RÉSOLUTION adoptée le 6 mars 2012 |
|
N° 110 SESSION
ORDINAIRE DE 2011-2012 |
|
|
|||
résolution européenne sur
la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la protection des personnes physiques
à l'égard du traitement des données à caractère
personnel et à la libre circulation de ces données
(E 7055). |
|||
Le Sénat a adopté la
résolution européenne dont la teneur suit : |
|||
Voir les
numéros : Sénat : 406,
446 et 457 (2011-2012). |
Le
Sénat,
Vu
l'article 88-4 de
Vu
l'article 2 de
Vu
le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, notamment son article
16,
Vu
la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, notamment ses articles
7 et 8,
Vu
la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers
et aux libertés modifiée par la loi n° 2004-801 du 6 août 2004
relative à la protection des personnes physiques à l'égard des traitements de
données à caractère personnel,
Vu
la proposition de loi de M. Yves Détraigne et Mme Anne-Marie Escoffier
(n° 81, 2009-2010) visant à mieux garantir le droit à la vie privée à
l'heure du numérique, adoptée par le Sénat le 23 mars 2010,
Vu
le rapport d'information de M. Yves Détraigne et Mme Anne-Marie Escoffier
(n° 441, 2008-2009) au nom de la commission des lois du Sénat sur « La vie privée à l'heure des
mémoires numériques : pour une confiance renforcée entre citoyens et société de
l'information »,
Vu
la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la
protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à
caractère personnel et à la libre circulation de ces données
(COM [2012] 11 final/n° E 7055) en date du 27 janvier 2012,
Approuve
l'objectif poursuivi par
Prend
acte des avancées que porte la proposition de règlement s'agissant, entre
autres, de la promotion du droit à l'oubli numérique, de la consécration du
principe du consentement exprès à l'utilisation des données personnelles, de
l'obligation de portabilité des données personnelles, qui permettra à une
personne de s'affranchir d'un responsable de traitement sans perdre l'usage de
ses données, des limitations apportées aux possibilités de profilage à partir
de ses données personnelles, de la présence obligatoire d'un délégué à la
protection des données dans les entreprises de plus de 250 salariés ou de
l'encadrement, notamment par des règles d'entreprise contraignantes, des
transferts internationaux de données ;
Estime,
toutefois, que ces garanties doivent être renforcées ;
En
particulier ;
Appelle,
s'agissant du droit à l'oubli, à ce que les obligations pesant sur les moteurs
de recherche soient renforcées afin d'une part de prévoir l'effacement
automatique des contenus indexés au bout d'un délai maximal, et, d'autre part,
de permettre à l'intéressé d'obtenir la désindexation de ceux qui lui portent
préjudice ;
Juge
nécessaire qu'une solution équilibrée soit proposée pour obtenir, sur demande
de l'intéressé, l'effacement des données personnelles publiées par un tiers, dans
le respect de la liberté d'expression ;
Souligne
la nécessité que l'adresse IP (Internet Protocol) soit traitée comme
une donnée personnelle lorsqu'elle est utilisée pour identifier la personne
concernée ;
Estime
inopportunes les dérogations aux obligations pesant sur les responsables de
traitement en matière de transferts internationaux de données, s'agissant
notamment des transferts ni fréquents ni massifs ;
Considère
que l'obligation de désignation d'un délégué à la protection des données
pourrait être étendue aux entreprises dont la principale activité est celle du
traitement de données personnelles ;
Estime
en outre, de manière générale, que, s'agissant d'un domaine dans lequel
l'atteinte portée aux droits fondamentaux d'une personne peut être considérable
et compte tenu de l'inégalité de moyens entre le responsable de traitement et
l'intéressé qui lui a confié ses données personnelles, l'harmonisation proposée
ne doit s'effectuer que dans le sens d'une meilleure protection des
personnes ; qu'elle ne saurait, pour cette raison, priver les États
membres de la possibilité d'adopter des dispositions nationales plus
protectrices ;
Conteste
par ailleurs le nombre important d'actes délégués et d'actes d'exécution que la
proposition de règlement attribue à la compétence de
Juge
l'encadrement des pouvoirs d'investigation des autorités de contrôle nationales
trop restrictif, notamment l'exigence, pour engager une enquête, d'un « motif
raisonnable » de supposer qu'un responsable de traitement exerce une
activité contraire aux dispositions du règlement. En effet, les formalités
préalables pesant sur les responsables de traitement étant supprimées, ces
investigations constituent, dans le dispositif proposé, la principale source
d'information de ces autorités sur la mise en oeuvre des traitements ;
S'oppose,
enfin, au dispositif du « guichet unique » proposé par
Considère
en effet qu'il est paradoxal que le citoyen soit moins bien traité que
l'entreprise responsable du traitement, en étant privé de la possibilité de
voir l'ensemble de ses plaintes instruites par l'autorité de contrôle de son
propre pays ;
Rappelle,
à cet égard, que, lorsqu'il s'agit d'assurer la meilleure protection du citoyen
et son droit à un recours effectif, il convient, comme en matière de
consommation, de privilégier la solution permettant à l'intéressé de s'adresser
à l'autorité la plus proche de lui et auprès de laquelle il a l'habitude
d'accomplir ses démarches ;
Constate
que le dispositif proposé présente, en dehors de cette question de principe, de
multiples inconvénients pratiques :
– risque
de disproportion entre les moyens alloués à l'autorité de contrôle en
considération des contentieux relatifs à ses ressortissants et l'ampleur du
contentieux international qu'elle pourrait être appelée à traiter ;
– asymétrie,
pour le plaignant, entre les recours administratifs, exercés auprès de
l'autorité étrangère, et les recours juridictionnels contre le responsable de
traitement, portés devant le juge national ;
Relève
que ni les mécanismes de cohérence ou de coordination entre les autorités, ni
la possibilité offerte au plaignant d'adresser sa plainte à son autorité
nationale, à charge pour celle-ci de la transmettre à l'autorité compétente, ne
compensent les inconvénients du dispositif, ni le désavantage pour l'intéressé
de ne pouvoir faire instruire sa demande par l'autorité de contrôle
nationale ;
Demande
par conséquent au Gouvernement de veiller, d'une part, à ce que la possibilité
pour les États membres d'adopter des mesures plus protectrices des données
personnelles soit préservée, et, d'autre part, à ce que le principe de la
compétence de l'autorité de contrôle du pays où le responsable de traitement a
son principal établissement soit abandonné au profit du maintien de la
compétence de l'autorité de contrôle du pays de résidence de l'intéressé.
Délibéré en séance publique, à Paris, le 6 mars 2012.
Le
Président,
Signé :
Jean-Pierre BEL