Direction de la séance |
Projet de loi de finances rectificative pour 2020 (1ère lecture) (n° 122 , 124 ) |
N° 120 13 novembre 2020 |
AMENDEMENTprésenté par |
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M. FERNIQUE, Mme TAILLÉ-POLIAN, MM. PARIGI et BENARROCHE, Mme BENBASSA, M. DANTEC, Mme de MARCO, MM. DOSSUS, GONTARD et LABBÉ, Mme PONCET MONGE et M. SALMON Article 5 (État B (Article 5 du projet de loi)) |
Mission Ecologie, développement et mobilité durables
Modifier ainsi les ouvertures de crédits des programmes :
(en euros)
Mission/Programme | Autorisations d’engagement | Crédits de paiement | ||
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Infrastructures et services de transports |
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Affaires maritimes |
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Paysages, eau et biodiversité |
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Expertise, économie sociale et solidaire, information géographique et météorologie |
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Prévention des risques Dont titre II |
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Energie, climat et après-mines |
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| 300 000 000 |
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Service public de l’énergie |
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| 300 000 000 |
Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables Dont titre II |
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Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l’Etat (crédits évaluatifs) |
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TOTAL |
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| 300 000 000 | 300 000 000 |
SOLDE |
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Objet
Le présent amendement du groupe Ecologiste – Solidarité et Territoires vise à supprimer le montant d’indemnisation, prévu dans le protocole négocié le 27 septembre 2019 entre l’État et la Société Anonyme Electricité de France : EDF SA, au titre de la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim.
Ce protocole, dont les modalités de calcul des indemnités sont extrêmement désavantageuses pour l’État, a été jugé comme un processus de décision chaotique par la Cour des Comptes.
En effet, le montant relatif au préjudice pour anticipation des dépenses postérieures à la fermeture est évalué à 377 millions d’euros. Par le truchement de taux d’actualisation, l’indemnité aurait pu s’avérer plus élevée encore en cas de paiement différé. L’État a donc jugé plus raisonnable de payer l’intégralité de la somme en 2020 via ce PLFR.
Ces dépenses sont des frais qui auraient dû être supportés par EDF, exploitant de la centrale nucléaire, quelle que soit la date de fermeture de celle-ci. Par ailleurs, une période d’indemnisation va s’étendre jusqu’à 2041 (soit à l’âge improbable de 64 ans de cette centrale), avec des versements ultérieurs correspondant à l’éventuel manque à gagner.
Non seulement, cette indemnisation injuste devra être assumée par l’ensemble des contribuables français, mais surtout, ce protocole déséquilibré semble constituer une aide d’État au sens de l’article 107 alinéa 1 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), qui interdit en principe les aides octroyées par les personnes publiques aux entreprises.
Pourtant, EDF savait que les réacteurs nucléaires français ont été conçus et construits pour une durée de vie de 40 ans. Aussi, les objectifs généraux fixés par l’ASN consistent à se rapprocher autant que possible des exigences de sûreté applicables à des réacteurs de nouvelle génération.
De fait, les deux réacteurs cumulent suffisamment de défauts pour que la poursuite de leur fonctionnement au-delà de 40 ans ne soit pas envisageable, principalement :
- EDF savait pertinemment que ces travaux de renforcement du radier en 2014 ne passeraient pas la VD4 ;
- les diesels d’ultime secours exigés par l’ASN depuis 2017 n’ont pas été réalisés (ils auraient été destinés à assurer la sécurité des piscines non sécurisées, dans lesquelles le combustible usagé mais toujours radioactif est stocké pendant trois ans.
De fait, l’exploitant EDF demande ainsi à l’État de payer pendant 21 ans l’électricité qu’il n’aura pas produit et qu’il n’aurait pas été en capacité de produire. Ce qui se chiffrerait en milliards.
C’est sur ces fondements que le réseau « Sortir du Nucléaire » a porté plainte devant la Commission européenne, en considérant que ce protocole d’indemnisation constitue une aide d’État ayant pour effet direct d’accorder un avantage financier conséquent et injustifié à EDF SA.
Sans compter qu’EDF a pris le prétexte de la fermeture de la centrale pour se dispenser de réaliser certains travaux de sûreté, et a ainsi économisé entre 60 et 100 millions d’euros. Ces travaux restaient pourtant nécessaires même sur des réacteurs à l’arrêt.
Il ne serait pas illogique que l’exploitant EDF puisse obtenir une indemnité pour manque à gagner. mais uniquement entre la date de mise à l’arrêt définitif de chacun des réacteurs et la date à laquelle celui-ci aurait débuté sa 4ème visite décennale (VD4) (en théorie 2019 pour le réacteur n° 1, et 2021 pour le réacteur n° 2).
En l’occurrence, cela constituerait une somme nettement inférieure aux montants négociés. Surtout, EDF sait pertinemment que les critères post-Fukushima pour pouvoir passer une VD4 ne pouvaient être réunis.
Ainsi, un tel précédent juridique doit à tout prix être évité. Nous préconisons donc par le présent amendement une annulation de l’indemnité de 300 millions d’euros.
Par ailleurs, à l’instar des magistrats financiers, nous demandons à l’État de préciser les modalités d’application de l’accord d’indemnité conclu avec EDF, par voie d’avenant. Le rapport de la Cour des comptes présente sur de nombreux points des risques de divergence d’appréciation.
Il semble essentiel pour le Groupe Ecologiste d’octroyer cette ouverture de crédit de 300 millions d’ € à la mise en œuvre de politiques publiques pour servir la transition écologique et surtout une véritable transition énergétique en favorisant l’énergie dénucléarisée et bas carbone, au sein des territoires ruraux et des collectivités territoriales.
Ainsi cet amendement :
- Annule 300 millions d’euros de CP du programme 345 « Service public de l’énergie » sur l’action « Fermeture de Fessenheim ».
- Abonde de 300 millions d’euros de CP le programme « Energie, climat et après-mines » sur l’action « Accompagnement transition énergétique ».