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Direction de la séance

Projet de loi

Développement de l'offre de logements abordables

(1ère lecture)

(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)

(n° 676 , 675 )

N° 1

6 juin 2024


 

Exception d'irrecevabilité

Motion présentée par

C
G  

Mmes MARGATÉ et CORBIÈRE NAMINZO, M. GAY

et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky


TENDANT À OPPOSER L'EXCEPTION D'IRRECEVABILITÉ


En application de l’article 44, alinéa 2, du Règlement, le Sénat déclare irrecevable le projet de loi relatif au développement de l’offre de logements abordables n° 676 (2023-2024).

Objet

La présente motion propose de déclarer irrecevable le projet de loi relatif au développement de l’offre de logements abordables, en raison des atteintes portées au droit au logement, pourtant à valeur constitutionnelle comme en attestent les alinéas 10 et 11 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 intégrés au bloc de constitutionnalité.

Pour rappel, ces alinéas affirment :

« La Nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement.

Elle garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. »

Alors que 4 millions de personnes sont mal-logés ou sans logement, et que 2,6 millions de ménages sont en attente d’un logement social, le groupe CRCE-K dénonce un projet de loi qui va contribuer à rendre le logement plus cher pour de nombreux ménages, avec un taux d’effort qui augmentera considérablement si ce projet de loi venait à être adopté.

Ainsi, l’article 1er réduira les objectifs de construction de logements locatifs sociaux, en les remplaçant par des logements locatifs intermédiaires plus onéreux, au détriment des locataires. Les modifications apportées par la commission reviennent sur certaines contraintes pourtant nécessaires au respect des objectifs de la loi SRU, ce qui réduira encore les incitations à construire du logement social, pourtant indispensable pour garantir un accès au logement pour toutes et tous.

L’article 8 encouragera les bailleurs sociaux à augmenter les loyers des logements du parc social au niveau des plafonds de loyers, pour faire face au manque de financement de l’Etat, là-aussi au détriment des locataires. En commission, la suppression du contrôle préfectoral sur la révision des loyers accentuera les effets de la mesure qui pourra être mise en oeuvre, sans contrôle a priori, par des bailleurs sociaux financièrement à bout de souffle.

Les articles 11 et 12 contribueront également à rehausser le coût des loyers, en imposant un surloyer à des ménages qui n’en payaient pas jusqu’alors, et en renvoyant certains locataires vers des logements privés plus chers, en zone tendue, où les rotations et le parcours résidentiel sont mis à mal.

La possibilité, avec l’article 10, de déléguer le contingent préfectoral à Action Logement, qui ne remplit pas ses objectifs de relogement de publics prioritaires, comme l’a pointé le Haut comité pour le droit au logement, porte atteinte à la nécessité de faire appliquer la loi pour le Droit Au Logement Opposable, ainsi que les Plans Départementaux d’Action pour le Logement et l’Hébergement des Personnes Défavorisées (PDALHPD).

La création de baux-mobilités dans le parc social, et l’utilisation de logements sociaux comme logements de fonction, contribuera aussi à précariser les locataires en faisant de leur résidence principale une résidence temporaire.

En définitive, ce texte ne règlera pas les difficultés des classes moyennes pour se loger, ni celles des plus modestes. En défendant un logement inabordable, où les locataires seraient trop riches pour rester dans le parc social, ou trop pauvres pour y accéder, ce projet de loi aggravera la crise du logement et portera donc atteinte au droit au logement.

Pour toutes ces raisons, les membres du groupe CRCE proposent au Sénat de renoncer à ce texte de loi en reconnaissant son irrecevabilité constitutionnelle.



NB :En application de l'article 44, alinéa 2, du Règlement, cette motion est soumise au Sénat avant les orateurs des groupes.