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Direction de la séance

Projet de loi

Projet de loi de finances pour 2025

(1ère lecture)

SECONDE PARTIE

MISSION GESTION DES FINANCES PUBLIQUES

(n° 143 , 144 )

N° II-1758

4 décembre 2024


 

AMENDEMENT

présenté par

C
G  

Le Gouvernement


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 60


Après l’article 60

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Des biens immobiliers relevant du domaine privé ou du domaine public de l’État peuvent être transférés en pleine propriété à l’établissement public créé en application du premier alinéa du II du présent article. Ces transferts s’effectuent à titre gratuit. Un décret fixe la liste des biens transférés et arrête la date de leur transfert.

II. – La société anonyme Agence de gestion de l’immobilier de l’État est transformée en un établissement public national à caractère industriel et commercial placé sous la tutelle du ministre chargé des domaines.

Cet établissement a pour mission de :

1° gérer, entretenir et rénover les biens immobiliers dont il est propriétaire afin d’optimiser leurs usages et de contribuer aux objectifs de l’État en matière de transition écologique ;

2° mettre ces biens immobiliers à disposition des services de l’État, des collectivités territoriales, des établissements publics de l’État ou de tout organisme public ou privé ;

3° acquérir des biens et droits immobiliers de toute nature ;

4° valoriser les biens et droits immobiliers qu’il détient par tous moyens. Dans le cadre de la

valorisation du domaine privé, il pourra les céder, lorsque ceux-ci ne sont plus utiles à l’État ;

5° réaliser tous travaux et opérations d’aménagement, de développement, de promotion, de

construction, de restructuration ou de démolition ;

6° réaliser toutes prestations, notamment d’études, services ou conseils, au profit de tout

organisme public, dans le champ de ses missions.

L’établissement public met les biens dont la propriété lui a été transférée par l’État à disposition de ce dernier, des collectivités territoriales, des établissements publics de l’État ou de tout organisme public ou privé, dans les conditions prévues par un ou plusieurs contrats de bail ou conventions d’occupation du domaine public.

Cet établissement public peut créer des filiales ou prendre des participations dans des sociétés, groupements ou organismes dont l’objet concourt à la réalisation des missions définies aux 1° à 6° de l’alinéa précédent, après accord préalable du ministre de tutelle.

Il est autorisé à conclure des marchés de partenariat, dans les conditions prévues par le livre II de la deuxième partie du code de la commande publique.

L’établissement public est administré par un conseil d’administration qui arrête les orientations stratégiques de l’établissement et exerce le contrôle permanent de sa gestion. Il est composé de représentants de l’État, de personnalités qualifiées et de représentants du personnel de l’établissement. Son président est le directeur de l’immobilier de l’État.

L’établissement public est dirigé par un directeur général qui est responsable de sa gestion.

Les ressources de l’établissement public sont constituées par :

1° Les subventions de l’État, des collectivités territoriales et de toutes autres personnes publiques et privées ;

2° Les emprunts de toute nature, y compris les crédits-baux ;

3° Le produit d’opérations commerciales ;

4° Les dons et legs ;

5° Le revenu des biens meubles et immeubles ;

6° Le produit des placements ;

7° Le produit des aliénations ;

8° D’une manière générale, toute autre recette provenant de l’exercice de ses activités.

L’établissement public est soumis au contrôle économique et financier de l’État.

La transformation de la société Agence de gestion de l’immobilier de l’État en établissement public n’emporte ni création de personne morale nouvelle, ni cessation d’activité. Les biens, droits, obligations, contrats et autorisations de toute nature de l’établissement public sont ceux de cette société au moment de la transformation de sa forme juridique. Cette transformation ne permet aucune remise en cause de ses biens, droits, obligations, contrats et autorisations et n’a, en particulier, aucune incidence sur les contrats conclus avec des tiers par la société Agence de gestion de l’immobilier de l’État pour la gestion de l’immobilier de l’État et les sociétés qui lui sont liées au sens des articles L. 233-1 à L. 233-4 du code de commerce.

III. – Ne donnent lieu au paiement d’aucun impôt, droit ou taxe, ni d’aucune contribution ou frais perçus au profit du Trésor :

1° Les transferts de propriété mentionnés au I ;

2° Les opérations résultant de la transformation prévue au II ;

3° Les transferts de propriété effectués entre l’établissement public créé en application du II et une société dont il détient directement ou indirectement l’intégralité du capital.

IV. – L’établissement public mentionné au II du présent article est substitué de plein droit à l’État pour les droits et obligations afférents à la gestion, à l’entretien et à l’exploitation des biens qui lui sont transférés en application du I du présent article à compter de la date de leur transfert. Le décret visé en I. précisera les modalités d’application de cette substitution et listera le cas échéant les contrats qui en sont exclus.

V. – Nonobstant toute disposition contraire, l’établissement public mentionné au premier alinéa du I du présent article ainsi que ses filiales peuvent conclure des emprunts de toute nature, y compris des crédits-baux immobiliers.

VI. – Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :

1° L’article L. 213-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« l) les transferts en pleine propriété des immeubles appartenant à l’État réalisés conformément à l’article XXX de la loi n° XXX du XXX de finances pour 2025, ainsi que les transferts réalisés entre l’établissement public mentionné par cet article et une société dont il détient directement ou indirectement l’intégralité du capital. » ;

2° Avant le dernier alinéa de l’article L. 240-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« – aux transferts en pleine propriété des immeubles appartenant à l’État réalisés conformément à l’article XXX de la loi n° XXX du XXX de finances pour 2025, ainsi que les transferts réalisés entre l’établissement public mentionné par cet article et une société dont elle détient directement ou indirectement l’intégralité du capital. »

VII. – Le I de l’article L. 3211-13-1 du code général de la propriété des personnes publiques est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, après les mots « filiale mentionnée au 5° de cet article, » sont insérés les mots : « aux sociétés dont l’établissement public créé en application de l’article XXX de la loi n° XXX du XXX de finances pour 2025 détient directement ou indirectement l’intégralité du capital, » ;

2° Au troisième alinéa, après les mots « s’applique » sont insérés les mots : « à l’établissement public national créé par l’article XXX de la loi XXX du XXX de finances pour 2025 et ».

VIII. – L’établissement public mentionné au premier alinéa du II ainsi que ses filiales émettent un avis conforme à l’inscription d’un ou plusieurs de leurs biens sur la liste mentionnée au 2° du II de l’article L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques, dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État.

IX. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article, notamment le nom et la composition du conseil d’Administration de l’établissement public mentionné au I ainsi que la date de la transformation de la société anonyme Agence de gestion de l’immobilier de l’État, qui doit intervenir au plus tard le 1er juin 2025.

 

Objet

L’immobilier de l’État est confronté à des défis majeurs. L’État doit contribuer significativement l’effort national de réduction de l’empreinte carbone, mais aussi proposer à ses agents et aux usagers des services publics un environnement de travail et d’accueil amélioré et modernisé. Dans la poursuite de ces objectifs, la rationalisation de l’usage des surfaces immobilières, avec la transformation et la valorisation des surfaces libérées, sont des outils puissants.

 Le présent article vise à mettre en place une réelle fonction État-propriétaire (foncière interministérielle) à travers la mise en œuvre de loyers instituant la répartition des rôles entre l’État-propriétaire et l’État-locataire. Plus largement, il s’agit de responsabiliser, d’une part, l’État propriétaire sur ses missions de rationalisation, mise aux normes, entretien et valorisation de son parc et, d’autre part, l’État occupant sur le bon usage des locaux et la sobriété d’usage.

Pour assurer la réussite de cette réforme, le cadre juridique est solidifié par une réforme structurelle à travers la création d’une foncière d’État constituée sous la forme d’un établissement public à caractère industriel et commercial, qui devra assumer toutes les obligations de mise aux normes du parc qui lui sera transféré, afin de proposer aux occupants, agents et usagers des services publics, un immobilier adapté. La foncière aura pour objectif la mise aux normes et l’atteinte des objectifs fixés par l’État aux bâtiments publics en termes de transition écologique.

La légitimité d’action de la foncière découlera notamment du fait qu’elle sera pleinement propriétaire d’une partie des biens dont la gestion lui sera confiée, qu’ils relèvent du domaine public ou du domaine privé. Cet article détermine ainsi les conditions de transfert de biens immobiliers par l’État à cet établissement public, y compris dans les matières fiscales et de droit de préemption.

L’article décrit également les modalités générales d’organisation, de fonctionnement et de financement de cet établissement.

Ces dispositions, ainsi que la date de création de l’établissement, seront précisées par décret en Conseil d’État qui indiquera notamment la composition précise du conseil d’administration et ses modalités générales de fonctionnement (nombre total et par collège, mise en place d’un commissaire du Gouvernement, comités chargés d’assister le conseil d’administration et délégation du conseil d’administration, etc.).

Cette foncière sera propriétaire d’une partie du patrimoine de l’État qui lui sera transféré en pleine propriété. Elle sera chargée de le gérer, l’entretenir, le rénover, le valoriser et le mettre à disposition, à titre principal, des services de l’État ou ses opérateurs, en contrepartie du paiement d’un loyer. Par ailleurs elle disposera de capacités opérationnelles pour créer de la valeur à partir de ses biens, y compris en contribuant à l’effort de création de logements au travers d’opérations de transformation ou de cession.

La création d’une foncière d’État et interministérielle, qui assume pleinement et opérationnellement les fonctions de propriétaire, s’inspire d’un parangonnage international. Ce modèle de foncière existe dans la majorité des pays européens (Allemagne, Angleterre, Pays-Bas, Finlande, Autriche, etc.), aux États-Unis et il se développe depuis plusieurs années dans la sphère publique française (La Poste Immobilier, par exemple). La création d’un tiers permet de rassembler en son sein les moyens dédiés à l’immobilier et encadre la dissociation entre l’État propriétaire et l’État occupant.

Un dialogue permettra aux occupants d’exprimer leurs besoins et demandes d’évolutions auprès de la foncière dans le respect des objectifs de la politique immobilière de l’État, notamment de densification :

·         La direction de l’immobilier de l’État (DIE) est garante des intérêts de l’État et de la mise en œuvre de la réforme, ainsi que de l’agrégation de l’information pour tout l’immobilier de l’État. Elle est la tutelle principale de la foncière et, à ce titre, sa directrice ou son directeur assume la présidence du conseil d’administration de la foncière. Elle fixe les orientations et valide la stratégie globale de valorisation du patrimoine immobilier de l’État, définit le cadre de la politique immobilière de l’État, intègre dans un ensemble normatif les politiques publiques, accompagne et approuve les schémas directeurs immobiliers ;

·          La foncière assume pleinement les responsabilités de propriétaire d'un portefeuille d'actifs immobiliers, notamment : préservation et valorisation des actifs, optimisation des dépenses, création de valeur, maîtrise d’ouvrage, connaissance du parc et maintenance qualifiée (gros entretien). Elle met à disposition un immobilier aux normes aux occupants et formalise la relation avec les occupants au travers de contrats de bail qui précisent les niveaux de loyers, les modalités de récupération de charges locatives et la répartition des droits et devoirs ;

·         Les occupants gardent la responsabilité d’exprimer leur stratégie d’implantation en lien avec la DIE. Ils paient des loyers à la foncière en contrepartie du bénéfice d’un immobilier aux normes et adapté à leur activité et restent responsables de l’organisation des services généraux, aménagement intérieur des locaux et opérations de petite maintenance, en lien avec la foncière. La prise en charge intégrale, en cible, des loyers par les entités de l’État sur leurs budgets propres et non par un programme interministériel a vocation à constituer un levier de réduction des surfaces indispensable à l’atteinte des objectifs fixés à l’immobilier de l’État en matière d’impact.

La création de la foncière implique une profonde évolution des rôles et des responsabilités entre les différentes parties prenantes. Pour créer la foncière sur un périmètre maîtrisable et démontrer à court et moyen terme que les objectifs du projet sont atteignables, la réforme s’appuie sur un pilote opérationnel lancé courant 2025. Ainsi un premier transfert d’un ensemble d’actifs immobiliers dans le cadre d’un pilote de la réforme est prévu en 2025. Le périmètre de ce pilote porte sur les immeubles de bureaux occupés par les services du ministère des finances et du ministère de l’Intérieur (hors police et gendarmerie) et les sites multi-occupants situés dans deux régions : Grand Est et Normandie. De façon ponctuelle, certains biens en Auvergne Rhône-Alpes et en Ile-de-France pourraient également être concernés pour concrétiser des opérations prioritaires.