Direction de la séance |
Projet de loi Projet de loi de finances pour 2025 (1ère lecture) PREMIÈRE PARTIE (n° 143 , 144 ) |
N° I-168 rect. bis 25 novembre 2024 |
AMENDEMENTprésenté par |
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M. LEVI, Mme SOLLOGOUB, MM. BONHOMME, LONGEOT, HENNO, HOUPERT, LAUGIER, FARGEOT, CHASSEING, KLINGER, PELLEVAT, HINGRAY, Jean-Michel ARNAUD et Louis VOGEL, Mmes BILLON et Olivia RICHARD, M. COURTIAL et Mme HERZOG ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 9 |
Après l'article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Les entreprises de transport aérien soumises à l’impôt sur les sociétés en France peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt au titre des dépenses d’achat de carburants d’aviation durables qu’elles exposent au cours de l’année pour les vols dont les émissions de gaz à effet de serre ne sont pas soumises aux obligations du système européen d’échange de quotas d’émission instauré par la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 2003. Le taux du crédit d’impôt est de 50 % de la différence entre le coût d’acquisition des carburants d’aviation durables et le coût d’acquisition théorique d’une quantité énergétiquement équivalente de kérosène conventionnel, calculée selon des modalités fixées par décret.
Lorsque les sociétés de personnes mentionnées aux articles 8 et 238 bis L ou groupements mentionnés aux articles 239 quater, 239 quater B et 239 quater C du code général des impôts ne sont pas soumis à l’impôt sur les sociétés, le crédit d’impôt peut, sous réserve des dispositions prévues au dernier alinéa du I de l’article 199 ter B, être utilisé par les associés proportionnellement à leurs droits dans ces sociétés ou ces groupements.
II. – Les dépenses ouvrant droit au crédit d’impôt sont les achats de carburants d’aviation durables tels que définis à l’article 2 du Règlement (UE) 2023/956 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 visant à garantir des conditions de concurrence équitables pour un transport aérien durable, exclusivement issus de projets industriels :
1° Localisés au sein de l’Union européenne ;
2° Ou localisés dans un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales et répondant aux mêmes critères de durabilité que ceux exigés au sein de l’Union européenne.
III. – Les subventions publiques reçues par les entreprises à raison des opérations ouvrant droit au crédit d’impôt sont déduites des bases de calcul de ce crédit, qu’elles soient définitivement acquises par elles ou remboursables. Lorsque ces subventions sont remboursables, elles sont ajoutées aux bases de calcul du crédit d’impôt de l’année au cours de laquelle elles sont remboursées à l’organisme qui les a versées.
Pour le calcul du crédit d’impôt, le montant des dépenses exposées par les entreprises auprès de tiers au titre de prestations de conseil pour l’octroi du bénéfice du crédit d’impôt est déduit des bases de calcul de ce dernier à concurrence :
a) Du montant des sommes rémunérant ces prestations, fixé en proportion du montant du crédit d’impôt pouvant bénéficier à l’entreprise ;
b) Du montant des dépenses ainsi exposées, autres que celles mentionnées au a, qui excède le plus élevé des deux montants suivants : soit la somme de 15 000 € hors taxes, soit 5 % du total des dépenses hors taxes mentionnées au II minoré des subventions publiques mentionnées au III.
IV. – Le crédit d’impôt défini au présent article est imputé sur l’impôt sur les sociétés dû au titre de l’année au cours de laquelle les dépenses prises en compte pour le calcul du crédit d’impôt ont été exposées. L’excédent de crédit d’impôt constitue au profit de l’entreprise une créance sur l’État d’égal montant. Cette créance est utilisée pour le paiement de l’impôt sur les sociétés dû au titre des cinq années suivant celle au titre de laquelle elle est constatée puis, s’il y a lieu, la fraction non utilisée est remboursée à l’expiration de cette période.
V. – Le Gouvernement remet au Parlement, tous les cinq ans à compter de l’entrée en vigueur du présent article, un rapport d’évaluation portant sur l’efficacité de ce crédit d’impôt au regard de l’évolution des surcoûts des biocarburants durables et des obligations d’incorporation françaises et européennes.
VI. – Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
Objet
Le secteur aérien doit relever des défis majeurs pour atteindre ses objectifs de décarbonation à l'horizon 2050. La feuille de route "Destination 2050", élaborée par les acteurs de l'aviation civile européenne en février 2021, propose une trajectoire alignée avec le programme "Fit for 55" de la Commission européenne. En France, la feuille de route nationale pour la décarbonation de l'aviation, issue de la loi "Climat et Résilience" du 22 août 2021, repose sur deux leviers principaux : le renouvellement des flottes d'aéronefs et l'incorporation de biocarburants durables (SAF).
Les carburants d'aviation durables (SAF) constituent un levier essentiel pour la réduction des émissions de CO2, particulièrement pour les vols moyen et long-courriers. Leur potentiel de réduction des émissions peut atteindre jusqu'à 120 % avec les carburants synthétiques. Leur utilisation s'inscrit pleinement dans les objectifs ambitieux fixés par le règlement européen ReFuelEU Aviation, qui imposera des taux croissants d'incorporation de SAF à partir de 2025.
Cependant, l'utilisation des SAF se heurte aujourd'hui à un obstacle majeur : leur coût de production. En effet, le surcoût par rapport au kérosène conventionnel est actuellement de l'ordre de 3 à 4 fois supérieur, créant une distorsion de concurrence significative au détriment des compagnies aériennes européennes, particulièrement :
Sur les liaisons internationales en concurrence avec des compagnies non soumises aux mêmes obligations Sur les liaisons avec les Régions ultrapériphériques (RUP) où l'avion constitue souvent le seul moyen de transport
Le présent amendement propose la création d'un crédit d'impôt couvrant 50 % du surcoût entre les SAF et le kérosène conventionnel. Ce dispositif vise trois objectifs :
Soutenir la décarbonation effective du transport aérien en rendant l'utilisation des SAF économiquement viable Préserver la compétitivité des compagnies aériennes françaises face à la concurrence internationale Maintenir l'accessibilité des liaisons aériennes essentielles, notamment vers les RUP
L'impact budgétaire de cette mesure est estimé entre 150 et 200 millions d'euros pour 2025, tenant compte des volumes prévisionnels de SAF qui seront utilisés pour respecter les obligations d'incorporation. Cette estimation s'appuie sur :
Un surcoût moyen des SAF de 3 000 € par tonne
Les objectifs d'incorporation fixés par le règlement ReFuelEU Aviation
La part des vols éligibles dans le trafic total
Un mécanisme d'évaluation quinquennale permettra d'adapter le dispositif à l'évolution des surcoûts et des obligations d'incorporation, garantissant ainsi son efficacité dans la durée.
Cette mesure s'inscrit dans une stratégie globale de soutien à la filière des SAF, complétant les dispositifs existants de soutien à la production, pour permettre l'émergence d'une filière française compétitive de carburants durables tout en accompagnant la transition écologique du transport aérien.