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OFFICE PARLEMENTAIRE D'ÉVALUATION DES CHOIX SCIENTIFIQUES ET TECHNOLOGIQUES (OPECST)

Mercredi 25 avril 2001

- Présidence de M. Henri Revol, sénateur, président.

Conseil scientifique - Prolongation du mandat des membres

M. Henri Revol, sénateur, président, a présenté une communication relative à la composition du Conseil scientifique de l'Office.

La politique spatiale française : bilan et perspectives - Examen du rapport

L'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques a ensuite procédé à l'examen du rapport de M. Henri Revol, sénateur, président, sur " la politique spatiale française : bilan et perspectives ".

M. Henri Revol, sénateur, président, rapporteur
, a, dans un premier temps, évoqué les grands enjeux de la politique spatiale, rappelant que l'Europe spatiale avait connu un réel succès et que le moment était venu de procéder à des choix stratégiques, afin de bâtir un avenir à la mesure du passé.

Il a indiqué que l'effet d'entraînement de l'effort spatial français devait se poursuivre, sans pourtant obérer la nécessaire solidarité européenne. Il a souhaité que l'autonomie stratégique de l'Europe soit clairement reconnue comme un principe unificateur de la construction européenne. Il a rappelé la dimension symbolique et génératrice d'enthousiasme dans la jeunesse de la présence de l'homme dans l'espace, mais souhaité qu'en ce qui concerne la station spatiale internationale, une attitude prudente soit adoptée, compte tenu de l'importance des fonds immobilisés par ce programme mené sous le leadership américain.

Il a formulé de nombreuses recommandations programmatiques et structurelles. En ce qui concerne les aspects programmatiques, il a tout d'abord énuméré les moyens de maintenir l'autonomie d'accès à l'espace de l'Europe :

- conduire un programme d'amélioration d'Ariane 5, avec le double objectif de suivre l'évolution du marché et de réduire de façon importante les coûts de production ;

- améliorer la compétitivité du centre de lancement de Guyane en perfectionnant les installations de lancement et d'accueil des utilisateurs ; harmoniser la tarification avec la pratique américaine ;

- compléter la gamme des lanceurs dont dispose l'Europe, tant par des développements européens que par un élargissement de la coopération avec la Russie ;

- envisager l'ouverture du centre de Guyane à des lanceurs étrangers et notamment à Soyuz ;

- poursuivre un programme de développement technologique destiné à préparer les lanceurs du futur.

Puis, dans le domaine des satellites, il a mis en lumière deux lignes d'action principales pour la maîtrise de l'évolution technologique : la prise en compte des possibilités de miniaturisation et de réduction des coûts offerts par les microsatellites et la nécessité de mise à niveau de la capacité industrielle dans le domaine des satellites géostationnaires commerciaux par un programme faisant suite au programme STENTOR.

Il a salué le succès éclatant de la recherche scientifique spatiale et rappelé qu'il était indispensable de maintenir le financement du programme scientifique obligatoire de l'Agence spatiale européenne.

Il a rappelé que l'aspect commercial des télécommunications spatiales ne devait pas occulter la nécessité absolue d'un appui de la puissance publique : en effet, la maîtrise des télécommunications gouverne tous les secteurs de l'autonomie stratégique (militaire, culturel, économique et social) et il est, dès lors, impossible de s'en remettre aux seules forces du marché, d'autant que les règles en sont totalement biaisées par les subventions d'origine militaire dont dispose l'industrie américaine.

Il a mis en lumière l'intérêt de la télémédecine et du télé-enseignement qui peuvent améliorer notablement l'égalité d'accès à la santé et à l'éducation.

Il a insisté sur la nécessité de porter une attention particulière à l'homogénéité de la couverture territoriale pour les applications multimédia, en particulier pour celles qui sont nécessaires au développement de l'activité économique locale.

Dans le domaine de l'observation de la terre, il a appelé de ses voeux une convergence et une harmonisation des efforts européens dans le cadre des programmes Pleiades et GMES (Global Monitoring for Environment and Security) qui devraient, outre leur intérêt scientifique et stratégique, être l'occasion de consolider la structure de l'Europe spatiale et ses liens avec l'Europe politique.

Il a rappelé que l'importance capitale du secteur de la navigation et du positionnement était maintenant largement reconnue et qu'elle faisait de l'autonomie européenne, en ce domaine, un objectif capital ; il a jugé indispensable la mise en oeuvre du programme européen Galileo qui apparaît, pour l'ensemble de la politique spatiale, comme un élément structurant, à la fois parce qu'il exprime un objectif d'autonomie stratégique et parce qu'il contraint à une harmonisation des structures de l'Europe spatiale et de l'Europe politique.

Abordant ensuite les aspects structurels, M. Henri Revol, sénateur, président, rapporteur, a souligné la nécessité d'harmoniser les relations entre les centres techniques des agences spatiales des Etats et de l'Agence spatiale européenne et de créer un réseau européen. Il a également souhaité que s'établissent des relations organisées et formalisées entre l'Agence spatiale européenne et l'Union européenne, c'est-à-dire entre l'Europe spatiale et l'Europe politique.

S'agissant des structures industrielles, il a rappelé que, ni aux Etats-Unis, ni en Europe, l'industrie spatiale ne pouvait se maintenir et se développer sans l'aide déterminée de la puissance publique. Il a, par ailleurs, souligné l'intérêt que pourrait présenter l'utilisation des grandes industries du secteur spatial comme relais pour l'action de la puissance publique sur le tissu des petites et moyennes entreprises.

Il a évoqué la coopération internationale, dimension naturellement présente dans l'activité spatiale, indiquant que l'Europe pourrait établir des liens avec les Etats-Unis, la Russie et le Japon.

Il a souligné la nécessité d'un effort spécifique dans le secteur de la défense, où il faut impérativement remédier à deux déficiences :

- au niveau national, l'absence de doctrine concernant la place de l'espace dans l'ensemble des forces armées, accompagnée d'une réduction injustifiée des ressources financières consacrées à la composante spatiale de l'armement ;

- au niveau européen, l'insuffisance de la concertation entre les acteurs nationaux et de la cohérence des programmes nationaux.

En conclusion, il a souligné la nécessité d'une vision symbolique, c'est-à-dire d'une véritable politique spatiale tenant compte de la dépendance de l'ensemble de tissu socio-économique à l'égard des nouvelles technologies de l'information.

Il a jugé nécessaire que les choix politiques dans ce domaine soient soumis, dans l'avenir, sous une forme appropriée, au débat parlementaire, comme c'est la pratique normale pour ceux de ces choix qui, dans le moyen et le long terme, engagent de façon substantielle l'intérêt national.

M. Robert Galley, député, ayant rappelé qu'il avait lui-même présenté, dans le cadre de l'UEO (Union de l'Europe occidentale), un rapport sur la politique spatiale européenne, a déclaré qu'il approuvait les conclusions de M. Henri Revol, sénateur.

Il l'a interrogé sur l'éventualité d'une démarche de défense européenne autonome en matière de protection contre les missiles.

M. Henri Revol, sénateur, président, rapporteur, a indiqué qu'aucune démarche de ce type n'était envisagée.

En réponse à une question de M. Robert Galley, député, M. Henri Revol, sénateur, président, rapporteur, a indiqué que l'éventuelle ouverture de Kourou à un lanceur russe devrait être étudiée avec le plus grand sérieux et qu'il ne s'agissait pas d'une simple péripétie tactique, mais d'une décision stratégique majeure dont les conséquences à court et surtout, à long terme, devaient être soigneusement pesées. Il a proposé, avec l'accord de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, d'envoyer, en son nom personnel aux ministres chargés de l'espace des pays membres de l'Agence spatiale européenne les quelques pages du rapport qui sont consacrées à ce sujet, à simple titre d'information.

M. Jean-Yves Le Déaut, député, s'est interrogé sur la situation financière difficile d'Arianespace et sur le devenir de la Station spatiale internationale.

M. Henri Revol, sénateur, président, rapporteur, a indiqué que le déficit pour l'année 2000 d'Arianespace était notamment dû à la production de la commercialisation en parallèle de deux lanceurs : Ariane 4 et Ariane 5, situation qui accroît les coûts financiers et devrait cesser en 2003 avec la fin de la commercialisation d'Ariane 4.

Il a confirmé que les récentes décisions américaines de réduire les budgets consacrés à la Station spatiale internationale risquaient de diminuer fortement les possibilités d'y mener des recherches scientifiques.

Répondant à une question de M. Serge Poignant, député, M. Henri Revol, sénateur, président, rapporteur, a indiqué que l'Europe spatiale se construisait sur la base de la coopération de l'Allemagne, de l'Italie et de la France.

L'Office a approuvé à l'unanimité le rapport de M. Henri Revol, sénateur, président, sur " la politique spatiale française : bilan et perspectives ".