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Direction de la séance

Proposition de loi

Renforcer le droit de la concurrence et de la régulation économique outre-mer

(1ère lecture)

(n° 370 rect. , 369 )

N° 9

3 mars 2025


 

AMENDEMENT

présenté par

C
G  

MM. LUREL et KANNER, Mme BÉLIM, MM. OMAR OILI, STANZIONE et MONTAUGÉ, Mme ARTIGALAS, MM. BOUAD, CARDON, MÉRILLOU, MICHAU, PLA, REDON-SARRAZY, TISSOT

et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 1ER


Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de commerce est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l’article L. 420-2-1, après le mot : « importation », sont insérés les mots : « ou, pour les produits à marque de distributeur et les produits premiers prix définis par arrêté préfectoral, de distribution » ;

2° L’article L. 420-4 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« .... – Pour les accords ou pratiques concertées en cours, lorsqu’une infraction à l’article L. 420-2-1 est constatée, les entreprises concernées peuvent bénéficier d’une indemnisation du préjudice causé par les entreprises auteures, même partiellement, de la rupture de la relation commerciale en l’absence d’un préavis écrit qui tienne compte notamment de la durée de la relation commerciale, en référence aux usages du commerce ou aux accords interprofessionnels, et, pour la détermination du prix applicable durant sa durée, des conditions économiques du marché sur lequel opèrent les parties. 

« En cas de litige entre les parties sur la durée du préavis, la responsabilité de l’auteur de la rupture ne peut être engagée du chef d’une durée insuffisante dès lors qu’il a respecté un préavis de dix-huit mois.

« L’indemnisation prévue au premier alinéa prend en compte notamment les charges salariales afférentes, les atteintes à la valeur du fonds de commerce, les frais d’établissement et l’amortissement des biens d’équipement, autres que les immeubles d’habitation, les chantiers et les locaux servant à l’exercice de la profession, acquis ou fabriqués à compter de la conclusion du contrat commercial. »

Objet

Cet amendement du groupe SER opère deux modifications au code de commerce visant à parfaire la LREOM et à sécuriser les commerçants locaux face aux grands groupes d'importateurs distributeurs.

Premièrement, en insérant l'article L. 420-2-1 au sein du code de commerce, la LREOM a créé une nouvelle infraction en droit de la concurrence, applicable dans les seuls départements et collectivités d'outre-mer : l'interdiction des « accords ou pratiques concertées ayant pour objet ou pour effet d'accorder des droits exclusifs d'importation à une entreprise ou à un groupe d'entreprises ».

Cette interdiction n'est toutefois pas générale puisque l'article L. 420-4 du même code liste les dérogations possibles aux infractions au droit de la concurrence. Ainsi, les accords d'exclusivité peuvent être autorisés si leurs « auteurs peuvent justifier qu'ils sont fondés sur des motifs objectifs tirés de l'efficacité économique et qui réservent aux consommateurs une partie équitable du profit qui en résulte ».

Le législateur a en effet considéré qu'au vu de l'étroitesse des marchés ultramarins, il pouvait être parfois plus efficace économiquement, pour un fournisseur, de recourir à un importateur unique pour atteindre une taille critique. À l'usage, il apparait cependant que ces dispositions restent en partie incomplètes pour lutter contre les situations oligopolistiques et que certains types d'accords ou pratiques concertées continuent à fausser les règles de la concurrence, au détriment notamment des petits distributeurs locaux.

C'est la raison pour laquelle le 1° de cet amendement vise à élargir cette interdiction des clauses accordant des droits exclusifs d'importation non justifiées par l'intérêt des consommateurs à la distribution des produits à marque de distributeur et des produits premiers prix. Ces produits seraient définis par arrêté préfectoral dans le cadre des négociations annuelles prévues l'article L. 410-5 du code de commerce.

En second lieu, le 2° de cet amendement vise à modifier l'article L. 420-4 du code de commerce afin de parfaire les dispositifs pro-concurrentiels adoptés en 2012 et de mieux protéger les entreprises locales.

L'article L. 420-2-1 du code de commerce introduit en 2012 a pour objectif concret de condamner l'ensemble des « accords ou pratiques concertées ayant pour objet ou pour effet d'accorder des droits exclusifs d'importation à une entreprise ou à un groupe d'entreprises ». Si, comme en témoignent les décisions successives de l'autorité de la concurrence, cette disposition a permis de condamner de nombreuses entreprises, il s'avère parfois, dans la pratique, qu'elle engendre cependant des effets négatifs pour les petits acteurs économiques locaux. Paradoxalement en effet, cette mesure a, malgré l'intention du législateur, provoqué certaines dérives de la part des entreprises visées par cette interdiction.

Les expériences de terrain font manifestement apparaitre que nombre d'entreprises ou groupements (le plus souvent « importateur-grossistes » ou « agents de marque ») invoquent l'interdiction imposée par la loi LREOM pour rompre brutalement leurs relations commerciales avec les entreprises distributrices auxquelles ils ou elles sont liés. Or, lorsque ces dernières sont de petites entreprises locales, fortement dépendantes de ce contrat, la rupture des liens commerciaux peut entrainer la fin immédiate et brutale de leur activité, sans préavis, sans indemnisation et sans transfert d’une partie du personnel.

Les modifications proposées ici visent donc à faire en sorte que pour les accords ou pratiques concertées en cours, lorsqu'une infraction est constatée, les entreprises distributrices concernées peuvent bénéficier d'une indemnisation du préjudice causé par les entreprises auteures de la rupture de la relation commerciale.

Sur le modèle des dispositions prévues par l’article L442-1, le 2° prévoit ainsi que les entreprises auteures de la rupture de relation sont tenues d’adresser en amont à leur partenaire un préavis écrit qui tienne compte notamment de la durée de la relation commerciale, en référence aux usages du commerce ou aux accords interprofessionnels et, pour la détermination du prix applicable durant sa durée, des conditions économiques du marché sur lequel opèrent les parties.

En cas de litige entre les parties sur la durée du préavis, la responsabilité de l'auteur de la rupture ne peut être engagée du chef d'une durée insuffisante dès lors qu'il a respecté un préavis de dix-huit mois.

En outre, le 2° prévoit que l’indemnisation prévue au premier alinéa du nouveau paragraphe ainsi créé prenne en compte notamment les charges salariales afférentes, les atteintes au fonds de commerce, les frais d’établissement et l’amortissement des biens d’équipement, autres que les immeubles d’habitation, les chantiers et les locaux servant à l’exercice de la profession, acquis ou fabriqués à compter de la conclusion du contrat commercial.