Projet de loi Souveraineté alimentaire et agricole
Direction de la Séance
N°690
30 janvier 2025
(1ère lecture)
(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)
(n° 251 , 250 , 184, 187)
AMENDEMENT
C | Défavorable |
---|---|
G | Défavorable |
Rejeté |
présenté par
MM. GONTARD et SALMON, Mme GUHL, MM. JADOT, BENARROCHE, Grégory BLANC, DANTEC, DOSSUS et FERNIQUE, Mme de MARCO, M. MELLOULI et Mmes OLLIVIER, PONCET MONGE, SENÉE, SOUYRIS et Mélanie VOGEL
ARTICLE 1ER
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Alinéa 23
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 3° D’améliorer la coopération agricole sur le plan international, en soutenant les capacités exportatrices nécessaires à la sécurité alimentaire mondiale dans le respect de la souveraineté alimentaire des pays tiers, en maîtrisant les dépendances aux importations dans les filières stratégiques pour la souveraineté agricole et alimentaire, en sécurisant les approvisionnements alimentaires du pays, en privilégiant l’approvisionnement national dans le respect des règles du marché intérieur de l’Union européenne et des engagements internationaux, sans engendrer de concurrence déloyale ;
Objet
La réécriture de ce passage par le rapporteur du Sénat propose de manière antithétique d’améliorer tout à la fois « la compétitivité et la coopération agricole » . Cette référence à la compétitivité est incongrue dans un alinéa relatif à la coopération internationale en matière alimentaire...
Cet amendement a pour but de revenir à une version plus proche de celle l’Assemblée nationale mais complétée par une indispensable mention de la souveraineté alimentaire des pays tiers.
La France doit s’assurer que ses politiques agricoles et alimentaires n’aient pas d’impacts négatifs ou d’effets délétères sur le droit à l’alimentation et la souveraineté alimentaire des pays tiers, en particulier les pays en développement.
D’une part, du fait de leurs engagements régionaux et internationaux, la France et l’ensemble des États Membres de l’UE sont soumis à des obligations extraterritoriales et doivent s’assurer de :
- Respecter les droits humains, ne pas porter atteinte aux droits humains dans d’autres pays
- Protéger les populations des violations des droits humains, notamment en s’assurant que les acteurs économiques de la chaîne alimentaire qui opèrent sur le marché international et/ou à l’étranger ne portent pas atteinte aux droits humains, en particulier les droits des paysans, le droit à l’alimentation des populations et les droits environnementaux.
- Participer à la réalisation des droits humains au niveau international en mettant en œuvre des politiques de développement et une coopération internationale conformes et adaptées.
En outre, la France doit assurer la cohérence de ses politiques sur le développement des États tiers, un principe inscrit dans le Traité de l’Union européenne et dans le Traité de Lisbonne. Cela doit se traduire par l’analyse des impacts des politiques publiques sur le développement des pays tiers. Il convient à travers ce projet de loi de s’assurer que nos importations et nos exportations ne nuisent pas à leurs économies locales, leurs agricultures, la santé des populations et leur environnement, lorsqu’elles sont justifiées et après une évaluation de leurs impacts.
En effet, en contradiction avec l’objectif affiché de concourir à la sécurité alimentaire mondiale, le système agricole et alimentaire français contribue parfois à la déstabilisation des filières locales dans les pays en développement (PED) et réduit leur capacité à développer leur propre souveraineté alimentaire, à travers plusieurs mécanismes, notamment :
- l’importation de matières premières agricoles, en particulier les protéines végétales destinées à l’alimentation animale, issues de pratiques intensives qui menacent les ressources locales (sols, eau) et la capacité nourricière des pays du Sud et contribuent à la déforestation et l’effondrement de la biodiversité sauvage et cultivée ;
- l’export dans les pays en développement de matières premières agricoles à très bas coût, voire en-deçà des coûts de production, qui concurrencent de façon déloyale les productions locales dans les pays du Sud et renforce leur dépendance aux produits importés, au marché mondial et à la volatilité des prix de l’alimentation.
Ces exportations à bas coûts sont les conséquences d’une politique agricole qui subventionne de façon indirecte les produits exportés vers les pays tiers, et d’une politique commerciale qui ne permet plus de protéger les agricultures locales du dumping alimentaire ou d’autres formes de concurrence déloyale. La loi d’orientation pour la souveraineté alimentaire et agricole et le renouvellement des générations en agriculture doit protéger les agricultures locales, ici et dans les pays en développement, pour porter une vision cohérente et solidaire de la souveraineté alimentaire.
C’est le sens de cet amendement, travaillé avec le collectif Nourrir.