Projet de loi Souveraineté alimentaire et agricole
commission des affaires économiques
N°COM-408
6 juin 2024
(1ère lecture)
(n° 639 )
AMENDEMENT
présenté par
MM. DUPLOMB et MENONVILLE, rapporteurs
ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 15
Après l'article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa du V de l’article L. 122-1, il est inséré une phrase ainsi rédigée : « L’avis de l’autorité environnementale se fonde sur les enseignements de la science et cite les études académiques mobilisées dans son élaboration. » ;
2° L’article L. 181-10-1 est ainsi modifié :
a) Le II est ainsi modifié :
- À la seconde phrase du deuxième alinéa, les mots : « de trois » sont remplacés par les mots : « d’un » ;
- À la seconde phrase du deuxième alinéa, après la première occurrence du mot : « mois », la fin de la phrase est supprimée ;
b) Le III est ainsi modifié :
- Le 1° est supprimé ;
- Au 4°, après le mot : « conditions », la fin de la phrase est supprimée ;
- La même première phrase du 5° est supprimée.
3° Au deuxième alinéa de l’article L. 512-7, les mots : « soumises ni à la directive 2010/75/ UE du Parlement européen et du Conseil du 24 novembre 2010 relative aux émissions industrielles au titre de son annexe I, ni » sont remplacés par les mots : « pas soumises ».
Objet
Cet amendement procède à plusieurs modifications des procédures environnementales concernant les plus grands élevages, à la demande des filières de production animale (porc, aviculture). Dans un contexte où, par exemple, le taux de couverture de la consommation nationale par la production nationale n’est que de 58 % en poulet, cet amendement vise à augmenter le potentiel productif de la France (« il faudrait 400 poulaillers supplémentaires en France, sauf à manger deux fois moins de volaille », a dit le ministre de l’agriculture devant la commission des affaires économiques). Aussi :
1) L’amendement rappelle d’abord le principe que l’avis de l’autorité environnementale se fonde sur les enseignements de la science et mentionne les études académiques qu’il mobilise. Ce faisant, il permet de renforcer la qualité et la fiabilité de cet avis, ainsi que la transparence sur son élaboration. Il permet également de renforcer l’autorité des décisions de l’autorité environnementale. Il permet enfin de limiter les risques d’annulation des projets ICPE pour insuffisance de l’étude d’impact.
2) L’amendement revient ensuite sur un effet de bord d’une disposition de la loi « Industrie verte » (pas encore entrée en vigueur) qui, en cherchant à accélérer les procédures d’autorisation environnementale par la « parallélisation » des phases d'examen et de consultation du public, a en fait conduit à des lourdeurs administratives supplémentaires pour les projets d’élevage, à rebours de l’intention affichée de facilitation des implantations.
En pratique, la durée de consultation a été étendue à trois mois, et deux réunions publiques sont prévues, une d’ouverture et une de clôture, le tout au frais des porteurs de projet. La loi « Industrie verte » est donc source de contentieux et d’irritants locaux supplémentaires, ce qui peut décourager des créations ou extensions d’élevage, là où la volonté politique, illustrée par l'article 15, est au contraire de limiter les freins juridiques aux projets agricoles. Le présent amendement rétablit donc une durée de consultation publique d’un mois et supprime les réunions publiques d’ouverture et de clôture. Afin de ne pas complexifier davantage le paysage juridique, l’évolution prévue au présent amendement concerne l’ensemble des projets soumis au régime des ICPE, et pas uniquement ceux d’élevage.
3) L’amendement procède ensuite au relèvement des seuils faisant basculer de l’enregistrement à l’autorisation ICPE, et donc à partir desquels s’applique l’obligation d’enquête publique, en s’alignant sur les seuils de la directive EIE (évaluation des incidences sur l’environnement) et non plus sur ceux, inférieurs, de la directive IED (directive sur les émissions industrielles). En élevage, le seuil à partir duquel une autorisation serait nécessaire passerait de 2 000 à 3 000 porcs de production (+ 50 %), et de 40 000 volailles ou poules pondeuses à 60 000 pondeuses (+ 50 %) et 85 000 volailles (+ 112,5 %).
L’interprétation de l’administration française avait jusqu’ici été que le régime d’enregistrement devait son assise juridique à l’exclusion des installations relevant de la directive IED de son champ. Elle avait jugé également que les plus gros élevages de porcs et de volailles, soumis à la directive IED et devant à ce titre faire l’objet d’une autorisation « propre à l’installation » (aux termes de la directive), ne pouvaient être sous le régime de l’enregistrement, ce régime prévoyant le respect de prescriptions générales « standards » – et non propres à l’installation. Selon les filières de production animale, c’est précisément cette interprétation qui constitue une surtransposition. Il sera toujours possible au juge d’ordonner de soumettre le projet à autorisation environnementale (dans le cadre de l’examen « au cas par cas »).
Cet amendement présente un lien au moins indirect avec l’article 15 du présent projet de loi, qui crée une possibilité de régularisation des dossiers des projets ICPE devant le juge, accélère les recours à leur encontre et prolonge la durée des autorisations accordées aux pétitionnaires, ainsi qu’avec les articles 16 et 17 (nomenclatures ICPE).