Direction de la séance |
Projet de loi Projet de loi de finances pour 2021 (1ère lecture) SECONDE PARTIE MISSION JUSTICE (n° 137 , 138 , 144) |
N° II-473 rect. bis 3 décembre 2020 |
AMENDEMENTprésenté par |
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MM. CHASSEING et MENONVILLE, Mme MÉLOT, MM. LAGOURGUE, GUERRIAU, DECOOL, Alain MARC, WATTEBLED et CAPUS, Mmes GUILLOTIN et BILLON et MM. BOUCHET, MOGA, CHATILLON, PACCAUD et LONGEOT Article 33 (Crédits de la mission) (État B) |
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes | Autorisations d’engagement | Crédits de paiement | ||
| + | - | + | - |
Justice judiciaire dont titre 2 | 48 400 000 |
| 48 400 000 |
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Administration pénitentiaire dont titre 2 |
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Protection judiciaire de la jeunesse dont titre 2 |
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Accès au droit et à la justice |
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Conduite et pilotage de la politique de la justice dont titre 2 |
| 48 400 000 |
| 48 400 000 |
Conseil supérieur de la magistrature dont titre 2 |
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TOTAL | 48 400 000 | 48 400 000 | 48 400 000 | 48 400 000 |
SOLDE | 0 | 0 |
Objet
Le présent amendement vise à réévaluer la tarification des enquêtes sociales rapides (ESR), également appelées enquêtes de personnalité pré-sententielles. Les ESR sont définies par le code de procédure pénale comme des investigations visant à vérifier la situation matérielle, familiale et sociale d’une personne et à informer le magistrat des mesures propres à favoriser ou maintenir son insertion sociale (C. pr. pén., art. 41).
Le projet annuel de performance (PAP) pour la mission justice présente l’objectif « Renforcer l’efficacité de la réponse pénale, le sens et l’efficacité de la peine » ainsi que l’indicateur « Taux de peines alternatives à l’emprisonnement ferme » (pp. 46-48). Il établit particulièrement bien l’apport de ces enquêtes, essentielles à la régularité des procédures, pour le justiciable, l’institution judiciaire, la société et le contribuable :
« Outre la volonté d’élargir le recours aux mesures existantes (travail d’intérêt général [TIG], placement sous surveillance électronique, semi-liberté, placement à l’extérieur), notamment sur les peines les plus courtes (inférieures à 6 mois), un accroissement est également attendu, grâce à l'entrée en vigueur en mars 2020 de la détention à domicile sous surveillance électronique, et du sursis probatoire, grâce à l'extension des vérifications effectuées dans le cadre des enquêtes de personnalité pré-sententielles et à la création de l'agence nationale du travail d’intérêt général et de l'insertion professionnelle. A ce propos est déjà constatée au niveau des tribunaux judiciaires une augmentation très sensible du nombre d’enquêtes réalisées.
« Plusieurs dispositions de la loi de programmation pour la justice du 23 mars 2019 visent par ailleurs à réduire significativement le nombre de saisines des juges de l'application des peines en diversifiant les peines prononcées par le tribunal correctionnel, voire en prohibant le prononcé de certaines qui encombrent inutilement les cabinets d'application des peines. Ainsi, les peines dont l'aménagement est prononcé ab initio sont encouragées, limitant la saisine du juge de l'application des peines à la fixation de certaines modalités pratiques. Pour cela, l'information du tribunal correctionnel sur la personnalité et les contraintes du prévenu est renforcée par la multiplication des enquêtes de personnalité pré-sententielles. ». Ces enquêtes nécessitent la vérification de la faisabilité de la mise en œuvre de certaines peines alternatives.
Or, ces enquêtes sont réalisées par des associations qui n’ont pas vu leur tarification revalorisée depuis 2004 (70 euros par enquête) alors que ce coût avait été sous-estimé à l’époque et que depuis l’Insee a évalué l’évolution de l’inflation à plus de 21 % entre 2004 et 2019. Le coût englobe non seulement le travail d’enquête en lui-même, qui peut être très chronophage dans les grandes juridictions, mais aussi tout le travail de secrétariat et de facturation. Avant même la LPJ, la tarification des enquêtes était largement inférieure à leur coût réel pour les associations les réalisant.
De plus, comme le relève le PAP, ces enquêtes changent complètement de nature, entraînant pour les associations qui les réalisent une augmentation conséquente de leur temps de travail à plusieurs niveaux.
D’une part, elles peuvent s’appliquer à des procédures plus diversifiées : convocation par officier de police judiciaire ; convocation par procès-verbal ; comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, pour laquelle la loi prévoyait déjà le recours aux ESR mais n’était pas appliquée.
D’autre part, afin de remplir les objectifs de la LPJ, les enquêteurs doivent investiguer sur des éléments concrets attestant de la possibilité ou non de prononcer un aménagement de peine. Ainsi, à la fin du formulaire ESR, une partie aménagement de peine a été ajoutée, qui prévoit notamment l’avis de la personne quant à l’aménagement de peine ab initio, l’avis du maître des lieux (pour la détention à domicile sous surveillance électronique), etc. Recueillir l’avis des personnes nécessite une explication sur ce qu’est un aménagement de peine et sur la mesure ou la peine envisagée. De nouveaux éléments concrets doivent aussi être vérifiés (existence d’une ligne téléphonique pour la détention à domicile, par exemple). De plus, une nouvelle procédure d’échanges d’informations avec le SPIP au cours des ESR a été introduite dans les conventions signées entre les juridictions, les SPIP et les associations pour la mise en œuvre de la LPJ.
Enfin, ces enquêtes demandent plus de temps lorsqu’elles concernent des personnes en liberté qu’il faut convoquer et qui apportent de nombreux documents à examiner (contrairement aux personnes dans la procédure de comparution immédiate qui n’ont aucun document avec elles dans les geôles). Afin d’accompagner au mieux les objectifs de la loi de programmation par la justice sans risquer de voir leur pérennité menacée, les associations ont besoin que la tarification passe à 180 euros.
Compte tenu de l’augmentation du nombre d’enquêtes qui, selon certaines estimations de la Direction des Affaires Criminelles et des Grâces (DACG) devrait passer de 80 000 en 2019 à 300 000 en 2021, d’un changement de nature de ces enquêtes qui implique de nouvelles investigations et explications, et d’une tarification qui pourrait être portée à 180 euros, le présent amendement vise donc à abonder les crédits de l’action 02 « conduite de la politique pénale et jugement des affaires pénales » du programme 166 « Justice Judiciaire » de 48 400 000 euros.
Cette augmentation est compensée par une diminution des crédits de l’action 04 « Gestion de l’administration centrale » du programme 310 « Conduite et pilotage de la politique de la justice ». Les auteurs du présent amendement précisent qu’ils ne souhaitent aucunement diminuer les crédits de ce dernier programme mais que cette présentation est contrainte par les dispositions légales relatives aux lois de finances.