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commission de l'aménagement du territoire et du développement durable

Proposition de loi

Economie bleue

(1ère lecture)

(n° 370 , 0 , 0)

N° COM-1

16 février 2016


 

AMENDEMENT

présenté par

Rejeté

M. COMMEINHES


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 3 QUATER (NOUVEAU)


L’Article 165  de l’annexe IV au CGI est modifié selon les modalités suivantes :

Au 1, après la phrase : «, à l’exception, en ce qui concerne l’impôt sur les sociétés, des régies de services publics des départements, communes et syndicats de communes qui sont exonérées de cet impôt. »

Rajouter un 1 bis ainsi rédigé

«  I -  Les établissements publics locaux bénéficiant de l’autonomie financière et assurant une mission de service public confiée par une collectivité à caractère industriel ou commercial non concurrentielle avec le secteur privé, sont exonérées de cet impôt.

«  II -  La perte de recettes résultant pour l’Etat du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

Objet

En illustration du bien-fondé de cette démarche, L’EPR Port Sud de  France, exerçant sur le port de Sète est la meilleure illustration. Cet établissement  n’exerce  pas d’activité  lucrative au sens des articles 206, 1du CGI  106 de l’annexe  V du  CGI 

L’article 206, 1 du CGI dispose effectivement  que : 

« Sont passibles de l’impôt sur les sociétés [...] les établissements publics, les organismes  de  l’Etat  jouissant  de  l’autonomie financière, les organismes des départements et des communes et toutes autres personnes morales se livrant à une exploitation  ou à des opérations  de caractère lucratif  ».

L’article  165, 1de l’annexe IV au CGI énonce également  que :

« Nonobstant toutes dispositions contraires les  établissements publics ayant un caractère industriel  ou  commercial  sont passibles de tous les impôts directs et taxes assimilées applicables aux entreprises  privées similaires. Le même  régime  est appliqué  à  tous les  organismes  de l’Etat  des départements ou des communes ayant un caractère industriel ou commercial, s’ils  bénéficient  de  l’autonomie  financière,  à l’exception, en ce qui concerne l’impôt  sur les sociétés,  des  régies de services publics des départements, communes et syndicats de communes  qui sont exonérées  de cet impôt ».

La finalité de ces articles est ainsi d’éviter que  des  établissements  publics  puissent exercer une concurrence déloyale vis-à-vis des entreprises du secteur  privé et bénéficier d’un régime fiscal plus avantageux pour une activité  similaire voire identique.

La circonstance qu’un établissement public ait une nature industrielle et commerciale ne constitue à cet égard qu’une simple présomption d’intention spéculative et n’entraine pas de plein droit l’assujettissement à l’impôt sur les sociétés dès lors que les activités exercées sont exclusives de recherche  de tout  profit. Au cas particulier, l’Etablissement Public Régional Port Sud de France assure une mission de service public qui lui a été confiée par la   Région.

L’Etablissement Public Régional Port Sud de France n’est pas en situation de   concurrence   avec  le  secteur  privé  car  aucun  port  de  commerce   ou  de  pêche français n’est exploité par des  sociétés  commerciales.    Enfin, l’Etablissement Public Régional Port Sud de France n’exploite pas ses installations dans la perspective exclusive de  dégager  des  profits  et  de  rémunérer d’éventuels actionnaires.  Si l’Etablissement  Public Régional Port Sud  de France réalise des profits, ces derniers sont systématiquement  réinvestis dans  la modernisation de ses équipements à l’instar des Grands Ports Maritimes conformément   à   la   politique   menée   par   la   Région.   Si  cette   dernière avait d’ailleurs   exploité  cette  activité  dans  le  cadre  d’un  budget  annexe,  elle   l’aurait fait  dans  les  mêmes  conditions  que  celles  qui  sont  actuellement  mises en œuvre par  l’Etablissement  Public  Régional  Port  Sud  de  France,  et  aurait été  exonéré d’impôt  sur les sociétés.

En l’état de ces considérations, l’Etablissement Public Régional Port Sud de France ne saurait être assujetti à l’Impôt sur les Sociétés.

Commentant l’application de l’impôt sur les sociétés aux établissements publics, la doctrine administrative du 1ier mars 1995 (4 H 1351) précise :

 

« Sauf dispositions contraires, les régies dotées de la personnalité morales créées par les collectivités territoriales sont imposables à l’Impôt sur les Sociétés dans les conditions de droit commun ».

 

Or des décisions ministérielles successives, dont les premières datent de 1942 et de 1943[1] et sont reprises dans la documentation administrative en date du 30 avril 1988 (4 H-1352), prévoient  une exonération aux impôts directs des installations portuaires :

 

1 - « Nonobstant toutes dispositions contraires, les établissements publics ayant un caractère industriel ou commercial sont passibles de tous les impôts directs et taxes assimilées applicables aux entreprises privées similaires.

 

Le même régime est appliqué à tous les organismes de l'État, des départements et des communes ayant un caractère industriel ou commercial s'ils bénéficient de l'autonomie financière, à l'exception, en ce qui concerne l'impôt sur les sociétés, des régies de services publics des départements, communes et syndicats de communes qui sont exonérés de cet impôt ».

 

2 - « Toutefois, en vue de faciliter la reconstitution des installations portuaires détruites par fait de guerre, des décisions ministérielles successives ont exonéré d'impôts directs les ports autonomes, les chambres de commerce maritimes, les chambres de commerce de l'intérieur gérant des installations portuaires, les municipalités concessionnaires d'outillage public propriété de l'État dans les ports maritimes ainsi que les entreprises qu'elles ont pu se substituer pour l'exploitation de cet outillage ».

 Par ailleurs, nous noterons que les Régions n’apparaissent pas dans la dimension réglementaire.

Si les Régions ne sont pas évoquées en tant que telles dans les décisions de 1942  et  1943,  c’est uniquement  en raison de  l’ancienneté  de ces mesures.

Cette  omission a été rectifiée par les modifications apportées à l’article 207, 1,  6° qui indique :

 « Les Régions et les ententes interrégionales... et syndicats  mixtes constitués exclusivement de collectivités  territoriales...  ainsi  que  leurs régies de services publics.... sont exonérés de l’impôt sur les sociétés    ».

Il convient  donc d’articuler  les  textes précités  (décisions  ministérielles successives à partir de 1942 et 1943 et la doctrine de 1995) avec les dispositions de l’article 207,1, 6° du CGI afin de permettre aux régies des services publics des Régions de bénéficier de cette exonération d’impôt sur les sociétés dès  lors qu’elles exploitent des ports de pêche et de commerce  dans  les  mêmes  conditions que les Grands Ports Maritimes et que les Chambres de Commerce et d’Industrie. 

Rappelons que ces décisions ministérielles avaient été prises pour faciliter la reconstruction des ports français lors de la deuxième guerre  mondiale  en  prévoyant l’exonération des Grands Ports Maritimes ainsi que des Chambres de Commerce  et d’Industrie  à  l’impôt sur les sociétés. 

Ces décisions de 1942 et 1943 sont toujours en vigueur  dans  la  mesure où elles sont toujours appliquées par les Grands Ports Maritimes et les Chambres de Commerce  et d’Industrie. 

Cette exonération devrait s’appliquer à cette situation dans la mesure  où  l’EPIC Port Sud de France est assimilable à une entreprise se substituant [ ...J aux municipalités  (ici la  Région) pour  l’exploitation  de cet outillage.

La doctrine du 30 avril 1988 constitue une « disposition contraire » au sens de la doctrine administrative du 11er mars 1995 (4 H 1351). Cette notion de « sauf dispositions contraires » renvoie manifestement aux régimes d’exception prévus dans la doctrine précitée ainsi dans les décisions ministérielles de 1942 et 1943

Ne pas admettre cette évidence reviendrait à  introduire des discriminations  pour des motifs liés à la forme juridique de la structure qui exploite la plateforme  portuaire. En effet, il suffirait à la Région d’internaliser l’activité de pêche et de commerce dans le cadre d’un simple régie dotée de la seule autonomie financière (budget annexe) pour qu’elle puisse bénéficier de l’exonération à l’impôt sur les sociétés    sur    le   fondement    de   l’article    207,1  du   CGI.    Ni   les  conditions d’exploitation, ni les tarifs pratiqués, ne changeraient par rapport à la situation existante (EPIC).

Il apparaît difficilement justifiable que l’exploitation d’un port soit pénalisée par son assujettissement à l’impôt sur les sociétés alors que ses concurrents  nationaux  ne supportent  pas cette charge.

Ce principe d’égalité de traitement a par ailleurs été rappelé dans les dispositions relatives aux associations qui prévoient la fiscalisation des activités des  associations  exerçant  des activités concurrentielles.

En effet la seule structure juridique d’exploitation n’est pas de nature à justifier par elle-même une différence de traitement, au regard de l’impôt sur les  sociétés, pour des activités développées dans des conditions identiques.

 

 


[1] Cette exonération des Chambres de Commerce et d’industrie et ports autonomes (Grands Ports maritimes) a été reprise à l’article 167, 1 de l’annexe IV au CGI.