Direction de la séance |
Projet de loi Projet de loi de finances pour 2021 (1ère lecture) PREMIÈRE PARTIE (n° 137 , 138 , 139, 140, 141, 142, 143, 144) |
N° I-732 18 novembre 2020 |
AMENDEMENTprésenté par |
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Mme Nathalie GOULET ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 20 |
Après l'article 20
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article 1729-0 A du code général des impôts, il est inséré un article 1729-0 … ainsi rédigé :
« Art. 1729-0 …. – Lorsque le contribuable peut se prévaloir de l’une des garanties prévues à l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les majorations de l’article 1729 du présent code ne sont pas applicables au rehaussement d’imposition résultant de l’application de la procédure prévue au premier alinéa de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales ou de l’application de la procédure prévue au premier alinéa de l’article L. 64 B du livre des procédures fiscales. »
II. – Le I ne s'applique qu'aux rectifications notifiées à compter du 1er janvier 2021.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Objet
Le présent amendement vise à contrecarrer une jurisprudence du Conseil d’État en date du 28 octobre 2020 venant élargir l’application de la procédure d’abus de droit dans certains cas où le contribuable a suivi les instructions ou circulaires émanant de l’administration fiscale. Antérieurement, il était établi que le principe d’opposabilité de la doctrine administrative faisait toujours échec à l’application de la procédure d’abus de droit, ce au titre du principe de sécurité juridique.
Le Conseil d’État est revenu sur cette jurisprudence constante à la suite de la légalisation de la procédure de l’abus de droit par fraude à la loi opérée par la loi de finances rectificative pour 2008. Il résulte pourtant des conclusions du rapporteur public, Madame Marie-Gabrielle Merloz, que la volonté du législateur ne pouvait être identifiée en ce sens.
Par ce revirement de jurisprudence, le Conseil d’État prive en partie le contribuable de la garantie législative d’opposabilité de la doctrine administrative, venant ainsi mettre à mal la sécurité juridique du contribuable qui se conformerait aux dires de l’administration, notamment et surtout en ce qu’il se verrait appliquer des majorations en sus de l’imposition rectifiée et des intérêts de retard.
Dès lors, le présent amendement propose de limiter la portée de ce revirement de jurisprudence en écartant l’application des sanctions fiscales pour insuffisance de déclaration lorsque le contribuable serait amené à se prévaloir de la garantie d’opposabilité de la doctrine administrative, et ce, sans écarter l’application des intérêts de retard visant à réparer le préjudice que le Trésor français a subi. Il poserait ainsi un juste équilibre en vue de ne pas faire peser, sur le contribuable, les torts de l’administration par l’interprétation qu’elle a donnée de la loi fiscale tout en rétablissant le juste impôt dû et en réparant le préjudice budgétaire subi. Ce dispositif ne s’appliquerait qu’aux rectifications notifiées à compter du 1er janvier 2021 en vue de contenir d’éventuels effets sur actes procéduraux antérieurs réalisés par l’administration.
Ce dispositif aurait un coût budgétaire très limité, voire nul. De surcroît, il permet toujours d’éviter toute application massive d’une erreur d’interprétation de l’administration qui pourrait peser lourdement sur le Trésor français (comme cela avait été le cas en 1998 avec l’affaire des « fonds turbo »).
En sus, ce dispositif permettrait de continuer d’assurer une compatibilité de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales au droit de l’Union européenne en ce que ce dernier impose aux États membres de refuser le bénéfice du droit communautaire en cas de pratique frauduleuse ou abusive.
Enfin, le présent amendement permettrait d’éviter l’atteinte à la relation de confiance entre les contribuables et l’administration fiscale, relation souhaitée et recherchée notamment par la récente loi ESSOC du 10 août 2019. Il permettrait notamment d’éviter aux contribuables qui n’ont pas la possibilité de s’attacher les services de conseillers fiscaux de pouvoir se référer à la parole de l’administration avec la certitude de ne pas être sanctionné, et ce, sans avoir à procéder à une étude approfondie et complexe de la jurisprudence du Conseil d’État renvoyant à des notions comme celle du montage artificiel, dont les contours sont encore très flous.