Question de Mme BELRHITI Catherine (Moselle - Les Républicains) publiée le 16/05/2024

Question posée en séance publique le 15/05/2024

M. le président. La parole est à Mme Catherine Belrhiti, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Catherine Belrhiti. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Madame la ministre, vous avez récemment reconnu les difficultés de recrutement des enseignants dans certaines académies pour la rentrée 2024. Les premiers résultats des écrits du concours de recrutement des professeurs des écoles affichent ainsi un ratio de candidats par poste largement inférieur aux précédentes décennies, et ce avant même les résultats définitifs.

Face à ce constat, vous répondez chaque année par le recrutement de nouveaux contractuels, dans des conditions de formation loin d'être adaptées. La volonté gouvernementale de passer le concours de recrutement à bac+3 est une réponse bien insuffisante face à la gravité de la situation. Insérer nos futurs enseignants dans leur milieu professionnel selon les modalités actuelles ne conduira qu'à les exposer à plusieurs problèmes systémiques de l'éducation nationale : la rémunération, le déroulement des carrières, la mobilité et le manque de reconnaissance. Qui aujourd'hui souhaiterait gagner 1,1 fois le Smic en début de carrière après cinq années d'études ?

De plus, le système de gestion des ressources humaines, qui ne fonctionne qu'à l'ancienneté, conduit à envoyer de jeunes professeurs loin de chez eux, dans les territoires réputés les plus difficiles. Cela revient souvent à leur demander de sacrifier leur projet de vie.

Madame la ministre, quand le Gouvernement se décidera-t-il enfin à mettre en place un pacte qui rendra à la profession son attractivité et offrira à la jeunesse de ce pays un avenir ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

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Réponse du Ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse publiée le 16/05/2024

Réponse apportée en séance publique le 15/05/2024

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Mme Nicole Belloubet, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Madame la sénatrice Belrhiti, j'ai effectivement reconnu que nous rencontrions des difficultés de recrutement de nos personnels enseignants lors des concours.

Je me permets simplement de signaler que nous ne sommes pas les seuls dans ce cas. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.) J'ai récemment participé à une réunion du Conseil de l'Union européenne : tous les pays - je dis bien : « tous les pays » - de l'Union européenne, quelles que soient les rémunérations de leurs enseignants, quelle que soit l'organisation de leur système éducatif, connaissent de telles difficultés.

Nous avons pris un certain nombre de décisions pour y faire face.

D'abord, ainsi que vous l'avez rappelé, nous allons - je le reconnais devant vous - recruter des personnels contractuels, afin d'assurer la rentrée prochaine. Mais nous le ferons suffisamment tôt, parfois dès le 1er juin, pour que les personnes concernées puissent bénéficier d'une formation et prendre leur poste au 1er septembre. Cela me semble être un progrès.

Ensuite, comme mes prédécesseurs s'y étaient engagés, et contrairement à ce que vous indiquez, nous avons augmenté la rémunération de nos personnels enseignants, notamment en début de carrière. Alors qu'un enseignant du premier degré gagnait moins de 1 800 euros net par mois en 2017, il gagne plus de 2 100 euros net par mois aujourd'hui. Je pense que cela mérite d'être salué.

Enfin, ainsi que vous l'avez souligné, nous avons décidé de modifier la formation initiale de nos personnels. Nous mettons en place - c'est véritablement une réforme structurante et enthousiasmante - une formation d'excellence. D'une part, la préparation au concours se fera désormais à bac+3. D'autre part, les jeunes recrutés bénéficieront d'une gratification et d'une rémunération. Ils poursuivront leurs études jusqu'au master tout en effectuant sur le terrain des stages d'observation et de pratique accompagnée et des stages en responsabilité afin de se professionnaliser.

Ces différents éléments conditionnent, me semble-t-il, l'attractivité de la profession. J'y crois beaucoup.

M. le président. Il faut conclure !

Mme Nicole Belloubet, ministre. Et je pense surtout que, comme le disait Charles Péguy, le métier d'enseignant est le plus beau métier du monde, et qu'il faut...

M. Rachid Temal. Le payer correctement !

Mme Nicole Belloubet, ministre. ... le dire et le redire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Belrhiti, pour la réplique.

Mme Catherine Belrhiti. Madame la ministre, j'ai enseigné pendant quarante ans ; ce métier, je le connais. La crise la plus difficile que nous ayons à résorber est certainement celle de l'enseignement.

Vous traitez le problème d'attractivité par de petites réformes mises bout à bout, alors que nous avons besoin de repenser la profession en prévoyant un véritable plan d'insertion des jeunes professeurs. Par exemple, la régionalisation des concours semble aujourd'hui une étape indispensable.

Madame la ministre, sans une réforme d'ampleur, sans ce nouveau pacte fondateur, la contractualisation de l'éducation nationale est inexorable.

Soyez-en assurée, les professeurs qui ne s'épanouissent pas dans leur métier ne seront pas en mesure de former les têtes bien faites de demain ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

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