N° 139
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2003-2004
Annexe au procès-verbal de la séance du 7 janvier 2004
relatif au contrat de volontariat de solidarité
internationale,
PRÉSENTÉ
au nom de M. Jean-Pierre Raffarin,
Premier ministre,
par M. Dominique de Villepin,
Ministre des affaires étrangères
et M. Pierre-André WILTZER,
Ministre délégué à la coopération
et à la francophonie
(Renvoyé
à la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées,
sous réserve de la constitution éventuelle d’une commission spéciale dans les
conditions prévues par le Règlement).
Volontariat. |
EXPOSÉ
DES MOTIFS
Mesdames,
Messieurs,
à
côté des trois milliers de jeunes gens qui effectuent chaque année, dans le
cadre de la loi n° 2000-242 du 14 mars 2000 relative aux volontariats civils et
à diverses mesures relatives à la réforme du service national, une période de
volontariat civil international dans un service de l’État ou une entreprise,
plusieurs milliers de volontaires de tous âges effectuent des missions de
solidarité internationale dans un cadre associatif, dont plus de deux mille
d’une durée supérieure à un an dans le cadre du décret n° 95-94 du 30 janvier
1995 relatif aux volontaires et aux associations de volontariat pour la solidarité
internationale.
Le
volontariat de solidarité internationale fait partie des formes d’engagement
que le Gouvernement veut encourager, notamment dans la jeunesse. Il s’agit, en
effet, d’une expérience formatrice, qui apporte beaucoup aux volontaires eux-mêmes,
mais aussi qui irrigue la société française par les engagements qu’ils
continuent le plus souvent de prendre dans tous les domaines de la vie sociale.
La loi du 14 mars 2000 est adaptée pour les volontaires qui sont envoyés à l’étranger par l’État et les entreprises. En revanche, les associations se heurtent à des difficultés majeures pour entrer dans le cadre de cette loi pour des missions de solidarité internationale. En conséquence, le dispositif du volontariat civil n’est pas utilisé par les associations de solidarité internationale. Le décret de 1995, pour sa part, traite de sujets qui pour une bonne part sont du domaine de la loi, en particulier le statut du volontariat défini comme dérogatoire au droit du travail.
Il
est donc apparu nécessaire de préparer un texte législatif spécifique au
volontariat de solidarité internationale, qui assoit le statut des volontaires
sur des bases juridiques incontestables. Cette nouvelle loi se substituerait au
décret du 30 janvier 1995. Le cadre législatif du volontariat international
sera ainsi composé de deux volets : l’un instituant un contrat de droit
public par la loi du 14 mars 2000, et l’autre, un contrat de droit
privé par la présente loi qui permettra le développement du volontariat associatif
sur des bases juridiques sûres et adaptées. Celle-ci améliore et consolide le
statut des volontaires de solidarité internationale fixé par le décret du
30 janvier 1995 pour les missions supérieures à un an, et elle l’étend à
toutes les missions sans limite inférieure de durée.
La
rédaction de ce projet de loi s’est appuyée sur une concertation approfondie
avec les représentants des associations actives dans le volontariat de
solidarité internationale.
L’article
1er définit le contrat de volontariat de solidarité internationale, qui
« organise une collaboration désintéressée » entre une association
agréée et une personne majeure, pour l’accomplissement d’une mission d’intérêt
général à l’étranger dans les domaines de la coopération au développement et de
l’action humanitaire.
Ce
contrat est dérogatoire au droit du travail, de façon analogue au statut défini
pour les volontaires internationaux par la loi du 14 mars 2000.
L’article
2 précise que le
volontaire doit être de nationalité française ou d’un État membre de l’Union
européenne ou d’un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique
européen, ou justifier d’une résidence habituelle en France. La mission de
volontariat doit être accomplie dans un État autre qu’un État membre de l’Union
européenne ou Partie à l’accord sur l’Espace économique européen.
L’article
3 définit les
conditions dans lesquelles l’engagement d’un salarié de droit privé dans une
mission de solidarité internationale est un motif légitime de démission. Il
précise que les compétences acquises pendant des missions de volontariat de
solidarité internationale peuvent être prises en compte au titre de la
validation de l’expérience.
La
loi prévoit ensuite les dispositions contractuelles, notamment les obligations
des associations, qui se substituent aux règles du code du travail.
Ainsi,
l’article 4 prévoit que le contrat doit mentionner les conditions de la
mission, la durée cumulée des missions ne pouvant excéder six années. Il
institue l’obligation pour les associations d’assurer une formation au
volontaire ainsi que la prise charge du voyage aller et retour pour sa mission.
Enfin, il établit un préavis d’un mois en cas de rupture anticipée du contrat.
L’article
5 définit la
protection sociale que l’association doit assurer au volontaire et à ses ayants
droit.
L’article
6 traite des
droits à congés du volontaire.
L’article
7 institue une
indemnité qui n’est soumise, en France, ni à l’impôt sur le revenu, ni aux
cotisations sociales, de façon analogue à l’indemnité prévue par la loi du
14 mars 2000. La loi prévoit un montant minimum et maximum pour cette
indemnité, qui doit permettre au volontaire d’accomplir sa mission dans des
conditions de vie décentes.
L’article
8 institue un
agrément des associations en tant qu’associations de volontariat de solidarité
internationale. Cet agrément, délivré par le ministre des affaires étrangères a
pour objectif de vérifier et de garantir la qualité des associations qui
pratiquent l’envoi de volontaires en mission de solidarité internationale.
Sur le plan financier, la loi ne crée aucune obligation pour l’État. Cependant, dans le décret d’application, une procédure spécifique sera prévue pour les cofinancements du ministère des affaires étrangères pour les missions de volontariat de plus de six mois dans les pays en développement, mécanisme très proche de celui régi par le décret du 30 janvier 1995 actuellement en vigueur.
Enfin,
l’article 9 prévoit que les dispositions de la loi sont applicables à
Saint‑Pierre‑et‑Miquelon et à Mayotte.
PROJET
DE LOI
Le Premier ministre,
Sur le rapport du ministre des affaires étrangères,
Vu l’article 39 de la Constitution,
Décrète :
Le présent projet de
loi relatif au contrat de volontariat de
solidarité internationale, délibéré en conseil des ministres après avis du
Conseil d’État, sera présenté au Sénat par le ministre des affaires
étrangères, qui sera chargé d’en exposer les motifs et d’en soutenir la
discussion.
Toute
association de droit français agréée dans les conditions prévues à l’article 8
de la présente loi, ayant pour objet des actions de solidarité internationale,
peut conclure un contrat de volontariat de solidarité internationale avec une
personne majeure.
Ce
contrat est un contrat écrit qui organise une collaboration désintéressée entre
l’association et le volontaire. Il ne relève pas, sauf dispositions contraires
prévues par la présente loi, des règles du code du travail. Il est conclu pour
une durée limitée dans le temps.
Ce
contrat, exclusif de l’exercice de toute activité professionnelle, a pour objet
l’accomplissement d’une mission d’intérêt général à l’étranger dans les
domaines de la coopération au développement et de l’action humanitaire.
Le
volontaire de solidarité internationale doit posséder la nationalité française
ou celle d’un État membre de l’Union européenne ou d’un autre État partie à
l’accord sur l’Espace économique européen, ou justifier d’une résidence
habituelle en France.
Il
accomplit une ou plusieurs missions dans un État autre que les États membres de
l’Union européenne ou Parties à l’accord sur l’Espace économique européen.
Si
le candidat volontaire est un salarié de droit privé, l’engagement pour une ou
plusieurs missions de volontariat de solidarité internationale d’une durée
continue minimale d’un an est un motif légitime de démission. Dans ce cas, si
l’intéressé réunit les autres conditions pour bénéficier d’une indemnisation du
chômage, ses droits seront ouverts à son retour de mission. Ces droits seront
également ouverts en cas d’interruption de la mission pour cause de force
majeure ou de retrait de l’agrément délivré à l’association en application de
l’article 8.
L’ensemble
des compétences acquises dans l’exécution d’un contrat de volontariat de
solidarité internationale en rapport direct avec le contenu d’un diplôme, d’un
titre à finalité professionnelle ou d’un certificat de qualification peut être
pris en compte au titre de la validation des acquis de l’expérience dans les
conditions prévues aux articles L. 335-5 et L. 335‑6 du code de l’éducation.
Le
contrat de volontariat mentionne les conditions dans lesquelles le volontaire
accomplit sa mission. La durée cumulée des missions accomplies par un
volontaire, de façon continue ou non, pour le compte d’une ou plusieurs
associations, ne peut excéder six ans.
Les
associations sont tenues, dans des conditions fixées par décret, d’assurer une
formation aux volontaires avant leur départ et de prendre en charge les voyages
à partir et en direction de leur résidence habituelle.
Il
peut être mis fin de façon anticipée à un contrat de volontariat moyennant un
préavis d’au moins un mois. En cas de fin du contrat pour cause de force
majeure ou de retrait de l’agrément délivré à l’association en application de
l’article 8, l’association assure le retour du volontaire vers son lieu de
résidence habituelle.
L’association
assure au volontaire et à ses ayants droit, à compter de la date d’effet du
contrat, une protection sociale d’un niveau au moins égal à celui du régime
général de la sécurité sociale française, sous réserve des droits qu’ils
détiennent par ailleurs.
La
protection sociale du volontaire comprend la couverture des risques maladie,
maternité, invalidité, décès, vieillesse, accident du travail et maladie
professionnelle. Pour les ayants droit, elle comprend la couverture des
prestations en nature des risques maladie, maternité et invalidité.
Le
volontaire et ses ayants droit bénéficient dans des conditions fixées par
décret d'une assurance maladie complémentaire et d'une assurance pour le
rapatriement sanitaire prises en charge par l’association.
Le
volontaire bénéficie au minimum d’un congé de deux jours non chômés, au sens de
la législation de l’État d’accueil, par mois de mission, dès lors qu’il
accomplit une mission d’une durée au moins égale à six mois.
Le
volontaire bénéficie des congés de maladie, de maternité, de paternité et
d’adoption prévus par le code du travail et le code de la sécurité sociale pour
les travailleurs salariés.
Pendant
la durée de ces congés, le volontaire perçoit la totalité de l’indemnité
mentionnée à l’article 7 de la présente loi.
Une
indemnité est versée au volontaire. Elle lui permet d’accomplir sa mission dans
des conditions de vie décentes. Cette indemnité n’a pas le caractère d’un
salaire ou d’une rémunération. Elle n’est soumise, en France, ni à l’impôt sur
le revenu, ni aux cotisations et contributions sociales.
Le
montant de l’indemnité et les conditions dans lesquelles elle est versée sont
fixés pour chaque volontaire dans son contrat. Les montants minimum et maximum
de l’indemnité sont fixés par arrêté du ministre des affaires étrangères en
tenant compte des conditions d’existence dans le pays où la mission a lieu.
Toute
association qui souhaite faire appel au concours de volontaires dans les
conditions prévues par la présente loi doit être agréée par le ministre des
affaires étrangères. Cet agrément est délivré pour une durée limitée aux
associations qui présentent des garanties suffisantes pour organiser des
missions de volontaires de solidarité internationale dans les conditions
prévues par la présente loi.
Un
décret fixe les conditions d’application du présent article.
Les
dispositions de la présente loi sont applicables à Saint‑Pierre-et-Miquelon
et à Mayotte.
Fait
à Paris, le 7 janvier 2004
Signé :
Jean-Pierre Raffarin
Par le Premier
ministre :
Le ministre des
affaires étrangères,
Signé :
Dominique de Villepin
Le ministre délégué à la coopération et à la francophonie
Signé :
Pierre-André WILTZER