commission des lois |
Proposition de loi Restaurer l'autorité de la justice à l'égard des mineurs délinquants (1ère lecture) (n° 343 ) |
N° COM-21 17 mars 2025 |
AMENDEMENTprésenté par |
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Mme HARRIBEY, MM. CHAILLOU et BOURGI, Mme de LA GONTRIE, MM. DURAIN et KERROUCHE, Mmes LINKENHELD et NARASSIGUIN, M. ROIRON et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain ARTICLE 4 |
Supprimer cet article.
Objet
Le GSER souhaite la suppression de l’article 4, qui veut instaurer une procédure de comparution immédiate pour les mineurs. Elle s’apparente à la procédure de
présentation immédiate prévue par l’ancien article 14-2 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945, modifiée, relative à l’enfance délinquante. Cette procédure peu usitée suscitait des critiques tout à fait applicables à l’audience unique en comparution immédiate dont elle est la réplique exacte.
Alors que l’amélioration de la prise en considération de la victime est pourtant le quatrième objectif du CJPM, cette procédure pose plusieurs problèmes majeurs :
Un jugement précipité et inadapté aux mineurs. En effet, l’enfant n’aurait pas le temps de préparer sa défense avec son avocat et ses parents. Il ne serait pas jugé par un magistrat qui le connaît et suit son parcours. Et, les éducateurs n’auraient pas le temps d’analyser sa situation et de fournir un rapport complet.
L'article 4 soulève également un non-respect des droits des victimes. La victime ne pourrait pas se préparer psychologiquement et aurait du mal à se constituer partie civile dans les délais très courts imposés. Cela va à l’encontre de l’objectif du Code de justice pénale des mineurs (CJPM), qui vise à mieux prendre en compte les victimes, mis en exergue par la garde des Sceaux, Nicole Belloubet, au sein de l’article 93 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.
Par ailleurs, l'article L.423-4 du CJPM permet déjà de juger un mineur en audience unique rapide (culpabilité et sanction) sous 10 jours à 12 semaines maximum après saisine de la justice. Durant ce délai, le mineur de plus de 16 ans peut être placé en détention provisoire par le juge des libertés et de la détention dans l’attente de cette audience unique. Ainsi, l'écart entre les deux procédures est donc faible et la comparution immédiate n’apporte pas de réel bénéfice puisque le prononcé à son égard d’une mesure coercitive (placement en détention provisoire, contrôle judiciaire) à l’issue de sa garde à vue est déjà possible.
Puis, l’affirmation selon laquelle les mineurs délinquants resteraient impunis n’est pas confirmée par les données chiffrées accessibles. Au contraire, le taux de réponse pénale à leur égard est important. Il suffit de constater une hausse constante du nombre de mineurs écroués depuis la sortie de la période Covid pour atteindre au 1er juillet 2024 un nombre de mineurs écroués jamais atteint auparavant, 861.
Le CJPM est entré en vigueur il y a seulement trois ans. Les nouvelles dispositions qu’il contient ont profondément modifié le traitement pénal des mineurs en créant une césure du procès pénal afin qu’une réponse pénale soit apportée de manière diligente à chaque acte commis. Cette réforme très récente a nécessité la mobilisation et la réorganisation des juridictions des mineurs et de l’ensemble des professionnels de la chaîne pénale mineurs. Le rapport d’information de la commission des lois de l’assemblée nationale du 22 mars 2023 sur l’évaluation de la mise en œuvre du CJPM notait d’ailleurs que la réforme avait permis de gagner en efficacité au regard des objectifs fixés.
Finalement, cette mesure nous paraît inefficace et contraire à l’intérêt de l’enfant. Si l’enfant et sa famille acceptent la comparution immédiate, la date d’audience risque d’être la même que dans la procédure actuelle, rendant cette réforme inutile.
Nous souhaitons donc la suppression de l'article 4 qui va à l’encontre de la volonté de simplifier la justice des mineurs et de garantir une justice éducative adaptée.