Projet de loi Construction de nouvelles installations nucléaires
Direction de la Séance
N°39
16 janvier 2023
(1ère lecture)
(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)
(n° 237 , 236 , 233)
AMENDEMENT
C | Défavorable |
---|---|
G | Défavorable |
Rejeté |
présenté par
MM. SALMON, LABBÉ, DANTEC, FERNIQUE, BENARROCHE, BREUILLER, DOSSUS et GONTARD, Mme de MARCO, M. PARIGI et Mmes PONCET MONGE et Mélanie VOGEL
ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 10
I. – Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l’article L. 542-13-2 du code l’environnement, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Les propriétaires de matières radioactives sont tenus de refléter la perspective industrielle réelle de valorisation de ces matières au plus tard dix années après l’arrêt de la dernière utilisation de la matière. L’analyse de ces valorisations potentielles se fait à l’aide de critères analysant l’ensemble du cycle de vie des matières et intègre une analyse financière comparative.
« Le ministère chargé de l’énergie précise les doctrines d’emploi relatives à la qualification de ces substances radioactives et les interactions entre l’amont et l’aval du cycle du combustible nucléaire. »
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Titre …
Mesures relatives à la transparence financière et industrielle
Objet
Cet amendement reprend l’article 10 de la proposition de loi visant à renforcer la sûreté nucléaire, la transparence financière et le contrôle parlementaire déposée par le groupe Écologiste - Solidarité et Territoires le 2 février 2022, qui aborde la question de la gestion des matières radioactives et leur potentielle requalification en déchets.
Une part prépondérante de l'électricité produite en France est d'origine nucléaire, fournie par les 56 réacteurs nucléaires français. Le combustible nucléaire utilisé dans ces réacteurs est principalement issu de l'uranium naturel. Les différentes étapes de fabrication, de mise en œuvre, de retraitement, de recyclage, etc., de ce combustible sont désignées par le terme de « cycle du combustible nucléaire ».
On parle d'amont du cycle pour la partie allant de l'extraction du minerai d'uranium jusqu'à l'utilisation du combustible dans un réacteur, et d'aval du cycle pour la partie débutant à la sortie du combustible irradié du réacteur et s'achevant avec le stockage définitif de déchets radioactifs issus de la gestion de ces combustibles usés. En France, l'aval du cycle comprend des étapes de retraitement des combustibles usés et de recyclage des matières issues de ce retraitement pour la fabrication de nouveaux combustibles. De ce fait, le cycle du combustible est dit « fermé », même s'il n'est en réalité qu'incomplètement fermé (car le recyclage des matières ne peut, aujourd'hui, être mis en œuvre qu'une fois), par opposition au cycle dit « ouvert », pratiqué dans d'autres pays dans lesquels les combustibles usés sont directement stockés sans recyclage.
Le choix français du retraitement des combustibles usés emporte des conséquences concrètes sur l'ensemble de la gestion du cycle du combustible. En effet, à la sortie du réacteur, les combustibles usés sont entreposés dans des piscines en attente de leur retraitement. À l'issue du processus de retraitement, des matières recyclables ont été séparées - telles que le plutonium, servant à la production du combustible MOX2 -, et des substances radioactives ont été conditionnées sous la forme de déchets vitrifiés, en vue de leur stockage à terme.
L'évacuation des combustibles usés des centrales nucléaires dépend donc de la capacité de retraitement de ces combustibles, ainsi que des capacités d'entreposage disponibles dans l'attente de ce retraitement (le taux de disponibilité des piscines d'entreposage était évalué à 13,3 % fin 2016). Cet équilibre entre les déchargements de combustible des réacteurs et leur retraitement ne peut être garanti que si un nombre suffisant de réacteurs ont recours au combustible MOX, faute de quoi le stock français de plutonium s'accroitrait. Le respect de cet équilibre constitue un paramètre clé de la planification de la production électronucléaire. Ce paramètre doit donc être pris en compte dans les différentes programmations pluriannuelles de l'énergie (PPE), qui ont été instituées par la loi de transition énergétique pour une croissance verte (LTECV) de 2015. Cette prise en compte est d'autant plus importante que l'objectif de réduction à 50 % de la part du nucléaire dans la production électrique, dans un contexte de vieillissement du parc nucléaire existant, va engendrer des évolutions significatives des flux du cycle du combustible nucléaire. Des investissements importants - sur le parc actuel de réacteurs ou dans les installations d'entreposage des matières et déchets - doivent donc être réalisés au cours de la prochaine décennie. Il est nécessaire qu'ils tiennent compte des effets de rétroaction entre l'amont et l'aval du cycle. La discussion sur les alternatives possibles pour ces investissements n'a pas eu lieu lors du débat public de 2018 sur la PPE et les choix proposés dans le projet publié en janvier 2019 reposent sur des arbitrages qui n'ont pas été expliqués au grand public. Une plus grande transparence sur ce sujet permettrait d'apprécier pleinement la place qu'occupent les questions liées à l'aval du cycle du combustible parmi les déterminants des choix d'évolution des infrastructures nucléaires.