Direction de la séance |
Projet de loi Projet de loi de finances pour 2025 (1ère lecture) SECONDE PARTIE MISSION RELATIONS AVEC LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES (n° 143 , 144 , 150) |
N° II-731 28 novembre 2024 |
AMENDEMENTprésenté par |
|
||||||||
M. ROIRON, Mme BRIQUET, MM. COZIC, KANNER et RAYNAL, Mme BLATRIX CONTAT, M. ÉBLÉ, Mme ESPAGNAC, MM. FÉRAUD, JEANSANNETAS et LUREL, Mmes ARTIGALAS, BÉLIM et CANALÈS, M. CHAILLOU, Mme DANIEL, MM. FAGNEN, Patrice JOLY et KERROUCHE, Mme LE HOUEROU, MM. MARIE et MÉRILLOU, Mmes MONIER et NARASSIGUIN, MM. PLA, REDON-SARRAZY, ROS, STANZIONE, TISSOT, UZENAT, VAYSSOUZE-FAURE, ZIANE et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain ARTICLE 64 |
Supprimer cet article.
Objet
Le projet de loi de finances pour 2025 envisage la création d’un fonds de prélèvement sur les recettes des collectivités locales. Le groupe SER s'oppose à cet article. L’argument retenu pour la création de ce fonds et présenté par le gouvernement dans l’exposé des motifs repose sur la nécessité d’associer les collectivités à l’effort de redressement des finances publiques et plus particulièrement du budget de l’Etat lourdement déficitaire.
Cette ambition de redressement est importante, puisqu’il s’agit, pour la part revenant aux collectivités locales, d’une contribution globale de 5 milliards d’euros dont 3 milliards d’euros pour l’instauration d’un fonds de réserve correspondant à cet article, soit 5 % des dépenses d’équipement de l’ensemble des collectivités locales.
Ce fonds serait prélevé directement sur les recettes des collectivités dont les dépenses de fonctionnement sont supérieures à 40 millions d’euros.
Ce prélèvement est par ailleurs très concentré sur un petit nombre de collectivités. Pour les collectivités du bloc local, le prélèvement concernerait 450 communes et intercommunalités, principalement urbaines. Il est prévu des mesures d’exonération pour les collectivités présentant des difficultés (critères de revenu/hab. et de potentiel fiscal/ hab. retenu pour le FPIC), réduisant le nombre de collectivités contributrices.
Intercommunalités de France considère que s’il y a une communauté de destin en matière de déficit public, reconnaissant les efforts fait par la nation notamment au moment des crises récentes, le caractère brutal et non concerté de ce prélèvement pose question. A ce stade, compte tenu des délais réduits d’élaboration du PLF, aucune simulation ne permet de mesurer son impact sur l’investissement.
Selon les travaux de la Cour des comptes, la mesure de réduction d’un tiers de la DGF sur la période 2014-2017 (soit une baisse moyenne similaire de 3 mds par an) par an a donné lieu à un recul significatif de l’investissement (- 11 %).
La ponction financière prévue - dont la durée dans le temps n’est pas définie par l’article 64 du PLF 2025- pourrait produire les mêmes effets.
Rappelons que les communes et les intercommunalités jouent un rôle déterminant, notamment en matière d’investissement public. A ce titre, elles ont un effet levier indéniable et significatif sur l’économie locale et nationale. Ce levier de croissance doit être préservé.
A titre d’illustration, au cours des six dernières années (2018-2023), les collectivités du bloc local ont investi, en cumulé, 210 milliards d’euros, soit une moyenne de 35 milliards d’euros par an, répartis entre 65 % pour les communes et 35 % pour les intercommunalités.
Tout en considérant que le déficit des comptes public ne peut laisser les collectivités, parties intégrantes de la nation, indifférentes, force est de constater que le dispositif proposé n’est pas adéquat.
Rapportées au PIB, les dépenses des collectivités locales (18 % de la dépense publique) sont restées stables au cours des dix dernières années : 11,5 % en 2010 et 11,2 % en 2022 dans un contexte d’accroissement important de l’offre de services. A l’exception de l’année 2020 marquée par la crise covid, les collectivités ont dégagé une capacité de financement positive de 2015 à 2022 participant de ce fait à la réduction du déficit public. Ce n’est qu’à partir de 2023 que la forte inflation et la hausse du coût de l’énergie et des matériaux ont dégradé le besoin de financement des collectivités locales qui est devenu faiblement négatif.
Tel que rédigé, l’article 64 présente encore beaucoup trop d’inconnues et d’imperfections dans sa mise en œuvre : sa forte concentration sur un faible nombre de contributeurs.
L’objectif poursuivi d’une baisse du besoin de financement des collectivités concernées n’est en rien assuré, certaines, ayant des capacités d’emprunt importantes, pourraient alourdir la dette pour combler la perte d’épargne générée par la mise en place du fonds
La mise en œuvre opérationnelle semble délicate pour les budgets 2025 des collectivités et les PPI déjà engagés, puisque la mise en œuvre effective du fonds ne sera confirmée qu’en juin 2025 avec la publication du déficit prévisionnel par l’INSEE.
L’absence de concertation avec l’ensemble des acteurs, de diagnostic partagé sur la réalité de la situation des collectivités locales, de recherche en commun de solutions pour que les collectivités puissent contribuer à la résorption du déficit public conduit à supprimer l’article 64.
Les collectivités sont appelées à jouer un rôle actif dans la croissance économique du pays, à répondre aux grands enjeux en matière de transition écologique, mais aussi sociétaux et sociaux. Leur capacité d’investissement doit à tout prix être préservée.
Cet amendement a été travaillé avec des associations d’élus.