Direction de la séance |
Projet de loi Projet de loi de finances pour 2025 (1ère lecture) SECONDE PARTIE MISSION ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES (n° 143 , 144 , 145, 148) |
N° II-26 25 novembre 2024 |
En attente de recevabilité financière |
AMENDEMENTprésenté par |
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Mme LAVARDE au nom de la commission des finances Article 42 (crédits de la mission) (État B) |
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes | Autorisations d’engagement | Crédits de paiement | ||
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Infrastructures et services de transports |
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Affaires maritimes, pêche et aquaculture |
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Paysages, eau et biodiversité |
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Expertise, information géographique et météorologie |
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Prévention des risques | 230 000 000 |
| 230 000 000 |
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Énergie, climat et après-mines |
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Service public de l'énergie |
| 100 000 000 |
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Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables dont titre 2 |
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Fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires |
| 130 000 000 |
| 230 000 000 |
Sûreté nucléaire et radioprotection dont titre 2 |
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TOTAL | 230 000 000 | 230 000 000 | 230 000 000 | 230 000 000 |
SOLDE | 0 | 0 |
Objet
La loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 a intégré le budget du Fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM) – mieux connu sous le nom de « fonds Barnier » – au programme 181 « Prévention des risques ». Jusqu’à cette date, le FPRNM était financé par un prélèvement obligatoire de 12 % sur le montant payé par les assurés au titre de la garantie contre les catastrophes naturelles, représentant lui-même une « surprime CatNat » de 12 % ou 6 % sur la prime technique d’assurance selon qu’il s’agit d’un contrat habitation ou automobile.
Cela ne signifie pas que le prélèvement sur les contrats d’assurance ait disparu : une nouvelle taxe a été créée à l’article 235 ter ZE du code général des impôts, qui reprend l’assiette et le taux exacts du prélèvement sur la surprime CatNat, mais qui est désormais entièrement affectée au budget général de l’État. Par conséquent, les montants attribués au fonds Barnier sont décorrélés du taux de la surprime.
La budgétisation du fonds Barnier était nécessaire pour permettre au Parlement de se prononcer sur les dépenses du fonds, mais le « contrat implicite » était que la différence entre le produit de cette taxe et le montant du fonds Barnier demeure raisonnable.
Or, on constate aujourd’hui un écart massif entre les financements du fonds Barnier et le prélèvement sur les contrats d’assurance : en 2023, le produit de cette taxe a atteint 273 millions d’euros, tandis que le fonds Barnier s’élevait à 205 millions d’euros. À compter de 2025, ce décalage va s’amplifier : le relèvement du taux de la surprime de 12 % à 20 % prévu au 1er janvier conduira à une hausse du rendement du prélèvement sur la garantie CatNat, qui devrait atteindre 450 millions d’euros l’année prochaine.
Une telle situation n’est pas acceptable. Le prélèvement prévu à l’article 235 ter ZE du code général des impôts ne dépend pas du revenu des assurés, et il est assis sur la « surprime CatNat », qui a vocation à financer le régime d’indemnisation des catastrophes naturelles (régime CatNat). Le consentement à cet impôt repose donc sur l’idée que les sommes collectées viennent financer la prévention des risques.
Le rapporteur spécial avait déjà alerté sur cette situation dans son rapport sur le régime d’indemnisation des catastrophes naturelles, adopté par la commission des finances le 15 mai dernier : « Il serait incompréhensible pour l’ensemble des acteurs de l’assurance et de la prévention des risques que le relèvement du taux de la surprime ne se traduise pas par un rehaussement parallèle des financements du fonds Barnier, ou du moins, des dépenses destinées à la prévention des risques. »[1]
Après le dépôt du projet de loi de finances initiale, le Gouvernement a annoncé son intention de finalement rehausser le financement du fonds Barnier à 300 millions d’euros lors des épisodes d’inondations qu’ont connu les départements de l’Ardèche, de la Loire et du Var. Ce relèvement du montant est nécessaire, mais il convient d’aller encore plus loin : les 450 millions d’euros récoltés sur les contrats d’assurance doivent être affectés à la prévention des risques. En outre, l’amendement de crédit déposé sur le mission et le Gouvernement à l’Assemblée nationale ne prévoit pas cet abondement supplémentaire.
Les enjeux de prévention des risques dépassent par ailleurs le champ des mesures aujourd’hui prises en charge par le fonds Barnier. Le retrait-gonflement des argiles (RGA) n’est en effet pas pris en charge par le fonds, bien qu’il présente des enjeux financiers considérables.
À l’avenir, le poids du RGA au sein du régime d’indemnisation des catastrophes naturelles devrait augmenter fortement. Les indemnités versées au titre de la sécheresse devraient avoisiner 43 milliards d’euros entre 2020 et 2050, contre 13,8 milliards d’euros au cours des trente dernières années. Environ 50 % des maisons individuelles en France sont situées dans une zone d’exposition à ce risque.
Or, des mesures de prévention existent, et elles peuvent aider à réduire considérablement la pression sur le régime d’indemnisation des catastrophes naturelles. Le rapporteur spécial en avait présenté certaines, avec leurs avantages et leurs inconvénients, dans le rapport qu’il a consacré au risque RGA, et dont les conclusions ont été adoptées par la commission des finances le 15 février 2023[2].
Le présent amendement de crédits vise ainsi à augmenter les crédits de la politique de prévention des risques naturels de l’Etat sur le programme 181 de 220 millions d’euros à 450 millions d’euros en AE et en CP, qui seront fléchés de cette manière :
- 80 millions d’euros sur l’action 14 « fonds de prévention des risques naturels majeurs » (FPRNM – fonds Barnier), de sorte à ce que son enveloppe atteigne 300 millions d’euros ;
- 100 millions d’euros pour créer une nouvelle action 15 « prévention du risque retrait-gonflement des argiles » ;
- 50 millions d’euros seront fléchés à l’action 10 « Prévention des risques naturels et hydrauliques » pour subventionner des travaux dans des communes non dotées d’un plan de prévention des risques naturels majeurs.
Ces mesures seront financées par un transfert de 100 millions d’euros d’AE de l’action 18 « Soutien hydrogène » du programme 345 « Service public de l’énergie », ainsi qu’un transfert de 130 millions d’euros d’AE et de 230 millions d’euros de CP de l’action 02 « adaptation au changement climatique » du programme 380 « fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires » (fonds vert).
En effet, compte-tenu du retard pris dans la mise en œuvre du nouveau dispositif de soutien à la production d’hydrogène décarbonée, il ne pourra donner lieu à aucune dépense effective en 2025.
Concernant les dépenses inscrites sur le fonds vert : dans la pratique, elles sont peu consacrées à la prévention des risques, mais servent à financer d’autres politiques. Ce transfert doit ainsi permettre de garantir qu’elles financent effectivement des dispositifs à forte valeur ajoutée, pour cette politique essentielle comme la prévention du RGA.
[1] Rapport d’information n° 603 (2023-2024) du 15 mai 2024 de Mme Christine Lavarde fait au nom de la commission des finances sur le régime d’indemnisation des catastrophes naturelles.