commission de la culture |
Proposition de loi Lutte contre la manipulation de l'information (1ère lecture) (n° 623 ) |
N° COM-1 13 juillet 2018 |
Question préalableMotion présentée par |
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MM. KANNER et ASSOULINE, Mme Sylvie ROBERT, M. DURAIN et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain TENDANT À OPPOSER LA QUESTION PRÉALABLE |
En application de l’article 44 alinéa 3 du Règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur la proposition de loi relative à la lutte contre la manipulation de l’information
Objet
Les auteurs de la motion considèrent que les dispositions contenues dans la proposition de loi sont de nature à porter atteinte à la liberté d’expression et à la liberté de la presse et qu’elles ne permettront pas de lutter réellement contre la manipulation de l’information et la propagation de fausses nouvelles.
commission de la culture |
Proposition de loi Lutte contre la manipulation de l'information (1ère lecture) (n° 623 ) |
N° COM-2 13 juillet 2018 |
Question préalableMotion présentée par |
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Mme MORIN-DESAILLY, rapporteure TENDANT À OPPOSER LA QUESTION PRÉALABLE |
En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative à la lutte contre la manipulation de l'information (n° 151, 2017-2018).
Objet
La proposition de loi "relative à la lutte contre les fausses informations", devenue "relative à la lutte contre la manipulation de l'information" lors de son examen par l'Assemblée nationale, a été déposée par le groupe La République en Marche pour répondre à la préoccupation exprimée par le Président de la République lors de ses vœux à la presse le 3 janvier 2018.
Les dispositions les plus emblématiques de ce texte ont immédiatement suscité des inquiétudes très fortes de la part des professionnels du droit, des journalistes, mais également de la plupart des partis politiques. La proposition conjugue aujourd'hui trois sérieux motifs d'inquiétude.
Tout d'abord, le pouvoir de référé confié au juge par l'article premier constitue un dispositif insuffisamment abouti, dont l'impact serait probablement très limité, au pire dangereux pour les libertés publiques tant les incertitudes sur ses conditions d'utilisation sont nombreuses. La commission de la culture rejoint pleinement l'analyse de la commission des lois, qui a montré les failles du système, soulignées par l'intensité des débats lors de l'examen de la proposition de loi à l'Assemblée nationale.
Ensuite, la proposition ne peut s'affranchir du cadre juridique européen tracé par la directive du 8 juin 2000 dite "commerce électronique" et transcrit en droit national par la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique. Les dispositions relatives à la responsabilité des plateformes, dont le modèle économique rend possible la diffusion de fausses nouvelles, sont donc nécessairement tellement limitées qu'elles en deviennent inutiles. La seule solution réellement efficace serait d'engager très rapidement auprès des autorités européennes une demande de modification de la directive de 2000, qui ne parait plus adaptée presque 20 ans après son adoption.
Enfin, l'adoption de cette proposition pourrait faire croire que la question des fausses nouvelles aurait été résolue, alors même que nos concitoyens pourront constater dès les prochaines élections que tel n'aura pas été le cas. Le prix à payer pour cette législation de circonstance serait donc une nouvelle perte de confiance dans la parole publique, qui renforcerait une tendance sur laquelle prospèrent d'ores et déjà les fausses informations.
La commission estime donc que face au risque potentiel pour les libertés publiques issu d'un dispositif non abouti, que ne compense pas une efficacité assurée dans la lutte contre les manipulations de l'information, et face à l'absence de consensus minimal nécessaire quand la liberté d'expression et la sincérité du scrutin sont en jeu, il serait préférable de réfléchir de manière approfondie à des solutions plus ambitieuses au niveau européen.
Pour toutes ces raisons, la commission de la culture, de l'éducation et de la communication considère qu'une lecture détaillée de ce texte ne permettra pas de lever auprès des principaux acteurs concernés les sérieuses réserves soulevées. Dans ce contexte, la commission propose donc au Sénat d'adopter la présente motion.
commission de la culture |
Proposition de loi Lutte contre la manipulation de l'information (1ère lecture) (n° 623 ) |
N° COM-3 13 juillet 2018 |
Question préalableMotion présentée par |
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M. LAUGIER, Mme BILLON, MM. KERN et LAFON, Mmes de la PROVÔTÉ, VÉRIEN et les membres du groupe Union Centriste TENDANT À OPPOSER LA QUESTION PRÉALABLE |
En application de l’article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, après engagement de la procédure accélérée, relative à la lutte contre la manipulation de l'information (n°623, 2017-2018)
Objet
A l'heure d'Internet et des réseaux sociaux, la question de la manipulation de l'information est un sujet majeur. Mais les dispositions du présent texte ne sont pas de nature à y répondre de manière satisfaisante. Aussi les auteurs de la présente motion estiment-ils qu'il n'y a pas lieu d'en poursuivre la discussion en séance publique au Sénat. Cette proposition de loi apparaît en effet soit inutile, soit dangereuse.
La présente proposition de loi est inutile parce que:
_ notre arsenal juridique contient déjà de quoi répondre au problème. Le chapitre IV de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse porte expressément sur "les crimes et délits commis par la voie de la presse ou par tout autre moyen de publication". La loi de 1881 n'est pas appliquée. La création d'un nouveau dispositif ne se justifie pas;
_la viralité des réseaux sociaux rendra inopérante les sanctions prévues par le présent texte. En effet, que vaut le retrait d'un contenu par une plateforme s'il a pu être dupliqué à des milliers ou des millions d'exemplaires par les utilisateurs en quelques secondes?
_ le juge et le CSA sont investis de missions qu'ils ne pourront pas remplir. La notion de "manipulation de l'information" est très vague et le texte ne parvient pas à l'expliciter de manière satisfaisante. Le juge aura du mal à disposer des éléments qui lui permettront de se prononcer. Il se déclarera sans doute souvent incompétent. De même, qu'est-ce qu'une chaîne "contrôlée" ou "sous l'influence" d'un Etat étranger? Le CSA se retrouvera dans la même situation que le juge des référés.
Par certains aspects, le présent texte peut même apparaître dangereux:
_ Dangereux pour la liberté d'expression. Sous couvert de lutte contre la manipulation de l'information, le dispositif ne permettra-t-il pas d'étouffer certaines affaires?
_ Dangereux parce que générateur de discriminations. Le cœur du texte, consacré au code électoral, crée une discrimination entre le monde politique et le reste de la société. En effet, la question de la manipulation de l'information se pose à tous les citoyens. Or, les articles 1 à 3 bis peuvent apparaître comme une réponse corporatiste, destinée seulement à protéger le monde politique. Ces dispositions ne s'appliquent qu'à l'occasion des campagnes électorales pour protéger les candidats. Il s'agit donc d'un texte de protection des élus voté par des élus. Quid de la manipulation de l'information dont sont victimes quotidiennement nos concitoyens? De plus, le texte semble créer une discrimination entre journalistes. En effet, à son article 1, le texte prévu pour le I de l'article L.163-2 du code électoral vise "les services de communication au public en ligne", ce qui semble établir une distinction entre les journalistes dont les médias ont une édition "print" et les journalistes dont les médias sont dits "pure player". Seuls ces derniers, alors qu'ils sont des journalistes à part entière, seraient soumis au dispositif du présent texte.
Pour toutes ces raisons, la présente proposition de loi apparaît comme un texte épidermique, de circonstance, dont le contenu ne répond pas au problème réel posé par l'émergence des réseaux sociaux et, plus généralement, des GAFA. Seuls ses articles 9 ter à 9 septies, qui ne constituent évidemment pas le cœur du texte, posent l'une des véritables questions auxquelles il nous faut répondre: celle de l'éducation aux médias. Un texte véritablement consacré à l'éducation aux médias serait le très bienvenu, parallèlement à la mise en place d'un cadre de gestion éthique du numérique à l'échelle européenne.
commission de la culture |
Proposition de loi Lutte contre la manipulation de l'information (1ère lecture) (n° 623 ) |
N° COM-4 16 juillet 2018 |
AMENDEMENTprésenté par |
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M. RAYNAL ARTICLE 1ER |
Alinéa 16
Remplacer : les actions fondées sur le présent article sont exclusivement portées devant une juridiction administrative déterminée par décret.
Objet
Juge des élections, les juridictions administratives sont plus à même de connaître de ce contentieux relatif à la propagande électorale.
Tel est l'objet du présent amendement.
commission de la culture |
Proposition de loi Lutte contre la manipulation de l'information (1ère lecture) (n° 623 ) |
N° COM-5 16 juillet 2018 |
AMENDEMENTprésenté par |
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M. RAYNAL ARTICLE 9 BIS B (NOUVEAU) |
Supprimer : agrégées
Objet
La suppression de ce qualificatif a pour but d’obliger les opérateurs à présenter des statistiques détaillées. En effet, le risque avec les statistiques agrégées est l’absence d’intérêt de ces dernières, eu égard à leur caractère trop généraliste. Or, concernant l’utilisation des algorithmes, la précision est une condition de la transparence. Tel est l’objet du présent amendement.
commission de la culture |
Proposition de loi Lutte contre la manipulation de l'information (1ère lecture) (n° 623 ) |
N° COM-6 16 juillet 2018 |
AMENDEMENTprésenté par |
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Mme MÉLOT ARTICLE 1ER |
A l’alinéa 11, remplacer le mot « public » par les mots « disponible auprès des autorités compétentes »
Objet
Cet amendement vise à donner aux autorités publiques compétentes le pouvoir de se faire communiquer les montants des rémunérations reçues en contrepartie de la promotion de contenus d’information.
Le fait de rendre public le détail des montants investis dans la promotion des contenus d’information, notamment ceux investis par les entreprises de presse en périodes électorales, présente un risque important de porter une atteinte disproportionnée au secret des affaires et à la liberté d’entreprise, à laquelle veille le Conseil constitutionnel.
Il apparaît en revanche légitime qu’une administration indépendante puisse demander à chaque opérateur de plateforme de lui fournir le détail des rémunérations perçues pour la promotion de tels contenus d’information, préservant ainsi l’équilibre entre l’objectif poursuivi par la proposition de loi et la préservation de la liberté d’entreprise.
commission de la culture |
Proposition de loi Lutte contre la manipulation de l'information (1ère lecture) (n° 623 ) |
N° COM-7 16 juillet 2018 |
AMENDEMENTprésenté par |
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Mme MÉLOT ARTICLE 1ER |
Supprimer l’alinéa 12
Objet
Le présent amendement vise à supprimer l’obligation faite aux opérateurs d’agréger dans un registre les montants des rémunérations reçues en contrepartie de la promotion de contenus d’information ainsi que l’identité des personnes physiques ou morales ayant versé ces rémunérations.
Le fait de rendre public le détail des montants investis dans la promotion des contenus d’information, notamment ceux investis par les entreprises de presse en périodes électorales, présente un risque important de porter une atteinte disproportionnée au secret des affaires et à la liberté d’entreprise.
Ce risque est renforcé par l’obligation créée à l’alinéa 12 de réunir dans un même registre régulièrement mis à jour l’ensemble des informations usuellement confidentielles.
commission de la culture |
Proposition de loi Lutte contre la manipulation de l'information (1ère lecture) (n° 623 ) |
N° COM-8 16 juillet 2018 |
AMENDEMENTprésenté par |
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Mme MÉLOT ARTICLE 9 BIS B (NOUVEAU) |
A l’alinéa 2, après le mot « contenu », ajouter les mots : « qu’ils hébergent »
Objet
Le présent amendement vise à préciser que l’obligation de mentionner les parts d’accès direct et d’accès indirects aux contenus d’information est imposée aux plateformes lorsqu’elles hébergent lesdits contenus.
En effet, certains opérateurs de plateformes en ligne définis par l’article L111-7 du code de la consommation, tels que des moteurs de recherche, n’hébergent pas eux-mêmes les contenus qu’ils référencent et n’ont donc pas connaissance du nombre de leurs accès direct.
commission de la culture |
Proposition de loi Lutte contre la manipulation de l'information (1ère lecture) (n° 623 ) |
N° COM-9 16 juillet 2018 |
Question préalableMotion présentée par |
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M. RETAILLEAU et les membres du groupe Les Républicains TENDANT À OPPOSER LA QUESTION PRÉALABLE |
En application de l'article 44 alinéa 3 du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale, relative à la lutte contre la manipulation de l'information (n° 151, 2017-2018).
Objet
Le président de la République est à l'origine directe du dépôt de cette proposition de loi qui vise à empêcher la diffusion d'informations malveillantes, notamment en période électorale.
Il n'est pourtant pas nécessaire de recourir à une nouvelle loi, car notre pays dispose déjà d'un arsenal législatif visant à interdire de tels actes : code électoral condamnant la diffusion de "fausses nouvelles", code pénal réprimant la diffusion "d'informations malveillantes de nature à fausser la sincérité d'un scrutin", loi sur la presse du 29 juillet 1881 prévoyant le délit de diffamation...
La mesure emblématique de la proposition de loi vise à permettre un recours rapide contre les "fake news", au moyen d'une procédure de référé, conduisant le juge à estimer en très peu de temps si une information est inexacte ou trompeuse, alors que cette question sensible vise directement la liberté d'information et d'expression. Les revirements de rédaction à l'Assemblée nationale montrent bien la difficulté qu'il y aura à caractériser l'infraction, ce qui rendra la procédure au mieux inefficace, au pire dangereuse pour l'expression des opinions. La procédure risque par ailleurs de s'avérer contre-productive en plaçant le responsable en position de victime tout en assurant une publicité involontaire à ses affirmations.
Autre disposition de la proposition de loi, la mise en cause des plateformes est tout aussi périlleuse pour la liberté d'expression en incitant les plateformes à supprimer les contenus qui les exposeraient à des sanctions. Les mesures qu'elles mettront en œuvre sont d'ailleurs devenues purement indicatives au cours de l'examen du texte, le risque d'exposition à la censure étant trop manifeste.
Enfin, l'intervention du CSA à l'égard des services de communication audiovisuelle, qui pourra aller jusqu'au retrait du conventionnement d'une chaîne, devrait s'avérer exceptionnelle et peu susceptible de dissuader une éventuelle propagande étrangère.
De telles dispositions sont d'autant plus malvenues que la commission européenne s'est récemment prononcée sur la question de la désinformation en ligne. Elle recommande aux États membres non pas de légiférer mais de responsabiliser les plateformes, en encourageant leur autorégulation. Il est de toute façon évident que le caractère transfrontalier du phénomène ne peut conduire à une seule réponse nationale et rend nécessaire la poursuite de la réflexion au niveau européen.
La présente proposition de loi, dont l'impréparation est manifeste, est donc totalement prématurée, ce qui doit conduire à son retrait.