N° 297
SÉNAT
SESSION
ORDINAIRE DE 2002-2003
Annexe au procès-verbal de la séance du 14 mai 2003
PROJET DE LOI
organique
relatif au référendum
local
PRÉSENTÉ
au nom de M. Jean-Pierre RAFFARIN,
Premier
ministre,
par M. Nicolas SARKOZY,
Ministre de
l’Intérieur, de la sécurité intérieure
et des libertés locales.
(Renvoyé à la
commission des Lois
constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et
d’administration générale sous réserve de la
constitution éventuelle d’une commission spéciale dans les conditions prévues
par le Règlement).
Élections et référendums. |
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Le deuxième alinéa de l’article 72-1 de la
Constitution dans sa rédaction issue de la loi constitutionnelle relative à
l’organisation décentralisée de la République prévoit la possibilité pour les
collectivités territoriales de soumettre, par la voie du référendum, à la
décision des électeurs, les projets de délibération ou d’acte relevant de leurs compétences.
Cette disposition renvoie à la loi organique le
soin de préciser les conditions de sa mise en oeuvre. Le présent projet de loi
organique, pris à cet effet, précise le champ d’application du référendum local
et détermine les conditions d’adoption des projets de délibération et d’acte
qui y sont soumis.
* *
*
Le projet de loi est constitué d’un article unique
qui introduit dans le code général des collectivités territoriales les
dispositions relatives aux procédures référendaires organisées par les
collectivités territoriales énumérées par le premier alinéa de l’article 72 de la Constitution. Ces
dispositions, qui regroupent les articles L.O. 1112-1 à L. 1112-12, sont
insérées, au sein du titre unique du livre premier de la première partie du
code consacré à la libre administration des collectivités territoriales, dans
un chapitre II intitulé « Participation des électeurs aux décisions
locales ».
L’article L.O. 1112-1 prévoit des dispositions
communes à tous les référendums locaux, décidés par les collectivités territoriales.
Elles précisent le domaine dans lequel ces référendums peuvent intervenir : il
s'agit exclusivement des affaires relevant de la compétence de la collectivité.
L’article L.O. 1112-2 concerne les actes qui
relèvent des pouvoirs propres de l’exécutif de la collectivité territoriale. Il
réserve à ce dernier l'initiative de la demande d'organisation d'un référendum
local portant sur ces actes.
L’article L.O. 1112-3 réserve à l’assemblée
délibérante le soin de décider d’organiser un référendum local, de fixer les
modalités de l’organisation du référendum, notamment d’arrêter la date du
scrutin et de convoquer les électeurs. Ceux-ci se prononceront par une réponse
nette : « oui » ou « non » sur le projet de
délibération ou d’acte qui sera soumis à leur décision.
La délibération prise à cet effet est transmise, au
moins deux mois avant la date fixée pour le référendum, au représentant de
l’Etat qui exerce le contrôle de légalité selon une procédure accélérée. En cas
de présomption d’illégalité, le représentant de l’Etat saisira le juge
administratif dans les dix jours en assortissant éventuellement son recours de
conclusions aux fins de suspension sur lesquelles le juge statuera dans les
conditions prévues à l’article L.
521-1 du code de justice administrative.
L’article L.O. 1112-4 précise les conditions
d’organisation d’un référendum décidé par une collectivité territoriale autre
que la commune, en prévoyant la notification par le représentant de l’Etat de
cette décision aux maires situés dans le ressort de la collectivité
organisatrice.
En organisant le scrutin, les maires agissent en
tant qu’agent de l’Etat, sous l’autorité du représentant de l’Etat.
Comme le prévoit l’article L.O. 1112-5, le coût de
l’organisation du référendum local est à la charge du budget de la collectivité
territoriale intéressée pour laquelle il constitue une dépense obligatoire.
Pour éviter que le référendum local ne soit
détourné de son objet, l’article L.O. 1112-6 en interdit l'organisation dans la
période de six mois précédant le renouvellement général de la collectivité
intéressée, pendant la campagne électorale des élections générales et des
référendums nationaux et, dans la collectivité intéressée, pendant la campagne
électorale et le jour du scrutin d’une consultation locale organisée en vertu
des articles 72-1, 72-4 et 73 de la Constitution.
Aucun référendum ne peut par ailleurs avoir lieu en
cas de dissolution de l’assemblée délibérante, de démission de tous ses membres
ou en cas d’annulation de l’élection de tous ses membres.
L’article L.O. 1112-7 prévoit que le projet soumis
à référendum local est adopté s’il réunit la majorité des suffrages exprimés.
L'acquisition du caractère exécutoire du projet de
délibération ou d'acte adopté par la voie du référendum local, est soumise par
ce même article aux dispositions de droit commun : la publication et la
transmission au représentant de l'Etat.
L’article L.O. 1112-8 prévoit la mise à disposition
du public d’un dossier d’information sur l’objet du référendum local selon les
modalités définies par décret en Conseil d’Etat.
L’article L.O. 1112-9 précise que la campagne
portant sur le référendum local est organisée selon les conditions prévues par
décret en Conseil d’Etat.
Il prévoit par ailleurs, que seront habilités, sur
leur demande, à participer à cette campagne les groupes d’élus constitués au
sein de l’assemblée délibérante et les partis et groupements politiques ayant
obtenu 5% des suffrages exprimés lors du dernier renouvellement général de
cette assemblée.
L’article L.O. 1112-10 fixe les conditions de
participation des électeurs au scrutin. Dans le cas d’un référendum organisé
par une commune, les ressortissants communautaires pourront participer au
scrutin.
L’article L.O. 1112-11 prévoit qu’un décret en
Conseil d’Etat déterminera les dispositions relatives à la propagande, à
l’organisation du scrutin et aux opérations de vote applicables aux référendums
locaux, ainsi qu’à la proclamation des résultats.
L’article L.O. 1112-12 prévoit qu’un décret en
Conseil d’Etat déterminera les délais, formes et conditions de présentation
d’une protestation contre la régularité du scrutin.
PROJET
DE LOI ORGANIQUE
Le Premier ministre,
Sur le rapport du ministre de l’intérieur, de la
sécurité intérieure et des libertés locales,
Vu l’article 39 de la Constitution,
Décrète :
Le présent projet de loi
organique relatif au référendum local, délibéré
en Conseil des ministres après avis du Conseil d’État, sera présenté au Sénat
par le ministre
de l’intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, qui sera chargé d’en exposer les motifs et d’en
soutenir la discussion.
Le titre unique du livre Ier de la première partie du code général des
collectivités territoriales est ainsi modifié :
I. - Le chapitre II « Coopération
décentralisée » devient le chapitre IV. Les articles L. 1112-1 à L.
1112-7 deviennent respectivement les articles L. 1114-1 à L. 1114-7.
A l’article L. 1722-1, les références aux
articles : « L. 1112-1 » et « L. 1112-5 à L. 1112‑7 »
sont remplacées par les références aux articles : « L. 1114-1 »
et « L. 1114-5 à L. 1114-7 » et au 3° de l’article « L.
1781-2 » la référence à l’article : « L. 1112-1 » est
remplacée par la référence à l’article : « L. 1114-1 ».
II. - Il est rétabli un chapitre II intitulé
« Participation des électeurs aux décisions locales » ainsi
rédigé :
«
Participation des électeurs aux décisions
locales
« Référendum
local
« Dispositions générales
« Art. L.O. 1112-1. - L’assemblée
délibérante d’une collectivité territoriale peut soumettre à référendum local
tout projet de délibération tendant à régler une affaire de la compétence de
cette collectivité.
« Art. L.O. 1112-2. - L’exécutif
d’une collectivité territoriale peut soumettre à référendum local, après
autorisation donnée par l’assemblée délibérante de cette collectivité, tout
projet d’acte relevant de ses attributions.
« Art. L.O. 1112-3. - Dans les cas
prévus aux deux articles qui précèdent, l’assemblée délibérante de la collectivité
territoriale détermine les modalités de l’organisation du référendum local,
fixe le jour du scrutin et convoque les électeurs. Ces derniers font connaître
par « oui » ou par « non » s’ils approuvent le projet de
délibération ou d’acte qui leur est présenté.
« La délibération prise en application de
l’alinéa précédent est transmise deux mois au moins avant la date du scrutin au
représentant de l’Etat. Si celui-ci l’estime illégale il dispose d’un délai de
dix jours à compter de sa réception pour en saisir le juge administratif et
assortir sa demande de conclusions de suspension dans les conditions prévues à
l’article L. 521-1 du code de justice administrative.
« Art. L.O. 1112-4. - Si la
délibération émane de l’assemblée délibérante d’une collectivité territoriale
autre que la commune, le représentant de l’Etat dans cette collectivité la
notifie dans un délai de quinze jours aux maires des communes dans le ressort
de la collectivité, sauf s’il a été fait droit à sa demande de suspension.
« Les maires organisent le scrutin. Si un
maire refuse de procéder à cette organisation, le représentant de l’Etat, après
l’en avoir requis, y procède d’office.
« Art. L.O. 1112-5. - Les dépenses
liées à l’organisation du référendum constituent une dépense obligatoire de la
collectivité territoriale qui l’a décidée.
« Il en est de même lorsqu’il est fait
application du deuxième alinéa de l’article L.O. 1112‑4.
« Art. L.O. 1112-6. - Aucun
référendum ne peut être organisé par l’assemblée délibérante d’une collectivité
territoriale après le premier jour du sixième mois précédant celui au cours
duquel il doit être procédé au renouvellement général ou au renouvellement
d’une série sortante des membres de son organe délibérant.
« Aucune campagne en vue d’un référendum ne
peut être organisée, ni aucun scrutin se dérouler pendant la durée de la
campagne électorale ou les jours du scrutin prévus pour le renouvellement
général des membres des assemblées délibérantes des collectivités
territoriales, des députés ou de chacune des séries des conseillers généraux et
des sénateurs, pour l’élection des membres du Parlement européen, ainsi que
pour l’élection du Président de la République. Il ne peut davantage être
organisé de référendum local pendant la durée de la campagne ni le jour du
scrutin pour un référendum décidé par le Président de la République ou dans la
collectivité où il est fait application de ces dispositions, pour les
consultations qui ont lieu sur le fondement du dernier alinéa de l’article
72-1, de l’article 72-4 et du dernier alinéa de l’article 73 de la Constitution
non plus que les jours prévus pour ces scrutins.
« La décision de recourir au référendum
devient caduque en cas de dissolution de l’assemblée délibérante d’une
collectivité territoriale ou de démission de tous ses membres en exercice ou en
cas d’annulation devenue définitive de l’élection de tous ses membres.
« Pendant un délai d’un an à compter de la
tenue d’un référendum à l’initiative d’une collectivité territoriale, celle-ci
ne peut recourir à un autre référendum portant sur le même objet.
« Art. L. O.
1112-7. - Le
projet soumis à référendum local est adopté s’il réunit la majorité des
suffrages exprimés.
« Le texte adopté par voie de référendum est
soumis aux règles de publicité et de contrôle applicables à une délibération de
l’organe délibérant de la collectivité ou à un acte de son exécutif.
« Information des citoyens, campagne électorale
et opérations de vote
« Art. L.O. 1112-8. - Un dossier
d’information sur l’objet du référendum décidé par la collectivité territoriale
est mis à disposition du public dans les conditions fixées par décret en
Conseil d’Etat.
« Art. L.O. 1112-9. - La campagne en
vue du référendum local est organisée par la collectivité qui en a pris
l’initiative dans des conditions définies par décret en Conseil d’Etat ;
elle est ouverte le deuxième lundi qui précède le jour du scrutin à zéro heure.
Elle est close la veille du scrutin à minuit.
« Sont habilités, sur leur demande, à
participer à la campagne mentionnée à l’alinéa précédent :
« - les groupes d’élus constitués au sein de
l’assemblée délibérante ;
« - les partis ou groupements politiques dont
les candidats ou les listes de candidats ont obtenu au moins 5 % des suffrages
exprimés lors du dernier renouvellement général de l’assemblée délibérante de
la collectivité.
« Art. L.O. 1112-10. - Peuvent seuls
participer au scrutin les électeurs inscrits :
« - sur la liste électorale des électeurs de
nationalité française arrêtée à la dernière révision, ou lors du plus récent
scrutin organisé postérieurement à celle-ci, éventuellement complétée dans les
conditions prévues par le code électoral ;
« et, pour un référendum local décidé par une
commune, sur la liste électorale complémentaire arrêtée dans les mêmes
conditions que la liste électorale.
« Art. L.O. 1112-11. - Un décret en
Conseil d’Etat fixe les dispositions relatives aux opérations préparatoires au
scrutin, au déroulement des opérations de vote, au recensement des votes et à
la proclamation des résultats.
« Art. L.O. 1112-12. - Tout électeur
défini à l’article L.O.1112-10 ainsi
que le représentant de l’Etat peut contester la régularité du scrutin par une
protestation présentée devant la juridiction administrative dans les délais, formes
et conditions fixés par décret en Conseil d’Etat. »
Fait à Paris, le 14 mai 2003
Signé : JEAN-PIERRE RAFFARIN
Par le premier Ministre
Le ministre de l’intérieur, de la sécurité intérieure, et des libertés
locales.
Signé : NICOLAS SARKOZY