Direction de la séance |
Projet de loi orientation et programmation pour la justice (1ère lecture) (URGENCE) (n° 362 , 370 , 374) |
N° 132 24 juillet 2002 |
AMENDEMENTprésenté par |
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M. COINTAT ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 24 |
Objet
La fonction d'assistant spécialisé des magistrats a été créé par l'article 91-I de la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, codifié à l'article 706 du code de procédure pénale.
Les assistants spécialisés sont des fonctionnaires de catégorie A ou B ou de personnes justifiant d'une formation économique et financière ou sociale et d'une expérience professionnelle d'au moins quatre années.
Les premiers assistants spécialisés ont pris leurs fonctions le 1er juin 1999. A ce jour, 17 fonctionnaires et agents ont été mis à disposition de la justice par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, la Banque de France et la Commission des opérations de Bourse. En l'absence de ligne budgétaire spécifique, aucune personne issue du secteur privé n'a pu être recrutée.
Dans l'esprit du législateur, il s'agissait de mettre à la disposition des magistrats chargés des procédures économiques et financières les plus lourdes une équipe de collaborateurs de haut niveau afin de leur permettre d'exercer plus efficacement leurs fonctions en suscitant un travail d'équipe. Il n'était pas dans son intention de faire de ces personnes des acteurs de la procédure pénale mais de leur confier une mission d'aide à la décision sans qu'ils puissent se substituer aux enquêteurs ou aux experts.
Telle est la raison pour laquelle, aux termes du second alinéa de l'article 706 du code de procédure pénale, les assistants spécialisés assistent, dans le déroulement de la procédure, les magistrats sous la direction desquels ils sont placés, sans pouvoir procéder par eux mêmes à aucun acte.
La création de « pôles santé » sur le modèle des pôles économiques et financiers, prévue par la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé[1], devrait se traduire par le recrutement, en qualité d'assistants spécialisés, de fonctionnaires relevant du ministère de la santé et d'un ou deux fonctionnaires du ministère de l'agriculture : pharmaciens, médecins inspecteurs de santé publique, vétérinaires inspecteurs.
La mission d'information de la commission des Lois sur l'évolution des métiers de la justice a estimé, à la lumière de l'expérience des pôles économiques et financiers des tribunaux de grande instance de Paris et Marseille, que le cadre juridique de l'intervention des assistants spécialisés méritait d'être complété : « victimes de leur succès, ils [les assistants spécialisés] sont intervenus de manière croissante à tous les stades de la procédure, agissant ainsi bien au-delà du cadre légal. Leur présence aux interrogatoires, ainsi que lors des perquisitions a été parfois jugée utile.
« Le silence et le caractère flou de leur intervention qui ressort des textes a ainsi conduit à une occultation de leur rôle alors même qu'il prenait une importance croissante dans les procédures[2]. »
Telle est la raison pour laquelle, reprenant les propositions formulées en 2001 par le groupe de suivi des pôles économiques et financiers, qui paraissent faire l'unanimité, cet amendement tend à doter les assistants spécialisés d'un véritable statut.
Pour éviter toute confusion avec les assistants de justice et valoriser davantage cette fonction, il est proposé de retenir l'appellation de « conseillers techniques ».
Les conseillers techniques pourront établir des notes d'études, écrites et versées au dossier, participer aux perquisitions, saisies et interrogatoires, et mettre en œuvre le droit de communication reconnu aux magistrats par l'article 132-22 du code de procédure pénale.
Un dispositif d'extension de leur compétence au plan national est par ailleurs prévu, afin de leur permettre de se déplacer hors de leur juridiction d'affectation pour recueillir des éléments utiles à l'exercice des missions qui leur sont confiées.
Ils ne pourront toutefois, comme par le passé, agir que sur instructions et sous la direction et le contrôle des magistrats.
[1] La loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 a inséré dans le code de procédure pénale un article 706-2 autorisant l'extension de la compétence territoriale d'un tribunal de grande instance au ressort d'une ou de plusieurs cours d'appel pour la poursuite, l'instruction et, s'il s'agit de délits, le jugement de certaines infractions dans les affaires relatives à un produit de santé ou un produit destiné à l'alimentation de l'homme ou de l'animal qui sont ou apparaîtraient d'une grande complexité.
Un décret du 22 avril 2002 a prévu la mise en place de deux pôles santé à compétence interrégionale : l'un à Paris, couvrant les trois-quarts de la France, l'autre à Marseille, couvrant le sud du pays et la région Rhône-Alpes. L'idée d'un pôle à compétence nationale, un temps envisagée, a donc été abandonnée.
La compétence de ces juridictions spécialisées en matière d'enquête, d'instruction et de jugement est concurrente à celles des juridictions territorialement compétentes.
[2] Rapport n° 345 (Sénat, 2001-2002), Quels métiers pour quelle justice ?, de M. Christian Cointat, au nom de la mission d'information de la commission des Lois sur l'évolution des métiers de la justice présidée par M. Jean-Jacques Hyest.