Direction de la séance |
Proposition de loi Lutte antiterroriste (1ère lecture) (n° 336 , 335 ) |
N° 13 rect. 2 février 2016 |
AMENDEMENTprésenté par |
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MM. BIZET, KAROUTCHI, PELLEVAT, JOYANDET, DANESI, SAVARY, MILON, TRILLARD et DOLIGÉ, Mmes MORHET-RICHAUD et MÉLOT, M. GOURNAC, Mmes LAMURE et DEROMEDI, M. LAMÉNIE, Mmes IMBERT et DESEYNE, MM. MAYET, PIERRE, VASPART et POINTEREAU, Mmes LOPEZ et DURANTON et MM. VASSELLE et REVET ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 16 |
I. – Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l’article 25 du code civil est ainsi modifié :
1° Les mots : « L’individu qui a acquis » sont remplacés par les mots : « Tout individu ayant » ;
2° Les mots : « , sauf si la déchéance a pour résultat de le rendre apatride » sont supprimés.
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Titre …
Possibilité de déchoir de sa nationalité française tout individu ayant la qualité de Français et condamné définitivement pour crime ou délit de terrorisme
Objet
Depuis une dizaine d’années avec la multiplication des conflits religieux menés notamment par les intégristes islamistes, au premier rang desquels Al Qaïda et Daesh, on constate que des citoyens français s’engagent de plus en plus nombreux au sein de mouvements djihadistes. Ces individus français n’hésitent pas à prendre les armes et rejoindre des pays étrangers où se développent des conflits armés afin de combattre aux côtés des terroristes.
En outre, les récents attentats qui ont frappé la France ont révélé un autre phénomène particulièrement inquiétant. De jeunes citoyens français, nés en France prennent les armes afin de partir faire « le Jihad », en Syrie par exemple, et reviennent en Europe, en combattants aguerris et empreints d’une idéologie de haine envers l’Occident, pour y commettre des actes terroristes. D’autres se livrent à de tels actes, sans même être sortis du territoire national.
Il convient donc de réagir avec la plus grande fermeté à ce phénomène qui menace les fondements et la sécurité de nos sociétés occidentales. Ceux qui ont choisi la « patrie de la haine » ne sont plus dignes de la nationalité française. Comment admettre, dès lors qu’il ont renié leur patrie et toutes les valeurs de la démocratie qu’elle incarne, de conserver leur nationalité à des combattants qui appartiennent à un mouvement terroriste qui, sur ordre ou de leur propre gré, peuvent se retourner contre leur propre pays ? La gravité de leurs actes justifie une déchéance de la nationalité française, quelque soit leur statut, c’est-à-dire qu’ils disposent d’une double nationalité ou non.
Le droit international est souvent invoqué, d’une manière un peu vague, comme une contrainte rendant difficile l’application de la procédure de déchéance de la nationalité avec notamment le risque que ladite procédure débouche sur une apatridie qui serait proscrite.
Or, les conventions internationales de New York de 1954, celle de 1961, la Convention européenne de 1997 sur la nationalité, que la France a signées, restreignent bien les possibilités de créer des apatrides… mais ne l’interdisent pas formellement et notamment lorsque ces individus portent atteinte à la sécurité nationale et à l’ordre public. La Convention de 1954 sur le statut des apatrides, signée et ratifiée par la France, prévoit même la possibilité d’expulser un apatride se trouvant régulièrement sur le territoire national… et précise que les « Etats contractants accorderont à un tel apatride un délai raisonnable pour permettre de chercher à se faire admettre régulièrement dans un autre pays ».
En outre, cette déchéance de nationalité a pu être prévue sans méconnaître les exigences de l’Article 8 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen et la récente décision du Conseil constitutionnel du 23 janvier 2015 souligne que ceci ne met pas en cause le droit au respect de la vie privée.
Concernant notre droit interne, il interdit aujourd’hui de « fabriquer des apatrides ». Certes, la déchéance de la nationalité est inscrite dans notre législation, mais elle n’est possible que pour les bi-nationaux. En effet, la loi ordinaire du 16 mars 1998 a complété l’article 25 du Code civil en prévoyant qu’un individu qui a été condamné pour terrorisme peut être déchu de la nationalité française sauf si la déchéance a pour résultat de le rendre apatride.
Cet amendement a donc pour objet de revenir à la rédaction de l’article 25 du code civil antérieure à 1998 afin d’élargir la déchéance de la nationalité à tout ressortissant français, même né Français ou ne bénéficiant pas d’une double nationalité, engagé dans des mouvements djihadistes ou se livrant directement ou indirectement à des actes reconnus, au titre des articles 421-1 et suivants du code pénal, comme des actes terroristes.
Ainsi, la déchéance de nationalité pourra être prononcée à l’encontre d’un citoyen français, même Français de naissance, y compris ceux qui, du fait de cette déchéance, deviendraient apatrides.