Proposition de loi Sortir la France du piège du narcotrafic
commission des lois
N°COM-72
20 janvier 2025
(1ère lecture)
(n° 735 rect. (2023-2024) )
AMENDEMENT
Adopté |
présenté par
Mme Muriel JOURDA et M. DURAIN, rapporteurs
ARTICLE 14
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I. – Alinéas 2 et 3
Remplacer ces alinéas par huit alinéas ainsi rédigés :
1° L’article 132-78 est ainsi modifié :
a) Les deux premiers alinéas sont ainsi rédigés :
« La personne qui a tenté de commettre un crime ou un délit est, dans les cas prévus par la loi, exempte de peine si, ayant averti l’autorité administrative ou judiciaire, elle a permis d’éviter la réalisation de l’infraction ou de mettre fin à sa préparation.
« Dans les cas prévus par la loi, la durée de la peine privative de liberté encourue par une personne ayant commis un crime ou un délit est réduite si, ayant averti l’autorité administrative ou judiciaire, elle a permis de faire cesser la réalisation de l’infraction, d’éviter ou de limiter les dommages qu’elle a produits ou d’identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices. » ;
b) Au troisième alinéa, les mots : « de l’alinéa précédent » sont remplacés par les mots : « du deuxième alinéa »
1° bis Après le même article 132-78, il est inséré un article 132-78-1 ainsi rédigé :
« Art. 132-78-1. – Le bénéfice d’une exemption ou d’une réduction de peine prévue par le présent code est subordonné à la présence dans le dossier de la procédure du rapport mentionné à l’article 706-63-1 A du code de procédure pénale et de la convention prévue au cinquième alinéa de l’article 706-63-1 du même code, sauf si la personne a effectué des déclarations au cours de l’audience de jugement.
« Les modalités par lesquelles la juridiction se prononce sur la peine et fixe la durée maximale de l’emprisonnement encouru par le condamné pendant le délai de prescription de la peine sont définies par l’article 706-63-1 précité. »
II. – Alinéa 4
1° Supprimer les mots :
des troisième et quatrième alinéas
2° Remplacer les mots :
à la moitié de la durée de la peine restant à exécuter
par les mots :
au tiers de la peine prononcée par la juridiction de jugement
III. – Alinéas 5 et 6
Supprimer ces alinéas.
IV. – Alinéas 8 à 11
Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :
2° L’article 221-5-3 est ainsi rédigé :
« Art. 221-5-3. - Toute personne qui a tenté de commettre les crimes d’assassinat ou d’empoisonnement est exempte de peine si, ayant averti l’autorité administrative ou judiciaire, elle a permis d’éviter la mort de la victime.
« La peine privative de liberté encourue par l’auteur ou le complice est ramenée à vingt ans de réclusion criminelle si, ayant averti l’autorité administrative ou judiciaire, il a permis d’éviter la répétition de l’infraction ou d’identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices. »
V. – Alinéas 12 et 13
Remplacer ces alinéas par sept alinéas ainsi rédigés :
3° Après les mots : « faire cesser les agissements incriminés et d’identifier, le cas échéant, les autres coupables », la fin de la première phrase de l’article 222-43 est ainsi rédigée : « faire cesser la réalisation de l’infraction, d’éviter ou de limiter les dommages qu’elle a produits ou d’identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices. » ;
4° L’article 222-43-1 est ainsi modifié :
a) Après les mots : « réalisation de l’infraction », la fin de l’alinéa est ainsi rédigée : « ou de mettre fin à sa préparation » ;
b) Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La peine privative de liberté encourue par l’auteur ou le complice de l’une des infractions prévues par la présente section est réduite de moitié si, ayant averti l’autorité administrative ou judiciaire, il a permis de faire cesser la réalisation de l’infraction, de mettre fin à sa préparation, d’éviter ou de limiter les dommages qu’elle a produits ou d’identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices. » ;
4° bis Après l’article 222-67, il est inséré un article 222-67-1 ainsi rédigé :
« Art. 222-67-1. - Toute personne qui a tenté de commettre les infractions prévues par la présente section est exempte de peine si, ayant averti l’autorité administrative ou judiciaire, elle a permis d’éviter leur réalisation ou de mettre fin à sa préparation.
« La peine privative de liberté encourue par l’auteur ou le complice de l’une des infractions prévues par la présente section est réduite de moitié si, ayant averti l’autorité administrative ou judiciaire, il a permis de faire cesser la réalisation de l’infraction, d’éviter ou de limiter les dommages qu’elle a produits ou d’identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices. »
VI. – Alinéas 18 à 27
Remplacer ces alinéas par trente-cinq alinéas ainsi rédigés :
1° L’intitulé est ainsi rédigé : « Des collaborateurs de justice » ;
2° Au début, sont ajoutés des articles 706-63-1 A à 706-63-1 D ainsi rédigés :
« Art. 706-63-1 A. – I. – Les personnes susceptibles de bénéficier d’une exemption ou d’une réduction de peine en application du code pénal et qui expriment, au cours de l’enquête ou de l’instruction, la volonté de collaborer avec la justice aux fins d’éviter la réalisation d’une infraction, de mettre fin à sa commission ou à sa préparation, d’éviter ou de limiter les dommages qu’elle a produits ou d’en identifier les auteurs ou complices peuvent se voir octroyer le statut de collaborateur de justice dans les conditions prévues au présent article.
« II. – Lorsqu’une personne mentionnée au I exprime sa volonté de collaborer avec la justice, le procureur de la République ou le juge d’instruction, après avis du procureur de la République, requiert un service figurant sur une liste fixée par décret en Conseil d’État, aux fins d’évaluer la personnalité et l’environnement de cette personne. Après réception de cette évaluation, le procureur de la République ou le juge d’instruction après avis du procureur de la République recueille les déclarations ou fait procéder à ce recueil par procès-verbal séparé lorsqu’il existe des raisons sérieuses de penser qu’elles sont déterminantes pour la manifestation de la vérité.
« Le procureur de la République ou le juge d’instruction procède à l’évaluation du caractère sincère, complet et déterminant des déclarations recueillies sur procès-verbal.
« Après avoir recueilli l’avis de la commission mentionnée à l’article 706-63-1, si le procureur de la République ou le juge d’instruction l’estime opportun au regard de la complexité ou de la gravité de l’affaire, il octroie à la personne concernée le statut de collaborateur de justice. Les procès-verbaux de déclaration et l’avis de la commission sont joints à la décision. Lorsque la commission a rendu un avis défavorable, le magistrat indique les éléments qui lui semblent justifier de passer outre cet avis.
« Les procès-verbaux de déclaration ne peuvent être versés en procédure.
« III. – Les personnes mentionnées au I disposent d’un délai de cent quatre-vingt jours pour communiquer toutes les informations utiles en leur possession.
« Leurs déclarations sont consignées dans un rapport établi par les officiers de police judiciaire sous le contrôle du juge d’instruction ou du procureur de la République. Les mesures de protection mentionnées à l’article 706-63-1 ne peuvent être accordées aux personnes qui n’ont pas communiqué toutes les informations dans le délai prescrit ; elles peuvent également être révoquées en cas de violation des engagements contenus dans la convention conclue en application de l’article 706-63-1 C.
« Lorsque la collaboration d’une personne avec la justice concerne l’une des infractions mentionnées à l’article 706-74-1, le recueil et la consignation des informations sont assurés par le procureur de la République national anti-criminalité organisée.
« Art. 706-63-1 B. – I. – À titre exceptionnel et dans l’intérêt de la justice, lorsque les déclarations de la personne concernée sont d’une importance déterminante pour la manifestation de la vérité, notamment lorsqu’elles permettent l’identification d’un grand nombre d’autres auteurs ou de complices ou lorsqu’elles permettent de faire cesser ou d’éviter la commission ou la répétition d’une infraction d’une particulière gravité, le procureur de la République national anti-criminalité organisée, le procureur de la République près d’un des tribunaux judiciaires dont la compétence territoriale a été étendue au ressort d’une ou plusieurs cours d’appel en application de l’article 706-75 ou le juge d’instruction appartenant à la formation spécialisée de l’instruction des tribunaux judiciaires précités peut octroyer à une personne ayant collaboré avec la justice une immunité de poursuites dans les conditions prévues au le présent article.
« II. – Dans le cas où, après avoir recueilli les déclarations d’une personne entrant dans les prévisions du I de l’article 706-63-1 A et après avoir accompli les formalités prévues aux II et III du même article 706-63-1 A, le magistrat compétent envisage de lui proposer une immunité de poursuites, totale ou partielle, il requiert, au moins trente jours avant la conclusion de la convention mentionnée au III du présent article, l’avis de la commission mentionnée à l’article 706-63-1. Celle-ci se prononce dans un délai maximal de quatorze jours ; seules peuvent se voir accorder l’immunité de poursuites, les personnes dont le dossier a fait l’objet d’un avis favorable de la commission. Cette dernière peut, pour former son avis, saisir à nouveau le service mentionné au premier alinéa du II de l’article 706-63-1 A, qui se prononce alors dans le délai qu’elle fixe.
« III. – Lorsque la commission mentionnée à l’article 706-63-1 a donné un avis favorable à l’octroi d’une immunité de poursuites, le magistrat compétent rédige une convention qui comporte, outre les éléments mentionnés à l’article 706-63-1 C :
« 1° La liste précise des infractions commises pour lesquelles l’immunité est applicable ;
« 2° Les mesures de protection et de réinsertion accordées à la personne concernée et à ses proches ;
« 3° La liste des engagements auxquels la personne concernée est tenue et la durée de chacun de ces engagements ;
« 4° Le cas échéant, les conditions dans lesquelles l’immunité prend fin.
« IV. – Le délai de prescription de la peine encourue pour les infractions pour lesquelles une immunité a été accordée est réputé commencer à courir à la date de la conclusion de la convention mentionnée au III.
« Pendant la durée de prescription, s’il survient des éléments nouveaux faisant apparaître que la personne concernée a effectué des déclarations volontairement inexactes ou incomplètes, ou si elle commet une nouvelle infraction ou viole l’un des engagements pris dans le cadre de la convention qu’elle a conclue avec l’autorité judiciaire, l’immunité accordée prend fin de plein droit. La constatation de la fin de l’immunité est faite, sur réquisition du procureur de la République, par la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris.
« V. – Lorsqu’une immunité de poursuites a été accordée en application du présent article, les déclarations du collaborateur de justice sur l’infraction concernée ne peuvent en aucun cas être invoquées contre lui dans une procédure juridictionnelle, de quelque nature qu’elle soit. L’immunité accordée en application du présent article est valable devant toutes les juridictions françaises sans limitation de durée, sauf lorsque le statut de collaborateur de justice est révoqué dans les conditions prévues au IV.
« Aucune immunité ne peut être accordée pour des infractions dont la commission n’aurait pas cessé ou débuté à la date de conclusion de la convention mentionnée au III.
« Art. 706-63-1 C. – La personne bénéficiant d’une immunité de poursuites, d’une exemption ou d’une réduction de peine ou de mesures de protection et de réinsertion en application des articles 706-63-1 A, 706-63-1 B ou 706-63-1 s’engage par le biais d’une convention conclue avec le juge d’instruction ou avec le procureur de la République à respecter les règles de sécurité prescrites, à collaborer au bon déroulement de l’enquête, à garder secrètes les informations transmises à la justice, à s’abstenir de tout contact avec les autres auteurs ou complices de l’infraction et à indemniser les victimes, ainsi qu’à respecter toute autre mesure prévue par la convention.
« Lorsqu’elle est conclue en application de l’article 706-63-1 A, la convention comporte également la mention de l’exemption ou de la réduction de peine demandée par le juge d’instruction ou par le procureur de la République.
« Lorsqu’elle est saisie, et sauf décision spécialement motivée, la juridiction de jugement est tenue d’octroyer au collaborateur de justice le bénéfice des exemptions ou réductions de peine prévues par la convention. Elle fixe également la durée maximale de l’emprisonnement encouru par le condamné s’il survient, pendant le délai de prescription de la peine, des éléments nouveaux faisant apparaître qu’il a effectué des déclarations volontairement inexactes ou incomplètes, s’il commet une nouvelle infraction ou s’il viole l’un des engagements pris dans le cadre de la convention qu’elle a conclue avec l’autorité judiciaire. Dans l’une de ces hypothèses, le tribunal de l’application des peines peut, sur réquisitions du procureur de la République et par décision motivée rendue après un débat contradictoire, ordonner la mise à exécution, en tout ou partie, de l’emprisonnement prévu par la juridiction de jugement.
« Art. 706-63-1 D. – Aucune condamnation ne peut être prononcée sur le seul fondement de déclarations recueillies dans les conditions prévues aux articles 706-63-1 A et 706-63-1 B. » ;
2° L’article 706-63-1 est ainsi modifié :
a) Le deuxième alinéa est supprimé ;
b) Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le fait de révéler qu’une personne a sollicité des mesures de protection ou de réinsertion en application du présent article ou que cette personne et, le cas échéant, ses proches bénéficient de telles mesures est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende. »
c) Avant le dernier alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Les décisions octroyant, refusant ou révoquant des mesures de protection ou de réinsertion sont motivées et notifiées aux personnes faisant l’objet de telles mesures, au procureur de la République et, le cas échéant, au juge d’instruction. Le président de la chambre de l’instruction connaît des recours formés par le procureur de la République, la personne concernée ou, le cas échéant, le juge d’instruction contre ces décisions ; le débat a lieu et ce magistrat statue en audience de cabinet. Sa décision n’est pas publiée.
« En cas de nécessité, la commission nationale peut autoriser le collaborateur de justice à faire usage d’une identité d’emprunt ou à modifier son état civil à titre définitif lorsque cette dernière mesure apparaît indispensable au regard de la gravité de la menace encourue. Cette faculté s’applique également aux proches de la personne concernée. » ;
3° L’article 706-63-2 est ainsi rédigé :
« Art. 706-63-2. - Sur la requête du juge d’instruction ou du procureur de la République, la chambre de l’instruction peut ordonner, à tous les stades de la procédure, l’audition ou la comparution des collaborateurs de justice ou des personnes mentionnées au premier alinéa de l’article 706-63-1 dans des conditions de nature à préserver leur anonymat, y compris en bénéficiant du dispositif technique mentionné à l’article 706-61 ou de tout dispositif permettant d’altérer ou de transformer leur voix ou leur apparence physique. »
Objet
Outre des améliorations rédactionnelles et des harmonisations et coordinations, le présent amendement vise à :
- ouvrir la possibilité de recourir aux dispositifs des « repentis » en matière de trafic d’armes ;
- effectuer diverses simplifications suggérées par le président de la commission de protection et de réinsertion (CNPR), Marc Sommerer, s’agissant de l’exemption de peine, de la compétence de la CNPR pour attribuer des identités d’emprunt aux « repentis » ou encore pour renforcer la protection de ces derniers à tous les stades de la procédure ;
- préciser les conditions dans lesquelles le statut de collaborateur de justice pourra être révoqué et les conséquences d’une telle révocation (à savoir, en particulier, la mise à exécution de la peine d’emprisonnement complémentaire qui aura été prévue ab initio par la juridiction de jugement) ;
- surtout, à créer, sur le modèle du droit britannique, un système d’immunité de poursuites pour les personnes dont les déclarations justifieraient une telle immunité : décidée à titre exceptionnel et par les seuls magistrats spécialisés (c’est-à-dire ceux des Jirs et le futur procureur national anti-criminalité organisée), elle serait réservée au cas où de telles déclarations ont un impact majeur (grand nombre de victimes, particulière gravité de l’infraction dont la commission ou la répétition est évitée…) et serait soumise à l’avis conforme de la commission nationale de protection et de réinsertion.