Projet de loi visant à renforcer la lutte contre les dérives sectaires
Une mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires est chargée :
1° D'observer et d'analyser le phénomène des mouvements à caractère sectaire dont les agissements sont attentatoires aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales ou constituent une menace à l'ordre public ou sont contraires aux lois et règlements ;
2° De favoriser, dans le respect des libertés publiques, la coordination de l'action préventive et répressive des pouvoirs publics à l'encontre de ces agissements ;
3° De développer l'échange des informations entre les services publics sur les pratiques administratives dans le domaine de la lutte contre les dérives sectaires ;
4° De contribuer à l'information et à la formation des agents publics dans ce domaine ;
5° D'informer le public sur les risques et, le cas échéant, les dangers auxquels les dérives sectaires l'exposent et de faciliter la mise en œuvre d'actions d'aide aux victimes de ces dérives ;
6° De participer aux travaux relatifs aux questions relevant de sa compétence menés par le ministère des affaires étrangères dans le champ international.
Le président de la mission établit un rapport annuel d'activité remis au Premier ministre et rendu public. Il est publié sous la seule responsabilité du président qui ne peut être poursuivi à l'occasion des opinions qui y sont émises.
Elle reçoit les témoignages volontaires de personnes victimes de dérives sectaires, ou de tiers souhaitant témoigner de tels faits, des signalements individuels ou toute information sur l'existence ou le risque d'une dérive sectaire. Ces informations peuvent, sous réserve de l'accord de la personne déclarant avoir été victime, être publiés dans le rapport annuel. Les témoignages font l'objet de mesures adéquates de pseudonymisation ou d'occultation en vue d'assurer la confidentialité de l'identité des personnes concernées, en ce compris les personnes qui témoignent. Les informations émanant d'un témoin ou d'une personne tierce ayant connaissance de tels actes ne peuvent pas faire l'objet d'une communication.
Chapitre Ier : Faciliter et renforcer les poursuites pénales
Après le deuxième alinéa de l'article 223-15-2 du code pénal, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l'infraction est commise par l'utilisation d'un service de communication au public en ligne ou par le biais d'un support numérique ou électronique, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 750 000 euros d'amende. »
Après le premier alinéa de l'article 8 du code de procédure pénale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L'action publique des délits mentionnés à l'article 223-15-2, lorsqu'ils sont commis sur un mineur, se prescrit par six années révolues à compter de la majorité de la victime. »
Le code pénal est ainsi modifié :
1° L'article 227-15 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque la personne mentionnée au premier alinéa s'est rendue coupable sur le même mineur du délit prévu à l'article 433-18-1 du présent code, les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 300 000 euros d'amende. » ;
2° L'article 227-17 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque la personne mentionnée au premier alinéa s'est rendue coupable sur le même mineur du délit prévu à l'article 433-18-1 du présent code, les peines sont portées à quatre ans d'emprisonnement et à 60 000 euros d'amende. »
Chapitre II : Renforcer l'accompagnement des victimes
I. – L'article 2-17 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) Les mots : « reconnue d'utilité publique » sont remplacés par le mot : « agréée » ;
b) (Supprimé)
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les conditions dans lesquelles les associations mentionnées au premier alinéa peuvent être agréées, après avis du ministère public, sont fixées par décret en Conseil d'État. »
II. – Les associations reconnues d'utilité publique mentionnées à l'article 2-17 du code de procédure pénale, dans sa rédaction applicable avant l'entrée en vigueur de la présente loi, peuvent continuer à exercer les droits reconnus à la partie civile dans les conditions prévues au même article 2-17, dans sa rédaction résultant de la présente loi, dans les instances introduites jusqu'à un an après l'entrée en vigueur du décret mentionné au dernier alinéa dudit article 2-17.
Chapitre III : Protéger la santé
I. – L'article L. 4161-5 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l'infraction a été commise par l'utilisation d'un service de communication au public en ligne ou par le biais d'un support numérique ou électronique, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 75 000 euros d'amende. » ;
2° Sont ajoutés quatre alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque qu'ils sont commis dans les circonstances mentionnées au deuxième alinéa du présent article, les faits mentionnés sont punis d'une peine complémentaire de suspension du ou des comptes d'accès à un ou plusieurs services en ligne ayant été utilisés pour commettre l'infraction, y compris si ces services n'ont pas constitué le moyen unique ou principal de cette commission. Le présent alinéa s'applique aux comptes d'accès aux services de plateforme en ligne définis au 4 du I de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, aux services de réseaux sociaux en ligne et aux services de plateformes de partage de vidéo au sens du règlement (UE) 2022/1925 du Parlement européen et du Conseil du 14 septembre 2022 relatif aux marchés contestables et équitables dans le secteur numérique et modifiant les directives (UE) 2019/1937 et (UE) 2020/1828. La suspension est prononcée pour une durée maximale de six mois. Cette durée est portée à un an lorsque la personne est en état de récidive légale.
« Le prononcé de la peine complémentaire mentionnée au neuvième alinéa du présent article et la dénomination du compte d'accès ayant été utilisé pour commettre l'infraction sont signifiés aux fournisseurs de services concernés. À compter de cette signification et pour la durée d'exécution de la peine complémentaire, ces derniers procèdent au blocage du ou des comptes faisant l'objet d'une suspension et mettent en œuvre, dans les limites prévues à l'article 46 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, des mesures permettant de procéder au blocage des autres comptes d'accès à leur service éventuellement détenus par la personne condamnée et d'empêcher la création de nouveaux comptes par la même personne.
« Le fait, pour le fournisseur, de ne pas procéder au blocage du ou des comptes faisant l'objet d'une suspension est puni de 75 000 euros d'amende.
« Pour l'exécution de la peine complémentaire mentionnée au neuvième alinéa du présent article et par dérogation au troisième alinéa de l'article 702-1 du code de procédure pénale, la première demande de relèvement de cette peine peut être portée par la personne condamnée devant la juridiction compétente à l'issue d'un délai de trois mois après la décision initiale de condamnation. »
II. – Le code de la consommation est ainsi modifié :
1° L'article L. 132-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l'infraction a été commise par l'utilisation d'un service de communication au public en ligne ou par le biais d'un support numérique ou électronique, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 750 000 euros d'amende. » ;
2° L'article L. 132-3 est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque qu'ils sont commis par une personne physique dans les circonstances mentionnées au dernier alinéa de l'article 132-2, les faits mentionnés sont punis d'une peine complémentaire de suspension du ou des comptes d'accès à un ou plusieurs services en ligne ayant été utilisés pour commettre l'infraction, y compris si ces services n'ont pas constitué le moyen unique ou principal de cette commission. Le présent alinéa s'applique aux comptes d'accès aux services de plateforme en ligne définis au 4 du I de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, aux services de réseaux sociaux en ligne et aux services de plateformes de partage de vidéo au sens du règlement (UE) 2022/1925 du Parlement européen et du Conseil du 14 septembre 2022 relatif aux marchés contestables et équitables dans le secteur numérique et modifiant les directives (UE) 2019/1937 et (UE) 2020/1828. La suspension est prononcée pour une durée maximale de six mois. Cette durée est portée à un an lorsque la personne est en état de récidive légale.
« Le prononcé de la peine complémentaire mentionnée au cinquième alinéa du présent article et la dénomination du compte d'accès ayant été utilisé pour commettre l'infraction sont signifiés aux fournisseurs de services concernés. À compter de cette signification et pour la durée d'exécution de la peine complémentaire, ces derniers procèdent au blocage du ou des comptes faisant l'objet d'une suspension et mettent en œuvre, dans les limites prévues à l'article 46 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, des mesures permettant de procéder au blocage des autres comptes d'accès à leur service éventuellement détenus par la personne condamnée et d'empêcher la création de nouveaux comptes par la même personne.
« Le fait, pour le fournisseur, de ne pas procéder au blocage du ou des comptes faisant l'objet d'une suspension est puni de 75 000 euros d'amende.
« Pour l'exécution de la peine complémentaire mentionnée au cinquième alinéa du présent article et par dérogation au troisième alinéa de l'article 702-1 du code de procédure pénale, la première demande de relèvement de cette peine peut être portée par la personne condamnée devant la juridiction compétente à l'issue d'un délai de trois mois après la décision initiale de condamnation. »
Après l'article 11-2 du code de procédure pénale, il est inséré un article 11-3 ainsi rédigé :
« Art. 11-3. – Par dérogation au dernier alinéa du I de l'article 11-2, le ministère public informe sans délai par écrit les ordres professionnels nationaux mentionnés à la quatrième partie du code de la santé publique d'une condamnation, même non définitive, pour une ou plusieurs des infractions mentionnées à l'article 2-17 du présent code, prononcée à l'encontre d'une personne relevant de ces ordres, hors les cas où cette information est susceptible de porter atteinte au bon déroulement de la procédure judiciaire. Les II à V de l'article 11-2 sont alors applicables.
« Il informe également par écrit les ordres professionnels susmentionnés lorsqu'une personne est placée sous contrôle judiciaire pour une de ces infractions et qu'elle est soumise à une des obligations prévues aux 12° et 12° bis de l'article 138, hors les cas où cette information est susceptible de porter atteinte au bon déroulement de la procédure judiciaire. Les II à V de l'article 11-2 sont alors applicables. »
Chapitre IV : Assurer l'information des acteurs judiciaires sur les dérives sectaires
Après l'article 157-2 du code de procédure pénale, il est inséré un article 157-3 ainsi rédigé :
« Art. 157-3. – En cas de poursuites exercées sur le fondement de l'article 223-15-2 du code pénal, le ministère public ou la juridiction peut solliciter par écrit tout service de l'État, figurant sur une liste établie par arrêté du ministre de la justice, du ministre de l'intérieur, du ministre chargé de la santé et du ministre chargé de la cohésion sociale, dont la compétence serait de nature à l'éclairer utilement. Ce service ne porte pas d'appréciation sur les faits reprochés à la personne poursuivie. Les éléments produits par ce service sont soumis au débat contradictoire. »