Direction de la séance |
Projet de loi Souveraineté alimentaire et agricole (1ère lecture) (PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE) (n° 251 , 250 , 184, 187) |
N° 657 rect. quater 4 février 2025 |
AMENDEMENTprésenté par |
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MM. Vincent LOUAULT, CAPUS et MÉDEVIELLE, Mme LERMYTTE, M. CHASSEING, Mme Laure DARCOS, MM. LAMÉNIE, BRAULT, CHEVALIER, ROCHETTE et Alain MARC, Mme PAOLI-GAGIN et M. MALHURET ARTICLE 1ER |
Rédiger ainsi cet article :
I. – Le livre préliminaire du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Avant l’article L. 1, sont insérés deux articles L. 1 A et L. 1 B ainsi rédigé́s :
« Art. L. 1 A – La protection, la valorisation et le développement de l’agriculture et de la pêche sont d’intérêt général majeur en tant qu’ils garantissent la souveraineté agricole et alimentaire de la Nation, qui contribue à la défense de ses intérêts fondamentaux tels que définis à l’article 410-1 du code pénal.
« L’agriculture au sens du présent livre, qui s’entend par des activités réputées agricoles en application de l’article L. 311-1, comprend notamment l’élevage, l’aquaculture, le pastoralisme, la viticulture, les semences, l’horticulture et l’apiculture.
« On entend par souveraineté agricole et alimentaire, le droit de chaque pays de maintenir et de développer ses systèmes d’exploitation agricoles afin de garantir sa propre capacité à produire son alimentation et aux fins de fournir à l’ensemble de la population une alimentation saine, sûre, diversifiée, nutritive, accessible à tous tout au long de l’année et issue d’aliments produits de manière durable. À ce titre, elle garantit aux exploitants agricoles la liberté de gérer leur capacité et leur mode de production dans le but d’atteindre les objectifs nationaux fixés par la loi.
« On entend par sécurité alimentaire la capacité à assurer à toute personne et à tout moment un accès physique et économique aux denrées alimentaires dont elle a besoin.
« On entend par sécurité sanitaire alimentaire, la capacité à assurer la sécurité et la qualité sanitaires de notre alimentation, par l’évaluation des risques sanitaires dans les domaines de l’alimentation, de l’environnement et du travail, avec une approche intégrée et unificatrice qui vise à équilibrer et à optimiser durablement la santé des personnes, des animaux et des écosystèmes, en reconnaissant que la santé des humains, des animaux domestiques et sauvages, des plantes et de l’environnement en général est étroitement liée et interdépendante.
« Art. L. 1 B – I. Six mois avant le début des négociations de chaque cadre financier pluriannuel de l’Union européenne, le Gouvernement transmet (pour avis aux commissions compétentes) au Parlement une programmation pluriannuelle de l’agriculture pour les sept années couvrant le prochain cadre financier (ou fixée par décret) qui définit les modalités d’action des pouvoirs publics pour atteindre les objectifs définis aux L1-A, L1, L2, L3 et L4 du code rural et de la pêche maritime ainsi que par la présente loi.
« Cette programmation pluriannuelle de l’agriculture détermine notamment des objectifs de production par filière et la stratégie mise en œuvre pour atteindre ces objectifs. Ces objectifs doivent tendre à être excédentaires par rapport aux consommations nationales sur celles-ci.
« Le Gouvernement publie annuellement des données de production par filière permettant d’apprécier l’évolution de leur trajectoire de production.
« S’il est constaté pendant deux années consécutives un écart important entre la trajectoire de production observée de certaines filières et la trajectoire déterminée par la programmation pluriannuelle de l’agriculture, le Gouvernement transmet un rapport aux commissions compétentes du Parlement, exposant les raisons de l’écart et les mesures de correction envisagées. Ce rapport précise les mécanismes, notamment sous la forme d’aides, y compris européennes, mis en œuvre permettant de corriger les écarts observés.
« Elle est compatible avec les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre fixés dans le budget carbone mentionné à l’article L. 222-1 A du code de l’environnement, ainsi qu’avec la stratégie bas-carbone mentionnée à l’article L. 222-1 B, ainsi qu’avec le plan national d’adaptation au changement climatique et la stratégie nationale biodiversité mentionnée à l’article L. 110-3 du même code.
« La programmation pluriannuelle de l’agriculture fait l’objet d’une synthèse pédagogique accessible au public.
« Le décret prévu au présent article précise les objectifs et les priorités d’action de la politique agricole nationale.
« II. – Le Gouvernement remet chaque année au Parlement un rapport sur l’état de la souveraineté agricole et alimentaire de la France, détaillant l’atteinte des objectifs par filière mentionnés au II du présent article et comportant une annexe spécifique sur l’état de la souveraineté alimentaire de chacune des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution ainsi que de la Nouvelle-Calédonie. ».
2° L’article L. 1 est ainsi modifié :
a) Le I est ainsi rédigé :
« I. – La politique en faveur de l’agriculture et de l’alimentation, dans ses dimensions internationale, européenne, nationale et territoriale, a pour finalités :
« 1° De sauvegarder et, pour les filières les plus à risque, de reconquérir la souveraineté agricole et alimentaire de la France, en préservant et en développant ses systèmes de production et en préservant les agriculteurs de la concurrence déloyale de produits importés issus de systèmes de production ne respectant pas les normes imposées par la réglementation européenne, tout en veillant à préserver les écosystèmes et les ressources naturelles sur l’ensemble du territoire national et en promouvant les systèmes de production agroécologiques, d’agriculture raisonnée et d’agriculture de conservation des sols ;
« 2° De développer des filières de production et de transformation ainsi que leur valeur ajoutée, en alliant performance économique, sociale, notamment par un haut niveau de protection sociale, environnementale et sanitaire, afin qu’elles soient capables de relever le double défi de la compétitivité et de la transition écologique, dans un contexte de compétition internationale, et de veiller, dans tout nouvel accord de libre-échange, au respect du principe de réciprocité et à une exigence de conditions de production comparables pour ce qui concerne l’accès au marché ainsi qu’à un degré élevé d’exigence dans la coopération en matière de normes sociales, environnementales, sanitaires et relatives au bien- être animal, en vue d’une protection toujours plus forte des consommateurs et d’une préservation des modèles et des filières agricoles européens ;
« 3° De préserver la souveraineté de l’élevage et de l’agropastoralisme en France par un plan stratégique déterminant notamment les objectifs de potentiel de production, d’assurer le maintien de l’élevage, en préservant le pâturage et en luttant contre la décapitalisation dans l’élevage, en cohérence avec les besoins alimentaires, d’assurer l’approvisionnement en protéines animales des Français et de maintenir et de restaurer l’ensemble de ses fonctionnalités environnementales, sociales, économiques et territoriales ainsi que ses complémentarités agronomiques avec les productions végétales ;
« 4° De favoriser l’installation économiquement viable d’exploitations agricoles et de soutenir le revenu, en assurant une juste rémunération, de développer l’emploi et d’améliorer la qualité de vie et les conditions de travail des agriculteurs et des salariés agricoles et de l’agroalimentaire, de préserver un modèle d’exploitation agricole familial ainsi que la possibilité pour les agriculteurs de choisir leurs systèmes de production dans un cadre clair et loyal et dans le respect de la liberté d’entreprendre, de rechercher l’équilibre des relations commerciales, notamment par un meilleur partage de la valeur ajoutée, et de contribuer à l’organisation collective des acteurs et de valoriser le rôle essentiel des agricultrices par un accès facilité au statut de chef d’exploitation, à la formation continue et à une rémunération équitable ;
« 5° D’anticiper et de s’adapter aux conséquences du changement climatique, en atténuant ses effets, en accompagnant les agriculteurs et en surmontant de façon résiliente, efficiente et efficace les crises de toute nature susceptibles de porter atteinte à ses capacités de production nationale et à son approvisionnement alimentaire, notamment par l’établissement de toutes mesures de sauvegarde, dérogatoires si nécessaire, permettant le respect des objectifs et priorités d’action visée par le présent article
« 6° De reconnaître et de mieux valoriser les externalités positives de l’agriculture, notamment en matière de services environnementaux et d’aménagement du territoire ;
« 7° De concourir à la transition énergétique et climatique, en contribuant aux économies d’énergie et au développement des matériaux décarbonés et des énergies renouvelables ainsi qu’à l’indépendance énergétique de la Nation, notamment par la valorisation optimale et durable des sous-produits d’origine agricole et agroalimentaire dans une perspective d’économie circulaire et de retour de la valeur aux agriculteurs ;
« 8° De soutenir la recherche, l’innovation et le développement, notamment des technologies et des filières de production de fertilisants agricoles sur le sol national pour limiter la dépendance aux importations en engrais, de produits biosourcés, de la chimie végétale, de nouvelles techniques génomiques et de solutions fondées sur la nature ; et d’assurer la décarbonation de l’économie par la production durable de biomasse, y compris sylvicole, la captation et le stockage du carbone, l’efficience et l’efficacité de l’eau ;
« 9° De contribuer à la protection de la santé publique et de la santé des agriculteurs et des salariés du secteur agricole, en assurant le développement de la prévention sanitaire des actifs agricoles, de veiller au bien-être et à la santé des animaux, à la santé des végétaux et à la prévention des zoonoses en prenant en compte l’approche “une seule santé” ;
« 10° De participer au développement des territoires de façon équilibrée et durable, en prenant en compte les situations spécifiques à chaque région, notamment celles des zones dites “intermédiaires” et des zones de montagne mentionnées au VI du présent article ;
« 11° D’encourager l’ancrage territorial de la production, de la transformation et de la commercialisation des produits agricoles, y compris par la promotion de circuits courts, et de favoriser la diversité des produits par le développement des productions sous signes d’identification de la qualité et de l’origine et de promouvoir l’information des consommateurs quant aux lieux et aux modes de production et de transformation des produits agricoles et agroalimentaires ;
« 12° De promouvoir la préservation, la conversion, le développement et le maintien de l’agriculture et des filières biologiques, au sens de l’article L. 641-13, en veillant à l’adéquation entre l’offre et la demande sur le marché national pour atteindre les objectifs inscrits dans le programme national sur l’ambition en agriculture biologique et dans l’objectif d’atteindre une surface agricole utile cultivée de 21 % avant le 1er janvier 2030. ;
« 13° De promouvoir l’autonomie de la France et de l’Union européenne en protéines, en tendant vers une autonomie protéique nationale avant 2050, en augmentant la surface agricole utile cultivée en légumineuses à 10 % avant le 1er janvier 2030 ;
« 14° De promouvoir la souveraineté en fruits et légumes, par un plan stratégique dédié ;
« 15° De répondre à l’accroissement démographique, en assurant la sécurité alimentaire de la population en rééquilibrant les termes des échanges entre pays dans un cadre européen et de coopération internationale fondé sur le respect du principe de souveraineté agricole et alimentaire et permettant un développement durable et équitable, pour lutter contre contre la précarité alimentaire définie à l’article L266-1 du code de l’action sociale et des familles, et en luttant contre la faim dans le monde en soutenant l’émergence et la consolidation de l’autonomie alimentaire dans le monde.
« 16° De favoriser l’acquisition pendant l’enfance et l’adolescence d’une culture générale de l’alimentation et de l’agriculture, en soulignant les enjeux culturels, environnementaux, économiques et de santé publique des choix alimentaires.
« La politique d’aménagement rural définie à l’article L. 111-2 et les dispositions particulières aux professions agricoles en matière de protection sociale et de droit du travail prévues au livre VII contribuent à ces finalités. » ;
b) À la première phrase du II, après le mot : « biologique, » sont insérés les mots : « d’agriculture raisonnée et de conservation des sols, » ;
c) Le IV est ainsi rédigé :
« IV. – La politique d’installation et de transmission en agriculture a pour objectif de contribuer à la souveraineté agricole définie à l’article L. 1 A et aux transitions agroécologique, énergétique et climatique en agriculture, en favorisant le renouvellement des générations d’actifs en agriculture. Elle contribue à relever le défi démographique posé notamment par le vieillissement de la population active agricole, en accompagnant les reprises d’exploitation et en favorisant la diversification des profils des porteurs de projets à l’installation. Elle affirme le caractère stratégique de ce renouvellement pour, d’une part, renforcer la création de richesse et la compétitivité de l’économie française et, d’autre part, répondre aux enjeux environnementaux et climatiques grâce aux services écosystémiques et énergétiques rendus par l’agriculture. Elle participe à la transition vers des modèles agricoles plus résilients sur les plans économique, social et environnemental.
« À ce titre, elle oriente en priorité l’installation en agriculture vers des secteurs stratégiques pour la souveraineté agricole et alimentaire et les transitions écologique et climatique, adaptés aux enjeux de chaque territoire, et vers des systèmes de production diversifiés et viables humainement, économiquement et écologiquement, au moyen de mesures visant à :
«1° Faire connaître les métiers d’exploitant agricole et de salarié agricole et communiquer sur l’enjeu stratégique du renouvellement des générations pour assurer la souveraineté alimentaire de la France ;
« 2° Susciter des vocations agricoles dans le public scolaire et parmi les personnes en reconversion professionnelle ou en recherche d’emploi ;
« 3° Proposer un accueil, une orientation et un accompagnement qui soient à la fois personnalisés, pluralistes et coordonnés, à l’ensemble des candidats à l’entrée en agriculture et des personnes envisageant de cesser et de transmettre leur activité ;
« 4° Mettre en relation les porteurs de projets en agriculture et les personnes en activité agricole ou en fin de carrière agricole et favoriser la création, l’adaptation et la transmission des exploitations agricoles dans un cadre familial comme hors de ce cadre ;
« 5° Encourager les formes d’installation collective et les formes d’installation progressive, y compris le droit à l’essai, permettant d’accéder aux responsabilités de chef d’exploitation tout en développant un projet d’exploitation ainsi que l’individualisation des parcours professionnels ;
« 6° Favoriser la fourniture d’informations claires et objectives sur l’état des exploitations à transmettre, afin de garantir leur viabilité d’un point de vue économique, humain et environnemental ;
« 7° Soutenir l’installation en agriculture, en facilitant la possibilité́ de construire un nouveau bâtiment à usage d’habitation, attenant au bâtiment technique, sur le terrain agricole ;
« 8° Prévoir les leviers fiscaux et bancaires permettant la reprise d’exploitation.
« Dans le cadre de cette politique, l’État facilite l’accès au foncier agricole dans des conditions transparentes et équitables. Il assure la formation aux métiers de l’agriculture, de la forêt, de l’aquaculture et de la transformation et de la commercialisation des produits agricoles ainsi qu’aux métiers qui leur sont liés. Cette formation est adaptée aux transitions écologique et climatique, aux enjeux de la souveraineté alimentaire, aux évolutions économiques, sociales et sanitaires affectant l’activité agricole ainsi qu’au développement des territoires.
« La mise en œuvre de cette politique d’aide à l’installation et à la transmission s’appuie sur une instance nationale et des instances régionales de concertation réunissant l’État, les régions et les autres partenaires concernés. » ;
d) La seconde phrase du V est ainsi modifiée :
- après le mot : « marchés, », sont insérés les mots : « le revenu des agriculteurs, » ;
– après le mot : « durable, », sont insérés les mots : « l’adaptation des exploitations au changement climatique, » ;
– le mot : « locale » est supprimé ;
– après le mot : « l’emploi, », sont insérés les mots : « la formation, le renouvellement des générations, » ;
– après le mot : « locales, », sont insérés les mots : « notamment en s’appuyant sur les filières de diversification, la préservation et la pleine mobilisation de la surface agricole utile, ».
Objet
Amendement de réécriture de l’article premier afin de revenir et de le réinsérer sur le travail de concertation et de fond qui a été mené lors de l’examen à l’Assemblée Nationale, conjointement avec les rapporteurs, les groupes politiques et le Gouvernement.
Il permet d’éviter la caricature sur un texte important pour donner les lignes directrices et les objectifs de l’agriculture pour les prochaines années, qui sont clés pour sauver la production agricole de notre pays.