au moment de la traduction législative de leur réflexion, je veux exprimer aux membres de ce groupe ma reconnaissance et ma fierté d'avoir été des leurs. Le temps passe et avec lui grandit l'oubli mais sachez que ni eux, ni moi-même, n'avons dévié de cette ligne. Nous avons eu à coeur de ne pas trahir la confiance qui avait été mise en nous. Je le répète : le texte, avec les amendements du rapporteur, est fidèle, je souhaite donc que notre vote soit sur l'essentiel unanime.

Souvenons-nous du rapport Stern : investir dès maintenant 1 % du PIB mondial permettrait d'atténuer fortement les effets du changement climatique, ne pas le faire coûterait dans quelques décennies jusqu'à 20 % du PIB mondial soit plus de 5 000 milliards d'euros.

Le rapport demandé par la Commission européenne à M. Pavan Sukhdev traite de l'économie des éco-systèmes et de la biodiversité. Il fait apparaître que ne pas préserver la biodiversité ferait courir à l'humanité des risques énormes, eux-mêmes financièrement très lourds. Il y a là aussi une obligation absolue d'efficacité, puisque toute espèce qui disparaît est perdue pour toujours. La biodiversité est l'assurance vie de la planète et l'assurance vie de chacun. Châteaubriand le pressentait quand il écrivit : « la forêt précède les hommes, le désert les suit ».

La trame verte et bleue est un dispositif essentiel. Lors de l'étude du Grenelle II, il faudra lever un certain nombre d'ambiguïtés sur sa mise en oeuvre. Je n'insiste pas plus, puisque le rapporteur l'a fait et que je partage sa position. Une suggestion toutefois : pour ne pas mettre de jure une collectivité sous la tutelle d'une autre, ce qui serait anticonstitutionnel, je refais ma proposition d'une aire géographique pertinente, qui pourrait être l'agence de bassin. Un comité de pilotage d'élus représentant toutes les collectivités, aurait à organiser la méthodologie de la contractualisation.

Un mot enfin de l'éducation-formation-information, ce triptyque qui doit être lié à l'environnement et au développement durable quant au fond, c'est-à-dire quant au sens et quant aux valeurs.

Contrairement à certaines idées d'arrière-garde, c'est parce qu'il y a crise économique qu'il y a urgence à anticiper et à avoir une économie d'avance. Les États-Unis l'ont d'ores et déjà entrepris en matière de nouvelles technologies pour lutter contre le réchauffement climatique ; ils se positionnent déjà en leaders. Pourquoi la France et l'Europe ne se donneraient-ils pas une économie d'avance sur la préservation et la valorisation de la biodiversité ? Cette loi propose une base solide pour une relance économique dans cette direction.

Le XXIe siècle se structure sous nos yeux en remettant la réflexion, l'économie dans le droit chemin, c'est-à-dire au service de l'Homme. C'est à quoi vous faites allusion, monsieur le ministre d'État, en parlant du Green New Deal. Soyons nombreux à être des Green New Dealers ! (Applaudissements à droite et au centre)

M. Louis Nègre.  - Cette loi est d'abord une loi historique. Elle marque son époque. Elle représente la prise de conscience par le Gouvernement et par l'ensemble du corps social de la dégradation accélérée de notre environnement. L'urgence est là ! Certains n'hésitent d'ailleurs pas à évoquer une sixième grande extinction des espèces.

Cette loi constitue également une révolution. Elle bouleverse autant l'ordre établi de nos mentalités que nos comportements. Plus rien ne sera comme avant ! Cette révolution verte constitue une rupture qui annonce notre entrée dans le XXIe siècle.

C'est une loi politique au sens noble du terme. Comme l'a indiqué le Président de la République, il faut redonner au politique toute sa place car lui seul permet de se projeter dans l'avenir et de fixer une grande ambition au pays. Ce projet de loi correspond tout à fait à la mission principale que nous confie le peuple : gouverner c'est prévoir.

Cette loi est une loi de gouvernance exemplaire. Vous avez réussi à fédérer tous les acteurs de la vie sociale au sein d'un pentagone démocratique. Cette maïeutique pourrait servir de modèle dans d'autres domaines en donnant toute leur place à l'expression de nos concitoyens.

Enfin, cette loi dynamise notre économie. L'écologie n'est pas l'ennemie des entreprises et de la croissance, bien au contraire ! Cette loi fondatrice nous fait entrer de plain-pied dans une nouvelle ère ; elle vise à « assurer la transition de la France vers une nouvelle économie compétitive ». En effet, de quoi s'agit-il ? De mettre en oeuvre une croissance durable sans compromettre les besoins des générations futures. N'oublions pas que le respect de l'objectif de 20 % d'énergie renouvelable à l'horizon 2020 se traduira par la création de 220 000 emplois directs et indirects.

Bien sûr, j'ai entendu comme vous les cassandres, les railleurs, les grincheux, qui vont répétant que cette loi est un simple catalogue plein de bonnes intentions et que son financement hypothétique met en cause sa crédibilité, qu'il s'agit d'une lettre au Père Noël, voire d'un roman à l'eau de rose. C'est bien connu, toute révolution se heurte au conservatisme, à l'immobilisme et à tous ceux qui voudraient que surtout rien ne change. (On se moque, à gauche)

M. Roland Courteau.  - Il y va fort !

M. Louis Nègre.  - A ces gens qui doutent, je répondrai que les objectifs visés par le projet de loi ne relèvent pas du catalogue de La Redoute, mais d'une analyse consensuelle de l'ensemble des parties prenantes sur les maux qui affectent notre planète et sur les moyens de la sauver.

M. Jacques Blanc.  - Très bien !

M. Louis Nègre.  - Absence de moyens financiers ? L'État s'engage devant nous pour un effort financier sans précédent en faveur des transports en commun.

Des normes trop ambitieuses pourraient porter atteinte au développement économique de la Nation ? Au contraire, la loi va obliger les acteurs économiques à prendre acte de ce nouveau contexte ambitieux pour devenir encore plus performants. C'est une ardente obligation et il n'y a pas d'alternative.

Le nouveau président des États-Unis vient de déclarer : « le temps est venu pour l'Amérique de montrer le chemin en matière de lutte contre le changement climatique ». Il a ajouté : « les nouvelles normes n'ont pas pour objectif de porter préjudice aux constructeurs automobiles mais de les préparer pour l'avenir ». Ce n'est plus la Chine qui s'éveille, ce sont les Etats-Unis !

La course contre le changement climatique et pour l'innovation est engagée. Ne restons pas en retrait ! Les lignes Maginot n'ont jamais empêché de perdre les guerres.

M. Paul Raoult.  - Et il a l'air d'y croire !

M. Louis Nègre.  - Malgré la qualité de ce projet de loi, je souhaite qu'on aille plus loin et je vous proposerai plusieurs amendements.

Je profite de ce que nous sommes encore au mois de janvier, pour former cinq voeux. Sur la formation, les propositions du Gouvernement en la matière sont insuffisantes.

Il faudrait élaborer un plan de formation dynamique en direction des corps de métier directement concernés : bâtiment, santé, automobile. Prenons-y garde : faute d'une offre de formation suffisante, le Grenelle pourrait capoter !

M. Daniel Raoul.  - C'est une menace ?

M. Louis Nègre.  - Pas du tout !

La recherche-développement est à la source de l'innovation qui nous permettra de préserver notre compétitivité. Quelles mesures fiscales pourrait-on mettre en place pour l'encourager, dans le cadre du Grenelle II ?

S'agissant des transports en commun, après l'appel à projet pour les transports en commun en site propre (TCSP), il faudrait intensifier notre effort et lancer d'ores et déjà un deuxième appel à projet.

En tant que parlementaire des Alpes-Maritimes, j'affirme que l'État doit faire preuve de plus d'audace dans le développement des autoroutes de la mer. Je ne suis pas persuadé que les 80 millions d'euros inscrits dans la loi soient suffisants pour développer efficacement et rapidement ces transports alternatifs.

Mme la présidente.  - Veuillez conclure.

M. Louis Nègre.  - Je conclus. J'attends avec impatience le lancement de la ligne à grande vitesse de Provence-Alpes-Côte-d'Azur (LGV Paca), soutenue par la grande majorité des parlementaires de la région et dont l'utilité environnementale, sociale et économique ne fait aucun doute.

Au niveau national, les récents états généraux de l'automobile ont montré que la France ne pouvait conserver sa place dans le marché mondial qu'en se situant à la pointe de l'innovation. Je suggère donc d'instaurer un groupe de travail sur le véhicule du futur et de mettre en oeuvre tous les moyens nécessaires pour créer une filière industrielle de véhicules décarbonés.

Le Grenelle de l'environnement constitue un outil efficace, destiné à faciliter notre mutation et notre entrée dans une nouvelle économie. Mais il propose surtout une certaine vision de l'avenir : car, comme disait Saint-Exupéry, « on n'hérite pas de la terre des ses ancêtres mais on l'emprunte à ses enfants ». (Applaudissements au centre, à droite et au banc des commissions)

M. François Fortassin.  - Il y a trois mois on parlait d'économies virtuelle, aujourd'hui on parle de subventions virtuelles, demain viendra peut-être le tour des sénateurs et des ministres virtuels ! (Sourires)

M. Yann Gaillard.  - Je m'en tiendrai au problème de la forêt. Je tiens d'abord à saluer le courage de nos compatriotes du sud-ouest : nous qui, dans le grand nord-est, avons essuyé il y a dix ans les dégâts causés par les cyclones Lothar et Martin, nous savons de quoi il retourne. Klaus, le dernier ennemi public, s'en est pris principalement au pin maritime, prédominant dans le sud-ouest, et il a surtout endommagé des forêts privées. Que nos amis propriétaires forestiers et sylviculteurs sachent que toutes les communes forestières sont à leurs côtés dans cette terrible épreuve.

L'article 29 est excellent, mais il est long et complexe. Non qu'un texte de loi doive toujours être court et percutant ; l'important est qu'il ne s'en tienne pas à des pétitions de principe.

La forêt, la gestion forestière et le bois ont pris une place très importante dans les débats et les conclusions du Grenelle de l'environnement. J'ai encore en tête la belle phrase de M. Frémont : « la forêt est la lumière du Grenelle ». La forêt et le bois apportent une contribution essentielle à la lutte contre le réchauffement climatique, à la préservation de la biodiversité, à la protection de l'eau, des sols et des paysages, et à la satisfaction de la soif de nature de nos concitoyens.

C'est dans le cadre du Grenelle que les forêts publiques et privées ont signé, avec la Fédération nationale France Nature Environnement, un protocole intitulé « Produire plus de bois tout en préservant mieux la biodiversité », qui rend crédible l'objectif de mieux valoriser les forêts : le Président de la République en exprimait le voeu lors de son déplacement dans les Vosges le 18 décembre dernier.

Je souscris pleinement au principe énoncé par l'article 29 : « La production accrue de bois (...) doit s'inscrire dans des projets de développement locaux. » C'est au niveau local, par des projets impliquant tous les acteurs concernés sous la houlette des élus, que l'on pourra bâtir un projet de valorisation des bois, de préservation de la biodiversité, de création d'activités économiques et d'emplois, de services environnementaux et de qualité de vie, autrement dit un développement local durable et de qualité.

La création d'un Fonds de mobilisation des bois qui figurait dans une première version du texte ne se retrouve plus dans le projet qui nous est soumis. Pourtant, peut-on envisager une politique ambitieuse sans s'en donner les moyens ? Il faudrait au moins créer le Fonds de mobilisation de 100 millions d'euros annoncé par M. Barnier en conclusion des Assises de la forêt organisées dans le prolongement du Grenelle. Si nous voulons que brille la lumière du Grenelle, il faut allumer l'étincelle de ce fonds.

L'Office national des forêts assure un travail remarquable de gestion des forêts de l'État et des collectivités locales. Il applique un excellent régime forestier, commercialise 40 % du bois mis en vente chaque année et assure un service public très précieux en milieu rural. Cet établissement est aujourd'hui dans une situation délicate : il ne serait pas sage de compromettre son existence au moment où nous voulons que la forêt joue pleinement son rôle. (Applaudissements au centre, à droite et au banc des commissions)

M. Jean-Paul Alduy.  - Ce projet de loi a été adopté à une quasi-unanimité par l'Assemblée nationale ; souhaitons qu'il en aille de même au Sénat, car la lutte contre le réchauffement climatique, la préservation de la biodiversité, le choix d'un développement durable méritent de rassembler tous les Français.

La crise économique ne doit pas ralentir nos efforts, bien au contraire : elle est une opportunité, pour opérer la mutation nécessaire du comportement des ménages et des décideurs et prescripteurs, de l'appareil productif industriel et agricole, de la gouvernance des villes et des services publics. Cette loi modifiera le sens de nos décisions individuelles et collectives, et jette déjà les bases d'une nouvelle architecture juridique que d'autres lois viendront compléter.

En ce qui concerne l'habitat, je suis entièrement d'accord avec l'objectif de ramener à 50 kilowatts/heure par mètre carré et par an la consommation moyenne d'énergie primaire des bâtiments neufs dès 2013. Ce serait un mauvais signal de revenir sur cet objectif en multipliant les modulations ou les exceptions. J'entends les inquiétudes de certains ; mais les mêmes craintes s'exprimaient au début des années 1980 lorsque nous évoquions la réduction de 50 % de la consommation d'énergie des bâtiments neufs, ce qui nous paraît aujourd'hui banal ! Les nouvelles techniques d'isolation et de ventilation nous permettent de relever ce défi.

En outre, les panneaux photovoltaïques arrivent à maturité et seront d'autant plus rentables que le prix de l'électricité devrait continuer d'augmenter. Le solaire est une industrie naissante. L'Allemagne est en avance sur ce terrain ; aux Etats-Unis, le président Obama en a fait l'un des axes de son plan de relance, en octroyant des crédits d'impôt sans plafond. La France doit rattraper son retard, en accordant la priorité aux énergies renouvelables. L'objectif de 2012 n'est pas une contrainte insupportable, c'est une chance pour le bâtiment !

Le véritable défi concerne le parc existant. Le parc privé représente la moitié de ce marché, mais les aides financières et fiscales risquent d'être insuffisantes.

M. Roland Courteau.  - C'est vrai.

M. Jean-Paul Alduy.  - Il faudrait y réfléchir dans le cadre du plan de relance : il s'agit d'un marché ouvert aux petites entreprises sur tout le territoire, qui soutiendrait l'activité de ce secteur sans risquer de détériorer notre balance commerciale ; d'ailleurs les économies d'énergie réalisées grâce aux travaux augmenteraient le pouvoir d'achat des ménages.

M. Roland Courteau.  - C'est encore vrai.

M. Jean-Paul Alduy.  - C'est aussi à un problème financier que sont confrontés les bailleurs sociaux.

M. Thierry Repentin.  - Sur ce point, nous sommes d'accord !

M. Jean-Paul Alduy.  - Si l'on n'octroie pas de primes à l'amélioration des logements à usage locatif (Palulos) en dehors des zones d'urbanisation sensibles, aucun progrès significatif ne sera enregistré, alors que c'est là qu'il faudrait intervenir pour maîtriser les charges que les ménages les plus précaires ne peuvent plus payer. J'ai noté la volonté du ministère d'accorder des prêts à taux bonifié ou des subventions dans le cadre de conventions entre l'État et les bailleurs sociaux ; mais de grâce, privilégions les solutions simples, décentralisées et rapides, car il y a urgence.

Les objectifs assignés sont incontournables tant le secteur du bâtiment est important dans la consommation globale d'énergie de la France, mais il faut un soutien financier des pouvoirs publics plus important pour entraîner la filière construction, promouvoir l'industrie du solaire et déclencher le changement culturel nécessaire en faveur des énergies renouvelables.

J'en viens à la question de la planification urbaine. Le chapitre consacré à l'urbanisme n'est que succession de souhaits et d'encouragements. C'est qu'il manque encore, en France, une vraie gouvernance des villes, disposant d'un bloc de compétences cohérent sur un territoire pertinent et légitimée par le suffrage universel.

Mme la présidente.  - Il est temps de conclure.

M. Jean-Paul Alduy.  - Il faudra bien un jour avoir le courage de définir une compétence obligatoire des intercommunalités qui aille de la planification du développement durable jusqu'au droit des sols.

M. Thierry Repentin.  - Je vous rejoins là-dessus.

M. Jean-Paul Alduy.  - C'est sans doute dans le « Grenelle II » que je trouverai la réponse à mes questions. (On en doute à gauche)

J'approuve sans réserve l'ambition de cette loi, qui définit un ensemble cohérent d'objectifs et d'orientations même si je reste impatient de voir les lois qui vont suivre pour préciser la nouvelle architecture juridique du développement durable : c'est un texte fondateur, qui doit tous nous rassembler. (Applaudissements à droite et au banc des commissions)

M. Jacques Blanc.  - Je vous remercie, monsieur le ministre d'État, de nous avoir fait entrer dans un monde nouveau. Le Grenelle a inauguré une méthode nouvelle. M. Alduy l'a dit, ce texte est fondateur, car il ouvre une conception nouvelle d'un développement durable voulu par l'homme, préoccupé de son environnement et de son avenir.

Je dis oui, pour les transports, à la priorité au ferroviaire. Allons vite pour le TGV -MM. Alduy et Fournier ne me contrediront pas. Avançons, avec l'Union européenne, vers l'Espagne, par le tunnel du Perthus, en contournant Montpellier. Permettez à l'élu de Lozère que je suis d'ajouter qu'il faut sauver la ligne Clermont-Ferrand-Nîmes, mais aussi Clermont-Ferrand-Béziers, au moins pour le transport marchandises. Mais ne jetons pas le bébé avec l'eau du bain. Il faut aussi, là où les trains ne passent pas, faire un effort sur le routier. Je n'en donnerai qu'un exemple, celui du projet de la Nationale 88, qui bénéficie d'une charte de développement durable signée en 2007 et qui, pour assurer le développement local, doit faire la liaison Lyon-Toulouse en passant... par la Lozère. (On s'amuse)

Je dis oui à l'agriculture biologique, si on lui permet de vivre. Je suis étonné, cependant, de n'avoir pas entendu parler d'agriculture raisonnée. Certains y voient une concurrence, pas moi. Je me réjouis de ce que ce projet entend faire pour l'agriculture. Oui, les abeilles sont des témoins, et je souhaite que l'interprofession participe à la structure de recherche sur la pollinisation, indispensable à nos cultures.

Je dis oui aux mesures en faveur de la biodiversité et je vous dis bravo, monsieur le ministre, pour la trame verte. Mais quel rôle y joueront les parcs naturels ? Leur récente réforme leur permettrait de devenir des phares au service du développement durable. La Lozère a la chance d'abriter une partie du parc national des Cévennes, qui pourrait être classé, avec votre soutien, monsieur le ministre, au patrimoine mondial de l'Unesco. (On s'amuse derechef)

Vous nous avez permis, monsieur le ministre, de sortir du conflit entre experts et candides. Vous avez réconcilié les agriculteurs avec l'environnement. Vous avez su, d'un monde divisé, tirer un projet positif. Ce sera la marque de ce premier texte, fondateur, que de nous avoir sortis d'une situation de conflit pour rassembler les volontés et les énergies. Les scientifiques, pour lesquels la rigueur est de mise, comprennent à présent les élus, tenus à la même rigueur. Vous nous avez sortis du scepticisme et portés à adhérer au développement durable, réponse forte aux angoisses de l'homme, qui a besoin, c'est le neuro-psychiatre qui conclura, de se réconcilier avec lui-même et de cesser de vivre avec la pensée culpabilisante qu'il détruit l'avenir de ses enfants. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Jean Bizet.  - Merci docteur.

Mme la présidente.  - Je salue votre présence, madame la ministre, pour ce premier débat parmi nous, et me réjouis que le remaniement n'ait pas été le prétexte à réduire la représentation des femmes au Gouvernement. (Applaudissements)

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie - Je suis heureuse que ma première intervention devant vous porte sur ce texte, qui me tient particulièrement à coeur.

Je me réjouis de la contribution éminente de votre commission et de son rapporteur, M. Sido, et de la participation de tous, dont témoignent le nombre des orateurs inscrits et des amendements déposés sur ce texte. Elles sont pour moi le signe d'une adhésion à la démarche que nous engageons.

Notre discussion générale, riche, est la marque, monsieur Muller, d'un processus non point chaotique, mais où chacun a pu prendre la mesure des enjeux et faire des propositions. Le Grenelle a pu compter sur l'aide précieuse d'un grand nombre de scientifiques, dont Jean Jouzet, prix Nobel 2007, membre du Giec (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat) et président du groupe de travail n°1 sur le climat. Sur la proposition de loi relative à l'empreinte écologique, le Conseil économique, social et environnemental a été chargé de rendre un rapport.

Sur la fiscalité, je souscris aux conditions posées par la commission des affaires économiques. Conformément au souhait exprimé par le Président de la République en octobre 2007, nous raisonnons à taux de prélèvement constant et le Grenelle ne se traduira pas par une hausse de la fiscalité pesant sur le pouvoir d'achat des particuliers et la compétitivité des entreprises. Les 2,7 milliards de prélèvements supplémentaires issus du Grenelle seront intégralement reversés sous forme d'allégements ou d'exonérations. Nous nous inscrivons, comme le demande le sénateur Baylet, dans une logique d'incitation et d'orientation et non de rendement fiscal.

Le Gouvernement, monsieur Pointereau, est particulièrement sensible aux questions que pose, pour le transport routier de marchandises, la mise en oeuvre de l'éco-redevance. C'est pourquoi, nous avons pris des dispositions pour en reporter une partie sur les chargeurs et les donneurs d'ordre. Nous avons également prévu des mesures d'accompagnement qui font actuellement l'objet d'études et confié une mission à M. Liebermann. Nous travaillerons dans la plus grande concertation avec les professionnels que M. Bussereau a encore rencontrés cette après-midi.

M. Blanc a eu raison de rappeler que nous n'instituons pas un moratoire sur la route, mais une nouvelle méthode de concertation, avec l'inversion de la charge de la preuve.

Je remercie M. Sido d'avoir rappelé que le Grenelle est un formidable accélérateur de l'investissement local. Nous avons prévu des dispositifs financiers afin d'aider les collectivités à engager leurs grands projets d'infrastructures. Je rappelle à MM. Teston et Ries que l'État s'est engagé à financer les projets de TCSP dans une fourchette comprise entre 15 % et 25 %. Au total, ce sont près de 2,5 milliards de subventions de l'État qui seront mobilisées, dans un premier temps. C'est là, M. Nègre a eu raison de le souligner, un effort sans précédent. Je lui confirme qu'après le premier appel à projets, lancé en mars, un deuxième suivra, avant la fin de 2010.

En ce qui concerne les lignes à grande vitesse, nous avons appliqué un principe de répartition des contributions publiques sur la base d'une stricte parité entre l'État et les collectivités locales. M. Biwer a rappelé, pour s'en réjouir, que nous allons consacrer près de 400 millions d'euros supplémentaires par an à la régénération ferroviaire. C'est du jamais vu depuis 20 ans.

Pour le financement de l'Affitf, 876 millions en autorisations d'engagement sont inscrits sur la période 2009-2011. A quoi s'ajoutent les 8 milliards de prêts de la CDC pour le financement des infrastructures ferroviaires.

Monsieur Teston, 130 millions ont été inscrits à l'Ademe pour résorber les points noirs de bruit.

Comme l'a souligné très justement M. Bizet que je remercie pour son soutien tout au long du processus, le développement durable est avant tout une formidable source de croissance et de compétitivité et je ne crois pas, contrairement à M. Raoul ou à Mme Didier, qu'il y ait de contradiction fondamentale entre l'environnement et la croissance. Il nous faut une nouvelle conception de la croissance qui s'appuie sur la rareté des ressources.

Mme Hoarau a souligné que l'outre-mer devait être une vitrine du Grenelle, à l'image de la Réunion qui est déjà pionnière en matière de photovoltaïque et qui souhaite développer massivement son potentiel d'énergies renouvelables tout en préservant sa biodiversité exceptionnelle. Oui, messieurs Lise et Virapoullé, l'outre-mer a toutes les cartes en main -avec les énergies renouvelables, la géothermie, la biomasse, la biodiversité- pour devenir à terme une vitrine du Grenelle et de ses engagements.

Monsieur Repentin, nous ne négligeons pas l'aide au logement HLM par rapport au logement individuel et nous voulons une politique efficace. La rénovation des logements HLM s'effectue en lots ce qui permet de faire des économies d'échelles et ce, à un niveau énergique moyen, souvent de meilleure qualité que celui du parc privé. Le coût unitaire de rénovation d'un logement HLM est donc moins élevé que celui d'un logement classique.

L'étalement urbain et l'artificialisation des sols est un grave problème ; chaque année 60 000 hectares sont bétonnés. Le projet de loi prévoit une refonte des documents de planification et de nouveaux outils juridiques pour les collectivités locales.

Oui, madame Keller, le logement est le principal chantier pour les économies d'énergie. Monsieur Alduy, les normes que nous fixons avec les professionnels sont des outils de mobilisation et nous avons confié à une mission le soin d'organiser la formation et la mobilisation des professionnels du bâtiment.

MM. Baylet et Fortassin ont fait référence à la tragique tempête que nous venons de connaître : même si l'on ne peut scientifiquement affirmer qu'il en est la cause, le changement climatique est une réalité et notre pays sera de plus en plus vulnérable aux événements climatiques. Nous devrons adapter l'ensemble de nos activités et de nos services pour nous y préparer.

Je voudrais rassurer M. Richert : le Grenelle Environnement ne se limite pas au seul outil législatif mais comprend d'ores et déjà des actions règlementaires portant notamment sur la réduction des particules fines : je pense par exemple au plan particules en cours d'élaboration visant les transports et les chaudières. La qualité de l'air est un souci que nous partageons.

Oui, monsieur Soulage, il faut concilier une production agricole soutenue et diversifiée pour garantir la sécurité alimentaire et une gestion économe des ressources en eau et en sols ainsi qu'en intrants et en énergie. Les deux impératifs ne sont pas exclusifs l'un de l'autre. Nous devons, monsieur Fortassin nous diriger vers une agriculture qui renouvelle les ressources dont elle dépend et ne les épuise pas. L'agriculture biologique est aussi capable de fournir des rendements très importants comme le montrent de nombreuses exploitations sur l'ensemble du globe. En outre, la demande de produits bio est en train d'exploser ce qui constitue une formidable opportunité pour nos exploitants et pour nos territoires car il serait dommage de continuer à importer ces produits. Le projet de loi prévoit un programme d'accompagnement des agriculteurs qui s'engageraient dans cette voie.

Merci, monsieur Raoult d'avoir souligné l'importance d'une trame verte et bleue tant pour l'environnement que pour la richesse économique qu'elle peut produire. Merci pour votre implication à la tête du comité chargé de définir les conditions d'insertion de cette trame dans le droit de l'urbanisme.

Sur les OGM, le rapport Le Maho est publié et l'Agence européenne d'évaluation sanitaire, comme le dernier Conseil européen des ministres de l'environnement, souligne la nécessité d'une expertise enfin indiscutable.

On redécouvre le bois. Oui, monsieur Gaillard, la mobilisation en faveur de la forêt est cruciale.

Monsieur Vestri, vous avez très justement dit que la mer était un monde qu'il fallait « apprendre à connaître pour mieux le protéger ». Le projet de loi insiste sur les liens entre les activités terrestres et le milieu maritime ainsi que sur la nécessité de construire une gestion intégrée de cet espace. Il prévoit la création de dix aires marines protégées et, sur la question plus particulière de la navigation de plaisance, nous avons confié une mission spécifique à la navigatrice Catherine Chabaud. L'Union pour la Méditerranée a fait de la mer un de ses principaux dossiers.

Sur les déchets, monsieur Vasselle, je vous rassure : il s'agit des déchets ménagers et l'objectif est de les diminuer de cinq kilos par habitant et par an. Un Fonds consacrera plus de 300 millions à aider les collectivités dans leurs programmes de tri ou de valorisation des déchets.

Le projet de loi propose une nouvelle forme de croissance. A l'horizon 2012, le potentiel économique de cette mutation de société représente 220 000 emplois et 33 milliards de chiffre d'affaires.

Oui, monsieur Nègre, la recherche est prioritaire. Nous engageons un milliard supplémentaire pour cela et avons créé un Fonds démonstrateur de 400 millions, pour travailler sur ces sujets, par exemple sur les véhicules du futur. Ce fonds étudie des scénarios et choisit parmi les différentes technologies les plus pertinentes et les plus aptes à placer la France au premier rang dans ces secteurs. Comme l'a dit M. Alduy, tout cela n'est pas une contrainte, mais une opportunité. (Applaudissements à droite et au centre)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

Article additionnel

Mme la présidente.  - Amendement n°630, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

La présente loi fixe des principes préalables à la mise en oeuvre de politiques publiques. En matière d'infrastructures de transport et de gestion de déchets, l'application des principes de précaution et de prévention doit conduire à écarter si besoin les aménagements nocifs pour la santé humaine et l'environnement.

Les grands projets publics et toutes les décisions publiques sont arbitrés en intégrant leur coût pour le climat, leur « coût en carbone » et leur coût pour la biodiversité. Ces projets et ces décisions doivent démontrer leur contribution à la décroissance de l'empreinte écologique de la France.

Elle introduit le principe du renversement de la charge de la preuve en cas d'impacts potentiels ou avérés sur l'environnement, obligeant le porteur de projet à en démontrer le faible impact environnemental ou l'absence de solutions alternatives.

M. Jacques Muller.  - Lors des conclusions du Grenelle de l'environnement, le 25 octobre 2007, le Président de la République disait : « Car c'est bien à une révolution que nous invite ce Grenelle de l'environnement (...). Une révolution dans nos façons de penser et dans nos façons de décider. Une révolution dans nos comportements, dans nos politiques, dans nos objectifs et dans nos critères ».

Nous appelons de longue date à cette révolution écologique des comportements et des pratiques, mais surtout des investissements publics, déterminants pour la vie quotidienne de nos concitoyens et notre impact global sur l'environnement.

A l'heure où les crises du climat, de l'énergie et de la biodiversité sont exacerbées, nous ne pouvons nous contenter de verdir à la marge les processus décisionnels, n'examinant que post factum les conséquences pour l'environnement et la santé des autoroutes en construction, des centrales nucléaires commandées ou des champs ensemencés en plantes génétiquement modifiées.

Par une révolution copernicienne, nous devons mettre l'environnement au coeur du développement humain et inverser la charge de la preuve.

Notre amendement retranscrit en exergue de cette loi le discours prononcé par le Président de la République. En outre, nous ajoutons un concept essentiel à cette révolution écologique exigeant la révolution de nos critères : la décroissance de l'empreinte écologique.

Ce critère révolutionnaire est un indicateur synthétique développé depuis une quinzaine d'années dans les milieux scientifiques pour prendre en compte l'émission de gaz à effet de serre, la consommation d'énergie fossile ou de matières premières non renouvelables, enfin l'atteinte à la biodiversité. Cet agrégat synthétique permet aux décideurs d'arbitrer en utilisant l'unité dénommée « impact global hectare ».

Notre mode de croissance conduit à un constat terrifiant : il faudrait trois Terres pour que chaque habitant du globe puisse consommer comme nous !

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Cette disposition est largement satisfaite puisque le renversement de la charge de la preuve figure déjà dans l'article premier. En outre, nous voyons apparaître des dispositions étonnamment détaillées, comme la mention des déchets, inadaptées à l'article premier d'une loi de programmation.

Enfin, le calcul de l'empreinte écologique fait l'objet de débats. Le Premier ministre en a saisi le Conseil économique et social. Attendons ses conclusions avant toute consécration législative.

La commission est donc défavorable.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - Je veux aller un peu plus au fond. La dimension scientifique de la notion d'empreinte écologique est assez simple à comprendre et j'y suis globalement favorable. Devant l'Assemblée nationale, je me suis engagé à en saisir le Conseil économique et social environnemental et le conseil du développement durable. La méthode n'est pas simple. En outre, elle appartient à un tiers. Nous avons donc payé pour accéder à la propriété intellectuelle.

Nous souhaitons affiner la méthode. C'est pourquoi je souhaite sincèrement que le retrait de l'amendement m'évite de lui être défavorable.

M. Jacques Muller.  - Ayant entendu les explications de M. le ministre d'État et son engagement d'approfondir la réflexion sur ce concept, je retire l'amendement.

L'amendement n°630 est retiré.

Article premier

La présente loi, avec la volonté et l'ambition de répondre au constat partagé et préoccupant d'une urgence écologique, fixe les objectifs et, à ce titre, définit le cadre d'action, organise la gouvernance à long terme et énonce les instruments de la politique mise en oeuvre pour lutter contre le changement climatique et s'y adapter, préserver la biodiversité ainsi que les services qui y sont associés, contribuer à un environnement respectueux de la santé, préserver et mettre en valeur les paysages. Elle assure un nouveau modèle de développement durable qui respecte l'environnement et se combine avec une diminution des consommations en énergie, en eau et autres ressources naturelles. Elle assure une croissance durable sans compromettre les besoins des générations futures.

Pour les décisions publiques susceptibles d'avoir une incidence significative sur l'environnement, les procédures de décision seront révisées pour privilégier les solutions respectueuses de l'environnement, en apportant la preuve qu'une décision alternative plus favorable à l'environnement est impossible à un coût raisonnable.

Les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. A cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur de l'environnement, le développement économique et le progrès social.

L'État élabore la stratégie nationale de développement durable et la stratégie nationale de la biodiversité en association avec les collectivités territoriales, les représentants des milieux économiques et des salariés, ainsi que les représentants de la société civile, notamment les associations et organisations non gouvernementales de protection de l'environnement, en veillant à sa cohérence avec la stratégie des instances européennes et avec les engagements internationaux de la France. L'État assure le suivi de la mise en oeuvre de cette stratégie au sein d'un comité pérennisant la conférence des parties prenantes du Grenelle de l'environnement.

Pour ce qui concerne les régions, les départements et collectivités d'Outre-mer, compte tenu de leurs caractéristiques environnementales et de la richesse de leur biodiversité, l'État fera reposer sa politique sur des choix stratégiques spécifiques qui seront déclinés dans le cadre de mesures propres à ces collectivités.

Ces choix comporteront notamment un cadre expérimental pour le développement durable, au titre d'une gouvernance locale adaptée, reposant sur les dispositions du troisième alinéa de l'article 73 de la Constitution.

Considérant que la région arctique joue un rôle central dans l'équilibre global du climat de la planète, la France soutiendra la création d'une commission scientifique internationale sur l'Arctique.

Le Gouvernement rend compte chaque année au Parlement de la mise en oeuvre de la stratégie nationale de développement durable, et propose les mesures propres à améliorer son efficacité.

M. Jean-Etienne Antoinette.  - Je suis heureux de contribuer au débat sur une loi à l'enjeu planétaire, mais dont le premier mérite est d'être une large coproduction, même si l'outre-mer a été repêchée à la dernière minute, comme l'a remarqué notre collègue M. Lise.

L'article premier mentionne les trois piliers du développement durable : la préservation de l'environnement, le développement économique et le progrès social. Concilier : tout est dans ce mot, véritable quadrature du cercle qu'il faut poser en préambule, mais aussi en filigrane dans tous les actes de la loi. Car le vrai défi aujourd'hui consiste à concilier les intérêts que l'évolution économique du monde a opposés pendant des siècles. A cette fin, cet article aborde la question essentielle : quelle Terre laisserons-nous à nos enfants et à nos petits-enfants ? C'est en effet pour eux que nous sortirons des ornières créées par l'égoïsme économique de quelques-uns, pour construire le bien de tous pour les générations futures.

Je constate en outre que l'outre-mer figure dès le premier article d'une loi de la République, en l'occurrence pour la richesse de sa biodiversité. Ce qui est rare est cher ; je partage avec mes collègues ultramarins ce rare plaisir de voir nos territoires mentionnés dès le début d'une loi générale, qui plus est pour souligner ce qu'ils apportent à la Nation. Je n'ai pas résisté à la tentation de proposer un amendement confortant cette reconnaissance en l'étendant à nos sociétés. J'estime également remarquable que soit rappelé ici le droit à l'expérimentation.

Toutefois -car il y a évidemment un « mais »-, deux questions restent sans réponse.

La première concerne le renversement de la charge de la preuve, qui imposera de démontrer « qu'une décision alternative plus favorable à l'environnement est impossible à un coût raisonnable ». Mais qu'est-ce qu'un coût raisonnable et comment va-t-on le calculer ? Combien de générations prendrons-nous en compte pour évaluer une décision ? Ne devrions-nous pas redéfinir la notion de coût en fonction des nouveaux enjeux planétaires ?

La deuxième question concerne le mal-développement chronique de ces terres riches en biodiversité. Pour certaines, les indicateurs sociaux sont dignes des pays sous-développés, voire des pays les moins avancés. Dans l'hexagone, on parle de développement durable en insistant sur « durable » ; outre-mer, le mot « développement » fait problème. Les considérations géostratégiques et l'évidence du développement inégal -même fondé sur des échanges inéquitables à l'échelle de l'histoire- expliquent la préservation de la forêt primaire. D'où ma question : quand donc l'outre-mer rejoindra-t-elle le développement durable des autres régions françaises en valorisant la préservation du milieu naturel ? Quels efforts acceptera-t-on pour que ces terres, ces atouts pour la France, ne soient plus marqués par des indicateurs aussi bas ? Ne faudrait-il concevoir une véritable politique pour l'outre-mer plutôt que la petite série de mesures figurant à l'avant-dernier article ?

Cela dit, je sais que la loi Grenelle II doit arriver. J'inscris mon propos dans cette perspective.

Pour l'heure, je salue un texte qui a le mérite d'exister. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Serge Larcher.  - Bien que l'outre-mer soit plus particulièrement visé par l'article 49 du projet de loi, j'interviens dès l'article premier pour saluer la prise en compte des caractéristiques environnementales et de la biodiversité dont jouit l'Outre-mer. Cette reconnaissance a constitué l'une des avancées de la discussion à l'Assemblée nationale.

Pourquoi ce rôle et cette place ? Tout simplement parce que l'outre-mer représente 80 % de la diversité française et 97 % de son espace maritime. Cet apport permet à la France de jouer un rôle majeur dans la protection de la diversité mondiale.

Dans ces conditions, favoriser l'outre-mer revient à combattre l'effondrement actuel de la biodiversité, considéré par les scientifiques comme une crise aussi grave que le changement climatique. Il faut agir vite et à grande échelle car nous sommes entrés dans la sixième grande phase d'extinction de la vie sur Terre, provoquée cette fois par l'homme lui-même.

L'empreinte écologique de l'humanité est supérieure à la capacité régénératrice de la planète. Les députés ne s'y sont pas trompés, qui ont adopté à l'unanimité cette déclaration d'intention, car cette loi incitative plus que normative est une bonne feuille de route, reprenant une partie des engagements du Grenelle, les aspects financiers étant renvoyés à la loi « Grenelle II ».

S'il est cocasse que le « Grenelle II » soit examiné en urgence par le Sénat avant l'adoption définitive du « Grenelle I », nous espérons qu'il constituera, ainsi que l'a déclaré M. Jégo, une chance pour l'outre-mer. Nous voulons, M. Lise l'a rappelé, que la France d'outre-mer soit un territoire d'excellence environnementale. Encore faut-il que les moyens soient au rendez-vous du « Grenelle II », nous y serons particulièrement attentifs. Pour l'heure, salons les propositions de M. le rapporteur Sido sur l'outre-mer, notamment celle d'une réglementation thermique adaptée tenant compte des risques sismiques. Les sénateurs ultramarins auront à coeur d'améliorer ce texte, quoique nous doutions de la sincérité des engagements de l'État. Les rapporteurs spéciaux de la commission des finances ne relevaient-ils pas que le Grenelle de l'environnement n'a pas trouvé de traduction budgétaire en 2007, ce qui s'est confirmé en 2008 ? De fait, d'après le plan triennal de financement du Grenelle, seuls 17 % des 7,3 milliards d'euros qui y consacrés prendront la forme de crédits budgétaires, le reste échappera à l'autorisation budgétaire et, partant, à la démarche de performance de la Lolf. Le manque d'engagements financiers précis, singulièrement sur l'outre-mer, laisse songeur... Monsieur le ministre, il vous appartient donc de nous convaincre en adoptant nos propositions ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Roland Courteau.  - Le succès du Grenelle de l'environnement a créé une forte attente. De fait, il y a plus que jamais urgence écologique. Selon le président du Giec en juillet dernier, « il ne nous reste que sept ans pour inverser la courbe des émissions de gaz CO2  », faute de quoi nous connaîtrions de gigantesques dérèglements climatiques dont les ouragans, cyclones et autres tempêtes nous donnent un avant-goût amer. Même si le mal est déjà fait pour les vingt prochaines années, ce n'est pas une raison pour baisser les bras, le Grenelle de l'environnement doit nous réunir.

Cela étant dit, plusieurs décisions prises l'an passé contreviennent à l'esprit du Grenelle qui est, entre autres, d'organiser un débat avant toute décision importante. Tout d'abord, tout ce qui touche au nucléaire serait, par principe non négociable. Ainsi, le Président de la République a-t-il annoncé, sans consultation aucune, la construction d'un deuxième réacteur EPR, voire d'un troisième, pour complaire à EDF et GDF-Suez... Autres décisions contraires au Grenelle : celle d'autoriser l'utilisation du pesticide Cruiser, interdit dans de nombreux pays européens en raison de ses effets nocifs sur les abeilles, ou encore les réformes de la carte judiciaire, de la carte hospitalière, la suppression de bureaux de poste et de 250 points de chargement de fret ferroviaire qui augmenteront l'utilisation du routier et, donc, les émissions de CO2. La proximité est une priorité tant pour l'aménagement du territoire que pour la protection de l'environnement. Enfin, l'importance du social pour réussir le pari écologique. Car, s'il est un bouclier à inventer, ce n'est certainement pas un bouclier fiscal aussi injuste qu'inefficace, mais un bouclier écologique pour les générations futures. Comment demander à un travailleur de se préoccuper d'écologie quand il est condamné à vivre au jour le jour ?

M. Daniel Raoul.  - Très bien !

M. Roland Courteau.  - Le développement durable est-il compatible avec l'ultralibéralisme ? Dans ce système, qui répond d'abord aux besoins du capital, le profit ne prime-t-il pas sur tout, y compris l'environnement ? Eh oui ! Les socialistes sont attachés aux trois dimensions du développement durable : la protection de l'environnement, le développement écologique et technologique et l'émancipation sociale des plus démunis. Nous espérons donc que le Sénat fera bon accueil à nos amendements à l'article premier pour que le développement durable puisse satisfaire les besoins des générations futures, en commençant par ceux des plus démunis ! (Applaudissements chaleureux à gauche)

M. François Patriat.  - Le développement durable est une chance inespérée de redonner du sens au progrès. S'il est un secteur où nous pouvons agir, c'est celui du bâti et de la rénovation thermique, responsable de 30 % de l'empreinte écologique et de 26 % des gaz à effet de serre. Ce chantier, qui concerne 31 millions de logements, est estimé à 600 milliards ; il permettrait de créer 15 000 emplois non « délocalisables » par an. En Bourgogne, le secteur du bâtiment représente plus de 100 millions de m2, produit plus de 20 % des émissions de gaz à effet de serre et fait vivre 10 000 entreprises et 33 000 salariés. Diviser la consommation énergétique actuelle de 240 kW/h par mètre carré par an par quatre, voire par sept, constitue donc une urgence écologique, un impératif social.

Pour être efficaces, privilégions l'échelle locale. Parce qu'elles représentent 75 % de la dépense publique, les collectivités doivent jouer un rôle majeur, surtout les régions qui ont compétence en matière de transports ferroviaires et d'intermodalité, de formation professionnelle, de développement économique, d'aménagement du territoire ou encore de recherche. Les régions sont des laboratoires du changement. En témoigne l'engagement précoce de la Bourgogne dans cette voie. Sans attendre la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement, la région a multiplié par cinq son budget consacré à l'environnement depuis 2004 et par dix les crédits attribués aux énergies renouvelables. En février 2007, elle a adopté l'un des premiers plans « énergie climat », centré sur la sobriété énergétique, la mutation vers de nouvelles sources d'énergie et la formation des concitoyens, pour lequel ont été dégagés des moyens sans précédent : 140 millions par la région sur sept ans auxquels s'ajoutent 20 millions de l'Ademe et 30 millions de l'Union européenne ! Nous regrettons que l'État ne nous ait pas accompagnés...

La Bourgogne s'est voulu pionnière en matière d'efficacité énergétique avec le développement des bâtiments à basse consommation d'énergie. Les trois appels à projets destinés aux particuliers, entreprises, collectivités et bailleurs sociaux, ont démontré qu'il est possible de réduire par quatre la consommation énergétique sans occasionner de surcoûts. Sans tenir compte des résultats du troisième appel lancé en décembre, lequel fait déjà l'objet d'une première vague de 50 projets, notre politique a déjà porté ses fruits. Avec 61 000 km2 neufs et réhabilités, la Bourgogne totalise à elle seule la moitié des bâtiments basse consommation de France. Pour accélérer cette dynamique, elle a organisé plusieurs sessions de formation sur la construction économe, compacte et saine destinées aux professionnels en s'appuyant sur les filières locales, comme celles du bois, du chanvre, de la laine de mouton et de la brique. Résultat : plus des deux tiers des maîtres-d'oeuvre et architectes ainsi que tous les bailleurs sociaux de la région ont été sensibilisés à la question. Enfin, nous avons instauré un prêt à taux zéro pour les particuliers, y compris ceux qui effectuent eux-mêmes les travaux, afin d'atténuer la précarité énergétique, notamment dans les logements les plus énergétivores. Ce prêt, qui a devancé l'Eco-PTZ du Grenelle, est accessible et attractif -il porte sur des sommes de 2 000 à 10 000 euros pour une durée de deux à sept ans- sans compter qu'il peut se cumuler avec le crédit d'impôt.

C'est par de telles initiatives décentralisées que nous remporterons la bataille du bâti économe. C'est par une fiscalité écologique reconnaissant la valeur des filières et matériaux locaux que nous établirons un cercle vertueux ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Richard Tuheiava.  - A l'orée de ce débat, permettez-moi de parler avec le coeur et d'exprimer la sensibilité des populations ultramarines. Quand on parle d'environnement, on parle d'homme ; on parle de création; on parle d'innocence et de beauté originelle ; on parle du jardin d'Eden, on parle de la Génèse... pas d'Apocalypse ! Les Polynésiens le sentent bien, leur terre est un joyau, ce qui ne va pas sans difficultés.

Oui, parler du Grenelle de l'environnement, c'est parler avec franchise et du fond du coeur. Aussi mon propos ne sera pas excessif mais il vous interpellera, car nous ne comprenons pas qu'on distingue conceptuellement et juridiquement l'environnement de l'identité. Comment élaborer une loi ou un règlement sur l'un en ignorant l'autre ? C'est pourquoi il convient de rappeler d'emblée avec clarté que parmi les spécificités de l'outre-mer figurent en premier lieu l'interaction, le lien fusionnel entre l'individu et son environnement naturel. Cette exigence est conforme aux valeurs traditionnelles propres à ces collectivités territoriales, et qui ont été actées par un acte international, le Pacific Appeal, annexé à la résolution adoptée en juillet 2007 par le Comité du patrimoine mondial de l'Unesco et relatif à l'exigence d'implication des communautés locales dans le processus d'inscription des sites du Pacifique au patrimoine de l'humanité. Le respect de cette spécificité ultramarine en fera une source d'enrichissement et d'épanouissement interculturel entre la France et ses communautés ultramarines mais l'ignorer serait source d'incompréhension. Dans cette optique, et afin de promouvoir une politique globale, il faut reconnaître ce fait majeur et l'intégrer parmi les paramètres essentiels parce qu'on ne le ressent pas de la même manière outre-mer.

Mme la présidente.  - Il faut conclure.

M. Richard Tuheiava.  - Je ne veux pas croire, nous ne voulons pas croire que l'on s'arrêtera à des déclarations : nous ne voulons pas d'une Apocalypse et c'est d'ailleurs ce que disait en substance le Président Barak Obama. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

La séance, suspendue à 23 h 50, reprend à 23 h 55.

Mme la présidente.  - Amendement n°517, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après la première phrase du premier alinéa de cet article, insérer deux phrases ainsi rédigées :

Elle intègre la préservation de l'environnement dans les décisions publiques. L'impact environnemental doit être évalué et pris en compte de façon systématique.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Le Grenelle se focalise sur la préservation de l'environnement même si on se félicite que certains chapitres évoquent avec pertinence la notion de développement durable. Il importe de faire figurer un principe qui intéresse tous les Français avant le deuxième alinéa qui en tire les conséquences.

Il faut éviter l'écueil de la poésie sans lendemain et celui de la liste de courses décentralisée, qui est une grande tentation pour qui attend une desserte ferroviaire. Nous apportons un peu de chair à la poésie avec cette précision qui constitue une clause de confiance.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Je comprends bien votre objectif mais le deuxième alinéa satisfait votre amendement puisque l'Assemblée nationale y a introduit le principe de renversement de la preuve. Je comprends que vous préfériez que cela figure tout en haut mais je vous suggère de retirer l'amendement ; à défaut, j'y serais défavorable.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Nous partageons les observations du rapporteur : le deuxième alinéa renverse la charge de la preuve. Retrait ?

L'amendement n°517 est retiré.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Je le retire, mais nous reviendrons à la charge.

L'amendement n°517 est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°631, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

I. - A la deuxième phrase du premier alinéa de cet article, remplacer les mots :

développement durable

par les mots :

développement soutenable

II. - En conséquence, procéder à la même substitution dans l'ensemble de ce projet de loi.

M. Jacques Muller.  - Le rapport Brundtland de 1987 et le sommet de Rio de 1992 ont défini le développement soutenable comme « un modèle de développement qui satisfait aux besoins de la génération présente, à commencer par ceux des plus démunis, sans compromettre la capacité des générations suivantes à satisfaire les leurs ». Cette soutenabilité s'oppose radicalement -au sens étymologique- à la notion de durabilité.

« Traduttore, traditore » : comme souvent, la traduction française trahit le concept d'origine de « sustainable development ». Notre modèle de civilisation est insoutenable au sens physique et biologique, car nous n'avons pas de planète de rechange, mais également au plan éthique. Le développement industriel productiviste, qui n'est ni durable, ni généralisable, est la négation de la solidarité avec les générations futures et entre les habitants du village planétaire.

Industries et financiers pratiquent aujourd'hui le « green washing », se contentant de spots publicitaires et de campagnes de communication mâtinés de développement durable sans rien changer à leur politique, exclusivement orientée vers le profit à court terme. Quant aux élus, ils font du développement durable une tarte à la crème. Dans un monde aux ressources limitées, c'est une aberration de parler de « croissance durable » du PIB. Par respect pour ceux qui aspirent simplement au développement, nous préférons parler de développement soutenable, écologiquement et éthiquement.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Les expressions anglaises sont en effet souvent mal traduites. Toutefois, l'article 6 de la Charte de l'environnement, adossé à la Constitution, fait référence au développement « durable ».

M. Thierry Repentin.  - De lapin.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Introduire une nouvelle notion serait source de confusion, d'autant que les Français se sont approprié l'expression, quelque fausse qu'elle soit. Comme la bataille contre l'usage incorrect de l'expression « bien achalandé », c'est une cause perdue. Mettons plutôt notre énergie à défendre les idées qu'à changer les termes. Avis défavorable.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Nous partageons votre objectif d'équité sociale, d'ailleurs inscrit au troisième alinéa, mais le rapporteur a raison : avis défavorable.

M. Daniel Raoul.  - Mme le secrétaire d'État a mal compris mes propos : je n'ai jamais opposé croissance et développement. J'ai dit, lors de la discussion générale, que « dans une période de crise, le besoin d'investir massivement dans une croissance durable est au contraire plus prégnant », qu'une crise du système économique appelait « une réponse de long terme et une réorientation profonde de l'investissement et de la consommation en faveur d'une économie verte ».

M. Courteau, éminent oenologue de l'Aude (sourires), a souligné l'importance des inégalités sociales. Or le volet social est absent du plan de relance dont nous venons de débattre ! Espérons que le futur plan reposera sur le tripode développement-environnement-social. Quant à « développement durable », c'est en effet une mauvaise traduction, mais qui a pris racine. Nous nous abstiendrons.

M. Jacques Muller.  - Nous n'allons pas réécrire la Constitution, mais je suis heureux que l'on reconnaisse qu'il s'agit d'une erreur de traduction.

M. Bernard Frimat.  - Erreur durable...

M. Jacques Muller.  - Elle ouvre toutefois la porte à des interprétations qui en dénaturent le sens.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Que M. Raoul veuille bien imputer mon erreur à l'émotion ! Il n'est pas question d'opposer environnement et économie. Le Grenelle, ce sont des investissements structurels pour préparer la sortie de crise afin de nous rendre moins vulnérables aux phénomènes cycliques.

M. Daniel Raoul.  - Dont acte.

L'amendement n°631 est retiré.

Mme la présidente. - Amendement n°632, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Dans la dernière phrase du premier alinéa de cet article, remplacer les mots :

croissance durable

par les mots :

décroissance de l'empreinte écologique sans compromettre les besoins essentiels des générations présentes et futures

M. Jacques Muller.  - Par solidarité avec les habitants du monde et les générations futures, je défends un développement humain, social, écologique, soutenable. C'est pourquoi je conteste la notion de croissance durable du PIB, qui n'est pas un indicateur réel du développement : elle agrège algébriquement les bienfaits et les dégâts du progrès dès lors qu'il se traduit par une valeur ajoutée. La multiplication des accidents, des tempêtes, des guerres même, peut doper le PIB en entraînant un surcroît d'activité mais n'apporte pas plus de bien-être ! Vu le caractère fini de la planète, on ne peut inscrire dans la loi une notion aussi incongrue que la croissance durable : c'est un oxymore scientifique !

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Le mode de calcul de la réduction de l'empreinte écologique fait l'objet de débats. Il est donc difficile d'inscrire ce concept dans la loi sans le préciser, et il est difficile de le préciser sans donner matière à controverse. Retrait, sinon rejet.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Le Comité général du développement durable doit rendre son rapport dans trois mois, et le Premier ministre a saisi le Conseil économique, social et environnemental sur ce sujet.

La notion de croissance durable fait l'objet des travaux menés par la commission présidée par Amartya Sen et Joseph Stieglitz. Le terme étant bien compris du grand public, nous préférons toutefois la rédaction actuelle. Avis défavorable.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Je serai solidaire de M. Muller : la notion de croissance repose encore sur l'idée que les ressources de la planète seraient infinies. On n'a pas encore intégré l'idée qu'il faut partager. C'est un peu comme vouloir que tous les pays aient une balance des exportations excédentaire ! Les ressources de la terre ne sont extensibles à l'infini.

Le rapporteur a raison quand il dit que le calcul de l'empreinte écologique fait l'objet de débats mais le projet de loi mentionne le « service rendu par la biodiversité » à propos duquel les calculs sont dans le même état embryonnaire.

M. Daniel Raoul.  - Je comprends les arguments de nos collègues Verts mais on peut avoir quelques divergences. Nous tenons au tripode développement-environnement-lien social ; nous ne voterons donc pas cet amendement.

M. Jacques Muller.  - On me dit que le concept d'empreinte écologique doit encore être travaillé, mais on le dit aussi du concept de croissance, que pourtant on laisse dans le texte !

L'amendement n°632 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°312, présenté par M. D. Raoul et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après les mots :

croissance durable

rédiger comme suit la fin de la dernière phrase du premier alinéa de cet article :

qui permet de satisfaire les besoins d'une génération, en commençant par ceux des plus démunis, sans compromettre la possibilité, pour les générations suivantes, de satisfaire les leurs.

M. Claude Jeannerot.  - Nous voulons prendre en compte le fait que les inégalités sociales ne cessent de croître depuis plusieurs années et risquent encore de se creuser avec la dégradation de la situation économique, la multiplication des plans sociaux et la montée du chômage. Sur fond de croissance atone, de nombreux foyers ont basculé dans la précarité, y compris dans la précarité énergétique.

On dénombre 7,9 millions de pauvres en France, c'est-à-dire de personnes qui vivent avec moins de 880 euros par mois. Le taux de pauvreté est de 13,2 %, en nette progression depuis 2004. Parmi les plus vulnérables figurent des nouveaux pauvres qui ne sont pas sans activité mais font partie de la nébuleuse d'un salariat dont le statut traditionnel est de plus en plus grignoté et déstabilisé.

Les foyers qui rencontrent des difficultés pour se chauffer l'hiver sont de plus en plus nombreux du fait du renchérissement de l'électricité et du gaz, dont le prix pour les particuliers a augmenté de 25 % depuis 2003. Parallèlement, les dividendes versés aux actionnaires, eux non plus, n'ont cessé de croître, comme l'a rappelé M. Todeschini.

Dès lors, si cette loi doit assurer une croissance durable, cela ne peut se faire sur fond d'accroissement des inégalités. Or, ces dernières années, le mode de croissance est producteur d'inégalités sociales de plus en plus importantes ; la politique que mène ce gouvernement n'y est pas indifférente : bouclier fiscal, incitation à « travailler plus pour gagner plus » sur fond de politique salariale atone et accroissement des dividendes des actionnaires au détriment des salaires et de l'entreprise.

Notre amendement fait référence au rapport Bruntland sur le développement durable et à la Conférence des Nations Unies de Rio en 1992. La formule que nous ajoutons signifie concrètement que les objectifs fixés dans la présente loi ne peuvent être obtenus sur fond d'accroissement de la pauvreté et de la précarité énergétique.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Les députés ont ajouté au troisième alinéa que devaient être conciliés « la protection et la mise en valeur de l'environnement, le développement économique et le progrès social ». Il n'est pas nécessaire de l'ajouter aussi au premier alinéa. Retrait ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Même avis.

M. Roland Courteau.  - Cela va sans dire, mais cela va mieux en le disant.

M. Claude Jeannerot.  - Nous tenons à ce que la lutte contre la pauvreté soit très présente dans ce texte. Dans le département que je préside, je vois que les plus pauvres sont aussi les plus exposés aux factures énergétiques les plus élevées. Cela dit, j'ai entendu vos explications et je retire mon amendement.

L'amendement n°312 est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°518, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter le premier alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :

Les grands projets publics seront appréciés en intégrant leur impact pour le climat et leur impact pour la biodiversité.

Mme Marie-Christine Blandin.  - L'engouement initial que le Gouvernement avait réussi à susciter s'est construit sur l'espoir que les conflits autour des grands projets allaient cesser. Cet engouement est retombé ; il faut maintenant consolider la confiance ; c'est l'objet de cet amendement.

Il n'y a pas de projet sans impact, et c'est le propre de l'action humaine que de modifier les équilibres : le développement humain, des siècles et des siècles durant, n'a cessé de modifier son environnement. Sa survie fut à ce prix. Cependant, nous ne pouvons plus faire comme si notre univers de vie était infini et infiniment renouvelable. Les effets du désordre climatique, désormais mesurables, n'en déplaisent aux obscurantistes qui le niaient et aux charlatans qui se firent le relais de ces mensonges, doivent être pris en compte afin que nos choix soient les plus judicieux possibles afin de ne pas aggraver l'effet de serre.

La biodiversité, dont l'érosion nous apparaît moins spontanément catastrophique qu'une tempête ou la montée du niveau des océans, pourrait bien nous réserver quelques mauvaises surprises si nous persistons à dépenser sans compter ce qui nous reste de capital botanique et zoologique.

Cet amendement vise donc à guider les déclinaisons réglementaires à venir, tout comme la production d'indicateurs, ou les points essentiels à mettre au débat dans le choix de grands projets.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Cet amendement est déjà largement satisfait par le deuxième alinéa de l'article, qui renverse la charge de la preuve. Retrait ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Même avis. Parler d'environnement, c'est aussi évoquer le climat, la biodiversité et aussi la santé.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Cette fois, je ne vous suivrai pas : nous n'allons pas jouer aux dominos en retirant l'un après l'autre nos amendements... Le deuxième alinéa ne fait pas mention des « grands projets ». Or, depuis trente ans, les élus locaux, les associations et les écologistes s'affrontent sans se comprendre. Il faut sortir de cette incompréhension. Un « grand projet », c'est un objet de désir et un objet de conflit. Il serait donc souhaitable d'ajouter à la loi une clause stipulant que l'obligation de prendre en compte l'impact environnemental des décisions publiques s'applique aussi aux « grands projets ». Cela permettrait au ministère de renouer la relation de confiance qui le liait aux associations et qui est en train de se défaire.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - Il est exact que l'impact sur la biodiversité des mesures prises est moins visible en France qu'en outre-mer ; mais l'article mentionne explicitement le respect de la biodiversité.

L'article s'applique d'ailleurs à toutes les décisions publiques, et pas seulement aux grands projets. Je n'ai pas d'objection de principe à votre amendement, madame Blandin, mais je souhaite que l'on prenne le temps d'y réfléchir à tête reposée : il y aura encore plusieurs lectures de ce texte.

L'amendement n°518 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°245, présenté par Mme Didier et les membres du groupe CRC-SPG.

Rédiger comme suit le deuxième alinéa de cet article :

Elle introduit le principe du renversement de la charge de la preuve en cas d'impacts potentiels ou avérés sur l'environnement, obligeant le porteur d'un projet à en démontrer le faible impact environnemental ou l'absence de solutions alternatives.

Mme Évelyne Didier.  - L'amendement introduit la notion de renversement de la charge de la preuve : lorsqu'un projet est contesté, il revient au porteur du projet d'apporter la preuve que l'impact environnemental de ce dernier est nul ou faible ou qu'il ne peut être évité. Il s'agit d'un principe fondamental, conforme au souhait formulé par le Président de la République le 25 octobre dernier.

Mais la rédaction actuelle du deuxième alinéa introduit la notion de « coût raisonnable », qui réduit la portée de ce principe. Nous proposons donc de le réécrire.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - A Mmes Blandin et Didier et à l'ensemble de mes collègues, je souhaite dire que la commission a retenu beaucoup d'amendements déposés par des sénateurs siégeant sur tous les bancs de cette assemblée ; il en a même retenu davantage que le Gouvernement. Nous avons voté contre l'amendement précédent : mieux valait ne pas introduire cette modification « à chaud », mais nous pourrons y revenir lors des prochaines lectures. Nous avons examiné tous les amendements sans exclusive, et sans vouloir dénaturer le texte voté par l'Assemblée nationale.

Quant à l'amendement n°245, il est très largement satisfait. Peut-être existe-t-il une infime différence entre votre rédaction et celle du projet de loi, mais une loi doit être interprétée et tout ne peut y être écrit. Retrait, sinon rejet.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - Même avis.

Mme Évelyne Didier.  - La notion de « coût raisonnable » mériterait tout de même une explication. Certains considéreront toujours que le coût des mesures respectueuses de l'environnement, comme des mesures sociales, est excessif. J'accepte de retirer l'amendement mais je souhaite que l'on précise ce point.

L'amendement n°245 est retiré.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - Je partage votre avis : nous en sommes réduits à gérer des contradictions et il nous faut trouver le meilleur équilibre. Quoi qu'il en soit, il faudra examiner si aucune autre solution plus respectueuse de l'environnement n'est possible. A nous d'interpréter la notion de « coût raisonnable » d'une manière qui empêche les abus.

Mme la présidente.  - Autrement dit, nous avons encore du travail et il faut se réjouir que le Gouvernement n'ait pas déclaré l'urgence sur ce texte, comme il le fait trop souvent. (Marques d'approbation à gauche et au banc des commissions)

Amendement n°696 rectifié, présenté par MM. Houel, Paul Blanc, Billard, Revet, Garrec et Fouché, Mme Sittler et MM. Bécot, Juilhard et Carle.

Compléter le troisième alinéa de cet article par les mots :

à la condition impérative de respecter le principe de neutralité fiscale et sous couvert d'études préalables d'impact du mécanisme envisagé

M. Charles Revet.  - Dans son discours d'octobre 2007 sur le Grenelle, le Président de la République a dit qu'il était « contre toute fiscalité supplémentaire qui pèserait sur les ménages et les entreprises. Il n'est pas question d'augmenter le taux de prélèvements obligatoires. Et le Gouvernement est contre tout prélèvement sur le pouvoir d'achat des ménages. Tout impôt nouveau doit être strictement compensé. ».

Le principe de neutralité fiscale est fondamental pour les PME qui considèrent que toute contrainte fiscale supplémentaire doit être compensée pour ne pas augmenter la pression fiscale déjà très élevée et préserver leur compétitivité. Une fiscalité écologique réellement incitative doit respecter le principe de neutralité fiscale, sous peine de transférer la charge de cette politique sur les acteurs économiques, notamment les PME. Il est donc essentiel d'inscrire ce principe dans la loi.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - La commission partage entièrement votre avis. Elle a même déposé son propre amendement qui va plus loin que le vôtre puisqu'il prévoit que le Gouvernement devra remettre au Parlement un rapport qui permettra de vérifier que la loi n'a donné lieu à aucune hausse de la fiscalité. Votre amendement est donc plus que satisfait, et j'en demande le retrait.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - Je ferai à ce sujet un commentaire général qui me dispensera d'y revenir tout à l'heure. Le Gouvernement est évidemment favorable à ce principe mais il ne doit pas être appliqué individuellement. Les parlementaires viennent d'adopter en CMP l'éco-prêt à taux zéro et la possibilité de cumuler ce prêt avec les bénéfices résultant de l'article 200 quater, considérant qu'une personne ne pouvait être exclue d'un avantage fiscal parce qu'elle a recours à un financement bancaire. Cette mesure aura un coût. Ce qui importe, c'est que l'ensemble du dispositif soit fiscalement neutre. Veillons donc à la précision de la rédaction.

M. Charles Revet, rapporteur.  - Si j'ai bien compris, M. le rapporteur promet que notre amendement sera satisfait tout à l'heure, lorsque celui de la commission sera adopté. Nous retirons donc l'amendement.

L'amendement n°696 rectifié est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°1, présenté par M. Sido, au nom de la commission.

Remplacer le quatrième alinéa de cet article par deux alinéas ainsi rédigés :

La stratégie nationale de développement durable et la stratégie nationale de la biodiversité sont élaborées par l'État en cohérence avec la stratégie européenne de développement durable et en concertation avec les représentants des élus nationaux et locaux, des employeurs, des salariés et de la société civile, notamment des associations et fondations visées au deuxième alinéa de l'article 43 de la présente loi.

L'État assure le suivi de leur mise en oeuvre au sein d'un comité pérennisant la conférence des parties prenantes du Grenelle de l'environnement et en rend compte chaque année devant le Parlement, auquel il propose les mesures propres à améliorer leur efficacité. Le Gouvernement transmet à celui-ci, au plus tard avant le 10 octobre, un rapport annuel sur la mise en oeuvre des engagements prévus par la présente loi, son incidence sur les finances et la fiscalité locales et son impact sur les prélèvements obligatoires au regard du principe de stabilité de la pression fiscale pesant sur les particuliers et les entreprises.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Cet amendement modifie l'article premier sur plusieurs points. Il mentionne explicitement la présence de représentants du Parlement au sein du comité de suivi du Grenelle de l'environnement, qui doit être pérennisé. Il précise que les associations appelées à siéger au sein de ce comité devront répondre à un certain nombre de critères de gouvernance, de représentativité et de transparence financière. Il oblige enfin le Gouvernement à remettre chaque année au Parlement un rapport sur la mise en oeuvre des engagements prévus par la loi, assorti d'une évaluation de leur impact sur les prélèvements obligatoires -tenant compte du principe de neutralité fiscale posé par le Président de la République- ainsi que sur les finances et la fiscalité locales.

Mme la présidente.  - Amendement n°519, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

I. - Dans la première phrase du quatrième alinéa de cet article, remplacer les mots :

à sa cohérence

par les mots :

à leur cohérence

II. - Dans la deuxième phrase du quatrième alinéa de cet article, remplacer les mots :

cette stratégie

par les mots :

ces stratégies

III. - En conséquence, dans le dernier alinéa de cet article, remplacer les mots :

la stratégie nationale

par les mots :

ces stratégies nationales

Mme Marie-Christine Blandin.  - Il s'agit d'un amendement rédactionnel, qui tire les conséquences du fait qu'il n'y a pas une mais deux stratégies nationales, relatives au développement durable et à la biodiversité. Les coquilles figurant dans l'article montrent bien que la biodiversité a longtemps été considérée comme un sujet secondaire : ses rédacteurs ont d'abord pensé au climat, ils y ont ensuite ajouté la biodiversité, mais la grammaire n'a pas suivi...

Mais je constate que l'amendement de la commission rectifie ces erreurs.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - La nécessité de quelques améliorations rédactionnelles, malgré toute l'attention du Gouvernement et des députés, n'a pas échappé à la commission, et c'est en effet pourquoi son amendement n°1 reprend la modification que vous proposez. Retrait.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Favorable à l'amendement n°1. Même avis que la commission sur le n°696 rectifié.

Mme Odette Herviaux.  - Je suis sensible à l'argumentation du ministre. Il serait bon de préciser que le principe de stabilité de la pression fiscale s'applique globalement. L'amendement de la commission mériterait une rectification en ce sens, faute de laquelle je serais gênée pour le vote.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - L'Assemblée nationale a voulu sacraliser le collège associatif existant. Or, je ne suis pas sûr que toutes ces associations répondent aux exigences de l'article 43. Je préfèrerai donc, monsieur le rapporteur, que cette référence n'apparaisse pas dans votre amendement, ou que nous y revenions, pour le moins, en deuxième lecture.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Nous aurons l'occasion, monsieur le ministre, d'y revenir à l'article 43 et en deuxième lecture. Quant à la pression fiscale, madame Herviaux, elle est par définition globale.

M. Jean-Etienne Antoinette.  - Les propos du rapporteur soulèvent une question : les alinéas relatifs à l'outre-mer sont-ils supprimés ?

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Nous y reviendrons avec l'amendement n°2.

Mme Odette Herviaux.  - Je persiste et souhaite déposer un sous-amendement à l'amendement de la commission, pour bien préciser que la stabilité de la pression fiscale s'apprécie globalement.

Mme la présidente.  - Ce sera donc le sous-amendement n°775 à l'amendement n° 1 de M. Sido, au nom de la commission, présenté par Mme Herviaux.

A la seconde phrase du dernier alinéa de l'amendement n°1, après le mot :

stabilité

insérer le mot :

globale

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Encore une fois, c'est évidemment de la pression fiscale globale que l'on parle. De même, lorsque l'on parle d'environnement, on parle globalement, et l'on agit localement. Je m'abstiendrai.

Le sous-amendement n°775 n'est pas adopté.

L'amendement n°1 est adopté, le groupe socialiste s'abstenant.

L'amendement n°519 devient sans objet.

Mme la présidente.  - Amendement n°340 rectifié, présenté par M. Antoinette et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans le cinquième alinéa de l'article 1er, après le mot :

caractéristiques

insérer le mot :

sociétales,

M. Jean-Etienne Antoinette.  - Le terme d'environnement est polysémique. De la notion de tour, ou de contour, on est passé, au XXe siècle, à celle de milieu naturel, qui a permis de le lier à la notion de développement durable, pour lui faire désigner finalement l'ensemble des éléments naturels et culturels qui constituent le milieu des êtres vivant.

Dans le premier alinéa d'une loi si fondamentale, rien ne doit être laissé au hasard sémantique. Les sociétés ultramarines ont une relation particulière avec leur environnement, relation qui en explique en grande partie les caractéristiques, et la richesse de la biodiversité de leurs territoires. Reconnaître l'apport des sociétés locales dans la préservation et la valorisation de leur environnement est le gage que la mise en oeuvre de notre politique nationale saura prendre en compte le nécessaire respect des populations, de leurs besoins, de leurs pratiques, de leurs dynamiques d'évolution, de leurs savoir-faire, de leurs valeurs... au coeur de la démarche de développement durable.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Ce que vous proposez est écrit en toutes lettres à l'article 49. La commission présentera en outre un amendement n°2 rectifié qui satisfait votre demande. Retrait ou rejet.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Même avis.

M. Jean-Etienne Antoinette.  - L'article 49, l'avant-dernier de ce texte, n'a pas la même charge symbolique que l'article premier.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - L'amendement n°2, dans sa version initiale, renvoyait les dispositions relatives à l'outre-mer à l'article 49. Mais les discours des élus ultramarins me sont allés droit au coeur et c'est pourquoi j'ai souhaité rectifier l'amendement n°2 pour maintenir, à l'article premier, la référence à l'outre-mer.

M. Jean-Etienne Antoinette.  - Je maintiens mon amendement, auquel vous ne répondez pas.

L'amendement n°340 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°395, présenté par M. Lise et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter le cinquième alinéa de cet article par les mots :

et qui renforceront le processus de coopération régionale dans le domaine environnemental

M. Claude Lise.  - L'outre-mer est victime d'une dégradation continue de son écosystème. On parle même, en Martinique, d'une disparition irréversible de certaines espèces. La politique de développement durable ne peut se concevoir qu'en cohérence avec les zones géographiques -Caraïbe, plateau des Guyanes, Océan indien, Océan pacifique- auxquels ces territoires appartiennent. Des stratégies communes et une mutualisation des solutions doivent être recherchées, gages d'un développement économique durable.

Cet amendement souligne la place de la coopération régionale en matière d'environnement. En décembre 2006, le Conseil général que je préside a organisé un colloque international sur le réchauffement climatique qui a abouti à la création d'un observatoire régional. En 2009, un plan de lutte pour atténuer les effets du réchauffement climatique va être mis au point : 25 gouvernements de la Caraïbe vont se réunir à Haïti pour en discuter. Nous sommes donc obligés de nous insérer dans les politiques régionales. Je m'étonne de ne pas voir trace de la coopération régionale dans ce texte, alors qu'il en était question dans le Grenelle. Cela ne coûte pas grand-chose de la mentionner dans le texte.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - L'amendement est satisfait par le biais des 13 millions consacrés, au titre d'Interreg, à la coopération régionale Antilles-Amazonie, qui inclut le domaine de l'environnement. Retrait ou rejet.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Le principe du choix stratégique mentionné à l'alinéa 5 intègre déjà cette coopération régionale. Retrait ou rejet.

L'amendement n°395 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°2 rectifié, présenté par M. Sido, au nom de la commission.

Supprimer les deux derniers alinéas de cet article.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Nous supprimons l'avant-dernier alinéa que nous déplaçons à l'article 2 et supprimons le dernier par coordination avec l'amendement n°1. Nous avons rectifié l'amendement pour maintenir l'alinéa précédent après le vibrant plaidoyer de nos collègues d'outre-mer dont le message a été reçu cinq sur cinq.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Avis favorable. L'outre-mer doit trouver toute sa place dans ce texte dès l'article premier.

L'amendement n°2 rectifié est adopté.

L'article premier, modifié, est adopté.

Prochaine séance, aujourd'hui, mercredi 28 janvier 2009 à 15 heures.

La séance est levée à 1 h 10.

Le Directeur du service du compte rendu analytique :

René-André Fabre

ORDRE DU JOUR

du mercredi 28 janvier 2009

Séance publique

A 15 HEURES

Suite du projet de loi (n° 42, 2008-2009), adopté par l'Assemblée nationale, de programme relatif à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement.

Rapport (n° 165, 2008-2009) de M. Bruno Sido, fait au nom de la commission des affaires économiques.

LE SOIR

Débat et votes sur les demandes du Gouvernement d'autorisation de prolongation de l'intervention des forces armées :

- en République de Côte-d'Ivoire,

- au Kosovo,

- au Liban,

- et en République du Tchad et en République centrafricaine (Opération Eufor d'une part, et opérations Boali et Épervier d'autre part),

en application de l'article 35 de la Constitution.

_____________________________

DÉPÔTS

La Présidence a reçu de :

- M. le Premier ministre, un projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution.

- Mmes Nicole Borvo Cohen-Seat, Josiane Mathon-Poinat et Éliane Assassi, M. François Autain, Mme Marie-France Beaufils, M. Michel Billout, Mme Annie David, M. Jean-Claude Danglot, Mmes Michelle Demessine et Évelyne Didier, MM. Guy Fischer et Thierry Foucaud, Mmes Brigitte Gonthier-Maurin et Gélita Hoarau, MM. Robert Hue, Gérard Le Cam et Jean-Luc Mélenchon, Mme Isabelle Pasquet, MM. Ivan Renar et Jack Ralite, Mmes Mireille Schurch et Odette Terrade, MM. Bernard Vera et Jean-François Voguet une proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête parlementaire chargée d'investiguer sur la hausse inquiétante du taux de suicide survenant en prison.

- M. Jean Desessard, Mmes Marie-Christine Blandin, Alima Boumediene-Thiery et Dominique Voynet et M. Jacques Muller une proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur les dysfonctionnements éventuels dans le système hospitalier ayant conduit aux décès inexpliqués de plusieurs patients à la fin de l'année 2008 et au début de l'année 2009.

- M. Yann Gaillard, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012.

- M. Yann Gaillard, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2009.