Agriculture

Mme la présidente.  - Le Sénat va examiner les crédits relatifs aux missions « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales » (et articles 59 A à 59 D et 59 à 59 quater), ainsi que le compte spécial « Développement agricole et rural ».

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M. Joël Bourdin, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Les intervenants qui vont se succéder ce soir sont nombreux. Aussi vais-je centrer mon intervention sur les principales questions que la commission des finances s'est posées.

Le ministre de l'agriculture a pour délicate mission de mettre en oeuvre une politique largement communautarisée au bénéfice d'un secteur économique stratégique, mais vulnérable aux aléas économiques, climatiques et sanitaires. Votre mission intègre désormais un programme consacré à la sécurité et à la qualité sanitaire de l'alimentation et votre ministère a entrepris une réorganisation ambitieuse qui passe par le resserrement de l'administration centrale, la fusion des DDE et des DDA et des offices, ainsi que du Cnasea et de l'Agence unique de paiement. J'ai cru comprendre que vos services étaient en ordre de bataille pour fonctionner dès le 1er janvier selon ce nouveau schéma -qui nécessitera dans les plus brefs délais une traduction législative. Quand ?

Je forme le voeu que cette réorganisation administrative accélère les délais de réponse du ministère au questionnaire budgétaire. Cette année, je n'ai reçu que 37,7 % des réponses dans les délais prescrits par la loi organique.

Nous nous doutons que les crédits de cette mission sont budgétés au plus juste, mais l'exécution des années antérieures a montré le caractère insuffisant de certaines dotations, en particulier lorsqu'il s'agit de faire face aux nombreux aléas qui frappent le monde agricole. Le plan d'urgence que vous venez d'annoncer témoigne à nouveau des difficultés du pilotage budgétaire que vous devez assumer. Ce plan a fait débat à la commission, qui souhaite vous entendre en détailler le financement.

Nous nous sommes également interrogés sur la programmation pluriannuelle de vos crédits, qui prévoit une baisse des crédits de paiement de votre principal programme d'intervention de 17 % en 2010. Cette baisse semble gagée sur des redéploiements attendus de la réforme de la PAC, dont nous sommes désireux de connaître la teneur et les montants.

Nous nous demandons si certaines poches de sous-budgétisation ne demeurent pas au sein de la mission « Agriculture ». Que penser des montants alloués à la gestion des crises et aléas climatiques, économiques et sanitaires ? Il n'y a pas de crédits pour le Fonds national de garantie des calamités agricoles, alors même que vous nous soumettez régulièrement des projets de décrets d'avances pour abonder ce fonds en gestion.

Que penser des 13,7 millions prévus au titre de la lutte contre la fièvre catarrhale ovine, dont Mme Bricq, en sa qualité de rapporteur spécial, a souvent relevé la sous-budgétisation chronique ? D'après vos services, ce montant devrait être suffisant dans la mesure où les frais de vaccination ne seront plus pris en charge par l'État, mais par les éleveurs et, éventuellement, par l'Union européenne.

La même question se pose à propos du montant prévu au titre des « indemnisations de mortalité », soit 1,5 million. Cette prévision est fondée sur une hypothèse basse de prophylaxie, dont nous nous demandons si elle est réaliste, à voir la reprise de l'épizootie de cet automne.

Je pourrais également évoquer l'absence de crédits dévolus au paiement des refus d'apurement communautaire, dont le collectif règle traditionnellement la facture. L'audition à laquelle la commission a procédé le 13 novembre a été pleine d'enseignements et je persiste à juger nécessaire la budgétisation, en loi de finances initiale, de ces pénalités financières, au moins pour le montant correspondant au taux d'erreur incompressible dans l'application de la réglementation européenne.

Les conseils successifs de modernisation des politiques publiques ont validé la plupart des dispositifs d'intervention nationaux de votre ministère. La revue générale des politiques publiques se traduit néanmoins par des baisses significatives ou des suppressions de crédits en matière d'hydraulique agricole, d'animation rurale ou de préretraites. Je salue la réforme du service public de l'équarrissage, que la commission des finances réclame depuis longtemps. Mme Bricq et moi-même y avons consacré deux rapports d'information. Le fait que la réforme ait été opérée par voie d'amendement gouvernemental à l'Assemblée nationale a conduit toutefois la commission des finances à l'examiner dans une certaine urgence. Nous aimerions avoir davantage d'éclaircissements.

Les orientations annoncées pour l'évolution des haras nationaux sont conformes aux recommandations que nous avons formulées : recentrage sur les missions de service public, évolution vers un office du cheval permettant de mieux structurer la filière, plan de réduction des effectifs de l'opérateur à hauteur de 147 équivalents temps plein travaillé sur 2009-2011, qui se traduira par la diminution progressive de la subvention pour charges de service public. Il ne reste qu'à matérialiser ces orientations dans le contrat d'objectifs 2009-2013, qui tarde à paraître.

L'Office national des forêts verra sa subvention diminuer à 167 millions en 2010 et à 161 millions en 2011, et devra verser un dividende à l'État en fonction des cours du bois. Il devra réaliser des gains de productivité et réduire ses effectifs selon la trajectoire définie par son contrat d'objectifs 2006-2011. La commission des finances y sera attentive. Elle a confié une enquête à la Cour des comptes, pour évaluer l'exécution par l'opérateur de son contrat d'objectifs, des décisions de la revue générale des politiques publiques et des orientations du Grenelle de l'environnement et des Assises de la forêt. Nous nous pencherons également sur la question du paiement par l'ONF de la taxe foncière sur les propriétés non bâties sur les forêts domaniales de l'État. L'office se considère comme non assujetti, dans la mesure où il n'est pas propriétaire de ces forêts. Cela représente une perte de recettes importante et non compensée pour les communes concernées ; l'avis du ministre de l'agriculture nous serait précieux.

Le ministère est orphelin d'un de ses opérateurs : l'Agence française d'information et de communication agricole et rurale (Aficar) a prononcé sa dissolution le 11 septembre dernier, ce dont je me félicite, compte tenu des insuffisances que j'ai constatées dans le fonctionnement de cette agence. Le projet annuel de performance 2009 proposait de redéployer les 1,4 million de crédits de l'Aficar au profit d'opérations de communication décidées à l'initiative de la profession agricole. Notre collègue Forissier, rapporteur spécial de la commission des finances de l'Assemblée nationale, a proposé d'affecter cette somme aux charges de bonification des prêts aux coopératives d'utilisation du matériel agricole, les Cuma, et au bénéfice des associations oeuvrant en faveur du monde rural. Nous vous proposerons de revenir sur une partie de cette affectation, car nous considérons que la suppression de l'Aficar doit se traduire par une économie nette.

Il conviendra, enfin, d'améliorer la justification des crédits du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural ». Les subventions ne doivent pas être distribuées en vertu d'une logique d'abonnement aux aides des chambres d'agriculture et des instituts techniques.

Sous réserve de ses amendements, la commission des finances recommande l'adoption de ces crédits ainsi que des articles rattachés.

M. Gérard César, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.  - Je salue l'énergie que vous mettez, monsieur le ministre, à défendre les intérêts des agriculteurs, à l'intérieur comme au plan international. Dans le contexte actuel, une augmentation même minime du budget est un signe encourageant pour les agriculteurs.

Vos crédits assurent le financement du « coeur de métier » du ministère : l'installation, la stratégie économique, les mesures agro-environnementales, ou encore la sécurité et la qualité sanitaire de l'alimentation. Mais les crédits destinés au dispositif d'Aide aux agriculteurs en difficulté (AGMDIFF) reculent de 20 % cette année, à 4 millions, après avoir diminué de moitié l'an dernier. Pourquoi ces réductions, alors que les besoins augmentent ?

Avec une enveloppe reconduite à 32 millions, le soutien au développement de l'assurance récolte est en deçà des attentes. M. Soulage ne manquera pas de le dire. L'an passé, vous nous avez demandé d'attendre les résultats du bilan de santé de la PAC ; maintenant qu'il est disponible, comment comptez-vous soutenir les dispositifs assurantiels ?

Le soutien à des associations de développement rural diminue de 7 millions : que proposez-vous pour pérenniser le travail de ces structures ? Enfin, la baisse de 2,7 % des crédits du programme « Forêt » nous paraît décalée avec le développement de la filière forêt bois souhaité par le Grenelle de l'environnement et par les Assises de la forêt.

Depuis plusieurs années, votre ministère s'est engagé dans une politique très importante de réorganisation de ses services et établissements publics. Ces réformes vont se traduire par des économies de près de 40 millions dès l'an prochain, ainsi que par des réductions d'effectifs de plusieurs centaines de postes. Nous nous félicitons de votre contribution à la RGPP, mais quel sera votre calendrier ?

La filière vitivinicole est en crise, chacun le sait : la récolte 2008 est la plus faible depuis 1991, même si le beaujolais est toujours excellent ! (Sourires) Monsieur le ministre, quelles sont vos priorités dans les négociations européennes pendant le mois où vous présidez encore le Conseil agricole ? La Commission fait pression pour que l'OCM viticole, dont nous avons tous ici souligné la spécificité en adoptant à l'unanimité une résolution, soit intégré à l'OCM unique de la PAC. Les demandes d'arrachage adressées à la Commission et qui doivent restructurer la filière ne sont prises en charge que pour un dossier sur deux.

Notre commission a donné un avis favorable à ce budget. Je vous présenterai cependant un amendement soutenant les coopératives d'utilisation de matériel agricole et le Centre national des expositions et concours agricoles (Ceneca), très utiles au monde agricole. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Daniel Soulage, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.  - Je suis très satisfait de voir le programme «  Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation » relever de la mission « Agriculture » : c'est plus clair. L'augmentation des crédits de ce programme, cependant, résulte surtout de transferts internes au ministère. Les crédits effectivement mis à disposition du directeur général de l'alimentation diminueront l'an prochain, mais cela ne me choque pas dès lors que la nouvelle répartition résulte de la bonne gestion.

Je crains cependant que l'on aille un peu trop loin jusqu'à mettre en cause les engagements de l'État auprès de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa). Il n'est pas normal que cette agence autofinance une partie de la croissance de ses dépenses de fonctionnement, mais aussi ses investissements pour l'an prochain. Monsieur le ministre, pourquoi l'État n'a-t-il pas renouvelé l'attribution des 4 millions nécessaires à la résorption du stock de demandes d'évaluation des produits phytosanitaires et de leurs adjuvants ? Je le regrette d'autant plus qu'il y a deux ans, j'ai accepté de retirer un amendement suite à l'engagement pris par votre prédécesseur de réduire rapidement le stock en attente.

Cette année, la fièvre catarrhale ovine s'est étendue : le nombre de foyers a triplé en un an, près de 97 000 bovins et 70 000 caprins et ovins ont été abattus. La campagne de vaccination, commencée tardivement pour des raisons techniques, n'a pas protégé l'ensemble des cheptels. Cependant, monsieur le ministre, nous vous remercions pour l'action que vous avez menée ces derniers mois. Une campagne de vaccination obligatoire va être conduite pendant la période de prophylaxie. J'espère que vos prévisions de 14 millions seront plus réalistes que l'an passé, où 2 millions avaient été prévus, pour une dépense qui a atteint 57 millions.

Nous nous inquiétons de l'accroissement des charges des éleveurs avec la fin de la réforme du service public de l'équarrissage : ne devrait-on pas reporter le calendrier pour tenir compte de la FCO ? Enfin, le président de notre commission estime que la sécurité commanderait d'achever pour le 31 mars la campagne de vaccination obligatoire, plutôt que pour le 30 avril : ce calendrier vous paraît-il réalisable ?

S'agissant du plan « Eco Phyto 2018 », nous sommes tous favorables au principe de la réduction de l'usage des produits phytosanitaires. Mais nous redoutons que le rythme imposé ne détruise les filières de production, qui ne disposent d'aucune molécule de substitution à celles qui seront interdites prochainement. Il faudrait un moratoire dans les filières « orphelines », en particulier les fruits et légumes. Durant cette période de transition, il faudra responsabiliser le monde agricole pour l'encourager à modifier ses pratiques. Nous devrons également orienter la recherche et l'innovation publiques dans ces secteurs, délaissés par les laboratoires privés faute d'être rémunérateurs. Monsieur le ministre, comptez-vous accéder à ces deux demandes, formulées unanimement par la commission des affaires économiques ?

Merci, d'ores et déjà, pour vos efforts ! (Applaudissements à droite et au centre)

M. Jean-Marc Pastor, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.  - La France est le plus mauvais utilisateur des financements européens réservés à l'équipement rural. Sur les 15,9 milliards de fonds publics, 10,2 proviennent de l'Union européenne et 5,2 milliards de l'État. La moitié des revenus de la ferme « France » proviennent d'aides directes de l'Union.

M. Charles Revet.  - C'est normal !

M. Jean-Marc Pastor, rapporteur pour avis.  - Sur les 862,4 milliards du budget européen, 43 %, soit 370 milliards, sont utilisés par la PAC, qui semble sauvée pour la période 2007-2013. Cependant, nous ne savons nullement ce qui en adviendra après 2013. Les pays européens du Nord, plus libéraux, qui sont majoritaires au sein de la Commission européenne, pourraient faire d'autres arbitrages, soutenir d'autres priorités. L'accord des 19 et 20 novembre a été obtenu de justesse.

M. Jacques Blanc.  - Notre ministre a été excellent !

M. Jean-Marc Pastor, rapporteur pour avis.  - Cet accord risque de supprimer les instruments d'encadrement du marché, mais les pays européens ont souhaité dans leur majorité maintenir le modèle de la PAC.

M. Adrien Gouteyron.  - Entraînés par la France !

M. Jean-Marc Pastor, rapporteur pour avis.  - Monsieur le ministre, vous avez tout fait pour défendre une régulation de marché équilibrée, et je vous en félicite. (Applaudissements à droite et sur le banc des commissions)

M. Adrien Gouteyron.  - Bravo !

M. Jean-Marc Pastor, rapporteur pour avis.  - Notre groupe de travail, présidé par M. Bizet, a adopté à l'unanimité une proposition de résolution dont cinq points se retrouvent dans les accords : instauration d'outils de couverture des risques ; accompagnement de la sortie des quotas laitiers ; préservation des outils de stabilisation du marché ; possibilité pour chaque État de réallouer les aides au sein du premier pilier ; renforcement du volet développement durable.

Quels seront les choix du Gouvernement ? Les États membres ont jusqu'au 1er août 2010 pour décider. A-t-il fallu lâcher en contrepartie sur une renationalisation de la PAC ? Comment comptez-vous accompagner la sortie des quotas laitiers, et réorienter les aides du premier pilier ? Quel usage sera fait de la modulation supplémentaire obligatoire ? Quel soutien l'Europe apportera-t-elle à la forêt et aux biocarburants, qui ne figurent pas dans le bilan de santé ?

Quelles seront les conséquences sur les choix budgétaires ? Les indications des prévisions pour 2009 sont floues. Va-t-on soutenir les pans de l'élevage qui sont en crise ? Quid du secteur assurantiel ? En matière d'équarrissage, l'article 59 bis transfère progressivement sur les éleveurs les missions et les charges de service public. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous préciser cette subtilité ?

L'Assemblée nationale a supprimé les mesures sur l'indépendance énergétique des exploitations, car la hausse prévue de 130 % de la redevance pour pollution diffuse aurait trop pesé sur les agriculteurs. Que va faire le Gouvernement ?

Enfin, que comptez-vous faire pour que la France utilise au mieux les financements du deuxième pilier, et que le monde rural s'y retrouve ?

Cette mission alterne le bon et le mauvais : je propose la sagesse. (Sourires à droite ; applaudissements à gauche)

M. François Fortassin, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.  - Le budget de l'agriculture et de la pêche a, cette année plus que jamais, une connotation environnementale, traduction budgétaire du Grenelle. Les mesures agro-environnementales -prime herbagère agro-environnementale (Phae), indemnité compensatrice de handicap naturel (ICHN) ou prime à la vache allaitante (PNSVA)- évoluent favorablement.

Ne pourrait-on soutenir plus activement encore l'élevage extensif, en accordant les aides en particulier aux ruminants pâturant de l'herbe ?

M. Charles Revet.  - Tout à fait !

M. François Fortassin, rapporteur pour avis.  - Notre pays possède quantité de pâturages, notamment en montagne, qui permettent de produire une viande de qualité.

M. Paul Raoult.  - Très juste.

M. François Fortassin, rapporteur pour avis.  - Dans ces zones fragiles, souvent de montagne...

M. Paul Raoult.  - Pas seulement !

M. François Fortassin, rapporteur pour avis.  - ... la disparition du pâturage se traduirait par la désertification et la friche ; l'image de nos campagnes et le tourisme en souffriraient. L'élevage extensif n'aurait que des avantages : on maintient les éleveurs, on assure une production de qualité, et on préserve l'environnement ! (M. Charles Revet approuve) Est-il envisageable de lui réallouer les aides du premier pilier en ce sens ?

L'enveloppe globale du plan de modernisation des bâtiments d'élevage est revalorisée. A défaut de signature architecturale, ces bâtiments sont souvent vastes : ne pourrait-on installer des systèmes photovoltaïques sur les toitures ? Il faudrait pour cela passer des conventions avec EDF et les syndicats d'électricité. (M. Jacques Blanc approuve) EDF serait preneuse. Cette initiative, source de revenus supplémentaires pour les éleveurs, serait dans le droit fil du Grenelle ; elle pourrait d'ailleurs être étendue aux bâtiments industriels. En tant que président du syndicat d'électricité de mon département, je prendrai contact avec les services du ministère.

M. Jacques Blanc.  - La Lozère aussi !

Mme Nathalie Goulet.  - Et l'Orne !

M. François Fortassin, rapporteur pour avis.  - Il est tout à fait possible d'atteindre l'objectif de 23 % d'énergies renouvelables.

La filière ovine est en crise structurelle, et les revenus des éleveurs ovins sont parmi les plus faibles. Un troupeau de 500 brebis disparaît chaque jour, pour être remplacé par de la friche... L'élevage ovin joue pourtant un rôle social et environnemental. Une fois l'épizootie de fièvre catarrhale ovine enrayée, il faudra prendre des mesures. Je remercie le ministre d'avoir reconduit l'enveloppe de 15 millions, et porté à 50 millions la part du plan de soutien transversal à l'agriculture consacré à l'élevage ovin.

Je conclus, car je vois que Mme la présidente manie la règle... (Sourires)

Seul domaine où je ne me plains pas de voir les crédits diminuer : les prédateurs. (On crie au loup sur divers bancs) Nous sommes très favorables à la présence des prédateurs, à condition qu'ils ne soient pas à proximité des troupeaux chez nous. (Sourires) Je ne vois aucun inconvénient à ce qu'on les lâche dans la forêt de Fontainebleau : ils s'y adapteront parfaitement ! (Sourires)

La commission a donné un avis favorable à l'adoption de ces crédits. A titre personnel, j'émettrai un avis de sagesse. (Sourires et applaudissements sur divers bancs)

Mme la présidente.  - En application des décisions de la Conférence des Présidents, aucune intervention ne doit dépasser dix minutes. Si je suis sévère, c'est dans un souci d'équité ! (Marques d'approbation à droite)

M. Yvon Collin.  - La crise financière gagne l'ensemble de l'économie. Plusieurs filières de l'agriculture, déjà fragilisées par des difficultés structurelles, risquent de souffrir de la récession. D'après le ministère, les revenus agricoles diminueront de 8 à 15 %. Une fois encore, les producteurs de fruits et légumes ainsi que les éleveurs seront les plus touchés, puisque leurs revenus, qui n'ont cessé de se dégrader, connaîtront une chute supérieure à 20 %.

C'est pourquoi l'État doit soutenir le monde agricole. Si l'on peut se féliciter du plan d'urgence de 250 millions, que dire de ce budget de rigueur qui n'épargne pas la mission « Agriculture » ! L'augmentation des crédits de 2,4 % ne tient compte ni du taux d'inflation, ni de la diminution de 6,7 % des crédits d'engagement. Dans ces conditions, nombre d'actions vont être contraintes. Même si l'essentiel des concours publics à l'agriculture provient des fonds communautaires, et même si l'OMC et la PAC orientent les interventions, l'État doit prendre des mesures de soutien ciblées et pertinentes. Dans le contexte économique actuel, il doit jouer le rôle d'un amortisseur social en soutenant les plus menacés.

Parmi les mesures positives, l'installation des jeunes agriculteurs demeure un poste prioritaire avec une augmentation des crédits de 13,3 %. Il est effectivement essentiel de limiter la réduction du nombre d'exploitations parce qu'il ne faut pas sous-estimer le défi alimentaire. En revanche, il est surprenant d'estimer que l'installation des jeunes est fondamentale tout en rabotant les crédits du programme « Enseignement technique agricole ». Heureusement, un amendement a été adopté cet après-midi lors de l'examen de la mission « Enseignement scolaire », ce qui a permis de réduire la baisse initiale de 2,5 %.

Les mesures en faveur de la modernisation des exploitations assurent la performance et la vitalité du secteur. Nous approuvons le soutien au plan de modernisation des bâtiments d'élevage, qui date de 2005. En revanche, le plan végétal pour l'environnement est peut-être suffisamment doté pour répondre aux besoins, mais la baisse des crédits s'accorde mal avec les objectifs poursuivis par le Grenelle de l'environnement en matière d'indépendance énergétique.

La diminution des crédits consacrés au programme relatif à la conduite et au pilotage des politiques de l'agriculture conduit à négliger des outils essentiels au développement des exploitations, notamment les coopératives d'utilisation de matériel agricole (Cuma) qui permettent la modernisation des installations et dont les crédits ne couvriront pas les attentes en prêts bonifiés, d'autant que le redéploiement de 700 000 euros voté par les députés au bénéfice des Cuma serait remis en cause par notre commission des finances, ce que je n'approuve pas.

S'agissant du soutien à la gestion des crises, je regrette la faiblesse des crédits consacrés à l'assurance récolte. Vous comptez beaucoup trop sur la manne communautaire, attendue en 2010, pour couvrir la montée en charge du dispositif issu de la loi d'orientation du 5 janvier 2006. Les rapporteurs pour avis ont rappelé que l'assurance récolte n'est pas financée à la hauteur des besoins. La dotation, fixée en 2008 à 32 millions, est reconduite l'année prochaine. A l'occasion de l'examen, par notre assemblée, de la proposition de loi tendant à généraliser l'assurance récolte obligatoire, que j'avais déposée en début d'année, nous avons discuté de l'intérêt d'une meilleure protection des exploitants contre les conséquences des aléas climatiques.

En ce qui concerne le programme « Sécurité et qualités sanitaires de l'alimentation », désormais rattaché à la mission « Agriculture », l'augmentation des crédits consacrés à la lutte contre la fièvre catarrhale ovine explique en grande partie la hausse de ses moyens. Compte tenu de l'ampleur de la crise sanitaire qui touche les élevages, la dotation de 13,7 millions sera probablement insuffisante.

L'Europe souhaite sécuriser les denrées alimentaires et il est normal de réduire les pesticides dans l'agriculture. En revanche, le durcissement brutal des règles menacerait un grand nombre de productions, en particulier l'arboriculture fruitière. Dans mon département, la filière pomme est très inquiète. Le retrait des produits phytosanitaires doit être progressif et doit s'accompagner d'un plan de soutien à la recherche de solutions alternatives.

La question des retraites agricoles ne relève plus de votre responsabilité, monsieur le ministre, mais vous y restez sans doute sensible. Le problème du financement du régime social agricole a été évoqué lors de l'examen de la loi de financement de la sécurité sociale. Une solution pérenne doit garantir l'équilibre du fonds afin de permettre une politique plus volontariste à l'égard des retraités agricoles. Je ne sous-estime pas les mesures récentes qui visent à revaloriser les petites retraites des non salariés agricoles et augmenter le taux des pensions de réversion. Mais elles ne sont pas suffisantes, car la revalorisation ne portera la retraite qu'à 633 euros, ce qui s'apparente à un revenu de survie. Bon nombre d'anciens agriculteurs, nous le savons, se trouvent dans une situation de grande précarité alors qu'ils ont contribué à hisser l'agriculture française au niveau des plus performantes. C'est pourquoi l'effort de solidarité nationale en faveur des retraités agricoles doit se poursuivre.

Même si la prépondérance économique de l'agriculture diffère d'un département à un autre, ce secteur mérite l'attention de tous les parlementaires. Avec encore près de 800 000 actifs, notre pays conserve une forte tradition rurale. Les agriculteurs ont affronté des crises de toute sorte dans un contexte de forte concurrence. A chaque fois, ils ont montré leur capacité à s'adapter. En retour, nous devons les aider à se maintenir. Le projet de loi de finances pour 2009 n'étant pas à la hauteur des enjeux, les radicaux de gauche ne pourront le voter. (Applaudissements à gauche)

Mme Odette Herviaux.  - Le 5 novembre, lors de l'examen de la mission « Agriculture et pêche » à l'Assemblée nationale, vous déclariez, monsieur le ministre, que « notre secteur productif est au fond le seul atout qui peut permettre à la France et à l'Europe de résister ». Je partage cette analyse, mais sur le terrain, on est loin de ces certitudes : les agriculteurs, les pêcheurs, les ostréiculteurs souffrent, car aucune production ne s'en sort correctement aujourd'hui et les perspective d'avenir sont bien sombres, face à la dérégulation totale des marchés voulue par l'Union européenne. Ils ressentent d'ailleurs certaines conséquences désastreuses des lois d'orientation agricole et de modernisation de l'économie contre lesquelles nous nous étions élevés.

Ainsi, le revenu moyen agricole en Bretagne, qui était de 13 440 euros en 2006, est descendu à 9 360 en 2007. Qu'en sera-t-il en 2008 alors que le prix du lait a encore baissé ? Devant l'urgence, une table ronde a été organisée en préfecture de région samedi matin : les producteurs, les industries agro-alimentaires et les représentants des consommateurs reconnaissent que les prix payés aux producteurs ne sont pas à l'origine de la hausse du coût des produits alimentaires. Ils veulent aussi que soit mis un terme à la recherche systématique du prix bas pour l'alimentaire au profit d'un juste prix rémunérateur Surtout, ils réclament une transparence totale pour savoir qui gagne quoi et comprendre les négociations commerciales. Il est vraiment temps, monsieur le ministre, de faire fonctionner votre Observatoire des prix et des marges et de mettre en application votre plan d'urgence.

Nous sommes tous d'accord sur l'importance de l'agriculture et de la pêche et sur la nécessité de développer d'ambitieuses politiques de régulation, seules à même de préserver des activités qui répondent aux besoins de nos concitoyens. Malheureusement, les moyens que vous déployez pour atteindre ces objectifs ne correspondent pas aux attentes des agriculteurs et des pêcheurs. Votre budget est certes en augmentation de 2,4 % en crédits de paiement mais les autorisations d'engagement chutent de 6,7 %. Dans les deux prochains budgets, les autorisations d'engagement risquent de se réduire de près de 20 % !

L'avenir de la pêche n'est pas davantage assuré. En dix ans, elle a perdu 1 300 navires et elle a dû faire face à de multiples crises, alors que notre pays compte le linéaire côtier le plus long de l'Union. Les politiques européennes posent de nombreux problèmes alors que les financements diminuent : réduction de 4 millions pour l'investissement et la modernisation, et de 8 millions pour les sorties de flotte, alors que votre plan pour la pêche en a fait des priorités.

Les attentes du secteur sont fortes et, pour certains, le capital confiance est largement entamé. Les réunions de suivi de votre plan ne sont plus, d'après le président de la coopérative Ar Mor Glaz, « que des rafales d'annonces négatives ».

La Commission européenne, après les avoir jugées illégales, demande le remboursement par les entreprises bénéficiaires des 87 millions d'aides versées entre 2004 et 2006 par le Fonds de prévention des aléas de la pêche. Comment comptez-vous régler cette question qui constitue, pour la Commission, un préalable à la délivrance du certificat d'euro-compatibilité pour le Plan pour une pêche durable et responsable (PPDR) que vous avez lancé il y a quelques mois ? Votre ministère a indiqué que serait engagé « un processus de recouvrement des aides illégales, avec pragmatisme, au cas par cas, en tenant compte de la situation individuelle de chaque entreprise ». Mais, comme vous l'ont dit les comités régionaux des pêches, qu'allez-vous faire alors que la quasi-totalité des entreprises de pêche est au bord de la faillite, certaines ayant même déjà disparu ? Le 30 octobre, vous avez annoncé que le PPDR, doté de 310 millions et initialement prévu sur trois ans allait être mis en oeuvre en deux ans. Soit. Financé par l'écotaxe, il offre des aides à la cessation d'activité, à la modernisation et à la recherche halieutique. Les deux dernières ont, bien sûr, ma préférence. Face aux interrogations sur son financement, il est important de répéter que l'intervention des collectivités n'a pour seul but que d'apporter une aide juridico-administrative, et non de combler une éventuelle carence de l'État. Je suis également réservé sur les plans de casse et de sortie de flotte car ils provoquent des effets pervers sur les prix de l'occasion et sur les coûts d'installation. Quitte à sortir des navires de la flotte, il serait plus opportun d'aider au désarmement des vieux navires énergivores et peu sûrs pour favoriser la construction de navires neufs, plus économes en énergie, et dont les patrons s'engageraient à pratiquer une pêche responsable. Dans cet objectif, les contrats bleus sont un outil intéressant, même si de nombreuses questions demeurent. Ces plans se mettent progressivement en place et les structures sont parfois régionales, comme en Bretagne, ou nationales. Dans le respect du principe de financement du PPDR, qui repose sur une taxe ad hoc, les contrats bleus relèvent donc de l'intervention financière de l'État.

Le calibrage des contrats au regard des possibilités financières du PPDR ne peut résulter que d'une concertation avec les représentants des pêcheurs, ce qui permettrait d'épargner le Fonds européen pour la pêche, dont l'enveloppe limitée devrait être réservée à des actions de fond. Il semble en outre que certaines clauses des contrats bleus ne soient pas eurocompatibles. La coopérative que j'ai évoquée, qui a mis en place les contrats bleus pour les pêcheurs bretons et représente 75 % de la pêche chalutière bretonne, a décidé avec son homologue du Fonds pour le développement durable de la pêche de suspendre temporairement ses paiements, ce qui va poser de graves problèmes aux entreprises du secteur. Les crédits alloués à ces contrats, soit 30 millions d'euros, mériteraient d'être augmentés, car il semble difficile de servir tous les demandeurs. On peut enfin s'interroger, compte tenu de l'augmentation du nombre de contrats, sur leur rythme de financement prévisionnel pris en charge à 20 % par le Fonds européen pour la pêche (FEP), dont la mise en place a été retardée. L'Association des régions de France vous demande de préparer, au travers d'un bilan, la révision à mi-parcours du FEP fin 2009. Ce bilan serait à mettre en relation avec la mise en oeuvre du plan d'adaptation de 310 millions. L'état d'avancement budgétaire du programme opérationnel FEP au 3 octobre dernier pose en effet plusieurs questions : quid des lignes financières engagées à plus de 100 % concernant l'ajustement des efforts de pêche et les arrêts temporaires d'activité, ou déjà consommées à près de 50 %, comme les actions collectives ? Quelles modalités de calcul seront retenues pour les futures mesures régionalisées ?

Je ne peux conclure sans évoquer la grave crise que traverse l'ostréiculture. Les 2 500 entreprises du secteur rencontraient déjà des problèmes ; l'été 2008 a vu une forte mortalité de juvéniles et de naissains et le stock français d'huîtres creuses, fin 2009, sera réduit de moitié. Des mesures ont été prises, mais je réitère les interrogations que je vous ai adressées dans une question écrite : quels sont les moyens réellement mobilisés ? Quels sont les projets du Gouvernement en matière de couverture des risques dans le secteur ?

Certains éléments de votre budget vont dans le bon sens mais son inadaptation programmée à la gravité des crises que traversent tous les secteurs relevant de votre ministère ne nous permettra pas de le voter. (Applaudissements à gauche)

M. Claude Biwer.  - Alors que le revenu des agriculteurs a augmenté entre 2005 et 2007, il devrait baisser de 8 % à 15 % cette année. Les éleveurs de bovins et d'ovins de mon département, la Meuse, devraient même enregistrer une baisse de 20 % à 30 % ; il est à craindre, après les difficiles négociations de ces derniers jours, que les producteurs de lait ne subissent le même sort.

Monsieur le ministre, je vous suis reconnaissant d'avoir pris à temps des mesures destinées à soutenir le pouvoir d'achat des agriculteurs et éleveurs pour un montant total de 204 millions d'euros, dont le quart est destiné à une filière ovine gravement touchée par la fièvre catarrhale ovine. J'espère que les départements comme le mien, où l'élevage est très développé, verront les dossiers de demande d'exonération de charges sociales examinés avec célérité et bienveillance ; nos éleveurs sont pris à la gorge.

Si les crédits du plan de modernisation des bâtiments d'élevage voit ses crédits légèrement augmenter, toutes les demandes ne pourront être satisfaites tant les besoins sont importants. Je souhaite un abondement supplémentaire. Le Grenelle de l'environnement prévoit que d'ici 2013, 30 % des exploitations seront à faible dépendance énergétique ; mais le budget ne comporte pas de crédits pour un début de mise en oeuvre du plan de performance énergétique des exploitations agricoles, dont le coût total est évalué à 731 millions d'euros.

A ma grande surprise, le Gouvernement a décidé l'arrêt progressif sur quatre ans de l'exonération partielle de taxe intérieure de consommation pour les agrocarburants, alors que cette filière commence à peine à se développer. Je souhaite qu'il soit possible de maintenir la défiscalisation en faveur des esters méthyliques d'huile animale ; une usine de fabrication de ces esters est en cours de construction dans mon département dont la viabilité risque d'être mise en cause.

Les crédits alloués à la lutte contre les maladies comme la fièvre catarrhale ovine baissent de 16 %, alors qu'il en faudrait davantage pour faire face à une probable accélération de la pandémie, notamment de ses sérotypes 1 et 6.

La libéralisation du marché de l'équarrissage va accroître les charges des éleveurs. Le problème de la responsabilité de l'État en matière de sécurité sanitaire est aussi posé. Il faut maintenir la participation financière de l'État au service public de l'équarrissage et conserver sa responsabilité. Quant au nouveau dispositif de gestion des risques sanitaires dans les domaines alimentaire, vétérinaire et phytosanitaire, il reste éclaté entre plusieurs services de l'État et son financement paraît peu assuré. Pourriez-vous apaiser mes craintes ?

Le budget consacré à la gestion des aléas climatiques est reconduit à hauteur de 32 millions d'euros. Comment, dans ces conditions, l'État tiendra-t-il son engagement de développer encore l'assurance-récolte ?

Je salue les mesures prises pour soutenir l'installation des jeunes agriculteurs, qu'il s'agisse de la dotation jeune agriculteur ou des prêts jeune agriculteur, mais je regrette l'abandon progressif des principaux dispositifs d'aides au départ. Je me félicite de la revalorisation des petites retraites agricoles et de la fixation d'un minimum de retraite en deux étapes. Mais les problèmes de financement du régime d'assurance-vieillesse des non salariés agricoles demeurent. L'autorisation d'emprunt donnée à la MSA ne saurait être une solution d'avenir.

Je vous remercie par avance des réponses que vous voudrez bien m'apporter. Je voterai naturellement votre budget. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Gérard Le Cam.  - Le budget 2009 intervient dans un contexte très particulier avec le bilan de santé de la PAC -et ses sombres perspectives- et la crise financière mondiale. La seule constante, c'est le nombre de secteurs agricoles en crise. Et je ne parle pas de l'échec des négociations de l'OMC, qui favorise les accords bilatéraux au détriment d'une vision globale et de l'équilibre alimentaire mondial -leur succès serait une catastrophe plus grande encore, qui livrerait le monde à la loi de la jungle d'un libéralisme débridé. Merci, on a déjà donné ! Quant à la révision générale des politiques publiques, appelée par certains rationalisation, elle n'a d'autre but que d'en finir avec les grands services publics, de livrer les secteurs rentables au capital et de mutualiser les pertes des secteurs les moins attractifs. Dans ce monde devenu fou, la crise alimentaire va accroître de 100 millions de personnes le nombre de celles, déjà un milliard, qui ont faim. Je vous fais grâce du Grenelle de l'environnement, pavé de bonnes intentions, dont on parle avec gourmandise sans jamais ouvrir le porte-monnaie.

Le tableau est certes dramatique ; mais à quoi d'autre pouvions-nous nous attendre après les décisions prises aux niveaux national, européen et de l'OMC ? Dans le rapport de notre commission, on peut lire que ce budget limite les dégâts, qu'il permet de financer le noyau dur des actions du ministère, qu'il est contraint ou encore que les crédits de paiement vont baisser de 13 % d'ici 2011. Rien de réjouissant, même si les 5 milliards de crédits de la mission ne représentent que 15 % des concours publics à l'agriculture, le reste venant du budget communautaire.

On peut dès lors se demander à quoi sert ce budget et comment il peut être utile au monde agricole dans sa diversité. Nous devrions nous doter d'outils législatifs garantissant la stabilité des revenus et des productions de qualité, permettant à tous les modes et tailles d'exploitations de structurer l'espace rural -car les familles sont plus heureuses là où elles sont que dans les banlieues où elles viendraient grossir la cohorte des miséreux.

Les lois récentes ont toutes conforté une conception entrepreneuriale de l'agriculture, la concentration des exploitations et une agriculture démunie face aux centrales d'achat et à la grande distribution.

Le dernier exemple est constitué par l'article 59 ter de ce texte : accentuant encore la concurrence libre et non faussée chère à l'Europe, il condamne des dizaines de milliers de producteurs laitiers, en Bretagne, en zone de montagne et dans tout l'hexagone.

Le regroupement des offices agricoles dans un même sac neutralise toute régulation du marché, bien qu'elle ait constitué leur finalité initiale.

Ce budget semble enfin agir dans le bon sens pour l'installation des jeunes, mais en restant modeste.

Je m'interroge sur l'extension des surfaces agricoles bio de 1,4 % aujourd'hui à 6 % en 2012 et 20 % en 2020, conformément au Grenelle de l'environnement. Comment convertir des milliers d'exploitations à la culture biologique peu consommatrice de terre et d'intrants polluants ? On va bien s'amuser dans les CDOA ! J'aimerais connaître votre sentiment sur ce point précis, qui n'engage que ceux qui veulent bien y croire.

J'ai lu avec la plus grande attention les huit axes du plan Écophyto 2018, qui tend à réduire de moitié l'usage des pesticides et à retirer les 53 molécules les plus dangereuses. Il n'y a rien à propos des produits de substitution, sans danger pour les humains et la biodiversité. Il est vrai que la recherche coûte cher... Pour le reste, les huit axes vont dans le bon sens, mais les marchands de poison s'activent déjà et les résistances de la profession sont considérables.

L'État se désengage des haras nationaux, dont il ferme des sites. En Bretagne, il reste Lamballe et Hennebont, qui réalisent un travail exemplaire pour la conservation des races et les animations équestres. Pour la Bretagne, ils sont ce que le cheval est l'homme : sa plus belle conquête.

Nous sommes alertés par les associations de développement et d'animation du milieu rural, car, à l'instar du sort subi par les mis à disposition dans le budget de l'éducation nationale, elles sont dépourvues de crédits et ne peuvent guère s'inscrire dans les opérations du compte d'affectation spéciale pour le développement (Casdar), inadaptées à leur mission. Les coupes dont elles sont victimes mettent à mort le lien social en milieu rural. Les soutiens doivent donc être intégralement rétablis.

Globalement, notre agriculture est avant tout menacée par le niveau des revenus, souvent en baisse et irréguliers au gré des crises de production, subissant les à-coups de la PAC et écrasés par les marges des centrales d'achat. La table ronde réunie samedi en urgence à Rennes atteste la priorité accordée par le monde agricole aux revenus et aux relations avec la grande distribution. Jusqu'à présent, aucun gouvernement n'a pu assurer des prix rémunérateurs pour les producteurs, des prix abordables pour les consommateurs et des marges raisonnables pour les voleurs de la grande distribution. Ce serait possible, à condition de ne pas poser en préalable la concurrence libre et non faussée, complétée par l'arsenal libéral qui pérennise le banditisme commercial.

Le bilan de santé de la PAC inquiète toute la profession, car ses aides constituent la moitié du revenu des agriculteurs, si bien que la fin des dispositifs de régulation peut légitimement démoraliser le monde agricole. Quelqu'un que vous connaissez bien, monsieur le ministre, et qui n'est certes pas un dangereux gauchiste, a déclaré que l'accord intervenu est une décision irresponsable mettant fin à la régulation des marchés, en regrettant que, malgré une crise alimentaire permanente, la commission et les ministres restent figés dans un schéma dogmatique libéral. « L'augmentation des quotas laitiers est une ineptie au moment où tous les producteurs européens subissent d'importantes baisses de prix ». Qui s'exprime ainsi ? M. Lemétayer, président de la FNSEA. En cette période de crise du système capitaliste ultralibéral, les commissaires européens n'auraient pas dû en ajouter une louche. C'est indécent !

« Les marchés sont devenus fous ? » Non : les hommes. Gandhi disait : « la terre peut satisfaire les besoins de tous, mais pas la cupidité de tous ».

Les glissements autorisés du premier pilier vers le second visent à satisfaire l'opinion publique sensible à l'environnement. Certes, le second pilier est indispensable, mais rien ne justifie la dérégulation, ni la disparition progressive des aides.

Les producteurs bretons de lait sont en colère. Pendant plusieurs jours, ils ont bloqué les plates-formes logistiques de la grande distribution, car la fin programmée des quotas pour 2014, leur augmentation de 1 % par an et la pression des laiteries sur le prix constituent un cocktail explosif qui exaspère la profession. D'après Onilait, la France ne comptera que 75 000 exploitations laitières en 2010, contre 133 000 en 1998.

Il est urgent de conforter les instruments de régulation, de stocker des matières premières avec une marge de six mois, comme en Chine aujourd'hui, et de décourager par tous les moyens le crime contre l'humanité constituée par la spéculation sur les denrées alimentaires. Dans ce cas précis, un clic d'ordinateur est bien plus dangereux que les armes conventionnelles. Il est urgent de rétablir la préférence communautaire.

La crise alimentaire mondiale n'aurait pas eu lieu sans les spéculateurs : en 2007, les prix ont doublé à cause d'un déficit de production des céréales limité à 3 % ! Les aléas climatiques et sanitaires sont inévitables, contrairement à l'aléa spéculatif.

Dans le monde, 30 millions d'agriculteurs ont des tracteurs, plusieurs centaines de millions utilisent la traction animale, le milliard qui emploie la houe est le plus exposé à la famine. D'après l'ONU, 82 milliards d'euros suffiraient à éliminer la faim sur la planète. C'est peu ou regard des 2 000 milliards d'euros destinés à renflouer les spéculateurs bancaires européens.

Ni le budget, ni la politique agricole française, ni les orientations européennes ne correspondent aux attentes du monde paysan ni aux défis mondiaux. Nous ne voterons donc pas ce budget, en espérant qu'une prise de conscience conduise les 27 pays d'Europe à une réorientation profonde en 2009. (Applaudissements à gauche)

M. Alain Chatillon.  - Il me semble essentiel que le ministère de l'agriculture soit aussi celui de l'alimentation et de la nutrition, à l'instar de ce qui existe dans de nombreux pays. A cet effet, il faudrait revoir les rôles respectifs de l'agriculture et de la santé.

Par ailleurs, nos fonctionnaires à Bruxelles devraient entretenir un contact régulier avec les fédérations et syndicats professionnels, car la réglementation est en retard sur les préoccupations essentielles des industries. Comme chef d'entreprise, je n'ai jamais pu obtenir d'entretien.

De même, nos ambassades devraient mieux accompagner nos entreprises notamment nos producteurs agroalimentaires : il en va de leur compétitivité. Les industries agroalimentaires soutiennent le développement de la production agricole tout en favorisant l'équilibre territorial grâce à leur implantation rurale.

Je vous soumets donc quelques propositions qui vont à l'essentiel.

Premièrement, l'accent à mettre sur la nutrition doit s'accompagner d'une relation nouvelle avec le corps médical, afin que la meilleure prévention par l'alimentation procure de sérieuses économies à la sécurité sociale. Dans tous les pays anglo-saxons, les médecins prescrivent des produits alimentaires sur leurs ordonnances, par exemple pour traiter l'excès de cholestérol ou les troubles du transit intestinal. Dans le domaine des nutraceutiques et des alicaments, les produits venant de l'étranger doivent faire l'objet d'une vigilance accrue. Il en va de même pour les produits chimiques contenus dans des produits extérieurs à l'Union européenne.

Deuxièmement, seule une valeur ajoutée accrue peut éviter la délocalisation de la production agroalimentaire. La clé réside dans les relations établies entre l'industrie et la recherche. Les pôles de compétitivité ont un rôle essentiel à jouer, complété par celui des pôles d'excellence rurale. Il serait bon d'aider les entreprises artisanales qui structurent les territoires faiblement peuplés. Les zones concernées devraient avoir un statut identique à celui de zones franches, avec un accent mis sur les services structurants.

Troisièmement, nos PME ont une taille inférieure à celle de nos concurrents, en particulier allemands. Pour y remédier, l'appui de sociétés régionales de capital-risque et de capital-développement est essentiel.

Le quatrième point concerne la simplification des dispositifs d'aide : l'intervention d'Oseo, une trame régionale cohérente de pépinières d'entreprises et l'intervention de fonds d'amorçage diminueront sensiblement la mortalité précoce des entreprises. Il est urgent d'installer un guichet unique d'aide au plan régional !

Cinquièmement, la politique de flux tendus a progressivement supprimé les stocks agricoles, pourtant indispensables à la régulation des prix. Leur insuffisance fut la véritable raison de l'inflation des prix à la consommation l'année dernière. L'Europe doit à nouveau financer des stocks, ce qu'elle ne fait plus depuis six ans.

Sixièmement, que deviendra la PAC après 2012 ? Elle représente aujourd'hui 40 % du budget communautaire. Quel soutien apporterons-nous aux filières ovines et bovines, sinistrées par la fièvre catarrhale et les prix du marché ?

Devrons-nous dans quelques années acheter notre bétail à l'étranger et notamment au Commonwealth ?

M. Jacques Blanc.  - Surtout pas !

M. Alain Chatillon.  - A ce sujet, je m'interroge : les compensations obtenues par la Grande-Bretagne au sujet de la PAC ne servent-elles pas à subventionner les cheptels australiens et néo-zélandais, et à casser les prix des produits de nos éleveurs ?

M. Jacques Blanc.  - C'est bien possible.

M. Alain Chatillon.  - Faudra-t-il se résoudre, pour entretenir nos zones d'élevage, à embaucher des « jardiniers de l'espace » ? Que deviendront nos éleveurs attachés à leur cheptel et qui méritent notre respect et notre appui ?

M. Charles Revet.  - Cela coûtera bien moins cher de les maintenir en activité !

M. Alain Chatillon.  - En effet.

Les contrats de filière doivent être privilégiés. Il est indispensable que des accords structurants soient conclus entre les producteurs, les industriels et les distributeurs, afin que ces derniers ne soient pas les seuls à dégager des marges suffisantes. Un système de contrôle et d'arbitrage doit être mis en place, et de véritables interprofessions par filières doivent être créées.

La France consomme chaque année 58 000 hectares de terres agricoles à cause de l'expansion des villes. Il faudrait légiférer pour assurer une meilleure maîtrise de l'espace rural : les plans locaux d'urbanisme (PLU) et les schémas de cohérence territoriale (Scot) n'y suffisent pas.

Monsieur le ministre, vous faites depuis votre arrivée un travail remarquable, par votre compétence et votre capacité à mobiliser vos équipes, avec des crédits limités.

M. Charles Revet.  - C'est vrai !

M. Alain Chatillon.  - L'agriculture est essentielle à l'économie de notre pays. On vient en aide à l'industrie automobile et à d'autres secteurs, mais il y a aussi en France des industries agroalimentaires de pointe, et nous devons nous battre pour elles. La crise devrait nous inciter à favoriser particulièrement nos agriculteurs, nos éleveurs et nos industries de transformation. Il y va de l'avenir de notre pays. Monsieur le ministre, nous comptons sur vous. (Applaudissements au centre, à droite et au banc des commissions)

M. Aymeri de Montesquiou.  - « L'agriculture n'est pas une nostalgie ; l'agriculture n'est pas seulement une tradition. L'agriculture, ce n'est pas le passé... »

M. Charles Revet.  - C'est l'avenir !

M. Aymeri de Montesquiou.  - « L'agriculture est au coeur des défis de la planète de ce siècle : le défi alimentaire, le défi environnemental et le défi énergétique. (...) Ma conviction c'est que ces défis, la France est l'un des pays les mieux placés au monde pour les relever. Ce qu'il nous faut, c'est une nouvelle ambition pour l'agriculture en France et en Europe. » Ainsi s'exprimait le Président de la République à Rennes en septembre 2007. Au-delà des clivages politiques, nous ne pouvons que partager ses vues. (Marques d'approbation à droite)

Cette nouvelle ambition pour l'agriculture est manifeste dans le budget que nous examinons, et qui bénéficie de l'impulsion du Grenelle de l'environnement et de la RGPP. Cet ambitieux instrument de réforme prévoit la restructuration de l'administration centrale avec la création de la direction générale des politiques agricole, agroalimentaire et des territoires et d'un service de prospective, la mise en place de nouveaux services déconcentrés avec la fusion des DDA et DDE, l'apparition d'un nouveau réseau régional copiloté par le préfet de région et le président du conseil régional, ou encore la fusion des offices agricoles au sein de France Agrimer. Vous voulez donner un nouveau souffle à notre politique agricole et rurale, en concentrant les efforts sur l'exportation de nos produits.

La qualité de ces derniers est mondialement reconnue, grâce aux signes de qualité qui distinguent 30 % de notre production. Notre agriculture est la première d'Europe et la deuxième du monde, et notre pays est le troisième exportateur mondial de produits agroalimentaires. L'agriculture est le premier poste excédentaire de notre commerce extérieur, avec 9 milliards d'excédents, ce qui est précieux vu l'état de notre balance commerciale.

Le programme 154 vise à promouvoir les produits de qualité et à soutenir la présence française dans le monde. Le ministère a mis en place un cadre stratégique définissant les priorités de l'État pour ce qui est des pays cibles, des filières et des actions à mener. Nous encourageons nos entreprises à participer aux manifestations et salons internationaux, mettons en oeuvre des mesures d'appui à l'exportation, et gérons le partenariat avec les organismes assurant la promotion des technologies et du savoir-faire français.

Mais nous pouvons faire beaucoup mieux, vu la notoriété de nos produits. Pourquoi ne sommes-nous pas plus performants ?

Ce budget de 3,5 milliards d'euros couvre quatre programmes. Le ministère de l'agriculture est un ministère d'intervention : 84,5 % des crédits du programme 154 sont des crédits d'intervention. Si je regrette la baisse des crédits alloués aux associations d'animation rurale, je me réjouis de la priorité accordée à l'installation de jeunes agriculteurs, avec une forte progression de l'enveloppe consacrée à la bonification des prêts et le maintien de la dotation aux jeunes agriculteurs, qui devraient permettre 7 000 installations en 2009.

L'effet de serre, l'écologie, le développement durable concernent tous les citoyens, y compris les agriculteurs qui utilisent moins d'engrais, de pesticides ou d'autres traitements parce qu'ils ont compris qu'ils doivent protéger la nature, mais aussi parce que le coût de ces intrants grève leur budget. Les agriculteurs participent au développement durable en produisant des biocarburants, dont les objectifs d'incorporation dans les carburants ont été atteints en 2006 et 2007, et sont fixés à 7 % en 2010. En diversifiant les sources d'énergie, les biocarburants permettent de renforcer la sécurité des approvisionnements énergétiques de la France ; ils contribuent à réduire significativement les émissions de gaz dans le secteur des transports ; ils participent à l'indépendance protéique de la France et de l'Union européenne ; enfin ils créent de l'emploi dans les zones rurales. Il est donc primordial que ces unités de traitement soient réparties sur l'ensemble du territoire, de préférence près des centres de production de biocarburants. Il faut créer un centre de ce type dans le Gers, département le plus rural de France, qui produit une grande partie du maïs du sud-ouest.

Le compromis auquel les députés sont parvenus sur la défiscalisation est une bonne chose : l'éthanol ne sera désormais pas plus taxé que l'essence. La disposition sur l'écopastille votée par l'Assemblée nationale rejoint le voeu formulé par le Président de la République, « que les véhicules flex fonctionnant à l'E 85 puissent être exonérés rapidement du malus qui les frappe et qui ne tient pas compte du bénéfice environnemental complet de tels véhicules ». Je souhaite que le Sénat adopte cette mesure.

Les producteurs laitiers ont abouti à un accord avec les industriels, dont les modalités sont très dures, mais auquel ils ont consenti pour sortir de la crise. L'esca est une maladie qui touche l'ensemble des vignes. Elle s'est déclarée il y a une dizaine d'années et détruit aujourd'hui le vignoble gersois qui, si rien n'est fait, disparaîtra dans dix ans. Mais les chercheurs n'ont pas encore trouvé de solution. Raymond Vall et moi-même vous demandons, monsieur le ministre, d'engager en collaboration avec le ministère de la recherche un important effort de recherche sur l'esca : la survie de nos exploitations viticoles est en jeu.

Alphonse Karr, jeune directeur du Figaro au XIXe siècle, très en pointe sur l'évolution des débouchés agricoles, écrivait : « Il faut rendre à l'agriculture sa place et son rang. ». Les réformes engagées par le Gouvernement vont dans ce sens. C'est pourquoi, avec beaucoup d'autres, je voterai ce budget. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Charles Revet.  - Très bien !

M. Paul Raoult.  - Le budget de l'agriculture est stable, avec 3 milliards de crédits environ ; mais l'effort public reste faible. Entre 2009 et 2011, les crédits de paiement de cette mission diminueront de 10 %, et les autorisations d'engagement de 12 %. On justifie souvent ces coupes budgétaires par la baisse de la population agricole ; mais l'argument n'est pas valable : les revenus tirés de l'agriculture continuent à progresser. Nous avons besoin d'une politique agricole active, car les débouchés industriels de l'agriculture sont immenses.

Le ministère fait l'objet de restructurations qui créent un sentiment d'incertitude quant à l'avenir de la gestion du monde agricole et rural. Le découplage des aides confirme nos inquiétudes : c'est la mort programmée de l'aide publique au monde agricole et rural.

Que penser du démantèlement de la PAC, alors que les États-Unis ont encore augmenté leurs subventions agricoles dans le cadre du Farm Bill, en les portant de 55 à 77,5 milliards d'euros ? Que ne doit-on pas craindre de la relance du cycle de Doha, où l'OMC voudra nous arracher de nouveaux engagements qui lèseront le monde agricole ? Il vous faudra beaucoup de détermination, monsieur le ministre, pour résister à toutes les pressions.

L'économie agricole se porte mal, après une période d'euphorie. Le secteur de l'élevage connaît des crises sanitaires répétées.

Après la crise catarrhale de 2006, vous avez engagé une campagne de vaccination de grande ampleur sur les sérotypes 1 et 8, mais les pertes d'exploitation restent énormes pour les éleveurs concernés En ces circonstances extraordinaires et violentes, ils ont besoin d'être soutenus par la solidarité nationale et européenne ; malgré votre bonne volonté, le compte n'y est pas tout à fait.

Le dernier accord prévoit une augmentation des droits à produire qui prélude à leur disparition effective. La dérégulation du marché laitier est en marche, avec son cortège de concentrations. La création d'usines à lait, c'est la mort programmée des petits et moyens élevages de montagne et des zones intermédiaires comme l'Avesnois. Les conséquences seront catastrophiques en termes de désertification. Lorsque l'on manquera de lait, on regrettera amèrement la suppression des quotas et l'on verra qu'il faut du temps pour former un éleveur.

Autre sujet d'angoisse, saura-t-on lier intelligemment agriculture et environnement ? Les agriculteurs voient les problèmes mais a-t-on les solutions ? Le plan agriculture biologique horizon 2012 prévoit de tripler les surfaces bio en trois ans, ce qui pourrait concerner d'abord les zones de protection des champs captants. Mais l'on doit former les jeunes et l'on manque de formation... et de vocations. Il faut encore que la filière soit rentable et le pari est loin d'être gagné. Il requiert de la ténacité et des crédits. J'ajoute que c'est toute l'agriculture qui doit devenir respectueuse de l'environnement.

Le plan de réduction des phytosanitaires constitue un enjeu majeur. Quand des plantes résistent à certains traitements, continuer avec les mêmes méthodes, c'est aller dans le mur. Il convient de réorienter la recherche, de développer d'autres façons culturales et de préférer la résistance des plantes à la productivité. Le choix est difficile car si la précipitation est à proscrire, il importera de maintenir le cap. Or le temps presse pour nourrir trois milliards de personnes supplémentaires sur la planète : on risque la pénurie, et même la famine dans certaines régions.

Avec l'aide de l'État ou de l'Europe, une régulation est nécessaire. A défaut, la volatilité des prix conduira à la ruine des agriculteurs dissuadés d'investir. Les prix erratiques du lait montrent bien qu'il faut préciser les règles de leur fixation afin de permettre leur stabilisation. Un rééquilibrage en faveur de l'herbe et les protéines végétales limitera notre dépendance au soja américain tandis que la gestion des stocks évitera la spéculation. En plein Grenelle, la Commission européenne veut supprimer l'aide de 33 euros la tonne pour la déshydratation de la luzerne : quand on connaît toutes les qualités de cette plante mellifère, qui fixe l'azote, protège les sols et nourrit les animaux, on mesure toute la volonté politique qu'il faut pour assurer un revenu décent aux agriculteurs. Vos propositions pour un bilan de la politique agricole commune ne vont pas dans le bon sens et le président de la FNSEA parle même de décision irresponsable. Nous avons besoin de régulation, l'Europe ne peut être une zone de libre-échange et la seule issue ne peut être de renationaliser la politique agricole. Nous ne voterons donc pas ce budget car, même si nous en reconnaissons le sérieux, il souffre de trop d'incertitudes pour apporter des réponses aux enjeux. (Applaudissements à gauche)

M. Daniel Soulage.  - Le 20 novembre, les ministres européens de l'agriculture sont parvenus à un compromis sur le bilan de la politique agricole commune. La négociation, ouverte depuis un an, s'était accélérée en juin et je me réjouis que la présidence française ait pu la conclure. Merci, monsieur le ministre, de ce travail de conciliation. Le résultat peut être décevant et il ne fait pas l'unanimité, même si la proposition initiale, que la France n'approuvait pas, a été sensiblement améliorée. Un pas supplémentaire est franchi vers la dérégulation, les outils de régulation voient leur portée réduite ou sont menacés et le découplage des aides est décidé. Cependant des avancées sont réalisées pour le développement rural et les nouveaux défis que sont le changement climatique, les énergies renouvelables, la biodiversité, la gestion de l'eau et l'innovation, qui bénéficieront de cofinancements communautaires de 75 %. Les ressources naturelles en eau feront-elles partie de ces nouveaux défis ?

Les producteurs de tabac pourront bénéficier de mesures transitoires en 2011-2013. Que peut-on espérer après 2013 ?

La renationalisation d'une part croissante du budget par le bais de l'article 68 permettra de recentrer les aides sur des secteurs déjà enkystés. La liste en est-elle fixée et la filière fruits et légumes restera-t-elle exclue malgré les crises à répétition qu'elle traverse ? Je suis inquiet pour la filière en général et pour le pruneau en particulier. Pouvez-vous me rassurer ?

Je n'ai pas oublié l'assurance-récolte pour laquelle je n'ai cessé de militer. Vous avez défendu avec vigueur des crédits et obtenu des fonds européens pour un fonds sanitaire. Nous vous en sommes reconnaissants : c'est important pour notre agriculture -M. Emorine ne me démentira pas. L'article 68 prévoit que les États membres qui le souhaitent peuvent prélever sur le premier pilier pour cofinancer les primes d'assurances et mettre en place des fonds de mutualisation. J'en suis tout à fait satisfait. J'ai bien vu, il y a quelques semaines, en rapportant la proposition de loi de MM. Collin et Baylet, qu'il était aujourd'hui impossible de rendre l'assurance-récolte obligatoire : nous avons grand besoin de crédits européens pour la développer plus rapidement et compenser l'évolution des taux. L'année 2010 marquera un nouveau départ, ce dont nous vous remercions.

Le fonds sanitaire a prouvé son utilité. Comment le mettrez-vous en place ? L'enveloppe de l'article 68 n'est pas inépuisable : suffira-t-elle et quels sont vos projets ?

Je veux encore souligner la nécessité d'un développement rapide des OGM. On ne peut être contre les pesticides et contre les OGM : il faut choisir. Nous avons adopté une loi qui garantit la coexistence mais, tandis qu'elle reste lettre morte, nous accumulons les retards. M. Barroso a rappelé que les décalages dans les autorisations de mise sur le marché menacent l'agriculture communautaire.

A l'heure du Grenelle de l'environnement et au moment où la société est de plus en plus exigeante en matière de qualité et de sécurité alimentaires, nous devons développer notre recherche agronomique, sans oublier la recherche appliquée et les organismes qui la mettent en oeuvre. C'est indispensable pour que notre agriculture s'adapte et maîtrise de mieux en mieux les intrants.

Je soutiens votre action et voterai votre budget. (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Évelyne Didier.  - Nous remarquons la baisse des crédits du programme « Forêt », malgré son importance écologique. Le personnel de l'Office national des forêts manifestait récemment son inquiétude et dénonçait les décisions arrêtées par le Comité de modernisation des politiques publiques concernant l'Office. Ces mesures, qui constituent la dernière étape avant démantèlement et privatisation, représentent une véritable rupture du contrat qui lie l'ONF, les 11 000 communes forestières et l'État

Cet établissement public est chargé par la loi de gérer le patrimoine forestier de l'État selon trois objectifs : récolte du bois, préservation de la biodiversité, accueil du public. L'Office assure également des missions d'intérêt général pour le compte de l'État : prévention des risques d'incendie et d'avalanche, lutte contre l'érosion sur le littoral, préservation des richesses biologiques : marais, dunes, tourbières, mangroves. Il intervient aussi pour effectuer des prestations comme l'aménagement d'espaces naturels ou de loisirs, la réhabilitation de sites, l'expertise d'arbres. Toutes ces missions répondent aux objectifs de développement durable prônés au Grenelle de l'environnement.

Dans un contexte de raréfaction des matières premières énergétiques, une très forte pression risque de s'exercer sur la biomasse forestière. II est donc plus que jamais essentiel de conforter le service public forestier, de mettre en place un contrôle indépendant de l'exploitation des forêts domaniales et un financement pérenne de la gestion forestière. Or la politique actuelle vise à favoriser les missions commerciales de l'établissement public : la seule action en augmentation est celle qui est consacrée au développement économique de la filière forêt-bois.

En 23 ans, 37 % des effectifs de l'ONF ont été supprimés. Les réorganisations ont fait disparaître de nombreux sites ; les missions de service public ont été délaissées au profit d'activités plus rentables. Le Gouvernement poursuit ce mouvement en augmentant les quantités de bois exploitées pour rééquilibrer son budget.

L'intégration de l'inventaire national forestier au sein de l'ONF pose plusieurs problèmes, à commencer par la garantie d'indépendance de cet établissement public national qui mesure l'état des forêts et apprécie leur exploitabilité.

Le désengagement financier de l'État est visible avec le versement compensateur censé couvrir les prestations aux communes : les autorisations d'engagement de cette action baissent de 10 % et les crédits de paiement de 3 %. Le versement compensateur s'élève à 144 millions. Alors que la gestion des forêts communales n'a cessé de s'intensifier et que des missions nouvelles ont été confiées à l'ONF, le volume du versement compensateur est en constante diminution depuis 1981. Pour assurer un régime forestier identique en quantité et en qualité à celui de 1981, il faudrait aujourd'hui 162,4 millions !

Le financement des conventions nationales au titre des missions d'intérêt général il est lui aussi en recul. Ce désengagement de l'État aura des conséquences directes sur la qualité du service rendu. On note d'ores et déjà une forte diminution du nombre de patrouilleurs de lutte contre les feux de forêts.

La compensation de l'augmentation de la cotisation au compte d'affectation spéciale pensions constitue un nouveau transfert de charges du budget de l'État vers celui de l'ONF, qui coûtera à celui-ci 25 millions en 2008 pour atteindre 60 millions en 2011.

Tout cela ne peut qu'entraîner une augmentation déraisonnable de la récolte de bois et des suppressions massives d'emplois. Quelle crédibilité alors faut-il accorder au Gouvernement lorsqu'il parle de développement durable ? Les décisions du Comité de modernisation des politiques publiques ne font qu'accentuer le mouvement vers l'abandon des missions de service public.

J'en viens maintenant au secteur de la pêche, lourdement touché par des crises successives, en raison des impératifs de gestion de la ressource halieutique mais également en raison des coûts d'exploitation très lourds, notamment de la facture énergétique. Les conditions de travail difficiles rendent peu attractifs les métiers du secteur. En premier lieu, la hausse du coût des carburants a fortement touché les pêcheurs. Nous saluons le plan pour une pêche durable et responsable élaboré par le Gouvernement. Si les pouvoirs publics français se sont heurtés à la Commission européenne, ils ont finalement décidé de consacrer au secteur de la pêche 300 millions sur deux ans, et non trois. Nous espérons que cet engagement sera tenu.

Le chapitre social du plan comprend la mise en place d'un salaire minimum pour les marins pêcheurs, en accord avec les salariés du secteur ; ce qui est une bonne chose. Mais beaucoup d'emplois dépendant indirectement du secteur sont touchés par la crise ; des bateaux de pêche sont encore détruits.

La réglementation qui concerne la gestion de la ressource halieutique ne peut pas être déterminée au niveau européen, elle doit être internationale et il faudrait aller plus loin que le plan proposé, pour répondre en profondeur à la crise du secteur. Le découragement touche tout le monde de la pêche.

L'armement Porcher d'Erquy menace de se séparer de la moitié de ses bateaux, voire de la totalité, découragé qu'il est par les contrôles tatillons, par les appréciations divergentes sur la ressource, par la hausse du prix des carburants, par les abandons technologiques qui conduisent les armateurs à s'approvisionner à l'étranger. Si demain, cela devait se produire, ce sont de 300 à 500 personnes qui seraient touchées. L'économie locale en souffrirait. Le conseil général des Côtes-d'Armor vient d'investir dans le port d'Erquy, dont l'activité doit perdurer et se développer. Nous savons que vous vous êtes investi sur ce dossier, monsieur le ministre, et nous aimerions savoir quelles perspectives vous voyez.

A force d'être un élève zélé de l'Europe, la France paie chèrement l'addition. Un rééquilibrage s'impose. Pourquoi ne pas sensibiliser les pêcheurs à la diversification des activités de pêche et de cultures marines : vente directe, valorisation des produits, tourisme bleu, table d'hôte ? Ils pourraient ainsi affronter la réduction des quotas. Il nous semble important de réfléchir à la mise en place d'actions incitatives dans le cadre des politiques publiques, en utilisant l'expérience des pêcheurs qui se sont déjà engagés sur la voie de la diversification.

Je terminerai en évoquant la conchyliculture. L'été 2008 a vu une forte mortalité d'huîtres juvéniles et de naissains. L'allègement des contributions, l'aide au réensemencement, le report des cotisations sociales et la mise en oeuvre du Fonds national de garantie des calamités agricoles ne concernent pas tous les ostréiculteurs. Alors que les huîtres d'Arcachon étaient mises hors de cause dans les deux décès survenus en septembre 2007 et que le sous-préfet déclarait avoir eu confirmation par le parquet général que l'enquête était close, le ministère émettait des réserves. Les 350 entreprises du bassin voient arriver les fêtes de fin d'année avec appréhension : la profession estime à 30 % la baisse des ventes au détail et entre 50 et 80 % la chute dans les grandes surfaces, sachant que la période représente de 30 à 40 % du chiffre d'affaires de l'année.

La profession se sent incomprise et craint de nouvelles interdictions. Que proposez-vous ? Inclure le bassin dans Natura 2000 ? Accélérer le traitement des eaux usées qui se déversent à l'entrée du bassin ? On voit comment se lient biodiversité, lutte contre la pollution, développement durable.

Estimant que la réponse budgétaire apportée aux objectifs affichés est insuffisante, nous voterons contre. (Applaudissements à gauche)

M. Yann Gaillard.  - Moi aussi, je voudrais vous parler de la forêt, en tentant d'équilibrer optimisme et pessimisme.

En dépit de votre talent, monsieur le ministre, les ambitions des assises de la forêt appelaient une autre réponse budgétaire que celle qui ressort de la loi de programmation triennale. Le programme 149, qui disposait de 305 millions en 2008, et qui tombe dans le budget 2009 à 292 millions, est prévu en 2011 à 248 millions. Le minimum aurait été de confirmer l'orientation retenue par votre prédécesseur : maintenir le montant du programme et renouveler les crédits consacrés à la reconstitution des forêts détruites par la tempête de 1999 sur des investissements forestiers, de protection et d'amélioration, qu'il s'agisse de la forêt publique ou de la forêt privée.

Voyons d'abord la forêt publique. Sa partie communale, représentée par la Fédération des communes forestières de France (Cofor) dont naguère j'étais responsable, s'est abstenue de voter le budget de l'ONF le 17 novembre. Si elle s'est réjouie du maintien du versement compensateur à 144 millions, comme le prévoit le contrat État-ONF, ce dont je vous remercie de grand coeur, elle s'est inquiétée des charges qui pèseront désormais sur l'Office, son partenaire : augmentation de sa part patronale de dépenses sociales et exigence par l'État d'un loyer pour l'usage, gracieux jusque là, des maisons forestières. C'est folklorique et dérisoire...

La RGPP est passée par là. La réduction des effectifs se limitera-t-elle au non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux, ou bien faudra-t-il aller plus loin à l'intérieur de la norme de 1,5 % par an prévue par le contrat entre l'État et l'ONF ?

Les communes forestières vous demandent solennellement que les charges de l'ONF soient ajustées à la situation du marché du bois, qui se dégrade avec la crise de la construction. Les communes ont été choquées de voir l'État ou l'ONF refuser de s'acquitter de la taxe foncière sur les propriétés non bâties des forêts domaniales : 14 millions de recettes en moins pour les communes, et surtout un usage traditionnel aboli.

La forêt privée s'inquiète de la baisse des aides à la voirie forestière, pourtant nécessaires à l'accroissement de la récolte de bois. Quid du fonds de mobilisation, annoncé par le Grenelle de l'environnement ? Le dispositif d'encouragement fiscal à l'investissement a été amélioré pour les travaux, mais pas pour l'investissement foncier ; il serait pourtant souhaitable d'étendre à l'ensemble du territoire forestier le seuil de 5 hectares applicable aux forêts de montagne. Y aura-t-il un dispositif d'appui à la récolte du bois dans les forêts difficiles d'accès, pour valoriser ce qui est notre tout premier gisement national d'énergie renouvelable ?

Le président de la Fédération nationale des syndicats de propriétaires forestiers et sylviculteurs, constatant que 2 millions de vos crédits pour la forêt iront cette année au plan de relance pour l'emploi, a regretté que la forêt serve de variable d'ajustement ; c'est le cas depuis plusieurs années, ici pour financer les bâtiments d'élevage, là pour l'installation des jeunes agriculteurs, voire la lutte contre la fièvre catarrhale. Faudra-t-il nous consoler grâce à l'idée d'un « fonds chaleur », qui figure parmi les 50 mesures pour le développement des énergies renouvelables à hautes qualités environnementales ? Ce fonds porte une haute ambition, puisqu'il « s'interfacera naturellement sur les outils mis en place pour faciliter la mobilisation de la ressource forestière ». C'est un peu obscur, sans doute un peu idéal, mais nous comptons sur vous, monsieur le ministre, pour faire pénétrer dans cette obscurité un peu de lumière et dans cet idéal, un peu de réalité. (Sourires ; applaudissements à droite)

M. Jacques Muller.  - Nous débattons de ce budget avant d'avoir examiné le texte « Grenelle 1 », alors que nous savons bien que les engagements du Grenelle nécessitent des moyens concrets.

Les ombres qui pèsent sur notre modèle agricole en crise ne sont toujours pas dissipées ! Certaines dispositions vont dans le sens d'une agriculture biologique, mais je dénonce avec force le soutien d'1 milliard accordé aux agro-carburants de première génération. Ces agro-carburants ne présentent aucun intérêt pour l'émission de gaz à effet de serre ; leur culture industrielle a des effets très négatifs sur l'environnement, notamment sur la qualité des eaux et des sols, et sur la biodiversité. Le rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation pour l'ONU estime même que ces cultures risquent de créer une concurrence entre nourriture et carburant, qui laissera les pauvres et les victimes de la faim des pays en développement à la merci de l'augmentation rapide du prix des aliments, des terres vivrières et de l'eau.

C'est pourquoi, comme de nombreuses organisations non gouvernementales, je demande un moratoire immédiat sur ces agro-carburants de première génération.

De plus, ces produits sont indûment qualifiés de « biocarburants », alors qu'ils ne répondent pas aux critères de culture imposés à la filière biologique. Au mieux, cet usage vient d'une erreur de traduction du terme anglais bio-fuel, lequel ne prête pas à confusion dans les pays anglo-saxons puisque les produits issus de l'agriculture biologique y sont qualifiés d'organics. Au pire, elle vise à entretenir la confusion dans l'opinion publique, en s'appuyant sur l'image positive du « bio », pour vendre un produit dangereux pour la sécurité alimentaire mondiale.

Monsieur le ministre, êtes-vous d'accord pour cesser les subventions aux agro-carburants de première génération, cette pompe à finances publiques qui bénéficie au seul lobby céréalier ? Etes-vous d'accord pour abandonner l'appellation erronée de « biocarburants » ?

Cela étant, je salue votre volonté de soutenir la filière bio : 12 millions supplémentaires serviront l'objectif, fixé lors du Grenelle de l'environnement, de tripler la surface en agriculture biologique ; le crédit d'impôt pour l'agriculture biologique sera doublé ; les exploitations converties à l'agriculture biologique seront exonérées de la taxe foncière sur les propriétés non bâties.

Cependant, le crédit d'impôt ne sera doublé qu'à partir de 2010, puisque la mesure porte sur les revenus de 2009 ; l'exonération de la taxe foncière ne concerne pas les exploitations déjà engagées dans l'agriculture biologique, et elle reste à la charge des communes !

Ces dispositions sont loin de marquer la rupture nécessaire avec le modèle productiviste de notre agriculture, dont le secrétaire perpétuel de l'Académie d'agriculture et président honoraire de l'Inra estime qu'il n'est pas loin de s'effondrer sous le coup des pesticides. Nous devons choisir l'agro-écologie et la valorisation durable de nos terroirs, plutôt que la fuite en avant avec la chimie et les manipulations génétiques ! Les marges de manoeuvre existent mais elles sont délibérément ignorées.

Monsieur le ministre, allez-vous, en application de la PAC, mobiliser les 9 milliards d'aides du premier pilier sur des critères environnementaux précis ? Nos concitoyens attendent la définition d'une éco-conditionnalité qui reposerait sur critères simples et vérifiables, par exemple les surfaces de compensation écologique, le chargement en animal, la diversité et la rotation des cultures, la réduction des intrants, ou encore l'exclusion de certaines pratiques et produits. Il faut cesser d'utiliser le cahier des charges de l'agriculture dite « raisonnée », qui défend seulement les intérêts conjoints de l'agriculture productiviste et de l'agrochimie ! Des outils existent au sein de votre ministère, par exemple les indicateurs de durabilité des exploitations agricoles, à l'élaboration desquels j'ai eu le plaisir de collaborer en tant qu'Igref.

Le Grenelle de l'environnement a proposé des dispositions fiscales claires pour infléchir les pratiques agricoles dans le sens du respect de l'environnement. Il s'agit en particulier de renforcer les taxes et redevances sur les pollutions et la consommation de ressources naturelles et de créer une taxe dissuasive sur les pesticides. Ce chapitre n'est guère abordé par ce budget !

Monsieur le ministre, alors que les paysans souffrent économiquement, ils vont continuer de subir les effets de la PAC à la française et des détestables « références historiques ». Ces règles bénéficient à une minorité de grands céréaliers, au détriment des éleveurs.

Compte tenu de ces observations, les Verts voteront contre ce budget. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Yves Détraigne.  - L'accord du 20 novembre sur le bilan de santé de la PAC doit permettre à l'agriculture européenne de relever de nouveaux défis, comme la gestion de l'eau et la protection de l'environnement. Vous le savez, la luzerne est l'une des plantes de grande culture les plus favorables à l'environnement. Avec 1,2 million de tonnes, la France est le deuxième producteur de luzerne déshydratée en Europe.

La luzerne est l'une des dernières sources de pollen pour les abeilles. La filière est d'ailleurs soutenue par des organisations comme WWF, la ligue pour la protection des oiseaux, la fédération nationale de l'agriculture biologique et les syndicats d'apiculteurs. La luzerne protège les captages d'eau potable ; elle n'a pas besoin d'engrais car elle capte naturellement l'azote de l'air. Très sobre en intrants, elle ne nécessite qu'un herbicide par an et un pesticide tous les trois ans, et aucun fongicide. Enfin, installée pour quatre à cinq ans sur la même parcelle, elle préserve la macro et la microfaune.

La culture de la luzerne permet également de réduire notre dépendance en matière de protéines végétales car elle remplace avantageusement la nourriture animale à base de soja importé des États-Unis ou du Brésil et souvent OGM. Les extraits foliaires de luzerne constituent un complément nutritionnel des plus efficaces pour l'homme : source de protéines, de vitamines A et de fer, ils peuvent améliorer sensiblement l'état nutritionnel des pays en voie de développement.

Mais, en dépit de ses nombreuses vertus, la culture de la luzerne est menacée par la réforme de la PAC, qui supprime le découplage au 1er janvier 2012 des aides à la transformation des fourrages séchés. Ce découplage risque d'entraîner une baisse de 80 % de la production de luzerne : les producteurs empocheront la prime et se tourneront vers des cultures plus rémunératrices ! L'aide actuelle coûte 118 millions à l'Union européenne, soit 0,2 % de son budget agricole. La profession avait souhaité que le découplage n'intervienne pas avant le terme initialement prévu de 2013, afin de rendre ses outils de transformation plus économes en énergie. Les investissements engagés ne seront pas achevés d'ici 2012.

Alors que le Grenelle fixe l'objectif de 20 % de culture biologique d'ici 2020, et que l'Europe souhaite favoriser les projets « verts » en renforçant le deuxième pilier, voilà une culture biologique exemplaire qui risque de disparaître ! Connaissant votre détermination, monsieur le ministre, pour défendre cette culture, je vous demande de donner aux déshydrateurs le temps qui risque de leur manquer pour assurer l'avenir de ce secteur. (Applaudissements à droite, au centre, et sur plusieurs bancs socialistes)

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission.  - Très bien.

M. Benoît Huré.  - Je vous félicite, monsieur le ministre, pour votre travail lors de la présidence française de l'Union. Vous avez su réunir une large majorité autour d'un projet ambitieux, en dépit de négociations très ardues. Avec le fonds européen de développement de l'assurance récolte et le fonds de mutualisation pour répondre aux crises sanitaires et environnementales, vous donnez aux agriculteurs les moyens de se protéger contre ces risques.

Aujourd'hui, nous devons aider le monde agricole à se prémunir contre le risque économique. L'agriculture est un secteur stratégique : elle dégage un excédent de 9 milliards, loin devant l'industrie automobile, et participe à la résorption du fléau qu'est la famine.

Sous prétexte de défendre les consommateurs, la récente décision de la DGCCRF, exigeant du Centre national interprofessionnel de l'économie laitière qu'il cesse toute recommandation en matière de fixation du prix du lait, pénalise la profession agricole face à la grande distribution.

M. Adrien Gouteyron.  - Absolument.

M. Benoît Huré.  - Le principe de l'interprofession permet un partage plus équitable des marges entre tous les acteurs de la filière et favorise le consommateur, n'en déplaise à la DGCCRF !

L'agriculture doit compter avec les risques sanitaires et climatiques. Sans interprofession, les prix ne reflètent pas la réalité économique. Ainsi, depuis les années 1990, le prix de la viande bovine au producteur a baissé de 10 %, mais augmenté de 50 % pour le consommateur ! L'an dernier, la hausse des cours des céréales et du lait a été répercutée immédiatement sur les produits transformés ; cette année, leur baisse n'a pas affecté le prix des denrées alimentaires... Voilà ce dont devrait s'inquiéter la DGCCRF !

Je sais, monsieur le ministre, que vous considérez ces interprofessions comme un atout face à la mondialisation. Dans le secteur agricole, la loi du marché à elle seule livre consommateurs et producteurs aux aléas de marchés spéculatifs et volatils.

Mme Évelyne Didier.  - Très bien.

M. Benoît Huré.  - S'en remettre à la grande distribution, c'est risquer de voir se répéter les mêmes comportements que ceux des financiers rapaces qui ont précipité la crise !

Ce budget, en augmentation de 2,4 %, conforte l'agriculture française et consolide son avenir malgré un contexte budgétaire difficile. C'est pourquoi je vous apporte mon total soutien. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Jean-Marc Pastor.  - L'agriculture française connaît une crise quasi généralisée : c'est une première. Si les crédits de paiement augmentent, c'est pour répondre aux engagements précédents ; pour les autorisations d'engagement, il en va tout autrement.

Parmi les points satisfaisants de ce budget, je citerai l'installation des jeunes agriculteurs, la sécurité alimentaire, l'enseignement supérieur et la recherche, la gestion des aléas. Mais il y a aussi des manquements, à commencer par les retraites agricoles : la perspective de travailler jusqu'à 70 ans n'est pas le geste de solidarité attendu par nos anciens ! Parmi les oublis, il y aussi la gestion des crises, la forêt, l'enseignement agricole, le service public de l'équarrissage... Où est le grand plan de modernisation des exploitations lancé par votre prédécesseur ?

Je sais qu'il est difficile de concilier les exigences de l'OMC, de la PAC, du Grenelle, de l'aménagement du territoire, tout en offrant des revenus décents et des perspectives de vie aux agriculteurs. Rappelons toutefois que le Farm bill donne, sans scrupules, des avantages compétitifs aux agriculteurs américains, et que le Canada n'hésite pas à soutenir sa production laitière ! Vous devez être encore plus agressif dans le débat européen et pour défendre votre budget !

Vous dites redouter un système européen trop libéral et souhaiter que notre agriculture s'inscrive dans un contexte soutenu et régulé. J'apprécie cette évolution du discours, mais un budget qui ne couvre que le tiers des besoins et ne prévoit pas de lisser le retrait inévitable de l'Europe après 2013, me paraît très risqué.

Le monde agricole doit payer deux fois la note : le prix des intrants à fortement augmenté, tandis que celui des matières premières agricoles est reparti à la baisse.

Que fait-on des droits à paiement dormants ?

La contractualisation par filière permettrait de mieux mutualiser et de mieux protéger. Dans la perspective de l'après 2013, il faut à tout prix éviter une renationalisation de la PAC.

Le deuxième pilier va permettre de soutenir les revenus alors qu'il n'est pas fait pour cela. Il faut donc clarifier les choses, mais le bilan de santé de cette PAC n'en souffle mot. L'OMC joue-t-elle correctement son rôle dans le désordre international dans lequel nous sommes ?

Par rapport à toutes ces interrogations, ce budget est bien timide. La cohérence nécessaire entre la production agricole et les entreprises agroalimentaires implique une contractualisation des filières. Mais il est difficile de jouer à la fois la carte du tout libéral en voulant protéger certains secteurs.

Le foncier reste une véritable difficulté pour l'agriculture. L'Europe va-t-elle proposer des mesures cohérentes sur cette question ? Nos campagnes ne doivent pas être de simples espaces verts, mais permettre aux agriculteurs d'offrir à tous une alimentation de qualité. Pour être efficace, une politique doit être menée sur une génération ; ce budget est loin du compte, tout comme, l'Europe.

Malgré mes remarques positives...

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial.  - C'est bien !

M. Jean-Marc Pastor.  - ... mon groupe ne pourra voter ce budget.

M. Charles Revet.  - C'est bien dommage !

M. Jean-Marc Pastor.  - J'espère effectivement que la prochaine fois, ce sera mieux...

M. Charles Revet.  - Nous avons un ministre qui se bat !

M. Jean-Marc Pastor.  - ... et que je pourrai faire une annonce différente à cette tribune. Merci pour la prochaine fois. (Sourires ; applaudissements à gauche)

M. Jean Boyer.  - Je veux d'abord saluer votre présence, monsieur Barnier, à la tête de cet important ministère qui concerne l'ensemble de notre territoire qu'il soit celui du littoral, de la plaine ou de la montagne. Le Savoyard que vous êtes défend les intérêts des zones de montagne. Dans le Cantal, vous vous étiez même qualifié de « ministre des agricultures ». C'est au nom de l'une d'entre elles que je m'exprimerai : l'agriculture de montagne ne demande pas de privilèges, mais simplement la parité compte tenu des nombreux handicaps qu'elle rencontre.

Nous savons tous la place que l'agriculture a tenu hier, qu'elle tient aujourd'hui et qu'elle tiendra demain dans notre pays. Les récentes manifestations sur le prix du lait nous rappellent que les éleveurs traversent une période difficile et incertaine. Le Grenelle de l'environnement montre combien l'agriculture occupe une place majeure. Elle doit répondre au défi alimentaire afin de nourrir près de 7 milliards d'habitants aujourd'hui et sans doute 9 en 2050. Sa mission est également sanitaire, environnementale, sociale et elle participe à l'aménagement du territoire. Malgré le contexte budgétaire difficile, des priorités s'imposent. Les agriculteurs savent malgré tout qu'ils ont un bon ministre qui sait faire entendre sa voix à Bruxelles. Nous apprécions également la qualité des informations fournies par vos services.

Connaissant votre attachement aux problèmes de la montagne, je souhaite attirer votre attention sur cette agriculture spécifique, frappée de nombreux handicaps et qui mérite un soutien et un accompagnement permanent. Les éleveurs ont des problèmes de trésorerie et ils ont aussi du mal à prévoir l'avenir. L'agriculture de montagne souhaite que l'on comprenne ses difficultés. Ainsi en est-il de la collecte du lait : la densité des éleveurs étant faible, le coût de transport est plus élevé. Il ne faut pas non plus oublier les normes relatives aux bâtiments d'élevage, les mesures agro-environnementales, la multiplication des contrôles parfois ubuesques. En ce qui concerne les bâtiments d'élevage, les efforts entrepris depuis 2004 ont connu un incontestable succès, mais le nombre de dossiers en attente est encore trop élevé. Il faut simplifier les procédures afin de ne pas avoir le sentiment de chercher une aiguille dans une meule de foin ! Appliquons les règles avec équité mais aussi avec bon sens !

Il est essentiel de favoriser l'installation des jeunes agriculteurs et de permettre à tous ceux qui ont travaillé, avec beaucoup de courage et de détermination durant leur vie, de bénéficier d'une retraite bien méritée. Certes, nous saluons l'instauration d'une retraite complémentaire obligatoire mais il faut permettre à ceux qui le souhaitent de partir à l'âge qui leur convient, en tenant compte de leur état de santé ou de leurs difficultés économiques. La disparition des préretraites ne va donc pas dans le bon sens.

En zone de montagne, la revalorisation de l'indemnité compensatrice des handicaps naturels est nécessaire et les enjeux sont très importants. Les plafonds européens n'étant pas atteints, cette revalorisation renforcerait la politique en faveur de l'agriculture de montagne qui ne peut être laissée au bord de la route.

Les plans de relance de différentes filières ne porteront pas leurs fruits si, dans le même temps, les tracasseries administratives, les mesures de contrôle et les règlementations viennent contraindre l'agriculture de montagne. Maurice Blondel a dit : « L'avenir ne se prévoit pas, il se prépare ». C'est ce qu'il faut faire pour l'agriculture de montagne.

Merci, monsieur le ministre, d'avoir écouté un ancien agriculteur devenu sénateur, mais qui n'a pas perdu l'amour de son métier et qui votera, bien évidemment, votre budget. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Bernard Fournier.  - Le budget du ministère de l'agriculture et de la pêche intervient dans un contexte économique très difficile. Cependant, et alors que l'agriculture est confrontée à des défis européens et internationaux majeurs, il préserve la plus grande partie des mesures en faveur du monde agricole.

Issu d'un département où le taux d'installation des jeunes agriculteurs est très élevé, je me félicite que la dotation qui leur est réservée soit maintenue à son niveau de 2008 et que celle attribuée aux prêts bonifiés augmente.

De plus, le Gouvernement va mettre en place un montant minimum de retraite pour tous les agriculteurs ayant cotisé au moins 17,5 ans. Les veuves des exploitants agricoles pourront bénéficier de la retraite complémentaire obligatoire acquise par leur conjoint.

J'en viens à la crise de la fièvre catarrhale ovine (FCO) qui s'est développée en France et qui a fragilisé la filière bovine et ovine, particulièrement les éleveurs de bovins allaitants. L'État a mis en place une campagne de vaccination obligatoire contre le sérotype 8 en 2008 et les crédits du ministère pour la lutte contre les maladies animales vont augmenter de 4,6 %, ce qui est une bonne nouvelle. Cependant, le sérotype 1 venant du sud-ouest a fait son apparition depuis quelques mois dans la Loire et nécessitera très vraisemblablement une campagne de vaccination en 2009. Enfin, un nouveau sérotype est apparu récemment dans les pays du nord de l'Europe. Sur ce dossier très sensible de la FCO, l'État devra être en mesure de fournir les quantités de vaccins nécessaires pour les différents sérotypes lors des prochaines campagnes de vaccination.

Pour sa part, le conseil général de la Loire suit l'évolution de la FCO : il a soutenu les éleveurs touchés en participant à la prise en charge des frais d'analyses et des frais de soins aux animaux malades. Il observe également avec une grande attention les négociations en cours sur la participation de l'Union européenne au financement des vaccins et de la vaccination. Je salue les efforts de votre ministère pour s'assurer de la sécurité sanitaire de nos concitoyens.

D'une manière plus générale, je souhaite relayer la forte inquiétude des agriculteurs touchés par une baisse de leurs revenus. La Loire, département essentiellement dédié à l'élevage, est particulièrement sensible à l'augmentation des prix des matières premières nécessaires pour la fabrication des aliments pour animaux.

Parallèlement, le coût des intrants agricoles -engrais, produits phytosanitaires- augmente, en lien avec les fluctuations du coût du pétrole ; le revenu des éleveurs du département dont je suis l'élu est directement touché par la conjoncture mondiale, il a baissé de 12 % par actif non salarié en  2007 et probablement du double en 2008. Pour les seuls éleveurs de bovins et d'ovins, il aura baissé de 50 % à 60 % par rapport à 2006. J'ai connaissance de situations sociales et économiques de plus en plus difficiles. Beaucoup d'agriculteurs de la Loire ont été déçus, je dois le dire, par les mesures décidées par la Conférence sur le revenu agricole et le conseil des ministres de l'agriculture des 19 et 20 novembre.

S'agissant du dossier laitier, il importe de réduire autant que faire se peut les possibilités de prêt de quotas en fin de campagne. Le marché laitier est sur-approvisionné. La décision du conseil des ministres de l'agriculture d'augmenter de cinq points les quotas entre 2009 et 2013 et, pour la campagne en cours, d'autoriser des dépassements de quota n'est en rien justifiée. Je soutiendrai l'article 59 ter qui légitime opportunément le rôle de l'interprofession en matière d'éclairage des marchés. Je soutiendrai également la suppression, par les députés, de l'article 54 qui prévoyait une augmentation de 130 % d'ici 2011 de la redevance sur les produits phytosanitaires et l'élargissement de son assiette. Cette hausse aggraverait encore le poids des charges des agriculteurs. J'espère un vote conforme du Sénat ; si ce n'était pas le cas, je m'opposerai à toute augmentation. (M. Gérard César approuve) Je soutiendrai enfin l'amendement de M. César visant à conforter la dotation 2009 des coopératives d'utilisation du matériel agricole.

Monsieur le ministre, vous avez mon soutien. Je vous remercie pour votre écoute et votre volonté constante d'associer les parlementaires à vos décisions. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Pierre-Yves Collombat.  - Ce budget entend placer la forêt sous le règne du développement durable, mais celle-ci n'est pas résistante au feu. Les crédits de l'action « Prévention des risques et protection de la forêt » sont amputés de 3,2 millions d'euros.

Je voudrais vous parler d'une institution de plus en plus diaphane, le Conservatoire de la forêt méditerranéenne. Créé il y a une vingtaine d'années après les grands incendies qui avaient embrasé le sud de la France, il avait été doté de 15 millions d'euros. Au fil des années, il a été détourné de ses objectifs. Son budget 2008 était de 7,5 millions, son budget 2009 sera de 8 millions -probablement une erreur... A l'origine, il devait financer, en partenariat avec les collectivités territoriales de quinze départements, des travaux d'entretien et de défense contre les incendies et préfinancer l'exécution d'office du débroussaillement obligatoire, qui est de la responsabilité des maires. Or ces actions de prévention, qui doivent permettre d'éviter que les centaines de départs de feux ne se transforment en catastrophe sur des milliers d'hectares, ont été délaissées au profit de patrouilles de surveillance, de véhicules et de constructions diverses, ce que la Cour des comptes avait relevé dès l'année 2000, notant que l'État négligeait la prévention, peu visible, pour privilégier l'achat de matériel au service d'une lutte active plus spectaculaire contre les incendies. Un rapport oublié de plus... Accessoirement, Lolf ou pas Lolf, les crédits d'aménagement rural se sont métamorphosés en crédits de sécurité civile.

On se préoccupe du détonateur et des secours en ignorant l'explosif. La forêt n'est pas une poudrière qu'il suffirait de tenir sous surveillance, plutôt un dépôt de gaz qui fuit. La biomasse s'accumule ; plus tardive est sa destruction, plus grande est la catastrophe qui ne manquera pas de se déclarer, c'est ce qu'on observe depuis dix ou quinze ans. Comme indicateur de réussite de la prévention, vous avez choisi la proportion de départs de feu éteints avant que la surface brûlée ne dépasse un hectare, ce qui n'a guère de sens. Aussi efficace que soient les pompiers sur les feux naissants, en période d'extrême sécheresse et de vents violents, quelques foyers leur échapperont. L'objectif devrait être d'éviter que ceux-ci n'embrasent des milliers d'hectares. Visiblement cela n'intéresse pas les responsables de ce pays ; et les communes forestières, généralement sans grands moyens, se retrouvent bien seules pour réaliser, financer et entretenir les ouvrages de protection contre l'incendie. Elles ne bénéficient d'aucun financement du Conservatoire, alors qu'on leur impose des plans de protection au risque incendie de forêt (Pprif). Ou bien elles ne construisent ou ne reconstruisent plus dans certaines zones, ou bien elles réalisent et entretiennent des équipements hors de portée de leur budget. Pour ce qui est des prescriptions, on peut faire confiance aux services de l'État : la sécurité n'a pas de prix quand ce sont les autres qui paient... Ces communes sont aussi chargées de faire respecter le débroussaillement obligatoire, sans avoir les moyens de préfinancer les travaux d'office.

La commune varoise de Collobrières, avec 1 710 habitants, et 11 268 hectares au coeur du massif des Maures ...

M. Michel Barnier, ministre.  - Massif que j'ai fait classer !

M. Pierre-Yves Collombat.  - ... est l'une des dix-sept communes forestières du département à s'être vu imposer un plan de prévention après les incendies de 2003 -pour faire oublier qu'aucun préfet n'y avait pensé, on a redoublé de rigueur aux frais des communes. Le simple entretien des pare-feux et des pistes coûterait 300 000 euros par an, soit 15 % du budget de fonctionnement ... Sans commentaires ...

La Cour de comptes est claire : « La création du Conservatoire n'a jamais été présentée comme une action dans laquelle l'État apporterait une aide au démarrage dont le relais devrait être pris par le partenariat local ; tout au contraire, des ressources spécifiques avaient été créées pour en assurer la pérennité ». Les communes forestières demandent que la ressource, enfin affectée en totalité à son objet initial, les aide à faire face à leurs obligations. C'est cela, le développement durable ! (Applaudissements à gauche ; M. Yann Gaillard applaudit aussi)

M. Antoine Lefèvre.  - Ce budget intervient dans un contexte international de grande crise. Or l'agriculture reste un des secteurs fondamentaux, représentatif de l'économie réelle.

Votre politique s'inscrit dans un cadre européen ; je veux souligner les efforts que vous déployez pour tenter de donner des perspectives claires aux agriculteurs. Notre l'agriculture doit être accompagnée pour faire face aux défis de l'environnement et de la sécurité sanitaire et alimentaire.

Les biocarburants participent à la lutte contre le réchauffement climatique ; nous nous réjouissons de la solution qui a pu être trouvée dans ce dossier, un compromis qui sauve la filière.

La fièvre catarrhale ovine, l'une des crises sanitaires les plus graves que notre pays ait connue, continue de mettre en grande difficulté nombre d'éleveurs. Comment allez-vous les aider ? La France a été la première en Europe à proposer des vaccins à ses éleveurs ; une prise en charge communautaire de leur coût est-elle envisagée ?

En cette fin d'année, les cours du lait ont accusé une forte baisse, alors que la pression des industriels et des distributeurs s'accentue sur les producteurs. Je me réjouis qu'un accord soit intervenu le 1er décembre pour stabiliser les rapports au sein de la filière et mettre en place un Observatoire de suivi des volumes produits. Je soutiendrai l'amendement introduit à l'Assemblée nationale qui clarifie la situation juridique de l'organisation du marché.

Enfin, je n'oublie pas les jeunes agriculteurs. La DJA est maintenue à son niveau de 2008 et les prêts bonifiés sont fortement augmentés. Je souhaite attirer votre attention sur les agriculteurs qui sont confrontés à la restructuration betteravière et à la fermeture de sucreries, notamment dans mon département de l'Aisne. Devant se reconvertir, ils souhaitent bénéficier, pour les aides versées à ceux qui renoncent à leurs droits de livraisons sous quotas, du régime des plus-values professionnelles et des dispositions de l'article 151 septies du code général des impôts. Pensez-vous pouvoir accéder à leur demande ?

Je vous remercie, monsieur le ministre, pour votre volonté inlassable d'informer les parlementaires des progrès comme des difficultés que vous rencontrez au cours des sommets agricoles européens. Votre budget est responsable et prévoyant : il mérite d'être soutenu. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Adrien Gouteyron.  - C'est avec une grande satisfaction, monsieur le ministre, que vous avez dit le 20 novembre que vous veniez de remplir l'une des grandes priorités de la présidence française. Les représentants des zones de montagne, dont je suis, partagent votre avis.

Je pourrais énumérer les crises qui frappent le monde agricole, avec la fièvre catarrhale ovine et la baisse du prix du lait, mais je préfère exprimer mon soutien à l'accord du 20 novembre, car il faudrait remonter loin pour trouver un dispositif aussi prometteur pour nos zones de montagne. Il faut maintenant utiliser la boîte à outils mise à votre disposition.

Vous avez obtenu que la production de l'herbe soit reconnue comme activité économique à part entière, puisque son soutien peut figurer dans le premier pilier de la PAC. Si la prime à l'herbe, actuellement de 76 euros par hectare, est suffisante, l'agriculture de montagne, fortement herbagère, aura enfin une perspective d'avenir. Les montants économisés par l'État sur le deuxième pilier pourraient permettre de réévaluer encore l'indemnité compensatrice de handicaps naturels (ICHN).

Vous avez obtenu que les États membres puissent réorienter une partie des aides directes vers certaines productions fragiles. A mon sens, le secteur ovin devrait en profiter, vu l'extrême désarroi des éleveurs. Avec 50 millions d'euros, votre plan d'urgence représente 12 euros par brebis. Il faut arriver aux 27 euros demandés par la Fédération nationale bovine, puisqu'en 2008 les éleveurs de bovins ne dégageront qu'un revenu annuel moyen de 6 000 euros. Vous avez même cité une exploitation à 4 000 euros de revenu. N'oublions pourtant pas l'apport de cette activité à des régions comme la mienne, où elle évite notamment le développement des friches.

La deuxième priorité concerne l'aide à la production laitière en zone de montagne, afin de répondre à la disparition des quotas. Les producteurs laitiers ont manifesté leur désarroi devant ma permanence, avec beaucoup de dignité. En dialoguant avec eux, j'ai ressenti leur inquiétude, qui frise la détresse. Une nouvelle fois, le prix du lait, orienté à la baisse, rend intenable la situation des agriculteurs.

Vous avez adressé un signal fort à la filière en clarifiant la situation du Centre national interprofessionnel de l'économie laitière, ce que nous approuvons sur tous les bancs. L'accord signé lundi par l'interprofession traduit le sens des responsabilités des producteurs, mais aussi leurs désillusions, puisqu'il prévoit une baisse de 0,25 centime par litre, pour arriver à 55 centimes par litre en mars. Ce n'est pas une perspective très encourageante pour eux.

Comment ne pas vous entretenir également de l'installation des jeunes ? Vous avez fait sauter le verrou du plafond communautaire limitant les aides à l'installation. Nous sommes donc passés de 55 000 euros à 70 000 : c'est un succès.

M. Jean-Marc Pastor.  - A quel prix ?

M. Adrien Gouteyron.  - Il serait même utile d'aller un peu plus loin... Votre budget pour 2009 consolide l'aide à l'installation des jeunes en augmentant les crédits de 13,3 %. Nous vous engageons à poursuivre cet effort.

L'accord européen ouvre des perspectives nouvelles, sources d'espoir. Je sais que vous mobiliserez les crédits nationaux pour aider l'agriculture à surmonter ses difficultés.

« Le pessimisme est d'humeur, l'optimisme est de volonté. » Je suis frappé par la volonté qu'ont beaucoup d'agriculteurs qui échappent à l'humeur et s'engagent avec optimisme dans la voie du développement et de l'espoir.

Merci pour ce que vous avez fait ! (Applaudissements à droite)

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Ce budget se tourne vers le futur, grâce notamment aux aides aux jeunes agriculteurs et les prêts bonifiés. Après avoir salué la restructuration du ministère et de ses opérateurs, je vais centrer mon intervention sur la réaction aux crises et aléas sanitaires, climatiques ou économiques dont le monde agricole est régulièrement victime.

Il est fondamental d'inscrire des sommes suffisantes dès la loi de finances, pour ne pas avoir besoin de recourir à des décrets d'avance. Ainsi, une réserve de précaution serait par avance destinée à la gestion des crises.

La constitution d'un fonds de soutien à l'ostréiculture du bassin d'Arcachon a été envisagée, mais jamais concrétisée, malgré les interdictions mal expliquées depuis 2005. Cette profession doit affronter une difficulté structurelle liée à la non-propriété des principaux outils de production, puisque les cabanes ostréicoles du bassin d'Arcachon sont, à la différence de la Charente-Maritime, comme les parcs, situées sur le domaine public maritime en vertu d'autorisations d'occupation consenties à titre temporaire par l'État ou le conseil général. L'inconvénient principal de cette situation tient aux garanties exigées par les banques : elles imposent fréquemment des garanties prises sur les bateaux, voire sur les biens personnels, comme l'habitation. Les professionnels dénoncent cette situation depuis des années. Ils soulignent que les bonifications d'intérêt accordées par l'État ne sont que des effets d'annonce, car les banques refusent souvent tout prêt. Vu le contexte actuel, l'offre est encore plus réduite.

Je propose que l'on crée un fonds de garantie cautionnant une large part des prêts d'installation ou des prêts bonifiés en cas de calamités agricoles, pour reconstituer des stocks de naissains. Cette création est encore plus urgente que celle du fonds de soutien à l'ostréiculture.

Monsieur le ministre, nous avons apprécié votre venue en septembre au bassin d'Arcachon, et l'écoute dont vous avez fait preuve quant à l'ouverture de négociations sur l'ostréiculture dans le bassin d'Arcachon. L'anticipation de la gestion des crises et la prise en compte des spécificités dans un protocole doivent aboutir à une sécurité accrue. (Applaudissements à droite)

M. Jacques Blanc.  - La qualité des travaux des rapporteurs et des commissions m'autorise à concentrer mon propos sur trois points.

Le premier concerne l'Europe. Votre expérience en la matière, monsieur le ministre, a beaucoup contribué à ce que la présidence française aboutisse sur deux dossiers. Ainsi, l'accord du 19 novembre ouvre, jusqu'en 2013, des perspectives sur une gestion plus efficace des marchés, sur la gestion des crises climatiques et sanitaires, sur la possibilité de réorienter les aides vers des productions plus fragiles, outre l'accompagnement de la fin des quotas, sur le renforcement des mesures de développement rural -avec le basculement de la prime à l'herbe dans le premier pilier- en prenant également en compte, dans le passage du premier au deuxième pilier, le climat, la biodiversité, la gestion de l'eau et la bioénergie.

Vous avez réuni un conseil des ministres extraordinaires où s'est dégagé un accord sur les thèmes de la disponibilité alimentaire, de l'équilibre alimentaire mondial, de l'équilibre territorial, de la viabilité des agricultures. Vous avez ainsi lancé la réflexion pour l'après 2013, et je vous en remercie.

Au plan national, vous avez été confronté à des situations difficiles. Mais une somme de 25 millions d'euros a été dégagée pour les éleveurs d'ovins à partir des DPU « dormants ». Dieu sait si l'élevage ovin en avait besoin ! Des allégements de charges sociales ont été décidés en faveur des agriculteurs en difficulté, et des comités départementaux ont été mis en place. Mais ces allégements ne suffiront pas. Dans mon département, qui est probablement celui qui compte le plus de petites exploitations agricoles, 800 000 euros d'allégements ont été prévus pour les 500 producteurs de lait. Mais ces derniers, qui produisent 120 000 litres de lait, acquittent chaque année 2 400 euros de charges. Il leur faudrait donc 1,2 million d'euros. Encore un effort, faute de quoi les laitiers ne s'en sortiront pas !

Je vous félicite de votre réactivité devant l'épizootie de fièvre catarrhale bovine. Ce fut un traumatisme pour les agriculteurs, mais la campagne de vaccination que vous avez lancée a permis de parer au plus pressé.

Il faudra aider davantage le secteur laitier. Les laitiers ont conclu un accord avec les industriels, dont les conditions sont dures, mais qui résout certains problèmes. Vous avez laissé espérer de nouveaux DPU, et peut-être une extension de la prime à l'herbe, qui compenserait utilement la baisse des prix : je vous y encourage. Mais il faut passer le cap de 2009.

Enfin, nous avons besoin d'une véritable politique de la montagne. Vous avez eu le courage de souligner la nécessité de défendre l'élevage dans les zones de montagne. J'ai organisé lundi dernier à Aumont-Aubrac en Lozère un séminaire de la commission pour l'agriculture et le développement durable du Comité des régions d'Europe. Je vous ai fait part des communications. Il est essentiel à nos yeux de relancer au niveau européen une politique de la montagne, conformément à l'objectif de cohésion territoriale figurant dans le traité de Lisbonne, qui entrera, je l'espère, en vigueur. Nous souhaitons que le Livre vert promis par M. Barroso voie enfin le jour. La montagne mérite qu'on porte un nouveau regard sur elle : c'est cela, le développement durable !

Vous avez eu le mérite de jouer le jeu du développement durable avec les agriculteurs, qui ne doivent pas être montrés du doigt, et qui sont des acteurs indispensables de la préservation de la qualité de vie et de l'environnement.

Merci d'avoir ajouté 12 millions d'euros aux crédits destinés aux primes herbagères agri-environnementales (Phae) et aux indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN) : cela devrait permettre d'augmenter de 5 % l'INCH sur les 25 premiers hectares. Des efforts ont également été consentis en faveur des jeunes agriculteurs.

Quelles que soient les difficultés, il faut rendre espoir aux agriculteurs en détresse. L'agriculture n'est pas un boulet que nous traînons, c'est une chance pour notre pays, pour le développement durable ! Le Président Giscard d'Estaing ne parlait-il pas du « pétrole vert » ? Arrêtons de dire que la PAC coûte trop cher à l'Union européenne : c'est la seule politique européenne commune ! Elle n'est pas orientée vers le passé, mais vers l'avenir ! Nous soutenons votre action, monsieur le ministre, et nous voterons les crédits de cette mission. Agissons ensemble pour offrir une espérance nouvelle à tous les agriculteurs ! (Applaudissements à droite)

M. Gérard César, rapporteur pour avis.  - Vive la France !

M. Louis Pinton.  - Sur la fièvre catarrhale bovine, je suis moins optimiste que mes collègues. Cette épizootie menace la santé de nos élevages et met en péril les équilibres budgétaires. La principale réponse à la crise fut de vacciner les cheptels. Mais la vaccination a des limites, qui tiennent à la manière dont on la pratique ainsi qu'à la complexité épidémiologique de la maladie.

Pour que la vaccination contre un sérotype soit la plus efficace possible, il faut qu'elle concerne tous les sujets sensibles sur tout le territoire où peut sévir l'agent pathogène, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui, puisqu'on procède par campagnes concentriques autour des cas repérés. La vaccination répond bien à une logique d'élevage, mais pour qu'elle empêche la circulation d'un virus, il faut qu'elle soit totale.

Les ruminants sauvages non vaccinables, comme les cerfs ou les chevreuils, pourraient être sensibles à la maladie et maintenir la présence du virus.

M. Paul Raoult.  - Tuons tous les sangliers !

M. Louis Pinton.  - La complexité épidémiologique tient à l'étiologie du virus : 24 sérotypes sont aujourd'hui connus. A chaque sérotype correspond un vaccin. Deux sérotypes sont apparus jusqu'ici en France, les sérotypes 1 et 8. D'autres apparaîtront sans doute : le 6 n'est pas loin. Dès qu'un sérotype nouveau apparaît, il faut fabriquer le vaccin qui lui correspond et l'administrer aux sujets susceptibles d'en être affectés. Au rythme de deux nouvelles apparitions par an, il faudra douze ans pour régler le problème ! La vaccination court derrière l'arrivée des nouveaux sérotypes.

En ce qui concerne la dissémination de la maladie, on croyait jusqu'à une date récente qu'elle n'avait qu'un seul vecteur, le moucheron culicoïde. Mais il en existe probablement beaucoup d'autres, parmi les insectes et les acariens. Voilà pourquoi la vaccination ne suffit pas, même si nous n'avons pas d'autre solution pour le moment. Toutes ces informations m'ont été confirmées par le Professeur Schelcher, qui enseigne la pathologie bovine à l'Ecole nationale vétérinaire de Toulouse, et qui fut mon condisciple. Il m'a cité l'exemple de l'Espagne, où une tentative d'éradication de la maladie par la vaccination a échoué.

Il faudrait réfléchir à d'autres logiques médicales, notamment pour les élevages de bovins allaitants. En cas d'épidémie incontrôlable par la vaccination, le seul recours est la quarantaine. Celle-ci est d'ailleurs conforme à la logique économique, qui veut que l'on maintienne les animaux sur place. Aujourd'hui les éleveurs des zones défavorisées produisent des broutards maigres et vont les faire engraisser en dehors des territoires où ils sont nés. Cette pratique cantonne les éleveurs dans le statut de producteurs de matière première, les broutards. Elle conduit aussi à la circulation des sujets et donc du virus. Pour parer aux conséquences sanitaires de cette circulation, il existe désormais toute une réglementation qui nuit gravement à la rentabilité des élevages. Ne serait-il pas plus efficace, en complément de la vaccination, de mettre en oeuvre une politique volontariste d'engraissement des animaux sur le lieu d'origine ?

Médicalement, cette politique satisferait au principe de la quarantaine et, économiquement, elle permettrait aux éleveurs d'accomplir la totalité du cycle de production, ce qui stimulerait nos territoires. Une telle politique ne serait-elle pas appropriée ? Il s'agit de préparer l'avenir, cet avenir auquel je m'intéresse beaucoup... car c'est là que je compte passer mes prochaines années. (Sourires et applaudissements à droite et au centre)

M. Gérard Bailly.  - Deux heures viennent de sonner, je serai bref. Entre la conférence sur les revenus et le bilan de santé de la PAC, vous venez de vivre des semaines chargées, monsieur le ministre. Votre plan d'urgence a été le bienvenu : 250 millions iront aux exploitants, dont 50 millions aux éleveurs ovins, qui voient leurs revenus baisser depuis plusieurs années alors qu'ils sont confrontés à la hausse de l'énergie et des aliments, sans parler de la fièvre catarrhale que vient d'évoquer mon collègue. Je me contenterai donc de faire écho aux vétérinaires, qui demandent si le vaccin sera disponible et aux éleveurs, qui voudraient savoir qui le paiera. Les aides conjoncturelles annoncées le 12 novembre permettront d'attendre une réorientation des aides de la PAC. Je souscris à vos priorités que sont l'aide aux productions à l'herbe et à la production laitière de montagne.

On entend beaucoup parler des producteurs ovins. Nous avons, avec M. Fortassin, travaillé sur le sujet. Leur situation est proche du désespoir : de 13 millions de têtes en 1979, on est revenu à 8 millions. La fièvre catarrhale leur cause un souci tout particulier, mais il n'y a pas qu'elle : les éleveurs redoutent aussi cette calamité que sont les prédateurs, dont le nombre augmente. Des crédits d'indemnisation sont fléchés dans le budget du ministère de l'écologie. Nous veillerons à ce qu'ils soient suffisants. Mais une anecdote... Le Progrès titrait il y a peu sur la douzième attaque des lynx contre une exploitation à Mirebel, mais il y a quelques jours, on apprenait qu'une association qui soigne les animaux avait dépensé 1 500 euros pour recueillir un jeune lynx, que le préfet était allé ensuite relâcher clandestinement dans la forêt. (Mouvements divers) Comment voulez-vous, dans ces conditions, que les élus répondent aux questions des éleveurs !

Les producteurs laitiers traversent une grave crise, eux qui ne sont plus que 87 500 contre 130 000 en 1998, tandis que le nombre de vaches laitières a diminué de 12 %. Ils ont subi la baisse du prix du lait et l'on comprend leurs inquiétudes quand le récent accord ne leur donne que 55 euros les 1 000 litres. Dès lors, l'amendement adopté à l'Assemblée nationale pour autoriser l'interprofession laitière à s'informer de la formation du prix est vraiment le bienvenu et il serait impensable de l'empêcher tant la transparence est nécessaire. J'attends beaucoup de l'observatoire que vous avez annoncé, car l'on aimerait bien connaître la part de chacun dans la formation des prix. Lorsque les prix du blé et du lait ont augmenté, l'an dernier, les journaux en ont fait leurs gros titres, mais l'on n'entend guère parler de la baisse des cours -à moins que les prix de détail n'aient pas diminué ?

Président du groupe d'étude de l'élevage je me dois d'évoquer cet autre sujet d'inquiétude qu'est l'équarrissage. Je sais que vous avez eu des discussions avec la profession. Que se passera-t-il après le mois de juillet ? Je souhaite que l'on s'abstienne de demander la moindre redevance aux éleveurs pour l'enlèvement des animaux. Ils ne pourraient l'accepter et l'on verrait des animaux morts devant les préfectures ou les permanences électorales... D'autant plus que le nombre d'animaux morts a explosé avec une augmentation de 23 % pour les bovins et de 60 % pour les ovins. Un mot encore pour regretter la baisse des crédits pour la génétique animale.

Je me réjouis du plan de compétitivité des scieries ainsi que des aides aux micro-exploitations forestières mais n'oublions pas les dessertes forestières -nous discuterons bientôt d'un amendement. Quand on veut exploiter le bois-énergie, le bois-résidu, il faut pouvoir aller le chercher au coeur de forêts profondes et pentues. Or le tiers d'entre elles sont encore inaccessibles : nous avons besoin de routes forestières.

Le vin nous réjouit tous. Je vous remercie du soutien que vous avez apporté à nos viticulteurs sur la question de la réclame sur internet. Vous avez travaillé à un plan de modernisation, c'était vital. On peut en effet lutter contre l'alcoolisme autrement que par le harcèlement. Je souhaite que l'on puisse voir de la publicité pour le vin du Jura, pour le vin de paille, pour le vin jaune...

M. Jacques Blanc.  - Pour le vin du Languedoc...

M. Gérard Bailly.  - ... pour le vin d'Arbois, sans encourir les remontrances de l'association pour la prévention de l'alcoolisme et je veux vous dire bravo pour votre soutien à cette filière. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche.  - L'exercice est difficile à cette heure tardive... Je remercie les présidents et les rapporteurs des commissions de leur travail constructif et sans complaisance -c'est l'habitude de cette maison que je connais bien pour y avoir siégé.

Dans votre diversité, vous avez parlé de cette force que constitue l'agriculture au moment où nous devons, selon l'expression de M. de Montesquiou, relever les défis qui nous interpellent : la sécurité alimentaire, d'abord, avec 900 millions de personnes en danger de mourir de faim ; le réchauffement climatique, ensuite ; la nécessité, suivant le mot du président Obama, de se libérer de la tyrannie du pétrole ; la montée des risques sanitaires, enfin, avec des pathologies émergentes, prêtes à exploser. Pour relever tous ces défis et maintenir notre ligne d'horizon, il faut investir dans ce secteur que Mme Herviaux qualifiait justement de stratégique et préparer l'avenir, mais aussi l'accompagner de notre solidarité quand la crise le touche.

Dans l'incroyable tourmente qui emporte le monde à travers l'opacité du système financier, la force de notre appareil de production est l'appui le plus solide pour résister.

Bien sûr, l'agriculture n'est pas seule dans cette économie réelle, mais elle est la plus ancienne. Depuis dix-huit mois que je suis à la tête de ce grand ministère, je veux accompagner un secteur d'avenir qui concerne toute la société, pour l'alimentation, l'emploi, le développement durable. Bref, la question de l'agriculture est une question de société. C'est pourquoi je me suis efforcé de bâtir un budget pour l'avenir.

La mission obtient 3,4 milliards en crédits de paiement, soit une hausse de 2,72 % qui n'est pas négligeable ; mais les crédits alloués à l'ensemble du ministère de l'agriculture dépassent les 5 milliards. Les autorisations d'engagement atteindront 4,8 milliards. Certes, elles diminuent de 6,7 %, mais cette baisse est essentiellement due au calendrier de la prime herbagère agro-environnementale, dont la plupart des contrats ont été engagés sur cinq ans en 2008. Les crédits d'intervention augmentent de 7,4 % à 2,2 milliards.

Ces crédits nationaux pour l'économie agricole doivent être comparés avec le budget agricole européen : la France doit bénéficier en 2009 de 10 milliards de crédits européens dans le budget de la PAC, dont 9 milliards au titre du premier pilier et le reste sur le deuxième pilier. Je suis le seul membre du Gouvernement dont la politique est à ce point mutualisée au niveau européen.

Le 20 novembre, les 27 ont conclu à l'issue d'un an de discussions, après une longue nuit de négociation, le bilan de santé de la PAC. C'est le premier accord à 27 sur la politique agricole. Il était indispensable pour adapter la PAC dans la perspective de 2013. En tant que présidence, nous avons cherché à construire un compromis qui ne soit pas le plus petit dénominateur commun entre nous. Le fil rouge, ce fut de conserver des outils d'intervention, de ne pas abandonner la gouvernance économique que la PAC a instaurée.

Je vous le dis avec objectivité et lucidité : c'est un accord solide. Il modifie substantiellement la proposition initiale de la Commission : les ministres et le Parlement européen ont fait bouger les lignes. Il consolide la dimension économique de la PAC et prend en compte les priorités que le Président de la République m'avait fixées.

Nous avons préservé l'efficacité des outils d'intervention. C'est le cas pour les céréales et les produits laitiers. Nous les utiliserons dès janvier pour le stockage privé du beurre afin d'atténuer l'excès sur le marché laitier.

Nous avons rééquilibré la proposition sur les quotas laitiers, alors que la Commission proposait une augmentation automatique des quotas laitiers de 5 % d'ici leur suppression. La fin des quotas a été décidée en juin 2003. Malgré le retournement des marchés, aucune majorité ne s'est exprimée pour revenir sur cette décision ; le débat a porté sur les conditions de sortie des quotas. Ma responsabilité a été d'encadrer cette sortie et d'obtenir des mesures d'accompagnement. Nous avons obtenu que deux rapports en 2010 et 2012 fassent le point sur l'état des marchés et procèdent à l'ajustement des quotas. Le lien entre l'évolution des quotas et celle des marchés a été réintroduit. Nous avons désormais un pilotage politique de la production laitière avec l'obligation de rouvrir le dossier en 2010 et en 2012. Le jeu reste ainsi ouvert : l'évolution des quotas laitiers n'est plus scellée dans le marbre.

Nous avons obtenu la mise en place de mesures d'accompagnement pour la production laitière que nous pourrons financer soit dans le second pilier soit au titre de l'article 68. Nous avons introduit dans le premier pilier des outils de couverture des risques climatiques et sanitaires. Nous avons également ouvert des voies pour la PAC de l'après 2013. Les outils de la PAC de demain ne peuvent se réduire à des aides découplées.

Nous avons une boîte à outils pour réorienter la PAC sur les productions et les territoires fragiles, et nous pourrons accompagner le développement d'une agriculture durable. Mon intention est d'arrêter nos choix d'ici la fin janvier et je vais ouvrir la concertation sans tarder avec le Parlement, les organisations syndicales et professionnelles et les associations. Je ne vais pas en préjuger le résultat mais je puis vous dire que je ne laisserai pas mourir la filière ovine ; l'accompagnement de la production laitière est une possibilité ouverte et j'ai l'intention de proposer un plan protéagineux qui concernerait la luzerne.

Cet accord était la condition pour pouvoir avancer sur la PAC de 2013. C'est le second objectif de la présidence française. Ouvrir cette réflexion stratégique est une urgence, si l'on ne veut pas que l'agriculture soit la variable d'ajustement du budget européen. Après 2013 ? Il était important d'avoir la boîte à outils. Pour le reste, il s'agit déjà de savoir si l'on gardera la politique agricole commune ! Il y a des gens qui voudraient la supprimer, parce qu'elle coûte trop cher, disent-ils. Éric Besson va faire une étude mais je suis convaincu que la suppression de la politique agricole commune coûterait plus cher qu'elle ne coûte. Beaucoup de gens voudraient une Europe qui soit un grand supermarché avec beaucoup de concurrence fiscale et sociale, et des portes grandes ouvertes sur l'extérieur. Le débat sera difficile mais comptez sur moi : où que je sois, j'agirai en ce sens ! Dans une démocratie, comme est l'Union européenne, le débat politique doit précéder le débat budgétaire, pas le suivre !

Les prochaines discussions seront celles des perspectives financières pour 2013-2020. Le débat va être difficile. Le dernier Conseil de vendredi, dont je vous ai informé personnellement, l'a confirmé. Les ambitieuses conclusions de la Présidence ont été soutenues par 24 des 27 !

Dans le prolongement du G20 à Washington, Pascal Lamy envisage de convoquer pour la mi-décembre une réunion ministérielle pour reprendre les négociations du cycle de Doha. Cette réunion sera celle de tous les dangers. La position de la France n'a pas changé : l'accord qui est sur la table est déséquilibré. Sur le volet agricole, nous sommes sur la ligne rouge. Et sur les services et les biens industriels, je crains que nous ne gagnions rien. J'ai mis ce point à l'ordre du jour à Bruxelles, vendredi ; nous avons été nombreux à rappeler à la commissaire le devoir de vigilance : l'offre européenne doit être intangible.

J'ai souhaité donner du sens à ce budget afin de le mettre en cohérence avec une stratégie que je défends depuis longtemps, celle d'une agriculture et d'une pêche durables et fortes.

Une agriculture durable, c'est le renouvellement des générations. C'est pourquoi, je tiendrai l'engagement de donner la priorité budgétaire à l'installation.

C'est un acte pour l'emploi dans les territoires : nous aidons 6 000 installations par an, les crédits augmentent de 13,3 % cette année et il faut y ajouter le plan de professionnalisation, qui concernera 7 500 personnes.

L'agriculture durable passe encore par la recherche agronomique : nous augmentons ses moyens de 15,8 millions. Nous allons créer des pôles de dimension européenne. Après vos débats de ce matin sur l'enseignement agricole, je veux rendre un hommage aux enseignants et aux personnels administratifs de cet enseignement.

Nous soutenons aussi, en aval, la filière agroalimentaire, en particulier les PME.

Nous sommes proactifs pour le Grenelle de l'environnement, mon action au ministère de l'environnement, il y a quinze ans, n'y est pas étrangère. De surcroît les agriculteurs, les éleveurs, les ostréiculteurs, les pêcheurs sont les premiers et les seuls à ne travailler qu'avec l'eau, l'air et la terre !

M. Charles Revet.  - Tout à fait !

M. Michel Barnier, ministre.  - Le plan agriculture bio est ambitieux : nous consacrons 12 millions par an à l'objectif du triplement de la surface agricole bio. Le plan eco-phyto se propose, lui, de réduire de moitié l'usage des phytosanitaires. Nous agissons également pour améliorer la performance énergétique des installations ; dans l'Aveyron, j'ai visité un regroupement de 100 jeunes éleveurs, qui sont autonomes avec les 33 000 mètres carrés de surface photovoltaïque qu'ils ont installés : c'est possible partout ! J'ai donc passé un accord avec Total et EDF-GDF, pour la réalisation de 100 000 diagnostics énergétiques dans le monde agricole.

S'agissant de la forêt, je n'ai nullement l'intention de démanteler ou de privatiser l'ONF : les 144 millions prévus pour cet établissement, en portent témoignage ! Notre objectif consiste à remettre en production 12 millions de mètres cubes supplémentaires de bois d'ici 2012, car le bois est le premier éco-matériau. Nous voulons également mieux exploiter la biomasse forestière, aider les travaux forestiers, améliorer la gestion des domaines forestiers.

D'une manière générale, j'attache une très grande importance au suivi des politiques, au-delà de leurs annonces. J'ai confié par exemple une mission sur la filière apicole à votre collègue député M. Saddier, je ferai très prochainement des annonces qui feront suite à ses propositions innovantes. Je me rendrai demain en Guadeloupe et en Martinique, où des terrains ont été contaminés après le passage des cyclones Dean et Omar, pour y promouvoir un projet de banane durable, dont la culture serait exempte de tout produit phytosanitaire.

S'agissant des mesures sociales pour le monde agricole, le Premier ministre a annoncé des décisions importantes pour réduire les situations de pauvreté indignes, notamment celles des veuves : 91 % des veuves d'agriculteurs sans droits propres touchent une pension de moins de 400 euros par mois. Nous avons décidé la garantie d'un montant minimum de retraite égal au minimum vieillesse, qui intéressera 233 000 personnes, dont 70 % de veuves. Nous mettons en place la réversion aux veuves de la retraite complémentaire obligatoire, acquise à titre gratuit par leur conjoint. Cette mesure coûtera 40 millions et concernera 64 000 veuves. Enfin, l'État apportera sa garantie au Ffipsa pour pérenniser son financement.

Ce qui vaut pour l'agriculture durable vaut également pour la pêche, le métier le plus dangereux : hier encore un chalutier pêchant la coquille saint-Jacques en Bretagne a coulé, provoquant la mort d'un marin de Granville de 42 ans. La pêche est un métier vital pour l'activité des départements littoraux, elle une priorité du chef de l'État.

Les crédits de la pêche passent de 62 millions à 160 millions en 2009, c'est un effort sans précédent. Trois contrats bleus -forcément approuvés par la Commission de Bruxelles- sont déjà engagés pour 9,7 millions. Toutes les façades maritimes doivent être équitablement concernées par cette initiative novatrice.

Enfin, nous consacrons davantage d'argent à l'Ifremer, car le travail en commun des scientifiques et des marins-pêcheurs doit être renforcé pour disposer des données les plus objectives sur l'état des ressources halieutiques.

Pour la première fois, ce plan pour une pêche durable comprend un chapitre social et un chapitre sur la sécurité. Je souhaite équiper tous les marins-pêcheurs d'une balise individuelle. Une expérimentation concernera 800 à 900 marins, nous en tirerons le bilan à la mi-2009.

S'agissant de l'ancien Fonds de prévention des aléas à la pêche (Fpap), la Commission européenne a notifié en mai dernier aux autorités françaises sa décision négative. Ce n'est pas une surprise. Le remboursement des aides du Fpap doit donc être mis en oeuvre, selon des modalités pragmatiques et progressives qui ne pourront remettre en cause la pérennité des entreprises.

Dans la récente négociation du bilan de santé de la PAC, j'ai voulu trouver les outils d'une meilleure couverture des risques climatiques et sanitaires. Le bilan de santé portera ses effets en 2010. D'ici là, il nous faut travailler à des mesures plus conjoncturelles pour passer le cap. J'ai entendu l'appel digne et responsable des 20 000 éleveurs qui ont manifesté en septembre à Clermont-Ferrand.

L'élevage a pris de plein fouet la crise économique avec l'envolée du prix de l'énergie et des matières premières. J'ai engagé le 12 novembre un plan de soutien à la trésorerie des exploitations agricoles en difficulté de 250 millions, qui sera rapidement mis en oeuvre par les préfets : 70 millions réduiront la facture énergétique, 4 millions permettront de reconduire l'exonération des cotisations sociales pour les jeunes agriculteurs, 75 millions iront à l'amélioration de la trésorerie des exploitations et à des allégements de charge, avec le concours des banques et de la MSA.

Le plan prévoit également 50 millions pour les éleveurs ovins -50 % de crédits communautaires, 50 % dans le projet de loi de finances rectificative- en attendant le rééquilibrage des aides. L'élevage français est en difficulté, notamment en montagne. J'ai lu les propositions du Comité des régions, monsieur Blanc : je ne suis pas choqué d'y retrouver le terme de « cohésion territoriale », que j'avais fait inscrire dans le traité de Lisbonne. Comme je m'y suis engagé à l'Assemblée nationale, je vous confirme la redotation de l'ICHN, dont 6 millions de crédits nationaux et 7 millions du Feader.

Sur l'équarrissage, je vous répondrai par écrit, mais je m'engage à couvrir la dette des éleveurs au service public de l'équarrissage à hauteur de 12 millions. La réforme prévue concerne l'ensemble des filières, y compris celle du cheval. Un groupe de travail a été mis en place pour identifier les besoins.

L'élevage est également fragilisé par la fièvre catarrhale ovine, la plus grave crise sanitaire que nous ayons eu à affronter. Avec les éleveurs, les vétérinaires, les laboratoires, nos services, nous faisons face : réunion de crise quotidienne ! Après une première vaccination massive -40 millions de doses- une deuxième sera engagée le 15 décembre pour les sérotypes 1 et 8, qui sera achevée en avril. Les doses nécessaires seront réparties département par département. Je me bats pour mettre en place une stratégie européenne. On vaccine contre les sérotypes 1 et 8 dans tous les départements où le 1 a été constaté. En Espagne, la vaccination contre le 8 est lancée ; elle a fait ses preuves. Je suis d'accord pour mener une réflexion sur la politique d'engraissement. Ces mesures sanitaires indispensables voient leurs crédits progresser de 2 à 13 millions. De son côté, la Commission européenne vient de doter de 100 millions supplémentaires le financement de la vaccination en 2009, et le cofinancement à hauteur de 50 % des doses vaccinales et de la vaccination. Enfin, nous avons ajouté 30 millions pour les mesures de soutien économique.

L'élevage est encore touché par la crise du prix du lait. Je suis attaché à l'organisation interprofessionnelle, qui a fait l'objet d'un mémorandum à Bruxelles. Le cadre de la discussion interprofessionnelle a été consolidé en première lecture par un amendement du Gouvernement à l'Assemblée nationale. Après plusieurs semaines de discussions, les négociations ont abouti lundi à un accord entre les trois familles professionnelles, dont je salue l'esprit de responsabilité. Je les invite maintenant à travailler ensemble à des propositions concrètes sur les modalités de contractualisation.

La viticulture représente le quart de nos exportations agricoles. Toutes les mesures conjoncturelles possibles ont été prises pour les exploitations en difficulté. Nous pouvons nous appuyer sur une OCM solide, correctement négociée, et sur le plan de modernisation de la viticulture, qui doit permettre à la viticulture française de retrouver sa place sur un marché mondial de plus en plus concurrentiel.

Il n'est pas juste que les entreprises viticoles soient pénalisées par rapport à leurs concurrents étrangers, faute de pouvoir utiliser internet au motif que ce support n'existait pas lorsque la loi Évin a été votée. Après une concertation constructive avec Roselyne Bachelot, et avec le Parlement, nous allons mettre en place un système raisonnable tout en préservant l'esprit de la loi Évin.

Je confirme notre volonté de réformer l'indemnisation des calamités agricoles, avec la mise en place d'un véritable fonds sanitaire pour faire face aux risques, y compris les menaces nouvelles. La boîte à outils européenne nous permet de prélever dans le premier pilier les crédits nécessaires.

Une politique européenne plus préventive, plus équitable, qui reste une politique économique ; un modèle agricole et une pêche durables en métropole et outre-mer ; une agriculture économiquement productive, écologiquement et socialement responsable : voilà mes ambitions.

Je veux dire ma gratitude aux équipes de ce grand ministère, qui portent, assument, expliquent nos politiques, à Paris et sur le terrain, avec compétence et avec impartialité dans un contexte administratif profondément modernisé. Nous participons à l'effort national de maîtrise des dépenses publiques. La modernisation du ministère a été conduite avec la conviction que les enjeux dont nous avons la charge sont au coeur de la société, de ses attentes et de ses exigences. J'espère qu'un jour nous aurons un grand ministère de l'alimentation, du développement durable, de l'agriculture et de la pêche.

Dans la tourmente actuelle, le secteur agricole représente une chance et une force pour notre pays. Pour le soutenir, nous avons besoin d'un budget responsable et d'un ministère en mouvement, d'une politique européenne plus forte et plus équitable : j'y travaille avec vous. Nous devons aussi être vigilants dans les négociations commerciales. Nous avons enfin besoin d'une stratégie déterminée en faveur du développement durable. C'est l'intérêt national. (Applaudissements à droite et au centre)

Examen des crédits

Article 35 (Etat B)

Mme la présidente.  - Amendement n°II-208, présenté par le Gouvernement.

M. Michel Barnier, ministre.  - Comme je l'ai annoncé en début d'après-midi, cet amendement transfère 3 millions de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales » à la mission interministérielle « Enseignement scolaire », afin de tenir compte des difficultés financières de l'enseignement agricole, soulignées notamment par Mme Férat.

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial.  - La commission a donné un avis favorable cet après-midi à l'amendement qui a été voté. Dans la continuité, elle est donc favorable à celui-ci.

L'amendement n°II-208 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-31, présenté par M. Bourdin, au nom de la commission des finances.

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial.  - La commission souhaite diminuer de 700 000 euros les crédits destinés aux Cuma. Nous avons récupéré au cours de la discussion les crédits de l'Aficar qui s'est auto-dissoute cet été et nous avions pensé que ces crédits permettraient de réduire le déficit du budget de l'État. L'Assemblée nationale a réaffecté pour partie ces crédits pour financer les prêts bonifiés des Cuma, ce qui ne correspond pas à nos principes lolfiens.

En outre, il nous a semblé que les prêts bonifiés n'étaient pas un bon instrument et ils sont d'ailleurs critiqués par la Cour des comptes que nous avons reçue il y a une quinzaine de jours.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-132, présenté par M. César, au nom de la commission des affaires économiques.

M. Gérard César, rapporteur pour avis.  - Cet amendement propose de prélever 500 000 euros à l'action 01 du programme 215, « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture », vers le programme 154, « Économie et développement durable de l'agriculture, de la pêche et des territoires », où ils seraient ainsi répartis : 300 000 euros viendraient abonder, au sein de l'action 13, les crédits destinés à financer les charges de bonification des prêts consentis aux coopératives d'utilisation de matériel agricole (Cuma). Alors que les taux d'intérêt remontent, il convient d'encourager la distribution de tels prêts.

Ce transfert venant en complément d'un amendement adopté par les députés, la dotation des Cuma en 2009 atteindra 4 millions ce qui permettra de mener une véritable action au profit du monde agricole.

En outre, 200 000 euros seraient redéployés vers l'action 11 pour être affectés au Centre national des expositions et des concours agricoles (Ceneca). Cette somme sera en fait confiée à la Direction générale des politiques agricoles, alimentaires et territoriales (DGPAAT) au titre de ses responsabilités en matière d'action internationale. Cette direction aura la charge de la verser au Ceneca, opérateur de la promotion et des salons agricoles, et d'en évaluer les effets.

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial.  - Ces deux amendements sont antinomiques. Nous avons entendu les arguments de la commission des affaires économiques et observé qu'hier après-midi, trois millions avaient disparu de la mission. Partant de là, et en dépit des observations que j'ai pu formuler, nous retirons l'amendement de la commission des finances au profit de celui de la commission des affaires économiques.

L'amendement n°II-31 est retiré.

M. Michel Barnier, ministre.  - Je remercie M. Bourdin pour ses propos très sages et je suis favorable à l'amendement de la commission des affaires économiques. Naturellement, les crédits de l'Aficar sont supprimés ce qui implique une diminution des crédits de communication du ministère. Pour autant, il est assez légitime que si cet argent disparaît d'une ligne de communication, il puisse être utilisé pour d'autres actions qui en ont besoin. Les Cuma en font partie.

M. Gérard César, rapporteur pour avis.  - Tout à fait !

M. Michel Barnier, ministre.  - Elles font effectivement du bon travail.

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission.  - Je tiens à remercier M. le rapporteur spécial d'avoir retiré son amendement au profit de celui de la commission des affaires économiques. Les Cuma ont joué un grand rôle dans la modernisation de l'agriculture ces quarante dernières années. Si nous voulons que les agriculteurs puissent bénéficier de la mécanisation, il faut leur en donner les moyens grâce à des prêts spécifiques. Avec notre amendement, nous atteindrons 4 millions ce qui permettra de moderniser les exploitations agricoles.

M. Jean-Marc Pastor, rapporteur pour avis.  - Nous nous associons à cette démarche de solidarité en faveur du monde agricole. Les Cuma permettent de rationnaliser les investissements nécessaires à la modernisation des exploitations. Mais ils offrent aussi la possibilité à des hommes et des femmes de travailler ensemble, ce qui est essentiel dans notre société individualiste. Notre groupe votera donc cet amendement.

L'amendement n°II-132 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-192, présenté par le Gouvernement.

M. Michel Barnier, ministre.  - Dans le cadre des transferts prévus dans la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, les services de l'aménagement foncier quittent le ministère de l'agriculture pour rejoindre les conseils généraux. Ce transfert de compétence donne bien évidemment droit à compensation pour les départements concernés. Il convient donc d'ajuster le transfert de crédits qui avait été inclus dans le projet de loi de finances pour 2009. Compte tenu de la date limite d'exercice du droit d'option, deux personnes n'ont pas pu être prises en compte au moment de l'élaboration du projet de loi de finances.

L'amendement n°II-192, accepté par la commission, est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-155, présenté par MM. Leroy, Gaillard, César, du Luart et Bailly.

M. Gérard Bailly.  - Les forêts jouent un rôle important dans nos territoires. Pour les exploiter convenablement et pour contribuer à atteindre les objectifs du Grenelle de l'environnement, il convient d'améliorer les dessertes. Comme le financement qui leur est affecté est en notable diminution, nous proposons d'abonder les crédits destinés au programme « Forêt » de 5 millions en diminuant d'autant les crédits du programme « Économie et développement durable de l'agriculture, de la pêche et des territoires »

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial.  - Cet amendement est conforme aux orientations du Grenelle de l'environnement et aux Assises de la forêt. Pourtant, il est gagé sur une baisse de 5 millions des crédits de l'action 14 du programme 154 qui a déjà subi une ponction de 2 millions. Ces 5 millions nous semblent quelque peu excessifs. Je me tourne donc vers le Gouvernement.

M. Michel Barnier, ministre.  - Pour atteindre les objectifs des Assises de la forêt et les ambitions du Grenelle, j'avais prévu dans le projet de loi de finances des mesures fiscales.

Je comprends l'objectif de cet amendement, mais ponctionner ainsi le programme 154 me poserait un gros problème ; je dépose un sous-amendement pour ramener la somme considérée à un million et je vous propose de vous associer au suivi des nouvelles mesures fiscales.

M. Gérard Bailly.  - Je me rallie au sous-amendement, mais croyez bien que nous débattrons à nouveau de gestion forestière et de bois énergie avec M. le ministre de l'écologie lorsque nous examinerons le Grenelle de l'environnement : il n'y a pas d'énergie du bois sans desserte !

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial.  - Avis favorable au sous-amendement.

Le sous-amendement n°II-215 est adopté.

L'amendement n°II-155, sous-amendé, est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-168, présenté par Mme Herviaux et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Mme Odette Herviaux.  - Cet amendement transfère 5 millions d'euros du programme 215 au programme 154 pour abonder les crédits destinés à l'animation rurale.

A la suite des travaux du Conseil de modernisation des politiques publiques, les crédits de soutien aux associations d'animation rurale sont supprimés ; on assiste à un repli sur le financement de nos obligations communautaires à hauteur de 1,1 million d'euros. La ligne « Animation et développement rural » ayant déjà été réduite de moitié en 2005, les associations n'ont pu trouver ailleurs les financements dont elles avaient besoin. Les actions ont été réduites, des emplois permanents ont disparu, et certaines fédérations ont dû cesser leur activité.

Or ces associations jouent un rôle fondamental dans un monde rural qui se sent abandonné et livré à la désertification. Dans le cadre du Grenelle de l'environnement, elles sauront assurer le lien entre les agriculteurs et les autres acteurs du monde rural. L'une de vos priorités, monsieur le ministre, n'est-elle pas le développement durable ? Vous avez laissé entendre que nombre d'associations rurales seront éligibles au compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural » (Casdar). Mais il semble que le nouveau fonds ne permettra pas de financer des actions liées à l'animation rurale ; l'appel à projet du ministère est à ce titre explicite.

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial.  - L'effet de la baisse des crédits a été en partie amorti par un amendement de l'Assemblée nationale, qui a abondé la ligne « Animation rurale » de 700 000 euros, ce qui paraît suffisant. Je souhaite le retrait de l'amendement.

M. Michel Barnier, ministre.  - La baisse des crédits est cohérente avec la révision générale des politiques publiques. Les associations ont été informées qu'elles peuvent bénéficier du financement du Casdar pour des montants qui ne sont pas négligeables ; quant aux crédits correspondant aux obligations communautaires, ils sont maintenus à hauteur de 1,1 million d'euros. Avis défavorable.

M. Jean-Marc Pastor.  - J'ai évoqué tout à l'heure les financements européens dans le domaine de l'aménagement et du développement rural. La France ne sait pas capter ces financements, au contraire de l'Espagne et de l'Autriche, par exemple. Plus de 37 % des crédits demandés par l'Espagne l'ont été par des associations d'animation rurale. Vous supprimez les crédits des nôtres, c'est bien dommage, elles sont la preuve du dynamisme de la ruralité française.

L'amendement n°II-168 n'est pas adopté.

Les crédits, modifiés, de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales » sont adoptés.

Les crédits du compte spécial « Développement agricole et rural » sont adoptés.

Article 59 A

Un rapport sur l'impact de la réorganisation de l'Office national des forêts sur le budget de l'État et des collectivités territoriales et la gestion forestière de la forêt française est remis avant le 10 octobre 2009 au Parlement.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-5, présenté par M. Bourdin, au nom de la commission des finances.

Rédiger comme suit cet article :

Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 10 octobre 2009, un rapport évaluant l'impact de la réorganisation de l'Office national des forêts, du centre national et des centres régionaux de la propriété forestière sur la gestion de l'espace forestier en métropole et outre-mer, ainsi que sur les budgets de l'Etat et des collectivités territoriales.

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial.  - Nous regroupons ici les rapports prévus aux articles 59 A, 59 B et 59 C.

L'amendement n°II-5, accepté par le Gouvernement, est adopté et devient l'article 59 A.

Article 59 B

Un rapport sur l'impact de la réorganisation de l'Office national des forêts sur la gestion de l'espace forestier des départements d'outre-mer et sur le budget de l'État est remis avant le 10 octobre 2009 au Parlement.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-21, présenté par M. Bourdin, au nom de la commission des finances.

Supprimer cet article.

L'amendement de coordination n°II-21, accepté par le Gouvernement, est adopté ; l'article 59 B est supprimé.

Article 59 C

Un rapport sur l'organisation des centres régionaux de propriété forestière et l'impact budgétaire qui en résulte est remis avant le 10 octobre 2009 au Parlement.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-25, présenté par M. Bourdin, au nom de la commission des finances.

Supprimer cet article.

L'amendement de coordination n°II-25, accepté par le Gouvernement, est adopté ; l'article 59 C est supprimé.

L'article 59 D est adopté.

Article additionnel

Mme la présidente.  - Amendement n°II-169, présenté par Mme Herviaux et les membres du groupe socialiste.

Avant l'article 59, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Un rapport sur l'évolution des enveloppes consacrées par l'Etat aux prêts bonifiés dont bénéficient les coopératives d'utilisation de matériel agricole est remis au Parlement avant le 1er septembre de chaque année.

Mme Odette Herviaux.  - M. Pastor a dit tout le bien qu'il pensait de l'amendement de M. César sur les Cuma. Un tel rapport serait intéressant.

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial.  - Il y a déjà beaucoup de choses dans les rapports annuels de performance. Sagesse, cependant.

L'amendement n°II-169, accepté par le Gouvernement, est adopté et devient un article additionnel.

L'article 59 est adopté, ainsi que les articles 59 bis, 59 ter et 59 quater.

Article additionnel

Mme la présidente.  - Amendement n°II-170, présenté par M. César.

Après l'article 59 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les deuxième et dernier alinéas du 3° de l'article L. 13 du code forestier sont ainsi rédigés :

« Les procédures de certification de gestion durable des forêts sont reconnues bénéficier de la certification de conformité environnementale ou écocertification prévue par les articles L. 115-27 et suivants du code de la consommation.

« Les produits forestiers fabriqués à partir de bois récoltés dans le cadre de l'un des documents de gestion visé aux a, b, c et d de l'article L. 4 ou issus d'une forêt bénéficiant d'une certification de gestion durable des forêts peuvent prétendre à bénéficier d'une certification de conformité environnementale ou écocertification. »

M. Gérard César.  - Il s'agit de l'interprofession forêt.

Pour la reconnaissance des interprofessions spécifiques, il est notamment fait référence à la certification de conformité mentionnée à l'article L. 13 du code forestier.

La forêt du sud-ouest forme le plus grand massif forestier de France. L'interprofession du pin maritime mérite une reconnaissance analogue à celle dont bénéficient la viande, le vin ou le fromage. Pourquoi le pin maritime serait-il le seul à ne pas devenir une interprofession à part entière ?

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial.  - La commission souhaite connaître l'avis du Gouvernement à propos de cette disposition qui semble devoir dissiper une divergence d'interprétation entre la profession et le ministère.

M. Michel Barnier, ministre.  - La reconnaissance d'une interprofession régionale suppose qu'elle soit porteuse d'une certification ; or cet amendement propose de reconnaître la certification de gestion durable au titre de la certification de conformité. Le code de la consommation ne concerne que les produits destinés au consommateur final, ce qui n'est pas le cas de la forêt.

Il faut donc aplanir les difficultés juridiques soulevées par le sujet légitimement abordé par M. César, à qui je propose de retirer son amendement. Je m'engage à constituer un groupe de travail sur cette question.

M. Gérard César.  - Puisqu'un groupe de travail sera organisé, je souhaite y participer avec les professionnels concernés.

L'amendement n°II-170 est retiré.

Prochaine séance aujourd'hui, jeudi 4 décembre 2008, à 15 heures.

La séance est levée à 3 heures 35.

Le Directeur du service du compte rendu analytique :

René-André Fabre

ORDRE DU JOUR

du Jeudi 4 décembre 2008

Séance publique

À 15 HEURES ET LE SOIR

Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l'Assemblée nationale (n° 98, 2008-2009).

Rapport (n° 99, 2008-2009) de M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation.

Examen des missions :

Immigration, asile et intégration (+ articles 62 et 63)

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial (rapport n° 99, annexe n° 15) ;

M. André Trillard, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (Immigration et asile - avis n° 102, tome VII) ;

MM. Jean-Patrick Courtois et François-Noël Buffet, rapporteurs pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale (avis n° 104, tome XI).

Politique des territoires

M. François Marc, rapporteur spécial (rapport n° 99, annexe n° 19) ;

M. Rémy Pointereau, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques (avis n° 101, tome V).

Ville et logement (+ articles 82 et 83)

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial (rapport n° 99, annexe n° 32) ;

MM. Pierre André et Thierry Repentin, rapporteurs pour avis de la commission des affaires économiques (avis n° 101, tome VII) ;

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 103, tome VIII).

Économie

Compte spécial : gestion et valorisation des ressources tirées de l'utilisation du spectre hertzien ;

MM. André Ferrand et François Rebsamen, rapporteurs spéciaux (rapport n° 99, annexe n° 11) ;

MM. Pierre Hérisson, Gérard Cornu et Mme Odette Terrade, rapporteurs pour avis de la commission des affaires économiques (avis n° 101, tome II).

Sport, jeunesse et vie associative (+ articles 77, 78 et 78 bis

M. Michel Sergent, rapporteur spécial (rapport n° 99, annexe n° 30) ;

MM. Pierre Martin et Jean-Jacques Lozach, rapporteurs pour avis de la commission des affaires culturelles (avis n° 100, tome VIII).

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DÉPÔTS

La Présidence a reçu de :

- Mmes Alima Boumediene-Thiery, Marie-Christine Blandin, Dominique Voynet, MM. Jean Desessard et Jacques Muller une proposition de loi tendant à permettre la reconnaissance et la production d'effets en France des partenariats et unions civiles enregistrés à l'étranger.

- M. Patrice Gélard un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale :

- sur le projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant application de l'article 25 de la Constitution (n° 105, 2008-2009),

- sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif à la commission prévue à l'article 25 de la Constitution et l'élection des députés (n° 106, 2008-2009).

- de M. Jean-René Lecerf un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur la proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale, relative à la législation funéraire (n° 108, 2008-2009).