Direction de la séance |
Projet de loi Développement des territoires ruraux (1ère lecture) (n° 192 , 251 , 264, 265) |
N° 927 5 mai 2004 |
AMENDEMENTprésenté par |
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Le Gouvernement ARTICLE 10 BIS |
Supprimer cet article.
Objet
Il est proposé de supprimer cet article introduit par l'amendement n° 381 adopté par l'Assemblée nationale contre les avis du rapporteur et du gouvernement.
Le texte de cet article est le suivant :
« l'article L. 720-5 du code de commerce est complété par un VIII ainsi rédigé :
VIII – les exploitations des horticulteurs et/ou pépiniéristes vendant leur production au détail ne sont pas soumises à une autorisation d'exploitation commerciale ».
Il vise, au motif que les activités concernées seraient de nature agricole et non commerciales, à placer ces entreprises hors du champ du dispositif d'autorisation d'exploitation commerciale délivrée par la commission départementale d'équipement commercial compétente.
Cet article appelle les observations suivantes qui justifient sa suppression :
Comme l'a indiqué le ministre de l'agriculture au cours du débat parlementaire, cette disposition ne trouve pas sa place dans ce projet de loi.
La question du développement de ce secteur d'activités, soulevée par l'amendement adopté en 1ère lecture par l'Assemblée, mérite cependant une réflexion approfondie et pourrait être examinée dans le cadre du débat qui débouchera en 2005 sur un projet de loi de modernisation agricole.
Sans préjuger de la réflexion à conduire, les éléments suivants peuvent être soulignés.
Actuellement, les horticulteurs et/ou pépiniéristes ne sont pas soumis à une autorisation d'exploitation commerciale dès lors qu'ils vendent leur propre production au détail. Cette disposition s'appuie sur plusieurs éléments concrets : le statut agricole des exploitations et le fait que l'activité est de nature agricole au sens de l'article L. 311-1 du code rural, à savoir notamment la maîtrise et l'exploitation d'un cycle biologique. Dans ce cas, la production-vente, activité traditionnelle des horticulteurs et/ou pépiniéristes, ne s'apparente pas à un acte de commerce, qui se définit comme un acte d'entremise avec intention spéculative.
Toutefois, l'activité des horticulteurs et/ou des pépiniéristes s'ouvre de plus en plus sur la revente d'articles liés au jardinage, dits « produits inertes » (terreau, potiches, décorations de jardins, etc). Le cas échéant, certains horticulteurs complètent leur production propre par des produits végétaux acquis hors de leur exploitation (plantes, fleurs, arbuste, etc), ce qui tend à les apparenter à des commerces de détail traditionnels au sens de l'article L. 720-5 précité. Dans ces situations particulières, les surfaces de vente consacrées à cette activité de revente s'analysent évidemment comme des surfaces de vente assujetties à la législation sur l'équipement commercial dès lors qu'elles dépassent 300 m².
Dans sa rédaction actuelle, l'article 10 bis (nouveau), en précisant les obligations des horticulteurs et des pépiniéristes au regard des dispositions du code de commerce ne fait que reprendre l'état actuel de la législation en matière d'équipement commercial, sans apporter d'aménagements nouveaux.
Plus généralement, l'attribution d'une dérogation aux horticulteurs et/ou pépiniéristes poserait au moins trois séries de problèmes :
- elle aboutirait à une évidente distorsion de concurrence en raison notamment des règles de fiscalité (régimes d'imposition et de taxation différents selon les statuts agricoles ou commerciaux : taxe locale d'équipement, TACA, etc), de sécurité (serres horticoles non soumises à la réglementation spécifique sur la sécurité des établissements accessibles au public), ou d'aides (aide à la construction de serres, etc). L'attribution d'une dérogation générale constituerait également une concurrence déloyale au détriment des commerces traditionnels spécialisés par exemple dans la distribution de fleurs. En outre, l'évolution des pratiques commerciales et de la demande des consommateurs est susceptible d'entraîner un élargissement de l'offre des horticulteurs/pépiniéristes à des produits ne correspondant pas à la maîtrise et à l'exploitation d'un cycle biologique, sans que des moyens de contrôle efficaces puissent être mis en œuvre afin de garantir une concurrence claire et loyale conformément aux dispositions de l'article 1er de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 d'orientation du commerce et de l'artisanat ;
- elle pourrait menacer l'existence de nombreux magasins ruraux (grainetiers, coopératives agricoles, libres-services agricoles, etc), dont le maillage constitue un élément structurant au regard de l'aménagement du territoire. A cet égard, le maintien de l'article 10 bis irait manifestement à l'encontre des objectifs de consolidation des territoires ruraux recherchés par la présente loi sur le développement ;
- elle serait de nature à introduire pour les consommateurs une confusion entre les filières « production » et « distribution » de plantes et de végétaux, préjudiciables aux spécificités de ces deux activités.