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Direction de la séance

Projet de loi

Simplification de la vie économique

(1ère lecture)

(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)

(n° 635 , 634 )

N° 519 rect. bis

3 juin 2024


 

AMENDEMENT

présenté par

C Demande de retrait
G Défavorable
Rejeté

M. DELCROS


ARTICLE 16


Supprimer cet article.

Objet

L’article 16 porte atteinte aux droits des titulaires des marchés de la commande publique et génère une complexification inutile et contraire à l’objectif du présent projet de loi.

Cet article prévoit, d’une part, une dérogation à l’allotissement.

La direction des affaires juridiques (DAJ) du Ministère de l’Economie et des Finances a établi une fiche doctrine relative à l’allotissement dans les marchés publics, fiche disponible sur le site internet du Ministère. Dans cette fiche, la DAJ souligne très clairement : « Destiné à favoriser la concurrence entre les entreprises et leur permettre, quelle que soit leur taille, d’accéder à la commande publique, l’allotissement est particulièrement approprié lorsque l’importance des travaux, fournitures ou services à réaliser risque de dépasser les capacités techniques ou financières d’un seul opérateur économique. L’allotissement apparaît ainsi particulièrement favorable aux petites et moyennes entreprises, dans la mesure où il leur permet d’accéder plus facilement à la commande publique ».

Cette même fiche précise : « Désormais, conformément aux dispositions des articles L. 2113-10 et L. 2113-11 du code de la commande publique, tous les marchés doivent être passés en lots séparés lorsque leur objet permet l’identification de prestations distinctes, sauf à s’inscrire dans l’une des exceptions prévues par l’article L. 2113-11 ».

L’article 2113-11 du code de la commande publique liste très strictement ces exceptions :

« L’acheteur peut décider de ne pas allotir un marché dans l’un des cas suivants :

1° Il n’est pas en mesure d’assurer par lui-même les missions d’organisation, de pilotage et de coordination ;

2° La dévolution en lots séparés est de nature à restreindre la concurrence ou risque de rendre techniquement difficile ou financièrement plus coûteuse l’exécution des prestations ;

3° Pour les entités adjudicatrices, lorsque la dévolution en lots séparés risque de conduire à une procédure infructueuse.

Lorsqu’un acheteur décide de ne pas allotir le marché, il motive son choix en énonçant les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de sa décision ».

La DAJ est donc très claire : les dérogations au principe de l’allotissement doivent rester limitées et être dûment justifiées.

Ajouter dans ce projet de loi de simplification une nouvelle dérogation ne serait donc admissible que pour une situation particulière dont la légitimité serait incontestable. Ce qui est loin d’être le cas dans le présent projet de loi.

En outre, les marchés visés à l’article 16 sont des marchés conséquents (installation d'éoliennes, réseau haut débit mobile, compensation des atteintes à la biodiversité des projets d'aménagement...) susceptibles d’intéresser des PME et des TPE. Sous couvert de simplification, ce projet de loi conduirait donc à écarter les TPE/PME de ces marchés.

Cet article 16 prévoit, d’autre part, une dérogation au paiement direct pour le sous-traitant direct (de premier rang).

Le sous-traitant direct du titulaire du marché pourrait dès lors, par dérogation, renoncer expressément au bénéfice du paiement direct. Mais il convient de s’interroger sur l’intérêt pour un sous-traitant de renoncer au paiement direct. Dans la mesure où le paiement direct du sous-traitant direct est une obligation légale d’ordre public, ces derniers n’ont pas à la demander : il s’applique dès lors que le maître d’ouvrage a agréé le sous-traitant. Le fait que le sous-traitant ne l’exige pas dès le début du paiement des prestations, pourrait - après application de cet article 16 - être considéré comme un acte volontaire.

En cas de renonciation, les dispositions des articles 12 (action directe du sous-traitant à l’encontre du maître d’ouvrage) et 14 (garantie donnée au sous-traitant soit caution personnelle du titulaire, soit délégation de paiement du maître d’ouvrage) de la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance seront applicables. Le code de la commande publique ne trouvera pas application, au contraire de la loi de 1975, dont les dispositions citées sont opposables aux seuls maîtres d’ouvrage privés (et non aux maîtres d’ouvrage public ou privé soumis au code de la commande publique). Par conséquent, le sous-traitant direct répondant à un marché soumis au code de la commande publique aurait donc des marchés en paiement direct prévu par le code de la commande publique et des marchés soumis à la loi de 1975 : une situation à rebours de tous les objectifs de simplification affichés par ce texte !

Enfin, en pratique, il est à craindre que ce ne soit pas le sous-traitant qui fasse ce choix mais l’entreprise titulaire du marché qui le lui imposera, sans pour cela lui donner les garanties prévues par la loi du 31 décembre 1975. Il s’agit là encore d’une complication contractuelle : les PME et TPE sous-traitantes ne seront pas nécessairement au fait de ces subtilités créées par ce nouveau texte « de simplification ».

Face à ce constat, et dans un objectif de simplification réelle de la vie des entreprises, l’article 16 de ce projet de loi de simplification, qui déroge à deux grands principes du code de la commande publique et qui apporte une complexification des textes, doit être supprimé. Tel est l’objet du présent amendement.

Cet amendement a été travaillé avec la FFB du Cantal.



NB :La présente rectification porte sur la liste des signataires.