Projet de loi Lutte contre le dérèglement climatique
commission de l'aménagement du territoire et du développement durable
N°COM-652
25 mai 2021
(1ère lecture)
(n° 551 )
AMENDEMENT
Rejeté |
présenté par
MM. DANTEC, FERNIQUE, LABBÉ, SALMON
et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires
ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 23
Après l'article 23
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 5° de l’article L. 314-20 du code de l’énergie, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le complément de rémunération prévue au 4° peut être modulé en fonction du productible du site d’implantation du projet, dans le but de favoriser une répartition aussi équilibrée que possible des installations sur l’ensemble du territoire, et de faciliter l’atteinte des objectifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie définie aux articles L. 141-1 à L. 141-6 du code de l’énergie. »
Objet
Cet amendement prévoit d’adapter les dispositifs de soutien des projets d'énergies renouvelables aux disparités territoriales.
Pour mener à bien la transition énergétique et participer aux objectifs régionaux et nationaux, les collectivités locales intègrent dans leurs plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET) un volume significatif de production d’électricité solaire photovoltaïque qui s’avère être, de fait, un incontournable des stratégies locales de transition énergétique. Pour autant, les mécanismes de soutien (tarifs d’obligation d’achat et appels d’offres) ne tiennent aucun compte du différentiel d’ensoleillement entre régions françaises qui, cas unique en Europe, est proche de 1 à 2 entre Lille et Perpignan. Cet état crée une distorsion entre territoires pour ce qui est des moyens à leur disposition pour atteindre les objectifs qu’ils se sont fixés et sur lesquels ils se sont engagés pour participer légitimement à l’effort collectif.
La répartition réelle des puissances photovoltaïques installées en France métropolitaine ne suffit pas, et de loin, à combler l’écart entre régions méridionales et septentrionales : ainsi, à population équivalente, l’écart de puissance installée fin 2019 entre les Hauts-de-France et l’Occitanie est d’un facteur 12 alors que le différentiel d’ensoleillement est d’un facteur de 1,8 environ.
Les premiers à pâtir de cette situation sont les projets à gouvernance locale portés par les citoyens et les collectivités, qui se caractérisent par un ancrage territorial fort et une taille souvent modeste. Ces caractéristiques deviennent dans le contexte actuel de développement du solaire photovoltaïque des handicaps alors qu’ils devraient être considérés comme des atouts pour une transition énergétique partagée et citoyenne. Au-delà de cette inégalité territoriale qui mérite d’être au moins partiellement compensée, cette situation a pour conséquences néfastes une désoptimisation globale à la fois des surfaces disponibles sans concurrence d’usage : pour le photovoltaïque, spéculation foncière au Sud, friches en déshérence au Nord et pour l’éolien, forte concentration des projets dans certaines régions qui vient contribuer à l’opposition croissante de la population alors que certains territoires n’arrivent toujours pas à attirer les projets.
Le principe d’une différenciation géographique des mécanismes de soutien peut apporter des co-bénéfices financiers : des gains sont à attendre en matière d’accès au foncier, de besoins de renforcement du réseau, de taux d’échec des projets et de baisse des coûts par croissance du marché. D’autre part, il est pourtant possible de dimensionner les dispositifs de manière à atteindre au global la neutralité en termes de coût supporté par la collectivité par kWh produit. D’un point de vue juridique, il est à noter que la France a déjà mis en place des dispositions allant dans le sens d’une différenciation géographique à plusieurs reprises (pour l’éolien entre 2002 et 2015 via un tarif d’achat calculé sur 15 ans site par site, pour le complément de rémunération éolien de 2016 et 2017, ou pour le photovoltaïque en 2010 via des appels d’offres par région administrative). D’ailleurs la toute nouvelle version de la loi « EEG » allemande entrée en vigueur en janvier 2021 prévoit des appels d’offres régionalisés à hauteur 15% du volume total sur 2022-2023 et de 20% en 2024 afin de favoriser le déploiement de l’éolien dans le Sud du pays, dans les deux cas sans opposition de la Commission européenne quant à la conformité aux lignes directrices sur l’encadrement des aides d’Etat.