Projet de loi Lutte contre le dérèglement climatique

commission de l'aménagement du territoire et du développement durable

N°COM-1277 rect.

31 mai 2021

(1ère lecture)

(n° 551 )


AMENDEMENT

Satisfait ou sans objet

présenté par

MM. LEFÈVRE, BRISSON, POINTEREAU, SAUTAREL et GENET, Mme DELMONT-KOROPOULIS, MM. ROJOUAN et DUPLOMB, Mme GRUNY, MM. BURGOA et CHARON, Mmes DEROMEDI et GARRIAUD-MAYLAM et M. de NICOLAY


ARTICLE 19 BIS C (NOUVEAU)

Consulter le texte de l'article ^

Alinéa 2 :

- Au 1°, les mots « sans que puisse être remis en cause son usage actuel ou potentiel, en particulier aux fins de production d'énergie. » sont supprimés.

- Au 2°, les mots « S'agissant plus particulièrement des moulins à eau, l'entretien, la gestion et l'équipement des ouvrages de retenue sont les seules modalités prévues pour l'accomplissement des obligations relatives au franchissement par les poissons migrateurs et au transport suffisant des sédiments à l'exclusion de toute autre et, notamment, de celles portant sur la destruction de ces ouvrages » 

sont remplacés par les mots

« L'obligation prévue au présent 2° ne peut servir de motif pour justifier la destruction des moulins à eau ni des éléments essentiels de l'ouvrage permettant l'utilisation de la force motrice du cours d'eau, sauf s'il s'agit de la volonté du propriétaire du moulin. »

Objet

L'amendement proposé reprend l'objectif de l'article 19 bis C de non-destruction des moulins à eau dans le cadre de la mise en oeuvre des obligations de restauration de continuité écologique des cours d'eau, mais sous une forme jugée plus claire et permettant de concilier protection de la biodiversité avec la préservation du patrimoine existant : il reprend pour ce faire la rédaction de l'alinéa 1 de l'article 5 de la proposition de loi "Hydroélectricité" de notre collègue Daniel Gremillet, avec un ajout clarifiant le cas où un propriétaire de moulin souhaiterait effacer son seuil. 

La rédaction de l'article 19 bis C dans ses termes actuels, tels que ceux votés en séance publique à l'Assemblée nationale, soulève un certain nombre de difficultés détaillées ci-après que la formulation déployée dans le dispositif permettrait d'éviter :

1/ L'article 19 bis C ajoute une restriction des règles pouvant être prescrites au titre de la restauration de la continuité écologique des cours d'eau sur l'ensemble des ouvrages listés en 2°. Il conditionne les mesures à l'absence de remise en cause de l'usage actuel ou potentiel de l'ouvrage.

Cet ajout, qui est opéré sur l'article actuel, ne se limite pas aux seuls moulins visés dans l'exposé des motifs mais s'opère sur tous les types d'ouvrages que l'on peut trouver sur un cours d'eau : barrages, retenues etc.

La notion d'usage "potentiel", abstraite et extrêmement large, interroge la notion même de ruine d'un ouvrage ou de risque, et projette l'ouvrage vers un usage qui, aujourd'hui ne serait ni connu ni réglementé. L'amendement mentionne par ailleurs, "en particulier aux fins de production d'énergie", ce qui laisse entendre que d'autres usages sont possibles, ouvrant ainsi la porte à de nombreux contentieux relatifs à la caractérisation du potentiel. Tout ouvrage, quel que soit son usage initial et même dans sa configuration actuelle, a un "potentiel d'usage" théorique.

À cet égard, la notion de "non remise en cause de l'usage potentiel" revient notamment à interdire toute prescription de suppression des 20 000 obstacles référencés en liste 2° et par extension, des 100 000 ouvrages répertoriés sur l'ensemble des cours d'eau.

L'interdiction de remise en cause de l'usage potentiel d'un ouvrage pourra également s'imposer de plein droit au propriétaire lui-même, qui ne pourra plus choisir de supprimer son ouvrage afin d'en éviter les charges d'équipement, de gestion et d'entretien car quand bien même ceci serait sa volonté, des prescriptions auront à être établies pour la réalisation des travaux de démantèlement figurant aux objectifs visés à l'art. L.211-1 du Code de l'environnement.

La formulation actuelle de l'article 19 bis C risquerait enfin d'empêcher le propriétaire de bénéficier des aides des agences de l'eau pour une suppression rendue implicitement interdite par la loi.

2/ L'article 19 bis C ajoute également un paragraphe spécifique aux moulins à eau, qui réitère explicitement cette interdiction de suppression d'ouvrages.

Ce paragraphe introduit une distinction entre les moulins à eau et les autres ouvrages visés à l'art. L.214-17 du Code de l'environnement, sans en définir les caractéristiques pour autant. La teneur des débats à l'Assemblée nationale permettrait de définir un moulin à eau comme une "installation ayant initialement utilisé la force mécanique de l'eau (ancienneté et différenciation avec les petites centrales, dont la seule vocation est la production d'électricité), dont les caractéristiques des ouvrages hydrauliques n'ont pas été bouleversées (intérêt patrimonial) et sont encore en état de fonctionner (potentielle remise en exploitation sans impact supplémentaire)".

En ce qui concerne les "autres ouvrages", l'exclusion explicite de la possibilité de destruction des moulins à eau intégré à cet alinéa empêchera les propriétaires de moulins d'obtenir des aides des agences de l'eau pour la suppression volontaire de leur seuil aux fins de restauration de la continuité écologique, qui sera explicitement interdite par la loi. 

3/ Il a enfin été relevé que les arasements ou suppressions de seuils d'eau avaient une incidence bénéfique sur la réduction du nombre d'inondations, notamment sur les retenues d'eau ne faisant plus l'objet d'entretien ou de manipulation, et permettant ainsi une dispersion des crues mieux répartie entre écoulement dans le lit mineur et débordement en lit majeur.

3/ Le présent amendement propose donc de conserver le principe d'une interdiction de suppression liée aux obligations de restauration de la continuité écologique, tout en maintenant la liberté du propriétaire de ne pas conserver un ouvrage qui ne lui sert plus et qui lui coûte en entretien et gestion.

Tel est le sens de cet amendement.



NB :La présente rectification porte sur la liste des signataires.