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Direction de la séance

Projet de loi

Projet de loi de finances pour 2025

(1ère lecture)

SECONDE PARTIE

MISSION COHÉSION DES TERRITOIRES

(n° 143 , 144 , 145, 147, 148)

N° II-2081

16 janvier 2025


 

AMENDEMENT

présenté par

C Défavorable
G Défavorable
Rejeté

Mmes Olivia RICHARD, EVREN, PHINERA-HORTH, ROSSIGNOL, VÉRIEN, SOLLOGOUB et GACQUERRE


Article 42 (crédits de la mission)

(État B)


Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables

131 400 000

 

131 400 000

 

Aide à l’accès au logement

 

 

 

 

Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat

 

 

 

 

Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire

dont titre 2

 

 

 

 

Politique de la ville

dont titre 2

 

131 400 000

 

131 400 000

Interventions territoriales de l’État

 

 

 

 

TOTAL

131 400 000

131 400 000

131 400 000

131 400 000

SOLDE

0

0

 

Objet

Cet amendement propose d’augmenter, à hauteur de 131,4 millions d’euros, les crédits du programme 177 de la mission, consacrés à l’hébergement et à l’accompagnement des personnes sans domicile, dans la lignée des constats et préconisations formulés par le rapport de la délégation aux droits des femmes « Femmes sans abri : la face cachée de la rue », publié le 9 octobre 2024, et en particulier de sa recommandation n°3 : « Dans l’attente d’une offre de logements abordables suffisante et afin d’assurer une mise à l’abri immédiate et une prise en charge minimale d’un mois pour les femmes et les familles, créer 10 000 places d’hébergement supplémentaires, en mobilisant notamment l’habitat intercalaire ».

Le nombre de personnes sans domicile a doublé en dix ans, pour atteindre 330 000 en 2024. Si le nombre de places d’hébergement n’a jamais été aussi élevé, et devrait être maintenu autour de 203 000 places au sein du parc généraliste, il n’est cependant pas suffisant et, au vu des crédits annoncés pour 2025, tout laisse à penser que sera privilégié le financement de places d’hôtels. Bien que ces nuitées hotellières soient moins coûteuses, elles sont bien moins qualitatives et ne peuvent pas aider les bénéficiaires à sortir de la rue, contrairement à des nuits dans des centres d’hébergement et de réinsertion sociale qui prévoient un accompagnement social systématique. Lors de l’examen en délégation, les co-rapporteures rappelaient notamment que « La nature de l’hébergement dans les hôtels est en réalité honteuse et empreinte de violence, sans aucun accompagnement socio-éducatif. Elle ne peut en aucun cas être considérée comme une offre acceptable pour résoudre même une partie du problème des femmes à la rue ». En conséquence, cet amendement propose la création de 10 000 places dans des centres d’hébergement et de réinsertion sociale.

Afin de gérer la pénurie de places d’hébergement, des critères de vulnérabilité de plus en plus restrictifs ont été établis par les préfectures. Ce qui ne devait être qu’une priorité dans la prise en charge et une aide à la décision est devenu une condition d’accès à part entière, en contradiction avec le principe d’inconditionnalité de l’accès à l’hébergement. De facto, les personnes qui ne relèvent pas du niveau 1 de vulnérabilité (en Île-de-France, les femmes victimes de violences, les femmes enceintes de plus de six mois et les enfants de moins de trois mois) n’ont souvent aucune solution d’hébergement proposée lorsqu’elles appellent le 115 et même les personnes vulnérables n’obtiennent pas systématiquement une mise à l’abri, faute de places d’hébergement disponibles ou compatibles avec leur composition familiale. Toujours pour gérer le manque de places, certains hébergements d’urgence ne sont octroyés que pour quelques nuits, et, chaque semaine, les personnes qui y sont accueillies doivent quitter ces lieux, repasser par la rue, parfois pendant plusieurs jours, avant de retrouver un nouvel abri.

Chaque soir, environ 3 000 femmes sans abri, et autant d’enfants, passent la nuit dans la rue, exposés à de multiples facteurs de risque et à des violences physiques et sexuelles. Les femmes sans abri ont quasiment toutes subi des violences et sont particulièrement exposées aux risques d’exploitation par le travail et d’exploitation sexuelle.

Afin d’assurer une mise à l’abri immédiate et une prise en charge minimale d’un mois pour les femmes et les familles, la délégation aux droits des femmes a estimé, en lien avec les associations, que 10 000 places d’hébergement supplémentaires étaient nécessaires. En outre, une amélioration qualitative du parc d’hébergement doit être engagée, en transformant les nuitées hôtelières en places pérennes et en assurant davantage de places non mixtes pour les femmes isolées, des places adaptées à toutes les configurations familiales et des lieux permettant de cuisiner, disposer d’une intimité et accueillir des enfants. Enfin, les associations qui assurent la gestion du parc d’hébergement et l’accompagnement des personnes sans domicile doivent être davantage soutenues, avec une meilleure prévisibilité de leurs financements.

Traduisant ces trois préconisations, le présent amendement vise à abonder les crédits du programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » pour créer 10 000 places d’hébergement d’urgence supplémentaires avec accompagnement social des bénéficiaires.

Afin de se conformer aux règles de la recevabilité financière, cet amendement transfère 131,4 millions d’euros du programme 147 « Politique de la ville » vers le programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » et son action 12 « Hébergement et logement adapté ». Cependant, l’intention des auteurs n’est pas de ponctionner les crédits du programme 147 et, en cas d’adoption de l’amendement, il est demandé au Gouvernement de lever le gage.