Direction de la séance |
Projet de loi Travail, modernisation du dialogue social (Nouvelle lecture) (PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE) (n° 771 , 790 ) |
N° 1 13 juillet 2016 |
Question préalableMotion présentée par |
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MM. LEMOYNE, GABOUTY et FORISSIER au nom de la commission des affaires sociales TENDANT À OPPOSER LA QUESTION PRÉALABLE |
En application de l’article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi relatif au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels (n° 771, 2015-2016).
Objet
Le mardi 5 juillet dernier, le Gouvernement a engagé pour la seconde fois sa responsabilité sur le projet de loi relatif au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels afin de précipiter son adoption en nouvelle lecture. Le recours à cette procédure se justifie par l’incapacité du Gouvernement à rassembler une majorité pour adopter ce texte, alors même que son ambition initiale a été fortement rognée au fur et à mesure des reculs successifs qui ont jalonné son examen parlementaire.
Le texte qui nous est soumis ne tient pas compte de l’essentiel des apports du Sénat en première lecture, qui est pourtant la seule chambre dans laquelle le débat parlementaire s’est déroulé en séance publique. Plus de 80 heures ont été consacrées à ce projet de loi dans l’hémicycle et 358 amendements ont été adoptés, dont 201 en commission, proposés par les rapporteurs, le Gouvernement et chaque groupe politique.
Les députés ont remis en cause chacun des axes de travail qui avaient guidé la réflexion du Sénat.
Tout d’abord, l’objectif de simplification et de sécurisation du cadre juridique applicable aux entreprises n’est pas rempli : la commission de refondation du code du travail a perdu sa feuille de route ambitieuse en la matière, les initiatives tendant à assouplir les seuils sociaux ont toutes été écartées tandis que nos craintes d’une paralysie du dialogue social liée à la généralisation des accords d’entreprise majoritaires n’ont pas été entendues.
Ensuite, l’ambition de renforcer la compétitivité des entreprises et le pouvoir d’achat des salariés n’a pas trouvé d’écho à l’Assemblée nationale. A l’article 2, dont nous partageons la philosophie, notre volonté de confier aux entreprises la possibilité de définir, par le dialogue social, la durée du travail applicable en leur sein et de supprimer les rigidités issues de la durée légale de travail n’a pas été favorablement accueillie. De même, la plupart des modifications des règles des accords de préservation ou de développement de l’emploi que nous avions adoptées ont été écartées, alors que ces accords pourraient constituer pour nos entreprises un puissant outil d’adaptation interne aux évolutions de la conjoncture économique. Qui plus est, les députés n’ont pas été sensibles à notre souhait d’encourager le développement de la participation et de l’intéressement en abaissant le taux du forfait social qui leur est applicable.
Par ailleurs, les députés n’ont pas été convaincus par l’indispensable prise en compte des spécificités des TPE et PME qui avait orienté nos travaux. Le Sénat avait pourtant encouragé la négociation collective dans ces entreprises dépourvues de délégués syndicaux en faisant confiance aux représentants élus du personnel. Notre assemblée avait également obligé les branches à prévoir dans tout accord ou convention des stipulations propres à ces entreprises. Enfin, nous leur avions offert une plus grande souplesse dans l’application des règles relatives à la durée du travail, notamment en matière de conventions de forfait.
Soucieux de développer l’apprentissage comme voie de réussite, le Sénat avait introduit 20 articles additionnels visant à adapter son cadre juridique aux besoins des apprentis et aux attentes des entreprises. Tous ont été supprimés par l’Assemblée nationale, qui semble se satisfaire du statu quo alors que les insuffisances du modèle français par rapport aux exemples étrangers sont pourtant bien identifiées. S’agissant de la sécurisation des parcours professionnels des actifs, nos mises en garde sur la complexité du compte personnel d’activité n’ont pas été suivies d’effet, à l’instar de nos propositions de simplification du compte personnel de prévention de la pénibilité.
Concernant la médecine du travail, les députés ont rétabli la quasi-intégralité des dispositions du texte issu de l’Assemblée nationale en première lecture, en ne tenant compte qu’à la marge des propositions formulées par le Sénat pour tendre au meilleur équilibre entre la santé des travailleurs et la simplification de la vie des entreprises. Le texte transmis acte la suppression du principe général de la visite d’embauche, à laquelle le Sénat s’était opposé car elle n’apporte pas une réponse à la hauteur des enjeux posés par la situation de la médecine du travail dans notre pays. Il supprime également les dispositions introduites à l’initiative de plusieurs de nos collègues sur la prise en compte des mesures mises en œuvre par l’employeur pour l’appréciation de sa responsabilité au titre de l’obligation de sécurité de résultat ou encore sur l’élargissement des assiettes de financement des services interentreprises de santé au travail.
Pour toutes ces raisons, la commission des affaires sociales considère qu’un nouvel examen du texte dans la perspective de la lecture définitive n’est pas utile et invite par conséquent le Sénat à adopter la présente motion tendant à opposer la question préalable.