Direction de la séance |
Projet de loi Financement de la sécurité sociale pour 2025 (1ère lecture) (n° 129 ) |
N° 36 12 novembre 2024 |
En attente de recevabilité financière |
AMENDEMENTprésenté par |
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M. MILON ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 16 |
Après l'article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le livre préliminaire du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° L’intitulé du titre VIII est complété par les mots « ou de téléexpertise » ;
2° À l’article L. 4081-2, après le mot « téléconsultation »,sont insérés les mots : « ou de téléexpertise » ;
3° L’article L. 4081-3 est ainsi modifié :
a) Au 1° , après le mot « téléconsultations », sont insérés les mots : « ou de téléexpertise » ;
b) Au 2° , après le mot « téléconsultation », sont insérés les mots : « ou de téléexpertise » ;
4° Au premier alinéa du I de l’article L. 4081-3, après le mot : « téléconsultation », sont insérés les mots : « ou de téléexpertise ».
Objet
L’article 53 de la LFSS de 2023 a introduit l’agrément pour les sociétés commerciales de téléconsultation. Cependant, cet agrément se limite au champ de la téléconsultation, or séparer les champs de la téléconsultation de celui de la téléexpertise paraît peu réaliste. Plusieurs de ces sociétés de téléconsultation proposent déjà des offres de téléexpertise et sans doute la plupart le feront rapidement. Par ailleurs, jusqu’à l’entrée en vigueur de l’article 53, plusieurs sociétés entretenaient la confusion en parlant de « téléconsultations asynchrones », de « téléexpertises synchrones », de « téléconsultations différées » après un examen en présentiel avec un auxiliaire de santé et sans visio. Ces pratiques non conformes en téléconsultation ont rapidement basculé vers la téléexpertise une fois la nouvelle législation votée sur la téléconsultation, sortant ainsi du champ de la loi.
Les exigences de territorialité ne portent aujourd’hui que sur la téléconsultation alors qu’elles devraient être identiques pour la téléexpertise. Une téléexpertise demandée par un médecin généraliste à un médecin spécialiste conduit souvent à examiner ensuite le patient en présentiel, d’où un besoin de proximité. Il est nécessaire, sauf situation particulière, que le spécialiste soit dans le territoire pour une cohérence de prise en charge du patient et un parcours de soins compréhensible pour le patient.
Des innovations commerciales porteuses de conflit d’intérêt et de fraudes pour notre système de santé ont vu le jour depuis 2-3 ans, notamment dans le champ de l’optique et de l’audiologie. Par exemple, des supermarchés proposent avec un fournisseur de matériel optique un « diagnostic ophtalmologique gratuit réalisé par un opticien diplômé » associé à de la vente de produits optiques après fourniture d’une ordonnance par un ophtalmologiste « partenaire » lors d’une téléexpertise, uniquement après transfert de données réfractives par l’opticien et avec l’impossibilité de vérifier les données par l’ophtalmologiste. De plus, les limites règlementaires des intervenants ne sont souvent pas respectées et aucun examen médical n’est réalisé. Une autre société propose des ordonnances optiques par téléexpertise en passant par une plateforme d’échange sur abonnement et sans examen médical, suite simplement à un questionnaire rempli sans possibilité de contrôle. Tout ceci étant réalisé suivant un protocole personnel validé par aucune instance (HAS, assurance maladie, CNP d’ophtalmologie).
En audiologie des sites commerciaux proposent des abonnements pour des lots de prescriptions de primo-appareillage suite à un examen audiométrique réalisée par l’audioprothésiste. Or, pour la sécurité du public, le respect du parcours de soin impose la pose d’un vrai diagnostic donc d’une prescription préalable et non concomittante our postérieure à l’appareillage auditif. Ce procédé crée également des patientèles captives et un risque pour l’observance chez des patients sous pression, autrement dit un risque important de dépenses inefficientes.
Ces méthodes sont assimilables à un achat d’ordonnances médicales sans contrôle et examen médical, en vue d’obtenir une fourniture de produits médicaux. Plusieurs dizaines de milliers d’ordonnances sont déjà concernées par ces fraude, alourdissant les finances de l’Assurance Maladie et des complémentaires santé. La perspective d’une industrialisation à grande échelle de ce système prochainement menace la cohérence du parcours de soins et les finances publiques.
Cet amendement vise par conséquent à étendre le cadre législatif de la téléconsultation à la téléexpertise, dans l’intérêt des patients, pour la cohérence du système de santé et pour combattre la fraude.