Direction de la séance |
Proposition de loi Simplification et amélioration du droit (1ère lecture) (n° 21 , 20 , 3, 5, 6) |
N° 119 rect. 9 décembre 2010 |
AMENDEMENTprésenté par |
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MM. SUEUR, COLLOMBAT, PEYRONNET, ANZIANI et YUNG, Mmes KLÈS, BOUMEDIENE-THIERY et BONNEFOY, MM. RIES, LAGAUCHE, DAUNIS, MICHEL, BOTREL et PERCHERON, Mme BLONDIN et les membres du Groupe socialiste, apparentés et rattachés ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 10 TER |
Après l'article 10 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 972 du code civil est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« Dans les cas où le testateur ne peut pas parler, il peut faire un testament par acte public soit en se faisant assister par un interprète agréé en langue des signes, soit en écrivant lui-même son testament. Dans ce dernier cas, il est fait mention dans l'acte de suscription du fait que le testateur a écrit son testament en présence au moins d'un notaire. Dans l'un et l'autre cas, ce testament doit être signé par le testateur en présence du notaire et des éventuels témoins.
« Dans les cas où le testateur ne peut pas s'exprimer en français, il peut faire un testament par acte public en se faisant assister par un interprète agréé.
« Dans l'un et l'autre cas visés aux deux alinéas précédents, il est fait mention dans l'acte de suscription du fait que le testateur a été dans l'incapacité de dicter son testament. »
Objet
L'attention du Médiateur de la République a été appelée sur l'impossibilité actuelle pour les personnes muettes ou dans l'incapacité de s'exprimer oralement de recourir à la forme authentique pour établir leur volonté testamentaire.
En effet, en application de l'article 972 du code civil, le testament par acte public doit être dicté au notaire par le testateur en personne. Cette condition est interprétée strictement par la Cour de cassation qui a jugé que « le testateur doit énoncer lui-même, et de façon orale, ses dispositions et qu'il ne peut y être suppléé par de simples signes, fussent-ils aussi expressifs et peu équivoques que possible » (arrêt du 7 juillet 1965 de la 1ère chambre civile).
Il résulte de cet état de choses que les personnes ne pouvant procéder à cette déclaration orale sont privées de la possibilité d'établir ce testament authentique et ne peuvent ainsi recourir qu'à l'une des autres formes de testaments prévues par la loi. La personne sourde semble quant à elle autorisée à faire un testament par acte public, à condition qu'elle en donne elle-même lecture en présence des témoins et du notaire.
Cette situation apparaît inéquitable à un double titre. Contrairement au principe de non discrimination envers les personnes handicapées consacré par le droit international et le droit interne (loi 2005-102 du 11 février 2005), des personnes se trouvent exclues de l'exercice d'un droit au seul motif de leur handicap. Cette exclusion, choquante sur le principe, peut également avoir des effets pratiques dommageables, puisque le testament authentique dispose d'une force probante renforcée et offre une sécurité juridique supérieure à celle des autres actes, qui peuvent être plus facilement égarés ou contestés.
Il apparaît dès lors nécessaire que le législateur intervienne pour remédier à cette lacune. Tel est l'objet de cet amendement qui autorise expressément les personnes muettes ou qui ne s'expriment pas en français à se faire assister d'un interprète agréé en langue des signes ou dans leur langue maternelle.
En outre, afin de ne pas pénaliser les personnes ne maitrisant pas le langage des signes, cet amendement prévoit que le testateur hors d'état de s'exprimer oralement pourra faire un testament par acte public à la condition que ce document soit écrit par lui et signé de lui en présence du notaire et des éventuels témoins. Cette procédure n'est pas incompatible avec la définition de l'acte authentique donnée par l'article 1317 du code civil qui énonce : « L'acte authentique est celui qui a été reçu par officiers publics ayant le droit d'instrumenter dans le lieu où l'acte a été rédigé, et avec les solennités requises. » L'essentiel est donc que cet acte puisse être établi sous le contrôle du notaire et reçu par lui, la voie écrite ou orale devant être retenue au regard de la situation de l'intéressé.