Logo : Sénat français

Direction de la séance

Projet de loi

Projet de loi de finances pour 2021

(1ère lecture)

SECONDE PARTIE

ARTICLES NON RATTACHÉS

(n° 137 , 138 , 139, 140, 141, 142, 143, 144)

N° II-1274 rect. bis

2 décembre 2020


 

AMENDEMENT

présenté par

C Sagesse du Sénat
G Défavorable
Adopté

MM. LONGUET, MENONVILLE et SIDO


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 42 OCTIES


Après l’article 42 octies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le 13° de l’article 1382 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le mot : « souterrains » est supprimé ;

2° Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Les ouvrages de surface sont exonérés à hauteur de 90 % ; ».

II. – Le VI de l’article 43 de la loi de finances pour 2000 (n° 99-1172 du 30 décembre 1999) est ainsi modifié :

1° Après la quatrième phrase du premier alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Le coefficient multiplicateur applicable aux installations de stockage de déchets de haute activité et moyenne activité à vie longue, fixé par décret en Conseil d’État, est lié au ratio de radioactivité au mètre cube des déchets de haute activité à vie longue. »

2° La dernière ligne du tableau constituant le deuxième alinéa est supprimée ;

3° Le dernier alinéa est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« Sous déduction des frais de collecte fixés à 1 % des sommes recouvrées et plafonnés à 70 000 euros, le produit de la taxe additionnelle de stockage est perçu au profit :

« – des communes et des établissements publics de coopération intercommunale dans des périmètres autour de l’accès principal aux installations de stockage déterminés après avis du conseil départemental en concertation avec la commission locale d’information ;

« – des départements et des régions d’implantation des installations de stockage lorsque ces installations correspondent à des installations de stockage de déchets de haute activité et moyenne activité à vie longue. »

III. – Une loi précise la répartition de la taxe de stockage des déchets de haute activité à vie longue pour une première durée de vingt ans à compter de la demande d’autorisation de construction.

IV. – Les I et II s’appliquent à compter des impositions établies au titre de 2021.

V. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.

VI. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Objet

Le présent article est destiné à définir le modèle fiscal applicable à Cigéo, projet de centre de stockage en couche géologique profonde pour les déchets radioactifs de moyenne activité à vie longue (MA-VL) et de haute activité (HA).

Ce projet générera, sur toute sa durée, d’importantes retombées fiscales pour les collectivités territoriales.

En l’absence de modification des règles actuellement applicables, la fiscalité de Cigéo serait concentrée sur un nombre limité de collectivités territoriales peu peuplées. En effet, tant les agglomérations de Bar-le-Duc et Saint-Dizier que la région Grand-Est ne percevraient qu’une part résiduelle, alors qu’elles soutiendront le développement économique local et les services à la population. Il apparaît par conséquent nécessaire de construire un modèle de redistribution spécifique pour la fiscalité de ce projet hors-norme.

Une mission IGA-IGF a remis en mars 2017 un rapport sur le modèle fiscal de Cigéo. Cette dernière estime que l’utilisation de la taxe de stockage spécifique aux installations de stockage de déchets radioactifs constitue le meilleur levier de péréquation entre les collectivités. En effet, le produit de cette taxe peut être réparti de manière flexible entre les collectivités territoriales, sans que les règles de droit commun de répartition de la fiscalité directe locale en soient affectées. Présenté par la mission, ce mode de péréquation n’a pas suscité d’opposition de la part des collectivités et des élus locaux.

Le présent amendement vise par conséquent à :

Augmenter le montant de la taxe de stockage pour accroître les volumes de redistribution ;

Etendre le périmètre de redistribution de la taxe de stockage aux départements et aux régions d’implantation ;

Diminuer le montant des taxes foncières de 90%, pour les équipements de surface, en complément de l’exonération existante pour les ouvrages souterrains, afin de compenser la hausse de la taxe de stockage et de maintenir globalement le niveau de fiscalité applicable.

Une fois que les bases de ce dispositif fiscal auront été posées, une concertation sera organisée avec l’ensemble des parties prenantes pour définir les modalités précises de redistribution susmentionnée. Cette concertation devra également se prononcer sur l’articulation entre la fiscalité de Cigéo et les taxes actuellement affectées aux deux groupements d’intérêt public de Meuse et de Haute-Marne.

Des dispositions législatives devront fixer ces règles pour qu’elles puissent être mises en œuvre dès la D.A.C.

Historique

1 - Le 4 décembre 2017, le Gouvernement présentait dans le cadre du PLFR 2017 (Numéro 384) un amendement établissant le principe général d’une taxe de stockage applicable au futur projet Cigéo de gestion en couche géologique profonde, des déchets nucléaires à forte activité vie longue.

Cet amendement était en définitive retiré par le Gouvernement en raison des réserves exprimées par les parlementaires des deux départements d’implantation du Projet Cigéo, la Haute-Marne et la Meuse.

2 - L’amendement présenté ce jour reprend les principes généraux du projet gouvernemental de 2017 en clarifiant cependant 3 principes qui avaient suscité les réserves des parlementaires.

3 - Le montant total de la taxe perçue durant la totalité de l’exploitation du centre de stockage ne peut pas être inférieure au montant actuel perçu au nom du soutien au laboratoire d’études existant de Bure, par les 2 GIP Haut-Marnais et Meusien.

Or, la référence dans l’amendement à l’article 43 de la loi 99-1172 du 30 décembre 1999 de finance pour 2000, soit « remplacer le nombre 5-50 par 25-250 » est ambigu, sachant que les volumes visés par cet article ne tiennent pas compte de la radioactivité des colis stockés. Les déchets HA (haute activité) représentent 0,2% du volume des déchets radioactifs mais 98% de la radioactivité de l’ensemble des déchets. Cette situation est sans comparaison.

Le m3 de haute activité est donc plusieurs milliers de fois plus irradiant que le déchet moyen. Un facteur 250 est appréciable mais il ne restitue pas la réalité des risques. Un ratio de 50 000 par exemple aboutirait à une charge absurde. C’est pourquoi nous proposons la recherche d’un ratio plus complexe tenant compte et des rapports de nocivité et de l’impact sur le coût du mégawatt nucléaires à partir d’un pourcentage de l’ARENH et du coût du CSPE. L’impact de la taxe de stockage prévu par l’amendement gouvernemental représente de 0,01 à 0,25% du coût actuel d’électricité d’origine nucléaire. Aller jusqu’à 1% du coût pour la gestion durable des déchets HAVA paraît plausible. Soit le quadruple du projet 2017 du Gouvernement.

4 - Une période à ce jour non définie, mais déterminée par les études et les expériences nécessaires à la réussite du Projet Cigéo, conduira l’ANDRA à maintenir en activité le laboratoire. Si l’on admet que la Taxe de Stockage pourra diminuer progressivement les crédits des 2 GIP issus du fonctionnement du laboratoire, ils ne peuvent disparaître purement et simplement au moment où débutera fiscalement le Centre CIGEO. Et cela d’autant plus qu’en dehors de la connaissance scientifique du banc d’argile Callovo-Oxfordien qui accueille les galeries voisines mais distinctes du laboratoire de Bure, de Cigéo, le laboratoire existant survit pour d’autres compétences de conseil et d’expérimentation, et d’abord pour les techniques de gestion des colis. Il aura sans doute une vocation d’expertise internationale.

A ce titre, il constituera un atout pour la filière électronucléaire française et devra, et pourra donc participer sous une forme à définir, dans le prolongement de la loi Bataille de décembre 1991 au développement des deux départements d’implantation du laboratoire, la Haute-Marne et la Meuse.

5 - Enfin, nous proposons que la répartition de cette taxe fasse l’objet d’un article de loi et non d’un décret et que cette fixation ait une durée minimum de 10 ans, même si nous savons que ce qu’un texte édicte, un autre peut le remettre en cause. Mais par voie parlementaire et non par voie réglementaire.

La taxe de stockage correspond à la désutilité externe de Cigéo pour les territoires qui en assument l’image. Si la confiance est établie par la qualité des travaux préparatoires de l’ANDRA et la rigueur des procédures de contrôle de toute nature garantie par l’A.S.N. institutionnellement et par la culture de la transparence, force est de reconnaître que toute la Haute Marne et toute la Meuse, mais uniquement ces deux départements en assument la charge médiatique et psychologique Il convient donc qu’ils soient les principaux bénéficiaires du produit de la taxe, avec les collectivités d’implantation, de proximité immédiate et de proximité élargie.

6 – En revanche les dispositions prévoyant l’exonération à hauteur de 90% de la fiscalité locale de droit commun paraissent justifiées pour éviter les effets d’hyper-concentration au bénéfice de toute petite population.



NB :La présente rectification porte sur la liste des signataires.