SÉANCE

du lundi 17 novembre 2008

22e séance de la session ordinaire 2008-2009

présidence de M. Roland du Luart,vice-président

La séance est ouverte à 10 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les réponses du Gouvernement à quatorze questions orales.

Devenir européen des coopératives

Mme Nicole Bricq.  - Je souhaite attirer l'attention de Mme la ministre de l'économie sur le devenir des coopératives, fragilisées par deux plaintes déposées auprès de la Commission européenne. L'issue du premier litige, qui concerne les coopératives espagnoles et italiennes, pèsera fortement sur celui du second, qui oppose la Confédération française de commerce en gros et du commerce international aux coopératives agricoles françaises depuis 2004. Jusqu'alors, la Commission, considérant que les régimes fiscaux dérogatoires des coopératives étaient proportionnés à leurs contraintes juridiques, avait pris clairement position au point de publier une « communication sur la promotion des coopératives en Europe » en 2004.

Au reste, est-il besoin de souligner l'importance du mouvement coopératif qui, depuis la première révolution industrielle en Europe, s'est diffusé dans le monde durant le XXe siècle pour compter aujourd'hui 740 millions de membres et davantage de salariés que toutes les multinationales réunies ? Le rôle essentiel que les coopératives agricoles jouent dans l'aménagement du territoire a été en outre reconnu par la loi d'orientation du 5 janvier 2006.

Opter pour une fiscalité de droit commun conduirait à rompre avec l'idée que les coopératives d'utilisation de matériel agricole prolongent directement les exploitations agricoles et complexifierait la gestion administrative des coopératives de proximité ainsi que les initiatives collectives locales.

Comment le Gouvernement entend-il défendre les coopératives pour qu'elles puissent se développer à armes égales dans une économie concurrentielle ? Alors que la France préside pour quelques semaines encore l'Union, je ne doute pas qu'elle ait à coeur de faire avancer ce dossier !

Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur.  - La France, depuis que la Commission européenne lui a notifié en 2004 la plainte dont elle avait été saisie, a indiqué, dans deux réponses communiquées en 2004 et 2006, que les mesures fiscales dérogatoires étaient la contrepartie des contraintes juridiques auxquelles les coopératives étaient soumises et ne pouvaient être qualifiées d'aides d'État puisqu'elles ne procuraient pas d'avantages concurrentiels. Ce geste traduit clairement l'engagement du Gouvernement soucieux de défendre les coopératives qui, nous le pensons comme vous, sont un outil adapté au marché en ce qu'elles permettent notamment aux producteurs de mieux résister à la pression croissante sur les prix. Depuis, aucune procédure formelle d'examen du régime fiscal français n'a été ouverte. En outre, la France est intervenue dans le cadre des questions préjudicielles posées par des juridictions italiennes à la Cour de justice pour contester la qualification en aides d'État des mesures fiscales dérogatoires applicables aux coopératives. Nous sommes donc particulièrement vigilants et engagés dans la défense des coopératives.

Mme Nicole Bricq.  - Madame la ministre, je vous remercie d'avoir confirmé la position de la France dans ce débat. Je voulais soulever cette question aujourd'hui tout d'abord parce que le mandat de la Commission arrive bientôt à terme et que la commissaire Nelly Kroes, très active sur la concurrence, s'est quelquefois montrée, si j'ose dire, rigide. Ensuite, alors que l'on s'interroge après le sommet de Washington sur la façon dont l'Europe va s'engager dans la relance économique, il ne faudrait pas fragiliser le secteur coopératif, gros pourvoyeur d'emplois. Au-delà de la présidence de l'Union, la France doit donc tenir bon sur ce dossier pour éviter qu'il ne soit oublié.

Avenir de l'usine Ford de Blanquefort

M. Alain Anziani.  - Nous partageons le voeu, exprimé par le Président de la République dans son discours du 23 octobre dernier à Annecy, d'un « État plus actif dans l'économie, qui assume ses responsabilités, qui entreprend, qui investit, qui est une force d'innovation et de progrès ». Le Gouvernement a de nombreuses possibilités de mettre en pratique cette volonté, notamment dans le secteur automobile avec l'usine de Ford à Blanquefort.

Trop de temps a déjà été perdu. Il y a trois ans, M. Loos, interpellé par M. Madrelle, assurait qu'il n'y avait aucune crainte à avoir puis, en mars 2008, M. Novelli promettait que l'État négocierait avec Ford une reconversion du site. Pourtant, huit mois plus tard, Ford Europe a annoncé la fermeture du site pour dix semaines, du 24 octobre 2008 au 5 janvier 2009, et donc la mise au chômage technique des 1 580 employés. Cette décision semble préfigurer un abandon définitif du site avant 2010 et fait obstacle à la recherche de repreneurs.

Depuis des années, les élus girondins alertent l'État sur le désastre qui s'annonce : avec l'abandon du site seront touchés 9 600 emplois indirects dans la sous-traitance et pourront disparaître 10 % des recettes de la communauté urbaine de Bordeaux et une ressource essentielle pour toutes les communes girondines, concernées par la péréquation de la taxe professionnelle.

Par lettre du 28 octobre dernier, les présidents de la communauté urbaine et du conseil régional ainsi que le maire de Bordeaux, dont le soutien financier a été sollicité, ont demandé à être mieux associés à la recherche de repreneurs. Il est grand temps de lever le secret qui entoure ce dossier quand nous avons l'obligation de ne laisser aucun salarié au bord de la route et de réussir la reconversion du site.

Comment l'État entend-il obtenir du groupe Ford qu'il assume ses responsabilités ? Que compte-t-il entreprendre pour éviter le gâchis, humain, industriel et financier que constituerait l'abandon de Blanquefort ?

Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur.  - Conscients des enjeux de la fermeture du site de Blanquefort pour la région, les pouvoirs publics ont pris, depuis plusieurs mois, de nombreuses initiatives sur l'analyse des emplois indirects concernés, la formation du personnel et la validation des acquis de l'expérience, et, bien sûr, la reprise d'activité et de diversification du site. En ce qui concerne les emplois indirects, une étude confiée à l'Insee chiffre entre 4 500 et 5 000 emplois l'impact d'une telle fermeture.

Devant les difficultés rencontrées, Mme Lagarde a demandé au PDG de Ford Europe, le 5 février dernier, de s'impliquer davantage dans la recherche de solutions durables pour le site.

Depuis cette date, Ford a nommé un référent de haut niveau, M. Bennett, et le groupe s'est engagé auprès des autorités publiques à assumer ses responsabilités. Un cabinet de conseil a été mandaté pour amplifier la recherche d'entrepreneurs désireux de se développer au sein de la filière automobile ou qui pourraient apporter de nouvelles activités, recherche qui se poursuit en étroite collaboration avec l'Agence française pour l'investissement international et les agences locales de développement.

Les services de l'État sont eux aussi mobilisés. Complémentaire du groupe de travail technique animé par la Drire, un comité de suivi de l'évolution des sites de Blanquefort, réunissant les représentants de Ford Europe et des salariés, les principaux élus concernés et les services de l'État, s'est réuni en mai dernier, sous la présidence de Mme Lagarde afin d'apprécier les perspectives d'évolution du site, stratégique pour la région.

Grâce à cette mobilisation, plusieurs entreprises internationales du secteur de la mécanique ont manifesté leur intérêt, soit pour la reprise du site, soit pour une implantation à proximité, qui bénéficiera aux salariés du groupe. En dépit d'une conjoncture économique peu favorable, des discussions très avancées sont en cours avec deux entreprises. Une réunion d'avancement du comité de suivi fera prochainement le point sur ces opérations et les élus seront associés.

M. Alain Anziani.  - Je vous remercie de ces précisions. Que des repreneurs potentiels se soient manifestés, c'est bien. Mais j'attire votre attention sur le fait qu'ils appartiennent au seul secteur de la mécanique de transmission, ce qui pourrait ne pas résoudre les problèmes de la sous-traitance en même temps que poser un problème de rupture de charge, puisque la moitié des salariés ne pourraient être repris dans l'immédiat. J'ajoute que les mutations technologiques de long terme méritent d'être anticipées.

Maintien de l'activité aéronautique en Seine-et-Marne

M. Michel Billout.  - Fin juin 2008, le groupe industriel Safran a annoncé un projet de réorganisation de grande ampleur, qui touche différentes filiales et prévoit le démantèlement de plusieurs sites industriels, dont le site de l'entreprise Hispano-Suiza de Réau, filiale de la Snecma, constitué d'environ un millier de salariés. Seule entité demeurant sur le site, une division Safran Power, chargée de l'électronique de puissance et concernant 60 salariés, serait créée au sein d'Hispano-Suiza ; une division Safran Electronics, au sein de Sagem Défense Sécurité, implantée sur le site de Sagem à Massy, pourrait accueillir 450 salariés ; les activités relatives aux systèmes de régulation et équipements associés seraient transférées sur le site de Villaroche, commun avec celui de Réau.

Ces mesures ne font que poursuivre la politique de désorganisation et de transfert des activités du groupe Safran engagée par sa direction ces dernières années et qui a conduit à de vastes opérations de délocalisations, fragilisant l'avenir de notre production aéronautique.

A Melun Villaroche, Hispano-Suiza perdra 450 emplois industriels dès la fin de l'année 2009, tandis que les autres personnels d'Hispano-Suiza seront réaffectés vers des emplois déjà occupés par des personnels Snecma... Avec la sous-traitance et l'intérim, ce sont près de 1 000 emplois qui disparaîtraient du site, pourtant qualifié par le préfet de Seine-et-Marne de « poumon économique du département ».

Le Gouvernement y est d'ailleurs sensible puisque le 3 novembre dernier, M. Bertrand a choisi ce site pour présenter les nouvelles mesures relatives à l'intéressement des salariés ainsi que la possibilité de travailler jusqu'à 70 ans... Quel paradoxe au moment où les salariés du groupe se voient proposer des périodes de chômage technique, et ce alors que les carnets de commandes sont pleins et que l'on attend une augmentation de 15 à 20 % dans l'aéronautique et le spatial d'ici à 2020.

Le Conseil général de Seine-et-Marne, le Syndicat d'agglomération nouvelle de Sénart et la Communauté d'agglomération de Melun-Val-de-Seine se sont à l'inverse engagés en faveur du développement, sur le site de Villaroche, d'un pôle stratégique d'activités aéronautiques, en lien avec le pôle de compétitivité Astech.

N'oublions pas que d'autres emplois sont menacés sur le site, avec la suppression programmée du centre départemental de Météo France de Seine-et-Marne, situé sur l'aérodrome de Villaroche depuis 1947.

Quelles mesures entendez-vous prendre, madame la ministre, pour développer une politique aéronautique ambitieuse, qui passe nécessairement par le maintien de notre force industrielle ?

Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur.  - Grâce à l'excellence des 40 000 salariés qu'il emploie, et qui représentent 60 % des effectifs de la filière française, le groupe Safran constitue un acteur majeur de l'aéronautique mondiale. Alors qu'il intervient sur un marché mondialisé, dominé par les échanges en dollars, il a été incité à développer ses investissements dans les marchés émergents et la zone dollar, ce dont j'ai pu constater l'importance pour le rayonnement de notre pays. Pour faire face aux exigences de la compétitivité, l'entreprise doit aussi adapter son organisation. Celle annoncée fin juin doit améliorer la cohérence du groupe en regroupant ses activités électroniques autour d'un pôle fort. D'où les réaffectations de Réau à Massy. Je souligne, car c'est un point extrêmement positif, que le groupe n'envisage pas de réductions d'effectifs et que ses efforts d'investissement restent orientés sur le territoire national.

Les compétences présentes sur le site de Réau, majeur pour l'assemblage moteur et les essais avant mise en service, et qui emploie 5 000 personnes dont 1 000 ingénieurs, seront préservées. Au-delà, la filière s'est engagée dans une évolution profonde et le Gouvernement est déterminé à contribuer à faire de ces évolutions autant d'opportunités. En témoigne le plan pour l'industrie aéronautique annoncé par le Premier ministre à Marignane le 11 octobre 2007 et précisé à Toulouse le 23 juillet dernier, qui doit aider à l'émergence d'un acteur de premier plan. C'est ainsi que le budget de soutien à la recherche a été multiplié par deux, qu'un fonds d'investissement doté de 75 millions a été créé, à quoi s'ajoute l'action collective des Drire en faveur des stratégies industrielles et pour l'anticipation des besoins en ressources humaines, ainsi que les 20 millions d'appels à projets de l'Agence nationale pour la recherche et la couverture des changes par la Coface, pour aider à faire face à la faiblesse du dollar, dossier dans lequel je me suis personnellement impliquée. N'oublions pas non plus que trois pôles de compétitivité sont consacrés à l'aéronautique, appuyés par le Fonds unique interministériel, qui a débloqué, au premier trimestre, 40 millions de soutien à projets, auquel s'ajoutent 15 millions en provenance des collectivités locales.

Autant d'éléments qui confirment l'engagement fort du Gouvernement en faveur de cette filière d'excellence

M. Michel Billout.  - Il serait regrettable que ces engagements se traduisent pour des salariés d'un haut niveau de qualification par des difficultés supplémentaires. Ce projet de transfert n'est, hélas !, pas le premier. La filiale Elecma a ainsi été repliée à Villaroche, et les salariés ont dû suivre. Leur fera-t-on subir, avec leurs familles, la contrainte d'un nouveau déménagement à Massy ? Sans même qu'ils sachent quelles tâches leur seront confiées ?

Où est la logique industrielle de ce groupe ? Mais peut-être est-ce précisément sa taille qui pose problème ? En juin 2005, à ma question sur la fermeture du site Snecma moteurs de Villaroche, M. Bertrand répondait déjà, comme vous venez de le faire, que la fusion avec Sagem renforçait la compétitivité du tissu industriel français, que l'État avait à coeur d'accompagner le développement de l'industrie aéronautique et que le soutien à la recherche et au développement représentait une dimension essentielle de la politique industrielle du Gouvernement... Ce que je craignais s'est produit : ces restructurations se sont traduites par une perte des savoir-faire. Sur le site de Villaroche, la Snecma a abandonné, en 2005, le secteur des équipements de satellites alors même qu'elle était le seul partenaire industriel à intervenir dans ce domaine en France. Aujourd'hui, le même scénario se profile.

Taxis de la Réunion

Mme Anne-Marie Payet.  - L'article 18 de la loi de décembre 2000 d'orientation pour l'outre-mer (Loom) prévoit que « dans les départements d'outre-mer, les conditions d'accès à l'activité de transporteur public routier de personnes sont aménagées en ce qui concerne les conditions de capacité professionnelle et de capacité financière pour les artisans exploitant personnellement un seul véhicule, lorsque ce véhicule a une capacité maximale de neuf places, conducteur inclus, ou pour les entreprises qui n'utilisent qu'un seul véhicule de ce type ». Les modalités d'application de cet article devaient être précisées par un décret en Conseil d'État, ce qui n'a pas encore été fait à ce jour. Plus récemment, un protocole d'accord a été signé en mai 2008 par le Gouvernement et différentes fédérations de taxis, qui vise à favoriser le développement quantitatif et qualitatif de l'offre de taxis, en préservant l'équilibre économique de ce secteur et en tenant compte des différences entre zones urbaines, périurbaines et rurales.

Certes, à la Réunion, certains artisans taxis ont été conventionnés avant l'application de ces dispositions mais d'autres attendent encore. Les artisans taxis de la Réunion, ainsi que la chambre des métiers, souhaitent que les engagements pris dans ce protocole soient concrétisés. En effet, son paragraphe 2 propose que les taxis titulaires d'une autorisation de stationnement (ADS) contribuent au transport collectif sans formalités d'inscription au registre des transports lorsqu'ils effectuent du transport régulier ou à la demande, ce qui correspond à l'esprit de l'article 18 de la Loom.

M. Yves Jégo, secrétaire d'État chargé de l'outre-mer.  - Le Gouvernement est attaché au développement de la profession de chauffeur de taxi. Les mesures d'application de l'article 18 de la loi Loom, prises par décret du 11 décembre 2007, ont modifié les conditions d'accès à l'activité de transporteur public routier de personnes en aménageant les conditions de capacité financière et professionnelle, pour les artisans taxis des départements et collectivités d'outre-mer. Elles s'appliquent donc à la Réunion. Pour la capacité financière, la somme a été fixée à 1 000 euros, contre 1 500 en métropole, et la capacité professionnelle a été subordonnée à l'obtention du « certificat de capacité professionnelle », dont les épreuves écrites ont été aménagées, de même que la liste des diplômes admis en équivalence. C'est l'arrêté du 9 juillet 2008 qui a modifié la liste des matières de cet examen, en en supprimant par exemple tout ce qui concerne le transport international.

Ces dispositions s'appliquent à toutes les situations visées à l'article 18 de la loi Loom et j'ai demandé au préfet de la Réunion de communiquer ces informations aux artisans taxis.

Mme Anne-Marie Payet.  - Cette réponse me satisfait. Cependant ma question concernait également les artisans de métropole qui attendent les suites du protocole d'accord de mai dernier. Quand sera-t-il signé ?

M. Yves Jégo, secrétaire d'État.  - Dans les délais les plus courts possible.

Déviation de la RN 19

M. Christian Cambon.  - Pour la cinquième fois en quatre ans, je souhaite interroger le ministre des transports sur l'avenir de la déviation de la RN 19. Cette voie, classée route à grande circulation, est une des radiales les plus importantes de la région parisienne. Au plan départemental, elle dessert le plateau briard. Au plan régional, elle permet les liaisons entre l'autoroute A 86 et la Francilienne, à l'entrée de Brie-Comte-Robert en Seine-et-Marne. Au plan national, elle relie Paris à Troyes. En moyenne, 50 000 véhicules l'empruntent quotidiennement, dont 8 000 poids lourds, dans des conditions d'insécurité et de trafic insupportables pour les Boisséens comme pour les habitants du plateau briard. Outre des embouteillages monstres, on déplore de nombreux accidents : depuis janvier 2008, la portion de la RN 19 qui traverse Boissy-Saint-Léger détient le triste record de quatre tués, ce qui représente le tiers des morts dans le département du Val-de-Marne. Le nombre moyen d'accidents, entre 2003 et 2007, atteint 35 par an, et ce nombre ne baisse pas contrairement aux statistiques nationales.

Ce constat, intolérable, suscite à juste titre, et depuis des années, la mobilisation des populations et de tous les élus, comme en témoignera la question que Mme Terrade s'apprête à poser sur le même sujet. Si rien n'est fait, la situation va encore se détériorer puisque les perspectives de développement du plateau briard et des communes seine-et-marnaises desservies par la RN 19 laissent supposer une augmentation continue de la circulation, que l'on évalue à 80 000 véhicules par jour.

Certes, la déviation de la RN 19 est bien inscrite au schéma directeur de la région Ile-de-France depuis avril 1994, prolongée par une déclaration d'utilité publique en avril 1999, renouvelée en 2006. Le coût estimé de l'opération, inscrite à mon initiative au XIIe contrat de plan État-région 2000-2006 s'élevait à 230 millions; il a été actualisé en 2007 à 260 millions.

Cet aménagement a fait l'objet d'une programmation en deux phases : la première de Boissy-Saint-Léger -tranches nord et sud- à Villecresnes ; la seconde de Villecresnes à Servon. Malheureusement la réalisation complète de l'ouvrage, initialement prévue pour 2010-2011, ne cesse de prendre du retard du fait d'un déblocage trop lent des crédits de paiement qui ne respecte pas les engagements pris par l'État.

Mais voilà qu'une nouvelle inquiétude se fait jour pour les élus : le contrat de projet 2007-2013 ne consacre plus de volet qui permette de financer les infrastructures de la partie sud de la première tranche -tranchée couverte, contournement du centre-ville et ouvrage d'art à l'entrée de Villecresnes. Les travaux de cette première tranche risquent de s'arrêter, rendant totalement inutiles les travaux déjà réalisés en amont et en aval.

Ce n'est pas tout ! La seconde tranche qui prévoit la prolongation du tracée jusqu'à la Francilienne n'a fait l'objet d'aucune évaluation financière ni de déclaration d'utilité publique, ce qui risque de reporter sa réalisation aux calendes grecques ! Or, la déviation de la RN 19 est une et indivisible. La réalisation des deux tranches est nécessaire à la cohérence du projet car il serait scandaleux de voir deux rocades reliées par un barreau d'autoroute arrêté en pleine nature. Or, si l'on ne prend pas les bonnes décisions aujourd'hui, c'est ce qui va arriver !

Les élus des villes regroupées dans l'Association pour l'aménagement de la RN 19, toutes tendances politiques confondues, demandent l'inscription, dans le programme de développement et de modernisation des routes, du financement complémentaire de la première phase pour la réalisation de la partie sud de la déviation de la RN 19 à Boissy-Saint-Léger, évaluée à 140 millions. Ils demandent également de lancer les études de faisabilité de la deuxième tranche depuis Villecresnes jusqu'à la Francilienne et d'amorcer la procédure de déclaration d'utilité publique.

Cela fait quatorze ans que ce projet est en cours, que les déclarations successives des ministres et des préfets nous laissent entendre que les choses vont enfin être débloquées et enfin financées. Combien faudra-t-il encore d'accidents, de blessés et de morts pour que ces engagements deviennent réalité ? Monsieur le ministre, pouvez-vous prendre aujourd'hui, solennellement, et devant les élus présents dans cet hémicycle, des engagements quant aux financements et au calendrier, qui rassurent enfin les élus et les habitants ? A l'heure où le Gouvernement fait de la sécurité routière et de la protection de l'environnement ses priorités, il importe maintenant passer aux actes et de les mettre en conformité avec les engagements.

M. Christian Blanc, secrétaire d'État chargé du développement de la région capitale.  - Je vous prie d'excuser l'absence de Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports, retenu par une réunion européenne des ministres pour la Méditerranée.

Une première tranche de travaux de modernisation de la RN 19 entre Boissy-Saint-Léger et Villecresnes a été inscrite au contrat de plan État-région 2000-2006. Cette inscription a déjà permis de réaliser certains ouvrages nécessaires à la modernisation de cet axe. Bien évidemment, dans les mandats que nous avons donnés aux préfets pour les futurs programmes de modernisation des itinéraires (PDMI), l'achèvement des opérations engagées constitue une priorité. Ces PDMI prendront en 2009 le relais du volet routier des contrats de plan État-région et il semble légitime que la fin de cette première phase y figure en très bonne place.

Cependant, ces décisions ne porteront leurs fruits que dans les prochaines années. C'est pourquoi nous devons rechercher les moyens d'obtenir au plus vite des résultats. D'abord, nous voulons améliorer la sécurité de l'infrastructure actuelle grâce à des reprises de marquage qui seront réalisées dans les prochaines semaines. En outre, une démarche appelée « sécurité des usagers sur les routes existantes » a été initiée pour déterminer ce que nous pouvons faire à très court terme sur cet axe. Le diagnostic de cette démarche sera prochainement présenté aux élus.

S'agissant des travaux plus lourds, toutes les pistes sont recherchées pour mettre en place rapidement les financements nécessaires à l'amélioration de cette section de la RN 19. Une étude sur l'opportunité d'un partenariat public-privé a été lancée. Si elle conclut positivement et si un accord peut être trouvé avec les parties concernées, un tel partenariat permettrait de fixer un calendrier clair et contractuel.

Enfin, concernant les sections entre Villecresnes et la Francilienne, là encore, les financements seront à rechercher dans le cadre des futurs programmes de modernisation des itinéraires pour lesquels les préfets ont été mandatés.

Personnellement, en tant que secrétaire d'État chargé du développement de la région capitale, je ferai dans les prochains mois des propositions pour le schéma général des transports, et j'ai bien entendu votre impatience.

M. Christian Cambon.  - Je ne suis qu'à moitié rassuré. Bien sûr, l'inscription comme priorité de la fin de la première tranche au PDMI est une bonne chose, mais l'aménagement que vous évoquez pour le tronçon Villecresnes-Servon, la deuxième tranche, ne saurait nous satisfaire.

Ce dossier concerne directement le secrétaire d'État à la région capitale que vous êtes. Vous devez comprendre que la région parisienne ne se limite pas au plateau de Saclay et à la Plaine-Saint-Denis. (M. Yannick Bodin approuve) On ne peut pas négliger perpétuellement les habitants de l'Est parisien, dont beaucoup sont contraints d'aller travailler à l'Ouest, et leur imposer des conditions de vie et de transport inacceptables. Nous avons des réalités sociales et d'urbanisme qu'il faut mettre en relation avec les infrastructures de transport !

M. Yannick Bodin.  - Très bien !

Déviation de la RN 19 et transports en commun

Mme Odette Terrade.  - Ma question porte sur le même sujet.

Les difficultés de circulation et d'encombrement de cette route qui relie Paris à la Seine-et-Marne en passant par le Val-de-Marne, avec un accès à la Francilienne, sont connues de longue date. Le trafic y est de 50 000 véhicules par jour, dont 8 000 camions, et devrait atteindre les 80 000 véhicules par jour. Matin et soir, des dizaines de kilomètres de bouchons paralysent la circulation. Le tracé actuel de la RN 19 coupe en deux plusieurs communes, ce qui pose des problèmes de pollution et de sécurité, avec une accidentologie en augmentation quand la tendance nationale est en baisse. La traversée de Boissy-Saint-Léger est particulièrement dangereuse. On y compte 35 accidents en moyenne par an ; depuis janvier 2008, 4 personnes y ont perdu la vie.

Le 22 octobre, les élus des villes concernées, toutes tendances confondues, ont tenu une réunion extraordinaire pour rappeler que la demande de déviation est ancienne, et que leurs concitoyens ne veulent plus être éprouvés par ces drames. Ces travaux urgents, dont l'État a la responsabilité, se heurtent à une logique, celle de l'argent. Les budgets ont été gelés, rendant impossible la réalisation des travaux tant attendus au-delà de ceux dits de la première phase. Les sommes que l'État prévoit d'engager pour 2009 permettront à peine de finir l'échangeur de la Haie Griselle !

Cette déviation est inscrite au schéma directeur de la région Ile-de-France depuis le décret du 26 avril 1994, déclarée d'utilité publique le 16 avril 1999 et prolongée en 2006. Le coût total des travaux est aujourd'hui évalué à près de 300 millions. Seule la première partie, bien trop limitée pour avoir un effet, est en cours de réalisation. Son financement devait être partagé entre l'État et la région mais, étant donné le retard du projet, il n'est plus suffisant et, malgré les sollicitations des élus locaux, aucune annonce n'a été faite par l'État sur l'engagement des fonds nécessaires à la réalisation complète des travaux. Le Gouvernement a créé un PDMI pour remplacer le contrat de plan, mais toujours pas de résultat concret. Si les budgets initialement prévus étaient aujourd'hui pourvus, il faudrait au moins 5 ans pour engager les travaux, et 7 autres pour les réaliser. Ce sont des délais inacceptables.

Parce que le trafic automobile engendre le trafic automobile, il faut aussi penser à la multimodalité de l'offre de transport, laquelle nécessite une cohérence que seul l'État peut apporter, et des investissements que seul le budget de l'État peut assumer. Laisser les communes, les départements et la région se débattre seuls, et refuser les moyens de mettre en oeuvre les travaux nécessaires serait inacceptable pour tous les habitants et leurs élus. Laisser ces travaux à une entreprise privée, avec pour conséquence un éventuel péage, ne serait pas plus acceptable.

Lors du conseil municipal extraordinaire du 22 octobre, des parents de victimes ont dit leur rage de voir que les réponses ne venaient pas, alors que la situation est connue de longue date et que les difficultés qui ont provoqué les drames vécus par leurs familles allaient perdurer.

Quand comptez-vous engager les travaux de la seconde phase ? Quand l'État débloquera-t-il les fonds nécessaires ? Je souhaite également connaître les projets de transports en commun dans ce secteur. Dans quelles conditions pensez-vous associer les maires ?

M. Christian Blanc, secrétaire d'État chargé du développement de la région capitale.  - La première tranche a été inscrite au contrat de plan 2000-2006, ce qui a permis de réaliser un certain nombre d'ouvrages. Dans le mandat donné au préfet, l'achèvement de ces opérations est une priorité. En 2009, les PDMI prendront le relais.

Il y a plusieurs projets de transports en commun : prolongement du trans-Val-de-Marne, transports collectifs en site propre cofinancés par l'État et la région, tramway, deux pôles intermodaux, prolongement de la ligne 8 du métro vers les quartiers sud de Créteil et les quartiers nord de Valenton. Ces transports collectifs de qualité contribueront au désengorgement du réseau routier.

Mme Odette Terrade.  - Ce n'est pas un hasard si vous êtes interrogé de façon convergente des deux côtés de cet hémicycle. (M. Christian Cambon approuve) On compte sur cette route beaucoup trop de blessés et de tués, vous devez comprendre qu'il y a urgence !

Cette route borde un lycée ; en 1999, une mère de famille a écrasé un élève. Désespérée, elle s'est suicidée, imitée par son mari, laissant deux orphelins. De tels drames ne doivent plus se reproduire !

La multimodalité améliorera les choses mais ne saurait suffire pour répondre à l'urgence. Les élus ne « lâcheront pas l'affaire », comme on dit dans les cités.

Drame de Clichy-sous-Bois

Mme Dominique Voynet.  - Je voulais interroger Mme la garde des sceaux sur l'instruction judiciaire relative au décès de deux adolescents dans un transformateur de Clichy-sous-Bois, il y a maintenant trois ans.

Je suis élue d'un département qui, compte tenu de la diversité de sa population, est confronté encore plus que d'autres à la dureté des conditions de vie, et qui donc y ressent encore plus durement les injustices. On ne dit plus « justice de classe », on dit « deux poids, deux mesures ».

On nous parle du zèle avec lequel la police recherche le voleur de la mobylette d'un jeune homme au patronyme honorablement connu, tandis que l'instruction de ce drame est d'une lenteur incompréhensible. Voilà trois ans qu'à la suite de la mort dans un transformateur de jeunes qui n'avaient commis aucune infraction, des violences avaient frappé la Seine-Saint-Denis, les banlieues, les quartiers. Depuis vingt mois, l'ancien juge d'instruction considérait l'instruction comme close mais son successeur a ordonné une nouvelle reconstitution, ce qui retarde l'audiencement de l'affaire. C'est incompréhensible alors que l'on durcit l'arsenal répressif et que la justice est sommée d'agir avec célérité à l'égard des délinquants. Or des mises en examen avaient été prononcées en février 2007. Personne ne comprend que la justice prenne ainsi son temps et nos concitoyens se demandent si l'on n'agit pas moins vite pour des fonctionnaires de police, qui devraient être exemplaires. Les forces de police font-elles exception à la loi et les instructions judiciaires les mettant en cause se déroulent-elles dans les mêmes termes que pour les autres citoyens ? Vous allez me répondre qu'il n'y a pas de manipulation, mais il ne faut plus faire attendre des parents dont la dignité est exemplaire, et qui appellent au calme, servant aujourd'hui encore de médiateurs.

M. Christian Blanc, secrétaire d'État chargé du développement de la région capitale.  - C'est avec gravité que je vais vous répondre. La France est un État de droit, tout le monde y est égal devant la loi et les forces de l'ordre n'échappent pas à cette règle fondamentale.

Je vous rejoins, la justice doit être la même pour tous, en tout point du territoire. C'est le sens de la politique que mène la garde des sceaux. La procédure judiciaire, loin de tout arbitraire, doit respecter le code de procédure pénale. Tout fait dans lequel des fonctionnaires de police sont mis en cause, fait systématiquement l'objet d'une enquête judicaire et, dans ce cas, une information judiciaire est très fréquemment ouverte. Le juge d'instruction la conduit alors en toute indépendance, à charge et à décharge, avec pour seul objectif la manifestation de la vérité. Les investigations sont multiples, elles sont parfois longues. Toutes les parties sont à égalité ; elles peuvent faire valoir leurs droits et demander l'accomplissement de tout acte nécessaire ; elles disposent de voies de recours contre les décisions du juge d'instruction.

La reconstitution à laquelle vous faites allusion a eu lieu le 7 novembre : elle n'a donc pas retardé l'instruction. Ce gouvernement, comme tout gouvernement, respecte l'indépendance du juge d'instruction : si celui-ci a ordonné la reconstitution, c'est qu'il la considérait indispensable. Il fait son travail consciencieusement pour que l'instruction aboutisse prochainement ; il faut respecter la procédure.

Mme Dominique Voynet.  - Le cours de l'instruction n'aurait pas été retardé mais une reconstitution avait déjà eu lieu et le premier juge considérait depuis vingt mois qu'elle pouvait être close et cela avait été validé par la cour d'appel de Paris. C'est dans ces conditions que l'on s'est interrogé.

Plus généralement, il est inacceptable que l'État ne respecte pas ses engagements, qu'il s'agisse de l'emploi des jeunes, du financement de l'Anru, pour lequel on prend sur le 1 % logement, ou des transports en commun : l'on annonce une ligne automatisée pour le plateau de Saclay alors que l'on ne réalise pas le tramway promis à Clichy. Je vous prie de plaider en faveur des habitants de cette ville, non pour des politiques d'exception mais pour que la loi soit la même pour tous !

Formation des maîtres

M. Yannick Bodin.  - Le Gouvernement est en train de réformer la formation et le recrutement des maîtres. Jusqu'à aujourd'hui, les futurs enseignants pouvaient intégrer les instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM) avec la licence ; ils y suivaient une formation théorique la première année puis, après le concours, fréquentaient en alternance un établissement scolaire. Bref, ils recevaient une formation universitaire et professionnelle. La réforme mise en place supprime l'alternance et conditionne le concours à un mastère. Entendons-nous bien : élever le niveau des connaissances est une bonne chose, mais le compagnonnage pendant l'année de stage ne remplacera pas la pédagogie mise en place dans les IUFM : ce qui disparaît, c'est la capacité pour les futurs enseignants d'acquérir les compétences nécessaires à la transmission des savoirs. Lors de la réforme des IUFM, M. Fillon nous avait pourtant promis qu'ils ne seraient pas supprimés... Avec leur fin annoncée et la prise en main de la formation des maîtres par les universités, la dimension professionnelle va être occultée. Aucun stage en responsabilité ne sera obligatoire pour passer le concours et durant le compagnonnage, le nouvel enseignant sera entièrement responsable de sa classe.

L'enseignement est un métier, qui s'apprend, ce que ne garantissent pas les modules mis en place sans harmonisation dans les universités. Comment allez-vous assurer une véritable professionnalisation des nouveaux maîtres ?

M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale.  - La réforme voulue par le Président de la République obéit à des principes incontestables. Il s'agit d'abord d'améliorer le niveau de qualification de nos enseignants, ainsi que les grilles correspondantes -la « mastérisation » est d'ailleurs commune à l'Europe. Deuxième principe, faire confiance aux formateurs. Les IUFM ne disparaissent pas ; nous avons discuté avec la conférence des présidents d'université et avec celle des directeurs d'IUFM ; un texte a été signé entre eux, Mme Pécresse et moi. La formation initiale des étudiants se préparant à l'enseignement sera universitaire et professionnelle ; elle se déroulera dans le cadre de mastères et comprendra des stages d'observation et de pratique accompagnée : les étudiants pourront se familiariser avec leur métier. Il importe qu'ils ne passent pas simplement un concours mais que les épreuves valident aussi une compétence pédagogique et la connaissance du système éducatif, ce qui est de nature à répondre à vos inquiétudes. Les lauréats accompliront un stage la première année, soit en école soit en établissement public local d'enseignement, durant lequel ils bénéficieront, surtout en début d'année, de l'accompagnement d'un professionnel expérimenté. Ils seront titularisés après avoir été inspectés sur leurs compétences professionnelles. Des formations données au sein même de l'éducation nationale complèteront cette formation professionnelle.

Toutes les précautions sont prises afin de garantir l'acquisition des compétences professionnelles et pédagogiques.

M. Yannick Bodin.  - Aucun diplôme universitaire n'a jamais eu valeur de certificat d'aptitude à l'enseignement, l'ancien inspecteur général de l'éducation nationale le sait bien. L'enseignement est un métier et un métier, ça s'apprend. J'observerai donc attentivement ce que l'université est capable de proposer dans ce domaine nouveau pour elle. Je regrette qu'il n'existe plus d'école pour former les enseignants. Il fut un temps où tous les maîtres apprenaient à enseigner l'instruction civique et morale : la République, aujourd'hui, a besoin de former de nouveaux hussards !

Greta ardéchois

M. Michel Teston.  - Monsieur le ministre, quel sera l'avenir du réseau des groupements d'établissements publics locaux d'enseignement (Greta) et notamment des établissements situés en Ardèche, à Aubenas, Privas et Tournon ? Une nouvelle carte du réseau est en préparation dans le cadre de la révision générale des politiques publiques. On envisage des fusions, afin que les établissements atteignent une « taille critique » sur le marché de la formation continue. Ce critère, propre à l'entreprise privée, me paraît ici aberrant.

Une fois encore, le service public abandonne les territoires les plus fragiles. En Ardèche méridionale, territoire où l'emploi est en grande difficulté et où la topographie complique les déplacements, la suppression du dernier organisme public de formation continue aggraverait la situation sociale. Quelles sont les intentions du Gouvernement ?

M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale.  - J'indique, pour vous rassurer, que l'Éducation nationale est très attachée à sa mission de formation continue des adultes, qu'elle exerce depuis près de 40 ans et qui va perdurer. Sa spécificité est d'être autofinancée. Les principaux clients du réseau des Greta sont les régions. Les réseaux doivent évoluer, se montrer réactifs, s'adapter à la diversité des formations demandées, de plus en plus spécialisées et complexes. Regrouper les spécialités et les sièges des Greta afin de leur donner une taille critique est indispensable : on ne peut offrir toutes les formations sur tous les sites ! L'éparpillement et l'émiettement affaibliraient les réseaux.

Vous êtes, en tant qu'élu local, attaché au maillage territorial actuel, nous le sommes aussi. Dans l'académie de Grenoble, le recteur a engagé une réflexion à laquelle il a associé les élus locaux. Je veux lever vos inquiétudes : en Ardèche méridionale, il n'est pas question de réduire le potentiel d'intervention des Greta ni de réduire leurs moyens mais de créer des agences de gestion élargie. Un rapprochement entre le Greta de l'Ardèche méridionale et celui de la Drôme provençale est envisagé, afin de consolider l'offre dans des territoires fragiles et de faire prévaloir une logique de proximité. Ce schéma a déjà été mis en place en Savoie, où les élus semblent satisfaits. L'Éducation nationale ne retirera aucun moyen, notamment pour les postes de conseiller en formation continue. Le siège du Greta devrait demeurer à Aubenas avec, comme établissement support, le lycée Astier. Il s'agit donc d'un renforcement !

M. Michel Teston.  - M. le ministre tient des propos rassurants, mais je redoute qu'il ne s'agisse que d'une première étape, avant la disparition à moyen et long termes de tous les sites de formation continue en Ardèche. Il me semble donc important de conserver la démarche de zones territoriales d'emploi-formation mise en place par la région Rhône-Alpes et de maintenir un Greta par zone.

Creps de Houlgate

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Je m'inquiète pour l'avenir du Centre régional d'éducation populaire et sportive (Creps) de Houlgate. Par courrier du 4 juillet 2008, vous avez fait connaître aux conseils d'administration des Creps votre intention de réorganiser le réseau, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques. Vous avez précisé que vous souhaitiez un réseau « moins étendu mais moderne ». Cette annonce a soulevé bien des inquiétudes ! La remise en cause du principe d'un Creps par région entraînera la disparition des formations diplômantes de proximité et la réorganisation des services.

En Basse-Normandie, le Creps de Houlgate remplit un rôle reconnu sur le plan interrégional -il n'y a pas de Creps en Haute-Normandie- qu'il s'agisse de la formation professionnelle ou des stages. Son sort devait être scellé au début du mois d'octobre mais la décision a été reportée. Les Creps sont dans une situation bien inconfortable, au moment où ils élaborent leurs budgets 2009, en sollicitant les collectivités locales ! Nous avons besoin de connaître l'état de votre réflexion sur la réorganisation du réseau. Quel sera l'avenir du Creps de Houlgate ?

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports, de la jeunesse et de la vie associative.  - Les conseils de modernisation des politiques publiques des 4 avril et 11 juin 2008 ont conclu à la nécessité d'une réforme des établissements publics relevant du ministère de la jeunesse et des sports. Ils ont prescrit un renforcement de la tutelle du ministère sur l'ensemble de ses opérateurs, une redéfinition de leurs missions, une rationalisation de leurs moyens -avec, au besoin, la suppression de certains d'entre eux.

J'ai donc constitué une commission d'experts chargée d'évaluer le rôle des 24 Creps et de présenter les schémas possibles de réorganisation du réseau. Cette commission a rendu son rapport. Mais ce n'est qu'au terme d'une concertation avec les principaux élus, les représentants du mouvement sportif et les responsables des Creps que le ministère fera sur ce sujet une communication -avant la fin de l'année.

Il m'est impossible de vous donner aujourd'hui une réponse sur l'avenir du Creps d'Houlgate. Je vous indique cependant que le principe d'un Creps par région ne sera pas conservé. Au cours de la dernière décennie, le réseau a grossi au-delà du raisonnable. La modernisation de toutes les infrastructures sportives ou d'hébergement est impossible ; seul un réseau resserré permettra d'offrir des équipements modernes à nos athlètes. Le principal critère retenu est la capacité d'un Creps à accueillir des sportifs de haut niveau, y compris en leur assurant la possibilité d'une formation scolaire, universitaire ou professionnelle. Ceci impose la constitution d'établissements pluridisciplinaires les plus modernes.

Dans la perspective des Jeux Olympiques de Londres, la réorganisation du réseau des Creps sera opérée en cohérence avec les décisions concernant l'Institut national du sport et de l'éducation physique (Insep) et les filières du haut niveau, qui seront elles aussi resserrées au profit des sportifs d'élite.

Il convient également de bien identifier les secteurs dans lesquels l'État est le seul habilité à dispenser des formations, ceux déjà ouverts à la concurrence dont il devra progressivement se désengager et ceux dans lesquels la présence d'autres opérateurs est encore insuffisante.

Enfin, dans le cas où des établissements devraient être fermés, soyez assuré, monsieur le sénateur, que de telles mesures n'interviendront qu'au terme d'une concertation avec les élus, pour que le niveau sportif et l'offre de formations aux métiers du sport et de l'animation se maintiennent au meilleur niveau, de même que la plus grande attention sera apportée au reclassement du personnel des Creps.

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Vous laissez subsister le doute, mais je note que vous annoncez une concertation. J'espère qu'elle interviendra dans les meilleurs délais. Vous ne souhaitez pas un Creps par région, mais celui dont je vous parle est très utile localement, le territoire comprend du sport de haut niveau, en particulier pour la voile, et la Fédération français de tir à l'arc y organise ses stages. Sa disparition serait désastreuse pour notre région, les sportifs devraient alors se tourner vers la Bretagne ou vers le Nord, confirmant que la Normandie se situe dans « le triangle de l'oubli ». Et n'oubliez pas que nous sommes proches de l'Angleterre des prochains Jeux Olympiques ! Nous attendons donc beaucoup de la concertation !

Avenir de la gynécologie médicale

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Mme Demontès m'a demandé de poser cette question, que je fais volontiers mienne.

Distincte de la gynécologie-obstétrique qui est dédiée à la chirurgie et aux accouchements, la gynécologie médicale prend en charge l'ensemble des problèmes gynécologiques et médicaux des femmes tout au long de leur vie, notamment les traitement hormonaux, la prévention et dépistage des cancers génitaux et mammaires, l'éducation, la prévention, le dépistage et le traitement des MST, l'infertilité du couple, la contraception et les problématiques liées à la sexualité. La gynécologie médicale est donc très importante, on lui doit notamment que la France compte un taux d'hystérectomies de 6,7 % contre 40 % aux Etats-Unis, ou encore qu'en matière de cancer du sein, 80,5 % des victimes survivent contre 69 % en Angleterre et 65 % au Canada. Féminisée à 88 %, et présentant une fort déséquilibre démographique puisque la majorité des effectifs est âgée de 47 à 60 ans, cette spécialité éprouve les plus vives inquiétudes quant à son devenir.

Depuis 2003, les moyens qui lui sont alloués diminuent continuellement. Contrairement aux engagements de M. Douste-Blazy, seuls 20 postes d'internes ont été ouverts, sur les 60 annoncés il y a quatre ans. Aucun enseignant n'a été nommé à l'université depuis deux ans, ni de chefs de cliniques, qui sont trop peu nombreux pour encadrer les internes en stage.

Monsieur le ministre, pourriez-vous rassurer les femmes de notre pays, leur garantir que la gynécologie médicale demeurera une consultation de premier recours ? Le nombre de postes à l'université comme en clinique va-t-il s'accroître ? Comment le Gouvernement compte-t-il améliorer la répartition géographique de ces spécialistes ?

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports, de la jeunesse et de la vie associative.  - Les deux mille gynécologues médicaux que compte notre territoire sont très inégalement répartis : leur densité passe de 0 à 20 pour 100 000 femmes selon les départements, ils sont plus de 260 à Paris mais la Lozère et Corse du sud n'en comptent aucun.

Le suivi des femmes pour les problèmes gynécologiques, la contraception, la prévention et le dépistage ne relève pas des seuls gynécologues médicaux. Les médecins généralistes et les gynécologues obstétriciens assurent également cette prise en charge, chacun dans son champ de compétence.

S'y ajoutent également les centres de planification et d'éducation familiale, qui dépendent des conseils généraux et qui participent à la prise en charge de femmes en situation difficile : ils ont réalisé l'an passé environ 700 000 examens cliniques.

Les études de l'assurance maladie font observer qu'au-delà de la pratique des 2 000 gynécologues médicaux, environ 1 800 gynécologues obstétriciens ont abandonné leur activité chirurgicale et d'accoucheur pour réaliser uniquement des consultations médicales et prennent donc des patientes en charge. D'autres encore ont une activité partagée.

Le nombre de professionnels se consacrant à la santé des femmes n'est donc pas en baisse et, s'agissant de la prise en charge du cancer du sein, la ministre de la santé a montré récemment son attachement à une politique de prévention et d'information qui s'appuie sur tous les professionnels de santé.

La spécialité de gynécologie médicale qui est enseignée aujourd'hui a changé de sens, elle forme des spécialistes de haut niveau sur la pathologie endocrinienne et tumorale gynécologique ainsi que sur la fertilité. Une partie du cursus est partagé avec les gynécologues obstétriciens. Pratiquement tous ces spécialistes se destinent à un exercice hospitalier très particulier. Cette filière repensée offre des débouchés hospitaliers plus restreints, ce qui explique que le nombre de postes soit davantage limité. Pour autant, le nombre de gynécologues de ville ou de praticiens se consacrant à la santé des femmes n'est pas en baisse, du fait des transferts d'activité, de l'obstétrique notamment.

Le numerus clausus des études médicales a été progressivement relevé et il y aura, en 2011, plus de 7 000 internes supplémentaires qui se repartiront dans les différentes spécialités.

Enfin, la loi « hôpital, patient, santé, territoire » prévoit de favoriser une meilleure répartition géographique des postes d'internes, selon les spécialités et en fonction des besoins de chaque région. Mme Bachelot-Narquin entend voir corriger les différences de répartition que vous évoquez.

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Nous en débattrons effectivement dans la loi « hôpital, patient, santé, territoire » : il ne suffit pas d'augmenter le numerus clausus, encore faut-il améliorer la répartition géographique des médecins.

Commission nationale de déontologie de la sécurité

M. Jean-Claude Peyronnet.  - Les membres non parlementaires de la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) perçoivent une indemnité mensuelle de 170 euros pour un travail qui peut représenter jusqu'à un mi-temps, alors que le commissaire du Gouvernement, qui n'a pas d'auditions à réaliser, perçoit 1 500 euros mensuels. L'an passé, il avait été demandé le doublement de l'indemnité ainsi attribuée pour ce travail de qualité, confié à des personnalités de haut rang comme des conseillers d'État ou des conseillers à la Cour de cassation en retraite : 300 euros, ce serait encore modeste, quand les 170 euros actuels sont une aumône humiliante. Le ministre des relations avec le Parlement a cependant répondu, à l'Assemblée nationale, par une fin de non-recevoir, laissant penser, par le ton, que ces messieurs retraités du Conseil d'Etat, de la Cour des comptes ou de la Cour de cassation, étaient suffisamment bien pensionnés. Il serait plus simple, dans ce cas, de dire que cette activité est bénévole !

La réponse de M. Karoutchi -mais probablement allez-vous nous lire la même, monsieur le secrétaire d'État- pouvait laisser croire que les parlementaires membres de la CNDS, deux sénateurs et deux députés, percevaient également une indemnité : il n'en est rien, ces parlementaires ne perçoivent pas et ne demandent pas à percevoir d'indemnité.

Le Gouvernement s'apprête à diminuer le budget des autorités administratives indépendantes, notamment de la CNDS. Monsieur le secrétaire d'État, que fera le Gouvernement si le Sénat s'oppose à une telle diminution ?

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports, de la jeunesse et de la vie associative.  - Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord d'excuser l'absence de M. Woerth, qui m'a chargé de vous répondre.

La création, fin 2007, d'un poste de commissaire du Gouvernement a été l'occasion pour le président de la CNDS de solliciter une revalorisation de l'indemnité des membres de la Commission, qui est en effet fixée à 170 euros par mois depuis 2006. La CNDS étant composée de parlementaires, de magistrats expérimentés, ainsi que de personnalités qualifiées désignées par les autres membres de la Commission, la revalorisation de leur indemnité n'est pas apparue jusqu'ici comme une priorité. Toutefois, pour tenir compte de l'augmentation réelle de la charge de travail de la Commission, le Gouvernement est favorable à ce que le montant de ces indemnités soit réévalué dans la proportion que vous indiquez. En outre, il paraît justifié de mettre en place une indemnité spécifique pour les membres chargés d'examiner des dossiers dont l'instruction, particulièrement délicate, nécessite plusieurs auditions. Des projets de textes sont en cours d'instruction et devraient être prêts avant la fin de l'année.

M. Jean-Claude Peyronnet.  - J'étais pessimiste, mais vous m'apportez du baume au coeur s'agissant de la revalorisation.

Cependant, je veux attirer l'attention de M. le président, sur le fonctionnement même des séances de questions orales.

Elles sont l'occasion d'une ébauche de dialogue, qui ne prend toutefois tout son sens que lorsque le ministre qui intervient est celui auquel s'adresse la question. Je comprends que les ministres ne soient pas systématiquement disponibles, mais leur tendance à se faire remplacer s'aggrave. Je vous demande, monsieur le président, de saisir le président Larcher et la Conférence des Présidents, afin qu'il soit rappelé aux membres du Gouvernement qu'ils doivent venir répondre, autant qu'ils le peuvent, aux questions des parlementaires. Il y va du respect du Parlement et peut-être du renforcement de ses droits.

M. le président.  - Je vous donne acte de vos propos qui seront transmis dès demain à la réunion du Bureau.

Violences au sein du couple

M. Roland Courteau.  - Les violences intrafamiliales et au sein du couple ont causé en 2006 la mort de 137 femmes, 31 hommes, 11 enfants et 3 témoins ; elles ont en outre entraîné 46 suicides. Une femme meurt de violences conjugales tous les trois jours. En deux ans, près de 410 000 femmes ont déclaré avoir été victimes de violences physiques, étant précisé que, selon des sources sérieuses, toutes les victimes de violences n'osent pas les déclarer, loin de là. C'est dire l'ampleur du phénomène.

La loi du 4 avril 2006, votée à l'unanimité au Sénat comme à l'Assemblée nationale, a fait suite à la proposition de loi que j'avais déposée ici avec le soutien du groupe socialiste et de Mme André, ancienne ministre aux droits des femmes. Ce texte, que certains auraient une fâcheuse tendance à oublier, a introduit le principe de l'aggravation de la peine et l'extension de la circonstance aggravante aux anciens conjoints, concubins et partenaires pacsés, renforcé la lutte contre les mariages forcés, porté l'âge légal du mariage à 18 ans pour les filles, défini des mesures d'éloignement de l'auteur de violences, reconnu le vol entre époux, fait du viol au sein du couple une infraction pénale et prévu la prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique de l'agresseur.

L'article 13 de cette loi stipule en outre que le Gouvernement doit déposer tous les deux ans sur le bureau des assemblées parlementaires un rapport sur la politique nationale de lutte contre les violences au sein du couple. Ce rapport aurait dû être déposé le 4 avril 2008 ; il ne l'a pas été. D'après mes informations, nous manquerions de places d'accueil, notamment pour les situations d'urgence. C'est très grave. Quid en outre de la réinsertion sociale des victimes ou des modalités de prise en charge des auteurs de violences, en complément des mesures d'éloignement, afin de prévenir le risque de récidive ?

Quand aurons-nous connaissance des politiques mises en oeuvre par le Gouvernement ? Quand aurons-nous son rapport ?

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports, de la jeunesse et de la vie associative.  - Je vous prie de bien vouloir excuser M. Xavier Bertrand. Le rapport que vous demandez sera déposé d'ici la fin de l'année 2008 ; il s'appuiera sur le rapport d'évaluation du premier plan 2005-2007 de lutte contre les violences faites aux femmes, remis aux ministres concernés le 1er juillet 2008 et présenté à la Commission nationale de lutte contre les violences envers les femmes le 1er octobre dernier.

Cette évaluation a notamment relevé une amélioration de la connaissance du phénomène et de ses grandes tendances : les violences intrafamiliales subies par les femmes augmentent plus vite, de 24 %, que l'ensemble des violences aux personnes, 7 % ; on constate aussi une augmentation des décès au sein du couple et une révélation des violences subies en hausse de 8 %. L'outil reste toutefois perfectible, notamment en raison de l'absence de statistiques sexuées et d'études d'impact ciblées en nombre suffisant.

Dans le champ de la prévention, les progrès sont indéniables ; des circulaires et guides méthodologiques ont été publiés, les dossiers sont traités en temps réel par les parquets, les enquêtes sociales sont lancées plus rapidement, des magistrats référents ont été nommés pour centraliser les affaires de violences conjugales.

Il est en outre indispensable de mobiliser l'ensemble de la société à travers des campagnes d'information : le Gouvernement a lancé une nouvelle campagne d'affichage en octobre 2008.

Enfin, la coordination, la formation et la professionnalisation des acteurs s'améliorent afin de mieux prendre en charge les femmes victimes.

Toutes les informations recueillies permettront de réorienter au mieux l'action du Gouvernement, sachant que certaines préconisations sont déjà prises en compte dans le deuxième plan 2008-2010, notamment le développement de la prise en charge des auteurs de violences, une meilleure prise en compte des enfants exposés aux violences conjugales, et la mise en place d'un tableau de bord de suivi. Comme vous le voyez, le Gouvernement reste fortement mobilisé.

M. Roland Courteau.  - Je vous remercie de votre réponse.

Fièvre catarrhale ovine

M. René-Pierre Signé.  - Permettez-moi de regretter l'absence de M. Barnier.

Je souhaite attirer son attention sur la probable extension de la fièvre catarrhale ovine (FCO) à sérotype 1, qui fait craindre le pire à des éleveurs qui commencent à peine à se remettre des dégâts causés par le sérotype 8. Ils éprouvent déjà de grandes difficultés à payer leurs emprunts et leurs charges et devront, dans l'attente de la délivrance des vaccins, garder et nourrir plus longtemps leurs broutards -avec des frais supplémentaires. Le plan d'aide annoncé par M. Barnier, à hauteur de 50 millions d'euros, est très décevant, qui ne comporte que des reports de crédits, des prêts bonifiés ou la mobilisation de reliquats de droits à paiement unique.

Les éleveurs lancent par ma voix un cri d'alarme, d'autant que la fièvre catarrhale ovine peut muter, ce qui rend inopérantes les vaccinations antérieures. Qu'entend faire le Gouvernement pour leur venir en aide, tant au plan national qu'européen ?

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports, de la jeunesse et de la vie associative.  - Je vous prie d?excuser M. Barnier, qui prépare actuellement le conseil des ministres de l'agriculture qui devrait conclure les négociations dans le cadre du bilan de santé de la Pac.

Les éleveurs sont en effet confrontés à une situation de crise sanitaire sans précédent avec la fièvre catarrhale ovine et l'extension depuis l'Espagne de son sérotype 1. A ce jour, le ministère de l'agriculture et de la pêche a déjà utilisé sur l'ensemble du territoire plus de 50 millions de doses vaccinales contre le sérotype 8. Ce plan massif de vaccination, dont les éleveurs français ont été les premiers à bénéficier en Europe, a permis de protéger une forte proportion du cheptel. Pour la campagne 2009, M. Barnier a décidé la vaccination obligatoire et simultanée, entre décembre et avril, de l'ensemble des animaux pour les deux sérotypes 1 et 8 ; deux appels d'offres ont été lancés afin de disposer des doses nécessaires. La livraison des vaccins sera réalisée au prorata du nombre de têtes de cheptel dans chaque département.

Les vingt départements où les animaux ont été vaccinés contre le sérotype 1 de manière obligatoire seront servis dans un deuxième temps.

Pour la filière bovine, on a également décidé un plan de vaccination pour les animaux destinés aux échanges afin de réduire la période de blocage des exportations.

En outre, à la demande de la France, la Commission a proposé de porter de 60 à 160 millions le cofinancement communautaire de la vaccination.

Enfin, M. Barnier travaille à faciliter les conditions de sortie des animaux destinés aux échanges et qui ont été vaccinées de manière préventive. Un accord vient d'être signé avec l'Italie selon lequel les animaux vaccinés contre les sérotypes 1 et 8 pourront être expédiés en Italie après la deuxième injection, ce qui permettra de gagner 60 jours, et les animaux non vaccinés ou vaccinés contre un seul sérotype pourront être expédiés sans contrainte entre mi-décembre et début janvier.

Cet accord étant signé, la date de la campagne de vaccination massive sur le territoire national sera fixée sous peu et une réunion est prévue en ce sens au ministère mercredi matin avec les organisations professionnelles. Le calendrier de mise à disposition des vaccins sera adressé aux préfets et aux organisations professionnelles. La vaccination simultanée contre les sérotypes 1 et 8, qui sera obligatoire, aura lieu durant l'hiver pour se terminer au plus tard le 30 avril.

Parallèlement, pour soutenir les éleveurs durement touchés par la fièvre catarrhale ovine, M. Barnier a annoncé 30 millions supplémentaires, en sus des 186 millions débloqués pour cette crise et confirmé, lors de la réunion du comité de suivi de la fièvre catarrhale ovine du 3 novembre, que l'aide d'urgence au maintien des animaux serait revalorisée de 20 à 30 euros pour les bovins de 5 à 16 mois et de 10 à 15 euros pour les veaux, dans les départements touchés par le sérotype 1 entre le 1er juillet et le 31 octobre -l'acompte sera versé avant fin 2008. Par ailleurs, sera mise en place une aide générale à l'engraissement, dotée de 5 millions, pour toutes les zones du 1er novembre au 28 février 2009. Enfin, M. Barnier souhaiterait que l'on étudie la création d'une aide au maintien des animaux pour accompagner les départements qui changeront de statut sanitaire à mesure de la vaccination contre le sérotype 1.

La mobilisation du Gouvernement est donc entière pour aider l'agriculture pour laquelle M. Barnier, à l'occasion d'une conférence hier, a annoncé un plan global de 250 millions.

M. le président.  - Voilà une réponse fort détaillée... (Sourires)

M. René-Pierre Signé.  - ... et j'en remercie le Gouvernement. Toutefois, nonobstant les promesses et les mesures prises, je crains que cela soit insuffisant. Par exemple, les propriétaires de troupeaux mixtes n'étant pas indemnisés, puisque le cheptel doit compter au moins 100 brebis et représenter 30 % du chiffre d'affaires, certains départements, dont celui de la Nièvre, ont dû prendre des mesures spécifiques. Par ailleurs, on ne commence à mesurer que maintenant toutes les conséquences de l'épizootie -je pense aux malformations et aux avortements. Bref, les mesures prises sont intéressantes, mais toutes consistent en des reports de charges. Or, un jour, il faudra bien payer ! Ce que demandent les éleveurs, c'est une réévaluation de la prime à la brebis de 30 euros pour la porter à un niveau comparable à celle versée pour les bovins.

Il faut plus que jamais soutenir ce secteur alors que les aides de la Pac diminuent, que dans le Morvan, les éleveurs perdent 20 000 euros par an pour une exploitation moyenne, m'a-t-on dit, et que l'élevage a perdu 5 millions d'hectares de prairies en France. M. Barnier doit faire davantage pour maintenir cette profession, qui joue un rôle essentiel aux plans économique et écologique et constitue une vivante tradition pastorale et agreste dans le Massif central, sur des territoires qui sont déjà pauvres et qui subissent de plein fouet tous les aléas de la ruralité, comme la fermeture des services publics !

M. Roland Courteau.  - Très bien !

La séance est suspendue à midi dix.

présidence de Mme Catherine Tasca,vice-présidente

La séance reprend à 15 heures.