Projet de loi Mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat
Direction de la Séance
N°123
27 juillet 2022
(1ère lecture)
(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)
(n° 828 , 827 , 822, 825, 826)
AMENDEMENT
C | Défavorable |
---|---|
G | Défavorable |
Rejeté |
présenté par
Mmes PONCET MONGE et Mélanie VOGEL, MM. BENARROCHE, BREUILLER, DANTEC, DOSSUS, FERNIQUE, GONTARD et LABBÉ, Mme de MARCO et MM. PARIGI et SALMON
ARTICLE 1ER
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I. –Alinéa 19
Supprimer cet alinéa.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
Objet
Les accords d'intéressement sont un outil qui lient les salariés à la performance et à la rentabilité de l'entreprise. En 2022, selon le gestionnaire d’actifs Amundi, la hausse des bénéfices des entreprises françaises en 2021 a justement permis une augmentation des versements au titre de la participation et de l'intéressement des salariés de 30 %. Du moins des salariés des 38 % d’entreprises ayant un accord d’intéressement (excluant les associations). Tout dispositif d’aides publiques conditionnant à un accord d’intéressement privilégie ces seules entreprises, privilège croissant avec la taille.
L’intéressement peut aussi pousser à la modération salariale en limitant la part fixe des rémunérations et en conditionnant une part du salaire aux années de bénéfices, il fait partie des dispositifs accroissant la part variable de la rémunération et l’éviction d’une partie de la rémunération des droits contributifs.
Or, quelle que soit l’appréciation portée sur ces accords et à leur possible effet partiel de substitution, rien ne justifie que la minorité des entreprises en disposant bénéficie d’une multiplication des avantages quant aux primes dont la justification est de protéger tous les salariés de la baisse du pouvoir d’achat due à l’inflation.
L’encouragement direct et indirect à recourir ou accélérer la conclusion de ces accords comme l’article élargissant la possibilité d’accords unilatéraux de la part des employeurs, ne présentent aucun lien avec ce projet de loi traitant des mesures d’urgences face à l’inflation. Il peut être qualifié de cavalier législatif.
Et ce, dans un contexte où selon l’INSEE, en décembre 2021, le taux de marge des entreprises s’est envolé aux alentours de 36 %, soit son plus haut niveau depuis 1949. Or cette augmentation sur le long terme n’est pas le fruit du hasard : elle est due en partie à la dé-corrélation introduite dans les années 80 entre l’inflation et sa répercussion postérieure sur les salaires, stigmatisé par les libéraux théorisant la boucle prix-salaires, à la faveur de quoi la part des salaires dans le PIB s’est fortement et durablement dégradée.
Aussi, aujourd’hui, le risque est bien une nouvelle dégradation de ce partage de la valeur ajoutée, les mécanismes qui privilégient les mesures ponctuelles faisant porter sur le seul facteur travail l’effet durable de la dégradation des condition d’échanges, présentent un risque de nouvelle dégradation du partage des richesses.
Encore moins qu’hier, l’intéressement ne peut être l’outil de restitution aux salariés de la perte de la valeur en euros constants de leurs rémunérations. D’autant que selon la DARES, seul 8,8% des entreprises de moins de 50 salariés ont recours à l’intéressement, ce qui suffit à démontrer l’inégale répartition de l’abondement de ces primes et de conclure que l’augmentation de la prime ne touchera qu’une part restreinte des salariés, parmi lesquels probablement les plus privilégiés.
Cet amendement se propose donc de supprimer le doublement de la prime en cas d’accord d’intéressement afin de garantir l’urgence de l’augmentation des salaires, seul moyen de protéger le pouvoir d’achat de façon pérenne et équitable. En effet, il y a fort à parier que l’augmentation de cette prime ne pourra contribuer, de la même manière que pour la prime PEPA, qu’à un effet d’aubaine accroissant les inégalités salariales au sein de la population active.