Valorisation des produits agricoles, forestiers ou alimentaires et des produits de la mer
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi ratifiant l'ordonnance du 7 décembre 2006 relative à la valorisation des produits agricoles, forestiers ou alimentaires et des produits de la mer.
Discussion générale
M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche. - Je me réjouis de prendre pour la première fois la parole en tant que ministre de l'agriculture dans cette assemblée à laquelle j'ai eu l'honneur d'appartenir il y a quelques années.
La loi d'orientation agricole du 5 janvier 2006 -que le Sénat et notamment son rapporteur, M. César, ont grandement contribué à améliorer- a jeté les bases d'une réforme de notre dispositif de valorisation des produits agricoles et agroalimentaires qui était fort ancien.
En effet, la France a inventé le concept d'appellation d'origine il y a plus d'un siècle. Elle a contribué de manière essentielle à ce que les démarches de qualité soient reconnues par la réglementation communautaire. Les appellations d'origine protégées, les indications géographiques protégées, l'agriculture biologique et, au plan national, le label rouge sont désormais considérés comme des instruments essentiels pour la valorisation des produits. Nul doute que ce succès a contribué au développement des territoires, que vous représentez. Vous pardonnerez à l'élu de la montagne que je suis de penser plus particulièrement aux appellations d'origine fromagères dont j'ai pu mesurer la vitalité en me rendant dernièrement à l'assemblée générale des appellations d'origine fromagères et laitières à Aurillac.
Toutefois, l'ancienneté de l'expérience française n'a pas que des avantages. L'empilement des règles, la multiplication des structures, l'explosion des démarches de caractère privé introduisaient une certaine confusion pour le consommateur et nuisaient à la cohérence du dispositif. C'est pourquoi, la loi a défini trois catégories d'instruments de valorisation des produits agricoles et agroalimentaires : les signes d'identification de la qualité et de l'origine -appellation d'origine, indication géographique protégée, label rouge, agriculture biologique, spécialité traditionnelle garantie-, les mentions valorisantes telles que « produit fermier » ; la démarche de certification.
Cette nouvelle organisation rendait nécessaire l'adaptation de notre dispositif législatif et réglementaire. Ce fut chose faite avec l'ordonnance du 8 décembre 2006 et son décret d'application du 7 janvier 2007. Cette ordonnance poursuivait un triple objectif. Premièrement, fixer les nouvelles règles en étroit partenariat avec les organisations professionnelles concernées et en association avec le Parlement.
De nombreuses rencontres ont été tenues dans ce but, tandis que votre commission des affaires économiques, et tout particulièrement le sénateur César, rapporteur du projet de loi d'orientation agricole, était tenue informée de l'avancement des travaux.
Il fallait aussi clarifier le nouveau dispositif en le rendant plus lisible et en confortant sa crédibilité auprès du consommateur, ce qui a nécessité de renforcer l'appropriation par les professionnels de leurs démarches de qualité et, également, de renforcer les contrôles.
Enfin, il fallait simplifier nos procédures sans atténuer, évidemment, leur sérieux. Mais cet enjeu doit surtout s'inscrire dans le fonctionnement des instances chargées du suivi de nos démarches « qualité » et, particulièrement, dans celui de l'Institut national de l'origine et de la qualité (INAO). C'est pourquoi, j'ai souhaité que cet impératif de simplification soit inscrit de manière prioritaire dans le contrat d'objectifs pluriannuel de l'Institut que je signerai dans les prochaines semaines.
L'ordonnance dont je vous propose la ratification consacre une part prédominante de ses développements aux signes d'identification de la qualité et de l'origine. Pour les mentions valorisantes, il s'est agi, pour l'essentiel, d'adapter le dispositif existant : nous simplifions la démarche de certification de conformité, en substituant à un régime d'autorisation administrative, un régime déclaratif.
S'agissant des signes d'identification de la qualité et de l'origine, l'ordonnance met en oeuvre trois grands principes.
Premier principe : regrouper le suivi de ces démarches au sein d'un seul établissement : l'Institut national de l'origine et de la qualité (INAO). Dans le système précédent, la commission nationale des labels et certification des produits agricoles et agroalimentaires exerçait également une compétence en la matière. L'INAO regroupe en son sein depuis le premier janvier 2007 tous les signes d'identification de la qualité et de l'origine, dont le suivi est assuré par des comités thématiques composés de représentants professionnels, de personnalités qualifiées et de délégués des consommateurs. Afin de favoriser un enrichissement mutuel des différents porteurs de signes, chaque comité accueille des représentants des autres comités. Un conseil des agréments et contrôles traite des questions transversales. Enfin, un conseil permanent est chargé de l'administration de l'Institut et des questions générales concernant la politique des signes d'identification de la qualité et de l'origine. Nous avons maintenu au sein du nouvel établissement deux originalités de l'ancien institut national des appellations d'origine : la désignation intuitu personae des membres des comités, afin de garantir à la fois leur expertise et leur indépendance, et le rôle de proposition des textes confié aux comités de l'Institut.
Deuxième principe : conforter le rôle et les missions des structures chargées de gérer les cahiers des charges. En effet, à l'origine d'une démarche « qualité » il y a toujours, sauf pour l'agriculture biologique, une réflexion collective engagée par un groupe de producteurs désireux de valoriser ensemble un patrimoine auprès des consommateurs, dans l'espoir d'une reconnaissance par ces derniers. Ces producteurs conçoivent dans ce but un cahier des charges destiné à fixer les contraintes de production qu'ils vont s'imposer pour obtenir un label public. Ils s'assurent ensuite de sa mise en oeuvre dans des conditions garanties et de son évolution. Il importe donc que tous les professionnels impliqués dans ces démarches soient associés à la conception et à la gestion de ces cahiers. C'est pourquoi l'ordonnance prévoit de conférer un statut aux « organismes de défense et de gestion » (ODG) des différents signes, dont tous les producteurs concernés sont membres de droit, même si le texte prévoit une spécificité viticole. Ces ODG sont reconnus par l'INAO dés lors que leur représentativité est assurée et que le caractère démocratique de leur fonctionnement a été vérifié. A ce jour, la quasi intégralité des ODG a fait l'objet d'une reconnaissance par l'INAO.
Troisième principe : conforter la crédibilité des contrôles. C'est là le coeur de la réforme car une démarche « qualité » ne pourra être vraiment reconnue par le consommateur que si ce dernier est certain que des contrôles indépendants ont permis de vérifier la conformité des produits proposés avec les cahiers des charges : en clair, que les mentions « label rouge », « appellation d'origine », « indication géographique protégée », « agriculture biologique » tiennent leurs promesses...
Cet enjeu essentiel conduit à exiger désormais que tous les signes d'identification de la qualité et de l'origine fassent l'objet de contrôles menés par des organismes tiers, compétents, indépendants et impartiaux. Cette évolution est déjà concrétisée pour le label rouge, l'IGP et l'agriculture biologique. Elle le sera au plus tard au 1er juillet 2008 pour toutes les appellations d'origine.
Les professionnels sont convaincus de l'importance d'une telle évolution. En même temps, ils appréhendent ses conséquences prévisibles en matière de coûts de contrôle. C'est pourquoi, l'ordonnance propose un délai qui devra être utilisé pour mettre en place des règles garantissant l'équité de traitement pour l'agrément par l'INAO des organismes de contrôle et pour l'approbation des plans de contrôle.
De même, l'INAO fera preuve de pédagogie auprès des opérateurs pour accompagner leurs démarches en ce domaine. Enfin, en liaison avec les fédérations professionnelles, des réflexions devront être conduites sur les moyens de réduire les coûts -mutualisation, économies d'échelle....
Au-delà, il conviendra sans doute d'inscrire nos signes d'identification de la qualité et de l'origine, dans de véritables démarches de progrès destinées à conforter toujours plus leur compétitivité sur les marchés et à satisfaire le consommateur. C'est ce que nous prévoyons, notamment, en matière viticole, dans le cadre de la réflexion conduite au sein de l'Institut et visant à adapter les cahiers des charges et à mettre en place une nouvelle segmentation de l'offre viticole. En particulier, la disposition introduite dans le projet de loi de ratification et visant à supprimer à terme les « appellations d'origine vin délimité de qualité supérieure » (AOVDQS), très anciennes et mal adaptées au contexte actuel du marché vise cet objectif. Les professionnels concernés seront invités à opter soit pour une qualification « vin de pays », soit pour une démarche de reconnaissance en appellation d'origine contrôlée.
Dans le même esprit, les travaux du Grenelle de l'environnement ont mis en évidence l'importance de l'enjeu environnemental pour nos signes d'identification de la qualité et de l'origine. Plusieurs d'entre eux contribuent déjà, par exemple, à la préservation et au maintien de notre patrimoine paysager notamment en zone de montagne. J'approuve pleinement les ODG qui le souhaitent à fixer, à côté des cahiers des charges proprement dits, des prescriptions environnementales de nature à conforter leur ancrage dans nos territoires et en faveur du développement d'une agriculture durable.
Telles sont les raisons qui me conduisent à vous proposer d'adopter ce projet de loi. Je vous remercie, monsieur le rapporteur, du travail de réflexion que vous avez conduit et que votre commission a mené. Je suis évidemment disposé, chaque fois que possible, à examiner avec bienveillance les amendements éventuels que vous pourriez proposer. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Benoît Huré, rapporteur de la commission des affaires économiques. - Les signes valorisant la qualité et l'origine des produits agricoles et alimentaires bénéficient d'un engouement croissant auprès de nos concitoyens : plus un rayon de supermarché où l'on ne puisse acheter un fromage ou un vin AOC, un poulet label rouge ou encore un fruit ou un légume provenant de l'agriculture biologique. Cette évolution tient au fait que les préoccupations liées au goût, à la sécurité et à la préservation des savoir-faire et du patrimoine gastronomique prennent une place prééminente. Elle permet, en outre, de renforcer économiquement la partie la plus qualitative de notre agriculture, et de contribuer à un aménagement équilibré et durable du territoire.
Si la demande de signes de valorisation existe donc, l'offre ne paraît plus à la hauteur des attentes légitimes des consommateurs, de plus en plus désemparés devant la multiplication de ces signes, créés à des époques, à des échelons et selon des logiques différentes, sans qu'aucun travail de clarification n'ait jamais été mené. Peu lisibles du fait de leur inflation et de leur complexité, les signes de valorisation sont désormais, pour certains du moins, peu crédibles aux yeux du grand public. Une récente enquête de Que choisir ? concluait qu'une partie importante des vins classés en AOC ne méritait pas ce signe. Elle dénonçait aussi la partialité des organismes de contrôle, étroitement liés à ceux gérant les signes. Enfin, il était devenu nécessaire de mettre tous ces signes d'identification en concordance avec le droit communautaire, qui fixe de façon très précise le cadre de leur régime depuis quelques années.
Renforcer la lisibilité de ces signes, accroître leur crédibilité et garantir leur « eurocompatibilité », tels étaient les trois impératifs pour leur conserver leur renommée et leur valeur. Tel est également l'objectif que nous avons fixé au Gouvernement, lors du vote de la dernière loi d'orientation agricole, début 2006. Il était en effet indispensable que cette réforme donne lieu à la consultation de tous les acteurs intéressés. Parlementaires, professionnels et administration ont donc travaillé de concert, pour aboutir à l'ordonnance du 7 décembre 2006 que ce projet de loi se propose de ratifier.
Cette vaste réforme du système français de valorisation peut être synthétisée autour de quatre grands piliers.
Premier pilier, structurer les nombreux signes de valorisation autour de trois catégories principales : d'abord les signes d'identification de la qualité et de l'origine qui valorisent soit une qualité supérieure -label rouge-, soit une qualité liée à la tradition appellation -spécialité traditionnelle garantie (STG)- ou à l'origine -appellation d'origine contrôlée (AOC), appellation d'origine protégée ou indication géographique protégée (IGP)-, soit une qualité environnementale (agriculture biologique (AB) ; ensuite les mentions valorisantes -« montagne », « fermier », « produits de pays », « vins de pays »... ; enfin, les démarches de certification des produits qui reposent sur des démarches internes à des entreprises et, en tant que telles, ne relèvent pas de l'INAO.
Deuxième pilier : la création d'un Institut national de l'origine et de la qualité (INAO), structure « tête de réseau » prenant la place de l'ancien Institut national des appellations d'origine. Cet INAO nouvelle formule a un rôle central : il encadre tous les signes d'identification de la qualité et de l'origine. Il est pour cela composé de comités nationaux par filières et types de signes, où est représentée chaque catégorie d'opérateurs. Il possède par ailleurs un conseil des agréments et contrôles, qui supervise le contrôle, par les organismes privés, de tous les signes pour lesquels il est compétent.
Troisième pilier : la mise en place d'organismes de défense et de gestion (ODG), qui se substituent aux multiples structures existant auparavant. Représentatifs des différentes catégories d'opérateurs, ils mettent au point et gèrent les cahiers des charges des signes de qualité et d'origine, après avoir été reconnus par l'INAO.
Quatrième et dernier pilier : le renforcement des structures et procédures de contrôle. Afin de mettre fin aux critiques sur l'impartialité des contrôles, ceux-ci ne sont plus confiés aux opérateurs eux-mêmes, mais à des organismes tiers, indépendants et impartiaux, accrédités et contrôlés par l'INAO : les organismes d'inspection et de contrôle.
Ce nouveau dispositif recueille l'assentiment général de l'ensemble de ses acteurs et devrait rassembler au-delà des clivages politiques. Il ne saurait donc être question aujourd'hui de le remanier profondément, mais simplement de procéder aux quelques corrections dont l'expérience a démontré la nécessité. Tel est l'objet des cinq amendements adoptés en commission. Le premier est rédactionnel, le deuxième proroge de deux années le mandat des assesseurs aux tribunaux paritaires des baux ruraux, le troisième tend à restaurer, pour les labels rouges, un lien entre qualité et origine, le quatrième permet à l'INAO de prendre des mesures communes pour l'ensemble des labels rouges, comme c'est déjà le cas pour les appellations d'origine, et le cinquième adapte les dates d'entrée en vigueur de l'article 2.
Ce projet de loi renforce l'assise juridique du dispositif français des signes de valorisation ; il est accueilli favorablement par la très grande majorité des professionnels. Dans l'intérêt des consommateurs, des opérateurs et, plus largement, de l'image de la « ferme France » à l'étranger, j'espère qu'il fera l'objet d'une adoption très consensuelle. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Aymeri de Montesquiou. - La valorisation est une question centrale pour l'agriculture. Elle est la réponse majeure de la France à la mondialisation. En effet, les rapports de force dans le secteur agricole sont fortement déséquilibrés. Quand on considère l'écart entre la surface agricole utile du Brésil -220 millions d'hectares- et celle de la France -30 millions d'hectares- on comprend l'intérêt que nous avons à développer des productions hautement qualitatives. Notre pays doit absolument structurer très solidement sa politique de qualité, pour résister à des concurrences terribles. Prenons l'exemple du vin. Les critiques à l'égard des trop complexes AOC se multiplient, car les vins tricolores n'ont plus le monopole du marché. Les breuvages chiliens, californiens ou australiens séduisent, à grand renfort de marketing, de nouveaux consommateurs, ravis qu'on leur simplifie la vie en mettant en avant le seul cépage.
A l'étranger, même s'ils conservent une très bonne image, nos vins ont perdu des parts de marchés -notamment sur le marché américain. La France compte 473 AOC dans les vins et alcools : c'est trop. La baisse qualitative observée il y a quelques années a miné la confiance des consommateurs. Une association de défense des consommateurs a d'ailleurs proposé une solution radicale : que près d'un tiers de la production bénéficiant actuellement de l'appellation en soit exclue car elle ne représente pas la typicité d'un terroir ni ne respecte l'exigence de qualité...
Il faut bien sûr simplifier le système et repenser les contrôles, afin que l'on ne puisse plus dire que les producteurs sont juges et parties et que les produits sont mal contrôlés. Cela vaut pour les vins mais également pour bien d'autres productions. Il y va de la préservation du patrimoine alimentaire de la France. Et les motivations ne sont pas uniquement affectives, mais économiques. Mondialisation signifie banalisation des produits ; la spécificité devient alors un atout. C'est pourquoi, je soutiens les mesures proposées, notamment la transformation de l'INAO en Institut national de l'origine et de la qualité, ou encore la séparation des organismes et des missions.
Cependant, je m'interroge sur certains aspects. Les missions de l'INAO, à l'origine limitées au vin, se sont étendues à d'autres secteurs... mais les moyens n'ont pas suivi ! La nouvelle modification se fait-elle à effectif constant ? Quelles ambitions avez-vous pour l'établissement, quels seront ses moyens pluriannuels ? Vous me renverrez sans doute à la prochaine loi de finances, mais nous avons besoin de connaître, dans ce débat, les modalités de financement de l'Institut. Et comment l'INAO contribue-t-il à la promotion des signes de qualité en France et à l'étranger ? Dispose-t-il de moyens de communication adaptés ? Quels sont ses partenariats pour promouvoir les exportations agroalimentaires françaises ? Je me réjouis que cet organisme ait créé une filiale, Sopexa France, qui pourra aider les entreprises françaises à reconquérir les consommateurs français, sur un marché convoité ! Elle va promouvoir des produits qu'elle délaissait jusque-là sur le marché français, comme les vins et les produits laitiers.
Le terroir est à la mode... même si l'INAO, lui, a déjà fêté ses 70 ans. La référence au terroir ou à l'origine fonctionne comme une marque pour les consommateurs, en demande de repères. La politique de qualité répond à cette attente, mais la surabondance des signes nuit à la clarté du dispositif, d'autant que viennent encore se superposer les signes communautaires. C'est pourquoi cette réforme était nécessaire. La majorité du groupe RDSE votera ce texte. (Applaudissements au centre et à droite)
J-
Mme Françoise Férat. - Depuis une vingtaine d'années, les crises sanitaires se multiplient dans le secteur alimentaire, depuis la vache folle jusqu'à la grippe aviaire. La confiance en est altérée, les comportements d'achat modifiés. Les consommateurs exigent une alimentation saine, sûre, de qualité, à un prix acceptable. Les signes d'identification répondent à leurs attentes, si bien que trois Français sur quatre sont favorables à un label garantissant la provenance et la qualité des produits. Toutefois, la segmentation des rayons et la multiplication des logos et signes engendrent la méfiance et l'incompréhension. Les consommateurs recherchent une information précise ; or lequel d'entre eux, même parmi les plus aguerris, serait capable de dire ce que recouvrent tous les signes mentionnés dans ce débat ? Pas moi en tout cas ! Il en résulte une perte de crédibilité des signes de qualité, alors qu'environ 200 000 agriculteurs et plus de 13 000 entreprises agroalimentaires et fournisseurs sont aujourd'hui impliqués dans la politique de qualité. Les produits certifiés ont représenté un chiffre d'affaires de 16 milliards d'euros en 2005. Les signes de l'origine et de la qualité sont de véritables outils d'aménagement territoriaux et de développement économique.
Il est indispensable de préserver et de défendre ce patrimoine, de continuer à le promouvoir à l'extérieur -ces produits représentent déjà 30 % de nos exportations agroalimentaires. Plus de cohérence s'impose. L'ordonnance remet à plat l'ensemble des signes ainsi que les organismes qui les régissent. Cette réforme améliore la clarté pour le consommateur, qui sera mieux informé, donc rassuré. Elle met fin à la superposition des structures, la CNLC et l'INAO laissant place à une structure unique pour l'instruction et le contrôle des signes d'identification. Je me réjouis de la séparation entre les fonctions de gestion et de contrôle. Au niveau des filières, un seul ODG sera reconnu par signe d'identification de la qualité et de l'origine.
Enfin, élément essentiel de la crédibilité du nouveau dispositif, le contrôle est révisé dans ses modalités, scindé en deux phases distinctes. Le contrôle « primaire » sera assuré par des organismes tiers, indépendants et impartiaux, accrédités. Le contrôle ne se réduira plus à la seule dégustation au stade de la commercialisation, il interviendra à tous les stades d'élaboration du produit.
Ce dispositif rénové renforcera la confiance des consommateurs dans les signes de qualité. Je suis donc favorable à cette réforme, avec l'ensemble du groupe UC-UDF, mais deux points méritent d'être clarifiés.
D'abord, la révision des signes d'identification doit aider les professionnels à mieux exploiter la valeur ajoutée qu'ils incorporent. C'est pourquoi il importe d'assouplir le cloisonnement instauré par l'ordonnance, afin que les produits bénéficiant du label rouge puissent être couplés avec une IGP.
Ensuite, la procédure horizontale instituée par l'ordonnance « valorisation » -habilitant les ministres concernés à prendre rapidement des mesures communes à tous les produits bénéficiant d'une AOC, sur proposition de l'INAO- doit être étendue au label rouge.
Il me reste à féliciter la commission des affaires économiques et son rapporteur pour leur excellent travail. (Applaudissements au centre et à droite.)
M. Philippe Darniche. - Ce texte tend à clarifier les signes identifiant la qualité et l'origine des produits agricoles et alimentaires. Je souscris à cette réforme, essentielle pour les producteurs, et je me félicite de la concertation approfondie réalisée avec l'ensemble des intéressés, avec une attention particulière pour l'assentiment général des filières agricole, forestière ou de la pêche. Comme vous le savez, la Vendée a toujours été réputée pour la qualité de son patrimoine gastronomique, qui provient de l'agriculture biologique ou des produits de la mer. Pour nombre d'élus locaux, la défense de ce patrimoine suppose l'aménagement équilibré du territoire ainsi que la transmission durable des savoir-faire ancestraux qui font la réputation et la fierté des produits vendéens.
La réforme du système français de valorisation est nécessaire pour éclairer le consommateur et l'amateur gastronomique en matière de sécurité sanitaire et de goût. C'est pourquoi je soutiendrai le rôle désormais dévolu à l'INAO comme tête de réseau indépendante et impartiale. J'observe que la création des organismes de défense et de gestion permettra de rationaliser l'utilisation des moyens.
Toutefois, j'espère qu'on ne tentera aucun découplage des labels rouges et des IGP, car les producteurs sous labels rouges doivent impérativement pouvoir continuer de protéger leurs produits par la référence à un terroir. Ainsi, la volaille de Challans, élevée en plein-air dans le nord-ouest de la Vendée nous offre un caractère et une finesse de goût réputés grâce au savoir-faire d'aviculteurs passionnés qui produisent six millions de volailles par an et emploient plusieurs milliers de personnes. La loi doit donc préciser clairement que les IGP, qui s'inscrivent souvent dans la continuation d'une AOC, présentent un périmètre et des cahiers des charges fort distincts des mentions valorisantes à but commercial. En outre, les opérateurs doivent pouvoir associer un label rouge à une IGP.
Ne souhaitant pas de remaniement profond du texte, je soutiendrai les amendements de notre commission visant à protéger les productions de haute qualité. En effet, pour favoriser nettement et durablement la différenciation des productions nationales par rapport à celle du reste du monde, notre rapporteur propose de maintenir le lien entre qualité et origine, avec un couplage obligatoire de tout label rouge avec une IGP. En outre, l'INAO pourrait élaborer des mesures communes à l'ensemble des labels rouges.
J'achèverai mon propos par une anecdote. Lorsqu'on demandait au cardinal de Bernis pourquoi il utilisait uniquement du grand Meursault premier crû pour célébrer la messe, il répondait : « Je ne veux pas que le Créateur me voie faire la grimace » (On apprécie). En votant le texte amendé par le Sénat pour restaurer la confiance des consommateurs et conforter le développement de nos filières agricoles d'excellence, je ne ferai certainement pas la grimace... (Applaudissements au centre à droite.)
M. Paul Raoult. - J'interviens à titre personnel, et au nom de M. Jean-Marc Pastor, bloqué par une grève dans l'aviation. (Rires et exclamations amusées à droite.)
Comme le Conseil économique et social l'a rappelé, les signes officiels d'identification remontent au début du XXe siècle, lorsque la France s'est dotée d'instruments de compétitivité au bénéfice des consommateurs, des professionnels et de l'aménagement du territoire. L'Union européenne a profondément remanié son dispositif de valorisation et de contrôle des produits alimentaires, en intégrant les spécificités de chaque État membre lorsque c'était possible.
Ces dernières années, la globalisation économique a fait de la qualité un enjeu de compétitivité internationale sans précédent. L'un des enjeux de ce texte est de renforcer la confiance des consommateurs dans un cadre mondial, européen et national. Nous ne pouvons que soutenir cette démarche. Qu'est-ce que la qualité ? Qui la définit ? Les attentes sont évidemment diverses selon les catégories sociales et les produits.
La qualité résulte toujours d'un arbitrage entre les dimensions nutritionnelles, hygiéniques et organoleptiques, pour ne citer que celles-là. Pour l'acheteur, le goût vient souvent en premier lieu. Cependant, le prix, la marque et l'étiquetage sécurisent le consommateur.
Avec ce texte et l'ordonnance que nous devons ratifier, les signes de qualité et d'origine apporteront une réponse claire et simple, avec une certaine avance environnementale, l'État garantissant la procédure d'obtention des signes de qualité et d'origine, ainsi que les contrôles. Les associations de consommateurs réclament une plus grande crédibilité, plus de rigueur et d'homogénéité. Le texte comporte des avancées importantes à cet égard.
Après avoir sacrifié au modèle agricole unique entre 1975 et 1985, puis avoir cherché jusqu'en 2001 des modèles de remplacement à la production intensive, les agriculteurs sont engagés dans une convergence associant le respect de l'environnement, la gestion de l'énergie et l'accès à l'eau. Ils savent que la compétitivité de certaines zones fragiles s'obtient en échappant à la concurrence par les coûts grâce à une valeur ajoutée spécifique, bref en transformant les handicaps naturels en atouts. Le fromage de Roquefort dans l'Aveyron illustre l'effet positif de l'AOP dans cette zone. En outre, la manière dont le veau fermier du Ségala, produit dans le Tarn et l'Aveyron, s'est comporté pendant la crise de la vache folle prouve que les produits sous signe de qualité résistent bien mieux aux crises.
Au demeurant, l'enjeu ne se limite pas aux secteurs agroalimentaires, car il englobe la notoriété de nombreuses régions. Il était donc nécessaire de mettre fin à l'ambiguïté du positionnement des signes nationaux, afin de résister à l'internationalisation et de satisfaire les consommateurs.
La loi d'orientation agricole du 5 janvier 2006 comportait, à l'article 73, les jalons de la réglementation que nous examinons aujourd'hui. Le législateur avait alors précisé le champ de l'habilitation parlementaire afin, notamment, d'inscrire dans la loi les trois modes de valorisation décrits par notre rapporteur : les signes d'identification de la qualité et de l'origine ; les mentions valorisantes ; la certification des produits.
L'opposition se méfie toujours des ordonnances, qui permettent de faire adopter sans débat des mesures législatives. (Sourires)
En l'occurrence, le Parlement a réintroduit un ensemble de mesures dans le corps de la loi ; d'autre part, le texte émane de la concertation entre pouvoirs publics et représentants des filières concernées. Dont acte.
La volonté de simplification est louable, d'autant qu'au niveau mondial, c'est la marque privée qui prime conformément au système anglo-saxon. Toute restriction au commerce doit être argumentée et arbitrée par l'OMC sur la base du codex alimentarius. Les accords de Marrakech de 1994 ont protégé les indications géographiques au niveau mondial, mais les SIQO français et européens ont du mal à justifier leur existence, malgré les conventions internationales. Les nouvelles normes européennes renforceront la politique européenne dans le contexte international. Nous en avons bien besoin.
L'Union européenne n'a jamais su choisir entre une politique communautaire de la qualité et de l'origine, qui suppose un effort de convergence, et le maintien de la subsidiarité. Si les pays du Sud, la France et l'Italie soutiennent généralement la démarche de qualité -d'autant qu'elle n'implique pas de soutien des prix ou des revenus- ce n'est pas le cas des pays du Nord. Avec la suppression au plan européen des principes de réciprocité et d'équivalence, la France devait renforcer sa législation tout en la rendant plus efficace et plus souple.
Cette ordonnance opère une véritable rationalisation en redonnant une cohérence d'ensemble aux SIQO. Le nouvel institut national de la qualité et de l'origine assure une séparation fonctionnelle de la gestion et du contrôle avec la création d'un conseil des agréments et contrôles.
L'instauration d'organismes de défense et de gestion transparents et démocratiques, chargés d'élaborer et de mettre en oeuvre le cahier des charges, était nécessaire. En plaçant ce système de contrôle renforcé sous l'autorité de l'INAO, on résoudra les problèmes de chevauchement avec la CNLC.
Notre groupe vous suivra dans la rationalisation, la simplification de l'accès à la certification officielle, la responsabilisation des opérateurs, la stimulation de la demande de produits certifiés, et -je l'espère- la réduction des délais d'obtention des signes. Où en est-on pour le jambon de Lacaune ?
Le couplage du label rouge avec une IGP, proposé par le rapporteur, se heurte aux préconisations du Conseil national de l'alimentation, qui estime que faire reposer l'IGP sur un signe de qualité national bride l'accès à la protection communautaire. Je comprends que l'on veuille éviter de fragiliser des opérateurs économiques -je pense à l'ail rose de Lautrec-, mais une telle démarche ne renforcera pas la politique européenne de qualité... Il faudra en tout cas réduire les délais d'instruction induits par ce couplage.
La suppression de l'appellation d'origine vin délimité de qualité supérieure (VDQS), prévue à l'article 2, conduira les syndicats viticoles à choisir entre l'AOC ou les vins de pays. Il faut tenir compte du délai de mise en oeuvre de la nouvelle organisation commune de marché viticole et repousser cette suppression.
L'article 3 permet de sanctionner plus sévèrement toute personne qui délivre une mention « agriculture biologique » à ses produits sans satisfaire aux obligations de contrôle prévues par le code rural. Avec la crise de la production agricole intensive, remise en cause par la nouvelle PAC, l'agriculture biologique est à un tournant décisif. La demande de produits biologiques ne cesse de croître. Va-t-on enfin proposer de vraies incitations financières aux producteurs qui optent pour le bio ?
Lors des assises nationales de l'agriculture biologique, Michel Barnier a annoncé vouloir doubler les surfaces d'ici 2012, pour atteindre 4 % des surfaces agricoles totales. Cette question a fait l'objet de réflexions approfondies dans le cadre du Grenelle de l'environnement. En septembre dernier, le ministre avait fixé un objectif plus ambitieux de 10 % d'ici 2012.... France Nature Environnement a dénoncé ce recul.
Il faut mener une action volontariste en faveur de l'agriculture biologique, mieux structurer les filières, développer des circuits courts, réviser la réglementation applicable, trop restrictive en France.
A titre d'exemple, le parc naturel de l'Avesnois, que je préside, a consenti de grands efforts en faveur de l'agriculture biologique, avec le marquage des produits issus du territoire du parc. Le producteur ou le transformateur peut ainsi promouvoir une pratique respectueuse du milieu naturel et des spécificités locales. Il serait judicieux de revaloriser économiquement les pratiques favorables à la préservation d'une biodiversité, d'un paysage aujourd'hui peu valorisés.
L'agriculture biologique est une composante incontournable de l'écologie au quotidien et les consommateurs comme les producteurs doivent changer de comportement. Par un engagement financier clair, l'État doit donner enfin toute sa place à une agriculture biologique gage de qualité et réclamée par des consommateurs de plus en plus nombreux. Les chiffres ne sont pas à la hauteur des espérances : entre 2001 et 2006, le nombre d'exploitations biologiques n'a augmenté que de 2,5 %, et l'agriculture biologique ne représente que 2 % de la surface agricole française.
A l'heure de l'ultime phase du Grenelle de l'environnement, il faut rompre avec des modes de production et de consommation qui ont fait la part trop belle à la culture intensive, consommatrice d'engrais et de pesticides. Nous sommes au coeur de l'actualité : le 23 octobre 2007, le Parlement européen a donné son feu vert à un contrôle rigoureux de la mise sur le marché des pesticides, soumise à des règles strictes.
Ce projet de loi est très positif, nous le voterons. (Applaudissements)
M. Gérard César. - Très bien !
M. Dominique Mortemousque. - L'article 73 de la loi d'orientation agricole dont M. César a été le rapporteur a clarifié et simplifié le dispositif de valorisation des produits agricoles et alimentaires. Devant le maquis des signes et des labels, notamment ceux issus d'initiatives privées, les consommateurs ne s'y retrouvent plus. Il fallait remettre à plat le dispositif et le rendre plus lisible.
L'article 73 de la loi d'orientation agricole renvoyait à une ordonnance, que ce projet de loi nous propose de ratifier. L'appellation d'origine n'est pas une simple indication de provenance. C'est aussi et d'abord une référence qualitative, liée à la garantie d'un savoir-faire, à la marque d'un terroir, qui revêt une forte dimension patrimoniale et culturelle. Dans un monde aux échanges globalisés, aux productions normalisées, notre pays a su se doter très tôt d'instruments essentiels tels que les AOC pour préserver son patrimoine, son identité.
La politique de qualité est un outil de développement raisonné du terroir, elle impose des modes de production respectueux de bonnes pratiques agricoles et de l'environnement.
Compte tenu des nouvelles compétences de l'établissement public qui remplacera l'INAO, les financements devront être à la hauteur. Il faudra renforcer la communication institutionnelle sur les signes d'origine et de qualité afin que le consommateur sache ce qu'il achète et que les productions soient valorisées au mieux. Le ministère de l'agriculture et le nouvel INAO devront agir de concert.
La clarification du système permettra aux produits agricoles français de qualité de mieux se positionner sur le marché national et international. Je me réjouis que le projet de loi précise les trois modes de valorisation que sont les SIQO, les mentions valorisantes et la démarche de certification des produits. Je me réjouis que cette nécessaire réorganisation se fasse à droit constant. Les produits labellisés représentent un atout formidable pour la France. Leur attribution doit être encadrée.
Je m'interroge cependant sur la réorganisation de la CLNC et sur le fait que la certification de conformité ne fera désormais plus partie des signes officiels de qualité. L'Etat doit rester maître d'ouvrage. Les paysans français ont largement bénéficié de ce signe qui devrait être préservé : 40 % des poulets français sont actuellement labellisés. Il faut éviter le « tout conforme », qui mélange des notions d'origine et de qualité des produits.
Avec mes collègues du Périgord et du groupe d'étude sur l'élevage, nous proposerons que l'origine géographique puisse être mentionnée dans le label rouge, ce que l'ordonnance interdit actuellement. La loi d'orientation vise à ancrer l'activité dans les terroirs, et une telle interdiction aurait des conséquences désastreuses pour les territoires concernés, ce dont le rapport fait état.
Nous souhaitons également que la fédération nationale représentative des organismes de défense et de gestion des AOP et des labels rouges soit consultée par l'INAO pour les décisions qui les concernent. Faute d'une procédure claire, le nouveau système risque d'écarter les fédérations élues, par exemple le conseil national des appellations d'origine laitières ou la fédération label rouge : ce serait fragiliser l'ensemble de nos signes de qualité.
Monsieur le ministre, merci de l'intérêt que vous voudrez bien porter aux légitimes préoccupations des éleveurs qui s'engagent dans une véritable politique de développement durable ! (Applaudissements à droite et au centre)
M. Gérard Le Cam. - Lors d'un colloque sur le vin organisé au Sénat le 28 octobre 2004, le directeur de l'INAO déclarait que son objectif était de ne pas décevoir dans le verre la promesse faite au consommateur par l'appellation d'origine contrôlée, ce qui lui paraissait bien différent de la note attribuée par tel guide ou critique américain. Cette remarque de bon sens devrait guider notre réflexion au moment où, dans des échanges globalisés, les standards alimentaires s'uniformisent ! La promotion de la qualité des produits, en lien avec les terroirs, maintient l'activité sur ces territoires, elle est un gage d'un aménagement durable et harmonieux du territoire, tout comme d'une production respectueuse de l'environnement.
Vous avancez la nécessité de simplifier les étiquettes. L'UFC Que choisir ?, dans une enquête sur les saveurs, a montré que les professionnels jugeaient très diversement l'appellation AOC. Pour les uns, elle serait trop imprécise pour cibler les produits du terroir, ce qui lui ferait s'accommoder d'une standardisation des goûts. Pour les autres, les règles de l'AOC seraient un frein commercial et un facteur de rigidité. Ce qui nous paraît primer, cependant, c'est l'intérêt du consommateur.
Or, cet intérêt ne se limite pas à la simplification des étiquettes, il passe par la valorisation des terroirs, donc par le lien des produits avec les terroirs. La rupture du pacte de confiance entre le producteur et le consommateur tient à ce que les pouvoirs publics négligent le facteur humain du savoir faire, construit au fil de l'histoire. Songez que le terme « fermier », qui s'appliquait aux produits issus du lait de ferme et affinés à la ferme, bénéficie désormais aux produits laitiers affinés hors de l'exploitation, en particulier pour huit AOC fromagères importantes, dont le saint-nectaire et le reblochon. L'association des bergers corses Casgiu Casanu peut témoigner de cette évolution. Quand on sait l'importance de l'affinage, on mesure combien ce flou n'augure rien de bon pour l'avenir des fromages du terroir !
Le système actuel est peu lisible, mais le problème réside moins dans la multiplication des signes, que dans le manque d'information sur la composition des produits. Le temps est venu d'assurer une plus grande traçabilité des produits, pour que le consommateur sache ce qu'il achète. Ou ce qu'il désirerait acheter. La question du pouvoir d'achat ne peut être éludée, nous en reparlerons lors de la réforme annoncée de la loi Galland. Quant au contrôle il est entouré de bien des zones d'ombre.
Ce texte qui est censé simplifier le système me paraît en maintenir les défauts. La place des pouvoirs publics se réduit comme peau de chagrin : l'INAO et la CNLC fusionnent, et il faudra augmenter les moyens du nouvel organisme pour qu'il remplisse ses missions. Les filières bénéficieront d'un nom rassembleur : les organismes de gestion et de défense (ODG), mais leur réalité n'en sera guère améliorée, vu en particulier l'obligation d'adhésion et le coût de la cotisation. Des professionnels du vin s'inquiètent des nouveaux découpages géographiques correspondant aux nouvelles structures : on risque de voir apparaître des « super ODG » recouvrant plusieurs régions, ce qui serait contraire au maintien d'un lien étroit entre le produit et son terroir.
La réforme, ensuite, garantirait la neutralité du contrôle, en mettant fin à la confusion des rôles consistant, pour des producteurs, à participer aux organismes d'agrément. En fait, la séparation des rôles risque bien de n'avoir qu'une faible incidence, dès lors que les organismes de contrôles seront proposés par les ODG !
Nous voulons tous défendre notre agriculture dans ses terroirs, mais nos visions de l'agriculture divergent. Les sénateurs communistes, républicains et citoyens veulent valoriser et protéger les savoir-faire agricoles, en lien avec les terroirs d'origine. Or, cette valorisation exige qu'on ne suive pas le sillon tout tracé des standards communautaires et internationaux ! On simplifie les étiquettes, comme on a déjà commencé à simplifier les saveurs : nous ne voulons pas de telles dérives !
La réforme simplifiera les étiquettes, mais elle ne rétablira peut-être pas la confiance entre le consommateur et le producteur, et elle laisse entière la question du pouvoir d'achat des consommateurs, tout comme celle des revenus des producteurs. C'est pourquoi nous nous abstiendrons.
M. Michel Barnier, ministre. - Les moyens de l'INAO - MM. de Montesquiou et Le Cam m'ont interrogé à ce sujet- sont maintenus à un niveau important : le projet de loi de finances pour 2008 lui consacre 15 millions. Les crédits européens pour la valorisation des produits s'y ajoutent, j'y bataille vigoureusement dans le cadre de l'organisation commune de marché (OCM) que nous voulons forte et conquérante.
Mme Férat a raison : il faut des signes de qualité lisibles pour promouvoir l'exportation de nos produits. J'ai insisté là-dessus auprès de la Commission, qui doit présenter un premier bilan de santé de la PAC en novembre : la question de la qualité et de ses signes lisibles est essentielle pour notre commerce extérieur, et j'ai bien l'intention d'être en quelque manière un ministre du commerce extérieur pour les produits agro-alimentaires. J'étais naguère encore en Tunisie et en Lybie. C'est pourquoi je ne comprends pas l'abstention de M. Le Cam : en Chine, en Inde, en Russie, comment voulez-vous qu'ils comprennent nos signes de qualité si ceux-ci ne sont pas lisibles ?
Dans le cadre de mes fonctions précédentes, j'ai beaucoup parcouru la France et l'Europe ; j'ai vu que nos voisins aussi, l'Espagne, l'Italie, se préoccupent de qualité. Et cela se comprend : quand on goûte un produit d'appellation, on ne fait pas la grimace !
Je remercie M. Raoult de nous avoir donné acte que la procédure des ordonnances n'avait pas eu pour effet d'empêcher la concertation avec les professions et le Parlement. Je crois aussi que l'indication géographique est au coeur de nos discussions à l'OMC. Nous tenons à ce que la Commission tienne la ligne là-dessus.
Il faut d'ores et déjà ouvrir le débat sur la PAC après 2013, et ce dès 2008 et la présidence française. À ce moment-là, ce n'est plus de PAC que nous devrions parler mais, plus généralement, d'une politique alimentaire et agricole. Dans cette perspective, la question de la qualité est stratégique ; c'est elle qui distingue le modèle européen de celui qui prévaut ailleurs, outre-Atlantique par exemple. Jamais nous ne renoncerons à des produits ayant goût, couleur, saveur !
Non, je n'ai pas reculé sur l'agriculture bio. J'ai fixé l'objectif d'un doublement des surfaces ainsi cultivées ; s'il est dépassé, tant mieux. Je l'ai dit devant le conseil supérieur de l'agriculture bio, je souhaite soutenir la filière dans toutes ses dimensions.
Le jambon de Lacaune ? Je comprends que les producteurs pensent aujourd'hui à une IGP ; il semble que le problème vienne de ce qu'un des principaux transformateurs hésiterait à s'engager dans le processus.
Le ministère de l'agriculture a participé de façon proactive à ce grand moment de démocratie qu'est le Grenelle de l'environnement, ce qui a permis d'éviter une confrontation entre nous et les défenseurs de l'environnement. De manière générale, d'ailleurs, il n'y a pas eu confrontation mais dialogue entre des gens dont la rencontre était jusque là improbable. Les agriculteurs, il faut le rappeler, sont les seuls à travailler intégralement avec la nature, avec l'eau et la terre ; ils savent qu'ils seront les premiers à subir les effets d'un réchauffement climatique avec moins d'eau et plus de chaleur. On ne fera pas avancer la cause de l'environnement sans eux ou contre eux, mais avec eux !
M. Mortemousque a évoqué les préoccupations des fédérations des organismes de défense et de gestion. Le partenariat s'est concrétisé -je l'ai rappelé à Aurillac-, il n'y a pas lieu de l'inscrire dans la loi et de le rendre obligatoire : son mode de fonctionnement depuis soixante-dix ans est en lui-même une garantie d'efficacité.
Oui, monsieur Le Cam, il convient de mieux faire connaître la traçabilité, mais c'est un sujet différent de celui des signes de qualité. (Applaudissements à droite et au centre)
La discussion générale est close.
Discussion des articles
Article premier
L'article premier est adopté.
Articles additionnels
M. le Président. - Amendement n°1 rectifié, présenté par M. Huré au nom de la commission.
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le titre IV du livre VI du code rural est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa de l'article L. 640-1, les mots : « doit répondre » sont remplacés par le mot « répond » ;
2° Dans le troisième alinéa du 2° de l'article L. 640-2, le mot : « produits » est remplacé par le mot : « produit » ;
3° Dans le cinquième alinéa du 2° de l'article L. 640-2 et dans le premier alinéa de l'article L. 641-2, le mot : « vins » est remplacé par le mot : « vin » ;
4° Dans le premier alinéa de l'article L. 641-14, après le millésime : « 1985 », sont insérés les mots : « relative au développement et à la protection de la montagne » ;
5° Dans les articles L. 641-24 et L. 642-20, après le mot : « décret », sont insérés les mots : « en Conseil d'État » ;
6° Dans l'article L. 642-4, le sigle : « INAO » est remplacé par les mots : « Institut national de l'origine et de la qualité » ;
7° A la fin de l'article L. 642-21, le mot : « reconnue » est remplacé par les mots : « mentionnée à l'article L. 642 19 » ;
8° Aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 643-4, après le mot : « ministre », est inséré le mot : « chargé » ;
9° Au dernier alinéa de l'article L. 644-4, après le mot : « alinéa », sont insérés les mots : « du présent article » ;
10° Dans le premier alinéa de l'article L. 644-13, après le mot : « chargés », est inséré le mot : « respectivement », et dans le deuxième alinéa du même article, les mots : « le ministre chargé de l'agriculture et celui chargé » sont remplacés par les mots : « les ministres chargés respectivement de l'agriculture, ».
II. - Au 5° de l'article L. 115-22 du code de la consommation, les mots : « une indication » sont remplacés par les mots : « d'une indication » et les mots : « une spécialité » par les mots : « d'une spécialité ».
Cet amendement rédactionnel, accepté par le Gouvernement, est adopté.
Amendement n°13 rectifié, présenté par MM. Revet et Texier.
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 640-2 du code rural est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Un produit pourra porter l'appellation « fermier » dès lors qu'il est vendu en l'état ou que sa transformation en produit fini respectera l'évolution naturelle du produit de base et en particulier qu'en aucune façon ne soit interrompu l'apport de la flore microbienne sur la qualité gustative du produit fini. Cette transformation peut se faire soit sur l'exploitation elle-même, soit en un lieu où les producteurs se sont regroupés pour assurer l'élaboration du produit fini. »
M. Charles Revet. - Il n'y a pas de définition juridique du produit « fermier », si bien que le mot est mis à toutes les sauces et que le consommateur ne s'y retrouve plus. Quand j'ai interrogé la DGCC, elle m'a répondu qu'était fermier un produit qui vient de la ferme. (Sourires) Dans le cas, lui ai-je demandé, où il a été élaboré par plusieurs fermiers ? Alors il n'est plus fermier. En revanche, il l'est toujours si l'unique fermier a utilisé des moyens industriels, stérilisation et autres.
Ne pourrait-on préciser les choses ?
M. Benoît Huré, rapporteur. - De fait, ce flou est préjudiciable. Mais la précision que vous souhaitez est d'ordre réglementaire et votre rédaction n'est pas satisfaisante ; la Commission s'en remet à l'avis du Gouvernement.
M. Michel Barnier, ministre. - À la sagesse du Gouvernement ! (Sourires) Elle consiste à vous demander un retrait.
Mieux vaut, en effet, un décret qui prenne en compte l'extrême diversité des situations qu'une définition légale, trop générale.
Ces décrets existent déjà pour les fromages, les volailles et le décret sur les oeufs est en cours de rédaction. Je vous invite d'ailleurs à nous faire part de vos réflexions, monsieur le sénateur. Nous avons choisi de procéder par secteur pour éviter de faire des erreurs. Je souhaite donc le retrait de cet amendement.
M. Charles Revet. - Par delà la définition produit par produit, il m'importait qu'un produit, notamment laitier, pour lequel des agriculteurs mettent en commun leurs moyens de transformation puisse continuer à bénéficier de l'appellation « produit fermier ». Cela dit, je retire mon amendement.
L'amendement n°13 rectifié est retiré.
M. le président. - Amendement n°3 rectifié, présenté par M. Huré au nom de la commission.
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le second alinéa de l'article L. 641-2 du code rural est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :
« Un label rouge ne peut comporter de référence géographique, ni dans sa dénomination, ni dans son cahier des charges, sauf :
« - si le nom utilisé constitue une dénomination devenue générique du produit ;
« - ou si le label rouge est associé à une indication géographique protégée enregistrée ou transmise aux fins d'enregistrement par l'autorité administrative et si les organismes de défense et de gestion, reconnus ou ayant sollicité leur reconnaissance, pour le label rouge et l'indication géographique protégée concernés, en font expressément la demande dans le cadre des articles L. 641-3 et L. 641-11. »
M. Benoît Huré, rapporteur. - Créés par le décret du 13 janvier 1965, les labels rouges, garantie de qualité supérieure, se sont développés à l'initiative des producteurs soucieux, dans chaque bassin de production, de faire reconnaître des traditions et des savoir-faire locaux. Ils ont donc naturellement pris comme dénomination le nom du produit associé à son origine géographique.
La réputation de ces produits a ensuite facilité leur reconnaissance comme signe de qualité européen IGP.
L'ancrage du label rouge dans les bassins de production régionaux a été d'autant plus fort que l'administration française imposait aux producteurs, jusqu'à l'ordonnance du 6 décembre 2006, la certification ou le label rouge comme condition préalable à toute demande d'IGP. Une grande partie des produits sous label rouge est associée à une IGP, de sorte que coexistent des produits sous label rouge sans mention d'appartenance géographique et des produits label rouge bénéficiant d'une IGP et donc comportant une mention géographique.
Dans un souci d'efficacité, notamment au regard des délais, l'ordonnance permet aux producteurs de solliciter directement une IGP sans passer par l'obtention préalable d'un label ou d'une procédure de certification.
Sans revenir sur cette décision, il convient d'éviter que la nouvelle réglementation n'ouvre les cahiers des charges label rouge des produits français à tous les producteurs, sans les contraindre à maintenir l'ancrage territorial à l'origine de leur succès.
C'est pourquoi il faut permettre aux labels rouges qui le souhaitent d'être couplés avec une IGP pour ainsi continuer à être liés à leur territoire d'origine.
M. le président. - Amendement identique n°11, présenté par Mme Férat et M. Détraigne.
Mme Françoise Férat. - Après l'excellente présentation faite par M. le rapporteur, je considère que mon amendement est défendu.
M. le président. - Amendement n°9 rectifié ter, présenté par MM. Mortemousque, César, Bailly, du Luart, Beaumont, J. Blanc, Barraux et Texier.
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le dernier alinéa de l'article L. 641-2 du code rural tel qu'il résulte de l'article 2 de l'ordonnance n° 2006-1547 du 7 décembre 2006 relative à la valorisation des produits agricoles, forestiers ou alimentaires et des produits de la mer est ainsi rédigé :
« Un label rouge ne peut comporter de mention géographique qu'à condition que celle-ci figure dans la dénomination générique du produit, ou que ce label rouge soit associé à une indication géographique protégée reconnue ou en demande, ou bien que des dispositions réglementaires spécifiques le prévoient. »
M. Dominique Mortemousque. - J'ai écouté avec plaisir M. le rapporteur présenter son amendement : je vais retirer le mien au profit du sien.
L'amendement n°9 rectifié ter est retiré.
M. Michel Barnier, ministre. - M. Mortemousque m'avait alerté il y a quelques semaines. Comme ces amendements ne remettent pas en cause l'accès direct à l'IGP, le gouvernement y est favorable.
L'amendement n°3 rectifié est adopté et devient un article additionnel.
L'amendement n°11 devient sans objet.
M. le président. - Amendement n°4, présenté par M. Huré au nom de la commission.
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 641-4 du code rural est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Des conditions de production et de contrôle communes à plusieurs produits peuvent être définies par décret, sur proposition de l'Institut national de l'origine et de la qualité, après avis des organismes de défense et de gestion intéressés. »
M. Benoît Huré, rapporteur. - La gestion des conditions de production et de contrôle des labels rouges est assurée par les mêmes organismes que les AOC.
Or, l'ordonnance valorisation prévoit une procédure horizontale susceptible de permettre aux ministres de prendre rapidement des mesures communes à tous les produits bénéficiant d'une AOC sur proposition de l'INAO, après avis des organismes de défense et de gestion concernés.
La gestion des produits sous label rouge nécessitant les mêmes outils, le nouvel article L. 641-4 doit autoriser une telle procédure à vocation horizontale pour les produits bénéficiant du label rouge.
M. le président. - Amendement identique n°12, présenté par Mme Férat et M. Détraigne.
Mme Françoise Férat. - Je m'associe aux propos du rapporteur. Il serait souhaitable que les organisations nationales représentatives fédérant les ODG soient saisies pour avis.
M. le président. - Amendement n°8 rectifié quater, présenté par MM. Mortemousque, César, Bailly, du Luart, Beaumont, J. Blanc, Barraux, Texier et Pierre.
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 641-4 du code rural tel qu'il résulte de l'article 2 de l'ordonnance n° 2006-1547 du 7 décembre 2006 relative à la valorisation des produits agricoles, forestiers ou alimentaires et des produits de la mer est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Des conditions de production et de contrôle communes à plusieurs produits peuvent être définies par arrêté, sur proposition de l'Institut national de l'origine et de la qualité, après avis des organismes de défense et de gestion intéressés et des organisations nationales représentatives les fédérant. »
M. Dominique Mortemousque. - L'amendement de la commission répond à nos attentes. Je vais donc retirer le mien. Cela dit, alors que nous sommes en plein Grenelle de l'environnement, cela fait longtemps que les producteurs du Périgord sous label rouge font des efforts méritants en faveur du développement durable. Faisons en sorte de consulter tous les organismes afin de ne pas les décourager.
L'amendement n°8 rectifié quater est retiré.
M. Michel Barnier, ministre. - Le gouvernement est favorable aux deux amendements identiques et rejoint les réflexions de M. Mortemousque.
L'amendement n°4 est adopté et devient un article additionnel.
L'amendement n°12 devient sans objet.
M. le président. - Amendement n°7 rectifié ter, présenté par MM. Mortemousque, du Luart, J. Blanc, Barraux et Texier.
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 641-4 du code rural tel qu'il résulte de l'article 2 de l'ordonnance n° 2006-1547 du 7 décembre 2006 relative à la valorisation des produits agricoles, forestiers ou alimentaires et des produits de la mer, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Dès lors qu'il est susceptible d'engendrer un risque de confusion, l'usage du terme « label » en relation avec les produits relevant du présent chapitre est réservé aux denrées alimentaires bénéficiant d'un label rouge ou de tout autre label reconnu par la réglementation française ou communautaire. »
M. Dominique Mortemousque. - Comme le but poursuivi par cet amendement est atteint, je le retire.
L'amendement n°7 rectifié ter est retiré.
L'amendement n°6 rectifié quater est retiré.
M. le président. - Amendement n°15, présenté par M. César.
Après l'article premier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 644-5 du code rural est complété par un membre de phrase et une phrase ainsi rédigés :
« et, par extension, les sociétés coopératives de vinification qui collectent, vinifient et commercialisent un vin à appellation d'origine, représentant l'ensemble de leurs sociétaires qui établissent une déclaration de récolte pour ce même vin à appellation d'origine. Elles sont membres de droit de l'organisme de défense et de gestion concerné. ».
M. Gérard César. - J'estimais qu'il fallait faire entrer les coopératives dans les organismes de défense et de gestion. Mais mon expérience de vingt ans en tant que président de coopérative me démontre que cet amendement est, aujourd'hui, satisfait. Je le retire donc.
L'amendement n°15 est retiré.
M. le président. - Amendement n°10, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste.
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l'article L. 644-5 du code rural, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par extension, les sociétés coopératives de vinification qui collectent, vinifient et commercialisent un vin à appellation d'origine, représentent l'ensemble de leurs sociétaires qui établissent une déclaration de récolte pour ce même vin à appellation d'origine ».
M. Roland Courteau. - Nous avons eu un débat...
M. Charles Revet. - Amical !
M. Roland Courteau. - ...ce matin en commission et je ne suis pas d'accord avec M. César. La réorganisation du dispositif de valorisation des produits agricoles et agroalimentaires ne permet pas au secteur viticole d'être réellement représenté au sein des organismes de défense et de gestion. Il convient donc que les sociétés de vinification qui collectent, vinifient et commercialisent un AOC puissent représenter l'ensemble de leurs sociétaires qui établissent une déclaration de récolte pour ce même vin. Il est en effet dit dans l'article L. 642-18 du code rural que les règles de composition et de fonctionnement des ODG doivent assurer, pour chacun des produits, la représentativité équilibrée des opérateurs. Au sens de l'article L. 642-3, un opérateur est « toute personne qui participe effectivement aux activités de production, de transformation ou d'élaboration d'un produit ». Or, selon l'article L. 642-21, les opérateurs sont tous adhérents de l'ODG. Mais il est prévu pour les vins une exception puisque « la représentativité des opérateurs est appréciée à partir des seules personnes établissant une déclaration de récolte ». Ainsi, les caves coopératives ne peuvent aujourd'hui être représentées au sein des ODG. Quant aux déclarants sociétaires de ces mêmes coopératives, comment peuvent-ils participer à l'ODG puisqu'ils ne participent pas aux activités d'élaboration du produit ?
Enfin, les cahiers des charges concerneront les caves coopératives, notamment pour ce qui est de l'agrément des sites de vinification, mais sans que ces coopératives soient membres de droit des ODG alors que les autres produits agricoles ne font pas l'objet d'une telle exception.
Enfin, je rappelle que les sociétés coopératives de vinification assurent 66 % de la production de vin en AOC, et plus de 80 % de la production de vin de pays. Personnes morales, elles disposent d'un statut propre et accomplissent toutes les activités définissant un producteur.
Par souci d'équité, elles doivent donc pouvoir représenter l'ensemble de leurs sociétaires au sein des ODG.
M. Benoît Huré, rapporteur. - Rassurez-vous, monsieur Courteau, les coopératives, compte-tenu de leur importance dans la production vinicole, seront représentées dans les ODG. Toutefois, il faut protéger le droit inaliénable de chaque producteur à siéger de manière individuelle dans un ODG. (On le confirme à droite.) Obliger les viticulteurs à être obligatoirement représentés par leur coopérative, comme vous le proposez, est contraire à l'objectif de la réforme qui est de responsabiliser chaque producteur au fonctionnement de son signe d'origine et de qualité. Par ailleurs, l'INAO a accepté de prévoir des statuts d'ODG offrant la possibilité aux coopérateurs de se faire représenter par leur coopérative, s'ils le souhaitent. Enfin, permettre aux sociétés coopératives d'être considérées comme représentatives au sein des ODG ouvrirait la porte à des demandes similaires d'autres types d'acteurs.
Demande de retrait, sinon avis défavorable.
M. Michel Barnier, ministre. - Même avis.
L'amendement n°10 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°14 rectifié ter, présenté par MM. César, Mortemousque, Lardeux, Guené, Buffet et Doublet, Mme Lamure, MM. Barraux et Texier et Mme Férat.
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 644-9 du code rural tel qu'il résulte de l'article 2 de l'ordonnance n° 2006-1547 du 7 décembre 2006 relative à la valorisation des produits agricoles, forestiers ou alimentaires et des produits de la mer, il est inséré un article L. 644-9-1 ainsi rédigé : « Art. L. 644-9-1. - Les organismes de contrôle visés à l'article L. 642-27, les organismes de défense et de gestion visés à l'article L. 642-17 peuvent être admis, sur leur demande formulée auprès de l'Institut national de l'origine et de la qualité (INAO), à bénéficier de données du casier viticole informatisé dans des conditions définies par arrêté du ministre en charge de l'Agriculture et du ministre en charge du Budget. Dans ce cadre, ils peuvent consulter ou être rendus destinataires de certaines informations nominatives dès lors qu'elles sont nécessaires à l'exercice des missions de contrôle qui leur sont confiées par le présent titre. En tant que de besoin, ils fournissent à l'Institut national de l'origine et de la qualité les données résultant de leurs contrôles, nécessaires à la mise à jour du casier viticole informatisé ».
M. Gérard César. - Pour que les organismes de contrôle et les ODG fassent leur travail, ils doivent avoir accès à toutes les informations utiles sur les transactions afin de gérer de manière plus responsable tout ce qui touche à l'agriculture.
M. Benoît Huré, rapporteur. - Cet amendement donnera aux ODG et aux organismes de contrôle les instruments statistiques nécessaires à la bonne exécution de leur mission. Avis très favorable.
M. Michel Barnier, ministre. - Le casier viticole informatisé contient des informations utiles pour la gestion et le contrôle : avis favorable.
L'amendement n°14 rectifié ter, adopté, devient article additionnel.
M. le président. - Amendement n°2, présenté par M. Huré au nom de la commission.
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Par dérogation aux dispositions du premier alinéa de l'article L. 492-4 du code rural, le prochain renouvellement des membres assesseurs des tribunaux paritaires des baux ruraux aura lieu en janvier 2010.
Le mandat des membres assesseurs des tribunaux paritaires des baux ruraux en fonction prendra fin à la date d'installation des membres assesseurs nouvellement élus.
M. Benoît Huré, rapporteur. - Cet amendement a pour objet de proroger de deux ans le mandat des membres assesseurs des tribunaux paritaires des baux ruraux. Cette solution agrée toutes les parties concernées. La préparation de nouvelles élections ne pourra pas être menée à temps en raison de la surcharge de travail des services déconcentrés de l'Etat du ministère de l'agriculture au dernier trimestre 2007, de l'impossibilité de publier le décret d'application de l'article L. 492-3 suffisamment tôt et des contraintes liés pour les préfets à l'organisation des prochaines élections municipales.
M. Michel Barnier, ministre. - Le Gouvernement est sensible au souci que manifeste le rapporteur de la surcharge de travail des services ministériels et préfectoraux... Avis favorable à cette proposition réaliste et pragmatique.
L'amendement n°2, adopté, devient article additionnel.
Article 2
L'article L. 644-12 du code rural est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L. 644-12. - Les vins bénéficiant d'une appellation d'origine « vin délimité de qualité supérieure » le 1er janvier 2007 font l'objet, de la part du syndicat viticole intéressé, d'une demande tendant au bénéfice de l'appellation d'origine contrôlée ou de la mention « vin de pays » avant le 30 juin 2007, formée respectivement auprès de l'Institut national de l'origine et de la qualité ou auprès de l'Office national interprofessionnel des fruits, des légumes, des vins et de l'horticulture.
« Seuls les vins pour lesquels la demande prévue à l'alinéa précédent a été déposée peuvent, à partir du 1er juillet 2007 et jusqu'à ce qu'il ait été statué sur cette demande et au plus tard jusqu'au 31 décembre 2009, être mis en vente et circuler en vrac sous l'appellation d'origine « vin délimité de qualité supérieure », accompagnés du label délivré par le syndicat viticole intéressé, dans les conditions prévues par l'article L. 641-24 du code rural et les dispositions réglementaires prises pour son application, dans leur rédaction en vigueur avant la publication de l'ordonnance n° 2006-1547 du 7 décembre 2006.
« Par dérogation aux articles L. 642-17 à L. 642-26, la défense et la gestion des vins bénéficiant de cette appellation sont assurées par les syndicats viticoles. »
M. le président. - Amendement n°5, présenté par M. Huré au nom de la commission.
I. - Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 644-12 du code rural, remplacer la date :
30 juin 2007
par la date :
31 décembre 2008
II. - Dans le deuxième alinéa du même texte, remplacer la date :
1er juillet 2007
par la date :
1er janvier 2009
et la date :
31 décembre 2009
par la date :
31 décembre 2011
M. Benoît Huré, rapporteur. - La disparition de l'AOVDQS contraint les bénéficiaires du signe à choisir entre AOC et appellation « vin de pays ». Pour tenir compte des délais de publication de la nouvelle OCM viticole et permettre une instruction approfondie des demandes de reconnaissance comme AOC, il faut reporter les délais.
L'amendement n°5, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 2, modifié, est adopté, ainsi que l'article 3.
Interventions sur l'ensemble
M. Paul Raoult. - Pour sauver notre agriculture, nous devons mettre en valeur nos terroirs. Cela passe par une meilleure formation des futurs agriculteurs et par la commercialisation des produits en circuit court, directement du producteur au consommateur. En tant que responsable de parc naturel, j'ai rencontré des producteurs qui ont l'intelligence d'aller vers les consommateurs. Nous devons également mieux faire connaître les labels. Je pense en particulier au label rouge qui garantit une bonne qualité de viande, liée à une forme d'élevage à l'herbe, comme celui qui a été décerné aux vaches de race « Bleu du Nord ». Malgré les opérations de promotion du genre Festiviande, les ventes ne décollent pas. Autre piste de réflexion que je tire de mon expérience de responsable de parc, la nécessité de rééduquer le goût des enfants (M. Revet approuve.) La banalisation des produits utilisés dans les cantines scolaires détourne les écoliers de tout ce qui a un goût qui sort de l'ordinaire. Nous devons promouvoir les classes du goût, durant lesquelles des animateurs viennent apprendre aux enfants à goûter des choses aussi simples que le salé et le sucré. Il y a là de nouveaux débouchés pour les petits et moyens agriculteurs. Comme le président du groupe de travail du Grenelle de l'environnement auquel je participais, le professeur Robert Pitte, je suis convaincu que « les bons produits créent de beaux paysages » !
M. Gérard César. - En tant qu'ancien rapporteur de la loi d'orientation agricole, je me félicite que la démarche de valorisation des produits et d'information des consommateurs recueille aujourd'hui un tel consensus ! Naturellement le groupe UMP votera ce projet. (Applaudissements à droite).
Mme Françoise Férat. - Notre groupe est très satisfait de la nécessaire clarification qu'apporte ce texte et c'est avec enthousiasme qu'il le votera. (Applaudissements au centre et à droite).
Le projet de loi est adopté.
(Applaudissements à droite et au centre).