commission des lois |
Projet de loi Adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne (1ère lecture) (n° 482 , 0 ) |
N° COM-19 27 octobre 2014 |
AMENDEMENTprésenté par |
|
||||
Le Gouvernement ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 5 |
Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Le titre préliminaire du livre Ier est complété par un sous-titre III ainsi rédigé :
« SOUS-TITRE III
« DES DROITS DES VICTIMES
« Art.10-2 - Les officiers et les agents de police judiciaire informent par tout moyen les victimes de leur droit :
« 1° D'obtenir réparation du préjudice subi ;
« 2° De se constituer partie civile si l'action publique est mise en mouvement par le parquet ou en citant directement l'auteur des faits devant la juridiction compétente ou en portant plainte devant le juge d'instruction ;
« 3° D'être, si elles souhaitent se constituer partie civile, assistées d'un avocat qu'elles pourront choisir ou qui, à leur demande, sera désigné par le bâtonnier de l'ordre des avocats près la juridiction compétente, les frais étant à la charge des victimes sauf si elles remplissent les conditions d'accès à l'aide juridictionnelle ou si elles bénéficient d'une assurance de protection juridique ;
« 4° D'être aidées par un service relevant d'une ou de plusieurs collectivités publiques ou par une association conventionnée d'aide aux victimes ;
« 5° De saisir, le cas échéant, la commission d'indemnisation des victimes d'infraction, lorsqu'il s'agit d'une infraction mentionnée aux articles 706-3 et 706-14 ;
« 6° D’être informées sur les mesures de protection dont elles peuvent bénéficier et, notamment, de demander une ordonnance de protection, dans les conditions définies par les articles 515-9 à 515-13 du code civil. Les victimes sont également informées des peines encourues par le ou les auteurs des violences et des conditions d'exécution des éventuelles condamnations qui pourraient être prononcées à leur encontre.
« 7° Pour les victimes qui ne comprennent pas la langue française, de bénéficier d’un interprète et d’une traduction des informations indispensables à l’exercice de leurs droits. »
« Art.10-3 - Si la partie civile ne comprend pas la langue française et qu’elle en fait la demande, elle a droit, dans une langue qu’elle comprend, à l’assistance d’un interprète et à la traduction des informations indispensables à l’exercice de ses droits et qui lui sont, à ce titre, remises ou notifiées en application du présent code.
« S’il existe un doute sur la capacité de la partie civile à comprendre la langue française, l’autorité qui procède à son audition ou devant laquelle cette personne comparaît vérifie que la personne parle et comprend cette langue.
« A titre exceptionnel, il peut être effectué une traduction orale ou un résumé oral de ces informations ».
« Art.10-4. - A tous les stades de l’enquête, la victime peut, à sa demande, être accompagnée par son représentant légal et par la personne majeure de son choix, sauf décision contraire motivée prise par l’autorité judiciaire compétente. »
« Art. 10-5 - Dès que possible, les victimes font l’objet d’une évaluation personnalisée, afin de déterminer si et dans quelle mesure elles ont besoin de mesures spécifiques de protection au cours de la procédure pénale.
« L’évaluation est menée par l’autorité qui procède à l’audition de la victime. Elle peut être approfondie, avec l’accord de l’autorité judiciaire compétente, au vu des premiers éléments recueillis.
« La victime est associée à cette évaluation. Le cas échéant, l’association d’aide aux victimes requise par le procureur de la République ou le juge d’instruction en application de l’article 41-1 y est également associée ; son avis est joint à la procédure.
« Les modalités d’application des dispositions du présent article sont précisées par décret.»
2° Le premier alinéa de l’article 183 est complété par la phrase suivante :
«L’ordonnance de non-lieu est également portée à la connaissance de la victime qui ne s’est pas constituée partie civile, sans préjudice des dispositions de l’alinéa suivant. »
3° L’article 391 est complété par un deuxième alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque la victime ne comprend pas la langue française, elle a droit, à sa demande, à une traduction de l’avis d’audience. A titre exceptionnel, il peut en être effectué une traduction orale ou un résumé oral. ».
4° Les troisième à dernier alinéa de l’article 75 sont supprimés.
5° L’article 53-1 est abrogé.
Objet
La France doit transposer avant le 16 novembre 2015 la directive n°2012/29/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2012 établissant des normes minimales concernant les droits, le soutien et la protection des victimes de la criminalité.
Cette directive, qui remplace la décision-cadre 2001/220/JAI, a pour objectif d’établir des droits minimaux garantis à toutes les victimes d’infractions pénales, dans tous les Etats membres. Ces droits sont notamment les suivants :
- le droit de bénéficier d’informations minimales (informations sur leurs droits, sur les voies de recours, les services de justice réparatrice…) ;
- le droit de bénéficier d’un interprète, et d’une traduction des pièces essentielles du dossier ;
- la création d’une procédure d’évaluation des « besoins de protection » essentiellement en raison de la vulnérabilité des victimes exposées à des risques de représailles et à une victimisation secondaire;
- le droit d’exercer un recours contre les décisions de ne pas poursuivre ;
- la prise en charge par des services généraux ou spécialisés d’aide aux victimes ;
- le droit, pour les victimes identifiées comme vulnérables, victimes, à des « mesures de protection » (absence de contact avec l’auteur des faits, auditions dans des locaux spécialisés par des enquêteurs formés à cet effet…).
Notre procédure pénale, qui garantit déjà les droits des victimes de façon extrêmement complète, et de manière très souvent plus élevée que ce qui existe dans les autres pays de l’Union européenne, est conforme à la grande majorité des exigences de cette directive.
Notre droit doit cependant être précisé ou complété sur quelques points, dont certains ne font toutefois que consacrer des pratiques existantes. Le présent amendement permet ainsi :
- de compléter la liste des informations fournies aux victimes lors de leur dépôt de plainte ;
- de consacrer le droit des victimes à une évaluation de leurs besoins de protection ; les modalités concrètes de mise en œuvre de cette évaluation seront précisées dans un décret d’application afin de tenir compte des expérimentations nationales et européennes en cours ;
- de notifier aux victimes, à leur demande, les ordonnances de non-lieu rendues par le juge d’instruction ;
- de consacrer le droit des victimes à un interprète, qui est en pratique déjà mis en œuvre, et à une traduction des avis d’audience.
Ces dispositions devraient avoir un impact financier peu important, les victimes qui ne parlent pas la langue française étant déjà entendues en présence d’un interprète à défaut de quoi il serait impossible d’enregistrer leur plainte.