Le Sénat,
Vu l'article 88-4 de la Constitution,
Vu la directive 2010/13/UE du Parlement européen et du Conseil du 10 mars 2010 visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels (directive « Services de médias audiovisuels »),
Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2010/13/UE visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels, compte tenu de l'évolution des réalités du marché enregistrée à la Présidence du Sénat le 2 juin 2016 - COM(2016) 287 final,
Vu le projet de rapport du 15 septembre 2016 de la commission de la culture et de l'éducation du Parlement européen,
Se félicite de l'initiative de la Commission européenne visant à adapter le droit de l'Union européenne aux nouvelles technologies qui bouleversent ce secteur et aux nouvelles pratiques de consommation qui en découlent ;
Soutient l'approche générale de cette proposition qui vise à établir une concurrence équitable entre tous les acteurs de l'audiovisuel dans le respect de la protection des consommateurs, à encadrer juridiquement l'activité des plateformes de partage de vidéos et à assurer l'indépendance des régulateurs de l'audiovisuel ;
Rappelle que la directive « Services de médias audiovisuels » est une directive d'harmonisation minimale et qu'elle doit le rester dans tous ses aspects et laisser la possibilité aux États membres d'aller plus loin s'ils le veulent ;
Concernant l'extension du champ matériel de la directive :
Se satisfait de voir intégrées dans le champ de la directive « Services de médias audiovisuels » les plateformes de partage de vidéos, les vidéos créées par un utilisateur et les vidéos de courte durée ;
Estime toutefois que la définition d'un service de plateforme de partage doit aussi viser les plateformes qui mettent à disposition des vidéos d'utilisateurs et pas seulement des plateformes qui les stockent ;
Concernant un socle commun de règles pour les services de médias audiovisuels :
Se félicite de voir étendues aux services de médias audiovisuels à la demande des obligations de promotion des oeuvres européennes et de protection des mineurs ;
Regrette cependant que ces services ne fassent pas l'objet d'un encadrement juridique plus important ;
Accueille favorablement la proposition des rapporteurs du Parlement européen d'établir un socle de règles communes applicables aux services de médias audiovisuels, aux plateformes de partage de vidéos, ainsi qu'aux vidéos créées par les utilisateurs ;
Juge nécessaire que ces règles communes tiennent compte de la spécificité de chaque média ;
Estime que les règles communes doivent porter sur la lutte contre l'incitation à la violence ou à la haine, la lutte contre la discrimination, la protection des mineurs face aux contenus préjudiciables, les communications commerciales, le placement de produit et le parrainage, la protection des oeuvres cinématographiques et la préservation de la chronologie des médias, les droits d'information des destinataires d'un service, la corégulation, l'autorégulation, les codes déontologiques ;
Suite aux sanglants attentats survenus en Europe et notamment à Paris, Nice et Saint-Étienne-du-Rouvray, demande que la proposition vise expressément la nécessité de protéger les citoyens européens contre des contenus faisant l'apologie du terrorisme ;
Concernant la promotion des oeuvres européennes dans les catalogues des services de médias audiovisuels à la demande :
Rappelle l'importance de favoriser la diversité culturelle en Europe et de soutenir la production, la distribution et la diffusion d'oeuvres audiovisuelles européennes ;
Appuie l'approche retenue par la Commission européenne visant à imposer aux fournisseurs de services de médias audiovisuels à la demande des quotas d'oeuvres européennes dans leur catalogue et à les mettre en avant ;
Relève cependant que le niveau retenu de 20 %, bien inférieur à celui prévu pour les radiodiffuseurs, ne permettra pas une concurrence équitable entre les services linéaires et non linéaires et qu'il convient de hausser cette ambition à hauteur de 40 % ;
Concernant l'application de la règle du pays d'origine et la compétence des États membres :
Appuie l'introduction d'une dérogation au principe du pays d'origine afin de favoriser les contributions financières à la production d'oeuvres européennes des services de médias audiovisuels à la demande non présents sur le territoire d'un État membre mais qui ciblent celui-ci ;
Souligne la nécessité d'adopter un mécanisme permettant d'éviter une double taxation des opérateurs ;
Relève que cette dérogation seule ne peut suffire, d'une part, à rétablir une concurrence équitable sur le marché de chaque État membre, et, d'autre part, à assurer une protection efficace des consommateurs ;
Demande en conséquence que la dérogation envisagée s'applique également à la promotion des oeuvres européennes telle que prévue à l'article 13 de la directive « Services de médias audiovisuels » ainsi qu'à la protection des mineurs prévue en son article 12 ;
Souhaite en outre que les États membres, quand ils sont ciblés par une plateforme de partage de vidéos non présente sur leur territoire, puissent être associés à sa régulation dans l'État membre où elle est établie ;
Constate par ailleurs que la détermination de l'État membre compétent en matière de contrôle des fournisseurs de services de médias audiovisuels extra-européens diffusés par satellite dans l'Union européenne repose actuellement sur un critère technique premier - la liaison montante vers un satellite - qui ne permet pas d'agir efficacement en cas de manquements ;
Estime que le critère second visant la capacité satellitaire d'un État membre permet de déterminer plus rapidement l'État compétent et ainsi un contrôle plus effectif par les autorités de régulation nationales ;
Demande en conséquence que le critère de la capacité satellitaire devienne le critère premier ;
Concernant les règles relatives aux communications commerciales :
Constate qu'aujourd'hui, les radiodiffuseurs voient leurs ressources publicitaires diminuer et qu'il convient de leur donner plus de souplesse pour augmenter ces ressources publicitaires ;
Rappelle qu'il est nécessaire d'assurer des conditions de concurrence équitable entre tous les acteurs du secteur de l'audiovisuel sans affaiblir la protection des consommateurs ;
En ce sens, soutient la proposition visant à remplacer la limite quantitative horaire de 20 % applicable à la publicité au profit d'une limitation quotidienne, soit entre 7h et 23h, de 20 % ;
Estime toutefois que cette règle ne devrait pas s'appliquer entre 7h et 10h afin d'assurer une meilleure protection des enfants ;
Demande par conséquent que soit maintenue une limite quantitative horaire de 20 % entre 7h et 10h ;
S'oppose, en revanche, à un raccourcissement de la durée des tranches programmées sans publicité à la télévision, telles que prévues à l'article 20, paragraphe 2 ;
Rejette l'autorisation du placement de produits dans l'ensemble des services de médias audiovisuels telle que proposée par la Commission européenne et demande le maintien du régime actuel ;
Concernant l'accessibilité aux services de médias audiovisuels des personnes handicapées :
Estime indispensable de voir maintenues dans la directive « Services de médias audiovisuels » les règles relatives à l'accessibilité aux services de médias audiovisuels des personnes souffrant de déficience visuelle ou auditive et s'oppose à la suppression de l'article 7 de la directive « Services de médias audiovisuels » ;
Relève toutefois que les obligations concernant les services de médias audiovisuels à la demande doivent aller de pair avec les évolutions technologiques afin d'assurer un service de qualité irréprochable et d'éviter un coût trop important aux fournisseurs de vidéos à la demande ;
Concernant l'indépendance des régulateurs nationaux de services de médias audiovisuels :
Souligne l'importance pour chaque État membre de disposer d'autorités de régulation des médias audiovisuels dont l'indépendance est garantie et rappelle que ces autorités doivent en particulier veiller à l'objectivité de l'information ;
Juge nécessaire que les critères énoncés dans la directive laissent une marge d'appréciation suffisante aux États membres ;
Concernant l'institution d'un Groupe des régulateurs européens de services de médias audiovisuels :
Salue l'institution du Groupe des régulateurs européens de services de médias audiovisuels par la proposition de directive ;
Rappelle qu'à l'instar du régime applicable aux autorités nationales de régulation, ce groupe doit lui aussi voir son indépendance garantie et que, par conséquent, il doit adopter seul son règlement intérieur ;
Souligne que l'institutionnalisation du Groupe des régulateurs européens de services de médias audiovisuels n'est pas sans incidence sur la répartition des attributions entre ce dernier et le comité de contact prévu à l'article 29 de la directive et demande que soit clarifié le rôle de chacun en conséquence ;
Invite le Gouvernement à soutenir ces orientations et à les faire valoir dans les négociations en cours.